dossier
Agressions sexuelles
Pédophilie : diagnostic
et traitement
Pedophilia: diagnostic and treatment
H. Delavenne*, S. Lamy**, F. Thibaut***
L
es médecins ont de plus en plus à prendre en
charge des auteurs de violence sexuelle, dont un
certain nombre, environ 10 %, sont atteints de
pédophilie (1). Cette prise en charge thérapeutique
est un enjeu sociétal majeur de par les importantes
conséquences psychiatriques et médicales à long
terme de la violence sexuelle sur ses victimes (2, 3).
Établir le diagnostic de pédophilie chez un auteur
de violences sexuelles et lui proposer un traitement
adapté permet de limiter son risque de récidive et
d’améliorer sa qualité de vie.
Critères diagnostiques
Les patients pédophiles sont surtout des hommes
(plus de 90 % des cas). Les troubles commencent
dans la majorité des cas à l’adolescence et évoluent
de façon chronique (2, 4). Le terme “paraphilie”,
littéralement “attirance pour ce qui est déviant”,
regroupe les anciennes perversions sexuelles et
les comportements sexuels déviants. L’Association
américaine de psychiatrie (APA) a publié en 2013
la cinquième version du DSM (Manuel diagnostique
et statistique des troubles mentaux), une classifica-
tion diagnostique des troubles mentaux (5). Dans le
DSM-5, des changements sont apparus pour souli-
gner la différence entre un intérêt sexuel atypique
(paraphilie) et une pathologie mentale (trouble
paraphilique) entraînant une souffrance pour le
sujet et/ou pour autrui (en cas de passage à l’acte
délictueux). Huit principaux troubles paraphiliques
sont décrits : le trouble exhibitionniste, le trouble
frotteuriste, le trouble voyeuriste, le trouble féti-
chiste, le trouble pédophilique, le trouble masochiste
sexuel, le trouble sadique sexuel et le trouble de
travestissement fétichiste (5). D’après le DSM-5,
le trouble pédophilique peut être diagnostiqué s’il
existe des fantasmes sexuellement excitants, des
impulsions sexuelles ou des comportements surve-
nant de façon répétée et intense impliquant des
sur mineurs
enfants de moins de 13 ans pendant une durée de H. Delavenne
plus de 6 mois (critère A) et si ce comportement est
responsable d’une souffrance cliniquement significa-
tive ou de perturbations du fonctionnement social,
occupationnel ou dans d’autres domaines importants
pour le sujet lui-même ou pour les autres (critère B).
Le patient doit être âgé de plus de 16 ans et avoir au
moins 5 ans de plus que sa victime. La pédophilie
peut être caractérisée comme exclusive, cas dans
lequel l’excitation sexuelle du sujet est uniquement
en lien avec des stimuli ou fantasmes déviants, ou
non exclusive, et le sujet peut alors présenter une
excitation sexuelle en lien avec des stimuli sexuels
non déviants (2).
Contexte de la prise en charge
des patients pédophiles
Comme les conduites sexuelles déviantes sont très
stigmatisées, les patients pédophiles consultent
malheureusement peu avant le premier passage
à l’acte sexuel délictueux (6). En France, il semble
que, dans la plupart des cas, le sujet soit amené à
consulter sur injonction du juge au décours d’un
crime ou délit sexuel (1, 7). Dans le cadre de soins
ordonnés pénalement, le patient sera suivi à la fois
par une équipe socio-éducative et par une équipe de
professionnels de santé (1). La prise en charge des
patients pédophiles auteurs d’agression sexuelle
* Département de santé mentale,
comporte donc plusieurs dimensions : médicale, Institut national des sciences et tech-
psychologique et socio-éducative (2, 8). La construc- nologies moléculaires (INCT), faculté
de médecine, université fédérale du
tion d’une bonne relation thérapeutique entre le Minas Gerais, Belo Horizonte, Brésil.
patient et l’équipe de soins est le premier objectif de ** Service de psychiatrie et de psycho-
la prise en charge. Une demande de soins de la part logie médicale, CHU de Martinique,
Fort-de-France ; Inserm U 669 Impact
du patient peut ainsi apparaître ou être renforcée. des psychotraumatismes en Outre-
Le soin visera à la fois à améliorer le fonctionne- mer (IPOM), Paris.
