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Éducation et socialisation

Les Cahiers du CERFEE


42 | 2016
Orientation et formation au prisme du genre - Varia

Aspirations professionnelles de jeunes bacheliers


au Cameroun : l’influence de la pratique de
l’orientation scolaire revisitée

Dong Nguetsop Frosine Merveille et Fozing Innocent

Éditeur
Presses universitaires de la Méditerranée

Édition électronique
URL : http://edso.revues.org/1863 Ce document vous est offert par
ISSN : 2271-6092 Bibliothèque Interuniversitaire de
Montpellier

Référence électronique
Dong Nguetsop Frosine Merveille et Fozing Innocent, « Aspirations professionnelles de jeunes
bacheliers au Cameroun : l’influence de la pratique de l’orientation scolaire revisitée », Éducation et
socialisation [En ligne], 42 | 2016, mis en ligne le 23 octobre 2016, consulté le 07 novembre 2016. URL :
http://edso.revues.org/1863 ; DOI : 10.4000/edso.1863

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Aspirations professionnelles de jeunes bacheliers au Cameroun : l’influence d... 1

Aspirations professionnelles de
jeunes bacheliers au Cameroun :
l’influence de la pratique de
l’orientation scolaire revisitée
Dong Nguetsop Frosine Merveille et Fozing Innocent

Introduction
1 Les statistiques sur l’emploi au Cameroun font état d’un taux de chômage élevé, surtout
chez les jeunes diplômés. L’INS (2010) fait ressortir un chômage touchant principalement
les jeunes (âgés de 15-34 ans) avec un taux au sens large évalué à 15,5 %. Dans l’optique
d’accomplir sa mission d’éducation physique, intellectuelle, civique, morale et d’insertion
harmonieuse des jeunes dans la société, le système éducatif camerounais s’appuie sur ses
trois grands piliers : la pédagogie, l’administration et l’orientation.
2 Les statistiques camerounaises sur l’emploi font état d’une insertion socioprofessionnelle
dans des domaines d’activités très distincts de la formation scolaire reçue par les jeunes
(inadéquation formation-emploi). L’INS (2005) à cet effet, signale au plan national un taux
de chômage de 4,4 % au sens du Bureau International du Travail (BIT). Ce chômage frappe
ddavantage urement les jeunes avec un taux trois fois plus élevé que celui des adultes. Ce
taux croît avec le niveau d’instruction. Ce taux est croissant à mesure que le niveau
d’éducation croît. De moins de 10 % pour le niveau du premier cycle du secondaire, il
oscille entre 10,7 % et 11,8 % pour le second cycle du secondaire, et est de 13,4 % pour
l’enseignement supérieur. C’est un chômage essentiellement urbain, où l’on enregistre en
général des taux à deux chiffres.
3 Dans une perspective d’appréciation de l’incidence de la pratique de l’orientation scolaire
par le CO sur le type d’aspirations professionnelles nourries par les jeunes au Cameroun,
le présent article revisite au travers des pratiques de l’orientation scolaire, quels

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pourraient être les types d’aspirations nourries par les jeunes bacheliers. Cette
investigation questionne un éventail large de pratiques d’orientation qui va de la simple
consultation des Conseillers d’orientation à la pratique même de l’orientation. Cette
pratique recouvre l’initiation à la connaissance de soi, l’information sur les filières
d’études, l’information sur les réalités du monde du travail et de l’emploi, et enfin sur les
qualités personnelles du Conseillers d’orientation. Elle est conduite dans une perspective
de mise en regard avec le type d’aspirations professionnelles nourries par les jeunes.

Contexte
4 L’élévation constante du taux de chômage dans la tranche d’âges jeunes au Cameroun fait
penser à la faiblesse d’un maillon de la chaine de l’éducation. La faible assistance des
jeunes par l’orientation dans la consolidation de leurs aspirations professionnelles, ou
mieux dans l’élaboration et la consolidation des projets professionnels réalistes peut ainsi
être indexée. Dans cette veine, Bomda et al. (2010) dans une étude réalisée dans la ville de
Yaoundé sur un échantillon de 1356 travailleurs stratifiés selon la classification
institutionnelle par secteur d’activité relève que du primaire au secondaire, les parents
sont les principaux artisans de l’orientation de leurs enfants (49,1 %), suivi de l’intéressé
lui-même (29,3 %) qui le fait à sa guise ou dans une moindre mesure, ses aînés (10,6 %) et
que seuls 2 % des enquêtés ont été motivés dans leur choix par le conseil de classe et/ou
le conseiller d’orientation. Ce qui traduit bien que les Conseillers d’Orientation (CO) sont
très éclipsés quant à l’accompagnement des jeunes en matière de choix scolaires et
professionnels. Pourtant cette étude révèle qu’indépendamment du sexe, la rencontre
avec un CO accroit la probabilité de servir dans le formel (public/parapublic et privé
formel) plutôt que dans l’informel (Bomda et al, 2010).
5 Ainsi, malgré ces statistiques décevantes, seule la consultation du CO donne la possibilité
aux élèves de faire des choix raisonnés (en tenant compte de leurs potentialités et de
divers autres aspects), avec une certaine influence sur le type d’aspirations
professionnelles nourries par les jeunes. De plus, le choix d’un métier qui engage l’avenir,
nécessite pour un élève de bien se connaître, c’est-à-dire de faire le point sur ses
aptitudes, ses intérêts, ses connaissances, ses motivations, sa personnalité, etc. En
matière de choix scolaire, la nécessité d’être bien informé s’impose. En effet, certains
jeunes, conscients de la multitude de filières d’études qui existent, sont indécis quant au
choix de l’option appropriée. D’autres par contre n’ont pas assez d’informations sur les
filières d’études et les métiers correspondants. Ces réalités compliquent davantage leur
prise de décision et, laissent leur destin aux mains des autres acteurs de l’orientation
(parents, aînés, amis, etc.).
6 La complexité du monde du travail et de l’emploi amène le CO à sensibiliser et à informer
les jeunes sur les possibilités de formations professionnelles, la nomenclature des
emplois, les exigences du marché du travail et de l’emploi, et les opportunités à saisir.
Surtout à l’ère des projets structurants, la contribution de CO consiste non seulement à
recenser les niches d’emplois existant afin d’aider à l’insertion socioprofessionnelle des
jeunes, mais aussi à accompagner les jeunes porteurs de projets novateurs à la création
d’entreprises (l’auto emploi).
7 En pratique, il ne suffit pas de rencontrer un CO pour avoir une idée claire de sa réussite
scolaire et de son avenir professionnel. La capacité de négociation du CO est primordiale

