Bulletin de psychologie

Le test de Rorschach
Nina Rausch de Traubenberg

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Rausch de Traubenberg Nina. Le test de Rorschach. In: Bulletin de psychologie, tome 22 n°278, 1969. pp. 1059-1075;

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N. RAUSCH DE TRAUBENBERG

Le test de Rorschach

elle-même il y a une passivité de la part du

OULES« CHROMOSTHESIQUES
REPONSES
C - CF - COULEUR
FC » : sujet, attitude révélée par les expressions ima¬
gées : « Voir rouge », « Etre saisi de pitié ».
moins
Trois : points de vue se rejoignent plus ou
Ici, l’interprétation est beaucoup plus facile :
le déterminant est donné par la perception ; • La perspective phénoménologique :
il s’agit d'un élément sensoriel, d’une caracté¬
ristique du monde extérieur. L'étymologie même des mots « affect » ou
« émotion » suppose que quelque chose est
La contribution majeure de Rorschach est « fait » à quelqu'un, que quelque chose émeut,
d'avoir étudié la perception visuelle en fonc¬ fait « mouvoir ». L'état du sujet est donc
tion de toute la personnalité ; le postulat posé passif au départ.
par lui est une découverte majeure.
• Perspective
reprise du point de vue freudien :
de Rorschach
L’interprétation
et de sesclassique
continuateurs Décharge, passive également, vécue et con¬
Souligne trois aspects de la signification de trôlée par le Moi. Ce concept de passivité est
la réponse couleur : assez attrayant.
— type d'expression active, • Essais de conceptualisation :
— mode de contrôle
de l’action ou de l'impulsion, a) Schachtel défend cette position : il in¬
— tendances extratensives. siste sur le caractère passif de l’expérience
couleur (sans organisation, sans intervention
Les éléments de la réponse couleur présen¬ d’intermédiaire (réflexion), d’une expérience
tent des variations interindividuelles très gran¬ indifférenciée vécue de façon personnelle, voire
des, que ce soit chez les sujets normaux ou primitive), mis en rapport avec le caractère
les sujets « pathologiques ». passif de l'expérience affective. Concept de
Il s’agit d'une réaction spontanée répondant passivité perceptive.
à une situation extérieure : considérant que b) Rickers insiste à nouveau sur ce carac¬
la couleur stimule l'affectivité, on apprécie le tère direct, immédiat et indifférencié. Elle
mode de maîtrise des impulsions et des af¬
fects positifs et négatifs de ce rapport cou¬ souligne
est rarement
le faitneutre
que l’influence
: soit les de
couleurs
la couleur
atti¬
leur-affect. (Rorschach disait que la liaison rent, soit elles repoussent.
causale restait à définir; elle reste toujours
à définir.) Le rationnel des réponses couleur raisonnement
c) Rapaport : reprend
Utilisantson
la cadre
notion habituel
freudienne
de
n'est guère élaboré non plus.
de détour, de capacité à différer la décharge
affective, il compare l'intégration de l'impact
Le rationnel de la réponse Couleur couleur dans la forme articulée (capacité à
différer l’impulsion, surtout en cas de FC) à
la simple « nomination couleur » (incapacité
d’association, donc d’anticipation et de prévi¬
sion).
A partir de ces trois points de vue, Shapiro
quiLenous
ne
c'est
existe
et
sujet.
cas
affecté;
direct
et, nécessite
qui
fonde
: processus
un
ledeux
Ici,
immédiat
plus
sujet
le
: processus
ladu
nous
types
type
ni
réponse
est,
est
perceptif
sujet
effort,
; de
sommes
d’où
de
réceptif,
dans
essentiellement
F.
relation
àrelation
nil'attitude
l’objet,
Percevoir
l'expérience
est
volonté,
dans
passif,
différent
entre
estdele
deune
ni
un
impuissant,
l’objet
passif.
le
deuxième
passivité,
activité;
affective
de
rapport
couleur
monde
celui
au
Il élabore un concept : il propose le concept
de passivité perceptive en face des stimuli
visuels, attitude qui suppose un arrêt du tra¬
vail actif d'organisation ou une incapacité à
accomplir ce travail. Il argumente à partir
de différents types d'études :
1060 BULLETIN DE PSYCHOLOGIE
— sur le développement de l’enfant,
— en psychopathologie adulte,
— en psychophysiologie de la vision sur
sur handicapés visuels et aveugles
opérés.
Son concept rejoint la théorie de Binder
concernant l’émotion : il distingue le facteur
réceptif passif (qui correspond à l’affect) du
facteur formatif actif qui correspond à l’in¬
terprétation F).
a) Etudes de développement.
Le jeune enfant est très dépendant envers
les stimuli, « lié aux stimuli » (cf. théorie de
Werner), mais il est difficile de prouver quel
est l'impact de la couleur ; en effet, il faut
dissocier : un très vif attrait pour la couleur
peut ne pas être accompagné de réponses
intégrant la couleur ; il existe une divergence
entre l’intérêt et l’association, l’intérêt se ma¬
nifestant par des exclamations, des mimiques
d’excitation, des signes de contentement... Vers
3-4 ans, même si l'enfant est excité par la
couleur, il ne donne pas de réponse C asso¬
ciée à un engramme précis mais des nomi¬
nations de couleurs : « du rouge », « du vert ».
Après, les couleurs correspondent à des as¬
sociations : les RC augmentent jusque vers
6 ans ; après 8 ans, elle diminuent au profit
des C F, puis des F C, en raison d’une plus
grande intégration de la couleur à lar forme.
Ici le concept de Shapiro est vérifé, mais
la couleur suit un développement moins res-
tiligne qu’on ne l’avait pensé.
b) Application des « sorting-tests »
(tests de pensée catégorielle,
classifications)
aux malades mentaux.
Les malades mentaux graves (schizophrènes
chroniques ou malades organiques) manifes¬
tent leur désorganisation et le caractère pri¬
mitif de leur pensée par des classifications
à base C. Ceci est appuyé par une certaine
passivité dans le comportement : la couleur
devient une emprise.
Etude de N. Rausch avec le « stencil design »
(test des pochoirs). Les schizoïdes font un
travail rationnel, logique, comme si la cou¬
leur n’existait pas. Les épileptiques, enfants
et adolescents, sont envahis par la couleur.
c) Etudes de pathologie visuelle
sur des aveugles opérés
qui recouvrent la vue.
Les premiers essais de reconnaissance du
monde extérieur se font :
— par les effets de luminosité,
— par les effets de la couleur.
Les spécialistes considèrent que la recon¬
naissance des formes signifie une rééducation
pratiquement terminée.
La couleur a donc une signification très im¬
portante pour les enfants jeunes, les malades
et les handicapés, partout où il y a insuffi¬
sance d’organisation perceptive, que ce soit
par immaturité, par déficience ou par absence
d'équipement.
La perception de la couleur est-elle antago¬
niste de la perception de la forme ? Elle
n’exige pas de capacité d’organisation et se
satisfait d'une attitude passive de la part du
sujet. Ceci est vrai dans un premier stade
de développement, mais, dans un second
stade, la couleur prend un sens d’activation
et d’articulation : elle permet de mieux déli¬
miter certaines formes ; elle enrichit, rede¬
vient active, participant à une organisation
du monde extérieur. On a tendance à souli¬
gner le premier aspect, ce qui est dangereux,
car la couleur n'est pas toujours désorgani-
satrice ; elle enrichit et individualise les per¬
ceptions.
LES FACTEURS COULEUR
DANS LA REPONSE :
C - CF - FC
Les trois symboles proposés ne couvrent pas
toute la variété des réponses couleur, elles
indiquent surtout le poids relatif de la cou¬
leur, pondéré quantitativement. La somme ob¬
tenue
tionnelle.
(SC) témoignerait de la réactivité émo¬
a) Première étape
de la perception couleur
lence,
Rorschach
La nomination
certains
la cotait
auteurs
estet souvent
la
ne comptait
la cotant
passéecomme
pas.
sousMais
un
si¬
C (1,5), position qui paraît justifiée. Il s'agit
d’une réaction immédiate et passive ; le cri¬
tère en est l’absence d’interprétation. Exem¬
ple : « Ça c’est rouge » ; le sujet ne peut pour
la même localisation fournir d’interprétation.
Si le sujet commente : « C’est beau... », ce
n'est plus une nomination.
Vers 8 à 12 ans, certaines réponses peuvent
être prises pour des nominations de couleurs
quand il s'agit en réalité d’une attitude sco¬
laire descriptive.
On trouve les nominations de couleurs vers
34 ans ou, dans les cas de désorganisation
mentale grave chez les adultes ; ce ne sont
pas des réactions normales.
b) C pur
La couleur est rapportée à une expérience
vécue ; elle a un contenu. Le cas du rouge
est un peu différent (« sang, feu, guerre... »)
du cas des couleurs pastel (« aquarelle, rêves,
peinture, herbe »). Il existe des exemples plus
pathologiques, surtout à la planche IX : « vian¬
de avariée », « les « crachats de tuberculeux »
ou « effets de la gangrène » représentant des
réponses très désorganisées.
La consonance affective est tantôt négative,
tantôt positive, de façon plus ou moins in¬
tense selon le type de couleur.
La seule présence de la réponse couleur ne
 N. RAUSCH DE TRAUBENBERG : LE TEST DE RORSCHACH
peut avoir, à elle seule, une valeur diagnos¬
tique.
Il est trop shématique de dire que la pré¬
sence d’un C est signe pathologique. La ré¬
ponse C signifie une sensibilité indifférenciée,
mais celle-ci s’exprime :
— soit en attitude active, directe, impulsive ;
— soit en attitude très retenue, éloignée,
imprécise, ambiguë ou même abstraite ;
— soit sous un mode encore plus organisé
et plus morbide («viande avariée »...).
Il existe donc au mois trois types de réac¬
tions colorant les protocoles de façon diffé¬
rente. Il est rare qu’ils apparaissent dans le
même protocole : nous trouvons soit un in¬
térêt pour le rouge et un désintérêt pour le
pastel, soit l’inverse. Mais il existe :
— la combinaison C rouge, impulsif (« sang,
feu, incendie »...), lié à une réactivité pas¬
tel du type anatomique ou du type mor¬
bide ;
— plus rarement, la combinaison C rouge,
impulsif, associé à une réaction « artis¬
tique » aux planches pastel, qui a pour
effet de distancer l’impulsion.
Il faut toujours tenir compte du contexte
de la réponse à l'intérieur du test, de sa to¬
pographie dans la planche, de sa position
(réaction première, ou unique, ou réaction plus
tardive). Il est important d’indiquer la ma¬
nière d'exprimer et la capacité de retenir ou
surmonter les tendances impulsives ou agres¬
sives pour donner une signification précise
aux réponses C. Le C reste résonance immé¬
diate, mais il existe des manières très diffé¬
rentes de l'intégrer.
Il ressort de ce qui précède que le C peut
indiquer :
— l'impulsivité : décharge impulsive agres¬
sive ;
— un élan passionnel tout à fait généreux
et, surtout chez les jeunes enfants, un
besoin aigu d'attachement ;
— une crainte
impressionabilité
de déstructuration.
passive, constante ;
Un seul symbole recouvre donc des méca¬
nismes très différents ; il n’y a pas de mo¬
dulation de la réponse couleur, peut-être à
l'exception des rares protocoles où se trou¬
vent représentés les trois types de contenus.
