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Revue africaine de management - African management review

ISSN : 2509-0097
VOL.5 (1) 2020 (PP.17-34)
http://revues.imist.ma/?journal=RAM

Le rôle de la bonne gouvernance d’entreprise dans la communication des


informations comptables et financieres : une nécessité au Cameroun

Bimeme Bengono Isidore a, Um Ngouem Marie Thérèse b


a
Enseignant-chercheur en faculté des Sciences Economiques et Gestion, Université de Dschang
b
Professeur Agrégée en faculté des Sciences Economiques et de Gestion Appliquée, Université de Douala

Résumé

À l’heure où les faillites sont venues ébranlées les assises institutionnelles des
entreprises, la communication des informations comptables et financières est au cœur du
questionnement de la bonne gouvernance d’entreprise dans toutes les sphères économiques.
Cet article vise à examiner les effets des mécanismes de bonne gouvernance d’entreprise sur
la communication des informations comptables et financières en dépassant la simple optique
de la performance financière. Pour répondre à cette préoccupation, nous avons interrogé 130
sociétés anonymes et la méthode de régression logistique ascendante a permis de traiter les
données. A l’issue de l’analyse, il ressort que, la probabilité que l’information comptable et
financière soit communiquée, est d’autant plus grande lorsqu’il y a présence de l’actionnariat,
du conseil d’administration, de l’audit légal et du comité d’audit.

Mots clés : bonne gouvernance d’entreprise- communication des informations comptables


et financières- théorie de l’agence

Abstract

At a time when bankruptcies have shaken the institutional foundations of companies,


the communication of accounting and financial information is at the heart of the questioning
of good corporate governance in all economic spheres. This article aims to examine the
effects of good corporate governance mechanisms on the communication of accounting and
financial information by going beyond the simple perspective of financial performance.
Responding to this concern, we interviewed 130 limited companies and the bottom-up logistic
regression method made it possible to process the data. At the end of the analysis, it appears
that the probability that the accounting and financial information will be communicated, is all
the greater when there are shareholders, the board of directors, the audit and the audit
committee.

Key words: good company governance, communication of accounting and financial


information, agency theory.

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1. Introduction

La récurrence des scandales financiers observés dans des entreprises, tant en occident
qu’en afrique a remis en scène les débats sur la qualité de l’information comptable et
financière communiquée par les entreprises aux différentes parties prenantes. Ces derniers
temps, l’actualité économique révèle que les irrégularités et les fraudes de l’information
comptable et financière conduisent au spectre de perte de confiance et de fermeture de
certaines entreprises. Au cameroun, les études faites par l’institut national de la
statistique(ins) en 2015 sur le rôle des techniques de gestion, dans le pilotage des entreprises
montrent que la contribution des mécanismes de bonne gouvernance à la communication des
informations comptables et financières est mal connue. De même, les études faites par
snv (national socialist vanguard) et gicam (groupement interpatronal du cameroun) en 2015,
sur le comportement des dirigeants d’entreprises du cameroun, ont montré que près de 46%
d’entreprises ne communiquent pas entièrement leurs informations comptables et financières
lors des déclarations statistiques et fiscales, ce qui explique les conflits d’intérêts entre ces
entreprises et l’administration fiscale. Les cas les plus révélateurs au cameroun sont ceux de
camair-co, sodécoton, bicec, cofinest, cde, comeci, chronopost, sobat etc. De tels faits
montrent que le processus de production et de communication d'informations comptables et
financières est caractérisé par des pratiques irrégulières ; ce qui a fait l’objet des révocations
des directeurs de certaines entreprises privées et publiques au cameroun. Cette situation met
en scène la question de la bonne gouvernance d’entreprise dans le processus de production et
de communication des informations comptables et financières. Eu égard de cette situation, la
question de la communication des informations comptables et financières mérite une attention
particulière et constitue l’un des sentiers non battus dans les préoccupations des recherches
sur la bonne gouvernance d’entreprise au cameroun. En effet, la théorie d’agence explique
que le problème de communication des informations comptables et financières met en
évidence des conflits d’intérêts entre l’entreprise et ses parties prenantes. Ces conflits
résultent notamment d’une asymétrie d’information sur la production d’informations
comptables et financières (jensen et meckling, 1976). De ce fait, les travaux de djoutsa et
foka, (2014) ; tikire et al, (2013) ; raida, (2012) ; bayart, (2010), expliquent que la présence
des conflits est due au fait que les entreprises n’ont pas un comportement uniforme de
communication des informations comptables et financières et ce, malgré l’existence d’un
cadre normatif qui s’impose. Alors que, la bonne gouvernance d’entreprise est l’ensemble des
mécanismes mis en œuvre pour résoudre les conflits potentiels qui seraient de nature à
compromettre les opportunités de réaliser les gains mutuels (williamson, 1991, aguilera et al,
2008). Par contre ces dernières années au cameroun, cette nécessité de bonn gouvernance ne
fait pas encore échu vue les condamnations de certains responsables des entreprises avec leurs
commissaires aux compte donc la toile fond est la mal gouvernance de l’information
comptable et financière. Ainsi la question de bonne gouvernance d’entreprise sur la
communication des informations comptables et financières suscite des interrogations qui
rejoignent celles des révélations des études empiriques de sonia (2011) : et de chekkar et
onnée (2006) qui examinent le lien entre la bonne gouvernance d’entreprise et la
communication des informations dans la politique comptable de l’entreprise. Ainsi, cette
étude tente d’apporter des éléments de réponses aux questions suivantes : en quoi la bonne
gouvernance d’entreprise affecte-t-elle la communication des informations comptables et

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financières dans les entreprises du cameroun ? Autrement dit, quels sont les mécanismes de
bonne gouvernance d’entreprise qui contribuent à l’amélioration de la communication des
informations comptables et financières dans les entreprises au cameroun?
Ce questionnement étant nouveau dans les recherches en comptabilité
au cameroun, cet article présente trois grandes articulations dont la première fait le point de la
littérature et présente les hypothèses ; pendant que la deuxième est consacrée au cadre
méthodologique et la troisième, à la discussion des résultats.

