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Chapitre 

L’émergence
du yield management

Executive summary

 Une nouvelle approche de la gestion commerciale


des entreprises de service est née dans les années 1980.
Nous rappelons dans ce chapitre les origines du yield
management.
 Nous présentons une définition du yield management,
devenue aujourd’hui le revenue management, et en
expliquons les principes.
 Les techniques de yield management se développent, et
touchent aujourd’hui des secteurs d’application divers.
 Nous évoquons en fin de chapitre les concepts de total
revenue management et de revenue integrity, représentatifs
des évolutions du revenue management vers une approche
plus globalisée de la gestion commerciale (pricing, relation
client, distribution, etc.) des activités de service.

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REVENUE MANAGEMENT

Origine du yield management


Les bases du yield management ont été jetées tant d’un point de vue
académique que managérial dans le courant des années 1970. Les pre-
miers travaux, dont ceux de Littlewood (1972), ont introduit l’idée de
la maximisation des revenus pour une capacité donnée, plutôt que la
maximisation du taux d’occupation d’un avion (nombre de passagers).
D’un point de vue managérial, l’émergence du yield management
est associée à l’évolution du secteur aérien aux États-Unis, à la fin
des années 1970. La déréglementation du secteur (Airline Deregula-
tion Act, 1978) a conduit au développement de nombreuses compa-
gnies, créant une situation de forte concurrence. Dans ce contexte,
les acteurs tendent à déclencher des guerres des prix ; la baisse du
prix, arme la plus rapidement actionnable, permet de reprendre
ou de conserver ses points de part de marché. Mais cette tactique
entraîne le plus souvent une action identique de la part des concur-
rents. La guerre des prix est alors déclenchée. La solution salvatrice
à court terme, s’avère destructrice à moyen et long terme pour la
majorité des acteurs. Dans ce contexte, le yield management contri-
bue à éviter totalement ou partiellement la guerre des prix. Les mou-
vements massifs à la baisse des prix sont alors remplacés par des
variations des prix plus nuancées et mieux adaptées aux profils de
clientèles, aux périodes de vente, ainsi qu’aux types de produits.
Cette réflexion a conduit à l’émergence du yield management lors
de la crise vécue par le secteur de l’aérien aux États-Unis. Les opéra-
teurs sont progressivement passés d’une logique d’optimisation du
remplissage à celle d’optimisation du revenu généré par les ventes
réalisées, sans chercher à remplir l’avion à « n’importe quel prix ».
Le développement des GDS (Global Distribution System), à
cette même période, a facilité l’application des techniques de yield
management et contribué à leur diffusion. Ainsi, American Airlines
est présentée comme la compagnie ayant appliqué les premières
approches de yield management, bénéficiant du support de son sys-
tème informatisé de distribution Sabre.

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L’émergence du yield management

Principes du yield management
Principes
Le yield management repose sur un principe de forte variation tari-
faire adaptée au contexte de marché (intensité de la demande, type
de demande, pratique des concurrents, etc.). Il contribue à la pro-
tection de la clientèle à haute contribution, tout en offrant des accès
à des niveaux tarifaires plus avantageux à des périodes creuses ou
pour des réservations validées longtemps avant la date de réserva-
tion (early booking). Il suppose une segmentation approfondie des
clientèles, intégrant à la fois la valeur attribuée par le client à la
prestation de service (target-valuing), ainsi que la « sensibilité prix »
et la « sensibilité à la qualité » des consommateurs.
Un niveau de sélection plus avancé, lié aux pratiques de yield,
consiste à ne plus servir tous ses clients, mais en priorité les clients
à forte contribution qui acceptent les prix les plus élevés. C’est la
fin du «  premier arrivé, premier servi  ». Dorénavant, les clients
sont sélectionnés en fonction de leur profil et de leur contribution
potentielle ; et il faut toujours garder une « porte ouverte » pour les
meilleurs clients. Dans ce contexte, et pour permettre une véritable
réaction des consommateurs aux prix, les tarifs des prestations de
service sont fixés en tenant compte de l’analyse de la demande.
Par ailleurs, le yield management, outil d’aide à la décision,
concourt à une réduction partielle du risque inhérent à toute déci-
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sion commerciale en se fondant sur une accumulation de données


(passées, présentes et futures). Notons que le rôle du yield manager
ou des personnels de vente (compétence commerciale) reste pré-
pondérant en complément du support réel procuré par les outils
informatisés d’aide à la prise de décision.

Définition
Le yield management est une forme sophistiquée de gestion de
l’offre et de la demande par l’action simultanée sur les tarifs et sur

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REVENUE MANAGEMENT

la ­capacité disponible. C’est un processus d’allocation du meilleur


service au meilleur client, au meilleur prix et au meilleur moment
(Smith, Leimkhuler et Darrow, 1992). Cette approche de la gestion
dynamique des prix permet une meilleure gestion de la capacité pour
maximiser la recette globale. Daudel et Vialle (1989) définissent le
yield management comme « un ensemble de techniques au service
d’un principe : la gestion des capacités en vue de la maximisation
des revenus d’une entreprise de services ».