*** Service de psychiatrie-addicto-
ment psychosocial du patient et à diminuer l’activité logie, CHU Cochin, site Tarnier ; fa-
sexuelle déviante. Ces objectifs auront ainsi pour culté de médecine Paris Descartes ;
Inserm U 894, Centre de psychiatrie
conséquence une réduction du risque de récidive et neurosciences (CPN), Paris.
de violence sexuelle. L’absence de récidive ne peut
La Lettre du Psychiatre • Vol. X - n° 4-5 - juillet-août-septembre-octobre 2014 |  119
Mots-clés
Pédophilie Résumé
Auteurs de violence Les enjeux éthiques, juridiques, sociaux et thérapeutiques de la prise en charge des patients pédophiles font
sexuelle d’elle un défi pour les cliniciens. La psychothérapie est indiquée pour tous les patients. Une prise en charge
Paraphilie pharmacologique est recommandée dans certains cas. Les antidépresseurs du type des inhibiteurs de recapture
de la sérotonine restent les plus prescrits, toutefois hors AMM, en pratique clinique, compte tenu de leur bénéfice
Inhibiteur dans les paraphilies à faible risque de passage à l’acte et à forte tonalité compulsive, ou en cas de dépression
de la recapture associée. Deux classes de traitements hormonaux ont obtenu l’AMM en France dans la prise en charge des para-
de la sérotonine philies les plus sévères : l’acétate de cyprotérone et les analogues de la GnRH ; ils réduisent significativement
Agoniste de la GnRH et de façon réversible l’intensité et la fréquence des fantasmes et des comportements sexuels déviants. Leurs
effets indésirables imposent néanmoins une surveillance médicale stricte, et des recherches sont en cours pour
Acétate
mieux évaluer leur rapport bénéfice/risque. Enfin, une étude en cours permet de faire un état des lieux des sujets
de cyprotérone paraphiles délinquants sexuels en France.

Summary
The treatment of paraphilic sex
offenders remains a clinical
challenge because of ethical,
legal, societal and therapeutic
issues. Psychotherapy is indi-
cated in all cases. Several
pharmacological options are
available. In case of obsessive-
compulsive spectrum disorder
or depressive disorder associ-
ated to deviant sexual desire
in patients with a low risk of
sexual violence, the use of anti-
depressants such as serotonin
reuptake inhibitors might be
a therapeutic option. In case
of severe paraphilia, such as
pedophilia with a high risk
of sexual violence, hormonal
treatments may significantly
reduce the deviant sexual
desire and behavior. In France,
two hormonal treatments are
available, cyproterone acetate
and long-acting GnRH agonists.
We are currently studying the
risk/benefit ratio of pharmaco-
logical treatments in French sex
offenders, and of this paper is a
presentation our study.
Keywords
Pedophilia
Sex-offender
Paraphilia
Serotonin reuptake inhibitor
GnRH agonist
Cyproterone acetate
pas être considérée comme l’unique objectif de la
prise en charge par l’équipe de soins (2, 8). La prise
en charge médicopsychologique comporte plusieurs
axes : l’évaluation du sujet, qui recherche une ou
plusieurs paraphilies, des troubles de la personnalité
ou des troubles psychiatriques associés, le traite-
ment des troubles somatiques et psychiatriques
comorbides, la psychothérapie et, éventuellement,
le recours à des traitements pharmacologiques. Des
recommandations portant sur la prise en charge des
auteurs d’agression sexuelle à l’encontre des mineurs
de moins de 15 ans ont été publiées en 2010 par
une commission nationale placée sous l’égide de la
Haute Autorité de santé (8). Des recommandations
internationales portant plus spécifiquement sur le
traitement pharmacologique des paraphilies ont
été publiées sous l’égide de la World Federation of
Societies of Biological Psychiatry (WFSBP) et sont
disponibles sur son site, dans la rubrique “Treatment
Guidelines” (www.wfsbp.org) [6]. Des recommanda-
tions concernant la prise en charge des adolescents
agresseurs sexuels seront bientôt disponibles sur
ce même site.
Prise en charge
psychothérapeutique
La psychothérapie est recommandée pour tous les
auteurs de violence sexuelle (6, 8). L’association de
prises en charge psychothérapeutique et pharmaco-
logique est plus efficace que le traitement pharmaco-
logique ou psychothérapeutique utilisé seul (4, 9).
