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© Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 25/03/2023 sur www.cairn.info via Université Hassan II (IP: 196.200.191.18)
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cas des offices de notaires
Setting up a management
control system in independent
professions : the case
of notary public offices
Laurent CAPPELLETTI* et Djamel KHOUATRA**
Résumé Abstract
L’article étudie la problématique de l’im- This article examines the problematics of
plantation d’un système contrôle de gestion management controlling in independent profes-
au sein d’entreprises libérales, au travers du sions through the case study of 350 notary pub-
cas de 350 offices de notaires. La question lic offices. The question could be summarized
de recherche étudiée peut être résumée en in these terms : what are the contributions of a
ces termes : quels sont les apports d’un sys- management control system in independent pro-
tème de contrôle de gestion dans une entre- fessions and what are the key factors of success
prise libérale et quels sont les facteurs clés de of management control setting up in such small
succès de l’implantation d’un tel système au businesses ? To answer this question, a « quali-
sein d’entreprises de petite taille ? Pour étudier metrics » methodology of research has been used,
cette question, la méthodologie de recherche which combines the qualitative model and the
choisie est « qualimétrique » conciliant modèle quantitative model.
qualitatif et modèle quantitatif.
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Remerciements : Les auteurs remercient vivement les deux rapporteurs pour leurs remarques et sugges-
tions ainsi que le professeur Sylvain Biardeau pour ses conseils techniques.
Introduction
Cet article étudie la problématique de l’implantation d’un système contrôle de gestion dans les entreprises
libérales, au travers du cas de 350 offices de notaires. La question de recherche étudiée peut être résumée
en ces termes : quels sont les apports d’un système de contrôle de gestion dans une entreprise libérale
et quels sont les facteurs clés de succès de l’implantation d’un tel système ? L’article utilise le terme de
contrôle de gestion dans le sens de management control. Il s’intéresse en effet aux systèmes de contrôle de
gestion managériaux tels qu’ils ont été décrits par Anthony (1956, 1965, 1988) et Simons (1987, 1995,
2000). Il est centré, au travers du cas du contrôle de gestion socio-économique, sur les systèmes de
contrôle articulant outils de règles et de mesure avec des outils agissant sur les comportements des acteurs.
La question de recherche présente des enjeux pratiques puisque les entreprises libérales, et au-delà
les toutes petites entreprises, sont souvent dotées d’un système de contrôle de gestion rudimentaire
(Marchesnay, 1993 ; Plane, 1999 ; Parsons, 2004). Or, à l’heure de la mondialisation croissante, des
pertes de monopole et de l’hypercompétition (D’Aveni, 1994), les entreprises même de petite taille
sont confrontées à la gestion stratégique de leurs coûts. Par ailleurs, d’un point de vue théorique, si
le champ du management control est bien étudié lorsqu’il s’applique aux grandes entreprises, il l’est
moins concernant les entreprises de petite taille et les entreprises libérales en particulier, telles que
les cabinets d’avocat ou les offices de notaires. Or les professions libérales sont confrontées à de nou-
velles contraintes stratégiques qui leur imposent de mieux contrôler leur gestion : exigence accrue des
clients, intensité de la concurrence, perte de monopoles, etc. Le chef d’entreprise libérale étant le plus
souvent néophyte en gestion, il est confronté à une problématique d’implantation dans son entreprise
d’un système de contrôle de gestion adapté (Maister, 1993, 1997 ; Cappelletti, 2007).
Pour apporter des éléments de réponse à la question de recherche, la méthodologie choisie est
« qualimétrique » (Savall, Zardet, 2004). L’approche qualimétrique consiste à concilier les modèles
qualitatif et quantitatif pour accroître la validité des observations réalisées sur un objet d’étude.
Cette approche reconnaît la complémentarité des recherches qualitatives et des recherches quantita-
tives comme l’ont souligné également Burlaud, Teller et al. (2004). L’approche qualitative retenue a
consisté à implanter un système de contrôle de gestion socio-économique au sein de 350 offices de
notaires entre 1998 à 2004. Cinq variables explicatives de la réussite de l’implantation du système
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de contrôle de gestion ont fait l’objet d’analyses multivariées : l’implication du dirigeant dans l’im-
plantation du système de contrôle de gestion, la taille de l’entreprise, la compétence de l’intervenant
en contrôle de gestion, la compétence du dirigeant et de son encadrement en contrôle de gestion
(Cappelletti, Khouatra, Beck, 2007). Pour exposer les résultats de la recherche, l’article comprend
trois parties : la première partie expose le cadre théorique de la recherche centré sur le management
control et les entreprises libérales, la deuxième partie décrit la méthodologie de recherche mobilisée et
son protocole, enfin la troisième partie présente et analyse les résultats de la recherche.