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et dépend de ses propres attitudes. Afin de convaincre les jeunes des différentes options
envisageables, le CO doit disposer des qualités suivantes : grande capacité d’écoute et de
contrôle de ses émotions, confiance et confidentialité, sens relationnel développé, esprit
d’ouverture, d’analyse et de synthèse, sens du service public, respect, disponibilité et
ponctualité, capacité de prendre des initiatives, grande adaptabilité, etc. Tremblay (2010)
relève quatre groupes de facteurs qui influencent la réussite scolaire des élèves. Ce sont
les facteurs familiaux (pratiques éducatives parentales, climat affectif familial, niveau
d’instruction des parents, niveau socio-économique de la famille, etc.), les facteurs
scolaires (relation maître-élèves, climat scolaire, etc.), les facteurs environnementaux ou
sociaux (quartier de résidence/voisinage, ressources, etc.) et les facteurs personnels
(alimentation et activité physique, intérêts, estime de soi, motivation, aspirations
scolaires et professionnelles, etc.). Mais, les aspirations professionnelles conditionnent
aussi étroitement les performances et/ou persévérances scolaires des élèves et orientent
de ce fait leurs choix d’études. Elles sont donc intimement liées aux aspirations scolaires
et s’appréhendent comme des projets qui motivent les jeunes à poursuivre leur
cheminement scolaire. Il est donc question pour un jeune d’identifier un métier bien sûr,
mais d’avoir également réfléchi aux démarches à entreprendre, d’avoir établi certaines
échéances et anticipé quelques obstacles (Beaucher, 2007).
8 Beaucher (2007) distingue ainsi quatre types d’aspirations professionnelles : les
aspirations indéfinies, utopiques, détournées et réalistes. Pour faciliter à l’avenir son
insertion socioprofessionnelle, l’élève doit nourrir des aspirations professionnelles
réalistes. La logique voudrait donc qu’à la suite d’une réflexion approfondie sur les filières
d’études appropriées, les possibilités du marché du travail et celui de l’emploi, le métier
envisagé, les possibilités personnelles et divers autres enjeux, le jeune puisse élaborer un
projet professionnel réaliste.
L’élève porteur d’une aspiration professionnelle a besoin de soutien pour atteindre son but, si
c’est possible, pour le ramener à des proportions plus réalistes ou pour le modifier s’il est
trop éloigné des possibilités de l’individu. Dans tous les cas, il est risqué de laisser à lui-même
un élève porteur d’une aspiration parce que l’énonciation du but aura suffi à leurrer son
entourage qui le croira en projet (Beaucher, 2007, p. 7).
9 Les jeunes biens assistés dans l’élaboration, le suivi et la révision de leur projet
professionnel trouvent la motivation nécessaire pour persévérer dans leurs études,
meilleur gage pour une insertion socioprofessionnelle dans le métier envisagé.
10 Dans cette perspective et prenant en considération le point de vue de Beaucher (2007,
p. 7) qui pense que « le projet met en jeu les représentations de l’individu à propos de l’école, du
marché du travail, du métier envisagé, de soi et de son avenir », nourrir des aspirations
professionnelles réalistes nécessite pour un jeune camerounais la prise en compte des
déterminants personnels, de ceux liés à la connaissance du milieu du travail et celui de
l’emploi au Cameroun, de ceux liés à la connaissance du système éducatif camerounais et
termes de quantité/qualité de l’offre/demande de formations scolaires, universitaires et
professionnelles. Cependant, il apparaît difficile pour un jeune de nourrir des aspirations
professionnelles qui tiennent compte de ses potentialités propres et des exigences de
l’environnement, au regard de la multiplicité et de la complexité des éléments sus
évoqués, et surtout de l’existence d’un système d’information très inapproprié. En effet,
les informations disponibles sur la dynamique du marché du travail sont généralement
fragmentaires et limitées dans leur portée ou simplement obsolètes (OIT, 2007).

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11 L’une des missions prévue par le Cahier de Charges du Conseiller d’Orientation au


Cameroun (MINESEC, 2009, p. 5), « l’aide au choix des études, des professions et à la vie en
général », fait de celui-ci l’accompagnateur privilégié des élèves. En réalité, les missions du
CO, d’après la circulaire N° 06/B1/1464/MINEDUC/CAB du 19 février 2001 portant
missions du conseiller d’orientation au sein de l’établissement scolaire, sont multiples et
variées. Il est question de l’information des publics cibles (apprenants, parents,
enseignants et responsables éducatifs) sur les filières de formation et leurs débouchés ;
l’aide à l’adaptation scolaire, le conseil, la recherche appliquée et la participation à la
sélection des élèves ; l’aide à l’insertion professionnelle. Il s’agit globalement de la
préparation des jeunes à la vie en général. Ces missions, biens remplies donnent
probablement la possibilité au professionnel de l’orientation de ramener les élèves
porteurs d’aspirations indéfinies, utopiques ou détournées vers une consolidation
d’aspirations réalistes. En général malheureusement, dans les établissements, le CO est le
plus souvent très peu ou pas du tout consulté, certains élèves déclarent même ignorer son
existence.