Il n’y a donc pas d’interprétation automa¬
tique des réponses C : certaines sont patho¬
logiques, d’autres ne le sont absolument pas ;
on trouve des C purs chez les malades orga¬
niques, dans la névrose de caractère avec
traitsOnnarcissiques
sifs. en trouve ou: avec des traits impul¬
— chez les adolescents, mais ils sont sou¬
vent réprimés ;
— dans la série maniaque ;
— chez les personnalités hystéroïdes ;
— dans les grands déséquilibres.
c) CF
Ici le garde-fou est représenté par l’élément
formel, essai d’adapter la réaction immédiate.
1061
Cette réponse est beaucoup plus fréquente
que le C ; on y voit mieux le lien entre la
couleur et la labilité des affects, mais elle
est plus difficile à interpréter.
On assiste à une progression très régulière
des CF avec l'âge, jusqu’à 7-8 ans où ils cul¬
minent, puis diminuent. Les CF sont le signe
d’une qualité enfantine de réaction : sponta¬
néité, suggestibilité par rapport au stimulus,
donc attitude captative et égocentrique de l’en¬
fant qui ramène les choses à lui ; cette atti¬
tude est normale ; elle suppose aussi un be¬
soin d'expression.
Exemple : Planche II : « sang » ou « feu »
sont des C ; alors que « langue de feu », « ta¬
che de sang », « coucher de soleil », « rouge
baiser » sont des C F. Ici, l’élément formel
est un appui ; quelquefois un élément spatial
est interprété.
Exemple : Planche IX, en G, la démarcation
des couleurs : « un incendie, les arbres, les
flammes, la bruyère en bas ».
sité
C Fémotionnelle
ne comporte: ilpasexiste
toujours
une foison
cette deinten¬
ré¬
ponses de type artistique, pseudo-artistique ou
esthétique ou de type artifice (« bijoux »,
« fleurs »...). Quand cette intensité émotion¬
nelle n’est que moyenne, accompagnée de con¬
tenus nettement plus neutres, il convient de
donner aux réponses C F une signification
moins extrême. En effet, ces réponses cor¬
respondent à une gamme de réactions émo¬
tionnelles courantes et à un vécu plus super¬
ficiel ou émotif et non à un vécu pulsionnel
ou désorganisé.
Pourtant il existe des C F morbides ou pa¬
thologiques qui apparaissent aux planches
pastel,
de F contribue
surtout àà lalesplanche
dédramatiser
IX. La : présence
elle re¬
présente une tentative d'adapter la réaction ;
même si ce n'est pas très efficace, l’impact
du sensoriel est un peu moins intense.
Les CF ont donc une signification de labi¬
lité émotionnelle, souvent faite d’impatience,
d’une rapidité de changement d’humeur. Us
dépendent de facteurs temporels : rapidité de
réaction, retournements, d'autant plus nom¬
breux qu'il y a plus d'instabilité.
Il ne faut pas négliger l’aspect positif des
C F : chaleur de communication, échange,
ouverture, spontanéité dans l'abord d’autrui.
Le sujet syntone est un sujet C F : il peut
être capricieux, irritable, fantasque, mais aussi
plus ou moins enfant, avec des réactions plus
ou moins ludiques (dans ce cas, les CF se
combinent avec des kan), et même ici il faut
se garder d’insister toujours sur l'aspect né¬
gatif : les auteurs anglais insistent sur la
« joie de vivre » des «CF kan ».
A côté des facteurs temporels, l'alternance
de la qualité formelle est une donnée très
importante :
— soit, par ailleurs, un contexte de F + ;
il s'agit alors plutôt d'impressionnabilité,
de perméabilité, de vulnérabilité, la réac-
1062 BULLETIN DE PSYCHOLOGIE
tion formelle indiquant une possibilité
de reprise en main ;
— soit une alternance de F+ et de F— ,
signifiant une instabilité des réactions et
de la concentration.
En cas d’absence de réponses K, la labilité
domine ; le caractère devient une formation
névrotique (névrose de caractère). De plus,
s’il s’y ajoute des Dbl, il s'agit d’irritabilité.
En cas d'hystérie (non d'hystérie de conver¬
sion, qui se traduit plutôt par une absence
totale de réponses couleur, la répression étant
telle qu’elle aboutit à une somatisation, les
réponses sont souvent de caractère puéril) ou
de manifestations hystéroïdes, surtout fréquen¬
tes chez les adolescentes, les protocoles sont
envahis par des réponses CF et C.
Dans tous les cas d’attitudes névrotiques,
qu’elles soient narcissiques ou impulsives, avec
relâchement, oscillation entre le rationnel et
le sensoriel, on trouve une dominante CF si¬
gnifiant labilité, incapacité de différer l'ac¬
tion et la gratification.
Il faut retenir le fait que le CF n’est pas
pathologique. Il a une résonance d’immatu¬
rité, mais il est important de garder une
certaine souplesse de réaction émotionnelle
et de pouvoir relâcher les fonctions de con¬
trôle logique.
Il existe des CF «forcés» (ou des C, ou
des FC) où la couleur n'a pas de valeur af¬
fective en soi. Ici, la couleur est traitée de
façon arbitraire.
Exemple : R Géo : « Plaine de Russie, parce
que c'est vert... » Il s’agit d'un éloignement ;
le sujet intellectualise, socialise, scolarise
l'émotion.
Même en cas de protocoles d'enfants, cet
aspect est toujours intéressant, le sujet ne
pouvant donner ses réactions que sous un jour
superficiel et socialisé.
Les sujets plus atteints n’utilisent le C que
de cette façon : tout en reconnaissant la pré¬
sence de la couleur, ils lui nient toute valeur ;
il s'agit soit de « défense », soit de schizoïdie,
« inaffectives », chez des sujets qui ne veulent
pas donner
sens émotionnel.
valeur à leur réaction dans le
d) FC
Ici, la couleur est intégrée à l’élément for¬
mel, celui-ci étant en principe adéquat ; il
semble qu’elle l’enrichisse. La position res¬
pective des éléments indique le contrôle du
rationnel.
Les FC apparaissent essentiellement en D,
alors que les C et les C F sont plutôt ai G.
(Le G FC est rare, souvent intéressant et
original ; il démontre le rôle enrichissant de
la couleur.) La limitation rend le contrôle
plus facile. Ici, le vécu n'est pas un désarroi
ni une emprise ; l’affect assouplit les fonc¬
tions de jugement, les rendant plus indivi¬
duelles et plus subjectives. La présence de
la couleur est un élément positif : on a beau¬
coup parlé d’intégration pour les réponses F C,
insistant sur la difficulté que représente l'in¬
tégration de la couleur à la forme.
Certains F C sont donnés sans effort.
Exemple : Planche III : « papillon rouge » ;
l'intégration est facile, indiquant un simple
désir de socialisation ou simplement de doci¬
lité et de soumission par rapport au logique,
au concept « banal » (socialisé), évoqué par
un stimulus très prégnant : « la couleur a
joué un peu » disent les sujets.
Il existe d'autres FC plus personnels, va¬
lorisant l'affect : ils représentent le lien ob¬
jectai, alors que les CF représenteraient plu¬
tôt le lien captatif.
Le rationnel des réponses F C paraît plus
difficile à comprendre ; cette notion d'inté¬
gration (de la couleur à la forme) n'est pas
simple.
Que se passe-t-il exactement ?
a) Dans certains FC, il s'agit d’une espèce
d'adaptation sans effort, d’un désir de socia¬
lisation et de dépendance.
Exemple : rouge médian de la Planche III :
« papillon » ; ici le FC ne paraît pas avoir
de valeur personnelle d'effort d’adaptation ;
le fait d’accepter la suggestion prouve une
facilité de socialisation ; en effet, la forme
s’impose et le concept est banal.
b) D'autres FC ont une signification plus
personnelle, tenant compte d’autrui ; ce sont
de bons F C ; surtout si la forme est origi¬
nale, ils expriment une possibilité de lien ob¬
jectai
fective en
infantile
contraste
donnée
avecdans
la revendication
les CF à carac¬
af¬
tère spontané et primesautier.
Rorschach dit que le FC est encore «labi¬
lité affective», et il ajoute qu'il est base de
la « capacité de contact » et volonté d'adapta¬
tion.
REPARTITION DES FC :
a) Quelques FC seulement aux planches
pastel et sans autre représentant couleur. Ici,
il s'agit d'un contrôle (le sujet se surveille,
n’exprimant rien de pulsionnel), d’une inhibi¬
tion affective ; la sensibilité existe, mais ti¬
mide, réfrénée (non-utilisation du rouge).
b) F C distribués à travers cinq planches
(deux rouges et trois pastel), accompagnés
de liberté
la CF ou des
mêmemanifestations
de C. Cette diversité
émotionnelles
exprime
et
le fait que le sujet les assume.
c) Surenchère de réponses FC : cette insis¬
tance excessive n’exprime pas un surcroît
d'adaptation, mais une attitude défensive (sur¬
socialisation). Le nombre de réponses aug¬
mente, mais elles sont plutôt du type ± ou
du type vague ; quelquefois les contenus se
dégradent ; on trouve un contenu unique pour
trois ou quatre réponses (il faut faire atten¬
tion à cette « compliance » : prétendue doci¬
lité qui exprime le fait que le sujet est faus¬
sement à l’aise).
 N. RAUSCH DE TRAUBENBERG : LE TEST DE RORSCHACH
REACTIONS QUALITATIVES
A LA COULEUR
Il existe des réactions manifestes :
— soit répulsion, soit attraction ;
— soit rejet, soit fascination.
Le plus souvent les deux attitudes sont con¬
juguées, surtout pour le rouge; des études
sur la valeur et le rôle du rouge ont montré
qu'il suscitait au maximum les attitudes am¬
bivalentes. Cette ambivalence témoigne d’une
attitude défensive, non efficace en général.
Il existe aussi des réactions camouflées ou
indirectes : efforts pour éviter le contact avec
la couleur et avec ce qu’elle éveille de besoins
et désirs considérés comme inacceptables par
le Moi. La difficulté est de savoir de qui le
sujet a peur : agresseur extérieur ou agressi¬
vité déjà
est propre.
un évitement
L'absence ; del'introduction
réponses cotables
de ré¬
ponses qualitatives en confirme l’origine, mon¬
trant le mécanisme utilisé par le sujet pour
surmonter le choc et la perturbation : soit
renforcer la productivité par de nombreux
détails, soit un recours à l'imaginaire plus ou
moins infantile (K au kan), soit un effort
de combinaison synthétique (F+ bien combi¬
nés), soit un abandon à la facilité (F±), soit
des réponses F pour des localisations couleur.
Si ces éléments sont peu nombreux, on
parle de chocs larvés ou d’équivalents de
chocs ; mais, en dehors des chocs, toutes ces
réactions peuvent exister en tant que sim¬
ples mécanismes.