Anthony est considéré comme l’auteur de référence en management control (Bouquin, 2005).
Il définit dans un premier temps le contrôle comme « le processus consistant à assurer que l’organisa-
tion fait ce que le management veut qu’elle fasse » (Anthony, 1956). L’expression de management control
n’apparaît pas encore à cette époque dans ses travaux, bien que les expressions de management control
ou managerial control aient été employées avant ses travaux. Ainsi lorsque Sloan (1963) présente le cas
General Motors, il utilise l’expression de managerial control pour désigner un état organisationnel qui
permet aux managers d’affirmer qu’ils ont le contrôle. Bien avant, Mary P. Follett (1924) considérait
déjà l’entreprise à la fois comme une entité économique et une unité sociale devant faire l’objet d’une
analyse socio-économique. Pour Follett, le contrôle doit être appréhendé selon une perspective psycho-
sociologique car il constitue un instrument de coordination des personnes dans l’entreprise.
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À partir des années 1960, Anthony (1965) inscrit le management control dans la problématique de
la convergence des buts et de l’assurance de la mise en œuvre des stratégies. Il le définit dans un deu-
xième temps comme « le processus par lequel les managers obtiennent l’assurance que les ressources
sont obtenues et utilisées de manière efficace et efficiente pour réaliser les objectifs de l’organisation ».
L’auteur ajoute trois idées clés en complément de cette définition : le processus implique des managers
c’est-à-dire des acteurs qui font avancer les choses en coopérant avec d’autres acteurs ; ce processus
s’inscrit dans le cadre de la planification stratégique ; les critères pertinents pour évaluer les actions
conduites dans ce processus sont l’efficacité et l’efficience. Enfin, Anthony (1988) définit dans un
troisième temps le management control comme « le processus par lequel les managers influencent
d’autres membres de l’organisation pour mettre en œuvre la stratégie ». Selon lui, le management
control est le contrôle des managers par d’autres managers, ceux-ci étant des responsables d’équipes
ayant des objectifs à atteindre.
Aujourd’hui, la plupart des auteurs définissent le contrôle de gestion dans le sens de management
control. Ils lui reconnaissent deux dimensions facteurs à la fois de régularité et de changement : la
première formelle à vocation stratégique et de gestion, et la seconde informelle à vocation managé-
riale et comportementale (Dupuy, 1999 ; Bouquin, 2004 ; Burlaud, Teller, al., 2004 ; Gervais, 2005).
En particulier les travaux portant sur la dimension informelle et comportementale du contrôle souli-
gnent le rôle central de cette dimension dans les processus d’apprentissage et l’efficience du système
de contrôle mis en place (Chiapello, 1996 ; Dupuy, Guibert, 2000 ; Berland, 2002).
• Six outils destinés aux managers composent l’axe outils du contrôle de gestion
socio-économique.
– Le contrat d’activité périodiquement négociable formalise les objectifs de résultats prioritaires et
les moyens mis à disposition par l’organisation pour les atteindre. Il est mis en place au travers d’une
concertation semestrielle entre chaque acteur et son supérieur hiérarchique direct.
– Le plan d’actions stratégiques internes et externes est un outil de stratégie tourné aussi bien
vers les cibles externes (le couple produits-marchés, les clients, les fournisseurs) que vers les cibles
internes (les investissements matériels et immatériels, l’adéquation formation-emploi). Il est réactua-
lisé chaque année pour une projection stratégique visant les 3 à 5 ans à venir.
– Le plan d’actions prioritaires budgétées est l’inventaire réactualisé semestriellement des actions
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prioritaires à réaliser par les équipes pour atteindre les objectifs stratégiques.
– Le tableau de bord de pilotage regroupe les indicateurs qualitatifs, quantitatifs et financiers
utilisés par l’encadrement, pour piloter les personnes et les activités dans le sens des objectifs définis.
