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Évaluer les coûts des crises pour piloter la résilience : les

apports de la comptabilité analytique dans le cas des


services publics d’eau potable
Angélique Chéritat, Caty Werey
Dans ACCRA 2020/1 (N° 7), pages 11 à 33
Éditions Association Francophone de Comptabilité
ISSN En cours
DOI 10.3917/accra.007.0011
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DOI : 10.3917/accra.007.0011

Évaluer les coûts des crises


pour piloter la résilience :
les apports de la comptabilité
analytique dans le cas des services
publics d’eau potable
Assessing crisis costs to steer resilience:
the contribution of cost accounting
in the case of public water utilities
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Angélique Chéritat
Irstea, UMR GESTE, Engees Strasbourg
Caty Werey
Irstea, UMR GESTE, Engees Strasbourg

RÉSUMÉ – Reposant en bonne partie sur une démarche inductive, cet article fait émer-
ger, à partir de l’évaluation des coûts de cas de crises réelles et en se basant sur des
méthodes de comptabilité analytique, un nouveau modèle d’évaluation pour la prise en
compte des coûts liés aux crises dans le processus de résilience des services publics d’eau
potable. Ce modèle est ensuite utilisé pour l’évaluation des coûts de résilience de scénarios
hypothétiques en cas de phénomènes exceptionnels. Cet article, qui est un plaidoyer pour
la prise en compte des coûts liés aux crises dans le système de gestion de l’eau potable,
questionne en même temps la place de la comptabilité analytique dans les services publics.
MOTS CLÉS – coûts, comptabilité analytique, gestion de crise, résilience, services
d’eau potable
ABSTRACT – Based in part on an inductive methodology, this paper presents a
new model based on crisis costs valuation through cost accounting in order to take into
account crisis costs within the resilience process. This model is then applied for resilience
costs valuation on hypothetical scenarios in case of exceptional events. The paper shows
the interests of taking into account both crisis and resilience costs to improve resilience.
The article promotes the consideration of crisis costs valuation within the water man-
agement system and stresses out in the same time the question of the place of cost
accounting in public utilities.
KEYWORDS – costs, cost accounting, crisis management, resilience, water utilities

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Évaluer les coûts des crises pour piloter la résilience

Remerciements
Cette recherche a été réalisée dans le cadre du projet franco-allemand
ResiWater « Innovative Secure Sensor Networks and Model-based
Assessment Tools for Increased Resilience of Water Infrastructures »
financé par l’Agence Française de la Recherche (ANR ; projet : ANR-14-
PICS-0003) et le Bundesministerium für Bildung und Forschung (BMBF ;
projet : BMBF-13N13690). Nous remercions particulièrement les ser-
vices d’eau partenaires du projet qui ont permis la réalisation de cette
étude. Nous remercions également pour leurs conseils et leurs relec-
tures Marie Tsanga-Tabi, Irstea ; Dominique Verdon, ancien contrôleur
de gestion en collectivité et Pascal Fabre, Université de Franche-Comté.
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Introduction
Les gestionnaires des services publics ont en commun les objec-
tifs primordiaux de continuité, d’égalité, de qualité du service et sous
l’impulsion récente de la commission européenne, de la sécurité des
populations (Boual 2007). Mais ces objectifs pourraient être remis en
cause dans la mesure où les services sont de plus en plus vulnérables.
Ils sont en effet de plus en plus exposés – ou pourraient l’être – à des
évènements extrêmes, des « crises », comme des catastrophes natu-
relles (inondations, pluies torrentielles, incendies de forêt, ouragans,
tremblements de terre…), ou des actes terroristes (explosions, conta-
minations, cyberattaques…).
Au vu des risques grandissants, la gestion de crise a pris une place
primordiale dans le management des services publics, qui s’intéresse
de plus en plus à la notion de résilience. En tant qu’infrastructure cri-
tique, un service d’eau potable se doit d’élaborer une stratégie de
prévention contre les crises, ou au pire, une stratégie de contourne-
ment. Cela entraîne des coûts spécifiques, et l’on pourrait se demander
jusqu’à quel point un service peut investir ou modifier ses pratiques
d’exploitation pour être résilient ? Y-a-t‘il davantage de gains (enten-
dus ici comme des coûts évités ou réduits) que de coûts en retour de
ces investissements ? Comment – c’est-à-dire par quelles méthodes de
gestion – un service peut-il évaluer ses coûts de résilience ? Qu’apporte
cette évaluation à la résilience du service ? Quel pourrait être l’impact

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– si impact il y a – sur l’usager ? Nous nous proposons dans cet article
de répondre à ces questions en ne traitant que les coûts internes et
pas les coûts externes qui évaluent notamment les externalités pour les
consommateurs. Nous nous interrogeons également sur l’apport de la
comptabilité analytique à l’évaluation de la résilience.
Notre article montre, au travers de cas de crise réels et hypothé-
tiques, que l’amélioration de la résilience au niveau des services d’eau
potable peut être suivie ou pilotée par une gestion appropriée des
coûts de résilience grâce à l’utilisation de la comptabilité analytique.
Il propose la construction d’un cadre analytique et méthodologique
pour évaluer les coûts de résilience à partir de l’analyse de crises réelles
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investiguées sur trois services d’eau potable français et allemands.
Ces analyses de terrain ont été effectuées dans le cadre du projet de
recherche franco-allemand ANR-BMBF « ResiWater1 » (2015-2018).
Nous démontrerons ensuite à travers l’analyse d’un cas de crise hypo-
thétique dans des scénarios de résilience évolutifs, que la gestion des
coûts de crise par des outils analytiques permet de piloter le processus
décisionnel à toutes les étapes de la résilience, et donc in fine d’amélio-
rer la résilience et la qualité du service.

