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Grandeur et décadence de la consolidation des comptes

dans le secteur public local français


Sébastien Rocher
Dans Comptabilité Contrôle Audit 2011/2 (Tome 17), pages 137 à 159
Éditions Association Francophone de Comptabilité
ISSN 1262-2788
ISBN 9782311003079
DOI 10.3917/cca.172.0137
© Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 08/06/2023 sur www.cairn.info (IP: 87.255.154.42)

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Sébastien Rocher
GRANDEUR ET DÉCADENCE DE LA CONSOLIDATION DES COMPTES
DANS LE SECTEUR PUBLIC LOCAL FRANÇAIS 137
reçu en août 2009 / accepté en novembre 2010 par Marc Nikitin

Grandeur et décadence
de la consolidation
des comptes dans le secteur
public local français
The rise and fall
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of consolidation of accounts
in the French local public sector
Sébastien ROCHER*

Résumé Abstract
Au début des années 1990, la méthode de At the beginning of the 1990s, the consoli-
consolidation des comptes appliquée par les dation method applied by private companies
entreprises privées est transposée dans le sec- is transposed to the French local public sector.
teur public. Le consensus autour de la nécessi- The consensus around the need for the presenta-
té de cette information ainsi que les tentatives tion of consolidated financial statements in the
d’application engagées laissent imaginer une public sector as well as the experiments conducted
généralisation prochaine de cet outil. Pour- by local governments lead to the idea that the
tant, à la fin des années 1990, seules quelques generalization of this accounting device is just a
collectivités continuent d’appliquer cette mé- matter of time. But at the end of the 1990s, only
thode. a few local governments still applied it.
À partir du modèle d’analyse de la trajec- Based on the model elaborated by Law and
toire d’une innovation proposé par Law et Callon (1992) in order to study the trajectory of
Callon (1992), cet article retrace la dynamique innovations, this article emphasises the dynam-

* Professeur des Universités en Sciences de Gestion, Université d’Angers, membre du GRANEM

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de la consolidation des comptes dans le sec- ics of the consolidation of accounts in the French
teur public local français et met en lumière les local public sector and clarifies the reasons of this
raisons qui ont conduit à l’abandon de cette innovation failure.
innovation.

Mots-clés : Consolidation – Théorie KEYWORDS : CONSOLIDATION – PUBLIC LOCAL


de la traduction – Secteur public – SECTOR – TRANSLATION THEORY – INNOVATION
Trajectoire – Innovation

Remerciements : L’auteur remercie sincèrement les deux réviseurs anonymes pour l’intérêt qu’ils ont
témoigné à cette étude ainsi que pour leurs nombreux conseils et commentaires.
Correspondance : Sébastien ROCHER
Faculté de Droit, d’Économie et de Gestion de l’Université d’Angers
13, allée François Mitterrand
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49036 Angers CEDEX 01
sebastien.rocher@univ-angers.fr

Introduction
Dans les années 1990, les collectivités locales de nombreux pays se sont engagées dans la consolida-
tion de leurs comptes et de ceux de leurs satellites, c’est-à-dire l’ensemble des entités publiques ou pri-
vées participant à la gestion publique, sur le modèle des entreprises marchandes (Brusca et Condor,
2002 ; Lüder et Jones, 2003 ; Grossi et Pepe, 2009). La France n’a pas fait exception à ce mouvement.
Au début des années 1990, les pratiques de consolidation des entreprises sont transposées aux col-
lectivités locales françaises (Klopfer, 1991a ; OEC, 1992 ; DeKerviler, 1993 ; Pavard et Charpentier,
1993) ; et au cours des années 1990, les résultats des premières tentatives de collectivités locales met-
tent en évidence la possibilité d’adapter les pratiques du privé au secteur public (Thénoz, 1993, 1995 ;
Lande, 1996). Pourtant, au début des années 2000, la consolidation des comptes des communes
et de leurs satellites a été remplacée par la consolidation des budgets et la consolidation des risques
périphériques des collectivités locales (Rousseau, 2003). Partant de ce constat, la problématique de
cet article est la suivante : pourquoi la consolidation des comptes des communes et de leurs satellites
sur le modèle du secteur privé a-t-elle été délaissée ?
L’objectif de cet article est d’étudier la trajectoire de cet outil dans le secteur public local français,
de l’engouement initial qu’il a suscité à son abandon. Cette étude s’insère donc dans la continuité des
travaux sur la diffusion d’innovations, d’idées ou d’outils s’étant soldée par un échec1 (Broustail, 1990 ;
Law et Callon, 1992 ; Latour, 1993 ; Nauroy, 2005 ; Gonzalez Alvarez, 2007 ; Alcouffe et al., 2008a).
Dans ce dessein, cette étude s’appuie sur le modèle d’analyse de la trajectoire des innovations pro-
posé par Law et Callon (1992). Trois raisons majeures justifient ce choix. Tout d’abord, ce modèle
mobilise une approche processuelle des innovations, intégrant indifféremment les phénomènes

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sociaux et les aspects techniques (Heeks et Standforth, 2007). Ensuite, ce modèle s’insère dans la
continuité des travaux sur la théorie de la traduction (Callon, 1986 ; Callon et Law, 1989). À l’instar
de ce cadre théorique, ce modèle ne vise ni à démontrer ni à tester. Il constitue un cadre explicatif
favorisant la compréhension d’un processus à partir de la (re)constitution d’une histoire (Latour,
2006 ; Law, 2007). Enfin, Law et Callon (1992) ont élaboré ce modèle suite à l’étude de la trajectoire
du TSR 2, un avion de combat imaginé par la Royal Air Force à la fin des années 1950. Ces auteurs
montrent comment ce projet va progressivement prendre corps, jusqu’à son vol inaugural, avant
d’être abandonné. La trajectoire de cette innovation est similaire à celle de la consolidation des
comptes dans le secteur public local français dans les années 1990.
La première partie de cet article présente le modèle élaboré par Law et Callon (1992) puis expose
l’architecture de la recherche. L’analyse du développement de la consolidation dans le secteur public
local français constitue la seconde partie. Dans une troisième partie, une explication de l’abandon de
la consolidation des comptes dans le secteur public local français est proposée.

1. La diffusion d’une innovation, une histoire de réseaux


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La première partie expose les fondements du modèle proposé par Law et Callon (1992) pour étudier la
trajectoire d’une innovation. La seconde partie présente l’architecture de la recherche afin d’appliquer ce
modèle à l’étude de la trajectoire de la consolidation des comptes dans le secteur public local français.

1.1. L’étude de la trajectoire des innovations :


le modèle de Law et Callon (1992)
Selon la théorie de la traduction (Callon, 1986 ; Latour, 1987), la diffusion d’une innovation est la
résultante de la constitution d’un réseau d’alliés mobilisés autour d’elle, lui transmettant la force
nécessaire pour se propager. Dès lors, pour qu’une innovation se diffuse, il faut constamment enrôler
de nouveaux alliés (Latour, 1986 ; 1987). Pour ce faire, les intérêts des acteurs doivent être « traduits »
dans l’innovation : celle-ci doit devenir un « point de passage obligé », c’est-à-dire un moyen pour eux
d’atteindre leurs intérêts (Callon, 1986 ; Callon et Law, 1989). Ainsi, en accord avec Latour (1988,
p. 34), la trajectoire d’une innovation est fonction du nombre d’alliés enrôlés et de la nature des
transformations apportées à celle-ci. Cet auteur montre que la diffusion d’une innovation n’est pas
un phénomène linéaire prédéterminé mais plutôt un processus constitué d’allers-retours, de transfor-
mations, d’enthousiasme et de désintérêt, parfois de trahisons, conduisant au succès ou à l’échec de
l’outil (Alcouffe et al., 2008b).
Callon et Law (1989) et Law et Callon (1992) montrent que le processus de traduction intervient
tout d’abord au sein d’un réseau global puis au sein d’un réseau local dans lequel l’idée est transfor-
mée en une réalisation concrète. Le réseau global est un ensemble de relations générant un espace, un
moment et des ressources financières, techniques ou politiques qui permettent à l’innovation d’exis-
ter (Law et Callon, 1992, p. 21). Le réseau global s’apparente donc à un espace de négociation où
l’innovation est imaginée. Afin qu’elle devienne réelle et dépasse le simple stade de projet, un réseau

