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DE L’ESPOIR DANS LE TRAGIQUE.

QUAND L’AGIR PROCURE DU SENS À


UNE VIE

Marcelle Monette, Jacques Quintin


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Association de Recherche en Soins Infirmiers | « Recherche en soins infirmiers »

2018/4 N° 135 | pages 7 à 13


ISSN 0297-2964
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-recherche-en-soins-infirmiers-2018-4-page-7.htm
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RENCONTRE
De l’espoir dans le tragique.
Quand l’agir procure du sens à une vie
Hope in tragedy. When action gives meaning to a life

Marcelle MONETTE, Infirmière et bioéthicienne, présidente du comité d’éthique de Transplant Québec, Montréal, Canada

Jacques QUINTIN, Philosophe et professeur agrégé, département de psychiatrie, Faculté de médecine et des sciences de
la santé, bureau du développement de l’éthique, Université de Sherbrooke, Canada

RÉSUMÉ
L’expérience de la maladie entraîne une désorientation, une perte de sens et de liberté d’agir. C’est tout le
champ des possibilités pratiques qui diminue avec comme résultat une expérience de l’action comme quelque
chose d’impossible. Dans ce cas, la question est la suivante : l’infirmière peut-elle contribuer à maintenir un
espoir d’une vie riche de sens, ajusté aux limites imposées par la maladie ? Nous proposons, dans ce contexte,
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un modèle humaniste d’accompagnement qui permet aux infirmières de redonner de l’espoir et du pouvoir aux

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personnes en situation de vulnérabilité. En examinant le meilleur et le pire scénario qui pourrait survenir chez la
personne vulnérable, la méthode d’accompagnement proposée met l’accent sur l’exploration d’interventions
pratiques qui pourraient favoriser le meilleur scénario et réduire le risque et les conséquences du pire scénario.
En travaillant sur certains aspects pragmatiques, nous constatons que la vie prend sens selon l’usage qu’on
peut en faire, eu égard aux possibilités d’action.

Mots clés : humanisme, éthique clinique, phénoménologie, espoir, santé, soins infirmiers.

ABSTRACT
The experience of illness entails a disorientation, a loss of meaning, and a loss of freedom to act. In other
words, the entire field of practical possibilities diminishes, resulting in action being viewed as something
impossible. In this case, the question is the following: can the nurse contribute to maintaining hope for a life
that is rich in meaning, adjusted to the limits imposed by the illness? We propose, in this context, a humanist
model of accompanying that allows nurses to restore hope and power to persons in vulnerable situations.
In examining the best and the worst scenario that a vulnerable person could be faced with, the method of
accompanying proposed places emphasis on the exploration of practical interventions that could foster the
best scenario and reduce the risk and the consequences of the worst scenario. In working on certain pragmatic
dimensions, we ascertain that life becomes meaningful according to the use we can make of it regarding the
possibility of actions.

Keywords: Humanism, clinical ethics, phenomenology, hope, health, nursing.

Pour citer l’article :


Monette M, Quintin J. De l’espoir dans le tragique. Quand l’agir procure du sens à une vie. Rech Soins Infirm. 2018
Dec;(135):7-13.

