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Master

Administration Finance
des Entreprises d’entreprise
Professeur Jérôme Caby

2008-2009 CAS N°7 EIFFAGE-VINCI

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ENONCE

CAS EIFFAGE -VINCI

1. Présentation d’Eiffage

Eiffage est le septième groupe européen de la construction et emploie 65 000 personnes. Le


groupe compte cinq pôles d’activité, dont 4 détenus à 100% : le BTP avec Eiffage
Construction, l’installation électrique & multitechnique avec Forclum, la construction
métallique avec Eiffel, la route avec Appia, et les concessions avec APRR et le Viaduc de
Millau notamment. Eiffage reste très implanté sur le marché hexagonal (plus de 80 % du
chiffre d’affaires) avec un maillage important de ses implantations à travers le territoire. Le
reste des activités se situe quasi-exclusivement en Europe. Cette part très importante du
marché domestique se retrouve dans tous les métiers du groupe.

En 2006, le groupe a connu une étape importante avec le rachat de 50,01% du capital du
concessionnaire autoroutier APRR. Cette acquisition a changé en profondeur le profil du
groupe qui est passé du statut de constructeur à celui de constructeur-concessionnaire avec des
opérations comme la ligne ferroviaire Perpignan - Figueras.

Le chiffre d’affaires et les marges d’exploitation d’Eiffage se présentent comme suit :

En millions d’euros 2005 2006


Chiffre d’affaires total 8 433 10 745
Dt CA Concessions 106 1 490
Dt CA Installation
électrique 1 754 2 006
Dt CA Construction
métallique 186 244
Dt CA Routes – Travaux
Publics 3 258 3 635
Dt CA Construction 3 129 3 370

Résultat d’exploitation /
CA en % 2005 2006
Total 4,7 % 8,7 %
Concessions 25,5 % 33,4 %
Installation électrique 4,7 % 4,8 %
Construction métallique 4,8 % 4,9 %
Routes – Travaux Publics 3,7 % 4,8 %
Construction 4,8 % 4,6 %

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Eiffage est positionné sur des marchés porteurs (installation électrique, construction
métallique, concessions), mais est en conflit depuis de nombreux mois avec son principal
actionnaire espagnol Sacyr (avec 33,2 % du capital tandis que les salariés détiennent 22,2 %
du capital) et des procédures judiciaires sont en-cours. Ce conflit pourrait se traduire par un
rapprochement des deux groupes, une scission - démembrement d’Eiffage ou bien un accord
amiable.

2. Présentation de Vinci

Vinci est le premier groupe mondial de construction et de concessions, mais demeure


largement tourné vers le marché français, avec 65 % du chiffre d’affaires, le reste de l’activité
se situant essentiellement en Europe, avec 27 % du chiffre d’affaires. Le tournant stratégique
pris après le rachat des Autoroutes du Sud de la France en mars 2006 a considérablement
changé la physionomie du groupe.

Vinci est désormais réparti entre cinq branches toutes en croissance : construction,
concessions (ASF, Vinci Park, Cofiroute, …), routes (Eurovia), énergie et, dans une moindre
mesure, immobilier. Au 1er semestre 2007, le CA se répartissait ainsi : Construction (43 %),
Routes (25 %), Energies (14 %), Concessions (16 %) et Immobilier (2 %).

Les marges d’exploitation de Vinci se présentent comme suit :

Résultat d’exploitation /
CA en % 2005 2006
Total 6,9 % 9,5 %
Concessions 42,3 % 43,1 %
Energies* 5,4 % 5,3 %
Immobilier 8,3 % 12,9 %
Routes – Travaux Publics 3,8 % 4,0 %
Construction 5,1 % 4,7 %

*Dont Installation électrique

Vinci a un actionnariat dispersé avec un flottant représentant 62,2 % du capital et de


nombreux institutionnels ou investisseurs dans son capital (Artémis, Morgan Stanley,
Financière Pinault, Crédit Agricole, …). La stratégie du groupe Vinci se caractérise par une
croissance externe soutenue, comme en attestent en 2007 le rachat des 17% de Cofiroute,
l’acquisition de Solétanche Bachy (France), d’Entrepose Contracting (France), de Nukem
(Royaume-Uni), Prumstav (Tchéquie) ou Etavis (Royaume-Uni). Le rachat d’ADP (Aéroports
de Paris) fait aussi l’objet de rumeurs.