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local est ensuite constitué, c’est-à-dire un ensemble de relations entre acteurs humains et non-humains
nécessaire à la construction d’un outil qui fonctionne (Callon et Law, 1989 ; Law et Callon, 1992).
Dès lors, la trajectoire d’une innovation est fonction de trois facteurs (Law et Callon, 1992, p. 46) :
• la construction et le maintien d’un réseau global pourvoyant des ressources diverses dans le but
d’en retirer un bénéfice futur ;
• la construction et le maintien d’un réseau local utilisant les ressources issues du réseau global afin
d’offrir, en retour, un avantage économique, matériel, culturel ou symbolique aux acteurs composant
le réseau global ;
• la capacité du projet à s’imposer comme un point de passage obligé entre ces deux réseaux.
Cependant, à tout moment, le maintien de ces trois conditions peut être remis en cause. La force
d’un réseau est égale à celle de son maillon le plus faible et les alliances scellées avec une ou plusieurs
catégories d’acteurs peuvent se rompre et faire vaciller l’innovation, voire conduire à son abandon.
Les acteurs peuvent ainsi décider de déserter le réseau dans lequel ils étaient enrôlés. Deux causes
principales permettent d’expliquer ce phénomène de dissidence ou de trahison (Callon, 1986, Callon
et Latour, 1981 ; Latour, 1993). La première est la force des alliances et associations créées progressi-
vement autour de l’innovation. En effet, pour atteindre ses intérêts, un acteur a l’opportunité d’em-
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prunter différentes voies ou, pour reprendre les termes de la théorie de la traduction, de s’engager
dans différents points de passage (Star et Griesemer, 1989, p. 390). Comme le montrent notamment
Alcouffe et al. (2008b), la diffusion d’une innovation ne se déroule pas en vase clos et n’est pas imper-
méable à l’existence d’autres alternatives. Dès lors, le traducteur doit faire en sorte que son projet
devienne un point de passage obligé pour les acteurs. Pour ce faire, il doit être en mesure de couper
les relations que d’autres acteurs essaient d’établir avec lui (Callon, 1986, p. 186). Il relègue alors les
autres projets au rang de « points de passage concurrents ». Mais à tout instant, les alliances peuvent se
rompre si l’attraction vers un autre point de passage (c’est-à-dire vers le projet d’un autre traducteur)
devient plus forte que la force engagée pour maintenir les acteurs intéressés.
Le deuxième facteur est la représentativité des porte-parole. Les acteurs enrôlés dans un réseau
sociotechnique ne sont que les porte-parole de groupes d’acteurs au nom et pour les intérêts desquels
ils s’expriment. Mais si les alliés représentés sont trop nombreux, le projet risque de se noyer dans les
différentes volontés de multiples acteurs qui poursuivent leurs propres buts. Les acteurs peuvent ainsi
refuser le rôle imaginé pour eux et remettre en cause la représentativité de leurs porte-parole (Callon,
1986). Ainsi, des acteurs séduits, convaincus, transformés, s’ils sont poussés trop loin de leurs voies
habituelles, peuvent trahir et déserter un projet, une idée, une innovation, soit car les transformations
successives d’un projet qui les avait attirés n’intègrent plus leurs intérêts propres, soit car ils refusent le
rôle imaginé pour eux face à cette innovation. Ils redeviennent alors désintéressés et le réseau s’effondre.
Ces deux facteurs expliquent comment des innovations dont le succès semble assuré tant le
nombre d’alliés enrôlés est grand, tant il semble difficile de remettre en cause leurs fondements, tant
leur degré d’avancement les rend de plus en plus irréversibles, peuvent être, au final, abandonnées
(Law et Callon, 1992 ; Latour, 1993).
Pour Law et Callon (1992, p. 49), la trajectoire d’une innovation peut donc être représentée schéma-
tiquement sur un graphique dont l’axe horizontal présente le degré de mobilisation des acteurs du réseau
local et dont l’axe vertical indique le degré de mobilisation des acteurs du réseau global (schéma 1).

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Schéma 1
La mobilisation des acteurs

Fort
Degré d’attachement des acteurs
du réseau global

Projet solide,
indispensable

Faible Fort
Degré de mobilisation des acteurs
du réseau local

Désagrégation du projet,
projet faible
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Faible

Source : Law et Callon, 1992

Plus l’innovation est ancrée dans le quart supérieur droit de ce modèle, plus elle devient irréversible.
À l’inverse, plus elle se rapproche du quart inférieur gauche, plus elle est sujette à un échec proche.

1.2. Les fondements méthodologiques de l’étude


En accord avec Seiffert et al. (2008), l’étude des échecs est nécessaire pour mettre en perspective les
« success story » des organisations. En effet, comme le notent Law et Callon (1992, p. 22), l’analyse
d’un échec permet d’appréhender des mécanismes qui sont le plus souvent cachés dans le cas de
projets ayant « réussi », c’est-à-dire les projets devenus des « boîtes noires » ou, en d’autres termes, des
objets sur lesquels il ne semble plus nécessaire de revenir, qu’il n’est plus nécessaire de discuter (Callon
et Latour, 1981). Il en va ainsi de toutes ces innovations considérées comme indispensables et incon-
tournables, pour lesquelles les controverses qu’elles ont suscitées ont disparu. C’est le cas par exemple
de la consolidation des comptes dans le secteur privé : comme dans le secteur public, son dévelop-
pement a été sinueux, mais le virage de sa généralisation a été mieux négocié. Pourtant, les groupes
privés qui ont souhaité présenter des états financiers consolidés ont dû surmonter des difficultés
sociales et techniques (Bensadon, 2005, 2007). Mais aujourd’hui, il semble que le développement de
la consolidation des comptes est « allé de soi », qu’il ne pouvait pas en être autrement. Les controverses
ont disparu, les alliances construites et observables ont damé le pion aux alliances qui ont échoué, les

