GISELLE

1- Résumé de l'histoire
Acte 1 :
Une vallée dans les vignobles des bords du Rhin. Giselle est courtisée par Albrecht, Duc de Silésié
déguisé en paysan, et par Hilarion, un garde-chasse un peu rustre. Berthe, la mère de Giselle,
s'inquiète des conséquences potentiellement tragiques d'un excès de danse sur la santé délicate de sa
fille. Le Duc de Courlande et sa fille Bathilde, véritable fiancée d'Albrecht, sont à la chasse. Ils
s'arrêtent pour se rafraîchir à la ferme de Berthe où l'on peut goûter le vin nouveau. Des paysans les
divertissent de leurs danses et, lorsque les chasseurs se retirent, Giselle et Albrecht se joignent à la
danse des paysans, danse au cours de laquelle la jeune fille est couronnée reine des vendanges.
Hilarion révèle alors la duplicité d'Albrecht et Giselle sombre dans la folie avant de mourir, le cœur
brisé.

Acte 2 :
La tombe de Giselle dans une clairière. Hilarion puis Albrecht viennent successivement pleurer sur
la tombe. L'ombre de Giselle apparaît à Albrecht ; elle appartient maintenant au groupe des Wilis
que mène Myrtha et qui sont les fantômes des jeunes filles mortes d'avoir été rejetées par ceux
qu'elles aiment. Poursuivi par la troupe, Hilarion est contraint de se noyer dans le lac voisin, mais
Albrecht est protégé par l'amour de Giselle. Avec son aide, il luttera contre les Wilis jusqu'à l'aube,
moment où leur pouvoir se dissipe et, avec lui, l'ombre de Giselle. Albrecht demeure en vie mais il
reste seul.
Traduction Danielle Laruelle.

2- Le Ballet

Ballet pantomime crée le 28 juin 1841. Il est nommé à l'époque Giselle ou les Wilis.

Il représente l'archétype du ballet romantique et se divise en 2 actes opposés, selon une trame
narrative chronologique. Déjà, La Sylphide, créée en 1832 par Philippe Taglioni pour sa fille
Marie, jette les bases du ballet dit romantique, constitué de deux actes et narrant l'histoire d'un
amour impossible entre un être vivant et une créature surnaturelle. Dans Giselle, on observe un
mélange, des personnages (origines sociales différentes), des registres (rires, pleurs...), des
musiques (traditionnelles, classiques). Giselle finit mal, c'est un drame romantique.

Le livret est rédigé par Théophile Gautier et Jules-Henri Vernoy de Saint Georges, Directeur de
l'Opéra-Comique. Ce livret est inspiré d'un récit de Henri Heine (De L'Allemagne).

Les chorégraphes du ballet sont Jean Coralli et Jules Perrot (parties solistes).

La musique est composée par Adolfe Adam, les danseurs Carlotta Grisi (connue alors comme
danseuse disposant des mêmes qualités de vivacité - utiles aux danses de caractères - que Fanny
Essler, et des qualités d'élévation, de légèreté qui ont fait le succès de Marie Taglioni) et Lucien
Petipa (frère de Marius) interprètent Giselle et Albrecht.

Le ballet sera repris à l'étranger l'année suivante, au Mariinski de Saint Petersbourg, avec Fanny
Essler, reviendra en France en 1910 avec les ballets russes de Diaghilev, sera repris en 1932 par
Serge Lifar, l'inscrivant ainsi au répertoire de l'Opéra de Paris. Elle est encore aujourd'hui une
œuvre largement diffusée au sein des structures de répertoire (opéras).
 a- Caractéristiques du ballet romantique

 Le ballet devient l'expression de sentiments,

 Evocation de la paysannerie élégante,
 Giselle comprend deux actes, l'acte réel et l'acte « blanc », l'équilibre parfait des deux actes font
de Giselle l'apothéose du ballet romantique,
 La disposition du corps de ballet (arc de cercle) met en évidence la soliste,
 Invention de l'arabesque par Carlos Blasis (1797-1818),
 Début de l'adage,
 Fluidité des bras,
 Apparition de l'éclairage au gaz permettant une apparence mystérieuse du décor romantique,
 Les décors ; cimetières, cloîtres, clairières remplacent les décors mythologiques,
 La machinerie se développe (envol des sylphides),
 Costume de scène (tutu long) et costume de ville se confondent,
 Disparition progressive du danseur au profit de travestis,
 La thématique ; amour impossible entre un être humain et une créature surnaturelle,
 Inspiration dans la littérature étrangère ; féérie du Moyen-Age, légende écossaise (Walter Scott)
ou charme de la poésie allemande (Henri Heine),
 Une action simple, opposition entre deux mondes.