Yield management ou revenue management


Terminologie : Yield, en anglais, signifie rendement.
Dans le domaine du transport aérien, d’où est issu le yield mana-
gement, ce terme correspond aux techniques de gestion permettant
de maximiser la recette par voyageur transporté et par kilomètre
parcouru (voyageur-kilomètre).
Dans la pratique, les expressions yield management, revenue
management ou management du revenu (en version française),
sont employées sans réelle distinction sur le fond.
Le revenue management se situe aux confins de différentes dis-
ciplines (marketing, informatique, finance, fonction commerciale,
etc.). Il est traditionnellement rattaché au domaine marketing et
commercial. L’intégration de l’« esprit yield » et les choix en matière
de pratique de yield management relèvent dans un premier temps
de l’orientation stratégique de l’entreprise. Le yield management
n’est pas en soit une stratégie, mais il s’intègre dans la stratégie mar-
keting et en constitue un élément majeur. De ce fait, les grandes
orientations en matière de revenue management relève de décisions
correspondant à des niveaux hiérarchiques élevés (qu’il s’agisse
d’une structure de taille moyenne ou d’un grand groupe). Les reve-
nue managers sont le plus souvent dans une ligne hiérarchique les
rattachant à la direction générale.

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L’émergence du yield management

Spécificités des services et gestion


des capacités fixes
Le développement des techniques de yield management repose sur
un constat préalable : les entreprises de services font face à la double
contrainte des spécificités des prestations de services (intangibilité)
et de l’obligation de vendre un nombre de produits défini par la
capacité de l’entreprise (capacité fixe) et non la demande exprimée
sur le marché.

Intangibilité du service
Les activités de service se caractérisent par l’intangibilité partielle ou
totale de la prestation qui ne peut pas être stockée. Sa valeur devient
nulle si elle n’est pas commercialisée le jour de la réalisation de la pres-
tation : un siège vide au départ d’un avion ou un panneau d’affichage
vierge de toute publicité à un instant t sont des produits perdus. Les
contraintes de vente des prestations de service s’inscrivent donc dans
une problématique de maîtrise du couple espace-temps. Tout élément
d’une prestation (mètres carrés d’affichage, secondes de diffusion de
publicité à la télévision ou à la radio, places d’avion, chambres d’hôtels,
voitures disponibles à la location à un instant t, etc.) doit être vendu
impérativement au moment de la réalisation de la vente. Il n’existe pas
de possibilité de stocker la prestation, ni de la reporter dans le temps.
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Capacité fixe (inventaire)


Une contrainte supplémentaire s’impose aux prestataires de ser-
vice : l’ensemble des unités de vente, aussi appelé capacité ou inven-
taire, est fixe. Cette rigidité sera plus ou moins marquée : forte par
exemple dans l’aérien ou dans l’hôtellerie – vous ne pouvez ni enle-
ver un siège vide, au départ de l’avion, ni faire voyager des passagers
supplémentaires debout ou en ajoutant des sièges si la demande est
forte. La capacité est parfois plus malléable, par exemple lors de la

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REVENUE MANAGEMENT

location d’espaces destinés à des bureaux ou salons de réception, ou


la vente de secondes de diffusion au sein d’une plage de spot.
Dans tous les cas, les unités non vendues, ou la demande non satis-
faite en raison d’une capacité insuffisante, sont autant de revenu perdu
pour l’entreprise. L’effort commercial porte donc à chaque réalisation
de la prestation (le départ de l’avion, le début d’une plage de spot, etc.)
sur un nombre donné d’unités à vendre, pas plus, pas moins.
Ajoutons enfin, que certains secteurs tels que l’aérien ou l’hô-
tellerie se caractérisent par des coûts fixes très élevés et des coûts
variables plus faibles, qu’il faudra couvrir en assurant un minimum
de remplissage  ; orientation qui s’entend parfaitement en période
de faible activité au cours desquelles il faut stimuler l’activité, mais
qu’il convient de bien doser (effort de remplissage-niveau de prix de
vente) en période d’activité plus soutenue.

Prise de décision commerciale


et risque de dilution du revenu
Les notions de prestations périssables et de contrainte de vente d’une
capacité fixe conduisent à évoquer une autre problématique : l’accep-
tation ou le refus de la réservation du client et le risque de dilution
tarifaire. Un raisonnement « logique » serait d’affirmer que toute réserva-
tion nouvelle acceptée génère du revenu supplémentaire. Dans l’absolu,
l’augmentation du revenu est bien constatée, mais dans certains cas elle
peut s’avérer inférieure au revenu qui aurait pu être obtenu en prenant
une autre décision commerciale (vendre à un autre client, vendre à une
autre période… et à un prix plus élevé). Ce revenu généré, mais qui
reste inférieur à la performance que l’on aurait pu réaliser, est considéré
comme une perte de revenu, également appelée « dilution tarifaire ».
La dilution tarifaire peut également résulter d’une utilisation par
un consommateur d’un tarif qui ne correspond pas à son profil.
L’exemple proposé ci-dessous présente un exemple de dilution
tarifaire qui reste d’actualité. De longue date, les entreprises ont

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L’émergence du yield management

cherché à identifier, de façon plus ou moins formalisée, les possibles


pertes de revenu dues à des process commerciaux mal (ou pas) appli-
qués, ou à un contournement des règles par les consommateurs. Ces
manques à gagner sont aujourd’hui recherchés et analysés de façon
plus systématique et structurée à travers une approche dite de Revenue
Integrity (qui sera présentée au chapitre 2). Les entreprises ont égale-
ment renforcé leurs conditions générales de vente (CGV) de façon
à tendre vers un plus grand respect des règles commerciales par les
consommateurs.