2. La bonne gouvernance d’entreprise et communication des informations comptables et


financières : clarification de la littérature et déduction des hypothèses.

Selon bayart (2010), la communication des informations comptables et financières est


un « processus intégré dans la stratégie qui vise à mieux faire connaitre l’entreprise et ses
dirigeants, promouvoir son image auprès de ses partenaires en développant les outils qui
permettent d’entretenir avec eux les relations de long terme ». La communication des
informations comptables et financières qu’elle soit interne, externe ; ou institutionnelle est au
centre des débats dans les champs de recherche en comptabilité en indexant les mécanismes
de bonne gouvernance. En ce sens, la « bonne » gouvernance d’entreprise a essentiellement
une valeur incitative qui vise de s’assurer que les objectifs de l’entreprise sont conformes aux
intérêts, souvent contradictoires, des actionnaires ainsi que des autres parties prenantes
comme les clients ou le personnel. Pour charreaux (1997), la bonne gouvernance d’entreprise
est définie comme l’ensemble des mécanismes qui gouvernent les comportements des
dirigeants et délimitent leur latitude discrétionnaire. De plus hart et moore (1990) pensent que
la bonne gouvernance d’entreprise est « l’ensemble des règles de fonctionnement et de
contrôle qui régissent, dans un cadre historique et géographique donné, de la vie de
l’entreprise ». En effet la théorie des droits de propriétés (alchian et demsetz, 1937)* et la théorie
d’agence de jensen et meckling (1976), mettent en avant comme facteurs explicatifs les asymétries
d’information et les conflits d’intérêts. La répartition des pouvoirs dans le processus de
communication des informations comptables et financières dans les entreprises dépend du
contexte institutionnel où elle se situe.
En admettant que la production de l’information comptable et financière intimement
liée à la communication, tant pour des besoins d’échanges des biens et services que pour des
flux économiques, la théorique de la gouvernance montre que les rôles de l’actionnariat, du
conseil d’administration, le comité d’audit et de l’audit externe dans la politique des choix
comptables reposent sur les processus décisionnel des dirigeants.

2.1 L’actionnariat comme gendarme de la communication des informations comptables


et financières.
Le courant de la théorie positive de la comptabilité et de la théorie des droits de
propriété font l’objet de plusieurs travaux empiriques qui visent à expliquer la communication
des informations comptables à partir des mécanismes de gouvernance (hirigoyen, 2009 ;
dumontier et raffournier, 1993). En effet, la théorie de la gouvernance montre, que
l’actionnariat a un impact sur la communication des informations comptables financières,

*
Cités par Chekkar et Onnée (2006)
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lequel impact est lié aux problèmes d’agence pouvant générer les conflits d’intérêts entre les
partenaires (davidson et al, 2005 ; piot et janin, 2005). Dans une telle situation, les relations
conflictuelles sont souvent apparues dans le cas où certains dirigeants de l’entreprise
détournent une partie de l’information comptable et financière au détriment des autres parties
prenantes (mard, 2005). Pour cela, la théorie de l’agence met en exergue plusieurs sources
potentielles de distorsions liées à la communication des informations comptables financières
dans les entreprises. Les analyses faites par labelle et schatt, (2005) ; d’ahmed et dominique,
(2010) évoquent l’idée selon laquelle l’actionnariat a un impact sur la communication des
informations comptables et financières et les décisions des partenaires dans un grand nombre
d’entreprises aujourd’hui. De plus, les récentes dissimulations d’informations comptables
dans certaines entreprises camerounaises, qui ont semé le doute sur la qualité des états
financiers, ont pour origine la nature de l’actionnariat. De plus certaines entreprises du
cameroun, les travaux de sangue (2015) montrent que l’actionnariat veille sur la
communication des informations comptables et financières. Ceci rejoint les affirmations de
(vanden et levrau, 2007) qui pensent que l’actionnariat a un impact sur la communication des
informations comptables et financières parce qu’il agit sur la détermination des plans d’action
de l’entreprise. Ce raisonnement permet de formuler l’hypothèse suivante : h1 :
l’actionnariat influence négativement la communication des informations comptables et
financières.

2.2 L’interdépendance du conseil d’administration et la communication des


informations comptables et financières
Le cadre conceptuel de la relation entre le système de gouvernance et la communication
des informations financières et comptables dans les entreprises réside sur un certain
mécanisme de gouvernance tel que le conseil d’administration (mezghani et ellouze, 2007 ;
pesqueux, 2007). Le conseil d’administration dans le processus de prévention et détection des
pratiques frauduleuses dépend parfois de la présence d’administrateurs externes, c’est pour
cela que les analyses de (abbot et al, 2004 ; wafae, 2011 ; pesqueux, 2002) montrent que la
relation entre le conseil d’administration et la communication des informations comptables est
très significative. Dans le cas présent, le conseil d’administration encadre les comportements
managériaux en jouant un rôle disciplinaire (bowen, 1997 ; smaili, 2006). En s’appuyant sur
les exemples du cameroun, le système de gouvernance d’entreprise veut que les mécanismes
de gouvernance comme le cas du conseil d’administration arrêtent les comptes annuels et par
là, légitime l’information comptable et financière. Cela doit se faire sous l’approbation du
comité d’audit et des administrateurs indépendants. Le cadre règlementaire du conseil
d’administration en contexte ohada présente les obligations de gouvernance d’entreprise
permettant de discipliner les dirigeants. Ces règles sont contenues dans les articles 467, et
469 de l’acte uniforme ohada. C’est dans ce sens qu’on a observé la révocation des dirigeants
des entreprises au cameroun à l’instar de la camerounaise des eaux, la bicec et de
chronopost. Cette série de révocation des directeurs généraux a pour cause de la
communication des informations comptables et financières irrégulières. Le conseil
d’administration aide l’entreprise dans la formulation des stratégies (vanden et livrau, 2007).
Ce qui nous amène à proposer une hypothèse : h2 : le conseil d’administration contribue
positivement la communication des informations comptables et financières

