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SYNTHÈSE

médecine/scienœs 1 994 ; 10 : 6 5 7-64

Protéines Ras et transmission


des signaux mitogènes

Les protéines Ras jouent un rôle central dans la transmis­


sion du signal qui, parti des facteurs de croissance et de
leur interaction avec des récepteurs tyrosine kinases, abou­
tit à la stimulation de la transcription des gènes préco­
ces. En s'autophosphorylant sur des tyrosines, le récep­
teur fournit un site d'interaction avec Gbr2, et, par son
intermédiaire, un point d'ancrage aux protéines Sos.
Celles-ci induisent l'échange GDP ---7 GTP sur les protéi­
nes Ras, elles-mêmes liées à la membrane. Ras-GTP
recrute à son tour Raf et permet son activation. Raf phos­
phoryle MEK qui phosphoryle ensuite les MAP-kinases.
Après activation, ces MAP-kinases phosphorylent de nom­
breuses protéines et sont transloquées dans le noyau où
elles activent des facteurs de transcription de la famille
Ets qui contrôlent l'expression de cfos. Ce schéma sem­
ble vérifié dans de nombreux tissus, mais on connaît
encore mal le rôle précis des protéines GAP qui cataly­
sent l'hydrolyse du GTP lié à Ras, la fonction de Ras dans
Pierre Chardin les cellules qui ne se divisent pas, le rôle spécifique de
chacune des trois protéines Ras, H-Ras, K-Ras et N-Ras.

L
es gènes H-ras et K-ras ont titution des acides aminés 1 2, 1 3 ou
été découverts en tant 6 1 . Parallèlement, une équipe tra­
qu'oncogènes, c'est-à-dire vaillant sur la protéine du virus de
en tant que gènes d'ori­ Harvey a montré que cette protéine
gine cellulaire responsables pouvait s'autophosphoryler, non pas
du pouvoir transformant des rétro­ en utilisant I 'ATP, comme c'est le
virus dits de << Harvey » et de << Kirs­ cas le plus fréquent, mais le GTP.
ten ,, qui induisent des sarcomes On s'est aperçu, par la suite, que
chez le rat et la souris. Ces deux cette autophosphorylation n 'est
gènes et un troisième fortement qu'une réaction << parasite , de
apparenté, N-ras, ont été redécou­ l'hydrolyse du GTP, limitée aux pro­
verts de façon indépendante par téines Ras virales. Cependant, cette
plusieurs équipes qui cherchaient à observation a permis de découvrir
caractériser les altérations génétiques que les protéines Ras fixent le GDP
dans les tumeurs humaines. On et le GTP, suggérant une analogie
ADRESSE ET TIRÉS A PART --· trouve des gènes RAS mutés dans avec les grandes protéines G hété­
environ un tiers des tumeurs humai­ rotrimériques impliquées dans la
P. Chardin : chargé de recherche à l 'Inserm.
Institut de pharmacologie moléculaire et nes, où l'allèle transformant ne dif­ transduction de nombreux signaux
cellulaire, Cnrs, 660, route des Lucioles, fère de l'allèle normal que par une hormonaux. Des anticorps bloquant
06560 Valbonne, France. seule mutation qui provoque la subs- l'activité de Ras et un mutant ---

mls n° 6-7 vol. 10, juin-juillet 94 657


<< dominant négatif ,, ont permis de soit par la palmitoylation de cystéi­

cystéine du << CAAX dans le cas de


montrer que les protéines Ras sont nes situées quelques résidus avant la
indispensables à la transformation "•

par les oncogènes à activité tyrosine la protéine H-Ras, d'une isoforme


kinase, mais non par les oncogènes minoritaire (exon 4A) de K-Ras, et
à activité sérine/thréonine kinase [ 1 , de N-Ras. Ces modifications ont été
2] . Ces découvertes ont permis de décrites en détail dans un numéro
RÉFÉRENCES ------·
placer les protéines Ras comme récent de cette revue [3] ; elles per­
1 . Smith MR, OeGudicibus SJ, Stacey OW. intermédiaires entre deux grandes mettent d'expliquer l'association des
Requirement for c-Ras proteins during viral classes d'oncogènes : les récepteurs protéines Ras aux membranes.
oncogene transf01·mation. Nature 1 986 ; de facteurs de croissance à activité Cependant, elles n 'expliquent pas
320 : 540-3. tyrosine kinase et les sérine/thréo­ pourquoi les protéines Ras sont très
2. Feig LA, Cooper CM. Inhibition of nine kinases cytosoliques (comme majoritairement associées à la mem­
NIH3T3 cell proliferation by a mutant Ras Raf ou Mos) . Au début des années brane plasmique, alors que d'autres
prot.ein wiù1 preferential affinity for GOP. 1980, on pouvait donc proposer le petites protéines G de la même
Mol GeU Biol 1 988 ; 8 : 3235-43. schéma : tyrosine kinase ---7 Ras ---7 famille sont associées à des compar­
3. Pouliot JF, Béliveau R. Modifications Raf ou Mos ---7 Mye ou Fos, mais on timents membranaires intracellulai­
post-traductionnelles des protéines par les ne pouvait pas décrire en termes res comme l'appareil de Golgi [ 4] ;
lipides. médecine/sciences 1 994 ; 1 0 : 65-73. moléculaires les événements repré­ on peut penser qu'il existe sur la

1
sentés par chacune de ces flèches. membrane plasmique une << protéine
4. Coud B. Le o·ansport vésiculaire des cel­
lules eucaryotes est contrôlé par des Il aura fallu une dizaine d'années d'ancrage >> pour les protéines Ras.
GTP-ases. médecine/sciences 1 992 ; 8 : 326-33. pour découvrir les principaux