La dilution dans le secteur de l’aérien


La dilution est le phénomène par lequel des clients utilisent, de leur propre
initiative, des tarifs inférieurs à ceux qui correspondent à leur profil. À titre
d’exemple, Air France a mis en place un nouveau tarif spécifique d’accès à
la classe Affaires pour sa clientèle non professionnelle intéressée par un accès
à sa qualité de service moyennant un surcoût acceptable par rapport à celui
de la classe économique. Lors de l’élaboration de cette nouvelle offre, toute
la difficulté était de poser des conditions spécifiques, de manière que les
professionnels, clients habituels de la classe Affaires, n’accèdent pas, en nombre,
à ces tarifs avantageux. Une étude statistique approfondie de la clientèle Affaires
traditionnelle a déterminé que les professionnels ne sont que 6 % à rester plus
de 7 jours sur place et à effectuer leur réservation 42 jours à l’avance. Ces deux
conditions subordonnent donc l’accès au tarif spécifique de la classe Affaires.
La création de ce tarif spécifique a entraîné une dilution de 6 % mais, en
revanche, a permis de toucher 85 % de la clientèle Loisirs. Les recettes
additionnelles générées par ce tarif représentent plusieurs dizaines de
millions d’euros.
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Bruno Matheu, directeur général délégué, Air France, in « Rapport


d’information n° 1161 », Hervé Mariton, Commission des Finances,
Assemblée nationale, octobre 2008.

La dilution est un risque géré et maîtrisé lors de l’analyse des


décisions commerciales. Ainsi, lors d’une demande de réservation,
ou de vente le jour de la réalisation de la prestation (exemple : un
walk in –  client qui se présente au dernier moment sans aucune
réservation – en hôtellerie), si une unité de vente reste disponible,
elle peut être vendue. Mais s’il a été décidé de la vendre à un client

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REVENUE MANAGEMENT

bénéficiant d’un tarif promotionnel ou négocié et qu’un autre


client se présente immédiatement après, acceptant un tarif plus
élevé, on constate alors qu’un revenu supplémentaire aurait pu
être généré avec la même unité de vente (dilution du revenu). La
contrainte commerciale se résume donc à vendre le plus d’unités de
ventes possible, et toujours au meilleur tarif pour éviter la dilution
du revenu.

Application du revenue management :


secteurs d’activité et types d’entreprises
Le revenue management est implanté dans les grandes entreprises
de transport aérien (passager et cargo), maritime (ferry et croisière),
ferroviaire (passager et marchandise), et routier (bus de voyage),
de l’hôtellerie (les chambres, les services banquets et séminaires
des grands hôtels et d’autres services tels que les spas et centres de
bien-être), des résidences de tourisme, de la location de voitures,
des agences médias (gestion d’espaces publicitaires), des centres de
congrès et de location de salles et de bureaux. Le revenue manage-
ment touche aujourd’hui d’autres entreprises telles que les tours
opérateurs, les salles de spectacle, le secteur de la santé, des télécom-
munications, de l’énergie, de l’hôtellerie de plein air et d’autres sec-
teurs. L’intégration de pratique de revenue management est variable
suivant les secteurs :
•  Une intégration progressive  : les tour-opérateurs ont longtemps
limité l’application du revenue management à certaines pres-
tations spécifiques, tels que les vols secs. À présent, l’ensemble
des produits (dont les produits packagés) fait l’objet de réflexion.
Autre exemple  : dans le domaine culturel (opéra, musées, etc.),
les tentatives d’adaptation des pratiques de revenue management
sont récentes. Des applications sont déjà en place ou en cours de
développement.
•  Un développement qui ne touche qu’une partie du secteur  : dans le
domaine de la santé, par exemple, seuls les établissements à carac-

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L’émergence du yield management

tère privé, moins contraints d’un point de vue réglementaire que


des établissements publics, peuvent appliquer des pratiques de
revenue management à une partie de leurs prestations.
•  Un développement confronté à des freins : la restauration reste un
exemple de secteur qui pourrait sous certaines conditions appli-
quer en partie des approches de revenue management. Mais des
difficultés d’ordre pratique et culturel freinent ce développe-
ment. Par exemple, il est difficile de demander à un client de
quitter sa table à une heure précise, dans la perspective d’un
calibrage du produit et du temps passé à table, ou d’aller man-
ger dans un autre restaurant si vous n’avez plus de place pour
lui –  ce qui est en revanche possible en hôtellerie ou dans le
transport aérien.
D’un point de vue plus global, sont potentiellement concernées
par des applications de revenue management les entreprises présen-
tant les caractéristiques suivantes :
–– une capacité fixe à gérer ;
–– une demande fluctuante ;
–– un produit périssable ;
–– un produit pouvant être vendu à l’avance ;
–– une possibilité de segmentation par le prix (sensibilité prix des
consommateurs) ;
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–– un produit pouvant se différencier (un service supplémentaire


justifiant un tarif plus élevé).
Le revenue management est le fait de grandes entreprises gérant
d’importants volumes de vente (exemple  : des hôtels de  100 à
1  000  chambres). Des expériences satisfaisantes ont toutefois été
conduites dans des entreprises de taille plus réduite ; par exemple, dans
des hôtels d’une cinquantaine de chambres. Les très petites structures
(par exemple : un hôtel indépendant de 10 ou 20 chambres) peuvent
intégrer des principes de management du revenu (notamment en
termes d’approche de la valeur des clients et de segmentation), mais

