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Permanences et mutations de la géographie du peuplement en France

interroger les évolutions de la population et travailler sur la question du peuplement, c’est-à-dire sur la
répartition géographique de cette population sont des démarches fondamentales de la compréhension
géographique d’un pays ou d’une région.
Denise Pumain définit ainsi le peuplement dans l’encyclopédie en ligne de géographie Hypergéo :
« Le terme de peuplement a une double signification : il désigne la forme prise par la répartition de la
population dans un territoire c’est donc une configuration spatiale ; mais cette configuration résulte de
l’action d’occuper un territoire en le peuplant.[…] La notion de peuplement, qui interroge les localisations,
les concentrations et la plus ou moins grande régularité de l’installation des populations, est
caractéristique de l’approche géographique, par opposition à une approche démographique qui se
centre davantage sur les caractères de cette population et les processus de son évolution ».
Pourquoi vit-on ici plutôt qu’ailleurs ? Pourquoi certaines régions sont vides et d’autres si peuplées ?
Telles sont les questions abordées par la géographie du peuplement. La géographie du peuplement ne
dispose pas d’une théorie générale de la répartition de la population du monde, ou à l’échelle nationale.
La diversité des facteurs et de leur combinaison est donc considérable, et doit faire l’objet d’une analyse
nuancée, évitant tout déterminisme, et s’appuyant sur une réflexion à plusieurs échelles. Des facteurs
explicatifs multiples doivent être envisagés. Seuls, ils sont insuffisants, et l’explication la plus
satisfaisante réside le plus souvent dans la combinaison de plusieurs facteurs explicatifs.
Le peuplement de la France, appréhendé par l’indicateur simple que constitue la densité de populations
(population divisée par la surface, en habitat/km²) révèle des inégalités de répartition considérables,
imputables à une pluralité de facteurs. Aborder cette question nous amènera à nous interroger sur la
pertinence (ou pas !!!) d’une vision « déterministe » de l’espace.
Les dynamiques actuelles qui affectent la répartition de la population française seront examinées dans
un second temps, puisqu’elles induisent une redistribution des individus sur le territoire, suivant des
logiques très contrastées, voire parfois antagonistes. On interrogera tout particulièrement deux
dynamiques contemporaines en apparence contradictoires, mais qui disent la complexité de la
redistribution spatiale en cours : d’une part, la métropolisation, d’autre part les « renaissances rurales ».

I DE LA DIVERSITE DES FACTEURS EXPLICATIFS DU PEUPLEMENT EN FRANCE


1) Les principales zones de peuplement
La carte des densités de population met en évidence plusieurs types d’espace de forte à très forte
densité de population : sont ainsi soulignés les zones littorales, les corridors fluviaux, mais aussi les
grandes agglomérations. De manière plus diffuse, un croissant rassemblant l’ouest et le nord du pays se
caractérise par des densités plus élevées. Comment expliquer ces différentes concentrations, et à
l’inverse, les très faibles densités observées en Corse, dans les Landes, en Champagne ou dans le Massif
central ?

1
Figure 1 : Densité de population en France en 2019, disponible en ligne :
https://www.populationdata.net/wp-content/uploads/2017/01/france-densite-communes-
800x800.png

2) Les critères physiques, entre contraintes réelles et représentations idéalisées


Tous les milieux physiques ne sont pas exploitables de manière équivalente par une société donnée : il
est donc des milieux qui apparaissent plus contraignants que d’autres, qui bénéficient d’une image
favorable. Plusieurs questions découlent de cette affirmation :
- D’une part, quelles sont les zones du territoire dont les caractéristiques physiques apparaissent
suffisamment contraignantes pour expliquer la forte ou la faible présence anthropique ? Ces
zones ont-elles varié au fil du temps ? On verra que oui, ce qui met à mal toute velléité
déterministe.

2
- D’autre part, dans quelle mesure la présence de ressources abondantes est-elle nécessairement
synonyme de fortes densités ? Inversement, tout espace contraignant est-il peu peuplé ? Là
encore, la prudence est de mise et les raccourcis sont à éviter.

Les corridors fluviaux : une concentration indéniable, mais à nuancer à l’échelle locale

Bien qu’ils ne soient pas explicitement figurés sur la carte proposée, les grands fleuves français
apparaissent clairement à l’examen de la carte des densités de population, tant ils rassemblent un très
grand nombre de villes et, plus largement, des densités importantes de population. Plusieurs raisons à
cela : la proximité des fleuves permet de répondre en partie aux besoins en eau potable des populations,
mais aussi aux besoins industriels (eau pour le refroidissement des centrales nucléaires, dans les
processus productifs de l’industrie chimique, papetière, textile etc) ; la proximité des fleuves a
également pu favoriser l’émergence d’une agriculture maraîchère qui nécessite d’importants apports
en eau ; enfin les fleuves et leurs vallées constituent des axes de transports potentiels majeurs. Pour
autant, l’analyse de détail des densités de population invite à nuancer cette image d’une proximité
nécessaire à l’eau : d’une part, il existe de nombreuses zones localement inondables, dangereuses et
reconnues comme telles qui n’ont fait l’objet d’aucun établissement anthropique. A cet égard, certaines
bordures de la Loire sont révélatrices de la méfiance ancienne des sociétés face à l’eau. Inversement,
nombre d’agglomérations d’importance démentent ce schéma d’une proximité nécessaire au fleuve :
qu’on pense à Saint Etienne, Rennes ou Marseille : il s’agit de grandes villes, indéniablement, à la
tradition industrielle forte pour la première, et pour autant, aucun fleuve ne traverse leurs
agglomérations.

Ainsi donc, si la proximité d’un fleuve peut constituer un élément explicatif parmi d’autres des fortes
densités observées en certaines parties du territoire national, elle ne constitue pas pour autant une
explication intangible en la matière.

Les espaces de bassin en France : une image favorable, une histoire plus nuancée

Dans l’ensemble, l’utilisation des bas plateaux du Bassin Parisien est faiblement dépendante des
données physiques : pas de problème pour le franchissement, pas de difficultés liées à la pente. Certains
des plateaux de ces régions sont considérés dans l’imagerie populaire comme particulièrement riches :
c’est le cas de la Beauce ou de la Brie etc. De même, l’emplacement de la capitale au cœur du bassin
parisien a pu être lu par certains comme la conséquence de l’atout naturel que constituaient un site et
une situation exceptionnellement favorables en termes de transport, d’accessibilité,
d’approvisionnement etc. Comme le rappelait Armand Frémont : « tous ces éléments, et quelques
autres, ont conduit des générations de géographes, dans un déterminisme non avoué, à faire de ce vaste
territoire une sorte de pays de cocagne, le « berceau de civilisation » par excellence, le lieu central de la
France. »

Cependant, une partie des contraintes agronomiques du bassin n’a été levée que très récemment : c’est
ainsi que les carences des sols en composantes ont durablement affecté l’exploitation de ces espaces.
Ainsi, la Champagne était qualifiée de « pouilleuse » par les Physiocrates, savants éclairés de la fin du
XVIIIe siècle, en référence aux pouilles, végétation pauvre qui recouvrait les plateaux faute
d’exploitation, en raison de l’insuffisante fertilité des sols. Au XIXe siècle, l’élevage du mouton, animal
peu exigeant, s’y développe, en liaison avec l’essor de l’industrie lainière de Reims ou Sedan. On procède

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aussi au boisement en pins des terres les plus ingrates, qualifiées de savarts, signe patent des difficultés
d’exploitation du lieu. Ce n’est que dans les années 1950 qu’une véritable révolution agricole est
enclenchée, à l’aide de l’utilisation massive d’engrais, qui aboutit à la transformation de la région en
véritable grenier à blé. De vastes exploitations vouent alors la Champagne crayeuse à une grande
culture, fort rémunératrice, autour des céréales, de la betterave à sucre, de la Luzerne, etc. La figure ci-
dessous, capture du site de l’IGN dédié aux comparaisons historiques (www.remonterletemps.ign.fr)
permet de mettre en regard une photographie aérienne contemporaine récente à gauche, et la
situation de la région en 1950 grâce à une carte topographique de la même zone. On peut observer la
transformation radicale du paysage et de la production agricole, la disparition des boisements de
résineux au profit de grandes cultures mécanisées.