1.  M
 éthodologie : évaluation des coûts
de résilience
1.1.  Présentation de la méthodologie
Notre évaluation se base sur l‘étude de six cas de crises réelles inter-
venues dans trois services d’eau potable français et allemands. Ceci a
été réalisé dans le cadre du projet ResiWater, qui a pour objectif de
proposer aux services d’eau potable participant au projet des solutions
d’aide à la décision à partir de dimensions hydrauliques, métrologiques,
économiques et gestionnaires, pour leur permettre d’améliorer leur
résilience. Dans le but de trouver des solutions à leurs questionnements
sur l’évaluation des coûts d’une crise, différentes étapes ont caractérisé

1.  ResiWater “Innovative Secure Sensor Networks and Model-based Assessment Tools for
Increased Resilience of Water Infrastructures”(www.resiwater.eu). Ce projet envisage 3 crises
graves : un effondrement majeur du réseau, une contamination, des effets cascades sur le
réseau d’eau potable suite à une rupture énergétique ou cyberattaque.

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Évaluer les coûts des crises pour piloter la résilience

notre démarche de collecte de données, passant bien sûr par l’étude


délicate des stratégies de crise retranscrites dans les plans de gestion
de crise internes aux services, et par des interviews des personnels
ayant vécus les crises. Les crises en question sont ici des crises dont
l’apparition a une probabilité plus élevée que des crises aux répercus-
sions beaucoup plus graves, comme des actes terroristes par exemple.
Nous avons ainsi analysé tour à tour des cas de rupture de conduite
paralysant les axes routiers et transports en commun, mais aussi des
cas de pollutions (chimiques) ou de contaminations (bactériologiques).
Chaque cas de crise étudié a permis ainsi de faire dégager les princi-
pales étapes liées au management de ces crises, ou devrait-on plutôt
dire de la résilience du système. Chaque service nous a donné le détail
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des réactions, des solutions en termes matérielles et humaines qui ont
été mises en place, mobilisant parfois jusqu’au niveau régional, et sur-
tout les mesures prises ou décidées post-crise lors des débriefings, à
chaud d’abord, puis à froid. Ils nous ont informés sur l’apprentissage
issu des leçons tirées des crises vécues, et sur la réactivité améliorée
dont ils feraient preuve aujourd’hui dans la même situation.
Notre démarche empirique s’est articulée autour de 6 étapes princi-
pales, explicitées dans cet encadré.

(1)- Identification des six cas de crises


(2)- Entretiens avec les services d’eau potable
(3)- Collecte des données et compréhension du système d’information
(4)- Choix de la méthode d’évaluation des coûts adaptée
(5)- Calcul des coûts de résilience
(6)- Construction du modèle générique d’évaluation des coûts de résilience

1.2.  La résilience : un concept en émergence


La notion de résilience commence à émerger dans les politiques
publiques. L’ONU, pour la réduction des risques de catastrophes
(UNISDR), s’appuie sur la notion de BBB « Build Better Back » (UNISDR,
2017). Dans cet article nous définissons la résilience comme l’ensemble
des moyens mis œuvre pour éviter les crises d’une part, et pour y
faire face d’autre part, dans une démarche d’amélioration continue et
d’adaptabilité (Bruneau et al. 2003, Lapébie et al. 2015). En ce sens, elle

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Angélique Chéritat, Caty Werey

intègre pleinement la gestion de crise qui correspond à la gestion dans


l’urgence et au retour à la normale (Bout 2005). La résilience évoque
aussi l’idée de « bounce forward » introduite par Toubin (2012), selon
laquelle le service peut aller au-delà d’un simple retour à la normale, en
améliorant certains dispositifs par exemple.

1.3.  Du management de crise à la résilience


Nos investigations nous ont menés à nous interroger sur la façon
dont les crises se déroulent, et s’il existait dans la littérature un clas-
sement des activités ou des tâches du processus de résilience. Cette
littérature est riche de multiples études traitant de la classification des
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différentes activités liées au management des crises. Une des plus
importantes, celle de Pearson et Mitroff (1993), classe ces activités en
5 phases : la détection du signal, la prévention/préparation, l’endigue-
ment/limitation des dégâts, le retour à la normale ou « recovery »,
et enfin l’apprentissage (Elsubbaugh et al. 2004). Cette classification,
bien que se rapprochant de notre définition de la résilience en tenant
compte de l’effet d’apprentissage, paraît moins évidente lorsqu’il s’agit
d’attribuer des coûts à ces différentes phases, notamment pour ce qui
concerne la phase « détection du signal ».
Nous nous proposons de retenir quatre étapes de résilience : préven-
tion, urgence, rétablissement et post-crise, regroupées sur une échelle
de temps comme le montre la figure 1 (Werey et al. 2017 ; Chéritat
2016).