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REVENUE MANAGEMENT

n’exploiteront pas pleinement les ­techniques et outils du yield mana-


gement. Cependant, si l’hôtel appartient à un réseau (volontaire ou
franchisé) ou s’il collabore sur son marché avec d’autres établisse-
ments, la mutualisation des moyens (gestion commune des capacités
fixes, regroupement des outils de distribution/vente, etc.) autorise une
réflexion sur la mise en place de techniques de revenue management.
Une présentation des approches de revenue management dans
différents secteurs est proposée dans l’ouvrage Legohérel, Poutier
et Fyall (2013) : restauration (Cindy Heo), sites historiques (Anna
Leask), parcs à thème (Ady Millman et Kelly Kaak), croisières (David
Selby) ou immobilier de tourisme et time share (Amy Gregory). Par
ailleurs, de nombreux articles de revues académiques présentent
des approches de développement du revenue management dans
différents secteurs, ou pour des produits/contextes de vente spéci-
fiques (exemple : gestion de la cave et de la carte des vins en restau-
ration – Barth, 2011).

Vers le total revenue management


et le revenue integrity
Le « simple » revenue management tend aujourd’hui vers la notion
de total revenue management qui correspond à une approche plus
large de l’optimisation du revenu de l’entreprise. L’optimisation
du revenu s’apparente à la recherche de performance commer-
ciale. Celle-ci s’inscrit dans la durée et dans le cadre d’une analyse
globale. Être performant ne signifie pas « faire un coup », à portée
limitée. Illustrons ce point à l’aide de l’image d’une course d’endu-
rance : aux 24 heures du Mans, les pilotes vainqueurs sont certes
rapides (ils sont performants), mais ils ne réalisent pas néces-
sairement la meilleure performance au tour (une performance
éphémère qui ne refléterait pas la performance globale). Les vain-
queurs sont également ceux qui évitent de perdre un temps pré-
cieux aux stands. De la même façon, la performance commerciale

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L’émergence du yield management

d’un hôtel, devra allier un niveau de chiffre d’affaires élevé de


façon régulière (inutile de «  faire un coup  » sur une nuitée si le
reste de la semaine vous avez connu une occupation faible ou réa-
lisé trop de ventes à prix bas) à une lutte efficace contre les pertes
de revenu. En effet, la contribution à la performance globale de
ventes théoriquement « encaissées » peut s’avérer faible si dans le
même temps des fuites de revenu sont constatées. L’approche de
total revenue management est ici étroitement liée aux nouvelles
pratiques émergentes de revenue integrity. Cette démarche vise
à réduire les fuites de revenu (aussi appelée revenue leakage) au
sein d’une organisation. L’objectif du revenue integrity consiste à
mettre en place un ensemble cohérent d’actions, d’analyses et de
mesures correctives pour réduire les écarts entre le revenu réelle-
ment encaissé et le revenu théoriquement encaissable.
Selon P.  Niffoi (n & c) (cf.  témoignage ci-après), les fonctions du
revenue integrity sont :
•  Garantir l’adéquation entre chiffre d’affaires théorique et encaissé,
en identifiant les écarts et en les corrigeant.
•  Optimiser les process et les outils via la clarté, la fermeté ou la
souplesse dans certains cas.
•  Impliquer les équipes et obtenir leur adhésion, en reconnaissant
la vision horizontale d’un client sur toute la durée de fidélité,
ainsi que la vision vertical d’optimisation des revenus en un jour
donné, afin de transformer les divergences en collaboration.
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•  Contrôler de manière transparente les procédures.


•  Fiabiliser et fluidifier les process et procédures en proposant des
pistes d’amélioration.
•  Collaborer et communiquer en encourageant les bonnes pratiques
et les gains obtenus.

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REVENUE MANAGEMENT

Avis d’expert
PASCAL NIFFOI (N & C),
expert en revenue management

LE REVENUE INTEGRITY aérien car les règles tarifaires sont


Le revenue integrity est une complexes et peuvent être aisément
branche à part entière du revenue détournées. Les pertes cumulées
management. Une branche peu devenaient critiques pour les
connue et peu représentée dans compagnies aériennes. Une gestion
l’industrie. Comme son nom de la fraude par contrôle aléatoire
l’indique, le revenue integrity a pour à l’aéroport s’avérait inefficace et
mission de s’assurer de l’intégrité du la vérification manuelle des listes
revenu, c’est-à-dire de la cohérence de passagers devenait prohibitive,
de la chaîne commerciale dans interdisant le traitement de la fraude
son intégralité, depuis la définition en temps réel et laissant les agents
du prix jusqu’à l’encaissement d’enregistrement démunis.
des factures, en passant par le Le secteur aérien a donc été
chargement des prix dans les précurseur en la matière. Il y a, par
systèmes de réservation, la bonne exemple, le cas bien connu à Air
application des conditions tarifaires, France des « croiseurs-jeteurs » : le
le respect des recommandations de département pricing a segmenté ses
vente décidées par le yield. grilles tarifaires entre trafic « loisir »
Autrement dit, le revenue integrity et trafic « affaires » par un procédé
s’assure que le revenu réellement simple qui consiste à considérer
encaissé est bien conforme au qu’un client loisir passe la nuit du
revenu théoriquement encaissable, samedi au dimanche sur son lieu
et que le produit vendu à un de séjour (la fameuse règle du
instant t, a été vendu, facturé, Sunday Rule). Si la nuit du samedi au
encaissé au bon prix et avec dimanche est comprise entre l’aller
les bonnes conditions tarifaires. et le retour, la Compagnie considère
Les gains attendus sont élevés : que le client est « loisir », elle peut
donc lui proposer un tarif attractif.
de 1 % à 3 % du chiffre d’affaires.
À l’inverse, un homme d’affaires
LE CŒUR DU REVENUE INTEGRITY aura plutôt tendance à voyager dans
Cette activité a été particulièrement la semaine, à des prix beaucoup
développée dans le secteur plus élevés car c’est l’entreprise bien