1
acteurs de cette voie de transmis­ Structure
5. Fort P, Vincent S. Transduction du sion, et comprendre comment ils
signal mitogène, cytosquelette et petites et cycle fonctionnel
protéines G : vers un réseau de protéines interagissent. des petites protéines G
GAP ? médecine/sciences 1 993 ; 9 : 59-65.
Modifications Les protéines Ras font partie d'une
6. Camonis J H , K.alékine M , Gondré B , post-traductionnelles vaste famille de petites protéines
Carreau H, Boy-Marcotte E , Jacquet M .
Characterization, cloning and sequence of et localisation fixant le GTP, subdivisée en quatre
the COC25 gene which conu·ols the cyclic des protéines Ras branches principales : Ras, Rho, Rab
AMP leve! of S. œreuisiae. EMBO J 1 986 ; et Ran. Elles ont un poids molécu­
5 : 375-80. Immédiatement après leur synù1èse
laire de 2 1 kDa, d'où l'appellation
sur le ribosome, les protéines Ras
7. Bowtell 0, Fu P, Simon M, Senior P. fréquente de << p2 1 Ras et sont
•• ,
possèdent une séq uence dite
Identification of murine homologues of the constituées essentiellement d'un
activa tors of ras. Pror Natl A cadrSci ""SA aminé aliphatique, X
Drosophila Son of seuenless gene : �ntial << CAAX , (C cystéine, A
= acide =
domaine globulaire de 1 60 acides
n'importe =

1 992 ; 89 : 65 1 1-5. aminés constituant le site de fixation


quel acide aminé) à leur extrémité
du nucléotide (GDP ou GTP) et
8. Chardin P, Camonis JH, Gale 1\TW, van
C-terminale ; par exemple, la pro­
d'une région C-terminale variable,
Aelst L, Schlessinger J, Wigler M H , Bar­ téine H-Ras se termine par la
longue d'une vingtaine d'acides ami­
Sagi O. Human Sos] : a guanine nucleo­ séquence : Cys-Val-Leu-Ser. Une
tide exchange factor for Ras that binds to farnésyl-transférase vient ajouter un nés, qui se termine par la << boîte
GRB2. Science 1 993 ; 260 : 1 338-43. CAAX "· On connaît les structures
groupement farnésyl sur la cystéine,
tridimensionnelles des deux formes
9. Galland F, Birnbaum O. Le proto­ puis une protéase spécifique vient de la protéine Ras : liée au GDP et
oncogène m cf2/dbl et l e s fac teurs cliver les trois derniers résidus :
d 'échange GOP/GTP. méderine/sciences AAX, et le groupement carboxyle de liée au GTP. La comparaison mon­
1 992 ; 8 : 8 1 9-26. tre essentiellement deux régions, en
la cystéine, devenue terminale, est
positions 30-38 et 61-77, qui chan­
10. Cen H, Papageorge A, Vass WC, alors méthylé par une carboxy­
gent de structure selon que le GDP
Zhang K, Lowy O. Regulated and constitu­ méthyl transférase (m/s n° 8-9, vol. 9,
tive activity by COC25 Mm (GRF) , a Ras­ p. 996) *. La protéine possède alors ou le GTP est présent dans le site.
specifie exchange factor. Mol Cell Biol Les protéines qui reconnaissent uni­
une extrémité C-terminale fortement
1 993 ; 1 3 : 77 1 8-24. quement l'une des deux formes, par
hydrophobe et une grande avidité
exemple Raf et GAP (GTPase activa­
1 1 . Lowen tein EJ, Oaly R:J, Batzer AG, pour les membranes. L'interaction
Li W, Margolis B, Lammers R, Ullrich A, avec la membrane est encore stabi­ ting protein) qui reconnaissent spéci­
Skolnik EY, Bar-Sagi 0, Schlessinger J. The fiquement Ras-GTP, interagissent
lisée, soit par la présence de plu­
SH2 and SH3 domain containing protein avec ces régions.
GRB2 links receptor tyrosine kinases to Ras sieurs résidus chargés positivement
signalling. Cell 1 992 ; 70 : 43 1 -42. qui interagissent vraisemblablement Bien qu'elles contrôlent des aspects
avec les charges négatives des phos­ différents de la vie cellulaire : trans­
1 2. Li N, Batzer A, Daly R , Yajnik V, Skol­
pholipides (c'est le cas de la forme mission des signaux mitogènes pour
nik E, Chardin P, Bar-Sagi 0, Margolis B, Ras, réarrangements du cytosque­
Schlessinger J. Guanine-nucleotide-releasing majoritaire de la protéine K-Ras) ,
factor hSosl binds to Grb2 and links lette pour Rho [5] et trafic intracel­
receptor tyrosine kinases to Ras signalling. * Voir aussi Gingras 0, et al. médecine/sciences lulaire pour Rab [ 4] , ces protéines
Nature 1 993 ; 363 : 85-8. 1994 ; 10 : 55-64. fonctionnent selon le même cycle
658 m/s n° 6-7 vol. 10, juin:Juillet 94
Facteur
d'échange
� GDP GTP
-�
Cible de
la forme
GTP ou
effecteu r
de base, analogue à celui des autres
protéines G (figure 1). Sous forme
GDP, la petite protéine G est com­
plexée à une cible spécifique (GDI
spécifique de Ras à la membrane
plasmique, une fonction très diffé­
rente de celle des protéines GDI qui
permettent vraisemblablement à
rP

