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Une reformulation de l'approche dite du « balanced

scorecard »
Jean-Pierre Ponssard, Olivier Saulpic
Dans Comptabilité Contrôle Audit 2000/1 (Tome 6), pages 7 à 25
Éditions Association Francophone de Comptabilité
ISSN 1262-2788
ISBN 2711734110
DOI 10.3917/cca.061.0007
© Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/07/2023 sur www.cairn.info via Université de Tours (IP: 176.187.181.255)

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Jean-Pierre PoNssARD et Olivier Srwptc
t,NE REFORMI.JIÂNON DE LAPPROCHE DITE DU <BAT.ANCED SCORECARD I

Urue ,eformulation
de l'opproctrte d,ite
d,u ( balanced scorecard)
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Jean-Pierre PoNssenn et Olivier SeurBtc

Conespndomo: Jean-Pierre Ponssard


laboratoire d'économétrie de l'É,cole polpechnique
I rue DescanCI - 75005 - Paris
Té1. : 0 I 55 55 82 I 5 -email : ponssard@poly.polytechnique.Ê
Olivier Saulpic
l,aboratoire d'économétrie de l'École polytechnique et ESCP-EAP
79, avenue de la République - 75011 - Paris
té1. : 01 49 23 20 56-email : saulpic@escp.fr

* Ce travail a bénéficié du soutien financier de la FNEGE. Nous remercions Philippe Lorino, Nicolas Mottis et
un rapporteur anonyme pour leurs commentaires d'une première version.

CourrmurÉ - CoNrRôr^e - AnDIr / Tome 6 - Volume I - mars 2OOO (p. 7 à 25)


Jean-Pierre PoNssARD et Olivier Seurptc
UNE REFORMUIAIION DE IIAPPROCHE DITE DU IBALANCED SCORECARD t
I
En 1992, Kaplan et Norton (désormais KN) introduisaient dans un anicle de la Haruard Business
Reuiew t un nouveau cadre pour le pilotage des entreprises, cedle qu'ils ont dénommé Balanced
Scorecardt (désormais BSC). Cette approche est considérée par la limérature anglo-saxonne comme
I'une des innovations managériales les plus importantes de la décennie (Itmer et Larcker, 1998).
Le BSC a été développé en réponse âux critiques des qrstèmes classiques de gestion fondés sur un
découplage de la gestion opérationnelle, axée sur des indicateurs physiques et I'amélioration locale à
court terme, et de la gestion financière fondée sur la comptabilité, et donc essentiellement orientée
vers le passé (fohnson et Kaplân, L987).

lioriginalité du BSC, telle qu'elle est affichée par ses supporters, tient à deux principes majeurs :
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le caractère multidimensionnel de la performance, mesurée sur un ensemble d'indicateurs regroupés
selon quatre perspectives (financière, clients, processus internes, innovation et apprentissage), et
l'existence d'un modèle sous-jacent reliant ces différents indicateurs entre eur.

llobjectif de cette note est de proposer une reformulation de cette approche à panir de deux
idées. La première est propre au contexte français : il convient, dans un tel contexte, de capitaliser
sur la notion de tableau de bord qui s'est développée dans de nombreuses entreprises depuis les
années 1950 (Gray et Pesqueux, 1993; Chiapello et Delmond, 1994; kbas, 1994). Plusieurs
auteurs ont souligné la proximité et les différences enffe cette démarche et celle du BSC, notâm-
ment sur l'aspect multidimensionnel de la mesure de la performance (Epstein et Manzoni, 1998).
Par ailleurs, et cette seconde idée n est pas propre au contexte francais, le contrôle de gestion a
progressé pour accompagner les nouvelles formes de pilotage (axées sur la reprévision vers une cible
plutôt que sur une analpe des écarts, sur la coordination horizonale enue services pluôt que sur la
réalisation d'objecifs locaux, voir Chassan g, 1987 , mais aussi toute la littérature issue de la u gestion à
la japonaise> 3).Il est difficile de mettre en place un nouveau sJÆtème opérationnel dans fenueprise en
ignorant ces avancées qui mettent plus volontiers l'accent sur de nouvelles procédures (juste-à-temps,
gestion d. p*j.t ) que sur l'élaboration de modèles. Pour être présentes dans le diagnostic de KN, ces
avancées sont, à notre sens, insuffisamrnent mobilisées dans la démarche du BSC.

La reformulation proposée vise à bien intégrer ces deux idées. Elle s'appuie aussi sur une expé-
rience de mise en Guvre dans un grand groupe cimentier internationd, expérience qui consistait
précisément à rénover les tableaux de bord existants pour améliorer le pilotage opérationnel et non
pas à reconstruire l'ensemble des q/stèmes de piloage de I'entreprise. Dans cette expérience, la réfé-
rence à l'approche du BSC fut néanmoins déterminante (prise en compte de dimensions nouvelles
dans les tableaux de bord). En conuepartie, la âliation intellectuelle avec le renouveau du contrôle
de gestion apportait une réponse pratique à la question de la modélisation, qui constitue souvent un
point faible du BSC.
(ln autre âvântage de la reformulation e$ de permettre une articulation Êne entre les deux objec-
tifs affichés, mais souvent contradictoires en pratique, de meilleure coordination et d'incitations plus
fortes. Sur ce point, KN restent délibérément vagues, le BSC débouchant naturellement sur de
nombreux indicateurs qui ne sauraient être intégrés tels quels dans les qÆtèmes de compensation.
Au contraire, l'approche par le renouveau du contrôle de gestion débouche sur des procédures relati-
vement contraignantes au niveau des interfaces, procédures propres à générer indirectement les inci-
tations individuelles appropriées à la réalisation des objectiÊ communs.

CoMpBB[.rrÉ - C-rrNrrRôus - Auom / Tome 6 - Volume I -mars 2000 (p.7 à 25)


Jean-Pierre PoNsseno et Olivier Seuuprc
LJNE REFORMULAIION DE TiAPPROCHE DITE DU <BALANCED SCORECI4RD >

En définitive, la reformuladon proposée apparalt paniculièrement bien adaptée à la situation de


nombre d'entreprises abordant le BSC par I'amélioration de la gestion opérationnelle plutôt que par
une remise en qruse radicale de l'ensemble de leur rystème de pilotage. Par ailleurs, elle fournit des
réponses pertinentes à des questions théoriques lais#es en suspens.

Cet article est organisé de la manière suivante. La première section revienr sur les grandes lignes
de la démarche du BSC. Nous présentons ensuite les principaux éléments de la reformulation
proposée et ses principales différences avec le BSC (section 2), puis l'expérience à laquelle nous
avons pafticipé (section 3). En conclusion, nous discutons les réponses epportées par cefte reformu-
lation du BSC aux enjeux généraux du pilotage.
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Læ baknced scorecard

$'$ff,$,ffifififfi Le diasnostic
Selon KN, la grande entreprise connait une évolution qui I'amène à s'éloigner de plus en plus d'une
production de masse pour aller vers la production d'une large gamme de produits et de services. Si
la dichotomie des rystèmes de gestion, système financier et global d'un côté en combinaison avec
des systèmes physiques et décentralisés de I'autre, convenait à la production de masse, elle se rrouve
être un handicap ceftain face à l'évolution acuelle. En effet, alors qdil était suffisant de savoir si on
s'améliorait localement par repport au passé, il faut maintenant anticiper et reconfigurer rapidement
les coordinations internes. læs seuls indicateurs financiers constifircnt des signaux d'darme qui arri-
vent souvent trop tardivement. Il convient donc de les combiner à d'autres indicateurs plus straté-
giques pour analyser et interpréter en temps voulu la véritable situation de I'entreprise.

