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Résumé Abstract
L’article étudie la problématique de l’im- This article examines the problematics of
plantation d’un système contrôle de gestion management controlling in independent profes-
au sein d’entreprises libérales, au travers du sions through the case study of 350 notary pub-
cas de 350 offices de notaires. La question lic offices. The question could be summarized
de recherche étudiée peut être résumée en in these terms : what are the contributions of a
ces termes : quels sont les apports d’un sys- management control system in independent pro-
tème de contrôle de gestion dans une entre- fessions and what are the key factors of success
prise libérale et quels sont les facteurs clés de of management control setting up in such small
succès de l’implantation d’un tel système au businesses ? To answer this question, a « quali-
sein d’entreprises de petite taille ? Pour étudier metrics » methodology of research has been used,
cette question, la méthodologie de recherche which combines the qualitative model and the
choisie est « qualimétrique » conciliant modèle quantitative model.
qualitatif et modèle quantitatif.
Remerciements : Les auteurs remercient vivement les deux rapporteurs pour leurs remarques et sugges-
tions ainsi que le professeur Sylvain Biardeau pour ses conseils techniques.
Introduction
Cet article étudie la problématique de l’implantation d’un système contrôle de gestion dans les entreprises
libérales, au travers du cas de 350 offices de notaires. La question de recherche étudiée peut être résumée
en ces termes : quels sont les apports d’un système de contrôle de gestion dans une entreprise libérale
et quels sont les facteurs clés de succès de l’implantation d’un tel système ? L’article utilise le terme de
contrôle de gestion dans le sens de management control. Il s’intéresse en effet aux systèmes de contrôle de
gestion managériaux tels qu’ils ont été décrits par Anthony (1956, 1965, 1988) et Simons (1987, 1995,
2000). Il est centré, au travers du cas du contrôle de gestion socio-économique, sur les systèmes de
contrôle articulant outils de règles et de mesure avec des outils agissant sur les comportements des acteurs.
La question de recherche présente des enjeux pratiques puisque les entreprises libérales, et au-delà
les toutes petites entreprises, sont souvent dotées d’un système de contrôle de gestion rudimentaire
(Marchesnay, 1993 ; Plane, 1999 ; Parsons, 2004). Or, à l’heure de la mondialisation croissante, des
pertes de monopole et de l’hypercompétition (D’Aveni, 1994), les entreprises même de petite taille
sont confrontées à la gestion stratégique de leurs coûts. Par ailleurs, d’un point de vue théorique, si
le champ du management control est bien étudié lorsqu’il s’applique aux grandes entreprises, il l’est
moins concernant les entreprises de petite taille et les entreprises libérales en particulier, telles que
les cabinets d’avocat ou les offices de notaires. Or les professions libérales sont confrontées à de nou-
velles contraintes stratégiques qui leur imposent de mieux contrôler leur gestion : exigence accrue des
clients, intensité de la concurrence, perte de monopoles, etc. Le chef d’entreprise libérale étant le plus
souvent néophyte en gestion, il est confronté à une problématique d’implantation dans son entreprise
d’un système de contrôle de gestion adapté (Maister, 1993, 1997 ; Cappelletti, 2007).
Pour apporter des éléments de réponse à la question de recherche, la méthodologie choisie est
« qualimétrique » (Savall, Zardet, 2004). L’approche qualimétrique consiste à concilier les modèles
qualitatif et quantitatif pour accroître la validité des observations réalisées sur un objet d’étude.
Cette approche reconnaît la complémentarité des recherches qualitatives et des recherches quantita-
tives comme l’ont souligné également Burlaud, Teller et al. (2004). L’approche qualitative retenue a
consisté à implanter un système de contrôle de gestion socio-économique au sein de 350 offices de
notaires entre 1998 à 2004. Cinq variables explicatives de la réussite de l’implantation du système
de contrôle de gestion ont fait l’objet d’analyses multivariées : l’implication du dirigeant dans l’im-
plantation du système de contrôle de gestion, la taille de l’entreprise, la compétence de l’intervenant
en contrôle de gestion, la compétence du dirigeant et de son encadrement en contrôle de gestion
(Cappelletti, Khouatra, Beck, 2007). Pour exposer les résultats de la recherche, l’article comprend
trois parties : la première partie expose le cadre théorique de la recherche centré sur le management
control et les entreprises libérales, la deuxième partie décrit la méthodologie de recherche mobilisée et
son protocole, enfin la troisième partie présente et analyse les résultats de la recherche.