– La grille d’auto-analyse de gestion du temps est un ensemble cohérent d’instrumentation de la
gestion du temps pour améliorer la planification et la programmation des activités.
– La cartographie des compétences permet de visualiser les compétences effectives disponibles
d’une équipe et de son organisation.
• L’axe changement et gestion des coûts implique tous les acteurs de l’entreprise
Cet axe constitue un processus itératif en quatre phases : diagnostic des dysfonctionnements, pro-
jet de solutions, mise en œuvre et évaluation des solutions retenues. Le diagnostic socio-économique
consiste en un diagnostic qui révèle les dysfonctionnements et les coûts cachés, c’est-à-dire les pertes
de valeur qu’ils engendrent, en termes notamment de surconsommations, de surtemps, et de non-
production. Le diagnostic est réalisé à partir d’entretiens auprès des différentes catégories d’acteurs :
dirigeants, encadrement et employés. L’étape suivante consiste à formaliser des projets à partir du
diagnostic pour réduire les dysfonctionnements et convertir les coûts cachés en valeur ajoutée. Après
la mise en œuvre des solutions projetées, une évaluation permet d’analyser les résultats qualitatifs,
quantitatifs et financiers obtenus.
• L’axe de décisions politiques mobilise la direction de l’entreprise
L’axe de décisions politiques vise à stimuler la décision stratégique de la direction de l’entreprise
réunie dans un groupe de pilotage. Les décisions stratégiques de l’équipe de direction donnent un
sens à l’utilisation des outils et un cadre aux actions mises en œuvre pour réduire les dysfonctionne-
ments et les pertes de valeur qu’ils engendrent.
Les objectifs de la méthode HORIVERT sont comparables à ceux attribués au management control
par Simons (2000), Kaplan et Norton (1996, 2001, 2004). Il s’agit de doter l’entreprise d’un système
de contrôle adapté pour mesurer la performance et décliner la stratégie avec efficacité et efficience.
Cependant, la méthode s’écarte du modèle de Simons en proposant ses propres outils de mesure et de
pilotage. Elle s’écarte également du modèle de Kaplan et Norton en proposant au contrôleur de ges-
tion des outils situés sur trois axes pour décrire et expliquer la performance. Cette méthode est donc
descriptive, explicative et prescriptive ce qui l’inscrit dans un cadre hybride dit de « contingence géné-
rique » (Savall, Zardet, 2004). Ce positionnement médian situé entre constructivisme et positivisme
est matière à débats. En effet, il est original en management control où cohabitent le plus souvent des
méthodologies soit positives et normatives, soit constructivistes et interprétatives (Baker, 2007).
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1.2. Les spécificités de l’entreprise libérale notariale
Malgré le poids économique, social et politique des entreprises libérales, les travaux tant académiques
qu’économiques portant sur leur gestion et leur management restent peu fréquents. De même, les
parcours universitaires qui conduisent à ces professions sont dépourvus de formation en manage-
ment, comme si l’on considérait qu’une entreprise libérale ne se manage pas. Pourtant, les entre-
prises libérales sont soumises à de nouvelles contraintes stratégiques nécessitant des systèmes adaptés
de contrôle de gestion pour maîtriser leurs coûts et développer leur stratégie (Altman, Weil, 1996 ;
Boutall, Blackburn, 1998).
Environ 20 % de ce chiffre d’affaires consiste en activités hors monopole à tarification libre, principa-
lement en droit des affaires, en gestion de patrimoine et en négociation immobilière. Sur ce marché,
les notaires sont en concurrence les uns avec les autres, ainsi qu’avec d’autres professionnels tels que
les avocats ou les experts-comptables (Daudé, 2006).
Pour veiller au respect de ces règlements, le notaire est membre de structures réglementaires qui
contrôlent et animent la profession. Il est nommé par décret du ministère de la Justice et il est inscrit
dans une Chambre regroupant les notaires d’un même département géographique. Chaque Chambre
fait partie d’un conseil régional rattaché à une cour d’appel. L’action de ces organes s’inscrit dans
une politique déterminée et conduite par le Conseil Supérieur du Notariat (CSN). Celui-ci a un
rôle institutionnel en définissant la politique et un règlement unique pour la profession. Les notaires
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sont donc organisés en entreprises libérales réglementées : ils sont dirigeants d’entreprise et officiers
publics (Daudé, 2006).
