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Jean-Marc Frigerio
Jean-marc.frigerio@upmc.fr
Institut des NanoSciences de Paris
Campus Boucicaut
UPMC
Introduction :
Ce cours traite de l'interaction de la lumière avec la matière à l'état solide. Cette interaction est
responsable de la réflexion des métaux, mais aussi de la transparence du verre ou de la couleur des
pierres précieuses. D'autres matériaux peuvent paraître blancs à l'état de poudre à cause de la
diffusion de la lumière et être transparents en volume.
L'optique des milieux condensés permet de décrire et d'expliquer de façon microscopique
l'interaction d'une onde électromagnétique avec les électrons et les ions d'un solide et d'en tirer de
façon macroscopique une description quantitative des phénomènes mis en jeu.
Dans un premier temps, nous allons classer les différents effets optiques auxquels nous nous
intéresserons et définir les grandeurs que nous allons utiliser pour les quantifier.
La grande variété des effets optiques que nous observons ou que nous mesurons peut se classer en
un nombre réduit de phénomènes.
• La réflexion
• La réfraction
• L’absorption
• La luminescence
• Diffusion
De nombreux autres phénomènes optiques peuvent apparaître au cours de la propagation de la
lumière dans un matériau si l’intensité du faisceau est très grande. Ce sont des phénomènes non-
linéaires que nous n’aborderont pas du tout dans ce cours.
Matériau Optique
Propagation
Faisceau Réfléchi
Diffusion
En premier lieu une partie de la lumière incidente peut être réfléchie à la surface du matériau. C’est
la réflexion, qui peut être spéculaire en cas de faisceau incident collimaté et de surface plane ou
diffuse dans les autres cas (surface rugueuse ou lumière diffuse). Le reste pénètre dans le matériau
et se propage au travers. C’est la propagation. On parle de réfraction dans le cas de matériau
totalement transparent (le seul effet dû au matériau est une diminution de la vitesse de propagation
de l’onde lumineuse). Dans le plus part des cas, l’onde lumineuse est absorbée, on parle alors
d’absorption ou diffusée par les défauts ou les impuretés on parle alors de diffusion. Ces deux
phénomènes contribuent à l’atténuation de l’onde au cours de sa propagation. Enfin, une partie de
l’onde absorbée dans le matériau peut être réémise, on parle alors de luminescence. A l’interface de
sortie, une partie de l’onde restante peut être réfléchie de nouveau vers l’intérieur du matériau et ce
qui sort finalement, ou lumière transmise est nommée transmission.
La description de ces effets optiques nécessite des paramètres quantifiant de façon macroscopique
et intrinsèque l’interaction d’une onde électromagnétique avec un milieu matériel (à part la
diffusion qui demande en plus une description de la mise en forme du matériau). On peut
rapidement revenir aux équations de Maxwell dans un milieu pour voir que la réponse d’un
matériau à une onde électromagnétique peut être caractériser par trois paramètres qui décrivent
complètement le matériau.
Les équations générales de l'électromagnétisme pour des champs macroscopiques dans le vide, en
présence de charges et de courant peuvent s'écrire dans le système S.I. :
r
r ∂B r
∇× E = − ∇•D = ρ
∂t r
r r ∂D r
∇× H = j + ∇•B = 0
∂t
Ces équations suffisent à décrire toute l'interaction d'une onde électromagnétique avec la matière
r
sous réserve des hypothèses citées plus haut. Dans ces équations, on peut considérer que ρ et j
r r
sont les sources des champs D et H . Toutes ces grandeurs sont des grandeurs vectorielles (à part
ρ) et sont liées deux à deux par d'autres relations appelées relations constitutives :
r r r r r r
j =σE D =εE B = μH
r r r
Nous supposons ici que les milieux sont linéaires c'est à dire que j , D et B ne dépendent pas
r r
d'autres puissances de E et H . et de. On néglige ainsi tous les effets non-linéaires qui sont
importants dans tous les cas ou les champs sont intenses : lasers de forte puissance, forts champs
magnétiques, astrophysique, certains effets magnéto-optiques.
σ, ε et μ sont dans le cas le plus général des tenseurs. Si cela est le cas (matériau anisotrope) on fera
le changement de repère nécessaire pour se placer dans les axes propres du système.