3. Le développement des PPP (Partenariat Public Privé)

Le marché des PPP est aujourd’hui un marché en plein essor, encore relativement petit par la
taille, et lié à l’aléa des appels d’offres, mais actuellement en forte croissance, et s’apparente
aux concessions. Il apparaît difficile de quantifier exactement le montant des PPP /
Concessions mis en jeu dans l’ensemble de l’Europe mais les marchés se développent de

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manière importante dans des domaines variés : santé, justice, défense, éducation, culture,
loisirs …

Que ce soit en France, en Europe ou aux Etats-Unis, les programmes d’infrastructures sont de
plus en plus dévolus au privé. Le désengagement de l’Etat au profit de sociétés privées
concessionnaires permet de soulager les budgets publics. Le tronçon Sud Europe Atlantique
de la ligne à grande vitesse (LGV) entre Tours et Bordeaux, première LGV qui devrait être
financée sous forme d’une concession du secteur privé sur le réseau national français est
emblématique de cette montée en puissance. Eiffage, Bouygues et Vinci ont chacun présenté
un dossier de candidature à l’été 2007. Ce contrat devrait être signé au second semestre 2008
pour un investissement global de 5 Mds d’€, financé par PPP.

Eiffage et Vinci ont gagné de nombreux PPP / Concessions notamment en France et en


Europe (Vinci). Ils portent sur la conception, le financement, la construction et la maintenance
de ces différents projets. Le modèle des PPP apparaît comme une source potentielle de
croissance pour ces deux acteurs.

À l’aide des données qui vous sont fournies, vous devez analyser et comparer les situations
financières d’Eiffage et Vinci.

COMPTES DE RESULTAT simplifiés (en millions d’euros)

2005 2006 2005 2006


Eiffage Eiffage Vinci Vinci
Chiffre
d’affaires 8 433 10 745 21 543 26 032
EBE 597 1 591 2 204 3 844
Résultat
d’exploitation 397 934 1 484 2 476
RCAI 385 567 1 380 2 031
Résultat
Exceptionnel 0 0 (1) 49
Résultat net 302 377 872 1 270

ELEMENTS du BILAN (en millions d’euros)

2005 2006 2005 2006


Eiffage Eiffage Vinci Vinci
Capitaux propres 1 402 2 754 5 319 8 571
Actifs immobilisés 2 914 16 874 11 167 30 502
Endettement net 327 11 034 1 762 14 828
BFR (520) (471) (1 407) (1 672)
Capital économique 2 817 15 928 7 513 28 160

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DIVERS (en millions d’euros)

2005 2006 2005 2006


Eiffage Eiffage Vinci Vinci
Investissement d’exploitation 202 476 1 511 1 977
Augmentation du capital 4 415 270 3 392
Dividendes 15 256 390 552

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Éléments de corrigé du cas « Eiffage - Vinci »

Les étudiants doivent parvenir à faire émerger les éléments saillants et les relier entre eux :

- Des rythmes et des modes de développement similaires en dépit d’une envergure


différente :

2006 Eiffage 2006 Vinci


Variation du + 27,4 % + 20,8 %
CA

Les deux groupes enregistrent une croissance rapide de leur activité à la fois du fait du
développement interne de leurs métiers, mais surtout du fait de leurs politiques d’acquisition.
Cette croissance s’appuie :

- Sur des métiers diversifiés similaires (concessions, construction, installation


électrique, routes).
- Sur une stratégie similaire de développement de l’activité « Concessions » qui permet
de dégager une activité récurrente.
- Sur une base géographique très centrée sur le marché domestique avec des
développements internationaux principalement européens, ce qui les immunise contre
le risque de change et les retournements de l’activité américaine.

Pour autant, le chiffre d’affaires de Vinci est entre 2 et 3 fois supérieur à celui d’Eiffage, ce
qui lui donne une taille critique et le protège plus aisément contre la consolidation du secteur
aux échelles européenne voire mondiale. De surcroît, cette taille supérieure permet plus
facilement à Vinci de s’imposer sur les marchés mondiaux dans le domaine de la construction
et des concessions et sur le secteur en fort développement des PPP.