Figure 1 : L’échelle de temps des 4 phases de la résilience

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Évaluer les coûts des crises pour piloter la résilience

Cette échelle de temps a été créée de façon à montrer à la fois


l’échelonnement dans le temps des différentes phases de résilience,
mais aussi le processus dynamique qui fait que chaque décision de
management prise pendant le cycle peut entraîner un changement
marquant sur ces étapes. Cette idée fait écho au principe du « lear-
ning effect » introduit par Weick et Sutcliff (2003) pour caractériser les
Organisations à Haute Fiabilité (Weick et al. 2003), souvent reliées aux
services de l’État (services publics, armée, entre autres).
Les coûts associés à la phase de prévention ont été évalués comme
l’ensemble des activités annuelles de préparation et d’investissement
réalisées dans le but de minimiser l’apparition d’une crise et d’organiser
l’urgence. Les coûts de la phase d’urgence identifient l’ensemble des
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activités menées dans l’urgence pendant la crise. Les coûts de la phase
de rétablissement rassemblent les activités réalisées dans un souci de
retour rapide à une gestion normale de l’activité. Enfin, les coûts post-
crise correspondent aux activités réalisées après crise (débriefing, retour
d’expérience, mise à jour du plan de gestion de crise, retards dans
l’activité normale du service due à la pleine participation du personnel
pendant la crise…). La phase post-crise renvoie justement à cet effet
d’apprentissage décrit plus haut : en cas de nouvelle crise, on peut
s’attendre à une amélioration de la résilience, visible sur l’ensemble des
étapes et à une baisse générale des coûts liés à une meilleure réactivité
et à des outils d’alerte et de prévention plus précis.
Cette classification des coûts de résilience permet de les rendre plus
visibles et donc mesurables. Les étapes de la résilience sont donc ici
représentées en tant qu’objets de coûts, chacune déclenchant l’utilisa-
tion de ressources au moment où elle se produit.

1.4.  D
 éterminer les méthodes d’évaluation des coûts
de résilience
Chaque service d’eau potable, fonctionnant en régie ou en déléga-
tion de service, possède un système de gestion spécifique. Le tableau 1
donne les deux types de répertoires que nous avons pu rencontrer sur
les trois services d’eau engagés dans le projet ResiWater. Les auteurs ont
volontairement choisi de présenter les choses sous la forme d’idéaux
types, à la fois pour montrer la valeur pédagogique de ce tableau, mais
aussi dans un souci de simplification pour la compréhension.

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Tableau 1 : Mise en perspective des différences d’accès aux données


selon les systèmes d’information rencontrés

Service public d’eau potable avec peu d’outils Service public d’eau potable avec outils
d’évaluation de coûts d’évaluation de coûts
Système de gestion des informations Décentralisé Centralisé (ERP et/ou GMAO)
Pas la priorité MAIS on souhaite optimiser les Utile pour les managers, mais pas pour tous les
Vision de la Gestion des coûts
coûts liés au patrimoine opérationnels
Comptabilité analytique inspirée des sections
Développement en interne
homogènes ou de l’ABC, calcul d’écarts,
Outils Coûts complets (prestation externes, assurance,
tableaux de bord, coût marginal sur la
justification du prix de vente de l’eau en gros)
production
Utilité parfois non ressentie par les
Système interne peu utile et peu fiable/ analyse
opérationnels/ Comptabilité analytique utilisée
Utilisation des coûts utilisée pour des cas isolés avec des

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sur l’ensemble du service d’eau top down
méthodes hétérogènes
mais manque de communication
Centralisation des données et classement selon
Gestion des données Dispersion des données
une nomenclature prédéfinie
Utilisation des données Pas de remontées vers la direction Gestion avec la direction
Synthétisation : décryptage, recherche des
Morcèlement : reconstitution /définition de détails pour reconstituer le coût complet /
Collecte des données
coûts inexistants définition de coûts inexistants
Saisie des données au plus près du terrain
Gestion du réseau : Ruptures de Gestion du réseau : contamination, ruptures de
conduite/données plus facilement retrouvées conduite/données facilement retrouvées
Types de données vs type de crise (lien avec la gestion patrimoniale) Gestion de la production : pollution
Contamination réseau et pollution usine : usine/données noyées dans les charges
données estimées indirectes
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Évaluer les coûts des crises pour piloter la résilience

Ce tableau montre que pour évaluer les coûts de résilience, il n’est


pas forcément nécessaire d’avoir une comptabilité analytique très déve-
loppée (cf. dernière ligne du tableau), et que quelques outils de gestion
peuvent parfois suffire, notamment l’analyse des coûts en coûts com-
plets, qui montre un certain ancrage de la comptabilité analytique dans
le service. Il est évidemment plus facile pour un service qui a déjà une
comptabilité analytique, comme cela commence à être de plus en plus
le cas dans les services d’eau potable (Tsanga et al. 2006), d’évaluer des
coûts particuliers.