Aux fréquences optiques nous nous intéresserons essentiellement à la constante diélectrique ε, qui
comme son nom ne l’indique pas, dépend de la fréquence mais nous regarderons aussi σ pour les
métaux (ou plus généralement les conducteurs).
En optique on considère le plus souvent que μ = μ0 car les domaines magnétiques ne pouvant pas
s’inverser aux fréquences optiques les moments magnétiques ne « réagissent » pas à ces fréquences.
Structure de la matière :
Classification en fonction de l’interaction entre les atomes.
Gaz
• Les distances entre atomes et molécules sont grandes.
• Les interactions se font par l’intermédiaire de chocs.
• Régis par la physique statistique.
• Occupe tout l’espace disponible.
• Milieu très compressible.
• Propriétés optiques identiques à celle de l’atome isolé (raies fines d’absorbation et/ou
d’émission gouvernées par la mécanique quantique : sélection des transitions permises ou
interdites) + élargissement des raies dues à l’effet doppler (atomes en mouvement)
• Propriétés roto-vibrationnelles dans l’IR très complexes (intérêt essentiellement
astrophysique)
Liquides
• Les atomes, molécules ou ions sont proches les uns des autres (en contact ?).
• Le milieu est en première approximation incompressible.
• Il prend la forme du récipient qui le contient.
• Les particules sont en mouvement, il n’y a pas d’ordre à longue distance.
• Il peut y avoir un arrangement à courte distance : nombre et nature des premiers voisins
fixés.
Solide
Les atomes, molécules ou ions sont proches les uns des autres, mais ils sont fixes. Ils vibrent autour
de positions moyennes d’équilibre qui définissent un réseau dans l’espace (pour les cristaux).
• Amorphe ou verre
o Les atomes sont fixes et vibrent autour d’une position d’équilibre.
o Il n’y a pas d’ordre à grande distance (pas de périodicité).
o Il y a seulement un ordre à courte distance.
o Verre = liquide figé à un instant donné
o Etat métastable : dépende de la vitesse de trempe
o La transition liquide->amorphe est une transition de viscosité (fluidité).
Ce diagramme représentant le volume (ou l’enthalpie) en fonction la température. Tf représente la
température de fusion et Tg la température de vitrification (ou transition vitreuse).
• Cristaux liquides
o Phases mésomorphes : intermédiaire entre l’état solide et l’état liquide.
o Fluidité des liquides
o Arrangement dans l’espace présentant un certain ordre (2D ou 3D).
Phases colonnaires
o Propriétés optiques dépendant considérablement de l’orientation ou de la phase
cristalline.
o Possibilité de moduler la transmission, la polarisation, ou l’absorption et même la
diffraction de la lumière en fonction de la température ou d’un courant électrique.
Force de liaison dans les solides cristallins
• Forces attractives à longue distance : force électrostatique de Coulomb entre ions et électrons
• Forces répulsives à courte distance : atomes en contact (couches pleines).
• Energie de cohésion : énergie à dépenser pour séparer les constituants du cristal en atomes
(molécules) neutres au repos et infiniment éloignés. (passage de l’état solide à l’état gazeux à
0K).
• Cohésion :
o effets statiques : interaction électrostatique attractive entre les charges négatives des
électrons et les charges positives des noyaux.
o Effets cinétiques : dus au mouvement des électrons.
• Un solide est stable si son énergie totale (cinétique + potentielle) est plus faible que l’énergie
du même nombre d’atomes neutres libres.. La différence est l’énergie de cohésion Ec.
• Attention : il est possible d’avoir des solides dans des états métastables (amorphes)
Cristaux moléculaires
• Arrangement de molécules neutres faiblement liées.
• Ec(H2) = 2,44 kcal/mole ; Ec(CH4) = 2,40 kcal/mole.
• Très compressibles
• Cristallisation des protéines, des acides aminés, des molécules organiques (ex : saccharose)
• Propriétés optiques : celles des molécules (transparents dans le visible) avec les bandes
d’absorption de la molécule qui peuvent être légèrement modifiées par rapport à la molécule
unique par les interactions coulombiennes.
