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CLIMAT

Le niveau des océans pourrait s’élever de


25 mètres. Dès 2030.
9 OCTOBRE 2019 · PAR CHARLES-ELIE GUZMAN

La catastrophe ne sera pas pour dans trente ou cinquante


ans. Ça ne se passera pas dans un siècle. Non, c’est pour
2030, autant dire demain.

Une étude choc vient d’être publiée dans Nature, menée par
des chercheurs australiens qui analysent depuis plusieurs
années une période géologique d’intenses bouleversements,
le Pliocène. Pendant cette période, la Terre a connu quasi
exactement la même configuration climatique que celle que
nous avons aujourd’hui. Même taux de CO2 dans
l’atmosphère, élévation des températures de même ampleur.
Le résultat à l’époque fut une fonte d’un tiers de l’Antarctique
qui provoqua une élévation du niveau des océans de 25
mètres. La même situation pourrait se reproduire en 2030.
Répétition générale d’une catastrophe qui nous attend si
nous ne prenons pas les bonnes mesures pour a"ronter la
crise climatique.

Si les océans s’élevaient de 25 mètres, s’en serait Zini des Pays-


Bas, la Normandie perdrait son Cotentin, plus d’îles en
Bretagne, Nantes et Bordeaux sous la mer, la Camargue rayée
de la carte, la promenade des Anglais et le Vieux-Nice noyés,
sans parler du delta du Nil, du Bengladesh, de New York et de
la côte Est des Etats-Unis, la liste est longue. 1 milliard de
personnes seraient touchées et obligées de partir de chez
elles. Autant de migrants climatiques déjà prévus par les
scénarios des Nations-Unies.

Cette sombre perspective pourrait devenir une réalité si nous


continuons à rejeter des gaz à eRet de serre dans
l’atmosphère et à abandonner toute volonté de réduire le
réchauRement climatique sous la barre des 1.5 °C. Celle-ci,
Zixée par l’Accord de Paris semble déjà obsolète, les experts du
GIEC prévoyant, en fonction de l’état actuel de la situation,
une augmentation des températures allant allègrement vers
les 4 °C.

Les scientiZiques comme les médias ne cessent d’alerter sur


les risques que nous encourrons mais une nouvelle étude
publiée ce 3 octobre dans la revue Nature apporte un
éclairage inédit sur l’urgence que nous avons à agir. Une
équipe australienne de l’université Victoria de Wellington
travaille depuis plusieurs années sur le Pliocène, une période
qui s’est déroulée il y a environ trois millions d’années. Cette
ère est particulièrement intéressante car sa conZiguration
climatique n’est pas très éloignée de celle que nous vivons
actuellement. Elle peut donc servir de modèle prédictif.
Pendant cette période, la concentration de CO2 dans
l’atmosphère atteignait des niveaux comparables à ceux que
nous enregistrons aujourd’hui même : plus de 400 parties par
million.

Il y a trois millions d’années, s’est installée une période de


réchauRement intense des températures. Elles ont atteint des
niveaux équivalents à une augmentation de 2°C par rapport à
l’époque préindustrielle. Rappelons que nous en sommes
actuellement à presque 1.5 °C. Selon les prévisions du GIEC,
nous devrions atteindre, voire dépasser les 2° C prévus par
l’Accord de Paris dès 2030 si nous n’abaissons pas
drastiquement, et dès aujourd’hui, nos émissions de gaz à
eRet de serre.

Que s’est-il passé au


Pliocène ?
L’élévation des températures a fait fondre les glaces et plus
particulièrement celles de l’Antarctique qui a perdu un tiers
de sa surface glacée. Ces glaces fondues se sont déversées
dans les océans, les faisant monter de 25 mètres.

Les chercheurs australiens expliquent avoir foré des carottes


de sédiments déposés pendant le Pliocène, préservés sous les
collines accidentées du bassin de Whanganui en Nouvelle
Zélande. L’un des chercheurs, le professeur Timothy Naish,
qui travaille dans ce domaine depuis près de trente ans, a
identiZié plus de 50 ructuations du niveau mondial de la mer
au cours des 3,5 millions d’années de l’histoire de la Terre. Le
niveau des mers a augmenté et baissé en réponse aux cycles
climatiques naturels, connus sous le nom de cycles
Milankovitch, qui sont causés par des changements à long
terme de l’orbite solaire de la Terre tous les 20 000, 40 000 et
100 000 ans. Ces changements entraînent à leur tour la
croissance ou la fonte des calottes glaciaires polaires.

Alors que l’on pensait que le niveau de la mer avait ructué de


plusieurs dizaines de mètres, les eRorts pour reconstituer
l’amplitude exacte avaient jusqu’à présent été contrecarrés
par des difZicultés dues aux processus de déformation de la
Terre et au caractère incomplet de nombreux cycles.