De plus, la réduction de la libido obtenue avec les
traitements hormonaux semble augmenter les résul-
tats de la psychothérapie chez certains patients à
haut risque de violence sexuelle (2).
Les modalités de la psychothérapie sont à adapter
aux capacités psychologiques du patient ainsi qu’à
son niveau de verbalisation et à sa motivation. La
demande du patient peut être totalement diffé-
rente s’il consulte de lui-même ou s’il est adressé
dans le cadre d’une injonction de soins (7). Les
psychothérapies peuvent être conduites en groupe
ou individuellement et sont de type psychodyna-
mique, cognitivocomportemental, systémique ou
familial, selon l’âge, les besoins et l’évolution du
sujet. Les psychothérapies individuelles fonctionnent
mieux si le patient est motivé, s’il a des potentia-
lités d’autoanalyse, de symbolisation et d’insight
(8). Les thérapies de groupe permettent d’améliorer
la verbalisation et la capacité d’introspection des
patients et ont montré des résultats intéressants
(10). La thérapie cognitivocomportementale vise en
général un meilleur fonctionnement psycho­social.
Elle cherchera à améliorer chez le patient les rela-
tions interpersonnelles, les habilités sociales, comme
l’affirmation de soi et l’empathie, la gestion du stress
et des émotions telles que la colère, l’impulsivité et
les moments dépressifs. Le développement d’une
autocritique, des capacités d’insight et l’accroisse-
ment de l’estime de soi sont également des objec-
tifs importants. La psychothérapie chez les patients
auteurs de violence sexuelle œuvre plus spécifique-
ment à ce que le patient reconnaisse les faits ainsi
que les émotions de la victime et la perception de
la contrainte et de la violence qu’il a exercées sur
l’autre lors de l’agression sexuelle (10). Actuellement,
aucune étude contrôlée ne permet de proposer avec
certitude au patient le type de psychothérapie le
plus adapté à ses troubles paraphiliques.
Les traitements
pharmacologiques
et leur surveillance
Avant toute intervention pharmacologique, une
évaluation clinique psychiatrique cherchera à
caractériser la ou les paraphilie(s), les traitements
précédents et la réponse obtenue, les troubles
psychiatriques ou les troubles de personnalité
comorbides et la présence d’un déficit intellectuel
ou d’une démence (6). Le traitement idéal pour
un patient pédophile réduirait les fantasmes et les
comportements sexuels déviants tout en permettant
une vie sexuelle normale. Il n’existe pas actuelle-
ment et ceux qui sont disponibles diminuent, de
façon globale, l’activité et le désir sexuels (9). Les
antidépresseurs et les antiandrogènes (acétate de
cyprotérone et analogues de la gonadotrophine-
releasing hormone [GnRH]) sont les principales
classes utilisées.

120  |  La Lettre du Psychiatre • Vol. X - n° 4-5 - juillet-août-septembre-octobre 2014


Antidépresseurs
Les inhibiteurs de recapture de la sérotonine (IRS)
sont utilisés dans cette indication, d’une part pour
leurs effets ordinairement indésirables de réduc-
tion de la libido, d’autre part pour certains points
communs entre les troubles obsessionnels compul-
sifs et les paraphilies (2). Cependant, aucune étude
contrôlée et randomisée dans l’indication des para-
philies n’est disponible à ce jour et la qualité des
études disponibles est limitée par des biais métho-
dologiques (par exemple l’hétérogénéité des critères
d’évaluation utilisés et des patients inclus, et la
durée de suivi, en général courte) [9]. Les patients
présentant un exhibitionnisme ou une masturba-
tion compulsive semblent davantage bénéficier des
IRS (9). L’observance et l’acceptation du traitement
par IRS semblent être meilleures que celles des trai-
tements hormonaux chez les auteurs de violence
sexuelle. Les recommandations nationales et inter-
nationales actuelles préconisent leur utilisation chez
certains patients présentant une paraphilie sans
risque important de violence, ou chez les jeunes
patients (en particulier les adolescents), ou encore
lors de troubles du contrôle de l’impulsivité ou de
troubles dépressifs associés (6, 8). De nombreux
patients décrivent ainsi une incapacité à résister à
leurs désirs sexuels très intenses. Ces descriptions
cliniques soutiennent l’hypothèse de l’existence
d’idées sexuelles obsédantes et de compulsions
dans certains troubles paraphiliques (9). Dans ces
contextes cliniques particuliers, les antidépresseurs
sérotoninergiques (en particulier la fluoxétine, la
fluvoxamine, la paroxétine, le citalopram, l’esci-
talopram et la sertraline) peuvent constituer une
option thérapeutique, en dépit de leur absence
d’AMM dans cette indication (6). Leur tolérance
est en général bonne et, selon certains auteurs, les
IRS auraient même une action plus spécifique de
réduction du comportement sexuel déviant, permet-
tant ainsi au sujet de conserver une activité sexuelle
conventionnelle (6, 9). Les posologies peuvent être
progressivement augmentées sur plusieurs mois
si l’efficacité n’est pas suffisante, en l’absence de
contre-indications, et aller jusqu’à celles utilisées
dans les troubles obsessionnels compulsifs (6).