Tableau 2 : Principales méthodes de comptabilité


analytique investiguées
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Application(s) Applicabilité pour
Références bibliographiques METHODES rencontrée(s)/potentielles(s) secteur de l’évaluation des coûts liés
l’eau potable aux crises
Méthodes classiques
Dubrulle et al. (1987); Isolée : prestations externes, prix de l’eau,
Oui
Seal et al. (2012) Coût complet dossier d’assurance
CVd, CVi, CFd, CFi*
Sur l’ensemble du service
Dubrulle et al. (1987);
Coûts variables ou direct Isolée Oui
Seal et al. (2012)
costing Sur l’ensemble du service CVd, CVi*
Raulet et al. (1991);
Coûts spécifiques ou direct Isolée Oui
Seal et al. (2012)
costing adapté Sur l’ensemble du service CVd, CVi, CFd*
Isolée Pour évaluer les écarts
Dopuch et al. (1967) Coût standard
Sur l’ensemble du service seulement
Dubrulle et al. (1987); Oui
Seal et al. (2012); Sections homogènes Sur l’ensemble du service Découpage en fonction de
Hansen et al., (2006) l’organigramme du service
Isolée : ex. coûts marginaux de production
oui coût marginal de
dans un objectif de gestion stratégique si
Kloock et al. (1997) Coût marginal production en cas d’arrêt
le service dispose de plusieurs centres de
d’une usine
production
Méthodes de management
ABC et dérivées
Wegman (2006); Sur l’ensemble du service
Activity Based Costing (ABC) Oui
Seal et al. (2012) Puis possibilité d’étude sur un cas isolé
Wegman (2006); Activity Based Management
(1) (2)
Seal et al. (2012) (ABM)
Activity Based Budgeting
Antos et al. (1999) (1) (2)
(ABB)
Perrin (1962); UVA (Unités de Valeur
(1) (2)
Buffet et al. (2005) Ajoutée)
Oui
Savall et al. (1992);
Possibilité d’application selon les auteurs Prise en compte des
Krishnan (2006) ; Giakatis et al. Coûts cachés
mais non rencontrée dysfonctionnements
(2001); Cockins (2006)
internes et externes
Autres outils
Hilton et al. (2012); Oui
Possibilité d’application selon les auteurs
Krishnan (2006); Coûts de qualité Traduit la mise en œuvre
mais non rencontrée
Sailaja et al. (2015) de la démarche qualité
*CVd : charges variables directes, CVi : charges variables indirectes, CFd : charges fixes directes, CFi : charges
fixes indirectes
(1)- Il n’y a pas d’application possible sur ce type de secteur
(2)- Par extension, si l’application n’est pas possible sur le secteur, elle l’est encore moins pour évaluer les coûts
de résilience

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Angélique Chéritat, Caty Werey

Nous avons ensuite mené une revue de littérature qui offre de très
larges perspectives. Le tableau 2 présenté ici donne les principales
méthodes de comptabilité analytique et outils d’analyse de coûts. Il
informe le lecteur de l’application existante et de l’applicabilité poten-
tielle de l’outil au sein d’un service public d’eau potable pour l’évalua-
tion des coûts de résilience.
En vue d’élaborer notre modèle d’évaluation de coûts de résilience,
deux de ces méthodes ont retenu notre attention : la méthode des sec-
tions homogènes couplée à l’approche en coûts complets, méthodes
utilisées dans les trois services d’eau, comme nous l’avons vu, et la
méthode des coûts cachés.
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1.4.1.  L’intérêt de l’approche en coûts complets
La question de prendre en compte l’ensemble des charges relatives
à l’objet de coût est une question de fond. L’approche par les coûts
complets pose la question importante de l’imputation des charges
indirectes. Dans le secteur de l’eau, leur prise en compte s’effectue
à partir du budget annexe « eau potable »2 et doit pouvoir se justi-
fier d’un point de vue pratique – par exemple pour établir les dossiers
d’indemnisations, facturer des prestations à des tiers ou justifier du prix
de l’eau… – et théorique – la quantité de charges indirectes prise en
compte doit être suffisamment importante – (Bouquin 2008).
En cas de crise, d’autres services, internes ou externes à la collecti-
vité, comme celui de la voirie ou de l’entretien des espaces publics sont
souvent sollicités. Ceci implique que la prise en compte des centres
auxiliaires et donc des charges indirectes, a un intérêt pour évaluer les
coûts de résilience.

1.4.2.  L’intérêt de la méthode des sections homogènes


L’emploi de l’approche en coûts complets, qui prend en compte les
charges directes et indirectes, les charges fixes et variables, implique de
déterminer la méthode permettant de ventiler les charges indirectes
sur les objets de coûts définis.

2.  Le service de l’eau potable étant un SPIC (Service Industriel et Commercial) il dispose
d’un budget annexe, financé par la facture d’eau, indépendant du budget général de la
collectivité financé notamment par les impôts.

ACCRA – 2020/1 – n° 7, janvier 2020 19


Évaluer les coûts des crises pour piloter la résilience

La méthode des sections homogènes est une méthode de ven-


tilation des charges indirectes, au même titre que la méthode des
centres d’analyse et que la méthode ABC (« Activity Based Costing »).
Elle implique de définir les sections principales sur lesquelles seront
ventilées les charges indirectes, regroupées en sections auxiliaires.
L’homogénéité des sections principales sera obtenue lorsque cette
répartition sera effectuée par le biais de l’emploi d’une unité d’œuvre
appelée aussi clé de répartition. Ce principe répond à une logique de
définition d’objectifs propres à chacune des sections, pour la plupart
calquées sur la structure de l’organigramme du service.
La méthode des sections homogènes est adaptée à notre problé-
matique de ventilation, bien que la littérature préconise l’emploi de la
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méthode ABC pour l’évaluation de coûts isolés et particuliers (Letza
Ken Gadd 1994). Nous avons choisi d’appliquer la méthode des sec-
tions homogènes, considérant que celle-ci est moins complexe à mettre
en œuvre et qu’elle simplifie largement le choix de l’inducteur de coût
(Özkan et al. 2013). De plus, nous avons pu constater que l’approche
retenue permettait aussi d’évaluer des coûts de façon isolée, sans qu’il
soit nécessaire au préalable de disposer d’une comptabilité analytique
au niveau du service.