KN proposent de regrouper ces autres indicateurs nécessaires à la bonne compréhension des


enjeux selon trois volets : le volet commercial, le volet processus internes et le volet innovation et
apprentissage. Ces trois volets viennent s'associer au volet Ênancier pour constituer le tableau de
bord de l'unité. Pour chacun de ces quatre volets, ils identifient tout d'abord une série de leviers
génériques. Si on retrouve ici la décomposition du ROI en quelques leviers bien connus (prix, mix-
produits, besoin en fonds de roulement...), la nouveauté de la démarche tient sunout à I'articula-
tion que les auteurs s'attachent à construire entre les quâtre volets.
Alors que la grande entreprise est traditionnellement constituée de dépanemenrs ayant chacun
développé leur propre expeftise et leur propre système d'évaluation de la performance sur chacun de
ces volets, I'ambition du BSC est de donner I'occasion de repenser les interdépendances.

[,a maniète dont KN explicitent le volet innovation et apprentissage souligne cette ambition.
Dans un monde de plus en plus international oh les avanteges comperatifs sont plus construits que
donnés, le capital humain est un fadeur clé de succès des entreprises performantes. Il s'agit donc de
s'interroger en permanence sur la capacité d'apprentissage de l'entreprise : sélection et rétention des
meilleurs collaborateurs, maltrise des technologies de I'information et plus généralement efficacité
des outils et procédures organisationnelles sont autant de facteurs clés à relier aux fadeurs clés iden-
tifiés sur les trois autres vole$ à travers un modèle stratégico-financier.

CoupreorurÉ - CoNrRôLE - AUDII / Tome 6 - Volume I -mars 2000 (p.7 à25)


Jean-Pierre PoNSsARD et Olivier Snuntc
IINE REFORMUIAIION DE L]APPROCHE DITE DU .BAL4NCED SCORECARD,
10

La proposition de KN s une démarche top-douna


"ffi|ff$1ffiffi,i
Plusieurs exemples de mise en æuvre sont détaillés par les auteurs (1996b, p.78-79).Iæs principes
en sont les suivants :

- clarifier la suatégie de I'unité par des inrcrviews des principaux top managers de l'unité ;
- formaliser les résultats attendus de cette stratégie le long des quatre axes privilégiés par le BSC ;
- choisir quatre ou cinq indicateurs clés sur chaque axe ;
- concevoir un modèle synthétique reliant les stratégies possibles ;

- choisir une orientation stratégique pardculière, la quantifier grâce au modèle ;


- dédiner I'orientation retenue dans l'ensemble de forganisation à travers une mise à jour des
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systèmes d'information (o new exerutiue information ysteln>)
La phase de conception peut être achevée en 16 semaines, alors que la mise en place complète en
tant que procédure nouvelle de gestion (incluant la connexion du BSC au qÆtème d'information de
l'entreprise) peut requérir de deux à trois ans.
Il convient de noter que bien peu d'exemples de modélisations sont acnrellement décrits (voir sur
ce point Icner et lancker, 1998) à I'exception notable du modèle développé par Sears, Roebuck and
Company (Rucci et al,, 1998). Le plus souyent, on semble se contenter de faire figurer le même
indicateur dans les différents scorecards des unitâs censées se coordonner entre elles (voir par
exemple KN, 1996b, figure l0-8, p.245).
Pour favoriser la mise en place du BSC, les auteurs recommandent de capitaliser sur un enjeu
specifique lié au contexte particulier de l'entreprise. Cet enjeu peut, par exempler porter sur un
prorer de décentralisation dans une structure ou sur la prise en compte de synergies entre unités.
IJintégration d'un tel enjeu dans la démarche générale de mise en place du BSC doit permetue
d'ancrer les nouvelles pratiques dans des procédures régulières et favoriser I'adhésion des acteurs (et
non pas susciter des rejets au niveau intermédiaire associant volontiers le BSC à une nouvelle mode
managériale cotteuse en temps et en s)tstèmes d'information).

ffi La reformulation
ffi,tr$.ffiffi';$ Description de la démarche
La démarche proposée se présente comme une refonte de l'approche par les tableaux de bord,
refonre destinée à intégrer ceftains des principes mis au jour dans le BSC, plutôt que comme une
remise à plat de la stratégie de l'entreprise. Cette volonté de refonte doit évidemment s'appu1ær sur
un diagnostic approfondi des systèmes de pilomge existanc, diagnostic pennettant de vérifier et de
contextualiser le diagnostic général de KN.
Sous réserve du bien-fondé de ce diagnostic, il s'agit d'abord de fræionner les systèmes de
tableaux de bord physiques et les qystèmes de reporting fondés sur des indicateurs compables et
financiers. Il s'agit ensuite de mettre en place une procédure de reprévision qui porte sur I'ensemble
des indicateurs rerenus. Cette procédure de reprévision vient donc se substituer à I'idée d'une modé-
lisation a priori des liens entre indicateurs techniques et financiers et doit permettrc de réaliser avec
une plus grande efficacité I'ambition d'une meilleure coordination au sein de I'entreprise.

CoMprABIrrrÉ- Corrnôrc-Auolr /Tome 6 -Volume I -mars 2000 (p.7 à25)


Jean-Pierre PoNSSARD er Olivier SAuLplc
UNE REFORMLJTÂIION DE LAPPROCHE DITE DV < BAIT4NCED SCOREQ4RD ,

Lintérêt d'une plus grande réactivité de l'organisation, plutôt que I'aspecr novareur des quatre
axes du BSC, constitue donc la motivation première.

Au-delà de ces deux grands principes, revenons maintenant plus en détail sur ce qui fait la diffé-
rence entre le BSC et norre démarche.

,t $,Tjii' Tirois différences arrec le BSC


Les deux premières différences sont liées à l'intégration d'éléments propres aux tableaux de bord.
La troisième, qui est développée plus longuement, s'appuie sur la prise en compre des avancées
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du contrôle de gestion.

l) AU LIEU D'ADOPTER UNE DÉMARCHE TOP-DOWN,LAPPROCHE EST


À I-R rols ToP-DowN ET BITTzM-UP
Le diagnostic de KN part d'une dissociation rès préjudiciable entre les qrstèmes de pilotage
opérationnels et les systèmes financiers, et ils proposent une reconstrucrion complète de ces systèmes
Par une démarche top-down. Nous faisons I'hypothèse qu'il existe un savoir-faire technique impor-
tant à conserver dans les qrstèmes opérationnels existants. Pour en bénéficier, les nouveaux tableaux
de bord seront donc établis de façon décentralisée à partir d'un diagnostic de ces systèmes en tanr
que tels.
la direction de l'unité devra, en revanche, être mobilisée sur les points faibles qui sont peu ou
mal intégrés dans les systèmes d'information (aspect commercial, nouveaux produits, innovation,
capacité organisationnelle accrue, etc.), sans pour autant que la stratégie de I'unité en tanr que telle
ait besoin d'une mise à plat radicale t.
Cette approche vise à éviter deux types de risques. ks risques d'une démarche top-down concer-
nent suftout la non-prise en compte des contraintes opérationnelles lors de l'élaboration de la straté-
gie6, A contrario, une démarche purement botmrn-up peut occulter des aspects imponants en raison
d'une dissonance cognitive au niveau opérationnel.