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2.3 Le rôle du comité d’audit dans la communication des informations comptables et


financières.
Le cadre théorique des systèmes de gouvernance d’entreprise fait état des lieux, des
missions et pratiques du comité d’audit dans les entreprises. Au -delà de ces débats, le comité
d’audit dans le processus de bonne gouvernance d’entreprise répond aux objectifs suivants :
promouvoir les règles d’éthique et les valeurs appropriées au sein de l’entreprise, garantir une
gestion efficace assortie des comportements opportunistes, et bien communiquer des
informations comptables et financières pouvant créer la valeur (charreaux et wirtz,2006). Au
niveau de la réduction des asymétries d’information, il est admis que les rapports des
membres du comité d’audit permettent de créer des relations de confiance entre les différentes
parties prenantes et les entreprises (nathalie, 2019). Les études antérieures qui examinent
l’interrelation entre le comité d’audit et le système de bonne gouvernance d’entreprise
révèlent que, la prévention et la détection des irrégularités comptables sont liées aux efforts du
comité d’audit (krishan, 2005). Les études (d’abbott et al, 2004 ; vanden et levrau, 2007)
révèlent que le comité d’audit, à travers le conseil d’administration permet aussi d’atténuer les
conflits d’intérêts liés à la communication des informations comptables et financières. Au
regard de tout ce qui précède, nous pouvons émettre une hypothèse suivante. H3 le comité
d’audit influence positivement la communication des informations comptables et
financières ;

2.4 L’audit externe comme régulateur des asymétries d’information sur la


communication des informations comptables et financières.

Dans le but de résoudre les problèmes liés à la communication des informations


comptables entre les entreprises et ses partenaires, l’audit légal est aujourd’hui comme un
moyen mis en œuvre pour résoudre les problèmes d’agence. Ce dernier se réfère d’abord au
contrôle interne. La qualité de contrôle du vérificateur externe est associée positivement à la
communication des informations comptables et financières (pradit haudit, 2003). Elle a été
souvent mesurée par sa réputation et parfois son degré d’indépendance au client. De même les
études antérieures soulignent une relation négative entre un vérificateur appartenant au réseau
international et l’occurrence d’une irrégularité.
Par ailleurs, jensen et meckling (1976) font une lecture des relations entre l’entreprise et
ses partenaires en expliquant que celles-ci sont souvent fondées sur des conflits d’intérêt. Pour
réduire ces conflits, les systèmes externes de contrôle tel que la certification des comptes est
un mécanisme de surveillance garantissant la sincérité des informations financières
communiquées. La plupart des travaux empiriques sur l’audit légal s’accordent sur le fait qu’il
ne devrait agir que dans le sens de la protection des intérêts de tous les partenaires (djoutsa et
foka,2014).dans le contexte ohada, la mission d’audit légal dont l’objectif est au terme de
l’article 710 de l’acte uniforme, de certifier que les états financiers de synthèse sont réguliers
et sincères et donnent une image fidèle du résultat des opérations de l’exercice écoulé ainsi
que de la situation financière et de patrimoine de la société à la fin de cet exercice. Ces
affirmations rejoignent ceux de bayart(2010) qui pense que l’ancienneté de l’auditeur permet
d’éviter au maximum les erreurs pouvant compromettre la communication de l’information
comptable. De plus ; de angelo, (1981) pense que l’auditeur externe, dans le but d’obtenir les

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honoraires élevés, va produire un audit de qualité par un travail soutenu pouvant réduire les
conflits qui puissent contribuer à une communication des informations comptables de qualité.
Cette analyse permet de formuler l’hypothèse suivante : h4 : l’audit externe influence
positivement la communication des informations comptables et financières.
Tester ces hypothèses formulées permet de faire le tour de la méthodologie.

3. Cadre méthodologique de l’étude de la bonne gouvernance d’entreprise et la


communication des informations comptables et financières.

Le dispositif empirique de cette étude se décline sur quatre éléments


majeurs ; la constitution de l’échantillon, la construction du modèle théorique de recherche, l’
opérationnalisation des variables et la présentation d’outils statistiques d’analyse des données.

3.1 Construction de l’échantillon


Cette étude porte sur les sociétés anonymes ayant déposées successivement les procès-
verbaux des tenues de conseil d’administration auprès des tribunaux de grande instance
pendant au moins cinq ans. Pour cela, seules les entreprises ayant déposé régulièrement au
moins cinq déclarations statistiques et financières aux services des impôts et à l’institut
national de la statistique sont retenues dans l’échantillon. Cette spécification permet d’avoir
une visibilité de l’évolution des mécanismes de gouvernance dans ces entreprises. Après ce
nettoyage, l’échantillon final porte sur 130 entreprises de type sa. Les données ont été
recueillies par voie de questionnaire administré auprès des entreprises dans les grandes villes
douala, yaoundé et bafoussam parce qu’elles représentent près de 93%des grandes entreprises
selon l’institut national des statistiques du cameroun durant la période allant de 2015 à 2017.