Revue de la littérature
12 Des éléments multiples expliquent l’orientation scolaire des jeunes. En énumérant
quelques-uns Duru-Bellat (1997) retient notamment les facteurs structurels (les
dispositions législatives et réglementaires, le nombre de places offertes dans certaines
spécialités, le marché de l’emploi), les facteurs individuels (goûts, centres d’intérêts,
valeurs, ambitions), les facteurs géographiques, le genre, les attentes familiales.
13 Au Cameroun, les CO en service dans les établissements scolaires sont soumis aux
obligations administratives (participation aux différents conseils de classes, rédaction des
rapports d’activités, suivi et encadrement des stagiaires issus des Ecoles normales
supérieures, etc.) et aux obligations de recherche (élaboration des monographies sur les
formations et les métiers de la localité, exploitation de la fiche d’orientation en classe de
Terminale et des données issues de l’évaluation psychométrique et du counseling,
participation aux projets de recherche initiés par les services départementaux, régionaux
et centraux en charge de l’orientation scolaire, etc.)
14 Cette lourde charge de travail semble aggravée par des dissonances observées dans les
textes juridiques régissant l’exercice de l’orientation conseil au Cameroun. Au rang de ces
dernières, Okéné (2009) note le manque d’engagement politique affirmé, l’insuffisance
quantitative et qualitative du personnel d’orientation et de conseil, la gestion
approximative des ressources humaines de ce maillon du système éducatif, l’absence
avérée de moyens techniques d’action de ces personnels notamment les tests
psychotechniques adaptés au contexte camerounais, les tests d’acquisitions scolaires en
rapport avec les programmes d’enseignement en vigueur, des locaux adéquats, les
logiciels d’aide à l’orientation, la rareté des ressources financières affectées à
l’orientation. La promotion de l’Orientation Conseil passerait alors par la définition d’une
politique nationale intégrant sa lisibilité, sa visibilité, son efficacité et son efficience. Il est
indispensable d’améliorer la qualité et la quantité des ressources humaines, organiques,
techniques, financières du segment de l’orientation tout en gérant efficacement celles qui
sont déjà disponibles.

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15 Ainsi, si l’éducation est considérée comme l’un des droits fondamentaux des enfants, il en
est de même de l’Orientation. Pour une bonne orientation des élèves, les CO doivent
travailleurs en collaboration avec tous les membres de la communauté éducative. Ce qui
n’est pas toujours le cas. A ce titre, Noundou (2012) note que sur 200 élèves des classes de
Troisième du Lycée de Ngoa Ekellé à Yaoundé, 55 % d’élèves affirment que leurs parents/
tuteurs viennent souvent au service de l’orientation, 23,5 % d’élèves affirment qu’ils ne
viennent jamais et seulement 21,5 % d’élèves affirment que leurs parents/tuteurs
viennent toujours au service de l’orientation.
16 En matière de connaissance de soi, il convient de dégager l’apport des deux composantes
du soi : le concept de soi et l’estime de soi. D’après Martinot (2001), tout individu possède
de très nombreuses connaissances sur lui-même, c’est-à-dire, de très nombreuses
conceptions de soi, ce qui lui permet de se conceptualiser dans beaucoup de rôles
possibles. C’est l’ensembles de ces multiples conceptions de soi qui constitue le concept de
soi (composante cognitive du soi) qui est beaucoup plus global. À l’opposé, l’estime de soi
(composante affective du soi) correspond à la valeur que les individus s’accordent. Elle
répresente l’ensemble des attitudes et des sentiments que le sujet éprouve à l’égard de
lui-même et qui guide ses réactions spontanées comme ses conduites organisées (Safont-
Mottay, De Leonardis, et Lescarret, 1997). En aplication en contexte scolaire, Martinot
(2001) montre que les élèves qui pensent du bien d’eux-mêmes, par comparaison aux
élèves qui s’estiment modestement, poursuivent leurs études plus longtemps, perséverent
davantage dans leur travail scolaire lorsqu’ils rencontrent des difficultés, utilisent plus
efficacement les compétences et les stratégies qu’ils ont développées, et ont une
perception plus étendue des options de carrières qui leurs sont accessibles. Ainsi, les
différentes conceptions de soi et l’estime de soi orientent les aspirations scolaires et
professionnelles des élèves.
17 Par ailleurs, Bignon et al (2005) pensent que mieux se connaître, notamment sur le plan
scolaire c’est établir son propre bilan personnel. Il s’agit simplement de recueillir des
informations sur soi. Il est question d’identifier ses atouts à partir de son expérience
personnelle (connaissances, qualités, emplois, compétences, diplômes, état de santé
physique et psychologique, etc.), de repérer quels sont les rôles que l’on tient dans
différents contextes (famille, association, loisirs, etc.), et de prendre en compte ses goûts,
centres d’intérêt, valeurs personnelles, souhaits, ambitions. L’accompagnement de
préférence par un CO devra permettre à l’élève de faire son bilan personnel indispensable
pour des aspirations professionneles réalistes.
18 Dans l’optique d’accompagner l’apprenant dans la construction de son propre projet
professionnel, tout en lui donnant un rôle actif, Loisy et al (2011) proposent la démarche
portfolio. Appliquée par les auteurs en contexte universitaire, cette démarche consiste à
outiller l’apprenant pour qu’il construise son projet personnel. Ce qui nécessite
l’accompagnement qui vise à mettre l’étudiant en confiance et à lui apporter une aide
technique, à travers des phases successives. D’abord une phase de collecte individuelle
des données au cours de laquelle l’apprenant doit revenir sur lui-même, regarder du côté
de son trajet et de ses expériences dans un cas ou du côté de ses désirs et de ses goûts
dans l’autre. Puis, une phase d’échange au sein d’un groupe. Ici, les apprenants doivent se
mettre ensemble, au sein d’un groupe restreint de formation, pour des partages et
d’échanges qui participent de l’analyse de l’expérience ou de ce qui est donné à voir de
soi. Ces échanges sont un moment-clé de la démarche, car la réflexion permet
l’émergence de nouvelles possibilités et elle est aussi un moment de construction de sens.