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Anthony est considéré comme l’auteur de référence en management control (Bouquin, 2005).
Il définit dans un premier temps le contrôle comme « le processus consistant à assurer que l’organisa-
tion fait ce que le management veut qu’elle fasse » (Anthony, 1956). L’expression de management control
n’apparaît pas encore à cette époque dans ses travaux, bien que les expressions de management control
ou managerial control aient été employées avant ses travaux. Ainsi lorsque Sloan (1963) présente le cas
General Motors, il utilise l’expression de managerial control pour désigner un état organisationnel qui
permet aux managers d’affirmer qu’ils ont le contrôle. Bien avant, Mary P. Follett (1924) considérait
déjà l’entreprise à la fois comme une entité économique et une unité sociale devant faire l’objet d’une
analyse socio-économique. Pour Follett, le contrôle doit être appréhendé selon une perspective psycho-
sociologique car il constitue un instrument de coordination des personnes dans l’entreprise.
À partir des années 1960, Anthony (1965) inscrit le management control dans la problématique de
la convergence des buts et de l’assurance de la mise en œuvre des stratégies. Il le définit dans un deu-
xième temps comme « le processus par lequel les managers obtiennent l’assurance que les ressources
sont obtenues et utilisées de manière efficace et efficiente pour réaliser les objectifs de l’organisation ».
L’auteur ajoute trois idées clés en complément de cette définition : le processus implique des managers
c’est-à-dire des acteurs qui font avancer les choses en coopérant avec d’autres acteurs ; ce processus
s’inscrit dans le cadre de la planification stratégique ; les critères pertinents pour évaluer les actions
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• Six outils destinés aux managers composent l’axe outils du contrôle de gestion
socio-économique.
– Le contrat d’activité périodiquement négociable formalise les objectifs de résultats prioritaires et
les moyens mis à disposition par l’organisation pour les atteindre. Il est mis en place au travers d’une
concertation semestrielle entre chaque acteur et son supérieur hiérarchique direct.
– Le plan d’actions stratégiques internes et externes est un outil de stratégie tourné aussi bien
vers les cibles externes (le couple produits-marchés, les clients, les fournisseurs) que vers les cibles
internes (les investissements matériels et immatériels, l’adéquation formation-emploi). Il est réactua-
lisé chaque année pour une projection stratégique visant les 3 à 5 ans à venir.
– Le plan d’actions prioritaires budgétées est l’inventaire réactualisé semestriellement des actions
prioritaires à réaliser par les équipes pour atteindre les objectifs stratégiques.
– Le tableau de bord de pilotage regroupe les indicateurs qualitatifs, quantitatifs et financiers
utilisés par l’encadrement, pour piloter les personnes et les activités dans le sens des objectifs définis.
– La grille d’auto-analyse de gestion du temps est un ensemble cohérent d’instrumentation de la
gestion du temps pour améliorer la planification et la programmation des activités.
– La cartographie des compétences permet de visualiser les compétences effectives disponibles
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Les objectifs de la méthode HORIVERT sont comparables à ceux attribués au management control
par Simons (2000), Kaplan et Norton (1996, 2001, 2004). Il s’agit de doter l’entreprise d’un système
de contrôle adapté pour mesurer la performance et décliner la stratégie avec efficacité et efficience.
Cependant, la méthode s’écarte du modèle de Simons en proposant ses propres outils de mesure et de
pilotage. Elle s’écarte également du modèle de Kaplan et Norton en proposant au contrôleur de ges-
tion des outils situés sur trois axes pour décrire et expliquer la performance. Cette méthode est donc
descriptive, explicative et prescriptive ce qui l’inscrit dans un cadre hybride dit de « contingence géné-
rique » (Savall, Zardet, 2004). Ce positionnement médian situé entre constructivisme et positivisme
est matière à débats. En effet, il est original en management control où cohabitent le plus souvent des
méthodologies soit positives et normatives, soit constructivistes et interprétatives (Baker, 2007).
Environ 20 % de ce chiffre d’affaires consiste en activités hors monopole à tarification libre, principa-
lement en droit des affaires, en gestion de patrimoine et en négociation immobilière. Sur ce marché,
les notaires sont en concurrence les uns avec les autres, ainsi qu’avec d’autres professionnels tels que
les avocats ou les experts-comptables (Daudé, 2006).