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tions, en particulier identifier les variables qui pouvaient expliquer la réussite de l’implantation, la
variable Y intitulée « réussite de l’implantation d’un contrôle de gestion socio-économique dans une
entreprise libérale » a été étudiée à partir de cinq variables explicatives. Les résultats de l’étude relè-
vent donc d’une méthodologie qualimétrique conciliant modèle qualitatif et modèle quantitatif afin
d’améliorer la validité des observations réalisées.
Figure 1
La méthode miniaturisée HORIVERT multi-PME d’implantation
du contrôle de gestion au sein d’offices de notaires (source : ISEOR 1997)
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Axe inter-entreprise de décision politique : adéquation
des travaux avec les règles déontologiques, dosage de la directivité
des intervenants
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outils. Enfin, 3 séances de groupe de pilotage ont permis de superviser l’avancée des travaux dans les
groupes d’offices d’une région.
Une équipe de 15 chercheurs a été mobilisée de 1998 à 2004 pour réaliser ce programme de
recherche. Chaque chercheur a pris en charge en moyenne une vingtaine d’offices (soit un groupe
de quatre offices par an) pour les accompagner dans les travaux intra-entreprises et inter-entreprises.
L’affectation des chercheurs sur un office s’est faite de façon aléatoire. L’équipe de recherche a été pla-
cée sous le pilotage d’un responsable de la recherche lui-même placé sous la direction des responsables
de l’ISEOR.
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tive des outils de contrôle de gestion selon le mode d’utilisation préconisé. La base de connaissances
SEGESE montre en effet que la réduction des coûts et l’utilisation des outils sont liées. Mais SEGESE
montre également qu’une réduction fugace des coûts peut être provoquée, en l’absence d’outils, par
les dispositifs de l’axe processus de changement (diagnostic, projet, mise en œuvre et évaluation). Les
outils vont contribuer à un processus de réduction des coûts plus durable, par exemple avec la mise
en œuvre tous les semestres de nouveaux plans d’actions prioritaires, déclinés en objectifs individuels,
pilotés grâce aux tableaux de bord. À l’inverse, sans les dispositifs de l’axe processus de changement,
les outils perdent progressivement de leur intérêt en l’absence d’identification continue des dysfonc-
tionnements et des coûts qu’ils engendrent.
La collecte des données a été réalisée dans chaque office par un chercheur qui n’était pas intervenu
jusqu’alors dans l’office, afin d’éviter des risques de biais (par exemple la manipulation de la mesure
pour montrer une réussite). La collecte des données s’est faite par entretien avec les notaires et les
collaborateurs, et l’observation directe des outils. Une échelle de valeurs allant de 1 à 4 a été attribuée
à chaque entreprise de l’échantillon pour évaluer le degré de succès ou d’échec de l’implantation :
• valeur 1 : forte réduction des coûts (plus de 20 000 € par personne et par an) et utilisation
généralisée des outils (les six outils du contrôle de gestion socio-économique utilisés à la fréquence
préconisée d’utilisation) ;
• valeur 2 : réduction des coûts significative (entre 5 000 € et 19 000 € par personne et par an)
et utilisation des outils assez générale (au moins trois outils du contrôle de gestion socio-économique
utilisés à la fréquence préconisée d’utilisation) ;
• valeur 3 : faible réduction des coûts (entre 500 € et 4 000 € par personne par an) et faible uti-
lisation des outils (un ou deux outils du contrôle de gestion socio-économique utilisés à la fréquence
préconisée d’utilisation) ;
• valeur 4 : pas ou peu de réduction des coûts (moins de 400 € par personne et par an) et pas
d’utilisation des outils.
La variable expliquée Y est donc une variable discrète car la note attribuée à Y ne peut prendre que
quatre valeurs qui correspondent à quatre états de référence : réussite totale, réussite relative, échec
relatif, échec total.
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nant s’est faite compte tenu de la régularité de sa pratique en intervention et de son niveau de maîtrise
théorique de ce sujet. Une échelle de valeurs allant de 1 à 4 a été attribuée à chaque entreprise de
l’échantillon compte tenu de la compétence de l’intervenant l’ayant pris en charge.