2) SUBSTITUïON AU REPORTING E)CSThNT


[.a prise en compte simultanée d'indicateurs non financiers et financiers ne se fait pas par
I'adonction d'un nouveau q/stème et d'une nouvelle procédure de suivi aux systèmes existants (le
nouveau tableau de bord stratégique de la DG de l'unité et sa déclinaison dans l'organisation). Au
contraire, on cherche d'emblée à combiner indicateurs financiers et non financiers dans les tableaux
de bord qui sont utilisés dans la procédure de budget et dans le pilotage opérationnel.

Cela conduit à reconstruire I'ensemble des tableaux de bord associés à la structure organisation-
nelle existante ; d'emblée la démarche s'inscrit dans une perspective de pilotage opérationnel à tous
les niveaux, avec pour enjeu de rénover la dichotomie classique contrôle de gestion financier/gestion
industrielle des opérations sur des bases d'indicateurs physiques.
Le risque de la démarche BSC est en effet de rajouter un système de tableaux de bord sans
remplacer les systèmes existants et de rencontrer des difficultés pour faire survivre et prospérer le
BSC parmi l'ensemble des systèmes d'information concurrents (Epstein et Manzoni, 1998).

CoMpxAgturÉ- CoNrRôl^E-ArDtr /Tome 6 -Volume I -man 2000 (p.7 f2î)


Jean-Pierre PoNsscRD et Olivier Seulptc
UNE REFORMUTAIION DE LAPPROCHE DITE DU "BALANCED SCORECARD >

t2
La démarche proposée permer d'éviter l'écueil de la mise en place d'un qntème performant Pour
décider de la stratégie sans que les procédures de gestion (notamment la procédure budgétaire, clé de
voûte de la plupart des qystèmes de contrôle de gestion) soient aptes à supporter cette sffatégie
(Berry 1983).
IJintégration dans les sysrèmes existants permet aussi de poser d'emblée les questions techniques
en madère de sysêmes d'information. [.a démarche de mise en ceuwe proposée par KN fait Ïim-
passe sur la difficulté de la connexion du q/stème d'information managériale aux qntèmes transac-
tionnels ou de conduite industrielle des opérations. Or seule une connexion réussie entre ces
systèmes permer d'opérationaliser la démarche. En effet, les changements proposés ne peuvent être
acceptés et pérennisés par les opérationnels que si les nomenclenres sont cohérentes, les ableaux de
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bord ergonomiques et le qrstème managérial convivial.

3) REMPIACEMENT DE LÉLABORAIION D'tlN MODÈr F A PRION


PAR LINE PROCÉ,DURE DE REPRÉVISTON
Au lieu de chercher à construire d'emblée un modèle causal de la création de valeur, on cherche à
créer les procédures permettant l'émergence progressive d'une représentation commune des condi-
dons de la performance E. Pour cela, on se propose de mettre en place une procédure de reprévision
régulière d'objectifs annuels.
À I'idé. d'un modèle mécanisre, on oppose celle d'une procédure de coordination. Dans sa mise
en æuvre, cette procédure va certes souvent s'appuyer sur un modèle, mais les hlpothèses de ce
modèle doivent être partagées et son rôle se limitera à guider la réflexion collective dans une
démarche de rationalité interactive. Iæ modèle devient un suppoft à la décision collective et son
élaboration en e$ largement affectée (Ponssard et Tânguy, 1993 ; Ponssard, 1994).
Lidée d'une reprévision, quant à elle, rfest pas nouvelle (Doblin, 1986 ; Chassang, 1987). Elle
vise à répondre à une des critiques récurrentes des qrstèmes de contrôle de gestion classiques, à
savoir leur orientation vers I'analyse d'événements passés (Johnson et Kaplan, 1987)' en orientant la
prise de décision vers le futur.
Cela étant, le fait d'associer indicateurs opérationnels et financiers permet de raisonner sur les
dimensions opérationnelles des décisions tout en évaluant leur impact sur le plan économique. On
passe alors d'outils de type tableau de bord qui sont essentiellement fondés sur un pilotage sur des
indicateurs opérationnels e à des outils qui se rapprochent du type simulateur de vol '0. Les indica-
teurs financiers ne sont donc plus le reflet de la performance passée (" kg indicanrs r) mus la
tt.
traduction économique des actions envisagées (portant sur les o lead inàicanzJ ,) Cete traduction
peur être plus ou moins complète, d'otr I'importance de la notion de rationalité interactive.
Par ailleurs, I'association entre reprévision et combinaison d'éléments opérationnels et financiers
permer de progresser sur les auues enjeux du contrôle de gestion, à savoir : la coordination, les inci-
tations et I'apprentissage 12.
Coordînation
La reprévision doit êre l'occasion d'une discussion entre les opérationnels concernés, et donc un
lieu de coordination sur des bases opérationnelles et économiques. On peut alors par exemple éviter
des comportemenrs d'optimisation locale en montrant I'impact global d'une décision locde.

CoMrxABrr^rrÉ, - CoNrRôLE - AuDrr / Tome 6 - Volume I -mars 2000 (p.7 à25)


Jean-Pieue PoNss,{RD et Olivier Seulprc
tINE REFORMIJLAIION DE TAPPROCHE DITE DU IML4NCED SCORECARD ,
r3
Apprmtîssage
la procédure de reprévision, qui pofte coniointement sur des éléments opérationnels et finan-
ciers, est propre à susciter indirectement une demande de la part des opérationnels d'oudls d'aide à
la décision formalisant les relations technico-économiques et les interfaces entre services les plus
importantes. Elle permet donc de créer les bases d'un apprentissage collecdf sur les conditions de la
performance t3. Cet apprendssage s'appuie sur l'existence d'un savoir-faire répani et non formali-
sable en dehors d'un processus d'action, sur lequel il est possible de capitaliser pour créer les condi-
dons d'une meilleure réactivité organisationnelle. læ recours à des modélisations partielles intervient
alors à la demande des opérationnels eux-mêmes.
la reformulation proposée présente alors les avant€es suivants :
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- le savoir est constitué progressivement au travers d'une procédure habituelle sans recours à la
mise sur pied d'un projet spéciÊque, avec éventuellement l'intervention d'un consultant. Cel4
Permet de limiter les réticences des opérationnels, soulignées par Epstein et Manzoni (1993), à four-
nir I'information nécessaire à l'élaboration des modèles ta ;
- les contraintes techniques ou opérationnelles (essentiellement aux interfaces) seront prises en
compte neturellement dans les discussions enûe les opérationnels à l'occasion des reprévisions
(exemple : contraintes de gestion de la production lors d'un changement de politique commerciale),
alors que dans un modèle de la performance élaboré upar le haut , (comme dans la démarche
préconisée par KN) il sera difficile d'intégrer ce tFpe de contraintes.
il convient néanmoins de rester attentif aux risques suivanrs :

* retomber dans une gestion u comptable , de la reprévision, iest-à-dire se centrer sur les indi-
cateurs financiers, et donc ne pas expliciter les liens entre opérationnel et économique ;

- élaborer un modèle d'aide à la reprévision qui permette au contrôleur de gestion de réaliser


seul cet exercice. Il ny aurait alors pas de discussion entre opérationnels, ce qui enlèverait tout inté-
rêt à la procédure.
Iæ pilotage du projet de refonte des procédures de gestion doit donc être orienté vers la qualité
des exercices de reprévision afin de s'assurer qu'ils portent bien sur des enjeux de coordination entre
différents centres de responsabilité et sont I'occasion d'.rr, dialogue entre ces centres.
Incitatîans
Cela étant, pour que la procédure de reprévision fonctionne et permefte de prendre en compte
les recoordinations, il faut accepter de réviser les objectifs locaux ". Il y a donc un risque de réduire
la force des incitations 16. læ pari est alors double :