Il est important de noter la perturbation,
et surtout la manière de s'en sortir, de ne
pas se laisser envahir, même si le choc est
profond.
Exemple : silence, suivi d'une approche en
Dd, puis de D, puis de G K.
Le « choc au rouge », considéré au début
comme une phénomène très pathologique dans
le sens de stupeur, d'inhibition, existe en fait
chez près de 60% des normaux : s'il est sur¬
monté de certaines façons, il n'est pas pa¬
thologique. Qui plus est, les éléments de stu¬
peur existent même en cas de présentation
unicolore des planches II et III, ce qui a
fait penser qu'ils sont peut-être suscités par
le caractère incongru des formes. Par ailleurs,
ces réactions paraissent influencées par le fait
que la situation relationnelle établie à la plan¬
che I est brusquement modifiée par l’intro¬
duction de la couleur à la planche II ; cette
modification perçue comme dangereuse n'est
peut-être pas due seulement à la présence du
rouge.
Il faut distinguer choc manifeste et choc
larvé :
— pour le choc manifeste, il s'agit d’une
stupeur dont le sujet ne peut sortir ; les
associations sont arrêtées ; ce cas extrême
est rare ;
— les conséquences du choc larvé sont plu¬
tôt indirectes : son interprétation clas¬
1063
sique est le refoulement affectif (névro¬
tique, hystérique) ; une interprétation plus
courante y voit une signification plus
large de fragilité émotionnelle, d’ambiva¬
lence, avec un retentissement très varia¬
ble ; il s’y ajoute un élément d’anxiété.
Le phénomène de choc aurait une valeur
psychodynamique plutôt que diagnostique (il
est rare qu’un phénomène isolé ait une va¬
leur diagnostique précise ; il est important
de considérer sa valeur interprétative).
CONTENUS
DES REPONSES COULEUR
(en fonction de la profondeur des affects)
Il y aurait une émotion profonde liée à
une « tension pour survivre » (Piotrowski)
lorsque les contenus sont du type « incendie,
sexe, viande, alimentation » ou une émotion
« évanescente », un état d'humeur lorsque les
contenus sont vagues, artistiques ou décora¬
tifs.
La succession des réponses couleur et des
remarques qualitatives, leur distribution dans
le protocole ne sont pas indifférentes ; les
réponses couleur peuvent être massées soit
VIII,
une
aux certaine
planches
IX et X.mesure
IILe etstimulus
III,
la distribution
soit
conditionne
aux planches
desdans
ré¬
ponses : ainsi, s’il y a peu de réponses C F
à la planche III il y en aura davantage à la
planche II et surtout à la IX : la planche IX
présente une difficulté pour une interpréta¬
ciles
tion intégrée
à donneralors
aux que
planches
les FVIII
C sont
et X
plusou faˆ
la planche III, ces mêmes planches favori¬
sant les réactions C purs pour les sujets les
plus atteints.
D’autres réactions qualitatives à la couleur
s’expriment dans les choix : il est fréquent
que les planches couleur soient rejetées ou
choisies, ce qui apporte une information sup¬
plémentaire utile. Ces choix sont très insta¬
bles, liés à l'état de l'humeur.
RECAPITULATION
DES REPONSES COULEUR
1. - C, somme des R C pondérée
Rorschach utilisait cet indice isolément, con¬
sidérant qu'il mesurait la labilité affective.
Actuellement cette labilité, faite d’impressio-
nabilité, de perméabilité, d'une capacité de
syntonie, signifie une ouverture face au monde
extérieur, mais la somme des C ne nous donne
pas
l’émotion.
la teneur — plaisir ou déplaisir — de
Point important : Le S C représente la
charge affective que le sujet extériorise ; mais
il faut distinguer ce qu’il exprime de ce qu’il
assume. Pour assumer sa réponse, il faut que
le sujet considère qu'il s'agit de sa réponse,
de son besoin, de son désir. Une somme de
1064 BULLETIN DE PSYCHOLOGIE
C élevée signifie à priori participation active,
intérêt, engagement, mais aussi quelquefois
plutôt excitation qu’engagement, l'excitabilité
rencontrée chez les hypomanes qui s’oppose
un
à l’engagement
contact. affectif dans une relation ou
Un S C bas signifie inhibition ou retrait,
étouffement des affects, « affects plats ».
2. - RC %
Somme des réponses C aux planches VIII,
IX, X. Se situe entre 30 et 40 %.
Cet indice se trouve plus ou moins invalidé
selon que les réponses sont données unique¬
ment à la planche X ou bien réparties. Il
faut
signification.
le rapprocher de S C pour apprécier sa
• R C % élevé en l'absence de SC : exis¬
tence d’une résonance émotionnelle, avec une
incapacité à en faire quelque chose, sensibi¬
lité qui ne peut être extériorisée. Le sujet est
plus à l'aise dans les planches pastel : le
fait qu'il n'y ait ni F C, ni C F, ni C signifie
qu'ilmoins.
ou n’assume rien ; il peut en souffrir plus
Cette attitude est souvent rencontrée :
— chez les adolescents ;
— chez les prédélinquants ou délinquants,
chez qui on constate souvent la pré¬
sence certaine d'une sensibilité qu'ils
ne peuvent utiliser de façon positive,
quand bien même ils ne la retournent
pas contre eux-mêmes ;
— chez les schizoïdes ;
— tions.
chez les sujets qui étouffent leurs réac¬
couleur
• R C :%confirme
élevé, avec
le caractère
expressionstimulable
de réponses
de
l'individu.
• R C % bas, inférieur à 30 % : correspond
en général à une utilisation très réduite du
stimulus couleur, par ailleurs, et indique un
retraitle dans
vant nombrele rationnel
de F ou oude K.
l'imaginaire, sui¬
• R C % très bas à côté d'un C existant :
nuance l’attitude vis-à-vis des affects : les cou¬
leurs pastel suscitant un effet perturbateur qui
provoque un recul ou même un refus. Cet ef¬
fet est parfois très évident chez les adoles¬
cents à tendance paranoïaque.
Autre indice : le quotient affectif, introduit
par Beck, met en rapport le nombre de ré¬
ponses aux planches VIII, IX et X et celui
aux planches I à VII : la moyenne est à 0,60,
résultat qui indique la vivacité à réagir aux
situations agréables.
Il existe de nombreuses autres formules,
mais, d’une part, il est impossible de doser
le poids de la charge affective vécue ; d'autre
part, elle peut s’exprimer autrement que par
la couleur (E, K, etc.). Le sujet qui n'a pas
de réponses couleur n’est pas forcément un
inaffectif. S'il y a d'autres manières de mon¬
trer l'expérience affective, il reste que la ré¬
ponse couleur est la plus spontanée, la plus
labile et la plus chaleureuse.
Au sens des réponses couleur, l'affectivité
est conçue comme une facilité à vibrer en
fonction d'éléments extérieurs à soi, et le
terme d’extratensivité proposé par Rorschach
semble rendre l'attitude globale d’être facile¬
ment impressionné par la situation extérieure
événement ou contact avec autrui, attitude
dont la tonalité est soit négative, soit positive,
et qui inclut par cela même une certaine
anxiété liée à l’excitation et à l’instabilité (il
ne s'agit pas ici de l’angoisse massive, inhi¬
bitrice, qui se manifeste dans les réponses
clair-obscur).
REPONSES C’, C’F, FC’
Réponses Couleurs achromatiques
oùRorschach
le blanc etavait
le noir
trouvé
étaient
quelques
traités réponses
en tant
que couleurs chez les épileptiques, mais c’est
Klopfer qui a introduit ces réponses dans le
test. Il précise, dans le livre paru en 1942,
qu'il s’agit de nuances de noir et gris et de
la couleur blanche des Dbl, considérées en
tant que couleurs de surface et non d'estom¬
pages, de dégradés. L'association avec des dé¬
terminants E, clob, peut intervenir.
Une fois de plus, la distribution de ces ré¬
ponses modifie leur valeur et montre le rôle
qui peut être le leur, qu'ils apparaissent seuls,
aux planches monochromes, ou qu’ils survien¬
nent à la place des couleurs chromatiques ou
en même temps qu'elles ; ceci a évidemment
une importance cruciale.
Les réponses C' pures sont du type « char¬
bon », à V, ou de « la neige glacée dans le
sol » de VII ou « blancheur Persil », alors
qu'une réponse telle que « morceau de velours
noir » à V peut être une C' complétée par
une impression tactile et chatoyante que l’on
peut rendre par l’attribution secondaire d'un
E. Ainsi
née à VIen —est-il
« lad’une
lumière
réponse
blafarde
complexe
au lever
don¬
du jour ; la fumée grise » — où l'association
C' et E est évidente. Le C' peut côtoyer de
très près le Clob où l’angoisse et la dissocia¬
tion peuvent présenter des difficultés, et sou¬
vent elles sont une étape intermédiaire entre
la C et le Clob, alors que seul il peut repré¬
senter une recherche de compensation dans
la mesure où le noir, dans certains contextes
culturels, représente la majesté, la puissance,
et est lié d’office à une sublimation et à la
compensation.
Le C' blanc s'observe dans les protocoles
de sujets échaudés par des expériences émo¬
tionnelles douloureuses (des protocoles d’or¬
phelins et de sujets souffrant de sentiments
abandonniques ) .
Quant aux réponses C’F, elles sont moins
fréquentes, le blanc et le noir s’intégrant fa¬
cilement dans
eux-mêmes. Le une« tasforme
de charbon
ou s'imposant
» à V esten
 N. RAUSCH DE TRAUBENBERG : LE TEST DE RORSCHACH
pourtant une C'F comme « des nuages gris »
le sont à VII. Les associations C'F et E ou
EF surviennent justement à propos de ce
type de contenus : « brouillards du soir »,
« nappe de brume hivernale cachant les ar¬
bres » ou « nuages de pluie », réponses que
l’Ecole suisse cote automatiquement en Clob,
même si la tonalité dysphorique n’est pas ver¬
balisée par le sujet.
L'intégration du C’ dans une forme précise
donne des réponses du type V : « papillon
noir » ou « papillon de nuit » ; ou, pour le
blanc, « soupière de porcelaine blanche » : II ;
pour le gris, « tête d'éléphant » : à VII ; ou
« bonhomme de neige » : à IX. Il faut signa¬
ler ici que les enfants paraissent remarquer
particulièrement la couleur grise, mais peut-
être est-ce chez, eux description plus qu'inter-
prétation.
cultés de Dans
démarcation
les FC' avec
il y a les
moins
autres
de diffi¬
caté¬
gories, la présence du F précisant davantage
les limites du concept.
Parmi les réactions dites qualitatives à ce
type de stimulus signalons surtout les remar¬
ques sur l’opposition du noir et du blanc,
celle-ci pouvant être responsable à la limite
de réponses réelles dont la cotation est com¬
plexe.
L’interprétation de ce type de réponses ne
peut se faire que par rapport aux couleurs
franches et suivant que celles-ci sont pré¬
sentes ou absentes du protocole : globalement,
il semble s'agir de réactions émotionnelles,
comme retenues, non osées, étouffées même,
en sourdine, sous couvercle, et ceci d'autant
plus qu'il n’y a pas de réponses couleur.