Adresse de correspondance :
Marcelle Monette : marcellemonette@sympatico.ca

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Introduction Le Modèle humaniste des soins
infirmiers-UDEM
L’infirmière, qui assure le suivi de patients en externe
et à domicile, peut prévoir, jusqu’à un certain point, Ce modèle de soins infirmiers, enseigné par Cara (1) et son
l’évolution d’une maladie selon ses périodes de stabilité et équipe à la Faculté des sciences infirmières de l’Université de
d’aggravation jusqu’au point de non-retour dans certains Montréal depuis une dizaine d’années, puis testé et retravaillé
cas. D’ici là, le patient et ses proches ont une vie à vivre à de nombreuses reprises, promeut « l’excellence dans la
en s’adaptant aux pertes progressives et en confrontant prestation de soins, lesquels sont basés sur une relation
le désespoir qui les guettent, tout en accueillant aussi les humaniste de partenariat, centrée sur la signification que la
bonheurs au quotidien. personne soignée accorde à son expérience de santé et son
projet de vie » (1, p.23). S’inscrivant dans « l’école de pensée
Dans ce cas, la question posée est la suivante : l’infirmière du caring… caractérisée par une pratique infirmière centrée
peut-elle contribuer à maintenir un espoir, ajusté aux limites sur l’accompagnement, c’est-à-dire « être avec… » (1, p.23),
imposées par la maladie, d’une vie riche de sens chez une la pratique du soin vise à « constater et souligner ses efforts ;
personne atteinte d’une maladie évolutive et exposée au l’encourager à maintenir l’espoir » (1, p.25). Cara présente
risque du désespoir ? l’infirmière comme une partenaire qui reconnaît l’unicité de la
personne dans le choix d’interventions pertinentes (1, p.24).
Nous postulons l’hypothèse que cela est possible en travaillant
sur certains aspects pragmatiques, dans la mesure où la vie Plus les personnes sont vulnérables, plus l’expérience
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prend sens selon l’usage qu’on peut en faire, eu égard aux relationnelle du soin demande de la délicatesse pour que ces
possibilités réelles d’action. Ce sont ces petites actions qui personnes se sentent toujours en maîtrise de leurs choix de
viennent soutenir le sens que la personne donne à sa vie. vie. L’essence du soin est justement d’établir cette relation
L’infirmière stimule, encourage et soutient la recherche de de confiance et de respect avec, entre autres, les personnes
ces actions qui maintiennent l’espoir en favorisant un climat vieillissantes soumises aux processus de détérioration
où il y a toujours place à la créativité pour l’amélioration des physique et mentale.
conditions de vie.
Mais comment se vit l’expérience de la maladie ?
Dans cet article, nous avons choisi le Modèle humaniste des
soins infirmiers-UDEM pour soutenir notre conception de la
discipline des soins infirmiers. Notre choix a aussi porté sur
L’expérience de la maladie. Une
d’autres philosophies humanistes dont nous présenterons perspective phénoménologique
quelques concepts. Il en résulte un entrecroisement de
notions semblables et certainement convergentes malgré L’expérience de la maladie est un phénomène universel.
les approches différentes des disciplines, qui servent Elle fait partie intégrante de l’existence humaine. Loin de
d’appuis aux réponses à notre question de départ. Ainsi se réduire à un processus physiologique que l’on peut
nous décrivons, dans une perspective phénoménologique, objectiver (2), la maladie se vit subjectivement. Il suffit d’être
l’expérience de la maladie. Ensuite, nous présentons attentif à ce que les personnes malades racontent à propos
d’abord quelques définitions et conditions de réalisation du de leur état pour se rendre compte que la maladie prend un
concept d’espoir. Enfin, comme notre propos concerne des tout autre sens que celui que lui donne la science médicale.
personnes âgées dont l’autonomie, les alternatives d’action Ce sont les phénoménologues qui se sont intéressés à la
et les conditions de réalisation de l’espoir sont limitées par maladie comme expérience vécue dans la mesure où la
la détérioration physique et la maladie, nous exposons phénoménologie est une méthode philosophique pour
des éléments de la théorie des « capabilités » chez des l’étude de l’expérience vécue en faisant ressortir l’expérience
sujets vulnérables développée par Amartya Sen et Martha humaine subjective et préréflexive.
Nussbaum. Selon cette théorie, les êtres humains en
situation de vulnérabilité permanente ont droit à l’exercice Par maladie, nous entendons toute condition médicale sévère
maximal de leur autonomie. Pour les soutenir dans ce droit, et persistante qui entraîne un changement de vie durable.
l’accompagnement de l’infirmière doit s’orienter dans ce Il s’agit d’une condition à partir de laquelle il n’y a pas de
sens. C’est ce qu’illustre la méthode d’accompagnement rétablissement à court terme (3). La maladie est vécue comme
proposée par la recherche constante, avec les personnes une expérience intense qui jette un trouble sur les valeurs
vulnérables, d’actions qui soutiennent l’espoir et diminuent et les croyances de la personne malade. La vie n’est plus
le sentiment qu’il n’y a plus rien à faire. Nous terminons comprise comme elle l’était avant l’apparition de la maladie.
avec la conception de la santé de Nordenfelt, de Carel et La personne malade dit « il n’y a plus rien de pareil » ou « ce
de Canguilhem. n’est plus comme avant ». En somme, la personne n’habite

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De l’espoir dans le tragique.
Quand l’agir procure du sens à une vie