- le savoir commun généré par les exercices de reprévision permet au supérieur d'avoir une
meilleure appréciation de la pertinence des nouveeux objectifs calculés et de limiter ainsi les possibi-
lités de renégociation liées aux asymétries d'information 17 I

- I'affaiblissement des incitations sera compensé par les effets positifs sur la coordination.
l^a démarche proposée se combine alors facilement âvec une démarche visant à rénover par
ailleurs le système de rémunération ; en effet, par son c,râctère décentrali# et interactif elle permet
de mettre en évidence les indicateurs clés sur lesquels il est possible de construire (et de suivre !) ulté-
rieurement des incitations, et ceci à chaque niveau de I'organisation rs. Dans un contexte ft*ç"tt
dans lequel les incitations de type monétaire sont faibles, le système proposé permet d'accompagner

CoM!'rABrurÉ- CoNrRôl-E-AuDrr /Tome 6 -Volume I -man 2000 (p.7 \25)


Jean-Pierre Poussrno et Olivier Seugc
UNE REFORMUTâTION DE I']APPROCHE DITE DU *BAL4NCED SCORECARD,
r4
une orientarion vers des incitations plus fortes. En effet, les possibilités de renégociation permet-
ûonr de faire accepter progressivement une prise de risque plus imporante à des managers qui ny
sont pas habitués.
Les objectifs de la reprévision présentés ci-dessus renforcent l'importance de I'intégration des
nouveaux outils dans la procédure budgétaire au cours de laquelle les plans d'action sont discutés et
coordonnés, ainsi que I'intér& d'avoir une démarche botum'up.
Enfin, pour pouvoir prendre en compte des enjeux à long terme te, il convient certainement
d'étendre le principe des tableaux de bord et de la reprévision au processus de planiÊcation afin de
passer d'un horizon d'un an à un horizon stratégique. Il ne s'agira alors pas uniquement d'étendre
I'horizon des prévisions, mais de concevoir des ableaux de bord représentatiÊ des enjeux à long
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20.
terme
Au-delà de ces trois différences, on peut ajouter que la reformulation proposée paralt bien adap
tée aux entreprises multidivisionnelles qui visent à mettre en place des systèmes relativement
uniformes à travers I'ensemble de leurs divisions (même métier de base et benchmarking naturel
entre unités). En effet, dans ce cas, il est difficile de privilégier une unité pilote puis de généraliser;
il est préférable de tirer pani de I'expérience de différentes unités pour réaliser une synthèse. Cela
conduit à décenualiser la démarche dès le départ et à orienter les efforts sur laspect opérationnel
commun plutôt que sur les aspects spécifiques de la stratégie de telle ou telle unité. En outre, liargu-
menr du benchmarking permet de faire pâsser l'idée, a prioz mal perçue par les opérationnels, d'une
certaine standardisation des tableaux de bord (dans un premier æmps).
Par ailleurs, cette reformulation est bien adaptée à un contexte dans lequel âucune rupture straté-
gique n est envisagée à court terme 2r.
Enfin, la reformulation peut être complétée en s'inspirant du BSC par l'obligation de prendre en
compte systématiquement les quetre dimensions retenues par KN (ou d'auues, y' Epstein et
Manzoni, 1998) dans tous les tableaux de bord.

ffi fln exemFle de mise en (Eu're


(au sein d'un grand groupe cimentier)
IJexemple considéré concerne les unités cimendères appartenant à un grand groupe international.
La lettre de mission du chef de projet mentionnait deux objectiÊ :

- < avoir un système d'information commun à l'ensemble des unités cimentières à travers le
monde (plus de 50 unités) ;
- concevoir et metûe en æuvle les tableaux de bord qui permetuont aux responsables de ces
unités er aux différents niveaux de I'organisation de disposer des indicateurs dés permetant de
mesurer leur performânce et d'obtenir un meilleur pilotage de nos activités ,.
On peut déceler derrière ces deux objectiÊ opérationnels un souci de benchmarking interne, de
renforcement dune culture commune (notamment pour faciliter I'intégration d'unités nouvelles) et
plus généralement de capitalisation du savoir.
Deux unités opérationnelles furent retenues pour participer à la phase de conception du projet
(formulation des tableaux de bord, mode d'utilisation, etc.). Le comité de pilotage comprenait les

CoMprABILrrÉ - CoNrRôLE - Aupn / Tome 6 - Volume I -mars 2000 (p.7 à25)


Jean-Pierre PoNsseno et Olivier Sewptc
UNE REFORMULAIION DE LAPPROCHE DITE DV <BALANCED SCOREQARD o

deux responsables opérationnels de ces deux activités, un responsable fonctionnel niveau groupe
(en l'occurrence le directeur financier agissant en tant que responsable des systèmes d'information),
le responsable du projet assisté d'un consultant extérieur, co-auteur de cette note.
l,a conduite effective du projet s'est essentiellement faite en mobilisant des ressources internes
aux unités cimentières. Entre la conception du projet et le début de sa mise en Guvre il s'est écoulé
deux ans.
Bien que le projet ne ftt pas introduit comme une mise en æuvle de la démarche BSC, certe
référence est apperue progressivement comme utile à se concepruâlisation (notamment lors des
présentations internes). IJaspect BSC était particulièrement apparent de par la prise en compre
simultanée dans les tableaux de dimensions jusqu'alors analpées de manière indépendante ou rour
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simplement négligées (suivi d'indicâteurs phpiques, suivi budgétaire, suivi de questions de sécurité
et d'environnement, suivi des investissements, etc.).
Nous allons maintenant reprendre les aspects de ce projet directement en rapport avec notre
discussion.

,..ffi----fffiffi Aspecrc conioints toqt-doum et bottom-up


Cet aspect peut être illustré à propos de l'élaboration des tableaux de bord relatifs d'une part aux
directeurs usines et d'autre pert âuJ( directeurs commerciaux.

1) En ce qui conceme les directeurs d'usines, d'emblée la démarche fut plurôt bottom-up dans le
sens otr un sous-groupe fut constitué à panir de responsables des deux unit& pilotes avec comme
mission d'élaborer un tableau de bord commun. Cette tâche fut largement facilitée par l'existence
d'une direction fonctionnelle chargée du suivi des performances cimentières (niveau usines), et donc
par l'existence d'une batterie d'indicateurs techniques aux différentes phases du process. Ceci a
permis de vérifier le bien-fondé du diagnostic de KN quant à la déconnexion entre le pilotage tech-
nique des usines et le suivi financier des cotts (rythmes de reporting différens, absence de nomen-
clature commune, peu d'intérêt de la paft des opérationnels pour le suivi ubudgétaire ,, manque de
connaissance des enjeux opérationnels par les financiers et plus généralement clivage des cultures
techniques et gestionnaires).
IJenjeu de cette phase devait pofter sur deux points :

- intégrer suivi technique et suivi financier dans un tableau de bord commun ;

- sur un élément top-dnun non pris en compte dans les démarches existantes er concernanr le
suivi de la rentabilité des investissements : les directeurs usines avaient tendance à se battre pour
obtenir des investissements de manière à faire baisser leur cott direct sans tenir compte du cott
du capital.
Sur ce dernier point, le caractère à la fois np-dawn et bottorn-ap de la démarche permit de
déboucher sur une formulation acceptable et pouvent effectivement se traduire par des indicateurs
synthétiques de rentabilité du capital investi (en phase avec I'EVA, introduit par ailleurs à travers
une démarche essentiellem efi top-down).