Figure 2 : Comparaison de la photographie aérienne contemporaine et de la carte topographique de


1950, aux alentours de Bethéniville, Champagne crayeuse, source : www.remonterletemps.ign.fr

C’est donc aujourd’hui une des régions agricoles françaises les plus riches, mais il serait donc inexact de
lire cette réalité comme la conséquence d’une « vocation » particulière des sols. Ils constituent en
revanche une ressource importante dans le contexte technique et sociétal du XXe siècle. Cet exemple
montre aussi que la rentabilité économique des terres n’est pas nécessairement synonyme de fortes
densités : la Champagne est aujourd’hui un paysage d’openfield de faible densité, l’exploitation de ce
territoire ne nécessitant guère une présence massive de main-d’œuvre.

L’espace comme le temps nous invitent donc à nuancer les discours qui consisteraient à lire les densités
de population au seul prisme des caractéristiques physiques des espaces considérés.

3) Facteurs historiques
L’un des facteurs à ne pas négliger est l’ancienneté de l’occupation du territoire par une société donnée.
En effet, L’ancienneté de l’occupation signifie souvent, à conditions naturelles égales, un peuplement
plus dense, parce que l’occupation de l’espace est plus totale, l’utilisation plus intense de l’espace. Plus
encore, une certaine inertie des masses démographiques fait qu’un région anciennement peuplée de
manière importante, même si elle voit son dynamisme démographique diminuer, va demeurer un
espace densément peuplé.
Une population, une fois qu’elle a atteint une certaine masse critique, continue à croître par effet
d’inertie. On peut à cet égard évoquer le cas de l’ancienne région Nord-Pas-de-Calais, incluse désormais
dans les Hauts de France.

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La première révolution industrielle a constitué un foyer de peuplement majeur en Europe jusqu’à
aujourd’hui. Les fortes densités européennes recoupent aujourd’hui encore largement les grand bassins
charbonniers : Ruhr, Nord pas de Calais, mines anglaises. Il faut certes faire attention : si la présence de
charbon était nécessaire au développement industriel, il a surtout été rendu possible par l’existence
préalable d’une forte activité marchande et de capitaux disponibles pour effectuer les investissements
nécessaires. En l’occurrence, la préexistence d’activités marchandes a favorisé la révolution industrielle.
L’exploitation à partir de 1715 des gisements côté pays bas incite à la recherche… et permet la
découverte des gisements français.
Or, l’activité extractive constitue en effet une activité dite peuplante, avec une densité moyenne
estimée autour de 600 hab/km² par Pierre George. Aujourd’hui, les plus fortes densités européennes
correspondent en réalité encore aux premières zones d’exploitation minière : on les retrouve au
Royaume-Uni, dans la Ruhr, dans le Nord de la France ou de la Belgique etc. La date d’introduction d’une
innovation comme la mine compte donc presque davantage que son apparition pour expliquer les fortes
densités de population.

Une fois l’exploitation charbonnière établie, l'essor de la production textile dès la seconde moitié du
19e siècle renforce le poids occupé par Lille au sein la région. D'autres capitales du textile à l'instar de
Roubaix et Tourcoing se développent de manière fulgurante, accompagnées de centres de production
secondaires de part et d'autre de la frontière belge. Les premiers contours d'une aire métropolitaine
lilloise sont ainsi formés. En parallèle, l'exploitation intense du charbon fait naître un vaste bassin de
population le long du sillon houiller, la main d'œuvre de cette activité résidant de manière traditionnelle
au plus près du lieu de travail. Durant toute la période de production charbonnière, l'Arc minier s'est
particulièrement densifié, puis étalé.

Comme le rappelle l’INSEE1, après une période de relative stabilité dans la première moitié du 19e siècle,
la part de la population régionale dans l'ensemble métropolitain s'accroît sensiblement jusqu'aux
années 1920 – passant de 5 % en 1851 à 7 % en 1921, puis se stabilisant jusqu’aux années 1960. Cette
phase correspond à la révolution industrielle, caractérisée par des arrivées massives de populations de
diverses origines en réponse aux importants besoins de main-d'œuvre. Depuis, la part de la population
régionale diminue régulièrement. En effet, la période post-industrielle a fait succéder au boom
démographique une dynamique atone. Entre 1999 et 2006, la population régionale n'a progressé que
de 0,8 ‰ par an, soit 22 000 personnes en sept ans. En comparaison, la population française a augmenté
de près de 7 ‰ par an sur la même période. En conséquence de cette quasi-stagnation, le poids
démographique de la région au sein du pays se contracte progressivement, mais la densité de
population et de ménages restent bien supérieure à la moyenne nationale : en 2017, la population du
département du Nord atteint 453,5 hab/km² pour une moyenne nationale de 122 hab/km².

Au total, cet exemple régional met en évidence le poids de l’histoire dans les configurations actuelles
des densités du territoire national : les dernières mines du Nord ont fermé en 1990, la démographie
n’est pas particulièrement dynamique dans la région, et pourtant le monde plein hérité de la révolution
industrielle persiste.

Travailler sur le peuplement implique donc de penser la géographie du territoire sur le temps long, et
de considérer l’importance des effets d’inertie ; pour autant, des dynamiques sont observables sur des
temps plus courts. Ainsi, on étudiera dans les deux parties suivantes deux tendances très fortes de

1
INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques. Voir l’étude disponible à l’adresse
suivante : http://www.insee.fr/fr/regions/nord-pas-de-
calais/default.asp?page=themes/dossiers_de_profils/DP_104/DP_104_2.htm

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l’évolution de la répartition de la population française : la métropolisation et, de manière partiellement
concomitante, les renaissances rurales.

II LA METROPOLISATION, AU CŒUR DES DYNAMIQUES CONTEMPORAINES

1) Des évolutions majeures de la répartition de la population française depuis 1850

Le vingtième siècle a été marqué par des évolutions notables dans la répartition de la population
française : à l’exode rural débuté mi-XIXe siècle environ (avec des nuances suivant les régions touchées)
– et son corollaire, l’urbanisation globale de la population- a succédé un processus plus spécifique
encore de métropolisation, qui se comprend à deux échelles. A petite échelle, la population se
concentre de plus en plus dans un nombre réduit de très grandes villes, qui concentrent dès lors non
seulement beaucoup de populations, et des activités de commandement nombreuses. A grande échelle,
ces villes s’étalent en des ensembles dits périurbains, en discontinuité avec l’agglomération, souvent
sous la forme de lotissements pavillonnaires abritant des populations qui travaillent dans une
proportion élevée (40% pour l’INSEE) dans l’agglomération. Les dernières décennies ont même vu
croître à nouveau une bonne partie de l’espace rural, soit en continuité avec le processus décrit d’une
influence croissante de la ville, soit dans des régions plus isolées mais susceptibles d’attirer des
populations spécifiques (retraités etc – voir partie suivante).