Traitements hormonaux
Les traitements hormonaux sont indiqués seule-
ment dans les cas les plus sévères, comme ceux des
patients paraphiles que leurs désirs sexuels déviants
dossier
Agressions sexuelles
sur mineurs
fréquents et intenses peuvent mener à des compor-
tements de pédophilie ou de viols en série, ce qui,
en pratique, correspond à environ 10 % des sujets
bénéficiant d’une mesure d’injonction de soins (2).
Les patients pédophiles subissent fréquemment des
pressions externes pour commencer un traitement
hormonal. Il est fortement conseillé aux médecins
de respecter certaines précautions liées à des recom-
mandations éthiques avant l’instauration d’un tel
traitement (tableau) [2].
Les traitements hormonaux réduisent les compor-
tements sexuels et les fantasmes déviants dans le
cadre d’une diminution plus globale de l’activité
sexuelle. Ils diminuent significativement l’intensité
et la fréquence des fantasmes sexuels déviants, mais
ne modifient pas leur contenu dans les paraphilies
(6). Il existe 2 classes différentes de traitement ayant
l’AMM en France dans cette indication : l’acétate
de cyprotérone (formulation orale à 100 mg) et
les analogues de la GnRH (formulation injectable
à longue durée d’action à 3 mois). Les traitements
antiandrogènes stéroïdiens, dont l’acétate de cypro-
térone est le chef de file, inhibent la liaison de la
testostérone à ses sites récepteurs, tout en ayant un
effet progestatif, et modifient ainsi de façon modérée
et inconstante le taux de testostérone plasmatique
(6). La prise est orale et quotidienne. Les analogues
de la GnRH, comme la triptoréline dans sa forme
injectable par voie intramusculaire tous les 3 mois,
peuvent, dans un premier temps, avoir un effet “flare
up” qui correspond à une courte phase de stimulation
initiale de la sécrétion de LH (hormone lutéinisante)
− et, parfois, de testostérone. Une coprescription
Tableau. Considérations éthiques lors de l’introduction d’un traitement hormonal chez un patient
pédophile (Belgian Advisory Committee on Bioethics, 2006, http://www.health.fgov.be/bioeth).
1. Diagnostic de pédophilie établi au terme d’un examen clinique rigoureux par un psychiatre.
2. Existence d’un risque significatif pour la santé du patient ou pour l’intégrité morale ou physique
d’autrui.
3. Le traitement hormonal a pour objectif de diminuer la symptomatologie clinique et comporte-
mentale et il est adapté à l’état clinique et aux antécédents du patient.
4. Le traitement hormonal est envisagé en l’absence d’une autre possibilité de traitement efficace
adaptée au cas du patient.
5. Informer le patient des éventuels effets indésirables et recueillir par écrit son consentement
libre et éclairé.
6. Accompagner cliniquement le patient au moyen d’un suivi mensuel ou au maximum trimestriel
pour évaluer l’efficacité du traitement, ses effets indésirables et le risque de violence sexuelle.
7. Le traitement hormonal fait partie d’une stratégie de prise en charge globale et sa nécessité doit
être réévaluée régulièrement.