Cristaux ioniques :
• Exemples : NaCl, LiF, MgO, Al2O3 (saphir)
• Combinaison d’atomes (métalliques) très électropositifs et d’atomes (halogénures,
chalcogènes, oxygène) très électronégatifs.
• Transfert d’électrons de façon à obtenir une configuration électronique de couches
pleines.
o Ex : LIF : Li 1s2 2s Æ 1s2 (He) Li+
F 1s2 2s2 2p5 Æ 2p6 (Ne) F-
• Arrangement d’ions alternativement positifs et négatifs. (Chaque ion positif est entouré
d’ions négatifs, les ions négatifs sont plus gros que les ions positifs)
• Force d’attraction électrostatique de Coulomb entre sphères chargées.
• L’attraction de Coulomb entre des ions de signe opposé est plus forte que la répulsion de
Coulomb entre ions de même signe (quand ils se touchent).
• Tous les électrons sont liés Æ isolant électrique jusqu’à haute température, faible
conductivité par diffusion ionique, intrinsèque ou extrinsèque.
• Propriétés optiques :
o transparent dans le visible ou le proche IR.
o la première absorption correspond à l’énergie nécessaire à casser une liaison
ionique (plusieurs eV)
o absorbant dans l’UV ou le bleu avec possibilité de dissociation (AgBr bromure
d’argent utilisé en photographie argentique).
Transmission d’une lame dune lame de saphir et d’une lame de CdSe
• La zone de transmission (gap) s’étend d’autant plus vers l’UV que la liaison est ionique.
• La présence d’impuretés en particulier de métaux de transition sous forme ionique conduit à des
absorptions localisées pouvant modifier très fortement les propriétés optiques. Les interactions
entre le champ cristallin et les niveaux électroniques de l’impureté modifient la position des
bandes d’absorption et leurs intensités.
Cristaux covalents.
• Exemples : Si, Ge, Cdiamant
• Arrangement d’atomes dont les électrons de valence (couche externe non pleine) occupent
préférentiellement les régions entre premiers voisins.
• L’espace occupé par les « cœurs » (atome dépouillé de ses électrons de valence ≠ du noyau) est
chargé positivement, et il y a des charges négatives en excès le long des lignes joignant 2
atomes voisins.
• Force d’interaction attractive entre couches non pleines avec recouvrement des charges.
• Chaque atome donne un électron à chaque liaison : ces deux électrons sont mis en commun.
• Liaisons homopolaires, à paire électronique forte, avec des propriétés directionnelles très
marquées.
• Les électrons sont localisés entre les atomes, le long de la liaison, avec des spins antiparallèles.
Exemple de l’énergie potentielle (ou de l’interaction d’échange) pour une molécule d’hydrogène en
fonction de la distance.
• Exemple : Cdiamant : hybridation sp3 (même chose pour Si et Ge)
o C 1s2 2s22p2 Æ 1s2 2sp3
o 4 électrons de valence Æ 4 électrons équivalents participant à 4 liaisons covalentes
formant un tétraèdre régulier.
• Autre hybridation possible du carbone : C 1s2 2s2 2p2 Æ 1s2 2s1 2sp2
o Conduit à 3 liaisons covalentes planaires : graphite
Métaux
• Na, Mg, Al, métaux nobles (Cu, Ag, Au), métaux de transition.
• Les électrons des couches externes (de valence) non pleines sont pratiquement libres, leur
distribution dans l’espace est uniforme, sauf au voisinage immédiat des atomes Æ
responsables de la conduction.
• Interaction des cœurs (noyaux + couches internes) avec la « mer » d’électrons de conduction
Æ cohésion.
• Métaux alcalins : (type Na).
o Ions positifs dans une mer plus ou moins uniforme de charges négatives.
• Métaux nobles (Al, Cu, Ag, Au).
o les électrons libres sont de type s ou p.
o les couches plus profondes (couches d) sont pleines.
• Métaux de transition (type Ni)
o Interaction entre les couches plus profondes : niveaux d incomplets (niveaux f pour
les terres rares).
90
80
70
Reflection (%)
60
Or
50
Cuivre
40
Aluminium
30 Argent
20
10
UV IR
0
200 300 400 500 600 700 800 900 1000
Wavelength (nm)
àT=0K
àT>0K
Distribution de Fermi-Dirac