Les chercheurs ont donc utilisé une relation théorique bien


établie entre la taille des particules transportées par les
vagues sur le plateau continental et la profondeur du fond
marin. Ils ont ensuite appliqué cette méthode à 800 mètres de
carottes de forage et d’aseurements, représentant des
séquences sédimentaires continues qui couvrent une période
allant de 2,5 à 3,3 millions d’années.

Ils ont ainsi montré que pendant le Pliocène, le niveau global


de la mer ructuait régulièrement entre 5 et 25 mètres. En
tenant compte des mouvements tectoniques locaux des
terres et des changements régionaux du niveau de la mer
causés par les changements gravitationnels et par ceux de la
croûte terrestre pour déterminer les estimations du niveau de
la mer, ils ont ainsi obtenu une approximation de l’évolution
du niveau moyen de la mer à l’échelle mondiale.

Vingt-cinq mètres, c’est


beaucoup
Les chercheurs australiens sont arrivés à la conclusion que la
plus grande partie de l’élévation du niveau de la mer pendant
le Pliocène provient des calottes glaciaires de l’Antarctique.
Pendant le Pliocène chaud, la géographie des continents et
des océans de la Terre et la taille des nappes glaciaires
polaires étaient semblables à celles d’aujourd’hui, avec
seulement une petite nappe de glace sur le Groenland
pendant la période la plus chaude. La fonte de la calotte
glaciaire du Groenland aurait contribué à raison d’au plus cinq
mètres à l’élévation maximale de 25 mètres du niveau de la
mer mondiale enregistrée dans le bassin de Whanganui.

Vingt-cinq mètres, c’est beaucoup plus que ce que prévoient


les experts climatiques. Selon le récent rapport spécial du
Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du
climat (GIEC) sur les océans et la cryosphère, les glaciers et les
calottes polaires continuent de perdre de la masse à un
rythme accéléré. Jusqu’à présent, la hausse devait se situer
dans une fourchette allant de 0.60 à 1.1 mètres d’ici 2100. Or la
nouvelle étude est formelle : nous serons dans les conditions
du Pliocène dès 2030, dans onze ans !

« Au rythme actuel des émissions mondiales,


nous pourrions être de retour dans le
Pliocène d’ici 2030 et nous aurons dépassé
l’objectif de 2°C Zixé à Paris. L’une des
questions les plus critiques auxquelles
l’humanité est confrontée est celle de savoir
combien et à quelle vitesse le niveau des mers
va monter. »

Georgia Rose Grant, chercheur à l’Université Victoria de Wellington

Les chercheurs poussent donc la logique des résultats de


leurs expérimentations jusqu’au bout : il est fort possible que
l’Antarctique fonde et perde un tiers de sa surface, ce qui
provoquerait potentiellement, selon leurs hypothèses, une
élévation du niveau des mers du globe de l’ordre de 20-25
mètres.

Il est vrai qu’il ne se passe pas un jour sans qu’une


information ne nous parvienne de l’Antarctique ou de
l’Arctique sur la fracture de tel ou tel glacier ou la fonte de
millions de m3 de glace. Une étude publiée le 30 janvier
dernier alertait sur le sort du glacier Thwaites situé dans
l’Antarctique occidental ; un glacier large de 100 km, long de
600 km, d’une épaisseur de 3 km, de la taille du quart de la
France, qui fond et se délite à vitesse accélérée sous les yeux
désemparés des scientiZiques.

LIRE DANS UP : Antarctique : le glacier le plus dangereux


du monde est-il sur le point de céder ?

Cette masse gigantesque de glace qui reposait sur un


manteau rocheux, s’écoule ou se brise directement dans la
mer, faisant mécaniquement monter son niveau.

Point de basculement en
passe d’être franchi
Pour les chercheurs australiens, « Le fait que plus de 90 % de
la chaleur provenant du réchauRement de la planète ait été
déversée dans l’océan jusqu’à présent est extrêmement
préoccupant. Une grande partie de l’eau s’est déversée dans
l’océan Austral, qui baigne les marges de la calotte glaciaire de
l’Antarctique. » Ils poursuivent : « Déjà, nous observons
aujourd’hui des remontées d’eaux profondes circumpolaires
chaudes qui pénètrent dans les cavités de la plate-forme de
glace en plusieurs endroits autour de l’Antarctique. Le long de
la côte de la mer d’Amundsen de l’Antarctique occidental, où
l’océan s’est le plus réchauRé, l’inlandsis (la glace polaire
reposant sur un manteau rocheux – Ndlr) s’amincit et se
retire le plus rapidement. »

Un tiers de la calotte glaciaire de l’Antarctique – l’équivalent


de 20 mètres d’élévation du niveau de la mer – est ancrée sous
le niveau de la mer et vulnérable à un eRondrement
généralisé dû au réchauRement des océans. Le processus
n’est pas le même en Arctique où la fonte de la glace de mer,
ne reposant pas sur un support rocheux, a un impact moindre
sur l’élévation du niveau des eaux. C’est pourquoi, les
scientiZiques australiens estiment que sur les 25 mètres
d’élévation prévisibles, l’essentiel, soit 20 mètres, sont dus à
l’Antarctique.