1.4.3.  L’intérêt de la méthode des coûts cachés


Certains coûts ne sont pas identifiables dans la comptabilité géné-
rale, comme des retards dans le travail du personnel du service d’eau
étudié, dus à sa participation exclusive à la gestion de la crise, des pertes
de temps pendant la gestion de crise, dues à des équipements non
fonctionnels sur le réseau d’eau, ou encore dues à des défauts organi-
sationnels (pas de planning clair prévu pour le personnel) notamment.
Nous nous sommes donc tournées vers une méthode un peu moins
connue des entreprises et des services publics, qui est celle des coûts
cachés. Mise en avant par Savall et Zardet (1992), les coûts cachés sont
des coûts invisibles dans la comptabilité. Il s’agit souvent de coûts liés à
des défauts de qualité, ou à des défauts organisationnels ou de produc-
tivité. La méthodologie proposée est cependant plutôt inadaptée au
secteur public. Une entreprise du secteur public doit en effet respecter
selon la norme comptable M49, l’équilibre du budget entre dépenses
et recettes (Bourdin, 1998). Les auteurs l’ont donc adaptée en tenant

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Angélique Chéritat, Caty Werey

compte des taux horaires de main-d’œuvre majorés des heures supplé-


mentaires lorsqu’il s’agissait de déterminer des coûts liés à des retards
ou à des pertes de temps. S’agissant des pertes d’eau, leur valorisation
a été effectuée en tenant compte des m3 d’eau perdue sur l’ensemble
du réseau sur une année, et ramenés à la période de la crise étudiée.
C’est finalement la combinaison de ces 2 méthodes (sections homo-
gènes et coûts cachés) couplée à l’approche en coût complet qui a été
retenue pour l’évaluation des coûts de résilience.

1.5.  Application sur un cas de rupture de conduite


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Figure 2 : Explicitation méthodologique de l’évaluation
des coûts de la phase de rétablissement dans le cas
de la rupture de conduite du service A

ACCRA – 2020/1 – n° 7, janvier 2020 21


Évaluer les coûts des crises pour piloter la résilience

Nous présentons en figure 2 l’évaluation des coûts de résilience sur


un cas, celui d’une rupture de conduite qui a concerné l’un des services,
que nous nommerons le service A. Ce cas implique différents postes
de charges, cependant aisément identifiables dans la comptabilité, ce
qui en fait un cas intéressant pour notre analyse. Le tableau 1 présente
le cadre de calcul du coût complet. Il est réalisé à partir des quantités
et des coûts de matériels, et des temps et des coûts de main-d’œuvre
(tableau 2 et 3) pour les charges directes tout en tenant compte de la
quote-part de charges indirectes annuelles, grâce à la clé de réparti-
tion, ici surlignée en jaune (tableau 4). Les pertes d’eau chiffrées en
m3 sont évaluées ici par la méthode des coûts cachés. L’évaluation de
coût présentée concerne dans l’exemple la phase de rétablissement de
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la résilience. Dans un souci de présentation nous ne détaillerons pas
l’ensemble des coûts évalués pour cette application. Nous considérons
que cet exemple suffit à la compréhension de la méthodologie adop-
tée par les auteurs.

1.6.  M
 odèle générique d’évaluation des coûts internes
de résilience
L’application des méthodes de comptabilité analytique retenues et
les échanges avec les services d’eau sur les différents cas de crise ont
permis de faire émerger un modèle générique de mesure de la rési-
lience, présenté dans le tableau 3. Ce tableau dresse l’ensemble des
éléments de coûts à prendre en compte pour évaluer les coûts de rési-
lience sur les différents centres de coûts. Il donne notamment le type
de méthode qu’il est conseillé d’utiliser, en se rapportant au fonction-
nement actuel des services publics d’eau potable.
Sans pour autant donner un format de calcul type à utiliser, la
méthodologie proposée dans ce tableau se veut d’utilisation plus géné-
rale et plus flexible, ce qui lui permet d’être adaptable à tout type d’or-
ganisation et à tout type de crise.
Ce modèle d’évaluation qui est un outil à utiliser de façon ciblée et
ponctuelle, c’est-à-dire après chaque cas de crise, compte tenu de son
caractère exceptionnel, et suppose ainsi et en particulier dans les ser-
vices publics, l’évaluation ponctuelle de certains coûts qui ne sont pas
mesurés par ailleurs (Fabre et al., 2014).