TYPE DE RESONANCE INTIME
DEFINITION DU T.R.I.
Le type de résonance intime exprime le rap¬
port existant entre le nombre de réponses ki¬
nesthésiques — grandes K seulement — et la
somme des réponses couleur : soit xK/ySC.
En effet, leur « rapport mutuel » importe plus
que leur nombre absolu. Leurs relations dé¬
terminent l’attitude fondamentale de la per¬
sonnalité envers elle-même et envers le monde
extérieur ou « vis-à-vis du Moi, du monde et
de l’entourage ». Pour Rorschach, le T.R.I.
conditionne le caractère et même le mode de
perception, il détermine la forme de la né¬
vrose, il reflète toutes les liaisons fonction¬
nelles profondes, il a somme toute une valeur
caractérologique. Dans la mesure où les mo¬
ments introversifs ou extratensifs qui com¬
posent ce rapport sont « innés, primaires, dis¬
positionnels », ils ne sont pas tous mobilisés
entièrement dans le présent, ils constituent
l'éventail des modes de réception et de réac¬
tion, éventail mobilisable mais pas forcément
1065
Ne pas interpréter, par exemple, le rouge
de II pour interpréter le noir comme de la
terre salée c'est éviter sciemment les impres¬
sions brutales mais tout en accusant la per¬
turbation dans la mesure où l’interprétation
n’a rien de très organisé ; c’est tout simple¬
ment un déplacement qui peut signifier une
violente répression ou une défense contre l'af¬
fect suscité. Des réponses affectivement très
chargées comportent à cette planche le C’, le
C rouge et la kob.
La combinaison C’ blanc et C pastel à VIII,
en particulier « rayons de soleil sur un paysage
de neige » en DblD est souvent interprété
comme signe de sensibilité très nuancée, voire
de susceptibilité.
reflète un désir violent
Suivant de
Piotrowski,
sortir de lelaC'situa¬
noir
tion d'angoisse et correspond à l'«acting-out »
desAupsychopathes.
fur et à mesure d’une articulation plus
précise avec la forme, les significations de¬
viennent plus différenciées et la présence de
réponses C' allant de pair avec les Cf et FC
apporterait
vie émotionnelle
un élément
; les FC de
noirconscience
ou gris révèlent
de la
une sensibilité dépressive bien contrôlée.
Il est certain que le type de contenu réfé¬
rentiel détermine la tonalité affective de cette
expérience couleur un peu particulière et dont
la valeur interprétative n'est pas très élabo¬
rée.
Chacune de ces réponses prend une valeur
identique à celle des réponses couleur et la
somme ainsi pondérée est inclue par les pra¬
ticiens français dans le S C à l'encontre des
praticiens américains qui l'englobent dans la
somme des réponses estompages.
mobilisé dans son ensemble. Le vécu d'un
individu, sa manière d'éprouver — « comment
il éprouve » les événements et leurs échos —
peut être infiniment plus large et plus étendu
que T.R.I.
Le ce qu’il
donne
en une
exprime
indication
dans lasurvielacourante.
manière
dont le sujet pourrait vivre et non pas for¬
cément sur ses réactions manifestes circons¬
crites ; il représente en quelque sorte un cla¬
vier utilisé ou non utilisé.
Rorschach distingue quatre types de réso¬
nance intime, les commente suivant leur fré¬
quence d'apparition parmi les sujets normaux
et surtout malades mentaux, et présente les
variables psychologiques du test qui accom¬
pagnent ces types. C'est donc en termes de
données du test que le T.R.I. est défini et
non en termes de processus psychologique,
et cette absence de définition opérationnelle
peut expliquer l’abandon relatif de cette no¬
tion dans le contexte d’une utilisation diag¬
nostique de l'épreuve.
1066 BULLETIN DE PSYCHOLOGIE

LES DEUX DIMENSIONS DU T.R.I. ï tes et des désirs, et mécanismes de défense

K et C contre l’angoisse suscitée par ces désirs ; elle
D’APRES RORSCHACH est globalement plus « affective » qu'elle ne
l’a semblé et d'une affectivité très proche de
A partir des résultats obtenus sur ses di¬ l'inconscient
est une émotion
et pourtant
intensément
très vécue
contenue.
et maîtri¬
La K
vers groupes de sujets, Rorschach discute des
rapports entre K et C et des caractéristiques sée ; elle suppose une conscience de ses li¬
àpsychologiques
dominante C. des
Les sujets
différences
à dominante
entre les Kdeux
ou mites ; elle permet la relation affective avec
autrui comme elle est un moyen de connais¬
portent sur : sance du monde extérieur, et si l'investisse¬
• Le rôle de la pensée qui différencie les ment des ressources intellectuelles y est visi¬
deux groupes, en ce sens que les sujets du ble, l’exploitation des ressources affectives y
type K s'adaptent par l’intermédiaire de leur est autre
un également
mode,perceptible.
un mode où Tout
intervient
se passele sur
re¬
pensée ou de leur imagination et de ce fait
ne semblent pas avoir pour premier souci cours à l’image, à l’imaginaire, recours plus
l'adaptation extérieure ; ceci ne veut absolu¬ ou moins accentué; il y a dans le type K
ment pas dire qu'ils sont plus intelligents que une sensibilité extrême, camouflée comme
les sujets du type C, simplement qu'ils met¬ chez les adolescents et les schizoïdes.
tent un certain poids dans la fonction .logique Dans les réactions du type C il existe la
et que la réflexion leur est plus habituelle possibilité de retrait affectif suivant les con¬
que l'expression immédiate. tenus des réponses couleurs comme existent
• L'aspect de stabilisation est un second nom.
des réactions
Dans la qui mesure
ne sont
où notre
affectives
attention
que est
de
élément distinguant les deux groupes, les su¬
jets à dominante K étant plus stables du davantage portée vers la recherche du ration¬
point de vue de la motilité et de l'affectivité. nel des réponses K et C que vers leur signi¬
• Le contact affectif est une autre donnée fication globale ou leur nombre, les rapports
caractérisant les types ; il est en effet d’une de ces réponses nous apparaissent sous un
qualité plus intensive pour le type K et plus nouveau jour et nous valoriserons davantage
extensive pour le type C. En aucun cas les les processus de régression pu de contrôle,
deux types ne s'opposent l’un à l'autre ni ne le caractère plus immédiat ou retenu, mani¬
tranchent l'un sur l'autre d’une façon abso¬ feste ou indirect, des émotions contenues dans
lue, ils expriment des orientations différentes les K et dans les C, les deux pouvant être
de sensibilité et constituent en fait presque très proches ou éloignés. Nous diistinguons des
toujours un mélange où domine un type : ce styles de vie différents, des manières diffé¬
sont des fonctions psychiques et non des types rentes de manier l'impact émotionnel, les deux
attitudes pouvant coexister et chacune d’elles
de constitutions,
non contraires. des psychismes différents et pouvant être représentée dans le type inverse
de façon atténuée. (Un rapprochement est pos¬
Telles sont, en termes de Rorschach, les ca¬ sible avec la caractérologie de Heymans et
ractéristiques extrêmes des types K et C, ca¬ Wiersma, où le retentissement de l'extraten-
ractéristiques qu'il pense proches, de celles de Sif est « primaire », celui de l'introversif «se¬
personnalités introverties et extraverties tant condaire ».)
que l'on ne parle que de fonctions et de dis¬
positions psychiques. Le type K est un intro- Il apparaît essentiel de considérer les types
versif, capable d’introversion, cette capacité meret les
K C comme des manières définies d’expri¬
étant mobile, alors que l'état d'introversion besoins émotionnels de l'individu, ces
est fixe et alors pathologique ; il y a dans les manières, ces modes de réaction, reflétant le
deux types cette mobilité dans l'orientation, de typela d’organisation
labilité ou du du contrôle.
Moi, avec
Ces modes
prévalence
n’é¬
cette aptitude à se tourner vers soi ou vers
autrui, à chercher l’image des choses en soi puisent pas toutes les ressources affectives du
ou en elles-mêmes en dehors de soi. nifester
sujet, dontdansuneles certaine
valeurs partie
de clarté
peutetsed'om¬
ma¬
bre, dans les données plus strictement for¬
LES POSITIONS ACTUELLES melles et de comportement telles que le ryth¬
SUR LE T.R.I. me, le débit et le langage. Ces modes de
réactions sont trop souvent considérées sous
Actuellement la discussion sur les types K l'angle d'une signification négative et on com¬
et C ne pourrait pas être menée dans les mente la réaction C plus aisément dans le
mêmes termes, car si le type C peut être con¬ sens de l'hostilité que dans le sens de l'obla¬
sidéré comme facilitant l'adaptation à autrui, tivité. La centration sur le pathologique est
le type K ne peut plus être interprété comme très compréhensible, étant donné le but diag¬
s’adaptant par la pensée, étant donné la va¬ nostique de l’instrument, voulu par son au¬
riété des mécanismes mis en jeu dans les pro¬ teur, mais elle ne doit pas être absolue et
jections kinesthésiques. En effet, la K n’est l'emporter entièrement, aussi bien au niveau
pas seulement intériorisation et disposition in¬ de l'interprétation qu'au niveau de la concep¬
tellectuelle, mais elle est aussi capacité à dif¬ tualisation des données : en un mot, elle ne
férer l'impulsion, projection intégrée des crain¬ doit pas être déformante.
 N. RAUSCH DE TRAÜBENBERG : LE TEST DE RORSCHACH
Si l'on admet que le type C indique l'adap¬
tation affective et le type K l’adaptation par
la pensée, le T.R.I. est alors la marque d’une
dichotomie difficilement acceptable, d'ailleurs
davantage systématisée par les continuateurs
de l’œuvre Dans
lui-même. de Rorschach
la mesurequeoù par
nousRorschach
connais¬
sons mieux les mécanismes des réponses K
et C, nous utilisons le T.R.I. en tant que to¬
LES TYPES DE RESONANCE INTIME
posés
Les quatre
par Rorschach
types de —résonance
le type intime
extratensif,
pro¬
le type introversif, le type coarté et le type
ambiéqual — forment toujours la base des
distinctions couramment adoptées.
LE TYPE EXTRATENSIF
Est dit pur ou mixte suivant que le pôle K
est absolument nul ou exprimé, mais d’une
façon très réduite.
— Le type pur correspond à O K : y S C.
— Le type mixte correspond à x K<y S C, ;
il constitue la somme pondérée des réponses
couleurs ; il peut être plus ou moins élevé.