tf1-�·�
(GDF-dissociation inhibiting protein) Rho et Rab de recycler à travers le
•iji+ dans le cas de Rho et Rab) , et un
facteur d'échange provoque l'ouver­
cytosol) ; on ne sait pas si le facteur
d'échange se dissocie après le pas­
Cible de � ture du site et le départ du GDP. sage de la petite protéine G sous
la forme Protéine Lorsque le GTP entre dans le site, forme GTP ; et on ne comprend pas
GDP "GAP"
complexe Ras-GTP1 effecteur, pour
Pi
la protéine spécifique de la forme ce qui provoque la dissociation du
GDP se dissocie, et la petite pro­
Figure 1 . Le cycle des petites pro­ téine G sous forme GTP peut inter­ permettre l'accès de GAP. Dans cer­
téines G. Au repos la petite protéine agir avec une cible spécifique de la tains cas GAP et l 'effecteur pour­
G est complexée au GDP et interagit forme GTP, ou « effecteur » . Après raient faire partie d ' un même
avec une cible spécifique de cette interaction avec cet effecteur, inter­ complexe.
forme GDP; un facteur d'échange vient une protéine de type GAP. La
provoque le départ du GDP et per­ On voit cependant que ces petites
met au GTP de le remplacer dans Je
rencontre de GAP provoque une protéines G se comportent comme
site nuc/éotidique ; la petite protéine hydrolyse rapide du GTP et le des << interrupteurs >> moléculaires et
G interagit avec une cible spécifique retour à la forme de repos liée au contrôlent la formation de deux
de la forme GTP, l'effecteur, puis GDP. Plusieurs points de ce cycle types de complexes : l'un sous forme
intervient une protéine de type GAP, sont encore mal connus. Dans le cas GDP, prédominant au repos, et
qui provoque l'h ydrolyse rapide du de Ras, on ne connaît pas la cible l'autre spécifique de la forme GTP,
GTP et le retour à la forme de de la forme GDP (il pourrait s'agir essentiellement responsable de l'acti­
départ, complexée au GDP. d'une protéine permettant l'ancrage vité de ces protéines (m/s n° 1 0,
vol. 8, p. 1 097).

1 Facteurs d'échange

On appelle << facteur d'échange >>


toute protéine capable de stimuler
de façon catalytique l'échange GDP
--1 GTP sur une petite protéine G

Comme beaucoup de protemes


essentielles au contrôle de la divi­
sion cellulaire, les protéines Ras ont
25-30% été extrêmement conservées au
244 831 1 24 1 1 244
RasG RF IIPHI ��PHI 1 Il cours de l'évolution. On trouve chez
la drosophile, ou même chez la
25-30%
51 252 641 1 066 1 596 levure, des protéines Ras très homo­
Dm Sos 1 t'0W�� PH I%J f1 1 logues à celles des mammifères.
L'efficacité des techniques de géné­
tique chez la levure a permis de
hSos1 découvrir chez cet organisme les
premiers facteurs d'échange de Ras
appelés CDC25 et SDC25 [6] . Quel­
hSos2 ques années plus tard, la découverte
par l'équipe de Rubin de la pro­
� Homologue pour toutes � Domaine Domaine facteu r • Régions riches
téine Sos (Son of Sevenless) de droso­
les protéines Sos dbl d'échange en praline
phile, impliquée dans la transduc­
tion du signal par le récepteur à
Figure 2. Structure schématique des principaux facteurs d'échange de activité tyrosine kinase, Sevenless, et
Ras. De haut en bas : les deux premiers facteurs d'échange découverts chez qui possède un domaine homologue
la levure : CDC25 et SDC25 ; RasGRF : un facteur d'échange de mammifères aux protéines CDC25 et SDC25, a
fortement exprimé dans le cerveau ; puis les protéines Sos de drosophile fortement stimulé les recherches des
(DmSos) et humaines (hSos 1 et 2). Les différents domaines sont représen­
tés par des boîtes de couleurs différentes. Les domaines responsables de
facteurs d'échange de Ras chez les
l'activité facteur d 'échange, représentés en rouge, sont alignés. Les pour­ mammifères et permis de découvrir
centages indiqués représentent Je degré d'identité entre ces différentes pro­ deux protéines de souris : mSosl et
téines dans les domaines concernés. Domaine db/ domaine homologue =
mSos2 [ 7] , puis humaines : hSosl et
pour J'oncogène db/. PH domaines d'homologie avec la Pleckstrine, subs­
= hSos2 [8] , qui ont une activité de
trat majeur de la PKC dans les plaquettes. facteur d'échange spécifique de Ras,
m/s n° 6-7 vol. 1 0, juin-juil/el 94 659
RÉFÉRENCES -------
Protéine Raf-1

r---_,�����--�nr----
1 3. Rozakis-Adcock M, Fernley R, Wade J, 330 627 648
Pawson T, Bowtell D. The SH2 and SH3
domains of Grb2 couple the EGF recep­
tor to the Ras activator mSosl . Nature CR1 CR2 Domaine kinase
1 993 ; 363 : 83-5. Riche en Riche en sérines
cystéines et thréonines
1 4. Buday L, Downward J. Epidermal
growth factor regulates p21 Ras through the Figure 3. Structure schématique de la protéine Rat, effecteur de Ras.
formation of a complex of receptor, Grb2 Les différents domaines sont représentés par des boÎtes de couleurs diffé­
adapter protein, and Sos nucleotide rentes. La partie N-terminale porte deux régions régulatrices appelées CR 1
exchange factor. Cel/ 1 993 ; 73 : 6 1 1 -20.
et CR2, l'activité sérine/thréonine kinase est portée par la moitié C-terminale.
Ras-G TP est en interaction directe avec l'extrémité N-terminale de Raf.
15. Sarlat 1, Schweighoffer F, Chevallier­
Multon MC, Duchesne M, Fath 1 , Lan­ L 'extrémité C-terminale de Raf forme un complexe avec la kinase MEK
dais D, Jacquet M, Tocqué B. The Saccha­ (dénommée aussi MAP-kinase-kinase), immédiatement en aval dans la trans­
romyces œrevisiae gene product SDC25 C­ mission du signal.
domain functions as an oncoprotein in
NIH3T3 cells. Oncogene 1 993 ; 8 : 2 1 5-8.