...
24
L’émergence du yield management

...
souvent qui prend en charge les frais retours « loisir » à bas prix et à cheval
de déplacement. Le tarif « affaires » sur 3 semaines. Puis, à jeter le premier
est régulièrement 6 à 7 fois plus cher et le dernier coupon. Cela lui permet
que le tarif « loisir », parfois plus. de faire l’aller-retour dans la semaine
Le procédé consiste donc pour un pour un tarif moins cher qu’un billet
client « affaires » à acheter deux allers- « affaires » (voir figure 1.1).

L L
A1
M M
Me Me
Semaine 1 J J
V V
S S
D D

A2
L L
M M
Me Me
Semaine 2 J J
V R1 V
S S
D D

L L
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M M
Me Me
Semaine 3 J J
V V
S S
R2
D D

Premier Aller-Retour loisir : A1 – R1


Deuxième Aller-Retour loisir : A2 – R2
Figure 1.1 – Illustration de la pratique (ancienne) dite des « 4 billets croisés »

25
...
REVENUE MANAGEMENT

...
Abandon des coupons A1 et R2, le la même année, abandonnée
passager peut faire son aller-retour depuis.
sur la semaine 2 Les problématiques hôtelières
Les croiseurs-jeteurs sont ne sont pas forcément de même
maintenant bien identifiés et les nature que dans l’aérien.
contrevenants redressés. Il existe Mais le revenue integrity n’en est pas
d’autres types de fraude dans les pour autant démuni :
compagnies aériennes, comme les les tarifs « Séniors » sont-ils utilisés
simples jeteurs qui, depuis Paris, réellement par des seniors ?
achètent un Bordeaux-Paris-Boston Les annulations ou modifications
parfois moins cher qu’un Paris- de séjour sont-elles facturées selon
Boston pour dynamiser le trafic les règles en vigueur ? Les remises
local, et jettent ensuite le coupon manuelles appliquées sur certaines
Bordeaux-Paris. réservations sont-elles contrôlées ?
La cellule de revenue integrity Les tarifs en système sont-ils
d’Air France a mis en place une correctement paramétrés ?, etc.
batterie d’outils pour traquer ces La liste des anomalies est longue
procédés, avec des contrôles aux et le périmètre du revenue integrity
bornes d’enregistrement pour couvre un champ immense
s’assurer que « les coupons sont d’investigation.
utilisés dans l’ordre séquentiel » Il ne s’agit pas de tomber dans
comme le prévoient les conditions une mécanique exclusivement
de vente. Les contrevenants sont répressive, en durcissant les règles
alors renvoyés au comptoir de et en punissant, en interne, les
vente, avec l’obligation d’acheter mauvais éléments. Il s’agit de se
un nouveau billet, souvent au plein doter d’une batterie d’indicateurs,
tarif car en dernière minute… qu’il convient de partager avec
D’autres entreprises ont suivi l’ensemble des acteurs concernés,
le mouvement, plus ou moins et de voir où sont les plus
timidement, avec plus ou moins importants leviers d’amélioration.
de succès. Disneyland Resort Paris Il ne s’agit pas de durcir les
a lancé une cellule ICAR en 2006 conditions de vente, il s’agit de
(Inventory Control And Regulation) les faire appliquer, quitte à les
pour traquer toutes les ventes en assouplir s’il le faut. Par exemple,
anomalie. Pierre & Vacances a si le versement d’un acompte non
monté une première structure de remboursable de 25 % sur une
revenue integrity en 2008. Club réservation prise un an à l’avance
Med a fait une première tentative n’est pas réaliste, mieux vaut