Les besoins affectifs s'expriment sans freins
(encore faut-il vérifier la fréquence des ré¬
ponses F et leur qualité, ce qui constitue en
soi une possibilité de freinage). Les sujets
sont soumis aux sentiments, ils sont émotifs
et instables. Si le type pur correspond fré¬
quemment à celui rencontré chez les enfants,
il est aussi celui que l'on trouve chez les
adultes impulsifs, suggestibles et égocentri¬
ques ; seule la composition exacte du SC et
des réactions qualitatives permettent de pren¬
dre une position plus précise sur sa significa¬
tion. Le type mixte est nuancé par la parti¬
cipation des K ; en cela il est moins extré¬
miste et capable d’une certaine pondération
dans l'expression des besoins. Le caractère ex¬
tratensif n'est évidemment pas pathologique
en soi; il depeut
certaines ses leréactions
devenir par
de base.
exagération de
Quoi qu'il en soit, les types extratensifs sont
dominés par des charges affectives ou une
excitabilité dont l'utilisation est souvent inap¬
propriée ; ils manquent de recul dans l’ap¬
préciation de la réalité objective mais peu¬
vent être La
réactions. syntones
labilité etles spontanés
rend très malléables
dans leurs;
le réel extérieur, l'objet, les envahit facilement
et il peut y avoir relâchement des fonctions
cognitives et du contrôle.
LE TYPE INTROVERSIF
Pur ou mixte suivant que les réactions C
y sont pas ou peu exprimées : x K : O S C
et x K>y % C.
Préoccupés par leur propre personnalité, ils
observent l'objet, ils réfléchissent, sont aptes
1067
talité clinique davantage au niveau de l'éla¬
veau de la
boration diagnostique
formulation
et et
pronostique
de la communica¬
qu'au ni¬
tion des résultats : un malade schizophrène
se comportera différemment suivant qu'il a
un T.R.I. en K ou en C, suivant que la symp¬
tomatologie sera idéationnelle ou expressive.
Mais annoncer son T.R.I. dans le rapport n'a
pas de sens pour l'interlocuteur.
à différer l’action et la gratification, et parais¬
sent avoir un caractère réservé. Dans ce sens,
ils peuvent avoir une bonne connaissance d'eux-
mêmes ; ils sont peut-être conscients de leurs
difficultés mais peuvent s’absorber dans leur
propre contemplation imaginaire et leur mon¬
de intérieur imaginaire prend le pas sur la
réalité extérieure. La réaction du type mixte
est plus impulsive, ce qui est fréquemment
le cas des sujets très centrés sur eux-mêmes
mais pouvant avoir des incidents explosifs.
La symptomatologie des types introversifs
va être surtout idéationnelle et ne comportera
de décharges affectives qu'occasionnellement.
Nous retrouverons donc des introversifs dans
les névroses obsessionnelles et phobiques, dans
les états schizoïdes et certaines schizophrénies
paranoïdes.
LE TYPE AMBIEQUAL
C'est celui où les deux composantes sont
manifestées à un degré égal mais largement.
Il y a donc x K pour y 2 C. C'est un type
que l’on retrouve chez les gens doués, larges
d’esprit, qui savent exploiter les richesses du
monde extérieur et élaborer leurs propres res¬
sources d’une façon différenciée et qui exer¬
cent avec souplesse un contrôle sur l'extério¬
risation des décharges affectives. Ce caractère
peut devenir pathologique lorsque la richesse
et la diversité des réactions empêchent le
choix et rendent l'équilibre difficile étant don¬
né le tiraillement subi entre des forces dif¬
férentes : c’est le cas des caractères obses¬
sionnels.
LE TYPE COARTE PUR
OU COARTATÏF
OK : OC.
I K : 0,5 — 1 2 C.
C’est un type où les deux modes d'expres¬
sion sont réduits, comme annihilés, et les
réactions dans le test sont essentiellement
formelles, avec souvent une certaine présence
des réponses estompage. Cette restriction, cette
coartation est-elle l'effet d'un blocage ou l'ex¬
pression d’une pauvreté réelle ou d'une inap¬
titude à manier les symboles ? la formule ne
le dit pas, mais on sait que toutes ces alter¬
natives sont possibles et que, par conséquent,
1068 BULLETIN DE PSYCHOLOGIE
la symptomatologie pourra être variée. En ef¬
fet, la dépression réduit le besoin d'expres¬
sion, lecaractérielles
manifestation
titudes déficitsousmental
cette
en limitent
n’en
formepermet
; au
certaines
maximum
pas at¬
la
le risque. On trouve donc des types coartés
ou coartatifs
pement et dans
dansleslessituations
cas d'insuffisance
où la seule
d'équi¬
ex¬
pression affective paraît à bannir et où la
fonction logique est le seul critère de contact.
Les types coartés ou coartatifs peuvent être
considérés comme assez vulnérables et peut-
être même plus vulnérables que les autres
types : la restriction des manifestations, le
blocage opéré réduisent la mobilité et d'au¬
tant plus la capacité d'adaptation à une si¬
tuation.
REPARTITION ET VARIATION
DES TYPES DE RESONANCE INTIME
Il est illusoire de parler de distribution des
T.R.I. dans la population : on sait simple¬
ment que les types extratensifs y sont plus
nombreux que les introversifs et qu’ils sem¬
blent prédominants dans leurs aspects adap¬
tatifs chez les femmes ; dans leurs aspects
égocentriques chez les enfants. Encore faut-il
se rendre compte que les configurations per¬
ceptives limitent le nombre de K visibles dans
le test, alors que le nombre de réponses
couleur est pratiquement illimité.
L’évolution des T.R.I. est marquée à travers
l'âge par une légère diminution des types ex¬
tratensifs entre 4 et 10 ans et par une aug¬
mentation valable des introversifs dont le pour¬
centage va de 6 à 22. Chez l'enfant avant 10
ans, le type extratensif prévaut dans 55 % des
cas et l'introversif n'est donné que dans 22 %
des cas, les types mixtes étant plus utilisés
que les types purs. La préadolescence est sur¬
tout marquée par la coartation et l'adolescence,
très variable, est souvent coarté ou très ambi-
équale.
La répartition des T.R.I. dans les groupes
d’adultes normaux européens — extratensifs
43 % et introversifs 39 %, ambiéquaux 17 % —
ne correspond pas à celle donnée pour une
population américaine où les pourcentages
sont respectivement 30, 23 et 17 alors que
les coartés et coartatifs groupent 30 % des
sujets et 70 % dès que la symptomatologie
dominante
leurs très fréquents
est obessionnelle
dans le; milieu
ils sontsocio-cul¬
par ail¬
turel peu évolué.
Il n’est pas possible de discuter ici des
variations subies par le T.R.I. en fonction des
modifications dues à la fatigue, la maladie, au
stress physiologique
importe cependant deou relever
psychologique,
que la récupé¬
etc. Il
ration du fonctionnement psychique dans les
cas d’altérations graves ou au réveil de chocs
semble présenter des stades dont la succes¬
sion paraît constante : le T.R.I. est extraten¬
sif comme il l'est à 4 ou 5 ans, puis il de¬
vient coarté parce que les repères utilisés sont
strictement objectifs, formels, puis à nouveau
extratensif mais mixte, adaptatif, et enfin il
peut être introversif, intégrant l’expérience
personnelle et l'effort créateur. Il est certain
que le T.R.I. est plus variable et plus chan¬
geant qu'on ne le pensait à priori et qu'en
particulier les situations de stress le dilatent
ou le réduisent considérablement, les deux
attitudes montrant alors la manière dont le
sujet mobilise ses défenses, soit en accusant
naire,
l’expression
soit endese soi
rétractant
et le recours
et en limitant
à l'imagi¬
au
maximum sa participation à la situation. De
même une disposition euphorique élargit, di¬
late le T.R.I. par une utilisation plus large,
débridée, du registre de résonance, alors qu'une
humeur sidysphorique,
comme la motivationsoucieuse,
d'utilisation
le rétrécit,
de ses
ressources tombait. La même motivation ou
absence de motivation agit sur d’autres fac¬
teurs du test, elle augmente ou réduit le nom¬
bre total de réponses, elle enrichit le vocabu¬
laire, précise les formulations.
EN CONCLUSION
Le T.R.I. constitue une totalité clinique dif¬
ficile à aborder. Il est l'expression d'une ex¬
périence émotionnelle plus ou moins proche
de l'inconscient, comme il est le reflet du
degré de maturation de l'aptitude à différer
la gratification et, par ce biais, il est relié au
développement de la pensée.
En effet, basé sur des notions présentant
beaucoup d'analogie avec les conceptions de
Jung, sans en utiliser l’aspect structurel ni
celui de la complémentarité, le T.R.I. s'ex¬
plique plus valablement dans le cadre des
théories psychanalytiques de psychologie du
Moi ; on utilise ici avec fruit la notion de
«détour», de capacité à différer l'action ou
la satisfaction immédiate dont le rôle dans
le développement psychologique est connu.
 LES REPONSES ESTOMPAGES - CLAIR-OBSCUR
E - E F - F E - Clob - Clob F - F Clob
(Nomenclature française)

nombreuses
test Traiter
de Rorschach.
de
divergences
ces réponses
de symbolisation
est particulièrement
dans les délicat
différentes
étantécoles
donnéd'étude
les très
du

Grouper ces réponses dans un seul chapitre a pour but de faciliter la recher¬
che du rationnel de ces réponses, et cela n'empêchera pas de distinguer ensuite
les symboles et les significations.

1. — RORSCHACH — corporels,
— spirituels ;
Etudie avant sa mort un protocole d'adulte b) sentiment vital endogène.
et conclut à la nécessité de tenir compte des
« ombres », « du blanc » et « noir » : « Pour¬ Si on applique cette classification à la
tant une grande allée bordée de beaux arbres sphère visuelle, qui est le climat même du
foncés qui montent se perd au loin [...] le psychodiagnostic,
de clair-obscur influencent
on constatesurtout
que leslesvaleurs
senti¬
tout en perspective. »
Ce qui le caractérise en grande partie, c’est ments d’âme.
états globaux, d'ensemble, en produisant des
qu'elles soulignent — que cela soit ou non
exprimé verbalement — le moment spatial tinction
Binder entre
ne pensele clair-obscur
pas toutefoiset que
les cette
couleurs
dis¬
et perspectif. « Ces interprétations, où ce ne doive être rigoureux : il y a en effet des « états
sont pas proprement les valeurs de tonalité d'âme » réalisés par les couleurs.
de couleurs qui ont décidé mais les valeurs Binder analyse les processus psychologiques
de clarté et d'ombre..., leur valeur sympto¬ dans l’interprétation du test de Rorschach,
matique n’est pas encore complètement éclair¬ pour étudier enfin les réponses clair-obscur
cie. Elles semblent avoir quelque chose à faire
avec la capacité d'adaptation de l’affectivité, et Binder
leur valeur
définitsymptomatique.
les interprétations clair-obscur
mais elles semblent indiquer une sorte d'adap¬ comme des réponses suggérées par les diffé¬
tation affective anxieuse, prudente, non libre, rentes nuances, ou ombres dégradées, qui
un contrôle de soi-même en présence d’au¬ vont du gris clair au noir le plus profond.
trui, spécialement une tendance à une hu¬ Il s’agit en fait encore de nuances dans le
meur foncièrement dépressive qu’on cherche
à surmonter devant l'entourage. gris-clair-obscur
de considérer comme et il faut
des réponses
se méfierclair-obscur
également
« Enfin ces interprétations possèdent encore des réponses qui se réfèrent à la ligne de sé¬
une particularité : de toutes les interpréta¬
tions, les clairs-obscurs soulignent le mieux paration
cées,
aucun mais
rôle.
desoùnuances
la valeurplusdeclaires
la clarté
et plus
ne joue
fon¬
la dimension profondeur de l'image; un don
particulier d'appréciation des valeurs spatia¬ Il s'agit alors d'une réponse F.
les,
raît deêtrela en
profondeur
corrélation
et de
avecl’éloignement,
une affectivité
pa¬ Il y a des clairs-obscurs secondaires équi¬
valents des C’ («hommes en habits noirs»),
quelque peu disposée à l'anxiété et à la pru¬ il y a des clairs-obscurs intellectuels, symbo¬
dence, d’un caractère tant soit peu dépressif, liques du clair-obscur.
nuancé, et cela paraît souvent, sinon toujours, Binder propose de classer ces interprétations
correspondre à certains sentiments d'insuffi¬ en deux catégories :
sance dont le contenu est une impression d’in¬
consistance, d'instabilité, de dislocation. » 1° REPONSES F (C).