22 ACCRA – 2020/1 – n° 7, janvier 2020


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Tableau 3 : Modèle générique d’évaluation des coûts internes de résilience

Centres de coûts
PREVENTION URGENCE RETABLISSEMENT POST-CRISE
Caractéristiques
-Estimations d’après
-Inventaire technique -Inventaire technique (si
interview sauf si
-Interview outils préventifs
montage dossier
-Estimation des -Coûts complets développés en post-
d’assurance
montants -Travail de décomposition crise)
Méthodes utilisées -Travail de
-Juste valeur des coûts globaux complets -Interview
décomposition des
-Coûts complets pour -Estimation des
coûts totaux complets
évaluation des coûts de montants
-Coûts complets
fonctionnement -Coûts cachés
-Coûts cachés
-Coûts de fonctionnement et -Principalement coûts de
-Investissement
pertes d’eau (parfois coûts fonctionnement
(amortissement)
-Coûts de reportés dans un programme (débriefing, mises à jour

ACCRA – 2020/1 – n° 7, janvier 2020


-Coûts de
Type de données fonctionnement d’investissement si trop plan d’urgence…)
fonctionnement
et pertes d’eau important) -Investissement
(préparation,
-Externalisation de certains (amortissement) si
maintenance)
types de travaux réalisés en post-crise
-Coûts de
-Amortissements : -Temps de main
fonctionnement :
estimations ou montant d’œuvre, de matériel,
estimations quantité,
du budget annexe nombre d’agents)
-Temps de main d’œuvre, de temps d’agents, tarifs,
-Coûts de -Données compte
matériel, nombre d’agents) taux horaires…
fonctionnement : administratif, tarifs,
-Données compte -Amortissements :
estimations quantité, taux horaires, bilans
administratif, tarifs, taux estimations ou valeur du
temps d’agents, tarifs, techniques et
Composantes des coûts horaires … budget annexe
taux horaires… économiques des
-Charges indirectes : fuel, -Charges indirectes :
-Charges indirectes : réseaux d’eau …
dotations amortissement fuel, dotations
fuel, dotations -Charges indirectes :
véhicules, matériel divers… amortissement
amortissement, fuel, dotations
pour véhicules, matériel
véhicules, fournitures, amortissement
divers…
matériel divers… véhicules, fournitures,
Angélique Chéritat, Caty Werey

matériel divers…

23
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Évaluer les coûts des crises pour piloter la résilience

Nous verrons dans la suite de l’article, l’application de ce modèle


issue de notre démarche de recherche inductive pour un cas de crise
simulé au niveau d’un service : la cyberattaque.

2.  M
 ise en perspective des coûts de résilience
dans des scénarios de crise évolutifs
2.1.  Description des scénarios

En partenariat avec l’une des trois collectivités engagées dans le


projet ResiWater, nous avons étudié un cas d’attaque intentionnelle
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pour un service d’eau : une cyberattaque combinée avec un acte de
malveillance avec un effet cascade. L’étude de ce cas hypothétique et
simulé a permis au service de se poser des questions sur les ressources
matérielles et humaines à mettre en œuvre, sur les investissements à
réaliser, ainsi que sur sa capacité à gérer la crise aujourd’hui et dans
un futur plus ou moins proche.
Le scénario de cyberattaque comprend un acte intentionnel sur
le réseau de commande et sur le réseau informatique. La transmis-
sion d’information est faussée par cette attaque qui donne des infor-
mations différentes de la réalité. Ainsi, la centrale de surveillance ne
distingue aucun signe de dysfonctionnement. Des coupures d’eau
et des baisses de pression se répètent et de plus en plus d’appels
parviennent au service qui ne voit pas tout de suite d’où vient le
problème et privilégie une recherche de fuite. Ce n’est que bien plus
tard que le service suspectera une anomalie au niveau d’un organe
de régulation.
Le manque d’expérience de ce genre de crise est avant tout la cause
de ce déroulement ; une semaine est nécessaire pour que cette crise
soit totalement entérinée. Ceci est la description du scénario dit de
référence, celui qui se rapporte à la situation d’aujourd’hui.
Le service a imaginé en lien avec notre travail, deux scénarios de
résilience améliorée, dans lesquels les outils investis ou développés
dans le projet permettent de réduire le temps de réaction et de retour
à la normale, et par là même les coûts d’urgence et de rétablissement.

24 ACCRA – 2020/1 – n° 7, janvier 2020


Angélique Chéritat, Caty Werey

Ils permettent également de réduire les coûts cachés associés qui eux
correspondent aux retards de temps sur le service, à la fois pendant et
après la crise (phase post-crise), et à des pertes (volume non distribué
qui impliquera le cas échéant des ristournes sur la facture d’eau).
Le premier scénario, appelé « R+ », s’appuie sur la mise en œuvre
de nouveaux outils développés dans le projet ResiWater, comme l’amé-
lioration des modèles de simulation hydraulique, l’optimisation du pla-
cement des capteurs, entre autres.
Le second nommé « R++ » va plus loin, et mobilise les capacités
des employés et des usagers. Afin d’améliorer la supervision et de
détecter plus rapidement une cyberattaque, il s’appuie respectivement
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sur des actions de formation et d’exercices de gestion de crise, sur
des actions de communication, des embauches. Il apporte aussi un
outil spécifique de détection des entrées informatiques malveillantes
et frauduleuses.

2.2.  Évaluation et comparaison des scénarios


L’évaluation des coûts de résilience sur ces trois scénarios a permis
d’en dégager les coûts et les gains en termes de résilience pour la col-
lectivité et de qualité de service par rapport au scénario de référence.
Cette évaluation s’est basée sur le modèle générique présenté à la fin
de la première partie de cet article. L’exercice a été d’autant plus facile
que nous l’avions déjà réalisé sur des cas de crise passée, comme pré-
senté en début d’article.
Le tableau 4 donne l’ensemble des coûts de résilience calculés sur
l’année de crise pour le scénario de référence appelé SQ (pour Statu
Quo) et R+. Nous avons réalisé la même analyse pour R++. Le tableau
est complété par l’histogramme de la figure 3, représentant tous les
scénarios et permettant de mieux voir l’évolution des coûts de rési-
lience sur l’année où a lieu l’attaque. Nous partons du principe que
R+ et R++ se déroulent à la suite de SQ, l’évolution est ainsi bien mar-
quée. Entre le scénario SQ et R++, on passe d’une durée effective de
crise d’1 semaine à quelques heures.