...
26
L’émergence du yield management

...
assouplir la règle plutôt que de la juridiquement pour interpréter
violer en permanence. l’offre comme il le souhaite).
Ainsi, Pierre & Vacances a assoupli •  Les problèmes de comportement
les règles de modification et (faire bénéficier manuellement de
d’annulation sur les groupes loisir remises tarifaires en dehors de tout
car elles étaient inapplicables, contrôle, non-respect des consignes
et hors marché. Les nouvelles de vente, etc.).
règles, assouplies, sont comprises Voici quelques exemples
et acceptées par tous. Il devient concrets où le revenue integrity
alors plus facile d’être ferme sur peut être amené à -intervenir :
leur bonne application. En un code produit associé à un
an, les frais de modification et mauvais tarif, préconisation yield
d’annulation ont augmenté mal configurées, application
de 60 %. rétroactive d’offres spéciales,
Les failles dans le dispositif règle du « no name change »
commercial doivent être identifiées non respectée, code offre
pour être corrigées. On peut les last minute utilisé pour des
classer en quatre catégories : réservations précoces, ventes
•  Les problèmes d’ordre technique en statut « ferme » sans
(un package difficile à paramétrer règlement, utilisation abusive
et qui ne sera pas vendu au bon du statut « option », conditions
prix, un tarif qui ne remonte pas sur d’exonération de frais de
Internet, etc.). dossier confuses, réservations
•  Les problèmes de procédure (des de tour-opérateur sur dates
consignes de vente mal répercutées stoppées à la vente, non suivi
aux distributeurs, des conditions des recommandations de durées
tarifaires mal transmises par ceux de séjour décidées par le yield,
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qui les paramètrent en système, remises « enfants » sans enfant


etc.). dans la réservation, doublon
•  Les problèmes de communication de réservations, no-show non
(Offre hôtelière du type 7 jours facturés, confusion dans les
au prix de 6. Le distributeur règles de cumulabilité des offres
peut prendre le dispositif à son spéciales, gestion des gratuités sur
avantage en exigeant que ce les dates contraintes, mauvaise
soit la nuit la plus chère qui saisie de réservation, non
soit offerte. Si le point n’est pas encaissement de pénalités, etc.
précisé dans la communication de Un exemple du contrôle de
l’offre, le distributeur est couvert l’application rétroactive d’offres

...
27
REVENUE MANAGEMENT

...
spéciales : en suivant les ventes LES VERTUS DU REVENUE INTEGRITY
réalisées sur ses ODM (offres de La mise en place d’un revenue
dernières minutes), le revenue integrity, au-delà du chiffre
integrity de Pierre & Vacances
d’affaires directement récupéré,
s’est aperçu d’une faille dans le
est vertueuse car elle permet de
système de réservation : tout
niveler les bonnes pratiques par
dossier, quelle que soit sa date de
le haut : tel commercial arrive à
création, pouvait se voir attribuer
obtenir de ses clients le versement
rétroactivement les bénéfices
de tous les arrhes ; tel autre
d’une offre spéciale en cours de
n’y parvient pas. Un reporting
validité. Lorsqu’un dossier de
peut être établi pour donner
réservation était réactivé pour
au directeur commercial des
ajouter une prestation annexe,
éléments d’appréciation chiffrés
pour prolonger la durée de
afin de caler des objectifs sur la
séjour ou même simplement
moyenne haute, et de capitaliser
pour préciser l’âge des enfants,
sur les bonnes pratiques. Et le
l’offre en cours s’appliquait
procédé peut être étendu à
automatiquement même si le
dossier n’était pas éligible à tous les types d’objectifs, en
l’offre. Partant de ce constat, particulier ceux qui concernent
toutes les offres ont été passées l’encaissement des pénalités ou
au crible. Pas moins de 500 k€ les gestes commerciaux, plus ou
de remise avaient été accordés moins utilisés et plus ou moins
au titre des offres spéciales, normés dans les entreprises.
bien après la date de création En étroite collaboration avec
du dossier, sans que les clients l’administration des ventes, le
n’aient demandé quoi que ce soit. revenue integrity peut également
Un développement informatique a contribuer à identifier les
permis de verrouiller l’attribution mauvais payeurs, et intégrer ces
des offres spéciales, en ajoutant éléments dans les négociations
dans les critères d’application commerciales ultérieures.
la date de création du dossier C’est le cas par exemple sur la
et en excluant les dates de détermination des allotements
modification. 500 k€ de chiffre pour des tours-opérateurs ou
d’affaires, et même de marge des plans de transport dans
pure dans ce cas précis, ont ainsi l’aérien. La difficulté à obtenir
été sauvés par le revenue integrity des acomptes, à gérer des frais
pour les saisons suivantes. d’annulation ou à facturer des

...
28
L’émergence du yield management

...
no-show est alors un élément projet ? Quel impact de cette
d’appréciation à prendre en nouvelle initiative sur les systèmes
compte dans la finalisation d’information ? Sur les process
d’une négociation. Cela pourrait actuels ? Par quel processus
s’appliquer à d’autres industries commercial doit-on vendre
où le revenue integrity n’est pas ce nouveau produit ? Si, en
encore représenté, par exemple s’inscrivant dans une démarche de
dans les medias avec des revenue integrity, les collaborateurs
négociations permanentes sur des contribuent à fluidifier les
plans de campagnes publicitaires process, à les standardiser, à les
ou la location de voitures avec documenter, s’ils s’assurent que de
des contrats firmes annuels. Le bout en bout, depuis la définition
revenue integrity permet alors de claire du concept jusqu’à son
désamorcer de véritables bombes implémentation, son paramétrage,
à retardement, en nettoyant les sa facturation, la chaîne est
process en amont de la chaîne cohérente et robuste, alors c’est
commerciale, afin de diminuer les l’entreprise tout entière qui en
éventuels cas de litige en aval. bénéficiera.
L’activité de revenue integrity Les processus, sous l’impulsion
dépasse donc largement le du revenue integrity, seront
cadre du revenue management. améliorés. Les demandes
Si le rattachement hiérarchique d’évolutions d’outils
devrait se faire idéalement et rationnalisées, les comportements
même naturellement au revenue changés. C’est pour cela que le
management, c’est tout un revenue integrity est avant tout
chacun qui peut se placer dans une démarche d’entreprise.
une démarche revenue integrity et Pour être efficace, il doit être
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en être un acteur. Pour chaque compris et partagé par l’ensemble


nouvelle initiative, on peut alors des services connexes au
se poser la question : mon projet revenue management : équipes
est-il opérationnellement faisable ? commerciales, distribution,
Quels sont les interlocuteurs exploitation, administration des
à mettre dans le groupe de ventes, direction générale.