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Enfin, une phase de mise en commun des éléments personnels et des informations sur
l’environnement. Ici, l’étudiant doit retourner à son portfolio pour continuer à
l’alimenter et à le transformer, de manière itérative afin d’aboutir à son e-portfolio.
19 De plus pour faciliter la connaissance de soi, l’informatique apparaît comme un outil
indispensable. Guichard et Huteau (2006) proposent à cet effet les systèmes analogiques
qui visent à apparier un profil décrivant l’individu et un profil décrivant un métier.
20 Les CO doivent au préalable disposer de l’information sur les filières d’études et leurs
débouchés pour mieux informer les publics cibles. Les moyens tels que les livres, les
journaux, les brochures, les adresses électroniques doivent être mis à profit. Par la suite,
ils doivent constituer une des bases de données (régulièrement actualisées), et les mettre
à la disposition du public concerné. Auteur1 et Référence1 (2013) travaillant sur les CO en
service à l’Université de Yaoundé I et à l’Université de Yaoundé II relèvent leur niveau
actuel de connaissance des structures de formation professionnelle est moyen (61,5 %),
leur niveau actuel de connaissance du système LMD élevé (51,3 %). Sur la base de ces
résultats, il est possible de généraliser que, les CO ne sont que moyennement informés sur
les filières d’études et leurs débouchés. De plus, ces auteurs montrent que le niveau actuel
de connaissance des CO des métiers est faible (43,6 %). Parmi les raisons imputables à ces
faibles scores, on note : l’absence ou la rareté des formations continues suivies dans le
cadre de l’orientation-conseil, le manque d’expérience ou de formation initiale suffisante
dans le champ de l’orientation professionnelle, la perte d’engouement pour l’information
sur les métiers.
21 Quant à leur niveau actuel de connaissance de la démarche entrepreneuriale, les sujets
enquêtés estiment avoir un niveau moyen (48,7 %), ou un niveau faible (35,9 %). En effet,
la majorité des CO enquêtés n’ont aucune idée des profils psychologiques des
entrepreneurs à succès, des principales étapes dans l’élaboration d’un plan d’affaires
(business plan), de la démarche pour le test d’une idée de projet, des principes pour la
gestion du développement d’une entreprise et des techniques de vente et/ou de
persuasion. Parlant du niveau de connaissance des niches d’emplois, les sujets enquêtés
estiment avoir un niveau moyen (53,8 %), voire un niveau faible (30,8 %). Dans ce
domaine, certains aspects restaient peu connus des enquêtés. Il s’agit notamment des
entreprises en cours de création, le contenu du Document de Stratégie pour la Croissance
et l’Emploi (DSCE) et du Programme économique régional (Fozing et Mboning, 2013).
22 Enfin, le niveau de connaissance des entreprises privées par les CO enquêtés est faible
(46,2 %). Ici, les CO enquêtés n’ont pas une connaissance des aspects tels que les risques de
chômage, les conditions de promotion et les perspectives de développement susceptibles
de permettre des emplois stables ou de générer des recrutements. Par contre, le niveau de
connaissance des techniques de recherche d’emploi par les CO enquêtés est moyen
(51,3 %). Les CO sont ainsi moyennement informés sur les réalités du monde du travail et
celui de l’emploi (Fozing et Mboning, 2013). Sur cette base, il leur serait impossible de
bien informer en retour les demandeurs d’informations sur cette question (parents,
élèves).
23 Le CO, en tant que fonctionnaire est tenu de respecter les principes éthiques tels que le
sens du respect, la ponctualité, la disponibilité, la confiance, la confidentialité, la
bienfaisance, la responsabilité professionnelle et sociale, la capacité à prendre des
initiatives, la justice, …etc. Bien que la littérature sur le comportement du CO dans les
établissements scolaires du Cameroun soit rare, l’étude réalisée par Noundou (2012)
rapporte que 52 % d’élèves font confiance au CO en cas de problème personnel et/ou

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académique. Ce qui n’est pas le cas pour 48 % d’élèves enquêtés. Ces résultats montrent
que l’établissement de la confiance entre les CO et les élèves reste encore un objectif à
parfaire.
24 Dans le contexte de l’orientation, l’aspiration professionnelle constitue « une intention
d’avenir fragmentaire pour laquelle le sujet n’est pas en mesure de se représenter efficacement une
stratégie d’action lui permettant d’atteindre son but » (Beaucher, 2007, p. 7). Cet auteur dans
ses travaux distingue quatre types d’aspirations professionnelles. L’aspiration indéfinie
où le jeune est en action mais ne peut énoncer de but. L’aspiration utopique qui ne tient
pas beaucoup compte de la réalité et où aucun obstacle n’est perçu par le jeune qui a
beaucoup de difficultés à identifier les étapes qui le mèneront à son but. L’aspiration
détournée qui fait également mention d’un but qui correspond aux possibilités de
l’individu mais où l’action entreprise est hors contexte et ne correspond pas avec le but
visé. L’aspiration réaliste qui est très proche du projet professionnel mais où le sujet
manque de précisions ou omet certains inconvénients pour ne retenir que les plus
attrayants.
25 Marcoux-Moisan et al (2010) soulignent que les facteurs qui influencent à la fois le niveau
des aspirations et leur évolution sont de trois ordres : les facteurs socioculturels (le sexe
du répondant, la structure de sa famille d’origine, le statut socioéconomique de ses
parents, son milieu géographique de résidence, l’intensité du travail rémunéré auquel il
se livre durant ses études et les interactions sociales susceptibles de l’influencer), les
facteurs psychosociaux (la perception de compétence et le sentiment d’appartenance à
l’école), les facteurs liés plus étroitement à l’expérience scolaire (la mesure du rendement
scolaire, les éléments qui caractérisent le travail de l’élève (temps consacré aux devoirs)
et son parcours scolaire (interruption des études, retard scolaire, difficultés diverses)).
26 Joye et al (2010) montrent que les facteurs institutionnels et psychosociaux agissent
conjointement et contribuent à la « division sexuelle de l’orientation professionnelle».
Les facteurs institutionnels sont ici compris comme relevant du « capital social » défini
comme « la possession durable de relations plus ou moins institutionnalisées
d’interconnaissances et d’inter-reconnaissances». Au Cameroun, ces relations sont
essentiellement celles qui sont entretenues avec les membres de la famille, les
professionnels de l’enseignement et les membres du groupe de pairs. Ainsi, le réseau
social d’un individu va influencer durablement ses goûts, ses loisirs, ses représentations
des sphères familiales et professionnelles et finalement ses aspirations et orientations
professionnelles. Les aspirations et orientations professionnelles sont également
déterminées par la vision du monde des jeunes (aspects psychosociaux), elle-même
ancrée au niveau idéologique avec des stéréotypes de sexe partagés par la majorité des
adolescents. Au Cameroun particulièrement, les facteurs socioéconomiques (âge de
l’étudiant, son niveau d’étude, la catégorie socioprofessionnelle de ses parents, les
dépenses consacrées à sa formation et le salaire qu’il recherche) influencent
significativement les aspirations professionnelles d’un jeune (Nguetoum, 2007).