3.2 Construction du modèle testable et opérationnalisation des variables

En faisant recours aux explications de (wirtz, 2004), la bonne gouvernance d’entreprise


a deux dimensions. La dimension organisationnelle décrit les caractéristiques de l’unité qui
est formellement chargée de produire et communiquer des informations comptables et
financières et la dimension chargée de contrôle des informations comptables et financières. Le
modèle retenu suite à notre analyse est donc le suivant.

Figure 1: cadre conceptuel entre la bonne gouvernance et la communication des


informations comptables et financières

Système de bonne gouvernance Finalités

-Conseil Administration - Réduction des Irrégularités


- Actionnariat - Efficacités du processus de
- Comité d’audit Informations prise de décision
comptables et - Accroissement de la
- Vérification externe financières performance
- Réduction de la vulnérabilité
de l’entreprise

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Source : l’auteur inspiré de la littérature

Ce modèle explique le rôle des mécanismes de gouvernance dans la surveillance


des choix stratégiques de communication des informations comptables et financières. Pour
cela le modèle économétrique permettant d’établir la relation entre les variables dépendantes
et indépendantes se présente comme suit.

Comm = 𝜷𝟎 + 𝜷𝒊 𝐱 𝐢 +µ i= 1, 2… 4 (1)
Avec xi , les variables explicatives, 𝜷𝒊 les coefficients de régression, 𝜷𝟎 constante et le µ
terme d’erreur. Cette équation est la suivante:

Com = o + 1 actionnariat

+ 2 conseild’administration

+ 1 comite d’audit

+ 4audit externe inter + µ(2)

Les variables qui sont retenues dans ce modèle ne sont nullement pas exhaustives, leurs
indicateurs ne sont parfois que des approximations limitées de la réalité des différents
éléments de la problématique. Dans une perspective plus explicative que descriptive, l’objet
du volet empirique de cette recherche se situe au niveau des éléments de la réponse que l’on
pourra apporter. Si les études permettent d’expliquer le modèle économétrique, comment
opérationnaliser les variables ?
3.3. Opérationnalisation des variables d’analyse
Il s’agit ici de présenter les variables de l’étude, en particulier les variables dépendantes
(expliquées) et les variables indépendantes (explicatives).

3.3.1. Variable dépendante : la communication d’informations comptables et financières.


L’objectif est de chercher à opérationnaliser la communication des informations
comptables et financières. Pour ce faire, il sera question dans cette partie de définir les
variables de la communication des informations comptables et financières. Ces variables sont
collectées par les indicateurs du respect de délai de communication et la fréquence de
communication.
3.3.1.1 Délais de communication des informations comptables et financières

Partant du cadre règlementaire d’ohada dans son article 7, la date de clôture de


l’exercice est fixée en décembre de chaque année. Par contre, selon la législation fiscale, la
publication des états financiers par les entreprises légalement responsables est fixée à trois
mois à compter de la date de clôture des comptes. Chaque entreprise doit communiquer ses
états financiers dans cet intervalle, au-delà de ce temps l’entreprise est défaillante. La variable
délai de communication est une variable qui est fonction du temps de publication des états

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financiers (c'est-à-dire la période peut être pour un, deux, trois, quatre mois et plus). De plus,
comme le précise tikiré et al (2013) le respect de délai de publication est aussi fonction du
temps règlementaire, et toutes les entreprises qui ne respectent pas le délai ont une intention
de maquiller leurs informations comptables et financières. Agrawal et al (1999) renchérissent
en expliquant que, l’information comptable communiquée sans respect de délai est très
souvent contestée par les utilisateurs à cause du non-respect du calendrier règlementaire. Par
ailleurs, matoussi (2009 explique que, la performance d’une organisation est liée au respect de
la réglementation dans le processus de communication des comptes annuels. Mard et marsat
(2008) ont conclu que cette variable permet de détecter les défauts des états financiers.

3.3.1.2 La fréquence de communication des informations comptables et financières.

Conformément aux appréciations des théoriciens, les entreprises camerounaises


communiquent des informations comptables et financières aux différents destinataires. La
fréquence de communication des informations comptables dans les entreprises comme le
précisent (baidari, 2005 ; saghroun et simon, 1999), est justifiée par la prise de
décision, la demande de financement et autres. De même, zambon (1996) explique que le
respect de la règlementation explique que la fréquence de communication de l’information
comptable et financière, peut se faire plusieurs fois par an (soit par trimestre, par semestre ou
quand le besoin se fait ressentir). Ces mesures d’association montrent et traduisent une
relation de forte intensité entre les variables liés à la ponctualité, au nombre de fois par
trimestre, par semestre. La faible fréquence de communication des états financiers entre les
acteurs entraine plus de manipulation (bardos, 2012). En somme, ces variables dépendantes
sont plus influencées par les variables indépendantes.

3.3.2. Variables indépendantes

Pour vérifier les différentes hypothèses h1, h2, h3, h4, nous développons des variables
relatives à l’effort de contrôle de l’actionnariat, du conseil d’administration, du comité d’audit
et de l’audit légal, qui constituent les variables indépendantes. Ces variables caractérisent les
mécanismes de bonne gouvernance d’entreprise au cameroun. Si tel est le cas quelles sont ces
différentes variables ?