- Des marges très satisfaisantes qui s’améliorent simultanément du fait de l’activité


« Concessions »

2005 2006 2005 2006


Eiffage Eiffage Vinci Vinci
EBE /CA en 7,1 % 14,8 % 10,2 % 14,8 %
%
RE/CA en % 4,7 % 8,7 % 6,9 % 9,5 %
RN/CA en % 3,6 % 3,5 % 4,0 % 4,9 %

Les taux de marge constatés en 2006 sont très satisfaisants pour les deux entreprises. Pour
autant, les marges nettes de Vinci sont assez largement supérieures. L’analyse des marges par
activités montre aussi que :

- L’activité « Concessions » se traduit par des marges bien supérieures pour les deux
groupes.
- Si les marges sont similaires pour la plupart des activités, elles sont plus élevées pour
l’activité « Concessions » chez Vinci.
- La réorientation stratégique des deux groupes atténue la cyclicité des résultats du
secteur « historique » de la construction au travers du poids des concessions.

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- Des rentabilités économiques dégradées et de bonnes rentabilités financières

2005 2006 2005 2006


Eiffage Eiffage Vinci Vinci
EBE /CE en 21,2 % 10 % 29,3 % 13,7 %
%
RN/CP en % 21,5 % 13,7 % 16,4 % 14,8 %

La rentabilité de l’exploitation des deux groupes se dégrade fortement (plus fortement pour
Eiffage) car l’activité « Concessions » nécessite des immobilisations beaucoup plus lourdes.
C’est la traduction financière de la stratégie suivie par les deux groupes à la recherche de
marges plus élevées.

Pour autant, la rentabilité financière initialement très bonne dans les deux cas demeure très
correcte en 2006 en raison d’un recours important à l’endettement et d’un effet de levier
financier positif (voir plus bas).

- De croissances financées par la dette et un effet de levier positif

2005 2006 2005 2006


Eiffage Eiffage Vinci Vinci
Endettement 23,3 % 400,7 % 33,1 % 173 %
net / CP

Si la structure financière était très saine pour les deux entreprises à l’origine, les rachats
d’entreprise (concessions en particulier) par endettement se sont traduits par une très nette
dégradation. Celle-ci obère la poursuite de stratégies de développement fondées sur des
acquisitions financées par la dette et ceci de façon encore plus marquée pour Eiffage.

Les deux groupes bénéficient de BFR négatifs traditionnels compte tenu de leurs activités, on
note néanmoins que cet avantage a tendance à se diluer chez Eiffage avec les changements de
périmètres.

2005 2006 2005 2006


Eiffage Eiffage Vinci Vinci
BFR/CA en j (23 j) (16 j) (24 j) (23 j)
(365)

Par ailleurs, on peut se demander quelle est la sensibilité de cet endettement à l’évolution des
taux d’intérêt (une hausse en l’occurrence) et les conséquences que cela pourrait avoir sur les
marges de ces deux groupes et sur la nature positive de l’effet de levier. On peut néanmoins
imaginer que les niveaux élevés de marge des « concessions » permettent de continuer à
bénéficier d’un effet de levier favorable y compris dans l’hypothèse (peu vraisemblable à
court terme) d’une non - immunisation à une augmentation des taux d’intérêt.

- Synthèse

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Les deux groupes poursuivent des stratégies parallèles qui se traduisent des conséquences
financières positives similaires à l’exception de la dégradation de leurs structures financières
respectives. La différence de taille semble néanmoins indiquer que Vinci est mieux placé pour
l’avenir et moins menacé par un éventuel rachat ou démantèlement au sein d’un secteur
aujourd’hui très marqué par le localisme, mais qui ne manquera pas d’être touché par la
mondialisation avec l’apparition de nouveaux acteurs internationaux (chinois, turcs, …). La
réorientation vers les PPP / concessions est une voie de sortie vers une activité à plus haute
valeur ajoutée qui subira également des consolidations dans le futur.

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