2) En ce qui conceme les directions comrnocialzs,la démarche fut plutôt nVd.own du fait de l'ab.
sence de langage commun entre des unités appartenant à des contextes différents (marchés mtrs ou

CoMI'xABIurÉ - CovrrôLs - AnDrr / Tome 6 - Volume I -mars 2fi)0 (p, 7 à 21)


Jean-Pierre PoNsseno et Olivier Seurgc
UNE REFORMUIÂIION DE LAPPROCHE DITE DU OBAIANCED SCOREC,ARD O

r6
en croissance, niveau différent d'intégration verticale, différence dans I'impoftance relative des
segmenrs de distribution, etc.) et peu habituées à communiquer en interne sur ces sujets. Le comité
de piloage joua donc un rôle plus direct pour formuler les objectifr de la direction générale en la
matière (nécessité d'une segmentetion, besoin de connaitre la décomposition de la strucnrre de cotts
ajoutés, la rentabilité par clienrc, par marchés et par usines, etc.) ; il fut alors possible de capitaliser
sur I'unité qui était la plus avancéevis-à-vis de ces objectiÊ sans pour auta:nt mettre de côté la néces-
sité de laisser la place aux spécificités locales dans l'élaboration définitive des tableaux de bord.

fl,fi#I È-ÏfffÏ Sub stitution à des procédures existantes


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Même si la direction générale était convaincue du bien-fondé de la démarche, celle-ci devait être
vendue sur le terrain à des opérationnels pas forément gagnés d'avance (uencore une démarche
imaginée par le groupe sans intérêt Pour nousr...).
Lattitude du responsable du projet consista à montrer en quoi les tableaux proposés pouvaient
être considérés comme des améliorations par raPPort au dispositif existant.
Sans coller parfaitement à la structure organisationnelle (puisque celle-ci pouvait varier d'une
unité à I'autre), les tableaux reprenaient le découpage de factivité par grandes étapes (producdon,
logistique, ventes, administration et frais généraux), et par niveau hiérarchique (zones commerciales,
ateliers direction commerciale régionale, usines direction des ventes, direcdon exploitation
- -
direction générale) en assurant une cohérence dans les indicateurs mesurés à chaque
-étape/niveau, ceux-ci étant plus ou moins agégés dans le temps et par neture (rythme journalier,
mensuel, annuel et emboltement des nomenclatures).
Ces nouveaux tableaux de bord pouvaient donc légitimement se substituer :

- aux tableaux opérationnels de pilotage industriel et commercial ;

- aux documents supports pour l'élaboration et le suivi des budgets ;

- au reporring fonctionnel technique organisé par la direction de la performance cimentière sur


Ies unités de production à travers I'ensemble de Ia société.

En tout état de cause, la démarche devait avant tout être utile aux unités et non pas consister en
une sorte de reponing de celles-ci vers le grouPe.
Dans une telle démarche, I'infléchissement de la stratégie de chaque unité ne résulterait pas tant
d'une réflexion nouvelle mais plutôt de la capacité à mieux piloter l'unité du fait de I'accès à des
indicateurs nouveau)L Clairement, dans certains domaines, il ne s'agissait que d'aider à l'explicita-
tion progressive d'une stratégie existante pour en permettre une plus grande diffusion au sein de
l'organisation (on rejoint alors l'aspect benchmarking interne de la démarche).

,t-æ,,*.+-t*, Ia procédure de reprévision


Ce riest pas pârce qu'on retrouve les mêmes indicateurs dans différents tableaux de bord qu'on a mis
en place une capacité organisationnelle à se coordonner. De même, ce riest pas parce qu'on met sur
un même tableau des indicateurs physiques et des indicateurs Ênanciers gu'on a généré une capacité
à anticiper les interdépendances entre ces indicateurs et à prendre les bonnes décisions.

CoMprABr^mÉ - Covrnôrc - Auorr / Tome 6 - Volume I -man 2000 (p.7 à25)


Jean-Piere PoNssÂRD et Olivier Seuprc
IjNE REFORMUIAIION DE TAPPROCHE DITE DU *ML4NCED SCORECARD,

La démarche ffaditionnelle du BSC consiste à modéliser les interactions à travers un modèle


strâtéBico-économique.
Compte tenu de la démarche adoptée, et notamment de I'ancrage sur les niveaux opérationnels,
une telle ambition était tout simplement iréaliste (il aurait fallu faire un modèle intégré de
I'ensemble de I'activité à partir de plusieurs centaines d'indicateurs). En fait, iest par la mise en
place de procédures communes de reprévision que certe question fut abordée.
Typiquement, cela a consisté à mobiliser l'ensemble des responsables de I'organisation pour des
fin d'année tant sur les indicateurs techniques que
exercices réguliers de reprévision de résultats de
financiers. Donnons un exemple détaillé de reprévision.
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ffi*-l$,-,.fT'$,. fifi TENJEU opÉ,MrroNNEL,,
Les usines de ciment sont organisées autour de quatre étapes principdes de fabrication : préparation
du cru, broyage, préparation du combustible, cuisson. Chaque étape est sous la responsabilité d'un
chef d'atelier qui rapporte au directeur de I'usine.
Par exemple : le responsable de la préparation du combustible est supposé être informé d'une
baissedu prix du coke de pétrole, un des combustibles que I'on utilise pour la cuisson. Compre tenu
des données sur les prix et des capacités calorifiques des différents combustibles, il prévoit qu'un
o/o de charbon à 65 o/o de
Passage de 100 coke de péuole et35 o/o de charbon conduirait à une baisse
du cott de la thermie de 15 F/GJ à 8 F/GJ 'z3. Il propose donc ce changement au directeur de l'usine
qui décide de le merue en Guvre, anticipant une baisse globale du cott du ciment de 100 F par
tonne à 80 F par tonne.
Le changement est supposé mis en æuvre. Au cours du mois qui suit on constate, dans les
tableaux de bord quotidiens, des dérives sur les paramètres techniques de I'usine. En particulier :

- le responsable de la préparation du cru constate une augmentation de la consommation


d'électricité et une baisse de la qualité ;

- le responsable de la préparation du combustible constate une augmentation de la consomma-


tion d'électricité et du taux de soufre ;
-le responsable du four fait face à des problèmes de fiabilité qui conduisent à une baisse signifi-
cative des quantités produites.
Le changement de combustible a donc des effets en cascade non anticipés sur la producdon,
notamment la nécessité d'adapter le cru, qui conduisent à des problèmes de fiabilité du four.
[æs apports de la procédure proposée seront maintenant illustrés en soulignant les avantages par
rapport aux approches traditionnelles.

ffi.rT$,}*fi$l..l'ffi LES sysrÈMEs rRADrroNNELs


Chaque usine était traditionnellement pilotée par un tableau de marche (technique) pour chaque
atelier mis à jour mensuellement dans le cadre d'une réunion regroupant les responsables d'atelier.
Le contrôleur de gestion faisait une analyse classique des écarts dans une optique de reponing essen-
tiellement mais ne panicipait pas à la réunion de pilotage rcchnique.
Ce système conduisait assez naturellement à la poursuite d objectifs techniques locaux. On riar-
bitrera pas entre les différentes actions possibles en tenant compte de leur impact économique. On

CoMpTABftrTÉ- CoNrRôre-ArDn /Tome 6 -Volume I -mars 2000 (p.7


^25)
Jean-Pierre Potqsseno et Olivier Snuplc
LINE REFORMUTAIION DE LAPPROCHE DITE DU rBAI.ANCED SCORECARD,
l8
risque dors de se concentrer sur les dérives techniques importantes, mêmes si leurs conséquences
économiques sont faibles, et de négliger des dérives techniques mineures mais dont les conséquences
,or la p.Àrmance économique sont importantes. De façon plus précise, on Peut envisaçr les deux
scénarios suivants :

- est possible pour le responsable de la cuisson de limiter les arrêts grâce à des investisse-
soit il
men$ nouveaux 24. Dans ce cas, on âura une fuite en avant qui risque de détruire la valeur a$endue
par la décision de changement de combustible. En effet, les investissements considérés seront faits
sur la base d'une situation de référence dégradée'5 ;
- soit il n'est pas possible de revenir, par des investissements, à la performance préwe au budget,
et le responsable du four aura alors comme seule marge de manæuvre de convaincre d'abandonner
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le projet au détriment de la performance économique globale.