Méthodes et outils
27 Cette investigation est une recherche quantitative, à considérer sous un angle descriptif
de type corrélationnel. La collecte de données a eu lieu dans la Région de l’Ouest,
Département de la Mifi, Arrondissement de Bafoussam Ier, au Lycée Bilingue de
Bafoussam, auprès des élèves des classes de terminale. Sur le total de 704 élèves des

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classes de Terminale du Lycée Bilingue de Bafoussam régulièrement inscrits pour le


compte de l’année scolaire 2013-2014, un échantillon représentatif de 185 élèves a été
prélevé, de sorte que toutes les sections, séries d’études, ainsi que tous les sexes soient
représentés.
28 Le choix de cette population d’étude vient de ce que les orientations en fin des classes de
Troisième et plus particulièrement après le Baccalauréat jouent un rôle déterminant dans
la construction des parcours des élèves. La sélection de la ville de Bafoussam
(Arrondissement de Bafoussam Ier) se justifie par le fait que, c’est l’une des grandes
métropoles urbaines cosmopolites au sein de laquelle les différentes tendances ethniques
du pays se trouvent probablement représentées dans les établissements. Ce milieu
apparaît, de ce fait, comme le lieu d’un brassage culturel fort intéressant pouvant donner
une vision holistique de ce que pourrait être l’objet de notre préoccupation auprès de la
population des futurs bacheliers sur l’étendue du territoire national. Et le choix du Lycée
Bilingue de Bafoussam se justifie par le fait qu’il s’agit d’un établissement secondaire
public d’enseignement général à cycle complet, avec une Section Anglophone et une
Section Francophone qui traduit le bilinguisme en vigueur comme politique linguistique
de l’Etat. Cet établissement dispose d’un nombre un peu plus élevé de Conseillers
d’Orientation par rapport aux autres établissements de la ville.
29 Dans le cadre de cette étude, la méthode d’analyse adoptée est la régression dite
« logistique ordinale ». Elle s’applique dans le cas où la variable qualitative dépendante
est ordinale c’est-à-dire avec des modalités sous forme d’échelle (Stafford et Bodson,
2006). La régression logistique est de fait une approche privilégiée pour effectuer une
analyse discriminante car elle cherche à prédire l’appartenance à une catégorie en
fonction d’un certain nombre de caractéristiques. La modélisation logistique ordinale qui
en découle recourt à une seule équation qui permet d’obtenir à la suite des estimations,
des prédictions de probabilités d’occurrence des catégories. Par ailleurs, elle permet de
mesurer la dépendance ou l’indépendance entre deux variables (dont au moins la variable
dépendante est qualitative). Au regard de la régression logistique, la significativité du
modèle et des paramètres estimés est évaluée par le Test de Log-vraisemblance. Le
tableau est généré par Statistical Package for Social Sciences (SPSS) pour chaque modèle
ou paramètre estimé, la valeur du khi-deux, le nombre de degré de liberté et la
significativité.

Résultats et discussions
30 Les résultats seront présentés dans des tableaux de valeurs numériques afin d’en assurer
une meilleure lisibilité. Il s’agit de vérifier s’il existe oui ou non une liaison significative
entre les variables (dépendantes et indépendantes). Les résultats issus de cette procédure
sont présentés dans le tableau ci-dessous. Afin de mieux interpréter ces résultats, la
régression logistique ordinale ne s’est pas limitée à rechercher uniquement le lien entre
les variables. Elle a aussi permis de concevoir un modèle explicatif du phénomène étudié.
Dans le cadre de cette étude, les modèles explicatifs des aspirations professionnelles des
élèves sont représentés ci-dessous. Ce tableau est un outil qui permet de mieux analyser
les variables expliquées en fonction des différentes valeurs prises par les modalités des
variables explicatives.

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Tableau 1 — Modèles explicatifs des aspirations professionnelles des élèves

Aspirations Aspirations Aspirations Aspirations


Aspirations indéfinies utopiques détournées réalistes
professionnelles des jeunes
B Signif. B Signif. B Signif. B Signif.

Constante 47,602 0,982 46,698 0,981 -46,718 0,987 -49,194 0,981

[VI01 =1] 17,145 0,996 -15,092 0,996 13,981 0,995 15,725 0,996

[VI01 =2] 15,749 0,996 -16,582 0,996 13,204 0,996 14,904 0,997

Consultation du
[VI01 =3] 0,738 0,224 0,345 0,535 -0,509 0,456 0,21 0,731
CO

[VI01 =4] 0,104 0,838 -0,328 0,491 -0,671 0,233 0,665 0,201

[VI01 =5] 0b . 0b . 0b . 0b .