plus le monde et ne vit plus de la même manière. C’est espoir précis et concret, par exemple pouvoir retourner au
pourquoi la maladie entraîne une désorientation et une perte théâtre, c’est la possibilité même de l’espoir qui est absente
de sens. La vie ne se présente plus avec la même cohérence. ou amoindrie. Ce n’est pas l’objet de l’espoir qui disparaît,
mais l’espoir lui-même. La personne n’est plus en mesure
Kay Toombs, une philosophe souffrant de sclérose en d’imaginer son futur.
plaques, a beaucoup écrit sur la maladie selon une
perspective phénoménologique (4). Selon elle, les principales
caractéristiques de la maladie vécue sont la perte du sens de
Qu’est-ce que l’espoir ?
la totalité, de certitude, de contrôle, de liberté d’agir et la perte
du monde familier. Fredrik Svanaeus (5) voit dans l’expérience Une métasynthèse de ce concept a été réalisée à partir
de la maladie une expérience d’étrangeté, comme si la d’une vingtaine d’articles écrits entre 1980 et 2010 (11).
personne malade n’habitait plus le monde. Blankenburg décrit Dans l’ensemble, il ressort de ces études que l’espoir est
cette expérience comme une perte d’évidence naturelle (6). « une ressource psychologique importante qui aide les
participants à composer avec leur maladie chronique.
Plusieurs personnes racontent que la maladie a induit une Plusieurs attributs positifs sont associés à l’espoir : sens du
modification dans leur perception de l’espace et du temps (7). soi, sentiments de contrôle, relations avec les autres, qualité
Par exemple, si la personne ne se déplace plus avec la même de vie » (11, p.1217). Selon la documentation scientifique,
agilité et qu’elle a besoin d’une canne ou d’une marchette, les déterminants les plus significatifs de l’espoir sont : la
elle mesure les distances d’une autre manière. Se déplacer satisfaction à l’égard de soi et des autres, la confiance en
du salon à la cuisine peut se transformer en aventure et en la vie et l’anticipation positive de l’avenir (12). Dans un essai
épreuve en raison des obstacles qui s’y présentent, et qui relatif à des patients en soins palliatifs, Moreau a défini
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ordinairement ne sont pas des embûches. Ce qui semblait l’espoir comme « une vision qui transcende le présent » (13,
auparavant presque insignifiant devient maintenant un enjeu. p.14). Elle ajoute que « cet espoir repose sur une force qui
Même si objectivement la distance est toujours de quelques soutient l’individu durant les périodes difficiles de sa vie au
mètres, l’évaluation subjective n’est pas la même. Cela cours desquelles les ressources paraissent insuffisantes »
aura aussi un impact sur la perception de la temporalité. Si (13, p.14-15). Paley définit l’espoir comme « une force de
auparavant, cette distance pouvait être franchie en quelques vie, un pouvoir intérieur, un sentiment humain universel, une
secondes, maintenant elle peut exiger un investissement vertu » (14, p.358). Nous pouvons alors affirmer que l’espoir
temporel plus grand et, dans certains cas, induire un sentiment n’est pas la croyance en l’obtention d’une attente de résultat,
de découragement. mais la vision qu’il y a une place pour la personne dans un
avenir rapproché et lointain. Cette force de vie existe, même
La pensée de Heidegger développée dans son livre Être et sous des apparences de lassitude et de découragement.
temps (8) peut être éclairante pour comprendre l’expérience
de la maladie. Ce qui caractérise l’être humain pour Heidegger Il est difficile de saisir si c’est l’espoir qui donne du sens à la
est son pouvoir-être (Seinkönnen), c’est-à-dire son ouverture vie ou si c’est le sens que l’on donne à la vie qui maintient
et son habileté à se projeter : la personne devient ce qu’elle l’espoir. Il apparaît que les deux concepts sont imbriqués et
souhaite en posant des actions appropriées. C’est ce que ne peuvent exister l’un sans l’autre.
la personne projette de devenir qui donne un sens à son
existence. Dès lors, le possible définit le mieux l’être humain. C’est pour cette raison que l’infirmière doit travailler avec
Mais s’il y a du possible, c’est en raison de la temporalité. les patients et leurs proches à rechercher et à poser
Lorsque la personne tombe malade, la temporalité s’en trouve des actions qui diminueront les obstacles à l’espoir et
affectée. Dans bien des cas, c’est l’avenir qui se ferme ou qui qui favoriseront son essor. L’espoir naît lorsqu’il devient
n’est plus disponible. Merleau-Ponty (9) reprend cette idée possible de poser des actions qui ouvrent vers l’avenir.
dans la mesure où l’être-au-monde ne se caractérise pas par Autrement dit, le sens de l’existence prend sa source en
un « je pense », mais par un « je peux ». partie dans le champ de l’action. Ainsi, agir, c’est s’engager
dans une temporalité.
Cela n’est pas sans conséquence pour la personne aux prises
avec la maladie : le monde s’appauvrit et la vie présente
de moins en moins de sens. La personne malade peut, à
Soutiens et obstacles à l’espoir
l’occasion, se demander si la vie mérite d’être vécue et si
elle en vaut la peine. Avec la maladie, c’est tout le spectre de Chez les patients atteints de maladies chroniques, les
l’avenir qui se rétrécit. (10). Il s’agit ici d’une perte d’espoir, cinq principales interventions permettant de nourrir
ce sentiment existentiel qu’il n’y a plus d’avenir. Selon l’espoir sont de : collaborer à réduire les effets délétères
Ratcliffe, la perte de l’espoir ne désigne pas seulement douter de la maladie ; favoriser le développement et le maintien
d’une issue positive quelconque : c’est aussi la perte de la de relations significatives avec des parents et amis ;
capacité à espérer. Autrement dit, plus qu’une perte dans un encourager les groupes de soutien ; aider à conserver le