$iii LE sYSrÈME PRoPosÉ,


Dans le cadre du système proposé, les tableaux de bord quoddiens sont encore constitués d'indica-
teurs techniques. Au cours du mois, seules des mesures locales seront donc prises pour limiter les
dérives constatées sur les indicateurs techniques.
Cependant, à la fin du mois, le directeur de l'usine demandera à ses collaborateurs de se livrer à
un exercice de reprévision sur les paramètres qui semblent avoir été affectés par le changement de
combustible. Ces reprévisions seront consolidées par le contrôleur de gestion de I'usine et discutées
en réunion.
La reprévision se fait dans les ableaux de bord mensuels et porte donc conjointement sur les
éléments opérationnels et leur traduction Ênancière. læ scénario discuté peut être schématisé par
le tableau ci-dessous.

Extrait des tableaux de bord (données fictives)

PnÉusroru RÉAu9ÉÉ $ns


Sm.nnon nmnu RrPRÉvrsron
DE N DÉOSION INIIIAU

Préparation du combustible
Consommation d'électricité KWM 10 10 15
Coût du combustible/Gj vGt 15 8 9

Préoaration du cru
KFUI* Yo 10 10 15
Quantités produites tcru/mois 50 000 50 000 47 000
Coût du cru Flt 14 14 15

Cuisson
Efficience des équipements o/o
70 70 50
Quantités produites tclinker/mois 32 000 32 000 28 000
Coût de cuisson Flt ck 60 40 50

Usine
Quantités produites t cimenVmois 40 000 40 000 3s 000
Cott du ciment F/t ciment 100 80 90

* lndicateur de qualité du cru (Kiln M UniformiU lndex).

CoMFTABrJTÉ - Co$rRôLE - AtDr / Tome 6 - Volume I -man 2000 (p.7 \25)


Jean-Pierre PoNSSARD et Olivi€r SAuI,prc
UNE REFORMUI.AIION DE LAPPROCHE DITE DU IBAIJ4NCED SCORECARD ,
9
La réunion p€rmet de discuter les possibilités de modifier collectivement ces prévisions. Elle se
conclut par le choix d'un scénario qui est alors traduit dans les tableaux de bord des différents mana-
gers.On substitue donc à une analyse budgétaire classigue d'écarts, confiée au contrôleur de gestion
etsens grand intérêt, un pilotage technico-économique dans lequel les responsables concernés
Peuvent prendre conscience de I'interaction entre leurs engagements respectifs (retard dans une
opération de maintenance, décalage d'un arrêt de four, accroissement de volume suite à la fermeture
momentanée d'un autre site...).

Dans le cas présenté, la question qui se pose est de savoir s'il est ou non souhaitable de réduire les
capacités pour réduire les cotts. Il convient ceftainement de soumettre le scénario envisagé au
niveau de la direction générale de I'unité pour valider que la perte de capacité rt'aura pas d'impact
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sur les prévisions commerciales ou envisager une répartition différente des producdons entre usines.
Il s'agira alors de urecoordonnerr les plans d'actions au niveau de I'unité (qui regroupe commercial
et production).

*ry'.HË,$t---ffi ARTrcutArroNENTRECooRDrNArroNETrNCrTAfl oN
La procédure proposée conduit à une révision des objectifs locaux. Par exemple, si le changement de
combustible est maintenu, on devrait assister à une baisse du cott du ciment, mais à une hausse du
cott du cru à la tonne. En l'absence de révision à la baisse de I'objectif correspondant, on imagine
aisément que le responsable de I'atelier concerné rt'adhérera pas à la décision. La poursuite de son
objectif local pourrait conduire à un échec global du changement de combustible. La possibilité
d'expliciter les gains économiques associés à une décision technique et à réviser les objectiÊ locaux
permet donc de favoriser la coordination.

On peut évidemment penser que cette procédure va limirer les incitations en multipliant les
occasions de renégocier, et donc de prendre des n matelas > en vue de négociations futures. Pour
éviter cette dérive, un bonus collectif a été directement associé à la capacité de I'usine à bien antici-
Per ses cotts annuels moyens. Llidée est la suivante : en fin d'année une prime est accordée en fonc-
tion d'un indicateur P construit comme indiqué ci-dessous :
Soit
X (n) = (cott annuel moyen constaté anticipation du cott annuel moyen au mois n)t
-
On définit I'indicateur P par :

p = n*X (n)
Plus P est élevé, moins I'usine a été capable d'anticiper à I'avance l'évolution de ses cotts et donc
moins elle upilote , llusine rrers une cible maltrisée. Donc, plus P est élevé, plus la prime sera faible.
l^a procédure retenue encourage donc I'apprentissage collectif sur les conditions de la perfor-
mance. On ne propose pas de modèle a priori de la performance de I'usine. À ce modèle, on substi-
tue une procédure de reprévision autour de paramètres techniques et économiques, procédure qui
favorise l'émergence d'une représentation commune des conditions de la performance. Dans norre
exemple, la reprévision permet de menre en évidence la nécessité de modifier le cru à la suite du
changement de combustible et les conséquences sur la fiabilité du four.

CoMpnlrlurÉ- Corqrnôm-Auorr /Tome 6 -Volume I -mars 2fi)0 (p.7 f 25)


Jean-Pierre PoNss,{RD et Olivier Srwptc
UNE REFORMUIÂIION DE LAPPROCHE DITE DU IMI/ NCED SCORECARD '
20
I-e faitde raisonner sur un scénario technico-économique permet de centrer la discussion sur les
interfaces entre services et les engagements à respecter dans notre eremPle, le maintien du niveau
de vente pour obtenir le but recherché sans qu
-il soit nécessaire de développer un modèle
-
complet de la conduire de l'usine.

Cela étant, il
est clair que dans la réalité l'évolution des indicateurs résulte de plusieurs actions
dont les impacts sont mêlés, ce qui peut limiter les conditions d'apprentissage.

Déjà en place dans cerraines unités, et ayant permis une amélioration manifeste dans la prévisibi-
lité et la maîtrise des cotts, la transposition de cette procédure fut considérée comme un transfert de
umeilleures pratiques > er non pas comme I'imposition d'une procédure lourde et cotteuse. Dans
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ceftaines unités nouvellement acquises à I'idée, il fut considéré que des outils d aide à [a reprévision
devaient venir conforter les opérationnels d'une part pour opérer des reprévisions automatiques sur
les postes n faciles , et, d'autre part, pour modéliser certaines interactions u techniques- D entre Para-
mèires. Le besoin de modélisation est donc apparu etc post et de façon non uniforme au sein
de I'enueprise.