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transformations successives de l’idée originelle ne sont plus discutées et les alternatives sont oubliées,
incidemment abandonnées au profit d’une définition de la consolidation des comptes qui n’est plus
remise en cause.
Comprendre pourquoi une idée, un objet ou une innovation devient, ou non, une boîte noire
nécessite de reconstituer les réseaux qui l’ont supportée ainsi que les controverses qu’elle a engendrées.
Pour ce faire, il faut « suivre les acteurs » en étudiant simultanément les acteurs humains et non-
humains et comprendre leur enrôlement, leur mobilisation et éventuellement leur désertion (Latour,
1987 ; 1993).
L’étude de l’échec de la consolidation des comptes dans le secteur public local français est née avec
la participation active aux groupes de travail lancés par la direction générale de la comptabilité publique
(DGCP) sur la consolidation des budgets et l’analyse des risques périphériques, menés entre janvier 2004
et décembre 2005 (Rocher, 2006). En 2003, la DGCP décide de s’engager dans le développement de
méthodes de consolidation alternatives, fondées sur la consolidation des budgets et sur l’analyse des
risques périphériques des collectivités locales et non sur la consolidation des comptes telle qu’elle est
appliquée dans le secteur privé. De cette situation a émergé la question suivante : pourquoi développer
des méthodes alternatives lorsque la consolidation des comptes semble applicable dans le secteur public
local, comme en témoignent les expériences de plusieurs collectivités dans les années 1990 ?
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La participation à ces groupes de travail a permis de recueillir l’opinion des personnes prenant
également part aux réunions, à savoir des membres des services administratifs et des trésoreries de
plusieurs collectivités, dont certaines s’étaient engagées dans la consolidation des comptes dans les
années 1990 (Issy-les-moulineaux, Orléans) et de membres de la DGCP. Les entretiens n’étaient ni
planifiés ni structurés. Ils ont été engagés au gré des opportunités laissées par la participation aux
différentes réunions des groupes de travail précités. Ces discussions étaient ensuite retranscrites sous
formes de notes, parfois rediscutées avec les personnes concernées.
Afin de compléter ces premières informations, les points de vues et positions prises par de nom-
breux acteurs (notamment les consultants privés et les élus), les controverses suscitées par l’implanta-
tion de la consolidation des comptes dans le secteur public local ainsi que les solutions qui y ont été
apportées, ont été étudiées au travers d’articles publiés dans des revues techniques ou académiques
dans les années 1990 (dissociés des références théoriques dans la bibliographie), à savoir trois revues
professionnelles s’intéressant aux évolutions de la comptabilité du secteur public local français (Revue
Française de Comptabilité, Revue du Trésor, Revue Française de Finances Publiques), ainsi qu’un
journal (Les Échos) et un magazine (La Gazette des communes) reflétant les pratiques managériales
des collectivités françaises. Cette première sélection nous a permis, d’une part, de collecter de nom-
breux articles relatifs à la consolidation dans le secteur public et, d’autre part, d’étendre nos sources
en nous reportant aux références citées par les auteurs des articles sélectionnés.
Les documents de travail de la DGCP ont permis également de compléter les informations sur le
développement de la consolidation dans le secteur public local français.
Enfin, après avoir identifié les villes qui se sont engagées dans la consolidation des comptes dans
les années 1990, nous avons mené des entretiens avec des membres des services financiers, des ser-
vices de contrôle de gestion et des consultants impliqués dans la mise en place de cet outil à l’époque.
Si nous avons pu contacter les instigateurs de la mise en place de la consolidation des comptes à
la ville d’Angers (le directeur financier, sa collaboratrice en charge de l’application de la méthode,

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l’expert-comptable participant à ce projet, le chef des services de contrôle de gestion), dans le cas
des villes de Grenoble et Marseille, nous nous sommes entretenus avec les successeurs des personnes
impliquées dans ce projet. Ce « choix » résulte du refus des personnes identifiées de répondre à nos
sollicitations. Quant aux autres villes qui se sont engagées dans la consolidation des comptes au début
des années 1990 (Rosny-sous-bois, Louveciennes, Nîmes, Aulnay-sous-bois, Douai), il ne nous a pas
été possible d’identifier les personnes impliquées à l’époque ou nous n’avons pas été en mesure de les
retrouver. Nous nous sommes donc entretenus avec d’actuels membres des services financiers de ces
communes. Toutefois, nos interlocuteurs n’avaient pas connaissance, le plus souvent, de l’expérience
de leurs (lointains) prédécesseurs en matière de consolidation. Au final, ce dernier mode de recueil
nous a permis de compléter les informations précédemment collectées grâce à 12 entretiens, d’une
durée allant de 15 minutes à 2h15.
Le recueil des données est donc fortement lié aux opportunités qui nous ont été offertes. En cela,
cette méthodologie s’insère dans la continuité des réflexions de Girin (1989) sur l’opportunisme
méthodique dans l’étude des situations de gestion. Selon cet auteur, il est nécessaire de saisir les
possibilités d’observation qu’offrent les circonstances et de maximiser les opportunités de recueil de
données face à l’impossibilité de collecter des données « idéales ».
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2. La trajectoire de la consolidation des comptes
dans le secteur public local français
S’appuyant sur les fondements du modèle d’analyse de Law et Callon (1992) évoqués supra, cette
partie présente le développement de la consolidation des comptes dans le secteur public local français
au début des années 1990, de l’émergence de l’idée aux premières expérimentations menées, jusqu’à
son abandon à la fin des années 1990.

2.1. La consolidation des comptes comme point de passage obligé


Au début des années 1990, un consensus national émerge sur la nécessité, pour les collectivités locales,
de présenter une information financière consolidée. Cependant, une controverse apparaît sur la
méthode à appliquer. La consolidation des comptes va progressivement s’imposer comme un point
de passage obligé, sous l’impulsion des experts-comptables et des banques principalement. Plusieurs
applications sont alors engagées.

2.1.1. LE DÉVELOPPEMENT D’UN RÉSEAU GLOBAL


AUTOUR DE LA CONSOLIDATION
La définition d’une méthode de consolidation des comptes d’une commune et de ses démembrements
en 1972 puis son application lors de l’exercice 1973 par la ville d’Orléans constituent la première ten-
tative d’élaboration d’états financiers consolidés dans le secteur public local français (Bouinot, 1977).
Toutefois, jusqu’à la fin des années 1980, cette tentative reste isolée et son impact limité (Bouinot et
Reynaud, 1991, p. 1).

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La dégradation de la situation financière de nombreuses collectivités françaises à la fin des


années 1980 suite aux difficultés d’un ou plusieurs de leurs satellites qu’elles ont dû soutenir, ravive
l’intérêt pour la consolidation. Cette situation met en évidence les lacunes de l’information financière
des communes en matière de prise en compte des risques associés à la gestion déléguée et renforce le
besoin d’une vision globale du « groupe communal ».
Très rapidement, la consolidation « problématise » un large réseau d’acteurs. Ainsi, en 1991, dans
son rapport public au président de la République (p. 126), la Cour des comptes observe que l’absence
de consolidation des opérations des satellites et organismes périphériques hors budget nuit à l’appré-
ciation juste et fiable de la situation financière des collectivités locales. Dans le même temps, plusieurs
conférences nationales sont organisées sur la nécessaire consolidation des comptes des collectivités
locales2, tandis que les articles sur ce thème se multiplient dans la presse spécialisée : des consul-
tants du secteur public (Laurent, 1991 ; Klopfer, 1991a ; 1991b ; Dupuis, 1991), le Crédit Local de
France (DeGaulmyn, 1991 ; Dabaji et Vanel, 1991), le comité secteur public de l’Ordre des Experts-
Comptables (Ducarre, 1991), des cabinets comptables (Kessler, 1991), des chambres régionales des
comptes (Francoz, 1991) et des universitaires (Bouinot et Reynaud, 1991) défendent ainsi l’introduc-
tion de la consolidation des comptes dans le secteur public. Cependant, si l’introduction de cet outil
fédère, sa mise en application entraîne de nombreuses controverses.
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2.1.2. UN MÊME CONCEPT, PLUSIEURS REPRÉSENTATIONS
Au début des années 1990, la notion de consolidation fait référence aux pratiques normées des entre-
prises marchandes, la consolidation ayant été introduite dans la réglementation sur les sociétés com-
merciales après l’adaptation de la 7e directive européenne relative aux comptes consolidés en jan-
vier 1985. La transposition de cette technique dans le secteur public local soulève plusieurs questions :
Comment définir le périmètre de consolidation et quelles entités intégrer ? Comment agréger les
comptes d’entités ne disposant pas d’un référentiel comptable commun ? Comment présenter l’infor-
mation financière consolidée ? Trois alternatives sont successivement développées.