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Figure 3 : Taux de variation annuel moyen par commune entre les recensements en France depuis
1968 (1968-1975, 1975-1982, 1982-1990, 1990-1999, 1999-2010, 2010-2015)

Ces cartes, réalisées à nouveau sous Géoclip, mettent en évidence des changements importants dans
l’évolution des territoires français au cours des 50 dernières années : Si la fin des années 1960 se
caractérise par une diminution nette des populations rurales, les décennies suivantes s’illustrent surtout
par les taux d’évolution particulièrement positifs des villes et des littoraux ; le dernier recensement se
distingue quant à lui par le faible nombre de zones où l’évolution est négative (essentiellement pour
des raisons de vieillissement de la population, et non en raison de migrations vers d’autres régions), et,
au contraire, par le retour de taux d’évolution positifs dans de vastes portions du monde rural,
notamment dans la périphérie des villes (cf le cas de Toulouse par exemple).

2) Rappels définitionnels

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Le terme d’urbanisation désigne le processus de développement des villes et l’état de fait qui résulte de
ce processus. On peut aborder l’urbanisation par différents indicateurs (mode de vie, extension
territoriale), mais surtout grâce à l’augmentation du nombre d’habitants.

On appelle métropolisation le processus de concentration de population et d'activités dans des


ensembles urbains de grande taille. Ce processus peut se faire au détriment de villes de niveau
hiérarchique inférieur. Les facteurs dont il résulte sont divers : taille des marchés, économies
d'agglomération, avantages comparatifs, connexivité et connexité des réseaux (aux échelles nationales
et mondiales), etc. La métropolisation est un phénomène de « concentration de valeur à l’intérieur et
autour des villes les plus importantes » (Ascher, 2003).

Il a donc une différence qualitative entre urbanisation et métropolisation : l’urbanisation correspond au


développement des villes, la métropolisation, au développement des très grandes villes, aux fonctions
de commandement élevées (c’est-à-dire aux activités politiques, économiques ou culturelles exercées
dans une métropole, qui donnent à ceux qui les exercent des pouvoirs importants et à la ville qui les
contient un rayonnement et une attraction sur un espace étendu).

La métropolisation est la traduction urbaine de la mondialisation2. C’est un ensemble de processus


dynamiques qui transforment les grandes villes en métropoles. La métropole est une étape de la
croissance urbaine qui se caractérise par des effets de seuils quantitatifs et qualitatifs. C’est une grande
ville qui s’étale de plus en plus, qui concentre populations et emplois, qui rassemble des activités
diversifiées comportant de nombreuses fonctions tertiaires supérieures qui rayonne de plus en plus
avec les autres grandes villes.

3) Un processus net de métropolisation

a) Evolution quantitative : une croissance urbaine de plus en plus concentrée sur quelques
grandes villes

Le constat est sans appel : depuis le début des années 1970, la France est entrée dans un nouveau cycle
d’urbanisation qui associe deux tendances principales. L’une, centripète, se caractérise par la
concentration des emplois les plus qualifiés dans un nombre limité de métropoles. L’autre, centrifuge,
conduit à la diffusion de populations et de certaines activités de plus en plus loin des centres, et à la
périurbanisation des espaces en question (Ascher, 1995 ; Julien, 2000). Ce phénomène d’extension des
périphéries n’est pas propre aux métropoles. Il s’observe à tous les niveaux de la hiérarchie urbaine,
donnant corps à ce qu’Henri Lefebvre (1970) a qualifié d’« urbain généralisé ». Si le terme d’étalement
urbain peut être en partie contesté pour décrire la périurbanisation, dans la mesure où il s’agit bien

2
La mondialisation désigne l’ensemble des processus socio-économiques, culturels, facilitant la mise en relation des sociétés du monde
entier. La mondialisation est accélérée par les systèmes contemporains de communication, de circulation de l'information. Elle tend à
accentuer les phénomènes de diffusion, d'homogénéisation à travers l'espace mondial. Mais, paradoxalement, elle alimente aussi des
comportements de rejet : les particularismes, régionalismes, communautarismes sont ainsi revisités à la lueur de la mondialisation.

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d’une croissance démographique en rupture physique avec l’agglomération, la logique est bien celle
d’une construction progressive aux marges de la ville centre, afin d’absorber la croissance
démographique liée à l’urbanisation globale de la population.

Le constat dressé par l’INSEE3 sur ces bases est sans appel :

En trente ans (1982-2011), à délimitations courantes des unités urbaines, la population de celles-ci s’est
accrue de 23 %, soit 8 961 000 habitants supplémentaires et la superficie occupée par ces dernières,
de 42,5 % (35 400 km). Sur cette période, la population urbaine a augmenté de manière inégale sur le
territoire. Les grandes unités urbaines réalisent en effet près de 80 % de la hausse (20 % par l’unité
urbaine de Paris et 56 % par les unités de 400 000 à 2 000 000 habitants). L’attractivité des grandes
villes conforte un système urbain dominé en premier lieu par Paris (près de sept fois plus grande que
ses suivantes immédiates, Lyon ou Marseille, selon les recensements) et en second lieu, par un
ensemble de 14 unités urbaines de 400 000 habitants ou plus. L’ensemble des quinze villes les plus
importantes regroupe en 2011, 21,3 millions d’habitants, soit 43,8 % du total urbain, contre 14,4
millions d’habitants ou 36,4 % en 1982.

Pour la période la plus récente, il nous faut utiliser un autre découpage statistique, celui des aires
d’attraction des villes, mis en place par l’INSEE en 2020.. Une « aire d’attraction des villes » est définie
par l’INSEE comme un « ensemble de communes, d'un seul tenant et sans enclave, constitué d’un pôle
de population et d’emploi et d’une couronne qui rassemble les communes dont au moins 15 % des actifs
travaillent dans le pôle ». Le pôle sera quant à lui défini par une combinaison de critères (de densité de
population et de nombre d’emplois4.

Cette catégorisation rend compte d’une très forte concentration des populations et des activités dans
les villes et leurs aires d’attraction. Plus encore, le constat du poids démographique et économique des
grandes villes demeure.

Aujourd’hui, les 699 aires d’attraction des villes regroupent 93% de la population française : 51 % de la
population française habite dans les pôles et 43 % dans les couronnes. Une personne sur cinq vit dans
l’aire d’attraction de Paris.

Concernant l’évolution de la répartition de la population, entre 2007 et 2017, la population augmente


le plus nettement dans les aires d’attraction de 700 000 habitants ou plus, à la fois en raison de leur
solde naturel souvent positif, mais aussi d’un solde migratoire favorable (avec des exceptions notables
comme l’aire de Paris, au solde migratoire négatif)

La carte suivante matérialise cette nouvelle catégorisation de l’espace français et l’étendue considérable
des grandes aires urbaines, largement sujettes au processus de métropolisation.