1 6. Van Aelst L, Barr M, Marcus S, Polve­


rino A, Wigler M. Complex formation bet­
ween Ras and Raf and other protein kina­
ses. Proc Natl A cad Sei USA 1 993 ; 90 : sans effet sur les protéines apparen­ cellules, et l'activité de la forme la
621 3-7. tées comme Rap et Rai. Leur poids plus longue pourrait être modulée
moléculaire est d'environ 1 60 kDa ; par les facteurs de croissance [ 1 0 ] .
1 7. Vojtek AB, Hollenberg SM, Cooper JA. cependant, différents épissages alter­ L'extrémité C-terminale des protéi­
Mammalian Ras interacts direcùy wiù1 the natifs pourraient engendrer des for­
serine/threonine kinase Raf. Cell 1 993 ; 74 : nes Sos a une composition très par­
205- 1 4. mes plus courtes dans certains tissus. ticulière : elle est très riche en pro­
La structure primaire des protéines lines. Comme les domaines SH3
1 8. Zhang XF, Setùeman J, Kyriakis JM, hSos1 et hSos2 (figure 2) montre au reconnaissent des motifs riches en
Takeuchi-Suzuki E, Elledge �J, Mars­ moins trois domaines distincts : ( 1 )
hall MS, Bruder JT, Rapp UR, Avruch J.
pralines (voir mini-synthèse p. 709 de
Normal and oncogenic p2 1 Ras proteins l'extrémité N-terminale d'environ ce numéro) et que la protéine Grb2,

bind to ù1e amino-terminal regulatory 600 résidus où l 'on trouve une constituée de deux domaines SH3
domain of c-Raf- 1 . Nature 1 993 ; 364 : regwn << dbl » qui pourrait être entourant un domaine SH2, joue un
308- 1 3. impliquée dans l 'interaction avec rôle essentiel dans la transmission
des petites protéines G de la famille
kinase et Ras [ 1 1 ] , on était tenté de
1 9. Warne PH, Rodriguez Viciana P, du signal entre récepteurs tyrosine
Downward J. Direct interaction of Ras and Rho/Rac [9] et une région d'homo­
the amino-terminal region of Raf-1 in vitro. logie à la pleckstrine ( substrat penser que les domaines SH3 de la
Nature 1 993 ; 364 : 352-5. majeur de la PKC dans les plaquet­ protéine Grb2 pouvaient interagir
tes) , de fonction inconnue pour directement avec l 'extrémité C­
20. Koide H, Satoh T, Nakafuku M,
Kaziro Y. GTP dependant association of l'instant, mais qui est trouvée dans terminale de Sos, le complexe
Raf- 1 with Ha-Ras : identification of Raf as de nombreuses autres protéines de
manquan t » entre récepteurs et Ras.
Grb2/Sos représentant le << chaînon
a target downstream of Ras in mammalian transmission ; (2) le domaine central
cells. Proc Nat! A cad Sei USA 1 993 ; 90 : qui porte la reg10n << facteur
8683-6. Deux des régions riches en pralines
d'échange », homologue des facteurs de Sos interagissent effectivement
2 1 . Morrison DK, Heidecker G, Rapp UR, d'échange de levure CDC25 et avec les deux domaines SH3 de
Copeland TD. Identification of the major SDC25 ; (3) l'extrémité C-terminale Grb2 , et l'on peut c o­
phosphorylation sites of tl1e Raf- 1 kinase. qui porte plusieurs régions riches en immunoprécipiter hSos1 avec Grb2
j Biol Chem 1 993 ; 268 : 1 7309- 1 6. pralines. Comme les protéines Ras, [ 1 2] . La quantité de protéine Sos
22. Kolch W, Heidecker G, Kochs G, ces deux protéines hSos1 et hSos2 associée à Grb2 est la même, que les
Hummel R, Vahldi H, Mischak H, Finken­ sont exprimées de façon ubiquitaire, cellules aient été stimulées ou non
zellzr G, Marmé D, Rapp UR. Protein leurs niveaux d'expression sont sem­ par un facteur de croissance ; en
kinase Ca activates Raf-1 by direct phos­ blables dans tous les tissus testés, et
phorylation. Nature 1 993 ; 364 : 249-52. revanche, on voit une association
leur abondance est très faible (envi­ rapide de ce complexe Grb2/Sos
23. Fabian JR, Daa.r 10, Morisson DK. Cri­ ron 1 ADNe sur 1 00 000) . avec le récepteur de 1 'EGF après sti­
tical tyTosine residues regulate ù1e enzyma­ Dans le cerveau, il existe une autre mulation [ 1 2- 1 4] . On peut donc
tic and biological activity of Raf- 1 kinase.
Mol Cel/ Biol 1 993 ; 1 3 : 7 1 70-9.
proteine : RasGRF (ou << mo use proposer le modèle suivant : la fixa­
CDC25 » ) , beaucoup plus fortement tion de l 'EGF sur son récepteur pro­
24. Cai H, Erhardt P, Troppmair J, Diaz­ exprimée que Sos, et qui pourrait voque sa dimérisation et une trans­
Meco MT, Sithanandam G, Rapp UR, Mos­ être le principal facteur d'échange phosphorylation sur différentes tyro­
cat J, Cooper CM. Hydrolysis of phospha­ de Ras dans les cellules nerveuses. sines ; une de ces tyrosines phos­
tidylcholine couples Ras to activation of
Raf protein kinase during mitogenic signal Différentes formes de cette protéine phorylées (en position 1 068) lie le
transduction. Mol Cell Biol 1 993 ; 1 3 : sont exprimées à des taux beaucoup domaine SH2 de Grb2, ce qui a
7645-5 1 . plus faibles dans d'autres types de pour effet de << transloquer » le com-
660 mis n° 6-7 vol. JO, juin-juil/el 94
pourrait être indispensable à son