• valeur 1 : compétences très fortes (pratique régulière de l’intervention en TPE avec un niveau
de maîtrise théorique très satisfaisant) ;
• valeur 2 : fortes compétences (pratique régulière de l’intervention en TPE avec un niveau de
maîtrise théorique satisfaisant) ;
• valeur 3 : compétences moyennes (pratique irrégulière de l’intervention en TPE avec un niveau
de maîtrise théorique moyen) ;
• valeur 4 : compétences faibles (connaissance théorique de base de l’intervention en TPE sans
mise en pratique récente).
La variable a ne peut prendre que ces quatre valeurs qui correspondent à quatre situations de réfé-
rence au regard de la compétence (compétences très fortes, fortes, moyennes, faibles). Ce repérage
de situations de référence correspond à un jugement d’expert qui permet d’écarter de l’analyse des
valeurs intermédiaires. Il a été utilisé également pour la mesure des variables c, d et e.
La variable explicative b : « taille de l’entreprise » a conduit à classer les entreprises étudiées selon
quatre catégories, chacune ayant été affectée d’une valeur allant de 1 à 4 :
• valeur 1 : très grand office (plus de 50 personnes) ;
• valeur 2 : grand office (entre 21 et 50 personnes) ;
• valeur 3 : moyen office (entre 6 et 20 personnes) ;
• valeur 4 : petit office (5 personnes ou moins).
La mesure de cette variable a été réalisée dans chaque office par le chercheur qui en avait la charge
par entretien avec le comptable, sur la base du registre du personnel.
La variable explicative c : « implication du dirigeant », c’est-à-dire son apport concret pour favori-
ser l’implantation du contrôle de gestion, a été mesurée dans chaque office. Le chercheur en charge
d’un office a évalué le comportement du notaire et le temps mensuel consacré à l’utilisation des outils.
SEGESE montre en effet que l’implication d’un acteur ne peut s’évaluer sur la seule base de son com-
portement observé, mais demande la collecte de données plus probantes et formelles. En ce sens, la
réservation de créneaux horaires dans l’agenda de la part d’un professionnel libéral tel que le notaire
est un signe très probant d’implication (Noguera, 2006). L’évaluation du comportement du notaire
s’est faite sur la base de l’observation de son comportement vis-à-vis des outils du contrôle de gestion
socio-économique. L’évaluation du temps mensuel consacré par le notaire à l’utilisation des outils s’est
Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 15 – Volume 1 – Juin 2009 (p. 79 à 104)
faite par entretien avec le notaire et consultation de son agenda. À l’issue des 8 mois d’implantation,
chaque chercheur a consolidé les données collectées pour évaluer l’implication du dirigeant. Cette
évaluation n’a donc pas été faite ex post ce qui aurait pu être source de biais, mais par consolidation de
données collectées tout au long du processus d’implantation. Une échelle de valeurs allant de 1 à 3 a
été attribuée à chaque entreprise de l’échantillon :
• valeur 1 : forte implication (comportement positif du notaire lors de chaque séance de travail et
temps mensuel consacré à l’utilisation des outils supérieur à 8 heures) ;
• valeur 2 : implication moyenne (comportement plutôt positif du notaire lors des séances de
travail et temps mensuel consacré à l’utilisation des outils compris entre 4 et 7 heures) ;
• valeur 3 : faible implication (comportement passif voire résistant du notaire lors des séances de
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travail et temps mensuel consacré à l’utilisation des outils inférieur à 3 heures).
Les variables explicatives d : « compétences en contrôle de gestion du dirigeant » et e : « compétences
en contrôle de gestion de l’encadrement » ont été mesurées dans chaque office par le chercheur en charge
de l’office. Le chercheur a évalué, au démarrage de l’intervention, les compétences en contrôle de gestion
du dirigeant et de l’encadrement par entretien et observation directe des pratiques de contrôle de gestion
au sein de l’office. Une évaluation des compétences ex post à l’issue des 8 mois d’implantation aurait pu
être source de biais, la compétence du dirigeant et de son encadrement en contrôle de gestion ayant été
modifiée par l’intervention. Une échelle de valeurs allant de 1 à 4 a été attribuée à chaque entreprise de
l’échantillon compte tenu de la mesure de la compétence du dirigeant et de l’encadrement :
• valeur 1 : compétences très fortes (bonne maîtrise théorique du contrôle de gestion et utilisation
très régulière et pertinente d’outils de contrôle de gestion) ;
• valeur 2 : compétences fortes (bonne maîtrise théorique du contrôle de gestion et utilisation
régulière et pertinente de quelques outils de contrôle de gestion) ;
• valeur 3 : compétences faibles (pas ou peu de connaissance théorique du contrôle de gestion et
utilisation de quelques indicateurs de base de contrôle de gestion) ;
• valeur 4 : compétences très faibles (pas ou peu de connaissances théoriques du contrôle de ges-
tion et utilisation inexistante d’outils et d’indicateurs de contrôle de gestion).