3
de Bellefon M-P., Eusebio P., Forest J., Pégaz-Blanc O., Warnod R., « 9 français sur 10 vivent dans l’aire
d’attraction d’une ville », INSEE FOCUS n°21, 21/10/2020, en ligne :
https://www.insee.fr/fr/statistiques/4806694#figureencadre
4
Précisément : ensemble de communes contiguës déterminé principalement à partir de critères de densité et
de population totale, suivant une méthodologie cohérente avec celle de la grille communale de densité. Un
seuil d’emplois est ajouté de façon à éviter que des communes essentiellement résidentielles, comportant peu
d’emplois, soient considérées comme des pôles.

9
Figure 4 : Zonage en aires d’attraction des villes, Source : INSEE, disponible en ligne :
https://www.insee.fr/fr/statistiques/4806694#titre-bloc-3

Ainsi donc, si l’on résume, le fait urbain, et plus encore, métropolitain apparaît aujourd’hui très
dominant dans la géographie du peuplement français. Les modifications statistiques évoquées plus haut
témoignent de cette prise en compte : l’INSEE n’a eu de cesse de faire évoluer ses découpages du
territoire national, les deux zonages les plus récents (zonage en aires urbaines 2010, zonages en aires
d’attraction des villes, 2020) faisant disparaître l’espace rural des découpages statistiques, considérant
que c’est désormais la ville – ou le rapport à la ville- permet de comprendre désormais la totalité du
rapport à l’espace national. L’espace français étant appréhendé au travers de la notion de pôles de
différentes tailles, ces derniers concentrant des emplois et polarisant les populations.

Cette nomenclature qui prend acte du rôle majeur de la ville en tant que pôle d’emploi et de
redistribution peut être lue comme le triomphe de l’urbain.

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b) Evolution qualitative

L’emploi s’est concentré en ville et plus celle-ci était grande, plus la part des services marchands y a
augmenté, tandis que décroissait l’emploi industriel, davantage présent dans les villes moyennes. Les
services supérieurs se sont accrus plus fortement dans les grandes villes qu’ailleurs. Ils concernent les
entreprises (recherche, formation, services financiers, juridiques…) mais aussi des composantes plus
transversales de l’attractivité des territoires (culture, loisirs, administrations…).

Ainsi donc, au-delà de la seule croissance de la population urbaine, on observe bien un phénomène de
métropolisation, dans la mesure où les activités « supérieures », « de commandement » ou
« innovantes » se concentrent de manière manifeste dans les plus grandes villes du territoire, et, très
prioritairement, dans la capitale (voir le cours sur Paris).

4) Facteurs explicatifs de la métropolisation

- Des marchés de l’emploi plus dynamiques

Les métropoles, avec leur vaste marché du travail, un taux de chômage souvent moins important que
sur le reste du territoire, des équipements plus diversifiés, des services supérieurs, la présence de
l’enseignement supérieur, une offre de loisirs étendue, attirent. Elles constituent des espaces qui ont
proportionnellement moins souffert des crises récentes du point de vue de l’emploi (voir notamment
Davezies L., La crise qui vient).

- Des nœuds majeurs du point de vue des transports

Les modes de transports rapides permettent d’organiser les échanges et donc la production à une
échelle nouvelle. La proximité physique perd une partie de son importance au profit de la proximité
temporelle. Les transports rapides n’ont plus que des effets de traversée et les étapes sont rares.
L’espace se polarise autour des noeuds qui articulent les différents systèmes de transport rapide, où se
connectent les divers réseaux ferroviaires, où se développent des pôles multimodaux avion-rail-route
ou logistiques pour les marchandises, où les compagnies aériennes établissent leurs plates-formes de
correspondance.

Placées au cœur d’un réseau d’infrastructures multiples où coexistent transports de fret et transports
de personnes et qui leur permettent une accessibilité rapide à d’autres grandes villes françaises ou
étrangères, pour elles-mêmes mais aussi pour les villes de leur région, les métropoles sont pour les
entreprises des espaces de « commutation ». On peut ainsi citer Lyon, avec Lyon Satolas, le TGV
méditerranée, l’A6, etc ou Lille et la densité considérable de transports qui insère pleinement la
métropole dans l’espace européen : Thalys, autoroute A1, etc.

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Si l’on se focalise sur la question logistique, le constat (et l’explication) sont identiques : ce sont bien les
métropoles qui polarisent la plupart des implantations récentes d’infrastructures logistiques, suivant
des temporalités parfois un peu différentes, mais de manière très sensible. On peut à cet égard
consulter avec profit la carte suivante :

Figure 5 : dynamiques de la construction d’entrepôts logistiques dans les aires urbaines françaises
(1985-2009), en ligne. Source : Guerrero D., Proulhac L., « La dynamique spatiale des activités
logistiques dans les aires urbaines françaises », Cybergeo : European Journal of Geography [En ligne],
Espace, Société, Territoire, document 773. URL : http://cybergeo.revues.org/27517 ; DOI :
10.4000/cybergeo.27517

- Les « classes créatives » et leur localisation, ou de la valorisation des métropoles pour certaines
activités innovantes ?

Richard Florida, universitaire canadien, a proposé de regrouper en une classe unique, la « classe créative
», l’ensemble des individus possédant une profession estimée comme créative : ingénieurs,
scientifiques, artistes, managers, architectes, etc. Il considère que c’est une population qui influence
fortement la croissance économique des territoires, parce qu’elle est à l’origine des innovations, elles-

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mêmes au cœur du système productif actuel. Or, d’après lui, la localisation des membres de cette
« classe créative » repose sur repose sur l’attractivité des villes en termes de tolérance, d’ouverture, et
de diversité. En ce sens, les métropoles seraient des lieux privilégiés d’implantation, et donc de
croissance. Et il en déduit que, pour permettre le développement économique des villes, -notamment
des villes industrielles nord-américaines largement frappées par la crise, les acteurs publics locaux
doivent entreprendre des politiques d’attraction des membres de la classe créative. Cette thèse, bien
que contestée à de nombreux égards (S’implante-t-on en un lieu prioritairement pour des raisons de
cadre de vie ? N’est-ce-pas le dynamisme économique qui attire les individus formés et non l’inverse,
etc.), présente néanmoins l’avantage, appliquée au cas français, de mettre en évidence le caractère
clairement urbain d’un grand nombre d’activités et de populations active. D’après l’INSEE, les cantons
marqués par une forte présence de population « créative » sont clairement urbains, et plus encore
métropolitains ou en contiguïté avec les métropoles. On retrouve le poids considérable de Paris dans
cette géographie, mais également d’autres métropoles comme Grenoble (spécialisée dans la haute
technologie), Toulouse (aéronautique), Lyon (activités bancaires) etc.