8. Dans certaines situations bien particulières, lorsque le risque de récidive de violence sexuelle est
majeur, la décision d’imposer un traitement, de quelque nature qu’il soit, doit être prise par un juge
que le médecin peut solliciter.
La Lettre du Psychiatre • Vol. X - n° 4-5 - juillet-août-septembre-octobre 2014 |  121
 dossier
Agressions sexuelles
sur mineurs Pédophilie : diagnostic et traitement
d’acétate de cyprotérone, instaurée une semaine
avant l’injection de triptoréline et maintenue en
association pendant le premier mois de traitement,
permet d’éviter tout risque de passage à l’acte dans
les premières semaines de traitement par triptoréline
(6). Par la suite, les analogues de la GnRH induisent
une désensibilisation des récepteurs hypophysaires
qui conduit à une réduction importante du taux de
LH et, consécutivement, du taux de testostérone
plasmatique (6). Le taux de testostérone peut
alors atteindre des valeurs équivalentes à celles
observées lors des castrations chirurgicales, d’où le
terme, impropre, mais parfois utilisé, de “castration
chimique” pour qualifier l’effet des analogues de la
GnRH. Le délai d’action des traitements hormonaux
varie entre 1 et 3 mois. Une disparition du compor-
tement sexuel déviant est observée dans environ
60 à 80 % des cas avec l’acétate de cyprotérone,
et dans plus de 90 % des cas avec les analogues de
la GnRH (6). Les analogues de la GnRH, de par leur
efficacité, leur tolérance et leur modalité d’admi-
nistration (l’injection intramusculaire garantissant
une bonne observance) apparaissent comme des
traitements prometteurs pour la prise en charge des
patients auteurs de violence sexuelle dont le risque
de passage à l’acte est élevé, comme les patients
pédophiles ou violeurs en série (6). La littérature
ne fait état d’aucun consensus quant à la durée de
la prise en charge. Une durée minimale de traite-
ment de 3 à 5 ans est recommandée en cas de para-
philie sévère assortie d’un fort risque de passage à
l’acte (6).
Bilan initial et surveillance
lors de la prescription
d’un traitement hormonal (6)
Les contre-indications de l’acétate de cyprotérone
sont les suivantes : puberté et croissance osseuse
en cours, refus du traitement par le patient,
dysfonction hépatique, psychose non stabilisée,
antécédents personnels et familiaux de maladie
thrombo-embolique veineuse. Les contre-indica-
tions de la triptoréline comprennent une puberté
ou une croissance osseuse en cours, un refus du
traitement par le patient et une ostéoporose sévère
non traitée. Le bilan clinique initial doit comprendre
un examen physique complet, comportant une
pesée, une mesure de la pression artérielle et la
recherche de pathologies somatiques, psychia-
triques et addictives. Un bilan sanguin doit être
réalisé ainsi qu’un bilan hormonal comprenant,
122  |  La Lettre du Psychiatre • Vol. X - n° 4-5 - juillet-août-septembre-octobre 2014
notamment, un dosage de la testostérone plas-
matique totale, de la protéine transporteuse de la
testostérone (TeBG) qui permet d’évaluer le taux
de testostérone libre (forme active), de la LH,
de l’hormone folliculostimulante (FSH) et de la
prolactine. Des troubles de la fonction hépatique et
rénale, de la glycémie, du profil lipidique, de l’hé-
mogramme, de la calcémie et de la phosphatémie
sont également recherchés. Si un risque personnel
ou familial d’ostéoporose existe, ou si le patient
a plus de 50 ans, une ostéodensitométrie doit
être effectuée avant de commencer le traitement
hormonal. La réalisation d’un électrocardiogramme
est recommandée. Un suivi de l’efficacité devrait
être mis en place durant toute la durée du traite-
ment antiandrogène. Des entretiens mensuels ou
au moins tous les 3 mois doivent être prévus pour
rechercher la présence de fantasmes et des activités
sexuelles déviantes et non déviantes et caracté-
riser leur nature, leur intensité et leur fréquence.