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se sont développées tout au long des 8 mois d’intervention.
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ment concurrentiel.
Tableau 1
Les résultats économiques de l’implantation du contrôle de gestion
socio-économique dans 350 offices de notaires (source : ISEOR 2004)
Coûts cachés Réduction des coûts cachés
Nombre (= pertes de valeur ajoutée) (= réduction des pertes de valeur
Région d’offices par personne et par an ajoutée) après 12 mois
1 34 10 000 € 36 %
2 24 12 000 € 29 %
3 27 10 000 € 27 %
4 81 11 000 € 37 %
6 54 16 000 € 45 %
7 57 12 000 € 38 %
8 14 15 000 € 36 %
9 28 10 000 € 47 %
Cette évolution a été étudiée au travers d’entretiens avec les notaires et d’une analyse de la compta-
bilité des offices. L’étude a montré que dans les offices présentant une CHMCV stable, les notaires
ont utilisé les marges de manœuvre engendrées par les réductions de coûts pour entreprendre des
actions de création de potentiel (par exemple en utilisant les temps gagnés pour faire plus de forma-
tion). Dans les offices présentant une CHMCV en croissance, les notaires ont utilisé les réductions
des coûts pour accroître les résultats immédiats de l’office (par exemple en utilisant les temps gagnés
pour augmenter la production d’actes).
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Les résultats présentés ci-après ont été obtenus par le traitement d’analyses multivariées de données
collectées auprès des 350 offices. Afin d’identifier les variables explicatives du succès ou de l’échec
de l’implantation du contrôle de gestion socio-économique, les données collectées ont fait l’objet
d’une analyse en composantes principales, d’une analyse par la méthode des nuées dynamiques,
d’une analyse de régression et d’une analyse discriminante. La combinaison de ces différentes
méthodes d’analyse statistique a eu pour objectif de mieux décrire (analyse en composantes princi-
pales), structurer et classer (méthode des nuées dynamiques), et expliquer (analyse de régression et
analyse discriminante) les variables.
Tableau 2
Matrice des corrélations
Y_REUSSI A_COMPET B_TAILLE C_IMPLIC D_DIRIGE E_ENCADR
Y_REUSSI 1,00
En première analyse, on peut lire une corrélation manifeste entre l’implication du dirigeant et la
réussite de l’implantation qui confirme les observations qualitatives réalisées.
Tableau 3
Analyse factorielle (avant rotation)
Valeurs propres initiales
Composante
Total % de variance % cumulé
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3 1,127 18,790 85,419
Les deux tiers de la variance d’origine (66,6 %) sont restitués sur le mapping constitué par les
deux premiers axes. La carte montre les positions des 6 critères et les coordonnées des 350 observa-
tions analysées par le logiciel Sphinx. On peut interpréter de visu le mapping :
• il existe une forte corrélation (assimilée à un cosinus directeur) entre la réussite et l’implication
du dirigeant ;
• il en est de même entre la compétence du dirigeant et la compétence de l’encadrement ;
• les axes géométriques (horizontal et vertical) sont peu significatifs pour l’interprétation, et il est
préférable de refaire l’analyse avec l’option « Rotation » qui facilite l’interprétation en conservant le
maximum de variance (Rotation « Varimax »).
Tableau 4
Analyse factorielle avec rotation varimax – Variance Totale Expliquée
Valeurs propres initiales Valeurs propres après rotation VARIMAX
On notera que pour les trois premiers axes la rotation amène une répartition différente de la variance :
• axe 1 (34,8 %) : Axe compétence (Dirigeant et Encadrement) ;
• axe 2 (29,6 %) : Axe Réussite liée à l’Implication de la direction ;
• axe 3 (21,0 %) : Axe Taille.
Les corrélations entre la réussite de l’intervention et l’implication du dirigeant d’une part, et
d’autre part la compétence du dirigeant en contrôle de gestion et celle de son encadrement sont
confirmées. La matrice des composantes après rotation est présentée ci-après.