- Une concentration de l’innovation dans les métropoles comme politique assumée

Figure 6 : nombre d’établissements innovants dans les pôles de compétitivité, et part des
établissements innovants par zone d’emploi Source : http://www.observatoire-des-
territoires.gouv.fr/observatoire-des-
territoires/sites/default/files/documents/3_Fiches_thematiques_Economie.pdf

- les stratégies des élus locaux

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L’action publique est également à analyser pour comprendre le poids croissant des métropoles. Nombre
d’élus cherchent à faire de leur ville une métropole suivant diverses approches. Si les années 1980-1990
ont beaucoup misé sur l’arrivée d’axes de transports permettant une bonne connexion aux flux
mondialisés – on peut penser par exemple au cas de Lille, qui développe Euralille, son centre d’affaires
en lien avec le TGV, l’influence des thèses de R. Florida a contribué à ce que l’accent soit moins mis
désormais dans les politiques locales sur le « Business Climate » que sur le « People’s Climate », c’est-à-
dire sur le développement d’aménités culturelles supposées susceptibles d’attirer la population
innovante tant recherchée. C’est dans cet esprit qu’il faut placer les stratégies de Lille ou Marseille,
successivement capitale européenne de la culture en 2003 et en 2014, Bordeaux classée à l’UNESCO
etc, La première caractéristique métropolitaine recherchée est donc liée à la notion de masse critique
faisant intervenir des effets de seuil à la fois quantitatifs (équipements lourds...) et qualitatifs (mutation
des universités, équipements d’affaires, culturels...). Apparaissent également les notions d’excellence
(services de haut niveau, qualité architecturale, qualité de l’offre culturelle) et de nouvelle image
urbaine.

Sont aussi recherchées des fonctions jugées « métropolitaines » : fonctions d’exception plaçant la ville
dans la trame des métropoles internationales, gamme importante d’activités, de fonctions tertiaires
supérieures… L’accessibilité, décisive pour la fonction internationale ou la fonction d’affaires, est
également mise en exergue : investissements d’accessibilité majeurs comme l’aéroport et les carrefours
de correspondances aériens ; mais aussi les autres nœuds de transports matériels (TGV, routiers,) ou
immatériels (technologies de l’information et de la communication).

Au total donc, le peuplement de la France se voit largement restructuré depuis quelques dizaines
d’années par le phénomène majeur que constitue la métropolisation, et qui concentre les hommes
autour de quelques grands pôles disposant de nombreux emplois, de capacités d’échange avec le
monde, d’instrument de formation et d’aménités culturelles. Ces dernières caractéristiques jouent un
rôle croissant dans la localisation des activités à un moment où les ressources et matières premières,
qui ont longtemps largement contribué à la géographie du peuplement, n’interviennent plus de manière
aussi décisive dans le processus productif. Quelles sont les conséquences aux échelles inférieures de ce
mouvement global ?

5) Des recompositions territoriales majeures à toutes les échelles

a. à l’échelle nationale : la remise en cause limitée de la macrocéphalie parisienne

Outre qu’elles stimulent des pôles de recherche, les métropoles régionales sont les points de rencontre
structurants de nos territoires sur les flux d’échanges européens et mondiaux ; certaines se développent
en franchissant les frontières. Quelques-unes ont, au-delà de leur impact national, un rayonnement
international.

Mais au total sommes-nous parvenus, à l’équilibre territorial que souhaitaient, dans les années soixante,
les inventeurs des « métropoles d’équilibre » ? Globalement, au niveau du pays, un certain rééquilibrage
paraît s’être opéré.

Toutes les métropoles, à l’exception de celles de Grenoble et du Grand Paris, ont un taux de croissance
démographique en hausse entre les périodes 2006-2011 et 2011-2016

14
Parmi les anciennes métropoles d’équilibre (Lille/Roubaix/Tourcoing, Nancy Metz, Strasbourg, Lyon-
Saint-Etienne-Grenoble, Marseille, Toulouse, Bdx, Nantes Saint Nazaire), la croissance démographique
reste vive. Ainsi, depuis 2011, Depuis 2011, le rythme de croissance de la population dépasse 1,0 % par
an dans six métropoles : Montpellier, Bordeaux, Nantes, Rennes, Toulouse, et Lyon.

Figure 7 : Variations de population des aires urbaines entre 1975 et 2007, source : Wolff M., Fol S., Roth
H., Cunningham-Sabot E., « Shrinking Cities, villes en décroissance : une mesure du phénomène en
France », Cybergeo : European Journal of Geography [Online], Regional and Urban Planning, document
661, Online since 08 December 2013, URL : http://cybergeo.revues.org/26136.

La carte suivante met en évidence le taux de variation élevé d’un certain nombre de métropoles entre
2011 et 2016, alors que Paris connaît une croissance moyenne : c’est le cas de Lyon, Rennes, Toulouse
ou Lyon par exemple.

15
Figure 8 : Taux de variation annuel de la population entre 2011-2016 dans les grandes aires urbaines,
Source : INSEE, op. cit.

Cependant, l’agglomération parisienne continue en parallèle à croître, suivant une dynamique de


« croissance moyenne » d’après l’INSEE : les effets de rattrapage sont donc limités.

Plus encore, la faiblesse des grandes villes françaises par rapport à l’ensemble des « villes de taille
européenne » persiste. Elles attirent encore difficilement les institutions et les entreprises d’envergure
internationale.

Six ou sept grandes agglomérations de province connaissent un processus manifeste de métropolisation


et tendent à s’organiser en conurbations. Comme d’autres pays européens, le territoire français connaît
donc une sélection de ses villes par la démographie. Néanmoins, dans le classement des villes
européennes millionnaires, Lyon et Marseille ne se placent qu’au-delà du vingtième rang. Les sept
ensembles régionaux (Lyon-Grenoble-Saint-Étienne, Marseille- Aix-Etang de Berre, Lille-Roubaix-

16
Tourcoing, Bordeaux, Toulouse, Strasbourg, Nantes) ne représentent que le tiers des emplois
métropolitains parisiens.

L’ensemble Lyon-Grenoble-Saint-Étienne constitue, loin derrière Paris, la seule entité provinciale


cumulant plus de 5 % de l’emploi national.

Par ailleurs, si la prime démographique est bien sélective, elle n’est que quantitative. Seule Lyon semble
émerger avec une population qui augmente, des fonctions métropolitaines qui se solidifient et
rayonnent, des échanges extérieurs qui se développent et, une croissance sur des fonctions généralistes
qui n’empêche pas celle de villes plus spécialisées de la région comme Grenoble, Chambéry ou Annecy.
Les villes de province les plus puissantes sont encore loin de leurs grandes concurrentes européennes.

En termes de répartition, d’organisation et de fonctionnement du territoire, l’héritage reste marqué par


une division spatiale des compétences reflétant une position hiérarchique de Paris et de l’Ile-de-France
qui agissent comme centres de commandement de l’ensemble des autres régions.

La population de Paris dépasse de loin celle de la deuxième ville du pays. En 2015, l’aire urbaine de Paris
rassemblait 12 millions d’habitants, contre 2,2 millions pour celle de Lyon. Seule la capitale combine
concentration économique et concentration des grandes fonctions, productivité d’échelle et
productivité de réseau. L’Ile-de-France pèse toujours très lourd dans la distribution territoriale des
emplois et dans son évolution, notamment pour ce qui relève des emplois qualifiés. L’influence
parisienne s’étend à la Picardie et dans une moindre mesure aux régions avoisinantes.

La question du déséquilibre entre Paris et le reste du pays demeure une question centrale en termes
d’aménagement. La métropolisation n’induit qu’un rééquilibrage modeste, tant du point de vue de la
population que de l’activité.

b. à l’échelle régionale

La métropolisation provoque souvent le creusement des écarts entre les villes les plus importantes et
les autres villes. Elle ne profite aux villes moyennes que sous certaines conditions : participation à des
réseaux, implication dans des relations avec des métropoles et proximité géographique et temporelle.
Ainsi la proximité peut permettre aux villes moyennes de bénéficier des services de la métropole et
d’être prises dans le mouvement de dynamique métropolitaine. A l’inverse, si elles sont isolées, cette
dynamique risque de se réaliser à leur détriment.