29
REVENUE MANAGEMENT

L’optimisation du revenu d’un produit, dans l’optique d’une


approche globale (total revenue management), passe toujours par
l’application de techniques de revenue management  ; mais elle
doit aussi intégrer l’ensemble des sources contribuant à générer
du revenu supplémentaire. Différentes pratiques répondent à cet
objectif :
•  Analyser l’ensemble des dépenses des consommateurs sur un site
pour identifier la contribution réelle des clients et mieux les sélec-
tionner : l’optimisation réelle du revenu doit tenir compte de la
valeur du client et de l’ensemble des ventes générées par ce client.
Par exemple, optimiser le prix de vente du green-fee (prix d’accès
à un parcours de golf) constitue la première étape de l’optimisa-
tion du revenu d’un golf. Mais cette approche est incomplète si le
responsable commercial ou revenue manager ne tient pas compte
des dépenses additionnelles du client (location de voiturette et
de matériel, jetons de practice, dépenses au bar et au restaurant,
etc.). Le golfeur prêt à payer le green-fee le plus élevé, n’est pas
nécessairement celui qui permet de générer le meilleur chiffre
d’affaires pour l’entreprise. Nous retrouvons le même lien entre
les dépenses de restauration potentielles d’un client et son achat
d’une chambre d’hôtel ou de son billet d’entrée dans un parc de
loisirs.
•  Inciter le client à s’engager dans de nouvelles dépenses :
–– pour des prestations complémentaires, accompagnant le service
principal ;
–– pour des aspects de la prestation principale qui étaient auparavant
inclus dans la prestation globale (exemple : le parking de l’hôtel,
le bagage supplémentaire dans un avion, etc.). Par exemple, sur de
nombreuses compagnies aériennes, le passager ne peut plus enre-
gistrer gratuitement qu’un seul bagage en soute. Au-delà, il faut
s’acquitter d’un supplément par valise. Ainsi, les passagers qui ne
payaient que les dépassements de poids, doivent aujourd’hui payer
pour le volume. Les compagnies «  traditionnelles  » tendent, de

30
L’émergence du yield management

plus en plus, vers des solutions de revenue management hybrides,


les rapprochant pour la gestion d’une partie de leur clientèle des
compagnies low-cost.

Avis d’expert
CHRISTOPHE IMBERT, Solutions Partner

« Afin de répondre à la menace est donc d’évoluer sur un modèle


que constituent les compagnies hybride où coexistent un produit
low-cost, les compagnies purement low-cost avec tous les
aériennes traditionnelles ont dû services additionnels en option, et
mettre en place des solutions de un produit premium où tous les
revenue management hybride services sont inclus. Ce modèle
permettant d’éviter une érosion a fondé le succès de JetBlue aux
tarifaire sur le segment des États-Unis et est maintenant suivi
tarifs à faible contribution tout par de nombreuses compagnies
en préservant le trafic affaires aériennes européennes comme
et O & D. La tendance actuelle EasyJet, Vueling, Aer Lingus ou
pour les compagnies aériennes Norwegian. »

Dans l’hôtellerie, l’approche « traditionnelle » du revenue mana-


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gement se focalise sur la maximisation du revenu généré par la vente


de chambre. Les groupes hôteliers ont pris conscience de la nécessité
de faire évoluer cette approche, et d’identifier et analyser toutes les
sources de revenu liées aux clients ; ceci permettant de segmenter
avec plus de discernement les clientèles sur la base de leur valeur.
Les sources de revenu « additionnelles » proviennent, selon l’hôtel,
de la restauration, du bar, des mini-bars, du spa, des boutiques, du
parking des événements et animations, du casino, du golf… L’une
des difficultés est de traquer efficacement les données commerciales,
indispensables à l’application des méthodes de revenue management