Tableau 5
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Matrice des Composantes après Rotation (a)
Composantes
1 2 3
b :Taille ,938
c :Impl_Dir ,930
d :Comp_Dir ,954
e :Comp_Cadre ,944
Succès ,929
Tableau 6
Moyennes de Typologie
Typologie_1 A_COMPET B_TAILLE C_IMPLIC D_DIRIGE E_ENCADR Y_REUSSI
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Total 2,07 3,01 1,52 2,91 2,81 1,95
valeur est proche de 1, plus la taille est grande. S’agissant de la variable c « implication du dirigeant »,
plus sa valeur est proche de 1, plus l’implication est forte. Enfin, concernant les variables d et e « com-
pétences en contrôle de gestion respectivement du dirigeant et de l’encadrement », plus leur valeur est
proche de 1, plus les compétences sont fortes.
L’interprétation du tableau ci-dessus montre en premier lieu que les entreprises de classe 1 soit
52 offices sur 350, c’est-à-dire 14,8 % sont en échec total (valeur moyenne de Y à 3,50), les trois autres
classes étant en succès total ou en succès relatif. Les entreprises de classe 1 expliquent leur échec par
toutes les variables, sauf la taille. Les entreprises de classe 2 expliquent leur succès (valeur moyenne
de Y comprise entre 1 et 2) par rapport à toutes les variables. Celles de classe 3 expliquent leur suc-
cès par l’implication du dirigeant et les compétences de l’intervenant. Enfin, celles de classe 4 sont
en succès grâce à l’implication du dirigeant. Cette analyse confirme celle réalisée dans la recherche
qualitative au regard des offices en échec (environ 15 %). En revanche, elle ne permet pas de distin-
guer nettement parmi les offices classées en réussite, les 10 % d’offices « fragiles » observés dans la
recherche qualitative. C’est pourquoi, pour mieux expliquer le rôle joué par les variables du modèle
dans la réussite de l’implantation, et dans la mesure où la variable Y peut être considérée comme une
variable qualitative (succès ou échec) ou quantitative (valeur de 1 à 4), une analyse de régression et
une analyse discriminante ont été réalisées.
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e :Comp_Cadre ,287 ,070 ,279 4,091 ,000
l’introduction de nouveaux outils au sein de leur entreprise. Deux interprétations peuvent être invo-
quées. En premier lieu, des notaires ont été réticents à l’intervention estimant qu’ils avaient déjà des
connaissances et des outils suffisants en contrôle de gestion. En second lieu, des notaires ont pu
penser qu’ils avaient déjà entrepris des actions satisfaisantes de réduction des coûts ne nécessitant pas
d’actions complémentaires.
On peut ainsi prédire le degré de réussite à partir de l’équation de la régression obtenue :
S- 1 50 51
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S- 2,0 98,0 100,0
Les résultats statistiques ne montrent bien sûr pas que des variables non testées dans la recherche
– la conception d’un système de contrôle, la méthodologie d’implantation, le contexte politique et
stratégique – sont sans effet sur la réussite ou l’échec de l’implantation d’un système de contrôle de
gestion. En effet, ces variables n’ont pas fait l’objet d’analyse statistique car la recherche s’est cen-
trée sur des variables discriminantes pouvant présenter des mesures différentes d’un office à l’autre.
Or, chaque office de l’échantillon était immergé dans un même contexte politique et a intégré les
mêmes outils de contrôle de gestion implantés selon une méthodologie similaire. Les résultats sta-
tistiques montrent assez nettement que la taille d’un office ne joue pas un rôle significatif dans la
réussite ou l’échec de l’implantation d’un système de contrôle de gestion. Ils relativisent donc la taille
comme facteur de contingence dans le cas de l’implantation d’un système de contrôle de gestion,
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même si les différences de taille entre les offices de l’échantillon n’étaient pas très significatives
(aucun office ne dépassait 55 salariés). Par ailleurs, les résultats confirment sur un large échantillon
que l’implication du dirigeant est un facteur central dans la réussite ou l’échec de l’implantation d’un
système de contrôle de gestion au sein d’une petite structure, rejoignant par exemple les conclusions
de Germain (2005). Enfin, les résultats semblent relativiser l’importance de la compétence de l’inter-
venant, ce qui est plus surprenant. La moyenne de typologie (voir tableau 6) montre que la réussite de
l’intervention a pu se faire avec des intervenants compétents (classe 2 du tableau 6) et, dans certains
cas, avec des intervenants moins compétents (classe 4 du tableau 6). Cette observation s’explique
peut-être par l’équipe d’intervention composée de chercheurs dotés d’une expérience minimale en
intervention. En effet, il s’agissait d’éviter, notamment au démarrage du programme de recherche,
un rejet des intervenants de la part des notaires. Une autre hypothèse tient peut-être à l’importante
standardisation des méthodes utilisées. La compétence de l’intervenant est sans doute moins impor-
tante lorsqu’il s’agit d’appliquer la même méthodologie dans un même secteur avec des procédures
claires et bien définies.