La métropolisation modifie, en l’inversant, le rapport des villes à leur région géographique : Celle-ci
constitue de moins en moins un arrière-pays approvisionnant la ville-centre. Réciproquement, la ville-
centre offre à la région non seulement des services de niveau supérieur, mais surtout l’accès aux réseaux
de globalisation.

Le développement (ou l’atonie) d’une région et donc de ses territoires les plus reculés est fonction du
type de développement de sa métropole ou de son réseau de villes.
A titre d’exemple, Francis Ampe cite l’implantation de Toyota à Valenciennes, décision qui résulte
largement de la qualité de l’accueil que la ville a su réserver aux investisseurs japonais en quête d’un
territoire d’implantation. « Mais peut-on sous-estimer, dans l’évaluation des facteurs de ce succès,
l’impact de la proximité de Lille ainsi que l’attractivité de ses équipements, de son image ? ». Si l’on en
doutait, il suffirait d’analyser les lieux où les cadres supérieurs de Toyota ont, in fine, décidé de loger

17
leur famille : Lille a joué un rôle essentiel, tout comme la région a pesé de tout son poids et de tous ses
moyens dans la décision d’implantation de Toyota à Valenciennes.

L’intérêt de la solidarité ville-région peut aussi être illustré par l’exemple du TGV Nord. Dans le Nord-
Pas-de-Calais, lorsqu’il s’est agi d’établir la gare TGV au centre de Lille, la contribution sollicitée par la
SNCF à la région représentait 400 millions de francs. L’association TGV-gare de Lille, qui réunissait les
forces vives de la région et notamment les principales villes, a obtenu l’accord d’une participation
financière du conseil régional en contrepartie d’une négociation avec la SNCF qui permettait de
desservir toutes ces villes par le TGV. Le TGV Lille-Paris devenait ainsi un outil d’irrigation de toute la
région.

On pourrait de même citer Sophia Antipolis, qui n’aurait pas connu un tel succès sans la proximité
niçoise, son aéroport, ses aménités etc. Malgré l’affirmation d’un contremodèle urbain, la technopole
ne se conçoit que grâce à la proximité de la ville.

On retrouve donc dans les faits ce qui avait plus ou moins été théorisé par F. Perroux et ses pôles de
croissance, et qui avait orienté la politique des métropoles d’équilibre. La croissance de la métropole
est souhaitée dans les politiques d’aménagement, puisque censée rejaillir sur le reste de sa région dans
des conditions favorables.

c. Des conséquences à l’échelle de l’agglomération

D’autre part, la concentration de la population et des emplois, s’est accompagnée d’un étalement
urbain considérable autour des métropoles. C’est la périphérie des ensembles métropolitains qui a
connu les plus fortes croissances à partir des années 1960-70. Initialement marquées par de faibles
densités de population, ces périphéries sont progressivement bâties en raison de l’évolution des
attentes en termes de cadre de vie, des coûts fonciers moindres, qui rendent possible l’accès à la maison
individuelle à de nombreux ménages, désormais plus mobiles grâce à l’usage de la voiture.

La notion de périurbanisation s'impose dans les années 1980 et le périurbain devient une catégorie
statistique officielle de l’INSEE en 1996. Par périurbanisation on entendra l’urbanisation se réalisant
autour des agglomérations mais, d’un point de vue morphologique, en rupture avec le bâti urbain
préexistant, et le plus souvent au détriment des espaces agricoles et naturels avoisinants.
Statistiquement, des définitions ont été proposées, induisant par ailleurs une réflexion sur la
dépendance à l’espace urbain, notamment en termes d’emplois : Une commune périurbaine au sens
de l'INSEE voit au moins 40 % de sa population résidente ayant un emploi travailler dans le pôle urbain
ou dans les communes attirées par celui-ci.

On comptait plus de 14 millions de périurbains lors du recensement de 2008, soit 23.8 % de la


population de la France métropolitaine. L’accroissement de la population périurbaine a été fort du
milieu des années 1970 au début des années 1990 mais la croissance des pôles urbains et des couronnes
périurbaines tend depuis à sa rapprocher.

En 2011, la France périurbaine comptait 15,3 millions d’habitants, dont 12 millions dans les couronnes
des grandes aires urbaines et 3,3 millions dans les communes multipolarisées, soit près d’un quart de la
population métropolitaine. Cette population se répartit sur un espace vaste (38 % du territoire

18
métropolitain pour 24 % de la population) avec une densité moyenne de 74 hab/km², faible au regard
de la moyenne nationale fixée à 103 hab/km².

Cet étalement urbain s’accompagne de l’émergence de nouvelles centralités, bien documentées dans
le cas parisien, mais qui se retrouvent dans de moindres proportions dans les autres métropoles. Ces
centralités s’entendent d’un point de vue économique, mais aussi démographique : le regroupement
des emplois dans des centres secondaires de l’agglomération modifie les territoires de vie et rend caduc
un modèle où seule la ville-centre polarise les différents flux.

Dans les aires urbaines, les taux d’emplois métropolitains supérieurs diminuent lorsqu’on s’éloigne de
la ville-centre, selon le modèle parisien : de 19,3 % dans la commune de Paris, à 6,6 % dans sa couronne
périurbaine en passant par 15,7 % en banlieue. Mais de nouvelles centralités sont progressivement
apparues : La Défense, la ville nouvelle de Cergy ou encore le pôle de Roissy. En région, le taux est
sensiblement plus élevé à Villeurbanne qu’à Lyon, et deux fois plus important à Villeneuve-d’Ascq qu’à
Lille. Ce qui témoigne clairement de l’émergence de centralités secondaires, autour des villes nouvelles,
mais pas seulement. Les travaux de Ludovic Halbert d’un point de vue économique, et plus largement
de Chemetov et Gilli dans le cadre de leur réflexion sur le grand Paris, rendent compte de cette
complexification des agglomérations, dans leur structure et dans leur fonction.

Les services financiers, les fonctions d’affaires et les services administratifs d’Etat restent dans les
centres-villes. Les transports et les activités logistiques, de communication et de commerce de gros se
localisent en périphérie à proximité des nœuds autoroutiers. Les entreprises de recherche-
développement et celles à fort contenu technologique innovant se localisent en première couronne
(accessibilité parking, proximité d’espaces résidentiels, aspect paysager). Les villes-centres voient
diminuer leur poids économique au profit d’espaces technopolitains en première couronne (Meylan
pour Grenoble, Labège pour Toulouse…). Les villes-centres voient diminuer leur poids économique au
profit d’espaces technopolitains en première couronne (Meylan pour Grenoble, Labège pour
Toulouse…). Des ensembles urbains complexes se constituent : polycentrisme ou corridors le long des
infrastructures (entre l’aéroport et la ville par exemple).