Le symbole accepté alors est F (C). Sont des clairs-obscurs dans le détail. Dans
ce cas, la forme est obligatoirement bonne;
2. — BINDER elle intervient en premier lieu, la nuance clair-
obscur en où
terminant second
la tache
lieu. est
Il s’agit
au moins
là d'un
formée
dé¬
Il reprend le problème, examine 271 mala¬
des et normaux et propose une théorie de de plusieurs nuances distinctes, bien séparées
la structure des sentiments en distinguant : les unes des autres, de manière à ce que cha¬
cune ait une délimitation bien précise de sa
nels
1° et
Lesisolés
sentiments
: périphériques, réaction¬ voisine. Le sujet fait ressortir chacune de ces
nuances à l’intérieur de la tache interprétée,
a) corporels, en observant en premier lieu le contour de
b) spirituels. chaque ombre isolée et secondairement la va¬
2° Les sentiments d’origine centrale (les leur de la nuance claire-obscure. Les exemples
états d’âme) : donnés sont des perspectives ou l’eau sur le
a) sentiments réactionnels d’ensemble : marbre, « statue de profil, la tête d'un artiste
1070 BULLETIN DE PSYCHOLOGIE
taillée en pierre claire. Les cheveux, l’œil pro¬
fond, les rides autour de là bouche sont in¬
diquées par des ombres plus foncées [...] ».
2° REPONSES Clob.
Dans ces réponses, il n'y a jamais des nuan¬
ces isolées.
bale et diffuse
11 y de
a plutôt
la valeur
une impression
clair-obscur glo¬
de
toute la planche. Les diverses taches ne jouent
aucun rôle en tant qu'imagé isolée, le contour
qui les sépare n’est même pas observé. L'en¬
semble du clair-obscur est perçu par une vi¬
sion globale. Ce sont surtout les planches
noires qui sont capables de donner une telle
impression. Ces interprétations sont moins ri¬
ches en traits particuliers et tiennent moins
compte que la précédente catégorie des fi¬
nesses nuancées de la planche. Elles ont un
rapport avec le sens qu’on donne aux nuan¬
ces claires-obscures dans la vie quotidienne.
Les Clob sont basées sur des perceptions glo¬
bales.
IV : «Un épouvantail, recouvert d’une étof¬
fe foncée ».
VI : « La silhouette d’un château en ruines
sur des rochers. »
II : « Une sorte de corbeau noir qui vole ;
là les ailes, et devant la tête. »
Les F (C) peuvent être liés aux sentiments
dysphoriques ou euphoriques.
Le F (C) clair-obscur détaillé peut être don¬
né soit avec un certain plaisir (tact, délica¬
tesse, recherche
certaine anxiété. d’adaptation), soit avec une
Les F (C) ont un lien étroit avec la couleur
(isolés) et ils ne distinguent pas de (C) F,
considérant qu’à partir du moment où la
forme ne domine pas on glisse vers le Clob.
Il existerait un rapport inversement propor¬
tionnel d'après la fréquence de leur appari¬
tion dans les groupes examinés et à l’intérieur
d'un même protocole l’apparition simultanée
des deux types de réponses est rare, mais elle
arrive parfois tout de même.
Les Clob s’opposent aussi aux FC, apparais¬
sent en G et en très grands D. Le Clob (Bin¬
der) :se VIII
leur trouve: «Jeu
parfoiscouleurs
dans lesauplanches
coucher cou¬
du
soleil lorsque le bas de l’horizon est assom¬
bri » : G, C, Clob.
Les Clob sont plus fréquents chez des in-
troversifs, peut-être du fait que K et Clob
semblent émaner de la personnalité profonde,
l'une en exprimant la tendance dynamique et
l’autre la tonalité affective, « l’état » stimmung.
On a proposé de les scinder en (C) F et (C),
mais cela n’a pas abouti.
3. — L’EVOLUTION
DE LA SYMBOLISATION
RELATIVE AUX NUANCES
ET INTERPRETATIONS
DE CLAIR-OBSCUR
Toutes les écoles ont compris la nécessité
de tenir compte de ces éléments mais cha¬
cune l'a fait à sa façon, et en fait il faut
admettre que les exemples donnés dans Bin¬
der sont à double tranchant et les réponses
clair-obscur tiennent aussi bien compte du
noir en tant que couleur ou du caractère
foncé des taches, caractère impressionnant
pour le sujet, ou du jeu des lumières, et le
F (C) est fréquemment un paysage, une pers¬
pective où les éléments sont très différenciés ;
quand la différenciation est moindre, la ré¬
ponse devient Clob et non pas (C) F. Il faut
ajouter à cela que la monographie de Binder
est écrite dans mie langue très difficile à tra¬
duire et que ses concepts sur la personnalité
ne sont pas facilement admis. On en a ex¬
trait les symbolisations et laissé l’argumenta¬
tion théorique.
Les continuateurs vont donc utiliser :
1° Soit la différenciation de Binder en F (C)
et Clob, ainsi qu’on le fait en Suisse. Loosli
Usteri, Zulliger, Salomon et Rapaport.
distinctions
2° Soit reprendre
très nombreuses
l'ensembleet ettrès
opérer
différen¬
des
ciées pour chaque type de réponses, ainsi
que l’a fait Klopfer, qui distingue neuf types
de réponses
me couleurs.et sépare le blanc, noir, pris com¬
3° Soit classer en trois catégories, comme
Beck (Y = gris clair, V = perspective, T =
texture) (fourrure, tout ce qui est sensoriel),
ou distinguant suivant la tonalité affective,
gardant le F (C) pour nuances à contenus non
dysphorique et le Clob pour le nuancé, dé¬
gradé à contenus dysphoriques (nuages, fu¬
mées).
Institut Gesell. Le Clob est dicté par le
foncé et le contenu pénible.
4° Et, plus accusé encore, le système de
Piotrowski,
de Clob et où
le lec nuances
c nuancesclaires
sombres
s’attachent
proche
plus au perceptif visuel et secondairement au
contenu, incorpore le noir-couleur.
4. — LA SYMBOLISATION
DE L’ECOLE FRANÇAISE
Elle
A été
consiste
élaborée
à : par Ombredane et Canivet.
• E : Remplacer le symbole F (C) par un
autre d'une seule lettre, plus commode lors¬
que des F devront lui être adjoints. Nous avons
pris l’habitude de désigner le déterminant de
ces interprétations par la lettre E (estom¬
page).
Traiter le F (C), désormais dénommé E,
comme la couleur, en distinguant les cas où
la forme l’a emporté sur l'estompage, l’estom¬
page sur la forme, et ceux où l’estompage
seul
Donner
a été des
déterminant.
valeurs différentes
Soit : FE, aux
EF déter¬
et E.
minants dictés par l’estompage, avec le critère
employé
à-dire : par Rorschach pour les couleurs, c’est-
EF = 11/2
FE
E = 1 1
 N. RAUSCH DE TRAUBENBERG : LE TEST DE RORSCHACH 1071

Calculer, d’après ces valeurs, un 2-E analo¬ tuellement sensibilité, quelquefois débouchant
gue au SC. Cette technique nous a permis carrément sur la sensualité quand le senti¬
d'apprécier avec plus de finesse les réponses ment du moelleux, du doux, est très accen¬
dans déterminant.
rôle lesquelles l'opposition des tons joue un tué (texture).
• EF : Nuages, objets vus à travers la cel¬
• Clob : Pour notre part, nous considé¬ lophane, du corail, des arbres vus à travers
rons, d’accord avec les auteurs suisses, que des nuages, des paysages architecturaux dans
le Clob est une interprétation déterminée par le lointain, paysages vus d’avion, trois dimen¬
l'effet de masses sombres que produisent cer¬ sions. Attitude qui peut être une grande déli¬
taines planches. Cet effet se rapporte toujours catesse, prudence, circonspection dans les con¬
à la planche tout entière ou à une grande tacts. Gens qui posent des jalons avant le
partie de celle-ci. La forme ne joue le plus contact affectif. Ils n’arrivent presque pas à
souvent ici qu’un rôle secondaire, quand elle la réalisation du contact affectif par trop de
n’est pas complètement négligée. Dans les cas prudence. Sentiment d’infériorité.
douteux, il faut, lors de l’enquête, s’informer • E : Etat indifférencié avec une affecti¬
aurpès du sujet pour savoir si son interpré¬ vité diffuse et asez inquiète. Gens qui n'osent
tation a été inspirée primitivement ou non pas donner une forme à leur manière d'être,
par l'effet de masses sombres. L'importance un nom à leur désir, à leur recherche. Ils
prise par la forme et la qualité de cette forme n’osent même pas y penser en termes affec¬
pourra
succès dansêtre la
considérée
lutte contre
comme l'angoisse
un indice tifs. (Eau, coton, fumée, nuage.) Vraiment
et l'ef¬
de
informel, sensibilité fine, contact atténué.
fort de rééquilibration.
On peut ranger dans les Clob les interpré¬ tention
Signification
à autrui.
positive : tact, délicatesse, at¬
rescuro
tations dedesperspective,
Américains)de etprofondeur
certains paysages.
(le Chia- Signification négative : non-assurance, infé¬
Comme pour les estompages, il convient de riorité, plus ou moins grande inquiétude.
distinguer les F Clob, les Clob F et les Clob Quand on n’a aucune couleur et que des
purs,
secondaires
suivantou que
inexistantes.
la forme est primordiale, cherche estompages,
et non
cela réalisation
signifie qu’il
affective
n'y a franche
que re¬
Donc, effet des masses sombres et planche (recherche, essai, tentative, désir). Dans la
tout entière. Les AA ne spécifient pas la né¬ mesure où ce sont des recherches, il semble
cessité d'un contenu dysphorique (dans l'in¬ que cela corresponde à une infériorité, à une
troduction au Bochner Holpem). absence d’affirmation de soi. Ils se retirent
Dans les cours de Mme Canivet, les Clob trop vite dès que le contact devient trop
doivent répondre aux trois critères : pressant.
affirmation,
Gensd’infériorité.
pleins de finesse. Pôle de non-
— de localisation G ou D ;
— l'impression massive, caractère foncé-noir;
— le contenu pénible, effrayant, désagréa¬ ETUDES EXPERIMENTALES
ble (angoisse, dépression ou agression). SUR LE E Rizzo.