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contrôle et la poursuite de buts réalistes ; soutenir toutes ce qu’elle désire. Car ce que la personne désire ne recoupe
les activités qui ont des effets positifs sur l’estime de soi, la pas nécessairement ce qu’elle valorise. C’est seulement la
spiritualité et le bien-être (15). réalisation de ce qui est valorisé qui procure le bien-être.

À ces interventions, Moreau (13, p.36-37) ajoute d’autres La théorie de Sen nous amène à jeter un regard critique sur les
facteurs qui maintiennent l’espoir chez des personnes en ressources déployées auprès des personnes malades dans
soins palliatifs : l’amour des proches, la croyance d’une vie le cas où ces ressources ne sont pas significatives pour les
après la mort, les relations positives avec les professionnels patients, c’est-à-dire si elles visent seulement l’amélioration
de la santé, le plaisir aux petits bonheurs de la vie, le courage, de l’état de santé telle que définie par Boorse (2).
la détermination, la sérénité, les souvenirs heureux. Toutefois,
il existe aussi des facteurs qui sont des obstacles à l’espoir : Pour Martha Nussbaum, les « capabilités » renvoient à ce
le sentiment d’abandon, la distance émotionnelle et physique qu’une personne est capable de faire et d’être (18, p.39) dans
ressentie auprès des professionnels de la santé et d’autres des conditions tragiques où elle est exposée à la fortune et
personnes côtoyées, la douleur physique non contrôlée. à la vulnérabilité de sa condition (19). Pour la chercheure, la
vie ne se résume pas à un revenu. La « capabilité » d’une
Il suffit que quelques-uns de ces facteurs soutenants soient personne est un « ensemble de possibilités que les individus
présents pour favoriser la recherche d’actions qui atténuent peuvent décider d’exercer ou non. Ils ont ainsi la possibilité de
les obstacles à l’espoir et soutiennent celles qui lui sont se construire eux-mêmes, d’investir leurs désirs de manière
favorables. pluraliste » (20, p.3, 10-1).

C’est dans cette conception des capabilités que s’inscrit la


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Théorie des « capabilités » selon méthode d’accompagnement du pire et du meilleur scénario
Amartya Sen et Martha Nussbaum proposée dans cet article en montrant qu’une infirmière peut
redonner du pouvoir et de l’espoir à une patiente malgré les
Avant de passer à l’étape de la recherche de ces actions, limites de sa maladie.
nous examinerons brièvement quelques concepts développés
par Amartya Sen et Martha Nussbaum, soit la théorie des
« capabilités », la définition des « capabilités » fondamentales,
La recherche du pire et du meilleur
la vulnérabilité des citoyens et la participation des émotions scénario
démocratiques des professionnels dans le choix des actions
auprès des personnes vulnérables. Ce qui rend une vie sensée, où l’espoir est possible, dépend
de conditions pragmatiques. La méthode d’accompagnement
Amartya Sen (16,17) propose, avec son concept de présentée met l’accent sur des interventions pratiques en
« capabilité », une augmentation des possibilités réelles que questionnant le pire et le meilleur scénario (21). Illustrons cette
l’individu a, afin de choisir la vie qu’il souhaite mener. La méthode à l’aide d’un exemple fictif.
question pour Sen consiste à bien identifier les ressources
réelles et externes d’une personne pour qu’elle accomplisse la Il s’agit de madame Viger, 88 ans, une ancienne directrice
vie qu’elle décide de mener. La théorie de Sen se démarque de d’école, célibataire et indépendante. Depuis deux ans, elle
la théorie utilitariste dans sa version hédoniste qui mesure le est atteinte d’arthrose sévère aux mains et aux pieds et
bien-être selon le plaisir ressenti. Pour Sen, la liberté de choisir d’un affaissement des dernières vertèbres de la colonne
sa vie, selon les ressources ou « capabilités » de la personne, vertébrale, ce qui la fait épisodiquement souffrir et qui limite
est un meilleur indicateur du bien-être que le plaisir. Car une sérieusement sa mobilité. Elle est suivie en rhumatologie et
personne peut être contente de son sort, par exemple si elle à la clinique de la douleur. Quand elle est souffrante, elle
reçoit de la monnaie alors qu’elle vit dans la rue, sans pour prend des médicaments analgésiques puissants et reste
autant avoir une réelle liberté de mener une vie correspondant alitée. À ce moment-là, elle pense véritablement qu’elle
à ses idéaux et valeurs. Pour Sen, la question devient celle- serait mieux morte. Par contre, quand son dos la laisse
ci : quel usage la personne peut-elle faire des ressources à tranquille, son énergie décuple.
sa disposition, si ressource il y a ? Il s’agit de mettre en place
des conditions de possibilités pragmatiques qui permettront Pour madame Viger, le pire scénario serait de demeurer
la réalisation d’une vie selon ses projets. Cela implique que le confinée à la maison, handicapée, jusqu’à la survenue de
bien-être d’une personne englobe davantage que la santé. De sa mort avec, comme conséquence, une perte d’envie de
sorte qu’une personne en santé peut n’éprouver aucun bien- soigner sa tenue vestimentaire, une perte de sa curiosité
être. Autrement dit, à quoi sert la santé si la personne n’a pas attisée par le déploiement des événements culturels, une
la liberté de choisir sa vie ? Le bien-être de la personne est perte d’appétit de goûter aux cuisines tendances, une perte
tributaire de l’accomplissement de ce qu’elle juge important, de sens et un immense sentiment de solitude. L’identification
de ce qu’elle considère comme étant une valeur et non pas de du pire scénario aide à entrevoir les pires conséquences