Il faut consolider les flux financiers


En 1991, à partir des comptes de l’exercice 1989, la ville de Marseille, en partenariat avec la Chambre
régionale des comptes Provence Alpes Côte d’Azur, s’engage dans une démarche de consolidation du
budget principal avec ses budgets annexes, enrichie d’une agrégation des données de ses satellites dont
elle a délimité le périmètre par un double critère d’influence et financier (Gaignaire, 1991). Cette
méthode permet notamment à la ville de disposer d’une approche globale concernant son épargne
nette, son endettement et l’importance du budget du « groupe ville » (DGCP, 2002).
De même, bénéficiant du soutien du Crédit local de France, les villes de Nîmes et Grenoble s’en-
gagent en 1991 dans la consolidation de leurs comptes et de ceux de leurs satellites, en transposant
les principes de la consolidation des comptes du secteur privé mais en se limitant à la consolida-
tion des flux financiers (Dabaji et Vanel, 1991 ; Le Hir, 1991) : définition d’un organigramme ins-
titutionnel, recensement des opérations comptables selon une nomenclature simplifiée, élimination
des principaux flux internes de transfert, présentation d’une vision globale de l’importance de la

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Sébastien Rocher
GRANDEUR ET DÉCADENCE DE LA CONSOLIDATION DES COMPTES
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« Holding Ville ». Il est ainsi précisé dans le rapport de présentation des comptes consolidés de la ville
de Grenoble (1991, p. 2) que « les travaux présentés ne constituent pas une consolidation au sens “comp-
tabilité privée” du terme », du fait notamment de l’hétérogénéité des nomenclatures comptables et de
l’absence de liasses de consolidation.

Il faut consolider les risques


En marge de ces premières expériences, un second réseau d’acteurs se forme autour d’une approche
alternative fondée sur la consolidation des risques, sous l’impulsion du comité consultatif pour la
réforme de la comptabilité des collectivités locales3.
Ainsi, comme le rappelle B. Adans, membre de la DGCP et membre de ce comité (cité par Petroff,
1991, p. 8), « Tout le monde semble d’accord sur la nécessité d’une vision globale qui permette d’appréhen-
der dans la globalité la sphère communale et autorise incidemment des comparaisons d’une collectivité à
l’autre. La solution préconisée est une consolidation comptable pour tout ce qui est de droit public et une
information extra-comptable pour tous les autres budgets. Au fond, ce que chacun veut et qu’ il faut rendre
possible, c’est une connaissance complète (mais non comptable) de tout ce qui concourt à la gestion locale
sur des chapitres bien déterminés tels que les dépenses de personnel, la charge globale de la dette, le taux de
fiscalité et la marge de manœuvre qui en découle. » De même, G. Combe, alors secrétaire général de la
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ville de Nancy, également membre du comité consultatif (cité par Petroff, 1991, p. 8) note que « ce ne
sont pas les comptes qu’ il faut consolider : ce sont les risques encourus par la collectivité ».
Dans le sillage des réflexions du comité consultatif, le législateur prévoit, dans la loi sur l’adminis-
tration territoriale de la République du 6 février 1992 (dite loi ATR), une obligation d’information
sur les engagements financiers de la commune envers les organismes de droit privé et sur leur situa-
tion financière, couplée à « la présentation consolidée des résultats afférents au dernier exercice connu du
budget principal et des budgets annexes de la commune » (article 13 de la loi ATR). Ce faisant, le légis-
lateur redéfinit la consolidation dans le secteur public local et propose une solution aux controverses
techniques posées par la consolidation des comptes.

Il faut consolider les comptes


Si le législateur a bien intégré la consolidation dans la loi ATR, il ne s’agit en réalité que de la simple
sommation des réalisations de l’exercice (budgets annexes et budget principal) et des restes à réaliser4,
les flux budgétaires entre budgets n’étant pas éliminés (Ravary, 2001). Dès lors, la position prise
par le législateur est largement critiquée (Charles, 1992 ; Pavard, 1993 ; Boucher, 1993 ; Marzials,
1993). Des méthodes de consolidation des comptes plus élaborées sont alors développées. L’Ordre des
experts-comptables publie une méthodologie à l’usage des collectivités locales qui s’appuie sur l’appli-
cation du modèle de consolidation des entreprises privées (OEC, 1992). Afin de dépasser les contro-
verses techniques évoquées supra, les partisans de la consolidation des comptes anticipent la mise en
place de la nouvelle instruction budgétaire M14 issue de la réforme de la comptabilité publique locale
car celle-ci doit harmoniser la comptabilité publique et la comptabilité privée. Ils balaient ainsi d’un
revers de la main la controverse sur l’hétérogénéité des systèmes comptables :
« Plaçons-nous d’abord en régime de croisière et supposons une nouvelle comptabilité budgétaire
intégrant une évaluation du patrimoine avec dotations aux amortissements et aux provisions, des

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GRANDEUR ET DÉCADENCE DE LA CONSOLIDATION DES COMPTES
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comptes de régularisation permettant de rattacher les charges et les produits à l’exercice qui leur a
donné naissance et une annexe retraçant les engagements donnés et reçus. Avec une telle présentation,
la contrainte de non-homogénéité comptable est en grande partie levée. » (Klopfer, 1991a, p. 129)
« Les limites évoquées pour limiter la consolidation à celle des risques sont de natures différentes : les
référentiels comptables utilisés dans le secteur public […] sont hétérogènes. Le projet de mise en application
de la M14, inspirée du Plan comptable, permet d’éliminer cet obstacle. » (Pavard, 1993, p. 20)
Par ailleurs, les experts-comptables proposent l’établissement d’un bilan et d’un compte de résul-
tat consolidés sur le modèle du secteur privé. Ils dépassent ainsi l’approche des flux en proposant une
approche patrimoniale. Ils adaptent également la méthode afin de prendre en compte les engagements
(garanties d’emprunt…) et provisionner les risques. Enfin, ils redéfinissent les finalités attribuées à la
consolidation des comptes dans le secteur privé. Ainsi, dans le secteur public, cet outil doit permettre
de mieux évaluer l’endettement total que supporte une commune, d’évaluer ses risques financiers,
d’améliorer sa gestion, d’apprécier son poids économique et financier réel, d’évaluer les politiques
publiques, de disposer d’une vue d’ensemble de la situation financière des activités de la collecti-
vité, ou encore d’effectuer des comparaisons entre différents groupes territoriaux (DeKerviler, 1992 ;
OEC, 1992 ; Befec, 1996). Le réseau qui supporte l’introduction de la consolidation des comptes
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dans le secteur public local se renforce également par l’addition de travaux universitaires (Lande,
1996 ; 1998) mettant en évidence la nécessité et la possibilité de consolider les comptes sur le modèle
des pratiques du secteur privé.
Dans le même temps, plusieurs experts-comptables s’engagent, en partenariat avec des collectivités,
dans la définition et la mise en place d’une consolidation des comptes5 telles les villes d’Aulnay-sous-
bois, d’Issy-les-Moulineaux, Rosny-sous-bois, de Louveciennes (De Kerviler, 1993 ; Rivière-Prost,
1995), de Douai (Jourdan, 1993 ; Le Solleu, 1993), d’Orléans (Anonyme, 1993) ou encore d’Angers
(Thénoz, 1995). Ces différentes expériences de consolidation engagées dans le secteur public local au
début des années 1990 démontrent la possibilité d’adapter cette technique du privé au public (Pavard,
1993 ; Adans et Moraud, 1994). Pourtant, cette méthode ne réussit pas à s’imposer dans le secteur
public local français.

2.2. L’abandon de la consolidation des comptes


L’abandon de la consolidation des comptes dans le secteur public local est lié, d’une part, aux diffi-
cultés rencontrées par cette méthode dans les collectivités locales et, d’autre part, à la désagrégation
progressive du réseau global sur lequel elle s’appuyait.

2.2.1. LES DIFFICULTÉS DE LA CONSOLIDATION AU NIVEAU LOCAL


Trois difficultés majeures sont apparues lors de la mise en place de la consolidation des comptes dans
les collectivités locales : la lourdeur de la méthode, le faible intérêt des élus, la concurrence d’autres
méthodes de suivi.