Cette croissance périurbaine s’accompagne de problématiques d’aménagement spécifiques :

- La consommation des terres agricoles : ainsi, en Languedoc-Roussillon, l’étalement urbain


s’opère en grande partie au détriment du vignoble de la plaine littorale. En région parisienne,
l’exemple emblématique de la plaine maraîchère de Montesson, progressivement grignotée par
les habitations et les infrastructures témoigne du même phénomène
- La fragilité économique d’une large part des populations périurbaines, repoussées des centres
par le marché immobilier, a constitué un objet d’étude et d’inquiétude dans les années 1990 et
au début des années 2000. Les « captifs » du périurbain mis en lumière par les premiers travaux
de L. Rougé sont en effet des ménages sans réelle capacité d’accès au bassin d’emploi de la
métropole, et fragilisés par le coût des transports.
- Les phénomènes ségrégatifs qui se déployaient traditionnellement entre les quartiers de la ville-
centre s’étendent aujourd’hui aux communes de la vaste région métropolitaine. Processus
inconscient ou volontaire, la ségrégation résidentielle se traduit par une concentration des
populations selon leurs caractéristiques et, spatialement, par une spécialisation des territoires
et une organisation qui se décline en sous-espaces homogènes entretenant de faibles relations
(notamment dans la fréquentation des services et des équipements publics de proximité).

19
Ainsi donc, la ville-centre fait place à un archipel urbain qui s’étend au-delà des frontières traditionnelles
des banlieues et où, en outre, coexistent de plus en plus difficilement les déplacements liés à la
distribution du fret et les déplacements des individus.

Si le phénomène de périurbanisation est général et concerne toutes les grandes villes françaises, son
ampleur est variable selon les aires. Il est généralement important quand la taille de l’aire et sa vitalité
sont grandes.

Cependant, un phénomène nouveau apparaît par rapport aux périodes précédentes : le regain de
certaines villes-centres et le moindre dynamisme, voire le déclin de certaines banlieues.

II LES RENAISSANCES RURALES

Après un siècle d’exode rural, une inversion des tendances démographiques des territoires ruraux
français est devenue observable à compter du début des années 1970. Dans un contexte de croissance
générale de la population française, la métropolisation observée plus haut peut en parallèle
s’accompagner d’une croissance des espaces ruraux, les deux phénomènes étant d’ailleurs notoirement
articulés dans le cadre périurbain.

1) De l’exode rural au renouveau des campagnes : un renversement de tendance

Après une longue période de déclin, puis de stagnation entre 1982 et 1999, la population des espaces
ruraux augmente désormais au même rythme (0,7 % l’an) que l’ensemble de la population française.
Ce renouveau démographique de l’espace rural s’appuie sur une double dynamique : la réduction des
zones de désertification d’une part et l’extension de territoires dont la population croît rapidement
d’autre part. Il est cependant à noter que ces dynamiques sont encore fragiles, et que des périodisations
fines laissent apparaître des inflexions de tendances successives.

En 2011, en dehors des aires urbaines, 11 000 communes sont multipolarisées, sous l’influence de
plusieurs aires sans qu’aucune ne prédomine : 10 % de la population y réside. Signe des nombreuses
interactions entre villes et campagnes, les trois quarts des communes rurales sont sous influence des
villes, dans lesquelles réside un habitant sur cinq. Hors influence des villes, on trouve 5 % de la
population dans 7 400 communes rurales ou petites villes.

Entre 2007 et 2017, la croissance de la population a été plus forte dans les communes peu denses, (+
0,6 % par an en moyenne, soit 0,2 point de plus que celle des communes denses ou de densité
intermédiaire et 0,5 de plus que celle des communes très peu denses). Ces communes peu denses,
peuplées pour 90 % d’entre elles de 200 à 3 000 habitants, se situent pour plus de la moitié (56 %) dans
les couronnes périurbaines des principales agglomérations. Mais ceci dit, les communes peu denses
sont désormais aussi attractives quelle que soit leur distance à la ville : contrairement aux années 1970
où les premiers espaces ruraux à bénéficier des dynamiques de périurbanisation étaient
essentiellement concentrés à proximité des villes, des espaces ruraux isolés gagnent aujourd’hui de la
population grâce à un solde migratoire positif.

20
L’excédent des arrivées sur les départs se généralise dans un nombre de plus en plus grand de
communes mais ce gain ne se répartit pas uniformément sur le territoire. Ce sont d’autres critères,
notamment d’orientations économiques, mais aussi d’attractivité résidentielle qui vont expliquer les
nuances dans l’évolution de ces territoires ruraux. A cet égard, il ne faut pas oublier non plus
l’importance du profil de la population préexistante : dans les communes où la population est très âgée,
l’évolution démographique reste souvent négative. C’est notamment le cas dans de vastes territoires
ruraux de ce que l’on appelait auparavant « diagonale du vide s’étendant des Pyrénées aux Ardennes.

Figure 9 : Typologie des Campagnes de la DATAR en 2011, Source : http://www.observatoire-des-


territoires.gouv.fr/observatoire-des-territoires/fr/typologie-g-n-rale-des-campagnes-fran-aises

A cet égard, la classification établie en 2011 par la DATAR met en évidence la diversité des trajectoires
rurales, tant sur le plan démographique qu’économique. Elle distingue :

- Les « campagnes densifiées, en périphérie des villes, à très forte croissance résidentielle et à
économie dynamique », rassemblent 5,5 millions d’habitants (9 % de la population
métropolitaine) et concerne t 3 000 communes (8 %) sur une superficie de 39000 km² 7 %).
Celles-ci se trouvent surtout dans la proche périphérie des grandes agglomérations et dans les

21
espaces les plus urbanisées (régions Île-de-France et Alsace, département du Rhône, sillon
mosellan et les périphéries de Rennes, Nantes, Toulouse) ; plus rarement, elles apparaissent
dans la périphérie des petites et moyennes villes. Ces communes affichent des densités de
population très élevées et en forte augmentation. Elles bénéficient du desserrement résidentiel
des grandes métropoles et d’un bilan naturel positif grâce à la présence d’une population jeune.
- Les « campagnes agricoles et industrielles » comptent 5,5 millions d'habitants (9% de la
population), soit 10523 communes sur un vaste espace de près de 140 000 km². Les dynamiques
économiques et démographiques y sont très contrastées et les territoires concernés profitent
ou subissent les influences urbaines parfois très lointaines ». Connaissant une faible densité, les
communes ont une population jeune et pour la plupart une croissance démographique due à
un bilan naturel et un solde migratoire excédentaires, mais avec des exceptions : on les retrouve
surtout dans les bordures du bassin parisien.
- Les campagnes « vieillies à très faibles densités » rassemblent près de 5,2 millions d'habitants
sur 12 884 communes, couvrant près de 227 000 km², soit 42% de la population métropolitaine.
Cette catégorie comprend plusieurs sous types fort différents : on y retrouve des campagnes
encore en cours de vieillissement, mais aussi des campagnes connaissant un regain
démographique notable suite au développement touristique ; le solde migratoire positif tient
pour certaines d’entre elles à l’arrivée de retraités des autres régions.

Ainsi de larges territoires, de plus en plus éloignés des villes et du littoral, se densifient significativement,
mais suivant des nuances locales considérables, largement lisibles au prisme de la distance à la ville et
à l’accessibilité des lieux.

Là aussi donc, la diversité des situations prévaut, et il semble impossible de proposer une approche
monolithique de la réalité rurale française. Il s’agit de dynamiques fines, qui témoignent tout à la fois
de la relative difficulté à penser ensemble une France des faibles densités encore en crise
démographique du fait de son vieillissement et des problématiques d’aménagement qui y sont associés
(accès aux services publics, accès aux soins etc.) et des espaces ruraux en plein retournement, habité
par des urbains qui ont « choisi la campagne » au cours de leur vie professionnelle ou durant leurs
retraites et vacances, débouchant sur d’importants transferts financiers entre régions productives et
régions rurales à « forte économie présentielle » (voir les travaux de L. Davezies et M. Talandier sur ces
questions).