Ras G TPase Activating Protein p1 20GAP
activité, mais la kinase responsable
Ca lB de cette phosphorylation reste à
découvrir ; on observe aussi la phos­
Région Pleckstrine Domaine d'activation
phorylation des sérines 43 et
hydrophobe Homologue de la GTPase de Ras
259 [21 ] , et la protéine kinase C
(PKC) pourrait jouer un rôle impor­
Figure 4. Structure schématique de la protéine p 120-GAP, responsa­
tant dans l 'activation de Raf, par
ble '!e l'h ydrolyse du GTP sur Ras. Les différents domaines sont repré­ phosphorylation des sérines 497 ou
sentes par des boites de couleurs différentes. La région N-terminale très 499 [22] . Certaines études suggèrent
hydrophobe pourrait permettre une association avec les membranes. La par­ aussi un rôle des tyrosine kinases de
tie N-terminale porte aussi deux domaines SH2 entourant un domaine SH3, la famille Src dans l 'activation de
qui pourraient être des sites d'interaction a vec les deux protéines p 190 et Raf, par phosphorylation des tyrosi­
p62. La région notée CaiB (calciu m binding) est semblable à celle de la phos­ nes 340 et 341 [23] . Le rôle de Ras­
pholipase A2, ce qui pourrait permettre une translocation sous l'effet du cal­ GTP est vraisemblablement de
cium. Le domaine responsable de la stimulation de l'hydrolyse du GTP sur
<< transloquer Raf, ou le complexe
>>
Ras (boite rouge) est situé en C-terminal.
Raf/MEK, du cytosol à la membrane
plasmique. Ce recrutement à proxi­
mité de la membrane pourrait être
plexe Grb2/Sos à proximité de Ras directemen t avec l 'extrémité N­ essentiel à l 'activation de Raf, soit
sous la membrane plasmique. La terminale (domaine régulateur) de par interaction directe de Raf avec
protéine Sos se trouve alors en posi­ la sérine/thréonine kinase Raf certains lipides [ 24] , soit par l'inter­
tion pour promouvoir l'échange (figure 3). Cette interaction a été vention d'une autre protéine asso­
GDP -7 GTP sur Ras. montrée en recherchant des protéi­ ciée à la membrane ( PKC, Src,
On trouve des protéines Ras activées nes capables d'interagir avec Ras par phosphatase ?) .
par mutation dans environ un tiers le système des doubles hybrides ,
<< Dans les fibroblastes, une augmen­
des cancers, ce qui montre l'impor­ chez la levure (m/s n° 2, vol. 1 0, tation de l'AMPc bloque l'activation
tance de ces protéines dans la trans­ p. 206), dans les deux sens : d'une de la MAP kinase par Ras, très vrai­
formation et suggère qu'elles pour­ part, en recherchant des protéines semblab l e m e n t en e m pê c h a n t
raient être activées par d'autres capables d'in teragir avec Ras, on a l 'interaction Ras-Raf [ 25] . Sachant
mécanismes dans les tumeurs où on trouvé Raf [ 1 6, 1 7] et, d'autre part, que la protéine Rap 1 est phosphory­
ne trouve pas de mutations. Il a déjà en recherchant des protéines capa­ lée par la PKA [26] , et interagit
été montré que l'expression d'un bles d'interagir avec Raf, on a avec Raf [ 1 8] , elle apparaît comme
facteur d'échange déréglé peut con­ trouvé Ras [ 1 8] . Différentes muta­ un bon candidat pour inhiber
duire à la transformation [ 1 5] . Des tions dans le domaine effecteur de l'interaction Ras- Raf. Il est possible
réarrangements ou des mutations Ras (en position 32-42) empêchent aussi que la PKA phosphoryle direc­
capables d'activer les protéines Sos l ' i n teraction avec Raf, et l 'on tement Raf, sur la sérine 43, et dimi­
observe une corrélation stricte entre nue son affinité pour Ras-GTP (m/s
la transformation. Le gène hSos1 est
pourraient donc aussi contribuer à
la perte de la capacité d'interagir n° 2, vol. 1 0, p. 235, [27] ) . Au con­
situé sur le chromosome 2 humain avec Raf et la perte du pouvoir traire, dans les cellules Swiss3T3,
(2p 1 6-2p22) et le gène hSos2 sur le transformant. L'affinité du domaine Rap-1 stimule la synthèse de l'ADN,
chromosome 14 ( 1 4q21-14q22) ; ces N-terminal de Raf pour Ras peut sans effet antagoniste sur Ras, et
localisations ne correspondant pas à être estimée à 50-150 nM [ 18, 19] , l'AMPc a un effet mitogène. Cet
des régions fréquemment amplifiées ce qui est meilleur que l'affinité de exemple illustre bien la variabilité
ou réarrangées dans les tumeurs, les NF-1 (0,25 !lM) ou GAP (5 !lM ) , et des effets d'un même second mes­
protéines Sos ne sont donc pas sou­ l 'on peut co-immunoprécipiter Ras sager selon le contexte cellulaire.
vent activées par ce type de réarran­ et Raf [20] . Il est donc clair que La technique des doubles hybrides
gement. Il serait intéressant de Ras-GTP a une bonne affinité pour a permis de montrer aussi une inter­
rechercher une surexpression ou des l 'extrémité N-terminale de Raf. action de Ras-GTP avec l 'extrémité
mutations ponctuelles des protéines Cependant, il reste à comprendre C-terminale du facteur d'échange de