3.3.2.1 variables liées à l’actionnariat

L’opérationnalisation des variables liées à la géographie du capital présente deux


indicateurs principaux : la propriété managériale et la concentration du capital.
À la lumière des travaux antérieurs, il ressort que pour cette variable, le pourcentage
d’actions détenues par les managers en constitue un indicateur privilégié. Selon la théorie
d’agence, augmenter le nombre d’actions détenues par les managers est la méthode la plus
directe qui permette d’aligner les intérêts des gestionnaires avec ceux des actionnaires. La
plupart des études montrent que la propriété managériale est une variable à forte intensité de
contrôle dans le processus de communication des informations comptables et financières dans
les entreprises en plus de ce que leur relation est curviligne (hermalin et weisbach, 1988 ;
chung et pruitt, 1995). De plus, zéghal (2005) suggère qu’il existe aussi une relation entre la
forte proportion du capital détenu par les dirigeants et le contrôle de l’information comptable
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communiquée. En sus, les résultats de son analyse montrent qu’un manager ayant une large
fraction de capital dans l’entreprise présente un pouvoir de contrôle fort dans le processus de
communication des informations comptables et financières. Dans ce cas, ces auteurs pensent
que ce mode contrôle à la probabilité de jouer sur la communication de l’information
comptable et financière surtout lorsqu’elle présente des défauts. S’il est avéré que la propriété
managériale est une variable de contrôle dans l’entreprise qu’adviendrait-elle de la
concentration du capital ?
Selon denis et mcconnell, (2003) la concentration de l’actionnariat est constituée
comme un moyen de contrôle de réduire les coûts d’agence engendrés par les conflits
d’intérêts entre les actionnaires et le dirigeant. La concentration de l’actionnariat renforce
donc le contrôle exercé sur le dirigeant dans le cas où l’entreprise enregistre un niveau faible
de performance. Dans le cadre de cette étude, cette variable est caractérisée par le
pourcentage d’actions détenues par les actionnaires, majoritaires. Parmi ces actionnaires on a
les personnes physiques, entreprises camerounaises et entreprises étrangères. Ainsi, (anderson
et jayaraman 1992; kang et shivdasani, 1995) ont mis en évidence l’efficacité de la fonction
de contrôle assurée par l’actionnariat majoritaire dans les entreprises où il investit. Wafae
(2011) tente de montrer que le pourcentage du capital détenu par les actionnaires majoritaires
est un moyen de contrôle de la communication des informations comptables et financières.
Qu’adviendrait-il pour le pourcentage de l’actionnariat majoritaire ?
Cette variable est mesurée par le pourcentage d’actions détenues par les autres
administrateurs qui peuvent être des entreprises. Elle a été utilisée par (abbott et al. 2004 ;
baber et al., 2005 ; faber, 2005 ; nadia, 2006 ; wafae, 2011 ). Par ailleurs, beasley (1996 et
1998) montre que le pourcentage d’actions détenues par les administrateurs externes est plus
important dans les entreprises qui ne communiquent l’information comptable et financière
que dans les firmes de contrôle. Cette variable prend la valeur 1 pour moins 25%, la valeur 2
entre 25 et 50%, la valeur 3 entre 50 et 75%, et la valeur 4 pour plus 75%. Comment se
caractérise le nombre d’administrateurs détenant l’expertise comptable et financière ?

3.3.2.2 variables liées au conseil d’administration

afin de vérifier l’hypothèse (h2), nous développons des variables relatives à l’effort de
contrôle du conseil d’administration : sa taille, sa composition, la présence d’administrateurs
détenant une expertise financière, la liberté de publier les résultats d’audit comptable et la
séparation de pouvoir. Ces variables ont été principalement collectées à partir des entreprises
dont les questionnaires ont été remplis.

Du point de vue de la taille, cette variable mesure le nombre d’administrateurs présents


dans le conseil d’administration. Elle a été utilisée par (abbott et al, 2004 ; beasley 1996 ;
farber, 2005 et evraert et al, 2003 ; wafae, 2011) et montre, par exemple que la taille du
conseil est associée à la probabilité de communication des états financiers. Cependant, farber
(2005) et roth (2012) ne trouvent pas de différences significatives entre les firmes
frauduleuses et les firmes de contrôle pour la taille du conseil d’administration. La relation
entre la taille du conseil et la communication des informations comptables est parfois
ambiguë.

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Concernant la variable mesurée, le degré de cumul des fonctions qui est un aspect qui
caractérise la gouvernance d’entreprise. Cette variable a été utilisée par (chen et al, 2000 ;
montandrau, 2004). A cet effet, la théorie d’agence présente les avantages de la séparation des
positions du président du conseil et du manager. Elle considère la présence de la structure
duale dans la firme comme une entrave à l’efficacité des mécanismes de contrôle de la
structure de gouvernance et recommande la séparation des rôles. Par ailleurs, la théorie de la
succession normale explique que, la structure duale de leadership se présente comme une
partie de la succession normale employée pour remplacer le manager ou le président renvoyé.
A cet effet, la période d’essai évalue la performance et détermine s’il est prêt ou non pour
occuper le poste. Cette variable prend la valeur 1 si le pdg préside également le conseil
d’administration et la valeur 0 dans le cas contraire. A l’instar de dechow et al. (1996), farber
et persons (2005), nous supposons que la relation entre la dualité de fonctions du pdg et le
niveau de communication des informations comptables et financières vont de concert.

Pour ce qui est du rôle des administrateurs, les débats sur leur rôle d’administrateurs
dans le processus de communication de l’information comptable et financière mettent l’accent
sur les attributs normatifs de ce dernier. Cette variable est mesurée par la nature professionnel
et du titre détenu, leur domaine de spécialisation et leur expérience. Ainsi les travaux de
dumontier et raffounier (1999) montrent que la présente d’administrateurs ayant l’expertise en
comptabilité et finance a une influence sur l’information comptable communiquée par les
entreprises.