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Une méthode consommatrice de ressources


En comparaison avec la consolidation des flux ou la consolidation des risques, la consolidation des
comptes offre une information plus précise et plus complète. Mais en contrepartie, elle nécessite des
ressources supérieures. Les premières tentatives de consolidation des comptes dans le secteur public
local confirment la lourdeur de cette méthode6 :
« J’ai eu des piles de documents et des tonnes et des tonnes de chiffres sur mon bureau pour au final
en sortir un chiffre. Au-delà on noyait les gens. Les élus ne sont pas techniciens. La méthode ne
les intéressait pas. […] Le logiciel aussi a été à l’origine de l’abandon. J’utilisais à l’ époque le seul
ordinateur du service, je le monopolisais pour au final ne sortir qu’un seul chiffre. En plus, les flux
croisés étaient retraités à la main. » (membre des services financiers)
Ce phénomène est accentué par la difficulté d’accéder à l’information. Si les satellites des collec-
tivités locales sont imaginés comme des entités qui coopèrent à la mise en place de la consolidation,
dans la réalité, les collectivités ont rencontré des difficultés dans la collecte de l’information :
« Demander ses comptes à un office d’HLM, passe encore. Pour une société d’ économie mixte cela
devient plus difficile. Mais pour les associations, c’est quasiment impossible » explique Jean-Marc
Garnier, le secrétaire général de Grenoble. « À Nîmes, il a fallu parfois menacer de couper les
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subventions. » (De Gaulmyn, 1992, p. 6)
« Un gros travail de communication et d’explication a dû être fourni pour obtenir des documents
et des informations financières de la part des services, organismes et associations concernées, parfois
peu coopératifs. » (Anonyme, 1992, p. 7)
Cela a contribué, d’une part, au décalage entre la date de réalisation de la consolidation et les
données financières concernées, parfois antérieures de deux ans et, d’autre part, à renforcer l’image
d’un outil difficile à implanter. La consolidation apparaît donc comme une méthode consommatrice
de ressources nécessitant un investissement financier et humain important :
« La consolidation intéressait les collectivités. Mais elles ne pouvaient pas toujours y mettre quelqu’un
à plein-temps. C’est pour cela que les expériences menées sont restées des “one shot.” » (Membre de
la DGCP)
« À cette époque, les collectivités étaient en situation de restriction budgétaire permanente. Il était donc
difficile pour elles de s’engager dans une démarche aussi lourde. » (Consultant du secteur privé)
Cette première difficulté a conduit les communes à prévoir une actualisation périodique, mais
non annuelle, de cette méthode. Mais cette transformation soulève de nouvelles controverses :
• Comment former les acteurs et capitaliser sur les connaissances acquises lors des premières expériences ?
Pour les collectivités qui se sont engagées dans la consolidation de leurs comptes et de ceux de
leurs satellites, la formation des administratifs était très restreinte et suivait un apprentissage local, en
partenariat avec des cabinets d’expertise comptable :
« Seules deux personnes étaient formées à la consolidation, le directeur et moi, car nous participions
à la consolidation, accompagnés par un expert-comptable, qui nous avait aidé dans le choix des
critères de définition du périmètre, la méthode de consolidation proprement dite, le choix du logiciel
et à examiner les liens qui existaient avec les règles de la conso du secteur privé ; et vu le travail

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GRANDEUR ET DÉCADENCE DE LA CONSOLIDATION DES COMPTES
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que cela représentait… Spontanément, mes collègues n’auraient pas pris le relais. » (Membre des
services financiers)
• Comment renouveler le soutien politique de cette information facultative alors que les élus n’ont
qu’un faible attrait pour les résultats de la consolidation des comptes ?

Le faible intérêt des élus pour les résultats de la consolidation des comptes
Les résultats des premières tentatives de consolidation des comptes sont en deçà des attentes initiales
attachées à cet outil et n’ont qu’un intérêt limité pour les élus :
« Il y a eu des apports : c’est à partir de ces expériences que les collectivités ont commencé à élaborer
une cartographie des entités qui composent le groupe territorial. Mais ce n’ était pas suffisant et ces
expériences sont restées au stade de projet. » (Membre de la DGCP)
« Les élus ne sont pas intéressés par le résultat de la consolidation. Leur intérêt réside surtout dans
la présentation du périmètre, la vue globale de la gestion municipale, l’approche par politique
publique. » (Membre des services financiers)
« Les élus ne voyaient qu’un chiffre, je ne suis même pas sûre qu’ ils aient pris conscience que la
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méthode a changé après l’abandon de la partie comptable de la consolidation. » (Membre des
services financiers)
Paradoxalement, l’une des limites des résultats se situe dans leur caractère global :
« Le problème, c’est qu’une fois que nous avions fini la consolidation, nous devions presque
“ déconsolider”. […] La consolidation par secteur à plus de sens qu’une consolidation générale.
Consolider les CRACL7 pour la politique foncière ou consolider les garanties d’emprunt pour le
logement social était plus pertinent pour les élus. » (Consultant du secteur privé)
La remise en cause d’une approche globale par les élus a conduit à la présentation d’informations
par politiques publiques, par ratios. Ce faisant, cette transformation a conduit la consolidation à être
en concurrence frontale avec d’autres méthodes d’analyse existantes ou en développement au sein des
collectivités.

La concurrence avec d’autres méthodes de suivi des satellites


Les difficultés de la consolidation des comptes furent également liées à son difficile positionnement
parmi les outils de gestion utilisés dans les collectivités locales. En effet, au début des années 1990,
le contrôle de gestion se développe au sein des communes. L’une des affectations de ces services est le
suivi des satellites des collectivités locales (Paquier et al. 1996).
« Au départ, les méthodes n’ étaient pas concurrentes. Il faut distinguer le rôle du directeur financier
dans la présentation de l’analyse financière globale et le rôle des directeurs opérationnels, parfois
accompagnés du contrôle de gestion, qui suivaient les satellites. Ce n’est pas le même niveau. […]
Au moment où nous avons mis en place la consolidation, il existait déjà une revue régulière des
comptes et des risques pour chaque satellite. Il y avait déjà une mécanique de dialogue entre les élus
et les directeurs opérationnels. Et de ce fait, ces méthodes sont devenues concurrentes. » (Consultant
du secteur privé)

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Dans de nombreuses collectivités, l’analyse des politiques publiques ou le suivi des risques sont
traités dans un service différent.
« Les résultats étaient avant tout formels. Les élus ne se sont pas approprié les résultats. Ils recherchaient
une simple vision globale. Ils n’avaient pas d’appétence pour la méthode. Ils ont laissé faire le directeur
financier. Mais c’ était plus une expérience “pour se faire plaisir”. […] Au service contrôle de gestion,
nous tenions des dossiers d’ évaluation pour les satellites les plus importants et nous organisions des
comités de suivi avec l’ensemble des partenaires. » (Membre des services de contrôle de gestion)
Progressivement, l’existence de méthodes alternatives de suivi des satellites minimise le rôle de la
consolidation des comptes dans les villes qui se sont engagées dans sa mise en place :
« Nous continuons de publier un rapport de communication financière en comptes consolidés, qui
reprend la consolidation du compte administratif et des satellites. Mais lors de la dernière réunion
de service, j’ai proposé que nous supprimions cette partie du rapport. […] Pendant longtemps, il y
avait un service dédié à l’analyse des SEM et on s’en remettait à ce service pour l’analyse financière. »
(Membre des services financiers)
L’ensemble des controverses apparues lors de la mise en place de la consolidation des comptes
dans plusieurs collectivités locales, ont toutefois pu être dépassées dans certaines d’entre elles. Ainsi,
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quelques villes, à l’instar d’Orléans (DGCP, 2006), continuent aujourd’hui de présenter une infor-
mation consolidée sur le modèle des pratiques du secteur privé8. Cependant, la désagrégation du
réseau global construit par les partisans de la consolidation des comptes a conduit au désintérêt pro-
gressif pour cet outil.