ACCRA – 2020/1 – n° 7, janvier 2020 25


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26
Tableau 4 : Identification des gains et surcoûts pour R+

Phase résilience Type de dépense SQ R+ R+ vs SQ Résultat global


Investissement 90 440 € 105 440 € 15 000 €
Prévention Surcoût
Fonctionnement 1 000 € 37 785 € 36 785 €
Pertes eau 2 933 € 2 200 € -733 €
Temps détection 400 € 358 € -42 €
Urgence Gain
Restriction d'usage de l'eau 520 547 € 318 247 € -202 300 €
Total fonctionnement 523 880 € 320 805 € -203 075 €
Rétablissement Fonctionnement 5 245 € 5 245 € 0€
Post-crise Fonctionnement 3 770 € 4 692 € 922 € Surcoût
Total investissement 90 440 € 105 440 € 15 000 € Surcoût
Évaluer les coûts des crises pour piloter la résilience

Total fonctionnement 533 895 € 368 527 € -165 368 € Gain


Gain/Surcoût -150 368 € GAIN

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Angélique Chéritat, Caty Werey

Le graphique ci-dessous montre que les mesures mises en place au


fur et à mesure permettent de faire baisser les coûts de fonctionne-
ment, davantage que n’augmentent les frais de prévention (les investis-
sements), ce qui nous fait conclure à un bénéfice global pour le service,
et par répercussion, pour les usagers.

Figure 3 : Synthèse des coûts annuels de résilience


pour les 3 scénarios durant l’année de la crise
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2.3.  Résultats et discussions
2.3.1.  Présentation des principaux résultats
Améliorer la gestion de crise et la résilience par une meilleure
gestion des ressources consommées
L’utilisation de la comptabilité analytique dans ce modèle s’avère
novatrice et est d’une grande utilité lorsqu’il s’agit de déterminer la
quantité de ressources matérielles ou humaines à employer pour l´ap-
plication des procédures de gestion de crise, définies dans le « plan
d’urgence », pour un manager qui n’a pas forcément les connaissances
de l’état du terrain ou qui ne dispose pas d’un système de gestion des
informations efficace (Excel, ERP et/ou GMAO3).
3.  Gestion de la Maintenance Assistée par Ordinateur.

ACCRA – 2020/1 – n° 7, janvier 2020 27


Évaluer les coûts des crises pour piloter la résilience

Les auteurs ont pu constater, à travers leurs études de terrain, qu’une


crise pouvait prendre plus d’ampleur si elle était mal gérée à l’amont,
c’est-à-dire, si la quantité de ressources, la disponibilité des ressources,
la vérification du matériel et les plannings de main-d’œuvre n’étaient
pas correctement préparés. En témoignent les différents coûts liés aux
pertes de temps, aux pertes d’eau, aux retards pris par les agents de
terrain lors de la reprise de leur travail quotidien. Nous avons constaté
que les coûts cachés liés à ces pertes de temps et à ces retards, pou-
vaient aller jusqu’à représenter 35 % du coût total de la phase d’ur-
gence d’un cas de rupture de conduite (voir le 2.2). Par ailleurs, pour
le cas hypothétique de la cyberattaque étudié ici, les auteurs ont cal-
culé que la part des coûts cachés pouvait représenter jusqu’à 40 %
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du montant total des coûts liés à ce cas de crise, mais que cette part
tendait à diminuer avec la hausse des outils préventifs (préparation et
outils) pour retomber à 15 % dans le scénario de résilience le plus amé-
lioré. Plus la crise est mal gérée à l’amont, plus les coûts des phases de
gestion de crise et de la post-crise seront importants, et plus faible sera
la résilience. En revanche nos résultats montrent que plus la crise est
gérée à l’amont, moins les coûts d’urgence et de rétablissement sont
élevés, moins on constate de défauts organisationnels ou de pertes
de temps, et donc plus la résilience s’améliore (moins d’impacts sur le
service et les usagers).
Améliorer la gestion de crise et de la résilience par une
meilleure gestion des investissements
En dressant l’inventaire des coûts de prévention, le service se pose
aussi la question de la rentabilité de ses investissements et jusqu’à quel
point il doit investir dans un outil spécialisé (ex : modélisation hydrau-
lique experte, maîtrise des cyberattaques…) et en lien avec le niveau
d’acceptabilité du risque et du coût du service par le consommateur.
Dans les études comparatives (R+ et R++ avec SQ), nous avons pu
constater que plus le montant associé aux investissements est impor-
tant, plus les coûts de fonctionnement baissent, et plus la résilience
s’améliore. Ainsi, quand les coûts de prévention sont multipliés par 5, les
coûts de fonctionnement liés aux phases d’urgence, de rétablissement
et de post-crise sont divisés par plus de 10 ! Ces études donnent aussi
l’impact potentiel en termes de coût sur le prix de l’eau du service. Les
services répercutent cependant rarement les coûts de fonctionnement

28 ACCRA – 2020/1 – n° 7, janvier 2020


Angélique Chéritat, Caty Werey

liés aux crises sur le prix de l’eau, ce qui n’est en revanche pas le cas
des investissements. On peut donc imaginer une hausse potentielle du
prix de l’eau de quelques centimes pour le consommateur, liée à une
hausse des investissements.