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Quand l’agir procure du sens à une vie

de la maladie tout en essayant d’imaginer les actions qui scénario. C’est pourquoi il faut identifier avec madame Viger
en atténuent les inconvénients. Comme elle possède un d’autres actions qui peuvent atténuer les obstacles. Ces autres
appartement confortable et tient à l’habiter le plus longtemps actions peuvent aussi s’accompagner d’autres obstacles
possible, pourrait-elle continuer d’y vivre si elle ne pouvait devant lesquels l’infirmière devra poser d’autres actions.
plus faire ses courses, le ménage, etc. ? Est-ce qu’une action, Finalement, devant le pire scénario, c’est souvent une série
comme celle de se déplacer désormais en fauteuil roulant, de petites actions qui s’imbriquent les unes dans les autres,
pourrait lui permettre de maintenir la même vie sociale ? Le comme une poupée russe, qui change les choses. Il s’agit de
rôle de l’infirmière consiste à explorer avec madame Viger, sortir de la tendance à trouver la solution magique qui règlerait
dans un esprit démocratique et de patient partenaire, toutes tout, comme une panacée. En faisant intervenir la patiente dans
les actions possibles qui pourraient être mises en place pour la recherche et le choix des actions qui ont du sens pour elle,
atténuer les conséquences fâcheuses de sa maladie. il est permis de penser que celle-ci en arrive à dédramatiser la
situation et à retrouver un certain pouvoir sur sa vie.
Il convient dès lors pour l’infirmière d’accompagner madame
Viger afin d’atténuer les obstacles dans ces moments de La démarche est reprise à l’identique en imaginant le
crise aiguë d’arthrose. À la question « de quoi auriez-vous meilleur scénario. Pour madame Viger, le meilleur scénario
le plus besoin présentement ? », les réponses pourraient consisterait à pouvoir continuer à voyager, ce qu’elle a fait
ressembler à « soulager mes douleurs intolérables » et à « me à plusieurs reprises durant toute sa vie. On pourrait dire
procurer des repas pendant que je suis incapable de faire qu’« aller à la rencontre de l’autre » est l’action qui a le
le marché »1. Afin de remédier aux obstacles qui pourraient plus de sens pour elle, d’autant plus que sa curiosité ne
survenir et entraver la satisfaction de ses besoins, l’infirmière s’est jamais tarie. Pourtant, la réduction de sa mobilité
pourrait s’assurer que madame Viger possède tous les présente tout un obstacle. Faire ses valises, se déplacer
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médicaments anti-inflammatoires et antalgiques requis par vers l’aéroport et dans celui-ci et circuler à l’intérieur d’un
son état et qu’elle a suffisamment de vivres pour s’alimenter. pays étranger sont autant de limites à la réalisation de
Par contre, l’inconvénient majeur vient du fait qu’elle vit ses désirs quasi utopiques. Dans ce cas, afin de favoriser
seule, sans service, excepté l’accès, en cas d’urgence, au le meilleur scénario, il s’agirait de proposer à madame
concierge, et qu’elle risque de manquer du nécessaire. Des Viger, en attendant une diminution de la douleur et un
solutions à cet inconvénient consisteraient à déterminer retour à une plus grande mobilité, la poursuite d’activités
les ressources externes lui permettant de se procurer des significatives comme des sorties culturelles avec différents
médicaments (coordonnées téléphoniques, service de proches : ballets, opéras, musées, restaurants. Toutes ces
livraison de la pharmacie, etc.) et de la nourriture (coordonnées activités lui permettraient de rencontrer d’autres personnes
téléphoniques d’un traiteur qui livre à domicile, etc.). significatives, de satisfaire sa curiosité et de compenser
temporairement son désir de voyager.
Madame Viger, une fois assurée qu’elle a suffisamment de
médicaments et de nourriture, devra être aidée par l’infirmière Quand des indices apparaîtront sur l’amélioration de
pour maintenir des relations avec des professionnels de la son moral, avec le contrôle de la douleur et l’apport des
santé si son état le requérait. Comme elle ne se déplace pas services de compensation, l’infirmière pourra amorcer
facilement, une solution serait de recourir au transport adapté une discussion sur son ouverture à vivre dans un milieu
et de faire appel à ses proches. de vie plus adapté à ses besoins, identifier avec elle ceux
qui lui conviendraient le plus et l’encourager à les visiter
Cette méthode d’accompagnement à l’intérieur du pire avec des proches. Si madame Viger argumente et affirme
scénario pourrait favoriser l’expression de sa détresse. que les coûts de location sont élevés et qu’elle ne peut
L’inconvénient de l’expression de la détresse serait se le permettre, l’infirmière pourra lui fournir une liste des
d’importuner ses proches qui ne sauraient pas comment agences, moins coûteuses, dédiées à l’accompagnement
l’aider. Sa détresse pourrait être liée à la peur de ne plus être des personnes en perte d’autonomie.
capable de reprendre des forces et de rester handicapée. Afin
d’atténuer cet inconvénient, l’infirmière pourrait lui suggérer Si les arguments invoqués découlent de préjugés
de s’adresser au service d’écoute d’une association qui vient défavorables à ces milieux, dont une partie de la clientèle
en aide aux personnes atteintes d’arthrose sévère. souffre de déficits cognitifs perturbants pour une personne
qui a peur de perdre ce qui lui reste de lucidité, l’infirmière
En explorant la situation, on réalise qu’il y a toujours des devra valoriser surtout les milieux où les résidents
obstacles à la mise en place des actions pour réduire le pire autonomes sont en majorité et où les services mis en
place lui permettraient de continuer de fréquenter salles de
concert, cinémas, restaurants et centres commerciaux.
1
Nous sommes conscients que toutes les propositions concrètes sont
chargées de valeur et peuvent être discutées quant à leur fondement et
leur pertinence. L’objectif du texte ne vise pas à promouvoir des solutions En somme, il est important qu’une personne connaisse et
particulières mais un processus de créativité en partenariat. tente de maîtriser « tous les types de facteurs qui peuvent