2.2.2. LA DÉSAGRÉGATION DU RÉSEAU GLOBAL


Trois évènements majeurs ont conduit à l’effritement des alliances constituées par les défenseurs de la
consolidation des comptes dans le secteur public local : la réforme du système comptable des collecti-
vités locales suite à l’introduction d’une nouvelle instruction budgétaire et comptable en 1997 ; l’essor
des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre à partir de 1999 ;
la transformation du rôle de la DGCP au début des années 2000.
Ces transformations vont affecter le réseau global supportant la consolidation comptable et
remettre en cause la pertinence de cette technique dans le secteur public local français tout en ravi-
vant, en parallèle, l’intérêt pour les méthodes de consolidation des budgets et des risques imaginées
quelques années auparavant.

1997 : L’introduction de la M14


Avec l’application obligatoire de la nouvelle instruction budgétaire M14 par l’ensemble des communes
françaises, la consolidation des comptes vacille encore un peu plus en 1997. En effet, cette réforme va
conduire les collectivités à délaisser la consolidation, renvoyée à son statut d’information complémen-
taire et facultative, au profit d’intérêts plus forts.
« En 1997, la réforme du système comptable des communes, corrélée au tassement des scandales financiers
a conduit les collectivités locales à s’engager totalement dans cette réforme. La consolidation, qui n’était
pas obligatoire, a été délaissée : les collectivités n’avaient plus les moyens humains et financiers, ni le temps

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suffisant, pour s’engager dans cette voie. En plus, la réforme était inévitable et elle devenait prioritaire ;
surtout que dans l’esprit de beaucoup, elle devait faciliter la consolidation. » (Membre de la DGCP)
Le réseau qui supporte la consolidation est donc fortement affaibli et les efforts d’intéressement
des élus et des administratifs semblent anéantis. Certes, cette réforme est présentée comme un futur
allié pour l’introduction de la consolidation des comptes dans le secteur public local puisqu’elle vise
à harmoniser la comptabilité privée et la comptabilité publique. Elle doit ainsi faciliter l’application
d’une méthode imaginée à partir de l’anticipation de cette réforme. Mais cet argument est annihilé
suite aux transformations successives de la consolidation dans les collectivités qui l’expérimentent9.

1999 : La réouverture de « boîtes noires » sur lesquelles repose la consolidation des comptes
Si la loi ATR a institué deux nouvelles catégories d’EPCI à fiscalité propre10 en 1992, l’intercommu-
nalité à fiscalité propre s’est réellement imposée en France à la suite de la loi du 12 juillet 1999 relative
au renforcement de la coopération intercommunale11. Cette loi a entraîné une dynamique intercom-
munale sans précédent dans le secteur public local français. Le nombre d’EPCI à fiscalité propre a été
multiplié par 10 en moins de 10 ans (DGCL, 2006). Mais en accentuant le rôle des EPCI à fiscalité
propre dans le paysage local, le législateur a rouvert des « boîtes noires » sur lesquelles s’appuyait la
consolidation des comptes dans le secteur public local.
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L’accroissement du rôle des organisations intercommunales à fiscalité propre dans la vie locale
a entraîné, par un système de vases communicants, la minimisation de l’importance des villes et a
remis en cause la primauté de la consolidation à l’échelon communal. Le législateur a ainsi rouvert les
controverses relatives à la définition de l’entité consolidante et au critère à retenir pour définir le péri-
mètre de consolidation dans le secteur public local. En effet, au début des années 1990, les EPCI à
fiscalité propre n’ont qu’un rôle mineur dans la gestion publique et les EPCI à participation se prêtent
aisément au traitement comptable imaginé par les partisans d’une consolidation des comptes conçue
à partir du modèle du secteur privé (OEC, 1992). Mais le développement des EPCI à fiscalité propre
va remettre en cause cette méthode : puisqu’il n’existe aucun lien de dépendance entre les communes
et l’EPCI à fiscalité propre dont elles sont membres, d’un point de vue comptable, l’intégration de
l’intercommunalité dans le périmètre communal ne peut avoir lieu puisque la commune ne peut pas
« s’approprier » les résultats de l’organisme intercommunal (et inversement).
Si Mattret (2003) apporte une réponse à ces nouvelles controverses et propose de consolider les
comptes des EPCI sur le modèle de la consolidation du secteur privé, l’impact de cette proposition
reste marginal et n’enrôle que peu d’acteurs, et ce pour deux raisons principales. D’une part, les trans-
ferts de compétences des villes aux EPCI dont elles sont membres ont accru l’importance financière
des budgets annexes de ces structures (DGCL, 2001). Il est alors apparu important de consolider
en priorité le budget principal et les budgets annexes des EPCI. D’autre part, la DGCP s’engage, en
2002, dans l’élaboration d’un tel outil, couplé avec une analyse des risques périphériques de la com-
mune ou de l’EPCI.

2000 : La transformation du rôle de la DGCP


En élaborant des méthodes de consolidation des comptes dans le secteur public local et en s’in-
vestissant dans leur mise en place, banques et experts-comptables s’inventent comme les nouveaux
partenaires des collectivités en matière de conseil en gestion au début des années 1990. De ce fait,

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ils cantonnent implicitement le Trésor public à sa mission de comptable public12. Or, au début des
années 2000, la DGCP remet en cause le rôle imaginé pour elle par les défenseurs de la consolidation
des comptes dans le secteur public local.
Suite à la réforme avortée de Bercy en 2000 (Séréni et Villeneuve, 2002 ; Pernot, 2002 ; Villeroy
de Galhau, 2004) et au lancement du programme « Bercy en mouvement » en octobre 2002 (Parini,
2005), la DGCP et la DGI ont vu leurs missions modifiées13 autour d’un recentrage de leurs métiers,
afin de moderniser l’administration et d’améliorer l’image de ces directions face aux contribuables
(Villeroy de Galhau, 2004, p. 10). D’un rôle de contrôleur, la DGCP devient ainsi le conseiller finan-
cier des collectivités locales en enrichissant l’expertise et le conseil financier au profit des décideurs
locaux. C’est à ce titre que la DGCP s’engage dans l’amélioration de l’information financière diffusée
par les collectivités locales. La DGCP signe, le 15 avril 2003, un contrat de performance sur la période
2003-2005 dans lequel elle s’engage notamment à développer l’information financière des collectivités
locales et réaliser des analyses consolidées des budgets principaux et annexes des collectivités locales.
Pour la DGCP14 « Présenter, pour chaque collectivité, de véritables comptes consolidés couvrant l’ensemble
des budgets apparaît à la fois logique (une seule personne juridique, un seul décideur, etc.) et utile (vision
d’ensemble). Dans le cas des EPCI, l’ intérêt est encore plus grand puisque la proportion des opérations
suivies dans un budget annexe peut atteindre et même dépasser la moitié des masses budgétaires globales. »
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En élaborant une méthode de consolidation des budgets, la DGCP redéfinit ce qu’est la conso-
lidation et reconfigure les alliances constituées au début des années 1990. En effet, la DGCP trans-
forme les fondements de la consolidation dans le secteur public en substituant au choix politique
sous-jacent à sa mise en place une prestation de services du Trésor public. Désormais, les communes
et les structures intercommunales peuvent bénéficier d’analyses financières prenant en compte les
opérations et la structure du patrimoine de leurs budgets annexes, disponibles sur internet15. De plus,
ce sont également les chiffres, ratios, logiciels et autres conventions comptables qui sont redéfinis.
Ainsi, la démarche mise en œuvre par la DGCP s’appuie sur le logiciel d’analyse financière utilisé par
le Trésor public (Rousseau et Huyghe, 2005).
Dès lors, la DGCP réinvente la consolidation comptable dans le secteur public local. Elle la trans-
forme en une prestation gratuite, librement accessible par les élus, les administratifs, les citoyens, et
l’enrôlement des acteurs non humains (conventions comptables, logiciels…) est maintenant un pro-
cessus invisible pour les collectivités.
En parallèle de cette première méthode, afin de tenir compte de l’incidence éventuelle des satel-
lites sur la situation financière des collectivités locales, la DGCP opte pour le développement d’une
méthode de « consolidation des risques », en partenariat avec des collectivités locales et des associa-
tions d’élus, afin d’analyser l’incidence des risques périphériques sur les marges de manœuvre finan-
cières des collectivités locales. À une logique ascendante qui qualifie la consolidation des budgets (et,
plus généralement, la consolidation comptable), la DGCP ajoute une logique descendante en cher-
chant à évaluer l’incidence des risques qu’un ou plusieurs satellites peuvent faire peser sur la situation
financière d’une collectivité locale, cette dernière alimentant financièrement ses démembrements
(Rousseau et Rocher, 2006).
La DGCP prolonge ainsi la méthode de consolidation envisagée en 1991 par le comité consul-
tatif pour la réforme de la comptabilité publique du secteur local. Après des universitaires (Bouinot
et Reynaud, 1991), des consultants du secteur public (Klopfer, 1995) ou encore l’OEC (1995), la