Pour veiller au respect de ces règlements, le notaire est membre de structures réglementaires qui
contrôlent et animent la profession. Il est nommé par décret du ministère de la Justice et il est inscrit
dans une Chambre regroupant les notaires d’un même département géographique. Chaque Chambre
fait partie d’un conseil régional rattaché à une cour d’appel. L’action de ces organes s’inscrit dans
une politique déterminée et conduite par le Conseil Supérieur du Notariat (CSN). Celui-ci a un
rôle institutionnel en définissant la politique et un règlement unique pour la profession. Les notaires
sont donc organisés en entreprises libérales réglementées : ils sont dirigeants d’entreprise et officiers
publics (Daudé, 2006).
Figure 1
La méthode miniaturisée HORIVERT multi-PME d’implantation
du contrôle de gestion au sein d’offices de notaires (source : ISEOR 1997)
faite par entretien avec le notaire et consultation de son agenda. À l’issue des 8 mois d’implantation,
chaque chercheur a consolidé les données collectées pour évaluer l’implication du dirigeant. Cette
évaluation n’a donc pas été faite ex post ce qui aurait pu être source de biais, mais par consolidation de
données collectées tout au long du processus d’implantation. Une échelle de valeurs allant de 1 à 3 a
été attribuée à chaque entreprise de l’échantillon :
• valeur 1 : forte implication (comportement positif du notaire lors de chaque séance de travail et
temps mensuel consacré à l’utilisation des outils supérieur à 8 heures) ;
• valeur 2 : implication moyenne (comportement plutôt positif du notaire lors des séances de
travail et temps mensuel consacré à l’utilisation des outils compris entre 4 et 7 heures) ;
• valeur 3 : faible implication (comportement passif voire résistant du notaire lors des séances de
travail et temps mensuel consacré à l’utilisation des outils inférieur à 3 heures).
Les variables explicatives d : « compétences en contrôle de gestion du dirigeant » et e : « compétences
en contrôle de gestion de l’encadrement » ont été mesurées dans chaque office par le chercheur en charge
de l’office. Le chercheur a évalué, au démarrage de l’intervention, les compétences en contrôle de gestion
du dirigeant et de l’encadrement par entretien et observation directe des pratiques de contrôle de gestion
au sein de l’office. Une évaluation des compétences ex post à l’issue des 8 mois d’implantation aurait pu
être source de biais, la compétence du dirigeant et de son encadrement en contrôle de gestion ayant été
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Tableau 1
Les résultats économiques de l’implantation du contrôle de gestion
socio-économique dans 350 offices de notaires (source : ISEOR 2004)
Coûts cachés Réduction des coûts cachés
Nombre (= pertes de valeur ajoutée) (= réduction des pertes de valeur
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1 34 10 000 € 36 %
2 24 12 000 € 29 %
3 27 10 000 € 27 %
4 81 11 000 € 37 %
6 54 16 000 € 45 %
7 57 12 000 € 38 %
8 14 15 000 € 36 %
9 28 10 000 € 47 %
Cette évolution a été étudiée au travers d’entretiens avec les notaires et d’une analyse de la compta-
bilité des offices. L’étude a montré que dans les offices présentant une CHMCV stable, les notaires
ont utilisé les marges de manœuvre engendrées par les réductions de coûts pour entreprendre des
actions de création de potentiel (par exemple en utilisant les temps gagnés pour faire plus de forma-
tion). Dans les offices présentant une CHMCV en croissance, les notaires ont utilisé les réductions
des coûts pour accroître les résultats immédiats de l’office (par exemple en utilisant les temps gagnés
pour augmenter la production d’actes).
Tableau 2
Matrice des corrélations
Y_REUSSI A_COMPET B_TAILLE C_IMPLIC D_DIRIGE E_ENCADR
Y_REUSSI 1,00
En première analyse, on peut lire une corrélation manifeste entre l’implication du dirigeant et la
réussite de l’implantation qui confirme les observations qualitatives réalisées.
Tableau 3
Analyse factorielle (avant rotation)
Valeurs propres initiales
Composante
Total % de variance % cumulé
Les deux tiers de la variance d’origine (66,6 %) sont restitués sur le mapping constitué par les
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Tableau 4
Analyse factorielle avec rotation varimax – Variance Totale Expliquée
Valeurs propres initiales Valeurs propres après rotation VARIMAX
On notera que pour les trois premiers axes la rotation amène une répartition différente de la variance :
• axe 1 (34,8 %) : Axe compétence (Dirigeant et Encadrement) ;
• axe 2 (29,6 %) : Axe Réussite liée à l’Implication de la direction ;
• axe 3 (21,0 %) : Axe Taille.