La grande différence entre Suisses et Fran¬ D'une façon générale, les E font entrer en
çais : l’absence de couleurs. jeu le sens tactile et un certain pouvoir de
représentation spatiale, une sensibilité à des
5. — SIGNIFICATIONS différents plans, différents niveaux ; ce sont
INTERPRETATIVES ces notions que l'on a interprétées en carac¬
téristiques psychologiques, approche par le
A) Les estompages sens et non par l'affect mûr direct (donc im¬
maturité, avidité affective, recherche d’amour
nuances
Sensibilité
isolées
au dans
dégradé,
différents
aux différences
contextes tels de avec un moment érotique assez primitif) et
sentiment d’incomplétude, d’infériorité (tridi¬
que des tours en ruines au haut d'une colline, mensionnels).
impressions de surface, de transparence, des D’après Beck, qui a fait une étude impor¬
vues à distance, en perspective, paysages en tante sur E (Congrès Rorschach, à Rome, en
relief, des falaises, des reflets dans l’eau, 1956), il faut rechercher à identifier les E et
des radiographies, des textures, de tout ce à rechercher leur signification générique :
qui correspond à un sens tactile : velours, qu'il indique comme étant le manque d'éner¬
velouté, moelleux. Ce sont donc des estompa¬ gie, de volonté, d’initiation, expression d’iner¬
ges surface, diffusion, texture, qu’il est néces¬ tie, indolence ou d'indifférence allant jusqu'à
saire de distinguer au moins qualitativement. la torpeur et l'apathie, la signification fonda¬
On est tenté de penser que toutes elles ont
une tonalité dysphorique alors qu’il y a un mise mentaleen étant
couveusela tendance
de l’activité
au émotionnelle.
retrait, à la
contenu
les nuances euphorique
claires sont
possible,
utilisées.
surtout quand Les significations sont différentes suivant le
groupe clinique mais la tonalité anxieuse est
• Le FE : Peau de bête à fourrure, les toujours présente. Chez normal, affects anxieux
poils couchés de part et d'autre ; paysages bien avec tendance au retrait.
construits
soit un désir avecdeperspective.
contact affectif
Il semble
réel etque ce auNécessité
éven¬ de distinguer les E qualitativement
moins, surface, diffusion, texture. Les ten-
1072 BULLETIN DE PSYCHOLOGIE
tatives de validation de l’E en tant qu'anxiété
se heurtent à des difficultés.
B) Les Clob
L'effet Clob le plus pur, au fond, est le
choc Clob ou choc au Noir : IV, VI, I, VII.
Le choc indique anxiété et agitation d’un S
effrayé par ses désirs ou ses pensées, pul¬
sions agressives ou érotiques qui l'horrifient
et non par le test. « Peur de l'inconnu, insé¬
curité, appréhension devant la menace (con¬
flit Es. sur Moi). Le Clob reflète un effet
d’abandon passif sans défense aux émotions
dysphoriques, à l'angoisse. Labilité d'humeur
de l'état profond, « stimmung » pesante, péni¬
ble, lourde, « marais stagnant », anxiété, dé¬
pressions, impression « helplessness », incapa¬
cité à s’aider, désespoir devant l’envahissement.
IV : « Masse inorganisée menaçante. »
IV : « Impression de cauchemar, air mé¬
dable.
chant, » ce n’est pas clair, l'air profond, inson¬
IV : « La douleur planant sur le monde. »
(Hystérique : Clob est artificiel, d’où abstrac¬
tion.)
V : « Espèce de trou (noir) laissant voir
orage terrible, tempête. »
• Clob F : Tonalité affective l’emporte sur
la F mais celle-ci existe : IV : « Ce n'est pas
beau, ressemble à de l’araignée, sale, velue,
désagréable. » Clob F qui vient des E « Troncs
d’arbres
des Aulnes.
dans
» la brume menaçante ; les rois
• F Clob : Interprétation donnée par la F
et la tonalité pénible du Clob, mais bien con¬
trôlée. Planche I : « Vampire menaçant, pa¬
pillon de forêt vierge. » Les attitudes, gestes,
L’ANGOISSE
Rorschach mentionne le terme, sans lui
consacrer de chapitre, dans le « Psychodiag¬
nostic ». Il a vu la portée de l'angoisse et dit
à propos du T.R.Y. que cet affect est le seul
à On
êtretrouve
indépendant,
chez ses du
continuateurs
type de T.R.I.
des indica¬
tions plus spécifiques ; ainsi Zulliger a établi
une liste des signes d’angoisse, tout en spé¬
cifiant qu'il s’agit d’une angoisse aussi bien
manifeste que latente. Cette liste, publiée en
1933, a été reproduite par Bohm :
1. Dd.
Augmentation moyenne du nombre de
2. Apparition de Do chez des sujets intel¬
ligents.
3. R.
4. Augmentation
Anat. mal vues.
des R. Clob.
5. Mauvaise R. originales ou individuelles.
6. Coartation de T.R..
7. Succession rigide avec F % élevé.
8. Relâchement de la succession chez des
sujets qui ont un choc couleur.
9. et
Typetendance
d’appréhension
Do. dans le sens Dd Dbl
paroles, moues du S sont importantes. Plan¬
che IV : « Masque effrayant avec une tête
de bœuf. » Evoque le caractère effrayant, en¬
vahissant, pénible. Conscience d'une anxiété
possible, mais la contrôle.
Associations possibles avec des K plus ou
moins passives ou actives.
I : « Une personne attachée, bras en l’air,
avec des nuages d’orage derrière. »
III : « Monstre aux bras relevés. »
IV : « Cet homme monstrueux, menaçant. »
Le pronostic de cette association est favora¬
ble.
Clob plus fréquents des introversifs et ra¬
res chez les C et CF.
Un essai de validation du F Clob a été
tenté par Robaye où le F Clob se trouve as¬
socié à N aspir. + et à N expec. +.
Cloc déclencheur archaïque de la peur. A
la structure d’un objet menaçant tel qu’il
est conçu par un enfant jeune ; est rattaché
à un niveau précoce, oral, dépendance abso¬
lue, impuissance agressive. S révoltés, in¬
quiets, insécures, amers, ne pouvant suppor¬
ter les
seul discrimine
frustrations,
les niveaux
peu sociables.
A et E. Le F Clob
**
*
Il y a donc des difficultés réelles à dis¬
tinguer les réponses Clob des réponses E et
des réponses couleurs noires ou grises. Dif¬
ficultés augmentées par le peu de connais¬
sances que nous avons de l’évolution de ces
réponses longitudinales et lors des différentes
crises de maturité et lors des psychothérapies,
des atteintes
assez vaste de
pathologiques.
travail. Il y a là un champ
10. Choc couleur, indiquant le refoulement
11. Diminution
de l'angoisse.des G et des K.
12. Hd> H.
13. Réduction des Ban et des originalités.
Quelques indications supplémentaires :
— recherche de la symétrie ;
— critiques de l’objet ;
— réponses alternatives, négatives et inter¬
rogatives ;
— contenus perspectives ;
— contenus de mutilation, de sang ;
sont interprétés dans le sens du manque d'as¬
surance.
Les contradictions qui apparaissent dans la
liste mettent en évidence le fait qu'il existe
de multiples indices d’angoisse, manifestations
aussi variées qu’apparemment contraires.
Sur le plan théorique, on estime que l'an¬
goisse est provoquée par le fait que les im¬
pulsions arrivent à la conscience alors que
le sujet veut les rejeter; l’angoisse est un
signal d'alarme ; elle peut ralentir, bloquer,
suspendre les fonctions psychiques pour évi-

ter l'irruption de conduites inacceptables ; elle
a un aspect positif : la création d'un système
de protection contre le danger; c'est une ins¬
titution très primitive du Moi : elle peut en¬
traîner la régression de la pensée et de l'af¬
fectivité sur
cilement à unle état
planinfantile.
magique aboutissant fa¬
La signification de l'angoisse est un peu dif¬
bidinal
férente : selon la phase de développement li¬
— elle est due à la sévérité du Surmoi dans
les structures obsessionnelles ;
— elle est relative à la perte de l'objet
d'amour dans les structures hystériques.
estL'angoisse
intéressant
prouvede savoir
une faiblesse
commentdu elle
Moi ; est
il
combattue, surmontée, et par quel mécanisme
de défense.
On sait que, pour Freud, l'angoisse de la
naissance est le schéma de toute autre forme
d'angoisse.
En ce qui nous concerne :
L’angoisse est un mécanisme de défense du
Moi contre les affects pulsionnels, agressifs,
destructeurs, qui peuvent entraîner un com¬
portement indésirable : elle maîtrise l’émo¬
tion, l'empêchant de pénétrer dans le psy¬
chisme et de provoquer une désorganisation
intellectuelle. En ce sens, elle a une fonction
positive.
Le Moi se protège de la prise de conscience
des pulsions inacceptables : l’angoisse évite
de voir ces désirs et ces besoins qui sont la
raison d’être des souffrances. L’angoisse étant
un état désagréable, le sujet érige une série
de systèmes défensifs. Contre elle, en consé¬
quence, le mécanisme de défense qu'est l’an¬
goisse suscite d’autres mécanismes de dé¬
fense qui s'opposent à elle.
Il est important de distinguer deux types
d’angoisse au Rorschach.
A) L’angoisse libre, flottante, diffuse, indé¬
terminée ; mécanisme de défense contre l’émer¬
gence de besoins inacceptables (R, E, Clob
sporadiques, remarques, etc.).
B) L'angoisse liée, systématisée, inhibée, etc.
(mécanismes de défense hystériques, obession-
nels, phobiques). Une structure défensive so¬
lide peut même donner l'impression d’une ab¬
sence d’angoisse. Exemple : la somatisation
de la conversion hystérique apparaissant dé¬
pourvue
Une notion
d’anxiété.
est fondamentale ici : c’est la
multiplicité et la diversité des manifestations
d'angoisse qui rend aléatoire la recherche des
« signes » ; ainsi l’exagération d'un phénomène
peut être signe d'angoisse chez un sujet don¬
né aussi bien que sa réduction chez un autre
sujet, par exemple ; en situation de stress,
donc d’angoisse, le comportement peut être :
— soit exubérant, soit inhibé, avec réduction
et tendance à la banalisation des C, augmenta¬
tion des Dd et des Do, disparition des déter¬
minants affectifs, augmentation des détails
(Ad, A, Hd, H), restriction de la verbalisation
(substantifs seuls, hésitations, etc.), restric¬
tion et blocage à tous les niveaux (perceptif,
1073
expressif, thématique, etc. ; en effet, si la res¬
triction ne se manifeste qu’à un seul niveau,
la systématisation n'est pas encore réussie ni
complète) ;
— soit, à l’inverse, une exagération des ré¬
ponses (Dd, C, Clob, etc., allant jusqu'au
« fouillis ») ; ici, l'angoisse est camouflée par
une accentuation de la manifestation, par une
surcompensation, avec un grand nombre de G
et des réactions intenses, rapides, riches, etc.