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DGCP renforce à son tour le réseau supportant l’introduction de la consolidation des risques dans le
secteur public local. Cette méthode alternative de consolidation est ainsi passée d’un point de passage
concurrent à un point de passage obligé.

Conclusion
Cet article propose une rétrospective de l’introduction de la consolidation des comptes et de son
évolution dans le secteur public local français. Si l’introduction de la consolidation des comptes en
France a déjà été étudiée, seul le secteur privé a fait l’objet d’attention (Bensadon, 2007). Cet article
revient sur l’abandon de la consolidation des comptes dans le secteur public local français à la fin des
années 1990 malgré l’engouement qu’elle avait suscité quelques années auparavant. En s’appuyant sur
la théorie de la traduction, cet article montre que les alliances qui avaient été constituées au début
des années 1990 ont été reconfigurées quelques années plus tard, ou se sont cassées du fait du refus
d’acteurs enrôlés du rôle imaginé pour eux. Ainsi, en appliquant le modèle de Law et Callon (1992),
la trajectoire de la consolidation peut être schématisée comme suit :
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Schéma 2 : La trajectoire de la consolidation des comptes
dans le secteur public local français

Fort
Degré d’attachement Consolidation des budgets
des acteurs du réseau global H et des risques
Point de passage obligé

B Expérimentations
C

D Difficultés dans la mise


en place
Faible Fort
Degré de mobilisation
A acteurs du réseau local
1973 – Orléans
1999
E 1997 – M14
F

G
2000

Faible

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DANS LE SECTEUR PUBLIC LOCAL FRANÇAIS 153

Ce schéma retrace la dynamique de la consolidation des comptes, de la première tentative dans


les années 1970 (A) à l’émergence d’une technique sur laquelle reposent de nombreuses attentes (B).
Cependant, si les expérimentations successives engagées dans les années 1990 mettent en évidence
la possibilité d’adapter cette technique au secteur public local (C), elles illustrent également les dif-
ficultés et les limites attachées à cet outil (D). À la suite de la minimisation de la mobilisation des
acteurs du réseau local puis du réseau global (E, F, G), la consolidation des comptes ne constitue plus
un point de passage obligé entre ces deux réseaux, remplacée par la consolidation des budgets et des
risques (H).
Plusieurs enseignements peuvent être retirés de ce cas concernant l’échec de la diffusion d’un outil
de gestion dans le secteur public.
1/ L’importance de l’enrôlement des acteurs locaux dans le réseau global
L’une des raisons de l’abandon de la consolidation des comptes réside dans la distance entre
la consolidation telle qu’elle est imaginée dans le réseau global et ce qu’elle devient lorsqu’elle est
confrontée à la réalité des collectivités locales. Cette distance s’explique, d’une part, par la non-repré-
sentativité des porte-parole composant le réseau global et, d’autre part, par l’enrôlement indirect
d’acteurs locaux primordiaux.
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Les administratifs, les satellites ou encore les élus ont refusé le rôle imaginé pour eux. Cette
situation s’explique par l’enrôlement indirect de ces acteurs au niveau global. Les administratifs sont
imaginés comme des acteurs qui coopèrent à la mise en place de la consolidation suite à l’acceptation
politique de l’outil. Mais à la première occasion, ils redéfinissent la consolidation, voire lui préfèrent
d’autres méthodes. De même, les élus sont intéressés par la consolidation, il ne peut en aller autrement
au début des années 1990. Pourtant, leur intérêt pour les résultats de la consolidation reste faible.
L’enrôlement de cet acteur s’est fait sur la base de questionnaires (Boucher, 1993 ; Lande, 1996 ;
1998), qui mettent en évidence le souhait des élus (ou de leurs représentants) de mettre en place une
consolidation des comptes de l’ensemble des satellites. De surcroît, cet acteur est enrôlé sur la base
d’une vision idéalisée de ses besoins et de son mode de fonctionnement. Lorsque les professionnels du
secteur privé avancent que la consolidation des comptes constituera un moyen de gestion, ils envisa-
gent l’élu comme un utilisateur de l’information financière, au même titre que le gestionnaire d’une
entreprise privée, et ils anticipent le modèle d’information qui lui sera utile.
Il est donc nécessaire d’enrôler directement des acteurs locaux primordiaux dès le réseau global
(élus et administratifs notamment). Les administratifs jouent un rôle fondamental dans la mise en
œuvre de l’outil, ne serait-ce que par leur connaissance des relations de la commune avec ses satellites,
de l’information disponible, tandis que l’échec de l’enrôlement des élus peut s’avérer rédhibitoire pour
l’innovation. La prise en compte de leurs regards et de leurs intérêts doit ainsi permettre de réduire la
distance entre l’outil imaginé et l’outil dont les collectivités ont réellement besoin.
Les experts-comptables ont également refusé le rôle imaginé pour eux. Pourtant, ils sont largement
représentés dans le réseau global supportant l’introduction de la consolidation des comptes dans le
secteur public local. La cause de ce désintérêt réside dans la non-représentativité de leurs porte-parole.
Lorsque l’OEC propose une méthode de consolidation des comptes pour le secteur public, il est à la
recherche d’un moyen de s’ouvrir les portes d’un nouveau marché. En transposant les pratiques du
secteur privé dans le secteur public, il offre a priori un nouveau champ d’action pour la profession
comptable libérale. Cependant, peu de professionnels se sont engagés dans ce nouveau créneau en