Cette procédure de reprévision a été généralisée pour devenir l'un des éléments clé de la
démarche mise en æuvre. Avec des rytlmes appropriés, cette procédure doit s'appliquer à la coordi-
narion intersites à propos des questions de gestion de producdon, à la coordination entre la direc-
tion technique et les usines à propos des plans d'investissement' etc.

FrÏ#,,ffi Autres points

Cette expérience de mise en æuvre suscite par ailleurs quelques réflexions sur des points rarement
relevés dans la littérature :

. Lenjeu associé arD( aspecrs prremenr informatiques (interconnexion des systèmes) est très
imporrant sachant qriil faut sans cesse naviguer entre deux extrêmes : ou bien présenter la démarche
comme pouvanr se conrenter du upapier crayonD (ou logiciel de type Excel), mais:lors on ne peut
pas se ,aoordet aux s"srèmes informatiques erdstents doùr une grande lassitude des opérationnels
après quelques mois d'enrhousiasme, ou bien umettre le paquetu sur les esPects informatiques,
cà qui prendra beaucoup plus de temps que prévu, et perdre de vue I'aspect managérial du projet
(les interlocuteurs concernés au sein des unités sont alors différents).

. [.a formation consrirue un autre élément à ne pas négliger pour assurer la réussite du projet :

les conuôleurs de gestion sont la cible privilégiée pour cette formation car ils deviendront les
gardiens de la nouvelle procédure et doivent à ce titre pertager la nouvelle philosophie du rystème de
gestion (il y a aussi un risque qu'ils soient les principaux acteurs d'un retour au passé).

. La lourdeur d'un tel projet (un projet de plusieurs années pour des retombées somme toute
assez nsoft u) requierr pour se réussite un encouragement constant de la direcdon générale ; en I'oc-
currence, cer encouragement fut obtenu de par la volonté de celle-ci d'introduire tous les ingrédients
propres à la ucréation de valeur u, le BSC étant l'élément naturel pour décliner cette démarche à un
niveau opérationnel.

CoMprABtLrrÉ, - Cor.r'rnôrs - Auott / Tome 6 - Volume I -mars 2000 {p.7 à21)


Jean-Pierre PoNSSARD et Olivier Sewptc
TJNE REFORMULAÏION DE LAPPROCHE DITE DU .MLANCED SCOREQ4RD o
2l
Conclusion

Les réponses appoftées aux enjeux du pilotage privilégient exagérément, selon nous, I'une ou I'autre
des deux dimensions suivantes :

- le recours à un q'stème d'incitations fortes associées à l'atteinte d'un objectif fixé u arbitraire-
ment D dans un contexte où les échanges d'informâtion sont volontairement limités. Dans ce qrye
de contexte, la performance est souvent résumée per un indicateur financier unique et les incitations
se traduisent par une forte variabilité des rémunérations. Les qrstèmes d'incitations sont censés
gerantir I'alignement des objectifs des managers le long de la voie hiérarchique (o internzl gouaer-
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nancer), et conduire ces derniers à prendre les décisions permettant de maximiser la valeur pour
I'actionnaire;

- le recours à des rystèmes me$ant I'accent sur les échanges d'informations offrationnelles. Ces
systèmes - -
le cycle plan-budget-contrôle, par exemple reposent sur une coordination ac ante des
plans d'actions suivie d'une mise en osuvre décentralisée de ces plans d'actions sur la base d'incita-
tions au respect d'un objectif local. Des outils sont alors mis à la disposition des opérationnels pour
mettre en æuvre ces plans d'actions, et I'analpe des écarts par rapport aux prévisions doit permettre
I'apprentissage collectif des conditions de la performance.

l,a théorie des contrats nous apprend qu'il existe un dilemme fondamental enrre ces deux dimen-
sions. Par exemple, on peut formellement montrer que l'introduction de la renégociation dans des
contrats dynamiques favorise les ajustements mais diminue en contrepartie la force des incitations
(Milgrom et Robers, 1992, chapitre'/ ; Crémer,1995). De fait, les nouvelles approches du pilotage
fondées sur I'analyse des activités et des processus (Lorino, 1991) ou sur la gestion de projet (Midler,
1990) laissent en suspens la question des incitations. A contrarto,les approches fondées sur la créa-
tion de valeur et le renforcement des incitations ignorent la question des interdépendances organisa-
tionnelles (Mottis er Ponssard, 199ù.
Il nous semble important d'éviter un balancement excessif enûe ces deux positions extrêmes 26 et
de réfléchir conjointement aux problèmes d'incitation et de coordination et à la nécessité de faire en
pratique des compromis.
IJapport du BSC est alors d'introduire, dans le contexte acuel largement dominé par les incita-
tions et la création de valeur pour I'actionnaire, la prise en compte d'éléments de long terme et de
coordination au travers de la combinaison d'indicateurs financiers et non financiers. Notre
démarche permet ainsi de prolonger la réflexion du BSC en présentant de nouvelles pistes de mise
en æuvre des principes généraux énoncés par KN. Ces pistes sont fondées sur trois principes :
. Les outils de contrôle doivent être pensés comme des outils de dialogue (Ponssard et Tânguy,
1993). Cela signifie que les échanges d'informations lors des phases de prévision sont plus impor-
tents que le respect des prévisions et que les procédures de suivi des réalisations doivent mettre
I'accent sur les échanges latéraux et verticaux d'information opérationnelle.
. Léchange d'information s'accompagne de pertes d'incitations qdil convient de compenser.

' Les outils doivent favoriser l'émergence d'un modèle liant enjeux opérationnels et perfor-
mance financière pour âugmenter l'observabilité des décisions et, par suite, limiter les pertes d'inci-
tations.

CoMprÂBrlrrÉ- Corrnôm-Auorr /Tome 6 -Volume I -mars 2fi)0 (p,7 t25)


Jean-Pierre Poxssano et Olivier Sewptc
UNE REFORMLJTAflON DE LAPPROCHE DITE DU rBALANCED SCORECARD >

22
Nous pensons que ces trois pistes sont de nature à participer à une réflexion visant à sortir
de I'alternative entre sysrèmes d'incitations fomes et qFstèmes visant à une meilleure coordination
en mettent notamment en aYânt I'importance de l'apprentissage.
S'il est clair, et rassurant, que le BSC comporte des éléments communs avec le tableau de bord
uà la françaiseu, ce dernier nous semble inscrit dans une tradition de pilotage asssz peu préoccupée
par les questions d'incitations. De ce point de vue, la littérature sur le BSC nous est epperue comme
une source d'inspiration féconde pour le renouvellement des systèmes de pilotage de l'entreprise.