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faire obstacle à son action » (22, p.70) comme tous ceux conditions. Car toutes ces propositions d’actions que
qui peuvent devenir favorables pour soutenir les buts que la nous suggérons ne visent pas tant à guérir le patient qu’à
personne s’est fixés. lui permettre de vivre avec la maladie en montrant qu’il y a
d’autres dimensions à l’existence. C’est ce que Havi Carel
L’exercice consiste à trouver les actions possibles (23) tente de démontrer lorsqu’elle suggère que le bien-être
qui favorisent le meilleur scénario et qui atténuent le est possible dans la maladie.
pire scénario tout en réduisant les inconvénients ou
les difficultés que peuvent générer ces mêmes actions Nous avons beaucoup insisté sur les aspects négatifs de
positives. Au lieu d’essayer de convaincre madame Viger la maladie. Mais il y a aussi des aspects positifs à cette
que ses désirs sont illusoires, il s’agit de rechercher avec expérience. Loin d’être une malchance, elle peut devenir une
elle, selon ses ressources, plusieurs pistes d’actions occasion de comprendre le monde d’une autre manière. La
qui s’interinfluencent pour finalement faire bouger maladie peut reproduire l’expérience de « l’épochè » telle que
simultanément la situation et le sens qu’elle accorde à sa développée par Husserl. Certes, pour le phénoménologue,
vie et aux actions qu’elle tente d’entreprendre. Ainsi, il est cela s’effectue sur une base volontaire, tandis que pour la
possible de croire que madame Viger conserverait, malgré personne malade, c’est une expérience qu’elle subit (24,
ses limites, un certain contrôle sur sa vie. p.58-59). La maladie pose une distance entre la personne
malade et son monde quotidien souvent pris pour acquis à
Poser des actions qui soutiennent le meilleur scénario travers une routine de vie et des habitudes de toutes sortes.
et qui réduisent le pire scénario en sachant que ces La maladie révèle des aspects de l’existence humaine qui ne
actions rencontreront des obstacles, implique qu’il faudra sont pas normalement observés.
continuer de rechercher de nouvelles actions afin de
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réduire ou d’éliminer ces obstacles. Ce faisant, chaque C’est pour cette raison que la santé, entendue comme moyen
action se présente avec des avantages à renforcer et statistique, ne peut pas être la seule norme pour mener
des inconvénients à réduire. Aussi, il arrive qu’une même une existence (2). La maladie, comme forme de vie, peut
action puisse exercer une influence autant sur le pire amener une autre normativité. Ici, l’apport de Canguilhem
que sur le meilleur scénario, ce qui lui donne une grande devient intéressant. En fait, pour Canguilhem, la santé est
valeur. la capacité de transformer les normes du vivant (25). En ce
sens, nous affirmons que toutes les possibilités d’actions,
En aidant à créer un espace entre les personnes et leur qui sont proposées à la personne malade par l’infirmière et
maladie où l’on imagine des possibilités d’action, on la personne à elle-même, servent à créer une nouvelle forme
tient à distance le sentiment d’une tragédie et on permet de vie. Pour l’infirmière, cela implique que son geste prend
la réappropriation de leur capacité à décider. Les actions une dimension éthique et politique dans la mesure où il
choisies sont celles qui laissent l’horizon ouvert pour vivre s’inscrit dans un espace beaucoup plus vaste que celui de
de belles expériences. La responsabilité de l’infirmière n’est l’individu. Même si « le développement des capabilités se fait
pas de trouver les solutions, mais d’interagir en posant des toujours individuellement, il doit être placé sous le signe de
questions sur le pire et le meilleur scénario et en suggérant la responsabilité de la société » (20, p.2). Il existe dès lors un
des pistes d’actions possibles qui, souvent, proviendront de devoir pour la société de poser des conditions de possibilités
la personne malade elle-même. pragmatiques pour l’émergence d’une vie menée selon les
souhaits de chaque personne.