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GRANDEUR ET DÉCADENCE DE LA CONSOLIDATION DES COMPTES
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démarchant par exemple les collectivités locales pour leur proposer leurs services. Les expériences
partenariales sont ainsi restées limitées. Or, comme évoqué supra, la formation des agents territoriaux
reposait sur la mobilisation des professionnels du secteur privé puisque les organismes de formation
des personnels administratifs n’étaient pas enrôlés dans le réseau global. Dès lors, l’implantation
durable de la consolidation des comptes nécessitait qu’un plus grand nombre d’experts-comptables
s’engage dans cette voie.
En outre, lorsque l’OEC développe une méthode d’analyse des risques périphériques des collecti-
vités locales (OEC, 1995), bien que les finalités de ces méthodes apparaissent à certains égards com-
plémentaires, il concurrence la consolidation des comptes et participe au raffermissement du réseau
global supportant cette alternative.
Ce constat est renforcé par le fait que la méthode de consolidation fondée sur la consolidation des
budgets et l’analyse des risques est le prolongement de l’idée du comité consultatif en 1991, où étaient
notamment représentés élus, administratifs et organismes de formation des cadres territoriaux.
2/ La concurrence des outils de gestion ou l’importance de la technique au niveau local
Au début des années 1990, l’impact du législateur dans les débats sur la consolidation est rela-
tivement faible. Il propose une information consolidée « a minima » dans la loi ATR. Deux raisons
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justifient son choix. D’une part, cette méthode est simple et applicable à toutes les collectivités locales
(sans distinction de taille, de moyens, etc.). D’autre part, ce choix est cohérent avec les lois de décen-
tralisation : l’État n’impose pas aux collectivités les outils nécessaires à la gestion des compétences
qu’il lui a transmis (Adans et Moraud, 1994). Mais en ne rendant pas obligatoire la consolidation des
comptes, le législateur l’a convertie en une décision politique locale. Le législateur a donc transformé
le marché global des collectivités locales françaises en un ensemble de micromarchés où la diffusion
de la consolidation devient nécessaire dans chaque collectivité. La consolidation des comptes entre
progressivement en concurrence avec d’autres méthodes de suivi existantes. Chaque collectivité se
change en une arène où s’affrontent des outils de gestion concurrents pour lesquels le rapport coût /
pertinence des résultats est primordial.
Il apparaît ainsi que dans un marché concurrentiel où chaque acteur à une grande latitude de choix
en matière d’outils de gestion, les caractéristiques intrinsèques de l’outil prennent une place plus impor-
tante qu’au niveau global où le jeu politique et les opérations de lobbying s’avèrent souvent décisifs.
3/ La capacité d’innovation du secteur public
Les partisans de l’application de la consolidation des comptes dans le secteur public local s’appuient
implicitement sur l’idée selon laquelle la modernisation de la gestion des organisations publiques
passe par la transposition des pratiques du privé au public. Toutefois, cette étude remet en cause cette
approche et illustre la capacité d’innovation des organisations publiques.
Dès lors, cette étude pose la question du rôle des consultants et des partenaires extérieurs des col-
lectivités locales dans le changement dans les organisations publiques : il semble que leur rôle doit être
celui de faciliter l’émergence d’innovations et de « bonnes pratiques » issues du secteur public plutôt
que de les concurrencer en transposant les pratiques du privé.
Aujourd’hui, la consolidation reste un concept polysémique et un outil protéiforme dans le secteur
public local français. Elle n’est toujours pas devenue une « boîte noire » pour l’ensemble des acteurs du
secteur public qui lui prête de nombreux objectifs disparates et l’imaginent sous différentes formes

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(Mattret, 2003 ; Le Bot, 2006). De surcroît, la « stabilité » à laquelle est parvenue la DGCP pourrait
être remise en cause par l’apparition de nouveaux acteurs dans le débat, à l’instar de l’International
Public Sector Accounting Standards Board (IPSASB), le normalisateur international de comptabi-
lité publique, qui a publié en 2001 trois normes comptables (IPSAS 6, 7 et 8) à l’attention des États
et des collectivités locales, relatives à la consolidation des comptes à partir de la transposition des
normes internationales de comptabilité privée, matérialisation d’une conviction qu’il est nécessaire et
possible de le faire. Dès lors, il n’est pas à exclure que les alliances constituées par la DGCP puissent
être remises en cause et que les porte-parole mobilisés ne désertent le réseau créé autour de la conso-
lidation des risques. Mais c’est une autre histoire.
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GRANDEUR ET DÉCADENCE DE LA CONSOLIDATION DES COMPTES
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Notes communes qui ont essayé de “consolider” dans un docu-


ment unique l’activité de l’ensemble de leurs satellites
1. Nous entendons par échec d’une innovation son n’ont pas débouché sur des résultats très concluants […]
abandon pur et simple mais aussi le fait que sa La consolidation suppose un “travail de titan” pour
diffusion, son utilisation ou son application soit reprendre l’expression du secrétaire général de Grenoble,
restée à un stade négligeable, bien en dessous des où il a fallu presque une année pour recenser les comptes
prévisions initiales. de l’ensemble des organismes […] Grenoble, comme
2. Notamment la 7e journée « Informatique et collec- Marseille ou Nîmes se sont trouvées face à une sorte de
tivités locales » qui s’est tenue du 21 au 23 octobre monstre hybride de la comptabilité, dont la complexité
1991, dont un atelier portait sur la consolidation des va parfois à l’encontre de l’objectif de transparence
comptes ; le colloque « Rencontres financières des recherché. » (De Gaulmyn, 1992, p. 6).
décideurs locaux » organisé le 27 novembre 1991 7. Les comptes rendus annuels à la collectivité locale ou
à Paris par le Crédit Local de France, dont l’un des CRACL sont des rapports d’activité que les sociétés
ateliers s’intitulait « Consolider les comptes : une d’économie mixte locales ont l’obligation légale de
vue globale de la situation financière » et au cours présenter aux collectivités locales chaque année.
duquel ont été abordés le recensement des engage-
8. Trois raisons principales peuvent expliquer ce phéno-
ments extérieurs et la mise en œuvre et l’analyse des
mène pour les quelques villes françaises concernées :
résultats de la consolidation ; le colloque organisé
par le cabinet Coopers & Lybrand et l’Association – l’utilité qu’accordent les élus à cette information ;
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des villes de France le 23 janvier 1992 à Paris, inti- – le maintien d’un savoir-faire participant à la renom-
tulé « La consolidation des comptes dans les collec- mée de la ville en matière de gestion ;
tivités locales, contrainte ou opportunité ? ». – l’abandon d’une telle information enverrait un mau-
3. Ce comité, mis en place en juin 1990 par Michel vais signal, susceptible de nuire à la crédibilité des
Charasse, alors ministre du Budget, était présidé élus.
conjointement par le directeur de la DGCP et le 9. Pourtant, la M14 prévoit la présentation de l’in-
directeur de la Direction générale des collectivités formation financière des communes par fonctions.
locales (DGCL) et comprenait 12 autres membres Il apparaît ainsi possible de consolider les comptes
parmi lesquels des élus, le président du Centre par fonctions, voire par politique publique (Lande,
national de la fonction publique territoriale, un 1996). Cependant, cette obligation est limitée aux
représentant de l’association nationale des adminis- plus grandes communes et peu d’entre elles ont fait
trateurs territoriaux, le président du Syndicat des le choix de présenter leur budget sur ce modèle,
secrétaires généraux, deux représentants de la Cour privilégiant l’approche « classique » par nature.
des comptes, un représentant du Conseil national Là encore, la consolidation par fonction n’est pas
de la comptabilité, un représentant de l’INSEE et devenue une « boîte noire » sur laquelle la consoli-
un représentant du ministère du Budget. dation des comptes aurait pu s’appuyer.
4. Selon les articles R3312-8 et R3312-9 du Code 10. À savoir les communautés de communes et les
général des collectivités territoriales, les restes à réa- communautés de villes.
liser correspondent aux dépenses engagées mais non 11. Notamment avec la création des communautés
mandatées à la fin de l’exercice budgétaire et aux d’agglomération et l’extension des compétences
recettes n’ayant pas donné lieu à l’émission d’un titre. des communautés de communes.
5. Pour une présentation synthétique des méthodes 12. Le réseau du Trésor public assure cinq missions
de consolidation mises en place dans ces collecti- principales pour le compte de l’Etat, du secteur
vités, voir notamment Rocher, 2006, p. 160-162. public local, des particuliers et des entreprises : il
6. Cette difficulté est notamment relayée par la presse recouvre les recettes publiques, il contrôle et exécute
nationale : « “Usine à gaz” selon le secrétaire général de les dépenses, il produit l’information budgétaire et
Nîmes, “magma financier” pour celui de Grenoble : les comptable publique, il gère l’épargne et les dépôts

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GRANDEUR ET DÉCADENCE DE LA CONSOLIDATION DES COMPTES
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de fonds d’intérêt général, il apporte son expertise 14. Source : www.colloc.bercy.gouv.fr/colo_struct_fina_


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Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 17 – Volume 2 – Septembre 2011 (p. 137 à 160)

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