3.3.2.3 Variable liée au comité d’audit et audit externe

Du point de vue théorique, le paradigme positiviste en comptabilité met en exergue le


rôle déterminant du comité d’audit dans la communication des informations comptables et
financières (knapp, 1978 ; fama et jensen 1983; classe, 2002). Pour ces derniers, cette variable
est mesurée par la taille, la présence d’un expert en comptabilité et finance dans le comité
d’audit et son indépendance. En effet, selon charles et al (2009) la taille est mesurée par le
nombre de membres présents au comité d’audit jouant un rôle dans la crédibilité de
l’information comptable et financière. Pour mootaz (2019), la variable d’indépendance du
comité d’audit est mesurée par le nombre de membres externes, traduisant mieux les
directives règlementaires concernant la présence de ce dernier. Pour la variable relative à
l’expertise comptable et financière celle-ci mesure l’efficacité de contrôle du comité d’audit.
Cette variable est mesurée par la réputation, l’indépendance, et la compétence. Pour la
réputation, elle est mesurée par l’appartenance de l’auditeur au réseau international qui prend
les valeurs 1 et 0 dans le cas contraire. L’indépendance, elle est mesurée par les autres services
rendus par l’auditeur et cette variable prend la valeur 1 et dans le cas contraire la valeur 0. La
variable la compétence quant à elle est mesurée par la durée de mandat. Briand (1998) précise
que cette durée est liée à l’expérience. Ces variables ont été utilisées par (mcmullen, 1996 ;
defond et jiamblvo, 1991 ; chekkar et al, 2009 ; briand, 1998 ; baber et al, 2005). Une étude
effectuée par piot et janin (2005) montre qu’une entreprise choisit son vérificateur externe en
fonction de la compétence, car celle-ci permet de satisfaire les besoins courant de l’entreprise
(créer de la valeur, crédibiliser l’information comptable et financière, améliorer la
performance, et être rassurés etc.). De plus, nous avons également mesuré l’indépendance du

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vérificateur externe à partir de la perception des honoraires de consultation.

4. Tests de spécification et de robustesse du modèle

Le tableau1 ci-dessous restitue la synthèse du test de spécification et de robustesse du


modèle.

Tableau 1: tests de spécification et de robustesse du modèle

Khi-deux - R2
Modèles
2logvraisemCox Nagel-
& Constante
Valeur Sig blance snell kerke
Modèle 1 71,618 ; 0,000*** 100,282 0,439 0,585 26,109**
Modèle 2 22,224 0,041** 149,676 0,164 0,301 0,431
***
: significatif au seuil de 1% et ** : significatif au de 5%

Le modèle 1 correspond au respect des délais de communication et le modèle 2 à la


fréquence de communication. L’explication du modèle consiste à comparer si les prédictions
du modèle correspondent avec la réalité.
-2log de vraisemblance mesure la qualité d’ajustement du modèle aux données. Plus la
variable est faible, plus l’ajustement est meilleur. L’examen du tableau ci-dessus montre que
le modèle1 est meilleur que le modèle2 (100,282 < 49,676).ainsi, nous remarquons une valeur
positive et significative au seuil de 1% pour le modèle1 et une valeur positive et non
significative pour le second modèle. Les statistiques de khi-deux attestent que les deux
modèles sont significatifs au seuil de 1% pour le premier modèle et de 5% pour le second
modèle. Ainsi, on en conclut selon le r2 de nagelkerke d’une part que les variables recensées
pour caractériser les mécanismes de bonne gouvernance d’entreprise (actionnariat, conseil
d’administration, comité d’audit et l’audit externe) expliquent à 58,5% pour le respect des
délais et 30,1% la fréquence de communication des informations comptables et financières.
En se référant aux deux modèles, il ressort qu’il y a problème de multi-colinéarités entre
certaines variables. En effet, selon kinney et mcdaniel (1989), pour se prononcer sur un
problème de multi colinéarité entre les variables indépendantes incluses dans un modèle de
régression, il faudrait que r ≥ 0,6. De même kevin (1992) pense que pour se prononcer sur un
problème de multi- colinéarité entre les variables indépendantes dans un modèle de régression
il faut que r≥ 0,7. Dans le cas d’espèce, l’examen des coefficients de corrélation de pearson
montre qu’il existe une zone critique. Ce qui nous pousse à utiliser une régression logistique
ascendante (pas à pas) qui consiste à éliminer une à une les variables non significatives,
jusqu’à l’obtention d’une synthèse du modèle final globalement significatif. Le tableau 3 ci-
dessus présente les résultats de la régression logistique du test d’hypothèses entre les variables
dépendantes et les variables indépendantes.

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Tableau 3: synthèse des résultats de l’estimation des paramètres des différents modèles
de la regression logistique

4.1 Interprétation des résultats et discussion

Communication des informations comptables et financières


Variables Modèle1 (délais) Modèle 2 (fréquence)
A S.e Wald Sig. A S.e Wald Sig.
Propriété **
-1,501 ,388 14,965 0,018
mana
Part
1,203 ,362 11,043 0,008*** ,560 ,215 6,802 0,009***
majoritaire
Séparation
1,522 ,480 10,057 0,002***
pouvoir
Evolution
des ,739 ,322 5,280 0,022**
honoraires
Appart
internation 1,842 ,653 7,955 0,005*** ,572 ,274 4,361 ,037**
ale
Ancienneté
-1,511 ,583 6,709 0,010** ,887 ,400 4,905 0,027**
auditeur
Comite
-,884 ,258 11,720 0,001*** -,307 ,178 2,983 ,084*
audit
Administra
teurs 1,564 ,602 6,750 0,009***
externes
Expert
fico au ,658 ,514 1,638 ,0201**
conseil
Constante 6,143 1,668 13,567 0,000*** 26,109 11,131 5,502 ,431

*** **
: significatif au seuil de 1% ; : significatif au seuil de 5% et * : significatif au seuil de
10%.

Cette interprétation permet d’analyser les liens entre les mécanismes de bonne gouvernance et
la communication des informations comptables et financières.