kinase de Raf peut être réglée par


Sos dans certaines tumeurs. comment l'activité sérine/thréonine Rai : RalGDS (Anne Vojtek, commu­
nication personnelle) , ce qui sug­
1 Effecteurs
Ras. L'extrémité C-terminale de Raf
est capable de former un complexe
gère que l'activation de Ras pourrait
aussi contrôler l'activité d'une petite
On appelle effecteur la cible spéci­ stable avec la kinase située immédia­ protéine G apparentée, Rai, et ren­
fique d'une petite protéine G sous tement en aval : MEK, et il semble force la notion de réseau de peti-
<<

forme GTP, partenaire essentiel possible de former un complexe tes protéines G [ 5] . La protéine
>>

pour son activité Ras/Raf/MEK, Ras interagissant avec Raf est très vraisemblablement
le N-terminal de Raf alors que MEK l'effecteur responsable de l'activité
Plusieurs études récentes montrent interagit avec le C-terminal. La phos­ mitogène de Ras ; cependant, dans
que Ras-GTP est capable d'interagir phorylation de la sérine 621 de Raf certains types cellulaires comme les ---•

m/s n° 6-7 vol. 10, juin-juilkl 94 66 1


RÉFÉRENCES ------- cellules nerveuses, Ras n'induit pas récepteurs, elle pourrait alors inter­
la prolifération mais au contraire la agir aussi avec l'un des domaines
25. Burgering B, Pronk G, van Weeren P, SH2 de la p 1 20-GAP.
Chardin P, Bos JL. cAMP antagonizes p2 1
différenciation ; dans ces cellules, les
Ras directed activation of extracellular effecteurs de Ras pourraient donc La chronologie de ftxation des dif­
signal-regulated kinase 2 and phosphoryla­ être différents. férentes protéines à domaines SH2
tion of mSos nucleotide exchange factor. sur un récepteur activé est probable­
EMBO j 1 993 ; 1 2 : 421 1 -20.
1 Protéines GAP ment une donnée essentielle qui
26. Lerosey 1, Pizon V, Tavitian A, de nous manque pour comprendre en
On appelle ,, protéine de type GAP ,,
Gunzburg J. The cAMP-dependant protein détail ces mécanismes. On peut pen­
kinase phosphorylates the Rap 1 protein in toute protéine capable de stimuler ser que la fixation du complexe
vitro as weil as in intact fibroblasts, but not de façon catalyti que l'hydrolyse du Grb2/Sos intervient précocement,
the closely related AP2 protein. Biochem GTP sur une petite protéine G
Biophys Res Commun 1 99 1 ; 1 75 : 430-6.
pour activer Ras, alors que le recru­
L'hydrolyse du GTP par les protéi­ tement de la p1 20-GAP par ses
27. Wu J, Dent P, Jelinek T, Wolfman A, nes Ras isolées est extrêmement domaines SH2 interviendrait seule­
Weber MJ, Sturgill TW. Inhibition of the ment dans une deuxième phase,
repos, Ras se trouve majoritairement
lente ; pourtant, dans une cellule au
EGF-activated MAP kinase signaling path­ avec un effet de la partie N­
way by adenosine 3',5'-monophosphate.
Science 1 993 ; 262 : 1 065-8. sous forme GDP ; il doit donc exis­ terminale pour réarranger le cyto­
ter une protéine capable de stimu­ squelette, peut-être par l'intermé­
28. Kahn A. Les protéines Ras et GAP, des ler l'hydrolyse du GTP sur Ras. Au diaire de la p 1 90 et de Rho [30] , et
relais sur la voie de transmission du signal moins deux protéines de ce type ont un effet de la partie C-terminale
passant par l'activation de tyrosine kinases. pour inactiver Ras. La présence de
médecine/sciences 1 992 ; 8 : 47 1 -5. été découvertes : d ' abord la
p 1 20-GAP [28] , puis la neurofibro­ ces deux activités sur la même pro­
29. Ridley AJ, Self AJ, Kasmi F, Pater­ mine (m/s n° 1, vol. 8, p. 91). téine suggère qu'elles doivent s'exer­
son HF, Hall A, Marshall CJ, Ellis C. Rho La structure de la protéine cer de façon ·coordonnée.
family GTPase activating proteins p l 90, Ber p1 20-GAP est schématisée sur la Une forme plus courte de GAP,
and RhoGAP show distinct specificities in dépourvue de l ' e x trémité N­
vitro and in vivo. bN!BO j 1 993 ; 1 2 : jig;ure 4 ; l 'extrémité N-terminale est
5 1 5 1 -60. très hydrophobe, ce qui pourrait terminale hydrophobe, la p 100-GAP,
permettre une association avec les qui pourrait posséder des propriétés
30. McGladeJ, Brunkhorst B, Anderson D, membranes ; on trouve ensuite deux biologiques diffé re n tes de la
Mbamalu G, Settleman J, Dedhar S, domaines SH2 qui entourent un p 1 20-GAP, est présente en quantité
N-terminal region of GAP regulates cyto­ domaine SH3 (mini-synthèse dans ce
Rozakis-Adcock M, Chen L, Pawson T. The
importante dans les trophoblastes du
skeletal structure and cell adhesion. nN!BO numéro) puis une région d'homolo­ placenta [3 1 ] . Une protéine de dro­
J 1 993 ; 1 2 : 3073-8 1 . gie à la pleckstrine, une région sophile, Gap1 , qui possède une
notée " CaiB semblable à celle de
» région homologue au domaine
3 1 . Zhang Y, Zhang G, Mollat P, Garies C, la phospholipase A2, qui pourrait d'interaction avec Ras de p1 20-GAP,
Riva M , Frobert Y, Malassiné A, Rostène W,
Thang D, Beltchev B, Tavitian A, Thang permettre une translocation mem­
joue un rôle de régulateur négatif
M. Purification, characterization and cel­ branaire sous l'effet du calcium, et, dans la transduction du signal par
lular localization of the 1 00 kD human pla­ à l'extrémité C-terminale, la région le récepteur tyrosine kinase Seven­
centa! GTPase-activating protein. j Biol responsable de la stimulation de less. En dehors de sa région
Chem 1 993 ; 268 : 1 8875-8 1 .
l'hydrolyse du GTP sur Ras. Les " GAP » , la protéine Gap 1 a peu ou
32. Maekawa M , Nakamura S, Hattori S. domaines SH2 de la p 1 20-GAP per­ pas d'homologie avec la p1 20-GAP,
Purification of a novel RasGTPase-activating mettent son interaction avec diffé­ alors qu'il y a une forte homologie
protein from rat brain. J Biol Chem 1 993 ; rents récepteurs tyrosine kinases entre les neurofibromines de droso­
268 : 22948-52. comme celui du PDGF (mini-synthèse phile et de l'homme, sur toute leur
33. Johnson M R, Look AT, DeClue JE,
dans ce numéro) lorsqu'ils sont activés longueur ; on peut donc penser
Valentine MB, Lowy DR. I nactivation of et autophosphorylés, puis sa phos­
qu'il existe une autre protéine
the NF1 gene in human melanoma and phorylation sur tyrosine. humaine fortement apparentée à
neuroblastoma cell !ines without impaired Au moins deux protéines sont asso­ Gap1 de drosophile. Des études bio­
regulation of GTP-Ras. Proc Nat! Acad Sei ciées à la p 1 20-GAP : une p 1 90 pré­ chimiques suggèren t aussi la pré­
USA 1 993 ; 90 : 5539-43.
dominante et une p62 présente en sence chez les mammifères d'une
34. Medema RH, de Vries-Smits AMM , van plus faible quantité. La p1 90, qui troisième protéine capable de stimu­
der Zon GCM, Maassen JA, Bos JL. Ras pourrait être un des substrats impor­ ler l'hydrolyse du GTP sur Ras [32] .
activation by insulin and EGF through tants de Src, possède une activité La neurofibromine, codée par le
enhanced exchange of guanine nucleoti­ gène NF-1, est impliquée dans la
des on p2 1 Ras. Mol Cel! Biol 1 993 ; 1 3 :
GAP pour Rho [ 29] , ce qui suggère
1 55-62. l'existence d'un réseau de petites neurofibromatose de type 1 , une
protéines G [5] . La p62 contient maladie comportant des symptômes
35. Li W, Nishimura R, Kashishian A, Bat­ plusieurs motifs riches en prolines hétérogènes tels que des neurofibro­
zer A, Kim ""JH, Cooper J, Schlessinger J. qui pourraient interagir avec le mes dégénérant fréquemment en
A new function for a phosphotyrosine
phosphatase : linking Grb2/Sos to a recep­
domaine SH3 de la p 1 20-GAP ; for­ neurofibrosarcomes, des taches
tor tyrosine kinase. Mol Cel! Bio/ 1 994 ; 1 4 : tement phosphorylée sur des tyrosi­ " café au lait », et une forte inci­
509- 1 7. nes après stimulation de nombreux dence de phéochromocytomes et de
662 m/s n° 6-7 uol. 1 0, juin-juillet 94
gliomes. la neurofibromine pourrait complexées au GDP (> 90 % de Ras­ tyrosines. Une des tyrosines phos­
interagir avec les microtubules, et GDP) ; la stimulation par des fac­ phorylées est spécifiquement recon­
semble être le principal régulateur teurs de croissance, tels que l'EGF nue par le domaine SH2 de Grb2,
négatif de Ras dans les cellules de ou le PDGF, le NGF, l'insuline, et le complexe Grb2/Sos se retrouve
Schwann, mais pas dans les méla­ l'IL2, l ' IL3 et le GM-CSF, ou la sti­ donc à proximité de Ras sous la
nocytes, ni dans les fibroblastes, où mulation du récepteur des cellules membrane plasmique, ce qui permet
c'est vraisemblablement la p1 20-GAP T, provoquent une augmentation à Sos de promouvoir l'échange GDP
qui est le régulateur négatif de importante de la forme liée au GTP � GTP sur Ras. Ras-GTP permet à
Ras [33] . (entre 20 % et 50 % de Ras-GTP, son tour de transloquer ,, Raf (ou
«