Une nouvelle conception


de la santé Conclusion

Cela nous conduit à reprendre la conception de la santé Notre méthode d’accompagnement repose sur le cadre
développée par Nordenfelt qui a des airs de famille avec la fourni par le Modèle humaniste des soins infirmiers-UDEM
théorie de la justice développée par Amartya Sen. La théorie et d’autres philosophies de type phénoménologique et
proposée par Nordenfelt consiste à définir la santé comme pragmatique et sur le concept de l’espoir, comme défini
la capacité de vivre selon des buts vitaux que la personne dans la documentation scientifique. Nous avons pu montrer
se donne dans des circonstances raisonnables (22, p.80). que l’espoir correspond à une force de vie à l’intérieur de la
Toutefois, la réalisation de ces buts exige la performance personne qui la propulse vers l’avant. Ce concept constitue
d’au moins une action, mais si le but est de nature plus aussi une entrée sur d’autres possibilités grâce à l’ouverture
générale, cela implique une séquence d’actions (22, p.80). générée par la mise en place d’actions autour du pire et du
Autrement dit, le but final est atteint à travers l’atteinte de meilleur scénario. Cette manière d’intervenir, génératrice
buts intermédiaires. Ce que nous proposons s’en inspire d’espoir, « propose des moyens concrets de maximiser
grandement. Et c’est ce qui permet à la personne malade les activités du quotidien en ayant recours à des activités
de vivre une vie éprouvée par la maladie dans de meilleures significatives » (21). Autrement dit, une possibilité d’action

12 l Recherche en soins infirmiers n° 135 - Décembre 2018


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De l’espoir dans le tragique.
Quand l’agir procure du sens à une vie