De façon plus générale on retrouve l'aspect romantique du ballet dans :

 Le thème de la passion, de la violence, de la jalousie, de l'amour porteur d'une issue tragique, la
mort,
 La nature comme témoin des malheurs de l'homme,
 Le temps, le passé représentant le bonheur et le présent le malheur.
 b- Etude comparative des deux actes de Giselle

Acte 1 ou « réel » Acte 2 ou « blanc »

Couleurs chaudes : jaune - orange Couleur froide : bleu
Automne, saison des vendanges Indéterminé
Soleil Lune
Poids Apesanteur
Réalité - vitesse Evocation - lenteur
Affirmation du réel Rêverie irréelle
Bras en couronne Transformation du geste
Supination (mains tournées vers l'intime, Pronation (mains tournées vers l'ailleurs,
omoplates ouvertes) omoplates fermées)
Valse : danse de couple, temps fort en bas Menuet, temps forts en haut
FOLIE
La scène de la folie est le lien entre le premier et le deuxième acte, elle définit le passage du
désespoir à l'espoir
Tous les personnages sont différents Les vingt-quatre Wilis sont toute semblables
Giselle reine de la danse Myrtha reine de la danse
Adage, pirouette, petits et grands sauts Batterie (travail des jambes) : série d'entrechats
qu'Albrecht se voit imposé par Myrtha pour
l'éloigner de giselle et le tuer (unique dans le
ballet classique)
« C'est l'intention qui donne sens au mouvement »
« Interpréter c'est changer d'état à tout moment »
Nb : les danses de caractères ont pour but dans le ballet romantique de situer l'histoire
géographiquement (Valse dans Giselle pour évoquer l'Allemagne). Les chorégraphes ont en effet
acquis une connaissance précise des danses des pays dans lesquels ils séjournent.

3- La relecture de mats Ek

Mats Ek

Né en 1945, suédois, trajectoire triple (danse classique, moderne - Martha Graham -, théâtre -
assistant d’Ingmar Bergman-).
Fils de Birgit Cullberg, personnalité importante dans la danse, et d'un père comédien chez Bergman,
frère d'un danseur chez Béjart.
Après avoir été metteur en scène, il devient danseur à 26 ans, chorégraphe à 30.
« J'ai ressenti un besoin violent de créer du mouvement » ; il crée un langage corporel signifiant.
Comme sa mère, il est engagé politiquement. Il s'inspire de l'oppression sociale, politique,
matriarcale, amoureuse ; comment l'être humain peut-il se libérer de ces oppressions ?
Il s'inspire beaucoup du monde de l'enfance et reprend leur gestuelle.
« Le mouvement est un langage, ce n'est pas une esthétique ni de la décoration. Pas plus une
illustration de la musique ».
Au fil des années, il créé un langage qui lui est propre, utilisant la gestualité quotidienne qu'il
remanie à sa manière.
Giselle (Ballets Cullberg, 1982)

Interprètes :
 Giselle : Ana Laguna,
 Albrecht : Luc Bouy,
 Hilarion : Yvan Auzely.

Il s'agit d'une relecture :

 Mats Ek revient à la source musicale, choisit l'orchestration d'origine, retire les ajouts du
XIXème siècle, et s'autorise à changer de place certains passages,
 On retrouve les mêmes personnages solistes et Ek développe des aspects du livret non traités
dans le ballet : la différence du milieu social, la femme toute puissante (selon Ek, les femmes
dominent le monde), Giselle est entre les deux hommes, menant le jeu, et adopte un caractère
nymphomane, elle est physique, montre ses désirs, elle est rejetée par son groupe social à la fin
du premier acte.
 Mats Ek développe le thème de la folie et au deuxième acte, Giselle se trouve dans un hôpital
psychiatrique, parmi les folles (les Wilis) qui expriment leur désir de fertilité, de maternité (ainsi
des coussins simulent la grossesse). Myrtha est infirmière en chef, Hilarion, le poète « fleur
bleue », c'est l'amoureux réel. Il ne meurt pas, il secourt Albrecht en le recouvrant. Albrecht
devient fou et se met à nu moralement et physiquement.

Le poids du corps est très important chez Mats Ek, On observe dans sa danse un contraste entre sol
et hauteur, mais aussi dans les qualités. On observe des mouvements amples. Son langage gestuel
dans cette relecture est une hybridation entre danse classique et mouvement du quotidien.

« Le grotesque est ma vision de la beauté ».