Il est important de voir : jusqu'où va la
désorganisation : si la fonction de synthèse du
Moi et la fonction de synthèse du réel sont
altérées ; comment l'angoisse est combattue :
ainsi ce qui devrait s’exprimer en K s'exprime
en kob ; ainsi ce qui devrait s'exprimer en C
s'exprime en F, ou F E, ou E (la pulsion
n’étant pas reconnue comme telle, estompages
et couleurs achromatiques, C’).
1. NON
— L’ANGOISSE
SYSTEMATISEE
LIBRE,
C’est ici qu’on trouve le plus de signes spé¬
cifiques au Rorschach, avec des différences
liées à l’âge, au type de réaction de la per¬
sonnalité. L'angoisse libre s'exprime par :
— la verbalisation : « Je ne suis pas sûr... »,
« Ça pourrait être... mais... » ;
— le retard du temps de latence (quatre
fois plus long que la moyenne) ou l'ex¬
cessive précipitation (émission rapide
d'une banalité) ;
— la productivité réduite allant jusqu’au re¬
fus ;
— des réponses neutres, banales, allant jus¬
qu'à la disparition des réponses person¬
nelles ;
— la rigidité, la stéréotypie ;
— les déterminants E, et surtout :
— E de diffusion : « brouillard, brume »,
destinés à éviter une impression trop
sensorielle qui risquerait d’entraîner
une culpabilité ;
— dant
E du souvent
type « radiographie
à un sentiment
», correspon¬
d’infério¬
rité ou un complexe d’intelligence (élé¬
ment scientifique ou parascientifique),
supposant une anxiété, mais prouvant
aussi une tentative pour intellectuali¬
ser, rationaliser, justifier l'anxiété ;
— le choc Clob, surtout à la planche IV,
contre les impulsions agressives ou quel¬
quefois érotiques éveillées par la planche
ou la réponse Clob ;
— la réponse achromatique C’ (surtout noir ;
quelquefois, mais plus rarement, grise ou
— les
blanche)
contenus
; :
— rétrécissement d'intérêt (A % plus éle¬
vé) ;
— valorisation de la fragmentation (Hd,
Ad, petits objets, sans danger) ;
— peu de combinaison (peu d’activité
« Z »), peu de tentatives de combinai¬
son (ce qui est morcelé, fragmentaire,
insulaire, délimité, est plus sécurisant);
*
1074 BULLETIN DE PSYCHOLOGIE
— au niveau des banalités (formes net¬
tes) ou des généralités, des contenus
partiels ou neutres.
La tendance à l’évitement se manifeste aussi
bien dans les MA, les déterminants, que dans
les contenus, le but étant de ne pas s’engager
pour éviter le danger.
Il faut donc être vigilant en présence de
ces protocoles « anodins » qui peuvent cacher
une tendance systématique à éviter l'engage¬
ment.
• La « tendance à la compulsion » est faite
de combinaisons arbitraires : en effet, cer¬
tains sujets esayent d'utiliser tous les éléments
à la fois, donnant exclusivement des G, utili¬
sant plusieurs stimuli à la fois, plus ou moins
bien justifiés.
• Certaines K très personnelles au bord de
l'autisme, avec déformation, être humain à moi¬
tié irréel.
• Chocs.
• Equivalents de chocs.
Il n’y a pas de limite aux manifestations
de l’angoisse.
L’indice « Hd-Anat.-Sexe » (totalisant 12 à 15
R) n’est pas toujours valable ; il correspond
à un type d'angoisse liée à l’intégrité du
schéma corporel, mais bien d’autres éléments
peuvent être le signe d’une anxiété qui va de
la simple inquiétude (infériorité ou insécurité)
à un phénomène plus global.
• Quand les « remarques symétrie » sont
trop systématisées, il s’agit d'une organisation
défensive ou même d'une simple tentative.
2. — L’ANGOISSE LIÉE,
INHIBÉE, SYSTÉMATISÉE
Elle se voit à travers l’inhibition des mani¬
festations, leur réduction par un système dé¬
fensif névrotique installé (obsessionnel, hysté¬
rique ou hypomane, éventuellement).
Caractéristiques de cette inhibition :
a) Le doute de sol,
de sa propre valeur
Critique du test, critique de soi-même, souci
de la symétrie, souci de l'objectivité.
Erigeant une barrière de doutes et suspi¬
cions, dele comparaisons.
type sujet épuise son énergie dans ce
Ces sujets attribuent leur angoisse au doute,
mais le doute ne constitue qu'une barrière
contre des éléments de perturbation plus pro¬
fonds.
Ce trait rentre aussi dans le caractère ob¬
sessionnel.
b) L’ambivalence
dont le meilleur critère est le TJR.I. ambi-
équal, qui est également un trait obsession¬
nel.
Le sujet est sensible aussi bien à K qu’à C,
aux éléments sensoriels du monde extérieur
et à leur élaboration intérieure.
Exemple, aux planches noires et rouges : la
couleur attire, mais c'est une réponse K qui
surgit, le sujet disant à l'enquête que « cela
aurait pu être des tâches de sang. Donc l’émo¬
tion existe ; elle est rentrée et intégrée dans
une réponse différente. On trouve, par contre,
de nombreuses réponses aux planches pastel.
Le T.R.I. peut être dilaté ou coarté, mais
toujours ambiéqual.
c) Les tendances dépressives
Ici, une difficulté surgit : il y a allongement
des temps, coartation du T.R.I. Dans le type
coartatif ou coarté, la restriction porte sur les
deux modes d'expression (ambiéqual, coarté) :
réduction de participation du sujet ; appau¬
vrissement de la vie psychique. La passivité
des réactions est vue dans les E, EF, FE, Ban,
F+% élevé impliquant un contrôle rigoureux.
Tous ces éléments sont difficiles à préciser
pour distinguer la dépression d'une aridité du
type « caractère obsessionnel » ; pour parler
de dépression, il faut un affect à coloration
particulière : etil faut
verbalisation de ladonc
différence
tenir compte
observéede en¬
la
tre le protocole spontané et l’enquête : si
nous n'aboutissons à rien à l'enquête, il s’agit
de dépression ; si nous aboutissons, d'une ré¬
duction de type obsessionnel.
Tout appauvrissement de la vie psychique
correspond à une inhibition, d’où l'importance
de recourir à un autre test, thématique.
(Ici, il ne s'agit pas de la dépression mélan¬
colique.)
d) Les tendances agressives
plus ou moins camouflées et voilées
même,
Un sujet
mais inhibé
il accuse
est aussi
prêt lesà autres.
s’accuser lui-
— Dbl pas très francs : latéraux, secon¬
daires ;
— critiques, ergoteries ;
— dénigrement des personnages humains :
caricatures, inanimés, ridicules, marion¬
nettes, idoles, etc. ;
— dénigrement de l’entourage.
Tout ceci est assez fréquent.
e) La formation réactionnelle
Ici, à l’inverse, les protocoles sont longs,
détaillés ; pour cacher l'inhibition, le sujet
parle pour ne rien dire.
F+% élevé, surtout aux planches noires (con¬
tre les manifestations d’angoisse ; le sujet veut
prouver qu'il est à l'aise).
Quelquefois, les F+ sont donnés aux plan¬
ches noires, accompagnés de commentaires
dysphoriques qui n’entrent pas dans les ré¬
ponses («C'est affreux»).
f) Tout ce qui est indécision
Elle peut porter sur la critique du test, mais
aussi sur le fond des réponses, en particulier
sur dynamiques).
ni les K (formels, indéterminés, ni statiques
 N. RAUSCH DE TRAUBENBERG : LE TEST DE RORSCHACH
Le sujet n'utilise pas de façon positive la
tériorisation.
capacité de différer l'action ni la capacité d’in¬
g) Certaines tendances hystériques
Le véritable hystérique ne donne pas de
réponse franche C ; sa conversion lui suffit.
Il est comme au-dehors de la situation, mais
cette attitude et son refoulement caractéris¬
tique sont en fait plus rares qu'on ne pense.
Il est plus fréquent que nous ayons affaire
à l’hystéroïdie.
Le refoulement hystérique est un mécanisme
de défense enlevant le sentiment d’angoisse :
— peu de K (ce qui prouverait que les émo¬
tions ne sont pas absorbées par l'imagi¬
naire ;
— plus de réactions à la couleur ;
— élevé, sans K, avec contexte de re¬
foulement : peut donner lieu à des con¬
versions avec préoccupations corporelles
en général (anat. plus ou mois bien vus).
h) Des manifestations phobiques
d’une
• Attraction
incapacitéenvers
à en faire
le rouge,
quelque
accompagnée
chose de
plus ( « attraction-répulsion » ) .
• Impressions de vertige : attirance par le
vide des planches, correspondant à une atti¬
rance dans la vie réelle. En effet, la peur des
carastrophes
et le T.A.T. se transpose dans le Rorschach
• Nombreuses réponses A avec des conte¬
nus de « bêtes menaçantes », phobies de la pe¬
tite enfance (chiens, araignées, etc.), bêtes à
antennes, crocs, dents, griffes, pinces, etc.
• Quelquefois, les personnages eux-mêmes
sont menaçants (sorcières, géants), ou le
monde extérieur (orage, tempête, nuage noir).
Il s’agit, comme dans certains récits au
détruire
T.A.T., d’une
ou dévorer.
crainte d'un événement qui va
• Préoccupations anatomiques.
Il n'est pas certain dans ce dernier cas qu'il
s’agisse encore d’inhibition : l’angoisse est déjà
transformée, perçue à travers la phobie ; il
1075
s'agit
le rôled'une
d’intermédiaire.
double défense, un objet jouant
i) Expression
dans les de
couleurs
l’angoisse
Surtout chez les adolescents, une utilisation
désordonnée de la couleur est souvent signe
d'angoisse. Une expression intense est toujours
preuve d’angoisse.
« Volcans », « explosions », « feux d’artifice »
peuvent ne pas être pulsionnels, mais signe
d’angoisse.
La multiplicité et la diversité des manifes¬
tations de l'angoisse crée une difficulté.
En ce qui concerne le compte rendu, il est
important de retenir que l'angoisse n’est pas
pathologique en soi, tout le genre humain
étant plus ou moins angoissé. La question
posée concerne le fait que l’angoisse du sujet
puisse avoir une action déstructurante ; le
compte rendu étant adressé à l'extérieur, la
simple mention du terme « angoisse » peut
avoir aussitôt résonance pathologique. Il est
donc prudent d'éviter l’utilisation du terme.
— BIBLIOGRAPHIE —
La littérature sur le sujet est abondante.
• In « Rorschachiana », vol. I, cahier II,
article de Mme Canivet, et V : « Le Test de
Rorschach et le Diagnostic de l'Angoisse ».
• Dans différents manuels, les chapitres sur
l’angoisse.
• Dans le deuxième tome de Bohm on
trouve des indications sur la possibilité de
préciser la nature de l’angoisse :
a) l'angoisse libidinale se manifestarait par
une accumulation de C purs ;
b) l'angoisse phobique aurait pour symptôme
central le choc au noir, accompagné de Do,
Clob, Clob F, de visages ou animaux mena¬
çants ;
c) l'angoisse de castration se signalerait par
des Do, un F+% très élevé, sans choc noir,
mais avec
triade Dd-Dbl-Do.
des K et une augmentation de la