génère une autre possibilité d’action qui semble logique pour 5. Svevaeus F. Das unheimliche-towards a phenomenology of illness.
Med Health Care Philos. 2000 Jun;3(1):3-16.
la personne. Ainsi celle-ci conserve sa place dans le monde
et continue d’apprécier les choses de la vie. 6. Blankenburg W. La perte de l’évidence naturelle. Paris: Presses
Universitaires de France; 1991.
Certes, il y a du tragique dans l’existence et nulle vie n’est 7. Ratcliffe M. Varieties of temporal experience in depression. J Med
épargnée. Quand la colonne vertébrale et les jambes Philos. 2012 Apr;37(2):114-38.
faiblissent et ont du mal à supporter le poids du corps, 8. Heidegger M. Être et temps. Paris: Gallimard; 1986.
quand les organes vitaux montrent des signes évidents de
9. M erleau-Ponty M. Phénoménologie de la perception. Paris:
grande fatigue et quand les déficits cognitifs se manifestent, Gallimard; 1945.
s’installent des difficultés avec lesquelles les personnes
doivent composer ou se résigner. Pourtant, il est possible 10. Ratcliffe M. What is it to lose hope? Phenomenol Cogn Sci. 2013
Dec;12(4):597-614.
de conserver l’espoir d’une vie meilleure malgré le tragique
si nous posons des actions qui maintiennent un espace de 11. Duggleby W, Hicks D, Nekolaichuk C, Holtslander L, Williams
A, Chambers T et al. Hope, older adults, and chronic illness:
pensée et de créativité. « Ce faisant, il devient possible de
a metasynthesis of qualitative research. J Adv Nurs. 2012
croire qu’il peut y avoir du vivre bien à l’intérieur de la maladie Jan;68(6):1211-23.
autant pour la personne malade que pour ses proches » (21).
12. Schrank B, Woppmann A, Sibitz I, Lauber C. Development and
La vie devient un champ de possibilités dans lequel nous nous
validation of an integrative scale to assess hope. Health Expect.
projetons. La vie devient alors un projet. Il s’agit de l’espoir, 2011 Dec;14(4):417-28.
grâce auquel la vie continue d’être bonne.
13. Moreau D. La mouvance de l’espoir en soins palliatifs. [Mémoire
de 3ème cycle]. Trois-Rivières: Université du Québec; 2009.
Des problèmes de vie, il y en aura toujours. La question
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devient celle-ci : sommes-nous en mesure d’y faire face ou 14. Paley J. Hope, positive illusions and palliative rehabilitation. Prog
Palliat Care. 2014 Feb;22(6):358-62.
avons-nous les ressources pour le faire ? Pour être créatif ?
En fin de compte, la santé optimale n’est peut-être pas si 15. Schrank B, Bird V, Rudnick A, Slade M. Determinants, self-
importante qu’on le laisse croire. La liberté d’agir en fonction management strategies and interventions for hope in people
with mental disorders: systematic research and narrative review.
de la vie que l’on souhaite mener procure sûrement plus de
Social Science & Medecine. 2012 Feb;74(4):554-64.
bien-être que la seule santé. Cela donne un sens à la formule
de Carel (23) selon laquelle l’être humain peut être bien avec la 16. Sen A. L’idée de justice. Paris: Seuil; 2010.
maladie. Par conséquent, il ne s’agit plus de penser et d’agir 17. Sen A. Éthique et économie. Paris: Les Presses Universitaires de
contre la maladie, mais de penser et d’agir avec la maladie. France; 2012.
18. Goldstein P. Vulnérabilité et autonomie dans la pensée de Martha
C. Nussbaum. Paris: Les Presses Universitaires de France; 2011.
Déclaration de conflits d’intérêts
19. Moati R. Martha Nussbaum : la fragilité du bien/l’art d’être juste
(Partie I) [En ligne]. Actu Philosophia; 2017. [cité le 14 août 2018].
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Disponible: www.actu-philosophia.com
20. Brugère F. Martha Nussbaum ou la démocratie des capabilités
Références [En ligne]. La Vie des idées; 2013. [cité le 14 août 2018].
Disponible: http://www.laviedesidees.fr/Martha-Nussbaum-ou-
la-democratie.html
21. Quintin J, Monette M. L’accompagnement éthique. De patient à
1. Cara C, Gauvin-Lepage J, Lefebvre H, Létourneau D, Alderson M, agent dans l’adversité. Éthique et Santé. 2016 Jun;13(2):75-82.
Larue C, et al. Le Modèle humaniste des soins infirmiers - UDEM :
perspective novatrice et pragmatique. Rech Soins Infirm. 2016 22. Nordenfelt L. Action, ability and health. Essays in the philosophy
Jun;2(125):20-31. of action and welfare. Dordrecht (Pays-Bas): Kluwer Academic
Publishers; 2000.
2. B oorse C. Health as a theoretical concept. Philos Sci. 1977
Dec;44(4):542-73. 23. Carel H. Can I be ill and happy? Philosophia. 2007 Jun;35(2):95-
110.
3. Carel H. Phenomenology of illness. Oxford: Oxford University Press;
2016. 24. Tatossian A. La phénoménologie des psychoses. Argenteuil: Le
Cercle Herméneutique; 2002.
4. Toombs K. The meaning of illness: A phenomenological account
of the different perspectives of physician and patient. Amsterdam: 25. Canguilhem G. Le normal et le pathologique. Paris: Les Presses
Kluwer; 1993. Universitaires de France; 2013.

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