31
REVENUE MANAGEMENT

à la totalité des sources de profit de l’hôtel. Les programmes de fidé-


lité mis en place par les hôtels/casinos prouvent leur efficacité car
le client doit utiliser sa carte et s’identifier pour bénéficier des nom-
breux avantages liés aux produits qu’il consomme. Le comporte-
ment commercial du client, et les revenus qu’il génère, sont alors
identifiés. Mais dans la majorité des établissements hôteliers, l’agré-
gation de la totalité des données liées au client ne s’opère pas, soit
parce que les procédures commerciales et les systèmes informatisés
n’ont pas été paramétrés à cet effet (exemple  : le fichier commer-
cial et le système comptable du golf qui resteraient indépendants
de celui de l’hôtel, pourtant situé sur le même domaine), ou simple-
ment parce que le client ne s’identifie pas (exemple : le client qui
prend son dîner au restaurant de l’hôtel, mais qui décide de payer
directement son repas sans en reporter le montant sur la facture glo-
bale de son séjour). L’information n’apparaît alors pas sur le fichier
commercial, et la valeur du client est sous-estimée.
En revanche, lorsque la capture des informations est possible,
et bien réalisée, les données remontées dans les bases de données
relationnelles nourrissent l’analyse marketing de l’entreprise qui a
alors une vision complète et actualisée du profil de ses clients. Cette
connaissance aide à la prise de décision commerciale (segmenta-
tion, adaptation de niveau tarifaire, évaluation des demandes de
réservation, etc.).
L’approche total revenue management est étudiée par de nom-
breux groupes hôteliers. Non seulement la contribution réelle de
chaque client occupe alors une place centrale dans la recherche
d’optimisation du revenu global d’un site hôtelier (on parle d’ail-
leurs d’une mutation du traditionnel RevPar vers des formules telles
que le GoPar ou le TotalPar), mais les sources de revenu annexes
présentent parfois des opportunités de maximisation du revenu
supérieures à celle de la chambre (plus de 50 % pour certaines éta-
blissements). L’une des conséquences est alors la remise en ques-
tion, ou l’amélioration de l’exploitation de leviers d’optimisation

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L’émergence du yield management

traditionnels tels que la gestion des groupes (versus clients indivi-


duels) et de la durée de séjour des clientèles.
L’approche total revenue management doit intégrer les problé-
matiques de gestion d’espace des différents sites de vente  ; non
seulement les chambres, mais également les espaces dédiés à la res-
tauration – espaces occupés par le client et temps passé sur le lieu
de restauration –, au spa – temps de personnel et espace occupé par
un soin –, aux salles de séminaire et événements – durée et type de
la prestation rapportés à un indicateur temps (heure, journée…) ou
surface (notion de RevPas – revenue per available square foot), au golf
–  temps moyen passé sur le parcours et gestion des intervalles de
départ… L’indicateur TotalRevpar (ou autre acronyme) reposera sur
une analyse de l’ensemble des sources de revenu générées par les
clients au regard du potentiel « global » de l’ensemble du site. Plus
en amont, le tracking complet et détaillé du profil commercial du
client et de son niveau réel de contribution concourent à une seg-
mentation optimisée des clientèles, et à des décisions d’acceptation
des couples « client – niveau de tarif » affinées. Ainsi, un soir de forte
fréquentation, un client prêt à payer le tarif fort à 180 € pour une
nuitée est considéré comme prioritaire au sens de l’approche revenue
management traditionnelle. Cependant, un client qui consomme
régulièrement diverses prestations (restaurant, spa…) peut s’avérer
plus profitable, même avec un tarif préférentiel à 150 €. L’approche
total revenue management permet d’évaluer le potentiel réel de la
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demande de réservation du client à 150 €, contribuant à une meil-


leure optimisation du chiffre d’affaires du site hôtelier.
Une analyse identique s’applique à toutes les situations de vente
de prestation de service qui correspond à différentes sources de pro-
fit pour l’entreprise (parcs de loisirs, bateaux de croisière et ferry,
salles de spectacle, etc.).
L’analyse des coûts constitue un autre levier de l’optimisation
de la performance. L’objectif de maximisation du revenu, objec-
tif déclaré des approches de revenue management, focalise sur le

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REVENUE MANAGEMENT

« volet recette », et joue sur le remplissage de la capacité au meil-


leur prix de vente. La notion de coût est, en partie, ignorée par
l’approche revenue management traditionnelle. La raison étant
que la part des coûts fixes est importante dans les entreprises du
secteur des services, et les coûts variables sont considérés comme
secondaires. L’approche total revenue management que nous défi-
nirons comme « la recherche de la maximisation du revenu par la
combinaison de ventes croisées de différentes prestations de ser-
vice au sein d’un même centre de profit », intègre la notion d’ana-
lyse des coûts, et notamment leur impact sur la contribution réelle
de l’ensemble des achats du consommateur. Par exemple, les coûts
variables sont peut-être négligeables dans l’analyse de la maximi-
sation de la contribution du client lors de l’achat d’une chambre,
mais peuvent avoir un impact plus significatif sur les produits de
restauration ou les soins du spa. L’intégration de l’analyse des
coûts devient alors plus pertinente dans le cadre d’une approche
globalisée de la maximisation du revenu et de la contribution au
résultat de l’entreprise.

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L’émergence du yield management

L’essentiel

 Le yield/revenue management apparaît dans le secteur


du transport aérien aux États-Unis au cours des années
1980. Par la suite, il s’étend à d’autres secteurs tels que
l’hébergement, la location de voiture ou la gestion des
espaces publicitaires.
 Cette approche managériale innovante est devenue
une fonction à part entière, au sein des entreprises de
service. Elle consiste en une gestion conjointe des niveaux
de tarification et de la capacité fixe de l’entreprise en vue
d’une maximisation du chiffre d’affaires.
 Le yield/revenue management vise à optimiser la prise
de décision commerciale (proposer le bon tarif au bon
client, ne jamais vendre à un prix trop bas…) en tenant
compte de l’intangibilité des prestations de service,
et de la contrainte de la capacité fixe.
 Déjà adopté dans différents secteurs et différents
types de structure, le revenue management poursuit son
développement à la fois par une adaptation à de nouveaux
secteurs, et en tendant vers une approche plus globalisée,
le total revenue management, et le revenue integrity.
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