Noles d'élaboration du modèle et aussi importante que


la phase d'utilisation du modèle. On prolonge
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l. Kaplan et Norton (1992). Cet article a été le donc cette analyse en mettent I'accent sur les
premier d'une série de trois articles (KN, 1993 ; conditions d'élaboration du modèle ou plus préci-
KN,1996a). sément du savoir commun.
7 La traduction française la plus courante est
9. Or, si les indicateurs financiers ne sont que la
o rableau de bord prospecdfu. traduction des actions passées, les indicateurs
3. Voir notamment Aoki (l 98O. phpiques ne sont pas en soi des indicatzurs de
4. qf IA{ 0996b, p. 8) : uobjectives and measures performance économique. Il convient donc de
for the Balanced Scorecard [.. .] are derived from a faire des hypothèses sur I'impact des objectifs
top-down process driven by the mission and stra- opérationnels sur la performance finencière afin de
tegy of the business unit , et le tiue du chapiue 9 : pouvoir piloter sur des indicateurs opérationnels.
uAchieving Strategic Alignment: From Top to 10. Restant ainsi dans la ligne des principes énonc&
Bottom o. par KN (1996b, p. 30).
De nombreuses méthodes préconisées pour la I l. Mesurer I'impact économique des décisions rfest
mise en place de tableaux de bord visent aussi à pas toujours facile. En paniculier, il n'est pas
allier les démarches ap-dawn(autravers de la défi- évident de mesurer l'impact économique de la
nition des objecdfs) et boxom-up (puisque ce sont réduction du cycle de développement d'un
les managers qui définissent les indicateurs clés produit ou du taux de satisfaction de la clientèle. Il
pennettant d'atteindre les objectifs définis). nous semble néanmoins difficile de prendre des
6. Ce risque est d'autant plus important que iest décisions sur ces sujes sans s'intéresser à leur
précisément dans les entreprises ayant une forte impact économique. la pr.océdure proposée vise
composante industrielle que le diagnostic de KN alors à inciter à expliciter les hypothèses sous-
s'applique ; il est alors difficile d'élaborer un jacentes sans préjuger de la capacité effective à
modèle de performance sans I'appui des o ingé- quandfier précisément I'impact financier de ces
nieurs >. A contrario, ce modèle est peut-eûe plus décisions.
facile à élaborer lorsque les contraintes opération- 12. Ces enjeux sont implicites dans la définition du
nelles sont plus faibles (par exemple, pour une contrôle de gestion d'Anthony (1988) comme
compagnie d'assurances), mais le diagnostic de ( processus par lequel les managers influencent
KN est alors moins pertinent. d'autres membres de I'organisation pour mettre en
7. Cette limitation de la démarche du BSC à la direc- æuwe les stratfties de cette organisation o.
tion générale est aussi soulignée par Chiapello et 13. On rejoint ici les travaux récents qui mettent
Lebas (199O et Mendoza (1998, p. 57). Certes la simulanément en anant I'importance de la modé-
dédinaison est envisagée (KN, 1996b, p. 8), mais lisation technico-économique et de l'apprentis-
jamais décrite. sage dans la conception des systèmes de gestion
8. Plusieurs âuteurs (Epstein et Manzoni, 1998 ; (fugrrir et Schôn, 1978 ; Hatchuel et Weil, 1990)
Chiapello et læbas, 1996) soulignent que la phase et qui ont conduit à une rénovation des qÆtèmes

CoMprAlrurÉ - CotirrRôt-E - Auon / Tome 6 - Volume I -mars 2000 (p.7 à25)


Jean-Pierre PoNSSARD er Olivier Sauuprc
UNE REFORMULAIION DE LAPPROCHE DITE DV <BALANCED SCORECARD
"
23
(Midler, 1994 ; Ponssard
de gestion prévisionnelle 19. Ce qui constinre un des objectifs du BSC.
etTânguy, 1993; SoleretTânguy, 1998; Saulpic 20. Pour une illustration, voir Thnguy (l 989).
etTânguy,1999).
21. Cela étant, même dans un cas où une telle rupnrre
14. Cette information étant pour eux source de est envisagée, I'existence d'une représentation
pouvoir (Crozier et Friedberg, 1977). commune des conditions de la performance
15. Ce point sera illustré élaborée u par le bas u peut permettre de valider la
^uparragraphe3.3.4. faisabilité d'une réorientation stratégique élaborée
16. Cette pene d'incitation peur provenir de ce que la
à panir d'une réflexion stratégique menée opar le
théorie des contrats appelle ueffet de cliquet ,
(Dewatripont, 1989) et qui r&ulte de la tentation haut u en introduisant les contraintes techniques

pour le supérieur de réviser un objectifà la hausse et opérationnelles dans la mise en Guyre de cette
réorientation (Tângun I 989).
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lorsqu'il constate que I'objectif fixé initialement
s'avère aisé à atteindre, ou du problème de uhold- 22. Ce cas a été élaboré à partir d'une enpérience réelle
up u qui correspond à des situations otr la possibi- dans le cadre d'une mission d'assistance à la mise
lité de renégocier leur objectif conduirait les en place des nouveaux tableaux de bord. Il fait
acteurs à limiter leur effort à une tâche spécifique partie d'un module de formation destiné à
dont ils ne pourraient tirer un r6ultat que dans le illustrer les effets attendus du qrstème auprès des
cadre de leur fonction ou entreprise actuelle responsables techniques et des directeurs d'usine.
(Han, 1995). 23.Pour des raisons de confidentialité, les données
17. Une autre piste consisterait à permertre d'intégrer sont fictives. Seules les tendances sont respectées.
les tâches de coordination dans l'évaluation de la 24.Sachant que le retour à la performance prévue
performance. Les travaux de théorie des contrats dans le budget n'est pas possible sans investisse-
qui étudient les conséquences de la multiplicité ments (f reprévision dans le cadre du nouveau
des tâches à accomplir par les agents sur les incita- s)'stème).
tions (Holmstrôm et Milgrom, l99l) suggèrent 25,C*ci explique pourquoi on ne retrouve pas dans le
pour celad'utiliser une procédure d'audit. Sinclair- ROI (ex pox) la moyenne des TN (ex ante) dæ
Desgagné (1999) montre en effet comment il esr projets d'investissement zuccessiÊ dans l'unité.
possible d'obtenir des inciations fortes simultané-
26. Ce constat est implicite dans le développement du
ment sur une tâche dont le r&ulat est mesurable
BSC, puisque le fait de rendre la performance
(quantités produites) er sur une tâche dont le
multidimensionnelle le conduit à remenre en
r6ultat ne l'est pas facilement (qualité). Pour cela,
question les systèmes d'incitations fortes fondés
il convient de mettre des incitations monétaires
sur un indicateur unique. À I'in".rse, il semble
sur les quantiÉs, de déclencher un audit sur la
que dans la démarche tableau de bord u à la fran-
qualité si les quantit& dépassent un certain seuil,
çaiseo on insiste soit sur la contrôlabilité des
de renforcer les incitations si l'audit est positifet
objectifs, ce qui signifie une séparation des
d'annuler les primes si I'audit st négatif, Si I'on
responsabilités et la résolution séparée dans le
fait I'hypothèse que les difficult& d'inciation à la
temps des problèmes d'incitation (ex post) et de
coordination proviennent de la difficulté de coordination (ex ante par le budget), soit on
mesure des résultats, I'objectif est de rendre n audi-
accepte des indicateurs nphpiques u r&ultant de
table o la coordination. Le modèle liant enjeux
l'action de différents responsables (Chiapello et
opérationnels et performance financière peut
Lebas, 1990, mais la question des incitations est
contribuer à aller dans ce sens.
alors laissée en suspens.
18.Comme nous I'avons souligné, KN riabordent
qu'indirectement la question des incitations.
Notre reformulation est en accord avec eux sur la
nécessité de définir les incitations apr& avoir mis Anrnor.ty R.N. (1988), Tbe Management Control
en évidence les problèmes de coordination. lwnction, Harvard Business School Press, Boston.

CoMprABIurÉ- Con-rnôrs-AnDn /Tome 6 -Volume I -mars 2fi)0 (p,7 \25)


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