4.1.2 Influence de l’actionnariat sur la communication des informations comptables et


financières.

En parcourant le tableau 3 ci-dessus, nous remarquons que l’influence de l’actionnariat


sur la communication des informations comptables et financières est mesurée par la part du
capital détenue par le dirigeant, l’actionnaire majoritaire et la présence d’institutionnels. En ce
qui concerne la part du capital détenue par le dirigeant, nous constatons qu’après la lecture du
tableau, celle-ci influence négativement au seuil de 5% sur la probabilité d’avoir une

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communication d’informations comptables et financières lorsqu’elle est appréhendée par le


respect des délais. Ces résultats expliquent que le dirigeant a une forte implication dans la
production de l’information comptable. Par conséquent, sa communication est entachée
d’irrégularités. Cette analyse rejoint celle de certains auteurs comme (smaili, 2006 ; wafae,
2011 ; onnée et rahma, 2005 ; ngantchou, 2008) qui expliquent que les irrégularités dans la
communication des informations comptables et financières dans les entreprises ont pour
origine la forte présence du monitoring du dirigeant de par l’importance des parts qu’il détient
dans le capital de l’entreprise. Cette analyse va de concert avec certaines prédictions sur
certaines entreprises du cameroun qui stipulent que la manipulation de l’information
comptable et financière a pour cause principale la forte présence du dirigeant dans le
processus de communication. Car la logique de rendre compte est parfois de façade « trompe
l’œil » dans les entreprises du cameroun. Ceci permet de valider l’hypothèse h.1 qui énonce
que l’actionnariat influence négativement la communication des informations comptables
et financières.

4.2.2 Influence du conseil d’administration sur la communication des informations


comptables et financière

En parcourant d’avantage le tableau 3 ci-dessus, il ressort que l’indépendance du conseil


d’administration mesurée par la proportion d’administrateurs externes, influence positivement
au seuil de 1% la communication de l’information comptable et financière si celle-ci est
appréhendée par le respect des délais. Ces résultats convergent vers ceux prédits par certains
auteurs (mfouapon et feudjo 2013 ; godard et al 2000 ; cormier et al 2006 ; mezghani et
ellouze, 2007) qui estiment que la présence d’administrateurs externes constitue une
participation importante au contrôle des informations comptables et financières parce qu’ils
sont susceptibles de défendre les intérêts des autres parties prenantes, en se liguant contre les
dirigeants lorsqu’il y a des irrégularités comptables et financières ; l’exemple de la
camerounaise des eaux en 2016 constitue le cas le plus récurrent de l’influence des
administrateurs où ceux-ci ont rattrapés les dirigeants dans la tricherie des achats des
immobilisations. De plus, en prenant l’exemple de l’ancien camair du cameroun, c’est grâce à
la présence d’administrateurs externes que certains dirigeants de cette entreprise ont été
traqués dans les pratiques irrégulières de l’information comptables. Ces résultats trouvent
leurs champs d’action dans les travaux de (wirtz, 2008 ; mezghani et ellouze, 2007 ; minko,
2016). Ce qui valide l’hypothèse h.4 selon laquelle le conseil d’administration influence
positivement la communication des informations comptables et financières.

4.2.3 Résultats de l’influence du comité d’audit sur la communication des informations


comptables et financières

En faisant l’examen du comité d’audit, il ressort qu’il influence significativement (au


seuil de 1% pour le respect des délais et 10% pour la fréquence) la probabilité d’avoir une
communication d’information comptable et financière non conforme. Ce lien est négatif si
elle est appréhendée par le respect des délais de communication, et négatif aussi si elle est
mesurée par la fréquence de communication. Ces résultats vont en droite ligne de ceux de piot
et janin (2005) qui pensent que ce dernier permet d’examiner la relation entre la gouvernance

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et le niveau de non-conformité des informations comptables et financières, grâce à la présence


d’expert en comptabilité et finance. Ainsi, cette association agit sévèrement à la
manipulation des informations comptables et financières. Ces résultats confirment que le
comité d’audit influence négativement la non-conformité telle que la fraude de l’information
comptable et financière en mettant l’accent sur l’information prévisionnelle.
Pour sansa (2006), le comité d’audit a pour rôle d’améliorer l’efficacité du conseil
d’administration grâce à la présence d’expert en comptabilité qui minimise les risques
opérationnels de non-conformité et accroit la qualité de l’information comptable et financière.
Au regard de tous ces avis, nous pensons dans les entreprises du cameroun le comité d’audit
veille à ce que les décisions soient mûrement réfléchies ; c'est-à-dire les décisions ne soient
entachées d’aucun conflit d’intérêt important. Ce fut le cas de l’affaire du feicom en 2005 où
le comité d’audit avait fait un rapport qui accablait les dirigeants de l’entreprise. Ces résultats
rejoignent ceux de labelle et piot(2003) ce qui confirme l’hypothèse h3 : le comité d’audit
influence négativement la non-conformité de communication des informations
comptables et financières. Cette hypothèse s’inscrit dans l’approche standard de la
composition du conseil d’administration dont la mise en place doit avoir pour objet de
renforcer la crédibilité de l’information comptable et financière communiquée par l’entreprise.