On voit donc la complexité des selon les conditions) . Ces effets de le complexe Raf/MEK ?) sous la
mécanismes permettant le retour de l 'EGF, de l 'insuline, et du PDGF membrane plasmique, où Raf est
Ras à sa forme de repos : au moins sont dus à une stimulation de l'acti­ activé par une autre protéine asso­
deux, peut-être trois, protéines vité du facteur d'échange de Ras ciée à la membrane (PKCa ou Src,
« GAP ,, différentes pourraient être [34] . Une fois activé, Ras va, à son PC-PLC, phosphatase ?) . Après acti­

1
utilisées selon le type de tissu et le tour, provoquer l'activation de la vation, Raf peut phosphoryler MEK,
type de signal. cascade Raf/MAP kinase. Cette voie qui, à son tour, phosphoryle la MAP
de transmission des récepteurs tyro­ kinase. Cette MAP kinase phos­
Rôle des protéines Ras sine kinase au noyau est récapitulée phorylée peut ensuite pénétrer dans
dans la transmission sur la figure 5. le noyau et phosphoryler Elk-1
des signaux mitogènes La fixation d'un facteur de crois­ et/ou Sap-1 , des protéines aussi
sance comme l 'EGF provoque la appelées TCF (ternary complex factors),
Dans les cellules au repos, les pro­ dimérisation de son récepteur et sa qui contrôlent la transcription du
téines Ras sont très majoritairement transphosphorylation sur plusieurs gène cfos, et d'autres gènes activés
très tôt au cours du cycle cellulaire.
La protéine c-Fos forme alors un
complexe avec c:Jun, et ce complexe
est capable de stimuler la transcrip­
Extérieur tion de nombreux gènes impliqués
dans la division cellulaire. La MAP
kinase pourrait aussi contrôler direc­
Cytoplasme tement l'activité de c:Jun, Mye, et
d'autres facteurs de transcription,
par phosphorylation. On peut donc
écrire le schéma suivant : récepteur
tyrosine kinase � Grb2/Sos � Ras
� Raf � MEK � MAP kinase �

Noyau
Elk- 1 , facteurs de transcription.
Ce type de schéma a été retrouvé
dans des cellules humaines et muri-
nes, chez la drosophile pour les
récepteurs Ellipse, Sevenless et
Torso, chez le nématode dans une
voie de différenciation, et chez la
levure pour la cascade de kinases ;
il est donc très vraisemblablement
proche de la réalité. Cependant, il
Activation de pourrait exister de nombreuses
la transcription
variantes : pour certains récepteurs,
Figure 5. Rôle de Ras dans la transmission des signaux mitogènes. La
comme celui de l 'insuline, il existe
fixation du facteur de croissance provoque la phosphorylation de son récep­ un adaptateur supplémentaire entre