« Notre étude soutient l’idée qu’un point de


basculement de la calotte glaciaire de
l’Antarctique pourrait être franchi si l’on laisse
les températures mondiales augmenter de
plus de 2℃. »

Un tel scénario pourrait entraîner la fonte d’une grande partie


de la calotte glaciaire, ce qui remodèlerait les rivages partout
dans le monde. En eRet, si un tel scénario advenait, il
changerait dramatiquement notre géographie et entraînerait
des désastres difZiciles à concevoir.

Carte interactive de la montée


des océans
(source NASA)

Cliquez ici

D’autant que les eRets du dérèglement climatique


étant cumulatifs, cette montée des océans aggraverait
l’impact des tempêtes et autres phénomènes extrêmes que
les climatologues prévoient du fait de l’augmentation des
températures et notamment de celles de l’océan. Une mer
plus haute provoquerait en cas de vagues submersives des
dégâts beaucoup plus loin dans les terres. L’impact d’un
cyclone comme Katrina serait démultiplié.

LIRE DANS UP : La mer monte. Il faudra bientôt songer à


s’en éloigner…

Cette étude de Nature développe une hypothèse en forme


d’alerte. Une alerte qui s’ajoute à d’autres et devrait nous
inciter à agir sans délai. Il est encore possible de stabiliser la
mécanique climatique en réduisant nos émissions de gaz à
eRet de serre. Cela implique des choix politiques courageux et
des changements complets de nos modèles de société. L’état
du monde de ces dernières années ne nous incite pas à
beaucoup d’optimisme mais en revanche, la pression des
populations pourrait avoir un eRet sur les dirigeants, s’ils
s’avèrent toujours incapables de prendre les bonnes
décisions.

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5 COMMENTAIRES

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Invité

Kassy ! 1 année # $

Selon les prédictions d’Al Gore en 2005, pape du réchauRement


climatique, qui s’est bien rempli les poches d’ailleurs… le niveau
des mers devaient monter de 2 mètres entre 2005 et 2020, il est
monté d’une vingtaine de centimètres en moyenne. Dans le même
ordre d’idée, à la même époque, des scientiZiques parlaient d’une
montée des mers de 80 mètres d’ici 2100 ??? 25 mètres
maintenant ??? Et alors ? Au lieu de glapir comme des ânes,
pourquoi ne pas commencer à construire des programmes de
digues et barrages côtiers ? Le tiers des Pays Bas est sous le niveau
des… Lire la suite »

0 0 Répondre %

Invité

pridrico ! 1 année # $

" Reply to Kassy


c’est marrant, on trouve toujours un(e) réac à la con pour
disserter d’un sujet auquel il ne comprend strictement rien.
votre monologue tiens plus de l’accumulation d’absurdité et
de bétise « ant écolo » que d’un raisonnement viable fondés
sur des arguments sensés.

0 0 Répondre

Invité

pridrico ! 1 année # $

" Reply to Kassy


c’est marrant, on trouve toujours un(e) réac à la con pour
disserter d’un sujet auquel il ne comprend strictement rien.
votre monologue tiens plus de l’accumulation d’absurdité et
de bétise « ant écolo » que d’un raisonnement viable fondés
sur des arguments sensés.

0 0 Répondre

Invité

Kassy ! 1 année # $

Selon les prédictions d’Al Gore en 2005, pape du réchauRement


climatique, qui s’est bien rempli les poches d’ailleurs… le niveau
des mers devaient monter de 2 mètres entre 2005 et 2020, il est
monté d’une vingtaine de centimètres en moyenne. Dans le même
ordre d’idée, à la même époque, des scientiZiques parlaient d’une
montée des mers de 80 mètres d’ici 2100 ??? 25 mètres
maintenant ??? Et alors ? Au lieu de glapir comme des ânes,
pourquoi ne pas commencer à construire des programmes de
digues et barrages côtiers ? Le tiers des Pays Bas est sous le niveau
des… Lire la suite »

0 0 Répondre

Invité

charoy olivier ! 1 année # $

bonjour ce que nous vivons est historique première inquiétude en


1979 notre maison brule et nous sommes en 1919 voir 2020 et qu
avons nous fait RIEN,la chine construit 2 usines charbon par mois
hallucinant l allemagne proche de chez nous ont arrête le
nucléaire pour se remettre au charbon allez comprendre quant
aux américains il sont pas prêt a stopper leur v8 c est pour dire
que même si on arrêtait les émissions aujourd’hui ça ne sufZirait
pas perso je vois comme un tsunami dont le point de non retour a
été franchie et aujourdhui nous ne recevons que… Lire la suite »

0 0 Répondre

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