4.2.4 Résultats de l’influence de l’audit externe sur la communication des informations


comptables et financières

En examinant la présence de l’auditeur externe, il nous permet de constater que


l’appartenance de l’auditeur à un réseau international influence positivement (au seuil de 1%
le respect des délais de communication, et 10% pour la fréquence de communication) sur la
probabilité d’avoir une communication d’information comptable et financière conforme. Ces
résultats réconfortent la littérature en ce sens que, l’appartenance de l’auditeur à un réseau
international est un enjeu d’efficacité dans la conception du métier. Cette conception est
d’autant plus à priori dans le but de réduire les distorsions d’une information comptable et
financière non conforme. Ainsi, ces résultats rejoignent ceux de manita et al. 2007 ; foka et
djoutsa 2014 ; cauvin et al, 2006) qui considèrent que la compétence de l’auditeur est liée à
l’appartenance à un réseau qui est une approche cognitive renforçant l’intégrité de la
comptabilité de l’entreprise et ses pratiques dans le processus de communication des
informations comptables et financières. De plus, susanti (2012) pense que le jugement des
auditeurs peut être bien effectué par des relations qu’entretiennent ces professionnels avec
leurs clients. Ces résultats vont en droite ligne avec ceux de (maijoor et vanstraelen, 2006
manita et al. 2007 ; djongoue, 2007 ; colasse, 2003 ; sakka et manita, 2011) ; qui énoncent
que l’ancienneté de l’auditeur assure un rôle de gardien de confiance dans la qualité des états
financiers les dirigeants. Ce qui confirme l’hypothèse h.4 qui énonce que : l’audit externe
influence positivement la communication des informations comptables et financières.

4.2 Implications managériales

Dans le cadre de cette recherche, pour ce qui est de la dimension qualité de


l’information, ces résultats s’inscrivent dans l’approche de l’orthodoxie des mécanismes de
bonne gouvernance (conseil d’administration, audit légal, comité d’audit, propriété

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managériale) permettant de repenser à la communication des informations comptables et


financières comme notion intégrée dépassant les simples mesures de survie en termes de
risques de disparition et de défaillance. De plus, l’intégration d’autres éléments institutionnels
(lois et normes comptables) régis par les règles, au-delà d’un effet direct et statique de la
performance organisationnelle, constituent les déterminants potentiels permettant de réduire
les faillites organisationnelles. Au-delà d’un effet direct est le conseil d’administration est un
déterminant potentiel de l’amélioration de la communication des informations comptables et
financières.
Pour ce qui est de la mesure stratégique de l’audit externe et du comité d’audit, les
exigences de la communication des informations comptables et financières de qualité
montrent que l’association d’indicateurs non financiers (l’éthique, la transparence) doit être
envisagée, bien qu’une difficulté réside dans le fait que certains indicateurs liés aux stratégies
organisationnelles, mais demeurent pertinentes qu’au niveau des entreprises. Ces résultats
suggèrent de repenser à la communication de l’information comptable dans entreprises par
l’intégration de ces mécanismes de gouvernance dans l’agenda de la structure de ces
organisations pour minimiser les risques de disparition et des d défaillances. Cette perspective
semble assez intéressante, car elle pourrait aboutir à des implications managériales
importantes pouvant créer un climat confiance et résoudre des conflits d’intérêts entre les
parties prenantes. Cependant, ces mesures se heurtent à des écueils managériaux majeurs
relevant de la difficulté d’appliquer dans certaines entreprises compte de la structure du
capital où la famille exerce une grande influence. Il nous semble aussi qu’une réplication de ce
travail à toutes entreprises de différents secteurs pourrait aboutir à une meilleure
généralisation des résultats obtenus. Enfin, l’introduction d’une analyse dynamique par
l’identification des « moments » clés dans le cycle de vie des entreprises disparues serait
l’occasion de situer de manière précise les « fenêtres » de risque de disparition et de mortalité.

Conclusion

Cette étude consistait d’évaluer les effets des mécanismes de bonne gouvernance
d’entreprise sur la communication des informations comptables et financières. L’objectif étant
d’examiner l’impact des attributs des mécanismes de bonne gouvernance pouvant contribuer à
l’amélioration de la communication des informations comptables et financières. Les résultats
de l’étude montrent que les mécanismes de bonne gouvernance influencent positivement ou
négativement le processus de communication des informations comptables et financières. Ces
résultats tentent d’enrichir l’aspect théorique des travaux empiriques dans une économie de
petite taille comme le cas du cameroun ; ce qui auparavant n’a fait l’objet d’aucune étude
dans le contexte. Cette recherche peut être notamment utile aux autorités des marchés
financiers pour cibler les entreprises qui sont susceptibles d’avoir des problèmes de
gouvernance en matière de communication des informations comptables et financières,
lesquelles devraient focaliser leurs efforts d’inspection et d’analyse, car les entreprises qui ne
présentent pas une visibilité sur les mécanismes de bonne gouvernance ne sauraient constituer
une valeur ajoutée pour une économie en développement. Pour ce qui est de la contribution
théorique, cet article permet de s’affranchir des critiques remettant en cause les modèles de
gouvernance dans les entreprises en afrique au motif de la non prise en compte exclusive des
variables individuelles où il y a absence du marché financier. En questionnant sur l’actualité

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de la théorie positive et de la théorie normative de la comptabilité ces travaux légitiment notre


choix de réaliser sur un pays africain. Cette étude laisse néanmoins une question en suspens à
savoir : quelle est la relation entre les choix comptables et la communication des informations
comptables et financières ?

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