III Une population française diverse…et géographiquement hétérogène

1) Une population globalement vieillissante

Comme le rappelle une récente publication de l’INSEE5, la population française connaît un net
vieillissement. « Au 1er janvier 2020, les personnes âgées d’au moins 65 ans représentent 20,5% de la
population […] contre 19,7% deux ans auparavant » et le mouvement va aller en s’amplifiant avec
l’arrivée à l’âge de la retraite des enfants nés durant le baby-boom. La pyramide des âges établie par

5
INSEE Références, 2020, disponible en ligne :
https://www.insee.fr/fr/statistiques/4277619?sommaire=4318291

22
l’INSEE pour 2022 permet de visualiser cette évolution, avec une base rétrécie par rapport aux classes
d’âges plus importantes

Figure 10 : Pyramide des âges en 2022, Source : INSEE, https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381472

Au-delà de ce constat général, il convient également de constater que la répartition des populations
âgées n’est pas homogène sur le territoire (tout comme ne l’est pas, au demeurant, la répartition des
classes d’âge plus jeunes). On observe en effet non seulement une inégale présence des populations
plus âgées, mais aussi une évolution contrastée de leur proportion dans les populations régionales. Ce
constat a été dressé de longue date puisque l’observatoire des territoires a établi dès 2013 une
typologie à l’échelle nationale des situations régionales face au vieillissement. La carte suivante en est
le reflet :

23
Figure 11 : Le vieillissement en France, Source : Observatoire des territoires, 2017, disponible en ligne :
https://www.observatoire-des-territoires.gouv.fr/visiotheque/2017-vieillissement-geographie-du-
vieillissement-en-france

Toutes les régions ne vieillissent en effet pas de la même manière ni dans les mêmes proportions : dans
les zones centrales de faible densité, c’est la dépopulation généralisée qui a perduré jusqu’aux années
2000 qui explique la situation actuelle où l’on observe une population vieillie et bien moindre que dans
le premier vingtième siècle. Dans le cas des littoraux, les dynamiques sont en revanche différentes : le
vieillissement y est en effet largement dû à l’arrivée de jeunes retraités qui s’y installent une fois qu’ils
ne sont plus contraints par la localisation de leur emploi. Inversement, la population des métropoles ne
vieillit que peu.

Cette situation n’est pas sans conséquences en termes d’aménagement : une population vieillissante
nécessite en effet des services spécifiques, que ce soit en termes sanitaires ou d’hébergement.

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2) Géographie de l’immigration

Le Haut Conseil à l'Intégration, définit comme immigré une personne née étrangère à l'étranger et
résidant en France.

La répartition de la population immigrée est particulièrement inégale sur le territoire national, avec
des régions particulièrement marquées par la présence d’étrangers nouvellement arrivés, tandis que
d’autres n’en accueillent que peu.

Figure 12 : La part des immigrés dans la population totale, source : INSEE Première, n° 1591, 2016,
disponible en ligne : https://www.insee.fr/fr/statistiques/2121524

Plusieurs localisations préférentielles apparaissent à l’examen de cette carte : régions frontalières,


régions urbaines principalement, auxquels s’ajoutent quelques espaces ruraux aux dynamiques bien
spécifiques (Corse et Sud-Ouest, pour ne citer que deux exemples). Fondamentalement, la
concentration des emplois dans les métropoles y favorise l’implantation des nouveaux arrivés, tout
comme l’existence d’une communauté préexistante à même de soutenir l’installation des immigrés plus
récents. La concentration des origines peut se retrouver localement, avec des quartiers ou communes
emblématiques de communautés : Montreuil est ainsi connue pour accueillir une très grande
communauté malienne, le XIIIe arrondissement de Paris des immigrés de certaines régions chinoises.

En revanche, au sein du territoire national, les mouvements de la population immigrée apparaissent


limités.

25
3) Les inégalités socio-économiques, des objets géographiques

Hervé le Bras, dans son Atlas des Inégalités, met en évidence la très inégale répartition des catégories
sociales, et notamment en fonction de leurs niveaux de diplômes internes. Ainsi l’on observe une très
forte métropolisation des cadres à haut niveau de diplôme, les ingénieurs en poste dans l’industrie ayant
disparu des autres territoires au gré de la diminution du secteur secondaire. Il en va de même pour les
professions intermédiaires, dont la concentration métropolitaine s’est elle aussi accrue au fil des
décennies. Inversement, les employés et ouvriers les plus qualifiés ne se concentrent plus dans les
métropoles, qui n’accueillent que ceux d’entre eux disposant de moins de diplômes.

Ces éléments contribuent pour partie à expliquer l’inégale répartition des revenus sur le territoire
national, inégale répartition qui peut se lire à grands traits via le revenu fiscal médian par unité de
consommation et par commune.

Figure 12 : Revenu fiscal médian par unité de consommation et par commune, carte obtenue à partir
de france-decouverte.geoclip.fr

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Cette carte met en évidence les revenus fiscaux plus élevés enregistrés dans les ensembles urbains, et
plus encore dans les zones métropolitaines, contribuant à la perception d’inégalités de richesse
importantes.

Pour autant, l’image d’une métropole concentrant toutes les populations aisées doit immédiatement
être nuancée, en constatant que les espaces métropolitains sont surtout marquées par de considérables
inégalités de revenus internes, puisqu’y cohabitent les populations les plus pauvres et les plus aisées.
L’image souvent donnée dans les médias d’une « fracture française » opposant grandes villes et
campagnes doit donc être a minima discutée.

Figure 13 : Indice de Gini par commune en 2022, carte obtenue à partir de france-decouverte.geoclip.fr.

L’indice de Gini, qui établit le rapport entre le décile de la population le plus pauvre (1er décile) et le plus
aisé (9e décile), témoigne de ces très fortes inégalités locales, tant dans les métropoles (Paris, Lille, Lyon
ou Marseille) que dans certaines régions aux profils variés : Hauts de France, littoral méditerranéen
notamment.

27
Au total, la géographie du peuplement français et ses évolutions témoigne de la multiplicité des logiques
en jeu dans la répartition de la population. Elle témoigne aussi de bouleversements rapides et majeurs
depuis quelques décennies : si le peuplement connaît des phénomènes d’inertie liés à l’ancienneté de
l’implantation humaine, dans le cas de la France, les logiques d’hier et d’aujourd’hui ne sont pas
toujours contradictoires, contribuant tout à la fois à renforcer les principaux pôles du pays, au premier
rang desquels on compte Paris, et à redynamiser des espaces périphériques longtemps peu peuplés et
en diminution, qui bénéficient aujourd’hui de la proximité physique ou de l’usage conjoncturel des lieux
par les urbains, ce qui semble confirmer la pertinence de l’évolution des zonages proposée par l’INSEE
depuis 2011.

Quoi qu’il en soit, les répartitions et dynamiques observées témoignent de fortes différences, parfois
ressenties comme des disparités par les populations concernées, ce qui invite, bien évidemment à y
réfléchir dans une perspective d’aménagement du territoire.

28

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