Conclusion
Les résultats présentés pour répondre à la problématique de recherche sont le fruit d’observations
réalisées à partir d’une recherche qualimétrique. Ils montrent que l’implantation d’un système de
contrôle de gestion socio-économique selon une méthodologie miniaturisée permet d’améliorer la
performance d’entreprises de petite taille, telles que des offices de notaire. Les recherches-interven-
tions ont montré que l’échec d’implantation d’une telle méthodologie résidait essentiellement dans le
manque d’implication du dirigeant, c’est-à-dire par une exemplarité défaillante et un temps insuffi-
sant consacré à utiliser les outils de contrôle de gestion. La recherche a montré que la mobilisation des
instances politiques contribue sans doute à stimuler cette implication du dirigeant.
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Ces observations ont été affinées par une étude quantitative combinant une analyse en compo-
santes principales, une analyse par la méthode des nuées dynamiques, une analyse de régression et
une analyse discriminante. Ces travaux statistiques ont permis une meilleure description, classifica-
tion et explication des cinq variables explicatives de la réussite de l’implantation du contrôle de ges-
tion socio-économique : l’implication du dirigeant notaire, la taille de l’entreprise, la compétence de
l’intervenant en contrôle de gestion, la compétence du dirigeant et de son encadrement en contrôle de
gestion. Ces variables ont été testées car elles semblaient expliquer la réussite de l’implantation d’un
système de contrôle de gestion, compte tenu des 350 recherches-interventions réalisées et des connais-
sances accumulées dans la base SEGESE du laboratoire. L’un des intérêts de cette étude quantitative
est d’avoir porté sur des variables qui sont généralement peu abordées dans la littérature, souvent
centrée sur la conception d’une méthodologie et moins sur son implantation dans les organisations
(Löning, al., 1998 ; Choffel, Meyssonnier, 2005). L’étude quantitative a montré que l’implication
du dirigeant et, dans une moindre mesure, sa compétence en contrôle de gestion et celle de son
encadrement, étaient des variables significatives de la réussite. Ce résultat pourrait signifier qu’une
méthodologie de contrôle de gestion devrait intégrer dans sa conception une dimension politique,
pour susciter l’adhésion et l’implication des dirigeants.
En définitive, l’apport de la recherche est double. D’une part, elle montre que le contrôle de ges-
tion est source de performances pour des petites structures sous réserve d’une miniaturisation perti-
nente. D’autre part, elle positionne dans les débats en management control, à côté de la problématique
classique de la conception d’outils, la problématique technique de leur implantation et la probléma-
tique politique de l’implication des dirigeants. L’article a néanmoins soulevé certaines hypothèses
dont le traitement nécessite des travaux complémentaires, par exemple celles portant sur les causes
de la pérennité d’un système de contrôle de gestion pendant plusieurs années, où celles portant sur la
généralisation des résultats à d’autres professions libérales, et au-delà aux petites entreprises. Ces tra-
vaux complémentaires pourraient contribuer aux débats portant sur les petites entreprises françaises,
souvent centrés sur la réduction de leurs charges visibles et moins sur l’exploitation de leurs ressources
endogènes au travers d’un contrôle de gestion adapté. Ils pourraient également contribuer à l’analyse
du rejet de certaines méthodes de contrôle de gestion dans les petites structures, telles que la méthode
du Balanced Scorecard, dont l’application semble réservée, peut-être à tort, aux grandes entreprises
(Germain, 2005 ; Rampersad, 2005).
Notes
1. Institut de Socio-Économie des Entreprises et des
Organisations, laboratoire de recherches associé à
l’IAE de Lyon, Université Jean Moulin Lyon 3.
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