[VI02 =2] -31,758 0,000 -31,918 0,000 44,872 0,963 47,35 0,973

Initiation à la [VI02 =3] -31,304 0,000 -30,658 0,000 31,104 0,000 31,75 0,000
connaissance de
soi [VI02 =4] -31,388 0,000 -30,655 0,000 30,409 0,000 30,809 0,000

[VI02 =5] 0b . 0b . 0b . 0b .

[VI03 =1] 29,74 0,991 14,883 0,994 -0,904 1 -16,492 0,994

[VI03 =2] 15,118 0,994 14,971 0,994 -14,303 0,994 -16,236 0,994
Information sur
les filières
[VI03 =3] 16,362 0,994 15,437 0,994 -14,489 0,994 -15,515 0,994
d’études et leurs
débouchés
[VI03 =4] 16,077 0,994 15,042 0,994 -14,253 0,994 -16,231 0,994

[VI03 =5] 0b . 0b . 0b . 0b .

[VI04 =1] -61,415 0,975 -31,201 0,000 44,099 0,990 48,707 0,972

Information sur [VI04 =2] -31,328 0,000 -31,257 0,000 30,883 0,013 32,703 0,000
les réalités du
monde du [VI04 =3] -32,092 0,000 -31,602 0,000 31,353 0,029 33,025 0,000
travail et celui
de l’emploi [VI04 =4] -31,257 0,000 -30,487 0,000 30,821 0,013 32,822 0,000

[VI04 =5] 0b . 0b . 0b . 0b .

[VI05 =2] -1,285 0,107 -0,997 0,224 1,002 0,277 1,468 0,113

qualités [VI05 =3] -0,027 0,962 -0,497 0,037 1,083 0,049 1,347 0,016
personnelles du
CO [VI05 =4] -0,102 0,837 -0,152 0,043 0,88 0,042 1,185 0,014

Éducation et socialisation, 42 | 2016


Aspirations professionnelles de jeunes bacheliers au Cameroun : l’influence d... 10

[VI05 =5] 0b . 0b . 0b . 0b .

Ajustement du modèle 1,3 % 10,7 % 4,8 % 0%

Khi-deux du modèle 33,89 % 13,30 % 26,55 % 46,84 %

VI01 =1 : Variable Indépendante 01équivaut à la modalité pas du tout d’accord

VI01 =2 : Variable Indépendante 01équivaut à la modalité pas d’accord


VI01 =3 : Variable Indépendante 01équivaut à la modalité Neutre (Ni en désaccord, Ni d’accord)
VI01 =4 : Variable Indépendante 01équivaut à la modalité d’accord
VI01 =5 : Variable Indépendante 01équivaut à la modalité tout à fait d’accord
B : Coefficients de l’équation de régression logistique ordinale
a : La modalité de référence est : D’ACCORD
b : Ce paramètre est remis à zéro parce qu’il est superflu.

31 Les dernières lignes du tableau permettent de se prononcer sur le degré d’ajustement de


chaque modèle. Partant sur la base qu’un modèle est bien ajusté lorsque sa significativité
est inférieure ou égale à 5 %, nous pouvons conclure que, seul le modèle représentant les
aspirations professionnelles de type utopique n’est pas ajusté (coefficient de
significativité =10,7 %>5 %). Toutefois le modèle représentant les aspirations
professionnelles de type réaliste est le plus ajusté (coefficient de significativité =0 %<5 %),
suivi du modèle représentant les aspirations professionnelles de type indéfini (coefficient
de significativité =1,3 % <5 %) et de celui représentant les aspirations professionnelles de
type détourné (coefficient de significativité =4,8 % <5 %).
32 Le khi-deux du modèle informe que, les aspirations professionnelles de type réaliste sont
expliquées à 46,84 % par l’ensemble des variables explicatives. En second lieu, les
aspirations professionnelles de type indéfini sont quant à elles expliquées à 33,89 % par
l’ensemble des variables explicatives. En troisième position, les aspirations
professionnelles de type détourné sont expliquées à 26,55 % par l’ensemble des variables
explicatives. Et enfin, les aspirations professionnelles de type détourné sont expliquées à
13,30 % par l’ensemble des variables explicatives.

Influence de la consultation du CO sur les aspirations


professionnelles des élèves

33 Le tableau ci-dessus indique qu’il n’existe aucun lien de dépendance entre la consultation
du CO et les aspirations professionnelles des élèves (coefficient de significativité >5 %).
Pourtant, les tris à plat montrent que 82,3 % d’élèves consultent le CO pour ce qui est de
leurs aspirations professionnelles (75,7 %) et sont satisfaits des échanges (50,2 %). Les
tableaux descriptifs ressortent également que 10,5 % d’élèves qui consultent le CO ont des
aspirations professionnelles indéfinies. Ce taux est de 24,9 % pour les aspirations
professionnelles utopiques. Il passe à 11,6 % pour les aspirations professionnelles
détournées. Et enfin à 27,1 % pour les aspirations professionnelles réalistes. Ces faibles
taux peuvent justifier le fait que la consultation du CO n’ait aucune incidence significative
sur chacun des types d’aspirations professionnelles des élèves.

Éducation et socialisation, 42 | 2016


Aspirations professionnelles de jeunes bacheliers au Cameroun : l’influence d... 11

34 Notons néanmoins que, contrairement à l’étude réalisée par Bomda et al (2010) qui
corroborait un faible taux de consultation des CO par les élèves, des avancées sont
perceptibles à l’heure actuelle dans ce domaine. Les résultats de la présente étude
montrent que les élèves consultent de plus en plus le CO et sont satisfaits des échanges
qu’ils ont avec lui. Toutefois, pour que cette consultation du CO influence
significativement les aspirations professionnelles des élèves, d’autres paramètres doivent
être pris en considération. Il faudrait notamment d’une part que les CO soient outillés en
matière de connaissance de soi, de connaissance des milieux éducatifs, de travail et de
l’emploi ; et d’autre part, les élèves doivent avoir une idée tout au moins vague de ce
qu’ils ont l’intention de faire. Ainsi les échanges avec le CO seront précis et pourront de ce
fait influencer significativement les aspirations professionnelles des élèves.