Shc (m/s n° 3, vol. 9, p. 334) ; une


teur (tyrosine kinase) sur de nombreux résidus tyrosine. Une des tyrosines le récepteur et Grb2, la protéine
phosphorylées du récepteur activé est spécifiquement reconnue par le
domaine SH2 de Grb2, le complexe Grb2/Sos se retrouve donc à proximité fraction de cette protéine Shc pour-
de Ras sous la membrane plasmique, ce qui permet à Sos de promouvoir rait même ne pas se fixer directe-
l'échange GDP � GTP sur Ras. Ras-GTP permet à son tour de u transloquer >> ment au récepteur mais reconnaî-
Raf sous la membrane plasmique, où une autre kinase comme la PKCa ou trait IRS-1 (insulin reœptor substrate 1),
Src ( ?) pourrait contribuer à l'activer. Après activation, Raf peut phosphory­
ler MEK (MAP kinase kinase), qui à son tour phosphoryle la MAP kinase. principale protéine phosphorylée
Cette MAP kinase phosphorylée peut ensuite pénétrer dans le noyau et phos­ par le récepteur de l'insuline. Shc
phoryler des facteurs de transcription comme Elk (appartenant à la famille porte un domaine SH2 capable de
Ets), Jun ou Mye qui contrôlent l'expression de nombreux gènes impliqués s'associer aux motifs contenant des
dans la division cellulaire. phospho tyrosines de nombreux ---•

m/s n° 6-7 vol. JO, juin-juilkt 94 663


récepteurs activés qui vont, à leur fibroblastes, différenciation pour les
tour, phosphoryler Shc sur plusieurs cellules nerveuses -, il va falloir Summary
tyrosines, l'une d'elles étant recon­ déterminer l'importance respective Ras proteins and mitogenic
nue par le domaine SH2 de Grb2. de ces différents partenaires de Ras, signais transduction
Dans le cas du récepteur du PDGF, selon le type de cellule. Par ailleurs,
Grb2 se fixe sur une tyrosine phos­ il existe trois protéines Ras différen­ Ras proteins are key elements in
phorylée de la protéine tyrosine tes : H-Ras, K-Ras et N-Ras, et, pour growth factors signal �ans�uc­
phosphatase I D (ou SH-PTP2 ou l' instant, on ne comprend pas le tion, from receptor tyrosme kina­
Syp) , qui possède un domaine SH2
p l 20-GAP, neurofibromine, Raf et
rôle spécifique de chacune. ses to the stimulation of imme­
et reconnaît la tyrosine 1 009 du ,
diate early genes transcription.
récepteur du PDGF (mini-synthèse facteurs d'échange ont l'air d'inte­ The major players in this pathway
dans ce numéro). Outre son activité ragir avec les trois, on peut suppo­ have now been identified. The
de tyrosine phosphatase, elle sert ser que la spécificité résidera dans binding of epidermal growth fac­
donc d'adaptateur pour Grb2 [35 ] . la reconnaissance de protéines
<<
tor to its receptor induces the
Dans les lymphocytes T aussi, des d'ancrage ,, différentes, mais l'exis­ dimerization and trans-phospho­
adaptateurs différents pourraient tence de ces protéines est encore rylation of the receptor, provi­
récepteurs. La protéine Shc apparaît
relier le complexe Grb2/Sos aux purement hypothétique. On trouve ding a binding site for Grb2.
plus fréquemment K-Ras muté dans Grb2 forms a complex with the
cependant comme un adaptateur de nombreux types de carcinomes, Ras exchange factors Sos ; thus,
e ssentiel dans de n ombreux sauf ceux des reins ou de la vessie binding of Grb2 to the receptor
systèmes. où c'est plutôt H-Ras qui est activé, at the plasma membrane recruits
Chaque étape de ce schéma semble alors que c'est plus fréquemment N­ Sos in a position where it can
pouvoir être modulée positivement Ras dans les leucémies. Les trois promote GDP --7 GTP exchange
ou négativement. Ainsi, une des gènes Ras semblent être exprimés à on Ras. GTP-bound Ras is then
sérine/thréonine kinases de cette des taux semblables dans ces diffé­
recruting Raf at the plasma mem­
able to activate Raf, probably by
cascade pourrait-elle moduler l'acti­ rents tissus ; on ne comprend donc
vité de la protéine Sos par phos­ pas les raisons physiologiques qui brane where other kinases such
phorylation ; l 'AMPc, en activant la pourraient expliquer ces activations
the activation. Activation of Raf
as PKC or Src may contribute to
préférentielles. L'invalidation de
de Raf alors que la protéine kinase
protéine kinase A, inhibe l'activation
,
chacun de gènes ras par recombi­ triggers a cascade of phosphory­
C a un effet stimulateur [ 1 9] . On naison homologue pourrait apporter lations, leading to MAPkinases
voit donc de nombreuses variations une réponse à ces questions sur le activation and phosphorylation of
cune des trois protéines Ras •
sur un même thème pour cette voie rôle physiologique spécifique de cha­ ternary complex factors such as
de transmission du signal mitogène. Elk-1 or Sap- 1 , controlling cfos
On voit aussi qu'il existe de nom­ transcription. However, the pre­
breux mécanismes de régulation, cise physiological role of GAP
variant d'une cellule à l'autre, qui prote i n s , stimulating GTP
commencent seulement à être hydrolysis on Ras, the way Ras
découverts. proteins are specifically targeted
Remerciements
to the plasma membrane, the
1 Questions en suspens Ces recherches sont conduites dans Je function of Ras in non-dividing
laboratoire de Marc Chabre, avec Didier cells such as neurons, and the
Le schéma d'ensemble paraît donc Cussac, Matthias Frech et Sonia Paris, en physiological specificities of the
élucidé ; il faut maintenant en pré­ collaboration avec Jacques Camonis, et three different H-Ras, K-Ras and
ciser les mécanismes moléculaires. Il avec le soutien de l 'Association pour la N-Ras proteins, are not yet
reste à comprendre précisément Recherche sur le Cancer. understood.
chacune des étapes du cycle de
fonctionnement des protéines Ras,
en particulier le mode de fonction­
nement des facteurs d'échange, le
mécanisme d'activation des effec­
teurs, et comment interviennent les
protéines p l 20-GAP et NF-1 . ous
avons vu aussi qu'il existe au moins
trois protéines << facteurs d'échange ,,
et deux protéines à activité GAP,
chacune ayant plusieurs isoformes ;
il existe aussi vraisemblablement
d'autres effecteurs que Raf. Pour
expliquer les effets très différents de
Ras - prolifération dans le cas des
664 m/s n° 6-7 vol. 10, juin-juillet 94

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