Les corrélations entre la réussite de l’intervention et l’implication du dirigeant d’une part, et
d’autre part la compétence du dirigeant en contrôle de gestion et celle de son encadrement sont
confirmées. La matrice des composantes après rotation est présentée ci-après.
Tableau 5
Matrice des Composantes après Rotation (a)
Composantes
1 2 3
b :Taille ,938
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d :Comp_Dir ,954
e :Comp_Cadre ,944
Succès ,929
Tableau 6
Moyennes de Typologie
Typologie_1 A_COMPET B_TAILLE C_IMPLIC D_DIRIGE E_ENCADR Y_REUSSI
valeur est proche de 1, plus la taille est grande. S’agissant de la variable c « implication du dirigeant »,
plus sa valeur est proche de 1, plus l’implication est forte. Enfin, concernant les variables d et e « com-
pétences en contrôle de gestion respectivement du dirigeant et de l’encadrement », plus leur valeur est
proche de 1, plus les compétences sont fortes.
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l’introduction de nouveaux outils au sein de leur entreprise. Deux interprétations peuvent être invo-
quées. En premier lieu, des notaires ont été réticents à l’intervention estimant qu’ils avaient déjà des
connaissances et des outils suffisants en contrôle de gestion. En second lieu, des notaires ont pu
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Les résultats statistiques ne montrent bien sûr pas que des variables non testées dans la recherche
– la conception d’un système de contrôle, la méthodologie d’implantation, le contexte politique et
stratégique – sont sans effet sur la réussite ou l’échec de l’implantation d’un système de contrôle de
gestion. En effet, ces variables n’ont pas fait l’objet d’analyse statistique car la recherche s’est cen-
trée sur des variables discriminantes pouvant présenter des mesures différentes d’un office à l’autre.
Or, chaque office de l’échantillon était immergé dans un même contexte politique et a intégré les
mêmes outils de contrôle de gestion implantés selon une méthodologie similaire. Les résultats sta-
tistiques montrent assez nettement que la taille d’un office ne joue pas un rôle significatif dans la
réussite ou l’échec de l’implantation d’un système de contrôle de gestion. Ils relativisent donc la taille
comme facteur de contingence dans le cas de l’implantation d’un système de contrôle de gestion,
même si les différences de taille entre les offices de l’échantillon n’étaient pas très significatives
(aucun office ne dépassait 55 salariés). Par ailleurs, les résultats confirment sur un large échantillon
que l’implication du dirigeant est un facteur central dans la réussite ou l’échec de l’implantation d’un
système de contrôle de gestion au sein d’une petite structure, rejoignant par exemple les conclusions
de Germain (2005). Enfin, les résultats semblent relativiser l’importance de la compétence de l’inter-
venant, ce qui est plus surprenant. La moyenne de typologie (voir tableau 6) montre que la réussite de
l’intervention a pu se faire avec des intervenants compétents (classe 2 du tableau 6) et, dans certains
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Conclusion
Les résultats présentés pour répondre à la problématique de recherche sont le fruit d’observations
réalisées à partir d’une recherche qualimétrique. Ils montrent que l’implantation d’un système de
contrôle de gestion socio-économique selon une méthodologie miniaturisée permet d’améliorer la
performance d’entreprises de petite taille, telles que des offices de notaire. Les recherches-interven-
tions ont montré que l’échec d’implantation d’une telle méthodologie résidait essentiellement dans le
manque d’implication du dirigeant, c’est-à-dire par une exemplarité défaillante et un temps insuffi-
sant consacré à utiliser les outils de contrôle de gestion. La recherche a montré que la mobilisation des
instances politiques contribue sans doute à stimuler cette implication du dirigeant.
Ces observations ont été affinées par une étude quantitative combinant une analyse en compo-
santes principales, une analyse par la méthode des nuées dynamiques, une analyse de régression et
une analyse discriminante. Ces travaux statistiques ont permis une meilleure description, classifica-
tion et explication des cinq variables explicatives de la réussite de l’implantation du contrôle de ges-
tion socio-économique : l’implication du dirigeant notaire, la taille de l’entreprise, la compétence de
l’intervenant en contrôle de gestion, la compétence du dirigeant et de son encadrement en contrôle de
gestion. Ces variables ont été testées car elles semblaient expliquer la réussite de l’implantation d’un
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Notes
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