Influence de l’initiation à la connaissance de soi sur les aspirations


professionnelles des élèves

35 Les résultats de l’estimation indique qu’il existe un lien significatif entre l’initiation à la
connaissance de soi et chacun des types d’aspirations professionnelles des élèves
(coefficient de significativité<5 %). Les élèves qui optent pour « pas d’accord » sur la
question d’initiation à la connaissance de soi ([VI02 =2]) ont tendance à développer des
aspirations professionnelles de type indéfini (B1 =-31,758) plus que ceux de type utopique
(B =-31,918<-31,758). Pour les élèves qui optent pour « neutre » sur cette question
([VI02 =3]), certains ont tendance à développer des aspirations professionnelles de type
réaliste (B =31,75) suivi de ceux de type détourné (B =31,104<31,75). Tandis que d’autres
ont plutôt tendance à développer des aspirations professionnelles de type utopique
(B =-30,658) suivi de ceux de type indéfini (B =-31,304 <-30,658). Une pareille conclusion se
dévoilent pour les élèves qui optent pour « d’accord » sur la question d’initiation à la
connaissance de soi ([VI02 =4]).
36 Les données descriptives corroborent cette conclusion. En effet, 19,3 % d’élèves enquêtés
qui affirment se connaître ont des aspirations professionnelles réalistes, tandis que
seulement 8,8 % d’élèves enquêtés qui affirment aussi se connaître ont des aspirations
professionnelles détournées, d’une part. D’autre part, 13,3 % d’élèves enquêtés qui
affirment se connaître ont des aspirations professionnelles utopiques, tandis que
seulement 5 % d’élèves enquêtés qui affirment se connaître ont des aspirations
professionnelles indéfinies. La conclusion qui se dégage de cette analyse est que
l’initiation à la connaissance de soi contribue à développer chez les élèves des aspirations
professionnelles, plus réalistes que détournées ou plus utopiques qu’indéfinies.
37 Il apparaît dont indispensable pour les ministères en charge de l’éducation de doter le CO
des techniques et outils appropriés (tests psychologiques, logiciels spécifiques, etc.),
d’initier des formations continues (sur des thèmes comme : estime de soi, affirmation de
soi, bilan personnel, etc.), afin qu’il puisse accompagner efficacement les élèves en
matière de connaissance de soi.

Influence de l’information sur les filières d’études et leurs


débouchés sur les aspirations professionnelles des élèves

38 Le lien est inexistant (coefficient de significativité >5 %) entre l’information sur les filières
d’études et leurs débouchés et les aspirations professionnelles. Les données descriptives

Éducation et socialisation, 42 | 2016


Aspirations professionnelles de jeunes bacheliers au Cameroun : l’influence d... 12

montrent que 42 % des sujets enquêtés admettent être biens informés les filières d’études
universitaires qui débouchent sur les professions auxquels ils aspirent. Ce taux passe à
40,4 % pour ce qui est de l’information sur les grandes écoles et à 33,7 % quand il s’agit de
l’information sur les instituts privés d’enseignement supérieur. De même, 5,6 % d’élèves
qui admettent être biens informés sur les filières d’études et leurs débouchés ont des
aspirations professionnelles indéfinies. Ce taux est de 11,7 % pour les aspirations
professionnelles utopiques. Il passe à 5,6 % pour les aspirations professionnelles
détournées. Et enfin à 15,5 % pour les aspirations professionnelles réalistes. Ces faibles
taux peuvent justifier le fait que l’information sur les filières d’études et leurs débouchés
n’ait aucune incidence significative sur chacun des types d’aspirations professionnelles
des élèves.

Influence de l’information sur les réalités du monde du travail et


celui de l’emploi sur les aspirations professionnelles des élèves

39 Il existe un lien significatif entre l’information sur les réalités du monde du travail et
celui de l’emploi et chacun des types d’aspirations professionnelles des élèves (coefficient
de significativité < 5 %). Certains élèves qui optent pour « pas d’accord » sur la question
d’information sur les réalités du monde du travail et celui de l’emploi ont tendance à
développer des aspirations professionnelles de type réaliste (B =32,703) suivi de ceux de
type détourné (B = 30,883<32,703). Tandis que d’autres vont plutôt développer des
aspirations professionnelles de type utopique (B =-31,257) suivi de ceux de type indéfini
(B = -31,328<-31,257). Une pareille conclusion se dévoile pour les élèves qui optent pour
« neutre » ou pour « d’accord » sur cette question d’information sur les réalités du monde
du travail et celui de l’emploi.
40 En effet, 7,2 % d’élèves enquêtés qui affirment être biens informés sur les réalités du
monde du travail et celui de l’emploi ont des aspirations professionnelles réalistes, tandis
que seulement 2,8 % d’élèves enquêtés qui affirment être biens informés sur cette
question ont des aspirations professionnelles détournées, d’une part. D’autre part, 3,3 %
d’élèves enquêtés qui affirment être biens informés sur les réalités du monde du travail et
celui de l’emploi ont des aspirations professionnelles utopiques, tandis que seulement
2,8 % d’élèves enquêtés qui affirment être biens informés sur cette question ont des
aspirations professionnelles indéfinies. La conclusion qui se dégage de cette analyse est la
suivante : l’information sur les réalités du monde du travail et celui de l’emploi contribue
à développer chez les élèves des aspirations professionnelles, plus réalistes que
détournées ou plus utopiques qu’indéfinies.