Des échelles permettent d’aider à l’évaluation du
risque de récidive de violence sexuelle (cf. “Risque
de récidive des auteurs d’agressions sexuelles”, de
C. Ducro et T. Pham, p. 124). Au niveau du suivi
clinique pour la tolérance du traitement, tous les 3
à 6 mois, une mesure de la pression artérielle et du
poids ainsi que la recherche d’un trouble dépressif,
de problèmes émotionnels et d’une féminisation
sont recommandées. Au niveau biologique, tous les
6 mois, la glycémie, le profil lipidique, la calcémie
et la phosphatémie doivent être contrôlés. Dans
le cas d’un traitement par acétate de cyprotérone,
la réalisation mensuelle d’un bilan hépatique est
recommandée pendant les 3 premiers mois, puis
chaque trimestre. Tous les 2 ans, ou chaque année
si le patient présente un fort risque d’ostéoporose,
une ostéodensitométrie est recommandée. Si une
ostéoporose est diagnostiquée, une supplémen-
tation en calcium et en vitamine D ou un traite-
ment par des biphosphonates doivent être prescrits.
Une supplémentation systématique trimestrielle
en vitamine D en hiver dans les régions peu enso-
leillées est également souhaitable. Un dosage de
la testostérone peut être demandé pour vérifier
l’observance du traitement, au moindre doute, ou
encore s’il existe une suspicion de supplémentation
masquée par de la testostérone (rarement observée)
[6]. Les effets indésirables principaux de l’acétate de
cyprotérone sont une gynécomastie (20 %) réver-
sible à l’arrêt du traitement, une hépato­toxicité
qui nécessite l’interruption du traitement, des
complications thrombo-emboliques (surtout en
cas d’antécédents personnels ou familiaux) ou un
 dossier
Agressions sexuelles
sur mineurs

trouble dépressif (6). Les effets indésirables les
plus fréquemment observés avec la triptoréline
sont des bouffées de chaleur, un trouble dépressif
et une déminéralisation osseuse (6).
Présentation de l’étude
EPIPARA
Nous avons mis en place une étude d’épidémio-
logie descriptive de sujets atteints de paraphilie
ayant commis un délit sexuel (étude EPIPARA) avec
l’aide de 15 centres en France et la collaboration des
Drs Lamy, Delavenne, du Pr Bénichou (méthodo-
logie) et du Pr Thibaut (coordonnatrice de l’étude).
Cette étude rétrospective, transversale, descriptive
et multicentrique a obtenu un modeste financement
d’un Programme hospitalier de recherche clinique
(PHRC) national en 2010 et a été réalisée à partir
des dossiers de sujets paraphiles ayant commis un
délit sexuel (inclusions de janvier 2013 à juin 2014,
de façon totalement anonyme). Seize centres ont
accepté, à ce jour, de participer : Rouen, Dieppe,
Montpellier, Lille, Tours, Nancy, Fort-de-France,
Strasbourg, Rennes, Mulhouse, 3 centres parisiens
(hôpital Cochin, centre médicopsychologique du
17e arrondissement, hôpital Paul-Guiraud), Bordeaux,
Perpignan et Marseille. Trois cents sujets ont été
inclus à ce jour. L’objectif est de faire un état des
lieux descriptif des patients paraphiles ayant commis
un délit sexuel et, à cet effet, les éléments suivants
sont recueillis : l’âge, le sexe, les comorbidités soma-
tiques, psychiatriques et addictives, l’histoire de vie
(recherche de traumatismes et de maltraitances,
histoire familiale et scolaire), le parcours juridique
et le parcours de soin (traitement pharmacologique
prescrit ou non à la date de la consultation du
dossier, en association ou non avec une psychothé-
rapie, etc.). Une enquête française réalisée en 2011
(11) a montré la nécessité et le souhait d’information
et de formation des psychiatres hospitaliers dans le
domaine de la prise en charge des agresseurs sexuels
paraphiles. L’étude EPIPARA permettra d’apporter
une meilleure connaissance du profil sociodémo-
graphique de cette population de patients. Elle sera
poursuivie, sous réserve de l’obtention d’un nouveau
financement de type PHRC, par une étude de suivi
de cohorte qui nous permettra de mettre en place
une évaluation des patients recevant un traitement
pharmacologique pendant plusieurs années, afin de
déterminer l’efficacité et, surtout, la tolérance de H. Delavenne déclare ne pas avoir
ces traitements. ■ de liens d’intérêts.

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La Lettre du Psychiatre • Vol. X - n° 4-5 - juillet-août-septembre-octobre 2014 |  123