2.3.2.  Discussion
Le modèle permet l’analyse des coûts de résilience et donne une
cadre d’analyse des centres de coûts pour mesurer la résilience, qui
rappelons-le, est une problématique émergente dans les services
publics d’eau potable. Il donne ainsi la possibilité aux services d’amé-
liorer leur résilience en faisant l’exercice d’évaluer cette dernière après
chaque évènement de crise, et de la comparer dans divers scénarios.
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On pourrait objecter que ce modèle utilise des méthodes de compta-
bilité analytique « dépassées ». Les auteurs ont cependant la convic-
tion qu’il n’existe pas de « bonne » ni de « mauvaise » méthode, tant
que celle-ci répond aux besoins des services d’eau (Gibert 1995) et
leur apporte les réponses nécessaires à leurs prises de décision. Les
auteurs auraient pu utiliser la méthode des coûts directs (coûts spéci-
fiques), plus facile à mettre en place, mais les résultats auraient man-
qué de précision. Quant à la méthode des coûts cachés, son utilisation
est limitée à la non-identification des coûts liés à la résilience dans la
comptabilité, ce qui explique son application partielle et conjuguée à
une autre méthode d’analyse de coûts. La pratique impose d’ailleurs
souvent d’utiliser plusieurs méthodes, à la fois dans un souci de cohé-
rence, de pertinence des résultats et de complétude. L’utilisation des
coûts cachés donne un atout managérial fort à des approches plus
classiques, comme celle des sections homogènes, ce qui implique que
ces méthodes se complètent alors qu’on les perçoit, souvent à tort,
comme étant concurrentes. Ainsi comme expliqué dans Cappelletti
et al. (2018), les coûts cachés sont une méthode de management
plus qu’un simple outil d’évaluation. Cet atout réel n’est pas toujours
perçu par les décideurs, qui ont tendance à rester dans l’illusion que
la réussite dépend de méthodes plus « objectives ». À cela les auteurs
répondent que c’est ignorer la nécessité d’adapter une méthode de
comptabilité analytique à une structure propre de gestion. En tenant
compte de l’ensemble des phases du processus de résilience (les 4
centres de coûts), les auteurs proposent un modèle applicable à tous

ACCRA – 2020/1 – n° 7, janvier 2020 29


Évaluer les coûts des crises pour piloter la résilience

les types de cas de crise, qu’ils concernent des contaminations sur le


réseau ou des pollutions au niveau des usines de production, ou des
ruptures de conduites. Il est intéressant de s’interroger sur son applica-
bilité à d’autres services publics, voire à d’autres types d’infrastructures
critiques confrontées à des évènements de crises similaires. En effet,
les centres de coûts sont définis en fonction du processus de résilience
qui peut rester le même quel que soit le type d’organisation concerné.
Concernant la deuxième partie de cet article, il serait intéressant
de se demander quels seraient les moyens d’évaluer les impacts des
scénarios de résilience sur le consommateur. On parlerait dans ce cas-là
de coûts externes (par oppositions aux coûts internes pour le service).
L’analyse peut en effet se prolonger en tenant compte de l’effet sur le
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consommateur dans une analyse coûts/bénéfices, qui rassemblerait les
coûts et les bénéfices internes et externes. Les outils ne seraient alors
plus seulement comptables mais aussi économiques pour connaître les
préférences des consommateurs s’ils se plaçaient dans différents scé-
narios de résilience tenant compte des impacts de la crise sur le ser-
vice fourni mais également de l’impact potentiel sur la facture d’eau.
L’analyse coûts/bénéfices implique une évaluation des coûts sur plu-
sieurs années.

3.  Conclusion et perspectives


L’utilisation du modèle d’évaluation des coûts de résilience proposé
et son application sur des cas réels et hypothétiques, permet l’amélio-
ration de la résilience sur toutes ses étapes. C’est en définissant des
centres de coûts correspondants à ces étapes et en les reliant à des
données de coûts, que le service peut aisément suivre la consomma-
tion des ressources disponibles liées à la gestion de crise, mais éga-
lement s’interroger sur l’efficience de ses investissements, et trouver
des réponses adaptées à ses questionnements dans une logique de
pilotage du service.
Pour élargir son application, les auteurs suggèrent de faire le lien
entre gestion de la résilience et gestion de la qualité au niveau du ser-
vice, la gestion de crise faisant en effet partie intégrante de la démarche
qualité. Les auteurs proposent de considérer dans ce cas, les « coûts

30 ACCRA – 2020/1 – n° 7, janvier 2020


Angélique Chéritat, Caty Werey

de qualité », comme étant les coûts liés à la gestion de la qualité du


service public dans son ensemble, et comprenant les coûts de résilience
du service. L’identification d’un centre de responsabilité (ici centre de
coûts) dédié à la gestion de la démarche qualité, permettrait de donner
à la résilience un cadre de gestion plus affirmé.

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ACCRA – 2020/1 – n° 7, janvier 2020 33

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