Influence des qualités personnelles du CO sur les aspirations


professionnelles des élèves

41 Il existe un lien significatif entre les qualités personnelles du CO et les aspirations


professionnelles de type utopique, détourné et réaliste chez les élèves (coefficient de
significativité < 5 %). Les élèves qui optent pour « neutre » en ce qui concerne les qualités
personnelles du Conseiller d’orientation ont tendance à développer des aspirations
professionnelles de type réaliste (B =1,347), suivi de ceux de type détourné
(B =1,083<1,347) ou des aspirations professionnelles de type utopiques (B =-0,497). Une

Éducation et socialisation, 42 | 2016


Aspirations professionnelles de jeunes bacheliers au Cameroun : l’influence d... 13

pareille conclusion se dévoile pour les élèves qui optent pour « d’accord » en ce qui
concerne les qualités personnelles du Conseiller d’orientation.
42 En effet, 13,3 % d’élèves enquêtés qui se sont prononcés sur les qualités personnelles du
Conseiller d’orientation ont des aspirations professionnelles réalistes, contre 6,1 %
d’élèves enquêtés qui se sont prononcés sur la question ont des aspirations
professionnelles détournées. La conclusion qui se dégage de cette analyse est la suivante :
les qualités personnelles du Conseiller d’orientation contribuent à développer chez les
élèves des aspirations professionnelles, plus réalistes que détournées ou utopiques.

Conclusion
43 Cette recherche part du postulat selon lequel l’une des causes du chômage des jeunes
diplômés au Cameroun peut être liée au fait que les jeunes ne soient pas assez assistés par
des professionnels dans la consolidation de leurs aspirations professionnelles, meilleur
gage d’une insertion socioprofessionnelle. Et, étant donné que, nourrir des aspirations
professionnelles cohérentes nécessite de combiner une multitude de facteurs (difficiles à
saisir), le CO de par ses compétences et les missions qui lui sont assignées apparaît comme
l’accompagnateur idéal susceptible d’aider les jeunes à passer des aspirations
professionnelles indéfinies, utopiques ou détournées aux aspirations professionnelles
réalistes.
44 L’initiation à la connaissance de soi contribue à développer chez les élèves des aspirations
professionnelles, plus réalistes que détournées ou plus utopiques qu’indéfinies.
L’information sur les réalités du monde du travail et celui de l’emploi contribue à
développer chez les élèves des aspirations professionnelles, plus réalistes que détournées
ou plus utopiques qu’indéfinies. Les qualités personnelles du CO contribuent à développer
chez les élèves des aspirations professionnelles, plus réalistes que détournées ou
utopiques.
45 Sur la base de ces résultats, il convient de retenir que le CO est un partenaire
incontournable et les élèves doivent se laisser accompagner par ce professionnel afin de
passer des aspirations professionnelles indéfinies, utopiques ou détournées aux
aspirations professionnelles réalistes qui débouchent sur des projets professionnels
faisables. Ce qui nécessite au préalable que le CO soit très outillé en matière de
connaissance de soi, de connaissance des milieux éducatifs, de travail et de l’emploi. Pour
ce faire, il est judicieux pour les ministères en charge de l’éducation de le doter d’un
ensemble de techniques et outils (logiciels spécifiques, tests psychologiques, bases de
données actualisées, documents pédagogiques homologués, etc.), d’initier des formations
continues (sur des thèmes comme : estime de soi, affirmation de soi, bilan personnel,
recherche d’emploi, montage de projet et création d’entreprise, etc.).

Éducation et socialisation, 42 | 2016


Aspirations professionnelles de jeunes bacheliers au Cameroun : l’influence d... 14

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NOTES
1. Valeur du coefficient de l’équation de régression logistique ordinale. Les coefficients B négatifs
traduisent le fait que les modalités de la variable indépendante concernée évoluent en sens
inverse par rapport à la variable dépendante et, doivent être comparés entre eux. Dans la même
logique, les coefficients B positifs ne peuvent être comparés qu’entre eux.

RÉSUMÉS
Cet article s’interroge sur les causes de la hausse du taux de chômage des jeunes au Cameroun et
penche vers la non assistance des jeunes par les professionnels dans la consolidation de leurs
aspirations professionnelles, gage d’une insertion socioprofessionnelle. Sur la base des données
collectées auprès de 181 élèves des classes de Terminale du Lycée Bilingue de Bafoussam par un
procédé de choix « aléatoire » et analysées par la régression « logistique ordinale », il ressort que
la consultation du Conseiller d’orientation (CO) n’influence pas significativement le type
d’aspirations professionnelles nourrie par les élèves. Il en est de même de l’information sur les
filières d’études et leurs débouchés. Par contre, l’initiation à la connaissance de soi contribue à
développer chez les élèves des aspirations professionnelles plus réalistes qu’utopiques ou plus
détournées qu’indéfinies. L’information sur les réalités du monde du travail et celui de l’emploi
participe à développer chez les élèves des aspirations professionnelles, plus réalistes que
détournées ou plus utopiques qu’indéfinies. Les qualités personnelles du CO contribuent aussi à
développer chez les élèves des aspirations professionnelles, plus réalistes que détournées ou
utopiques.

This study questions the causes of unemployment of youth in Cameroon and focused on poor
assistance to students in the consolidation of their professional aspirations, guarantee of socio-
professional insertion. Data collected from 181 students in Upper Sixth classes of Government
Bilingual High School Bafoussam through a random sampling method and analysed by regression
ordinal logistic stands out that consulting with a guidance counselor does not influence in a

Éducation et socialisation, 42 | 2016


Aspirations professionnelles de jeunes bacheliers au Cameroun : l’influence d... 16

significant way the types of professional aspirations entertained by students. Same goes for fields
of study and their openings. Initiation to self-awareness contributes in developing in students
more realistic professional aspirations rather than oblique, or utopian than undefined.
Information on the realities of the job market and the world of employment contributes to
developing in students more realistic professional aspirations rather than oblique, or utopian
than undefined. The personal qualities of a guidance counselor also contributes to developing in
students more realistic professional aspirations rather than oblique, or utopian.

INDEX
Mots-clés : aspirations professionnelles, connaissance de soi, information, pratique de
l’orientation scolaire.
Keywords : professional aspirations, self-awareness, practice of orientation

AUTEURS
DONG NGUETSOP FROSINE MERVEILLE
Université de Yaoundé I, Cameroun

FOZING INNOCENT
Université de Yaoundé I, Cameroun

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