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Les idiomes négro-aryen et

maléo-aryen : essai
d'hybridologie linguistique /
par Lucien Adam,...

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France


Adam, Lucien (1833-1918). Auteur du texte. Les idiomes négro-
aryen et maléo-aryen : essai d'hybridologie linguistique / par
Lucien Adam,.... 1883.

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LES IDIOMES

NECRO-ARYEN
ET MALËO-ARYEN

1 ~SS&t D'HYBMDOLOCtR UX&HtSTtQUE

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PAR LUCIEN ADAM

COXSBttJfN~ A LA COOtt C'APPKtf UK KAXfT

<B

PARIS
MAISONNEUVE ET C", LIBRAIRES-ÉDITEURS
25, quAt voLTAims, 35

1883
LES IDIOMES

NËGRO-ARYEN ET MALtO-ARYEN

ESSAI D'HYBBIDOLOQÏE LINGUISTIQUE

INTRODUCTION
Pendant un séjour de troil années que j'ai dû
faire à Cayenne, en qualité de magistrat, j'avais
appris à parler suffisamment le créole, mais ne
m'occupant point alors de linguistique, je m'en
étais tenu a la pratique de l'idiome local, dans
lequel je ne voyais qu'un jargon sans importance.
J'étais demeuré sous l'empire de ce préjugé,
quand le hasard d'une lecture me fit découvrir,
dans l'analyse sommaire de quelques langues de la
Guinée par M. Fried. Muller, l'explication trèss
nette des formes verbales guyanaises. Après m'être
assuré que les nègres de nos colonies américaines
intertropioales sont originaires de cette partie du
continent africain, je m'occupai de réunir les docu-
ments dont j'avais besoin pour mesurer la profon-
deur de l'analogie grammaticale qui venait de me
sauter aux yeux. Je trouvai, à la bibliothèque
publique de Nancy, un volume des publications de
l'Institut Smithsonien renfermant, à la suite d'une
monographie sur les algues de l'Amérique du Nord,
la grammaire yoruba du Rév. T. J. Bowen ('). Mon
ami, M. Leclerc, me communiqua la grammaire de
l'un des dialectesde la langue odschi par M. Riis~).
Enfin, je me procurai deux ouvrages consacrés
aux soi-disant patois créoles de la Guyane (*) et de
l'île anglaise de la Trinidad (*).
J'aurais voulu pouvoirjoindre à ces documents
tous ceux qu'indique M. Fried. Muller(*), mais en
province, il faut savoir se passer des moyens d'in-
formation qui surabondent dans les riches biblio-
thèques de la capitale.
Quoi qu'il en soit, les documentssur lesquels j'ai
travaillé m'ont fourni assez de faits probants pour
que j'ose avancer, sans crainte d'être jamais con-
vaincu d'erreur totale, que les soi-disant patois
créoles de la Guyane et de la Trinidad constituent
(') Grammarand Dictionnaryof the Yoruba language, by the
Bev. T. J. Bowen. Washington,1858.
(') Elemente des .~MctpMt-DMtM!~der Odachi-Sprache, von
H. N. Rifs. Base!, 1863.
(') Ja<<-o<:«c<t0)t MtMoM-e de C<~eMM, par Al&ed de Sfdnt-
Qnentin Étude «tf la ~M!m<a<MM c~o~e, par Auguste de
Saint-Quentin. Paris, Maiaonnenve, 1872.
(<) Me ~eo~ and pMC&'ee of Creole yMtMma! by J.-J.
Thomas. Port~oMpain, 1869.
(') G'nt)t<!)'~ der ~Mc~icmeMM~ T. I, p. 83.
des dialectes négro-aryens. J'entends par là que
les nègres guinéens, transportés dans ces colonies,
ont pris au français ses mots, mais qu'ayant con-
servé, dans la mesure du possible, leur phonétique
et leur grammaire maternelles, ils ont fait du tout
des idiomes ~M generis ne présentant aucun des
caractères propres à nos patois de France.Une telle
formation est à coup sûr hybride, mais ces idiomes
n'en constituent pas moins des dialectes nouveaux
à classer, nonobstant la nature aryenne de leurs
vocabulaires, a la suite des langues de la Guinée.
En Europe, le parler créole est universellement
considéré comme un jargon enfantin. Mais un
Guyanais, M. Aug. de Saint~Quentin, a eu de la
vérité une intuition confuse. « L'étude que nous
publions, dit-il, présente, dans leur ensemble et
dans leurs détails, les éléments de ce langage
étrange a plus d'un point de vue. Éclos, il y a moins
de deux siècles, au milieu d'un groupe d'hommes
touchant encore a la barbarie, formé de mots qui
leur étaient inconnus, sans calcul, sans raisonne-
ment, d'instinct pour ainsi dire, il a cependant
revêtu immédiatement des formes absolues et d'une
logique rigoureuse.Le créole d'aujourd'hui est iden-
tique à celui qu'on parlait déjà au milieu du siècle
dernier. Ainsi, c'est un produit spontané, aussi hâtif
qu'inconscient,de l'esprit humain dépourvu de toute
culture intellectuelle. A ce titre seul, il paraîtrait
déjà très remarquable à celui qui y découvrirait
antre chose qu'un amas confus d'expressions fran-
çaises déformées, mais, lorsque l'on étudie attenti-
vement les règles de sa syntaxe, on est tellement
surpris, tellement charmé de leur rigueur et de leur
simplicité, que l'on se demande si le génie des plus
savants linguistes aurait pu rien créer qui satisfit
aussi complètement à. son objet, qui imposât moins
de fatigueà la mémoire et moins d'effort aux intel-
ligences bornées ('). »
La grammaire dans laquelle M. de Saint-Quentin
voit un produit spontané et hâtif, n'est autre que la
grammaire générale des langues de la Guinée,
c'est-à-dire de langues auxquelles on peut donner
la qualification de M~M~~M, par opposition aux
langues CM&M~. Or, de même qu'aux yeux du
botaniste, les plantes naturelles ont sur les plantes
cultivées la supériorité de constituer des produits
francs, exempts de toute adultération intention-
nelle, de même, aux yeux du linguiste, les idiomes
des peuples réputéssauvages ont cette primauté sur
les langues des peuples civilisés, que leur gram-
maire se rapproche davantage de la grammaire
instinctive dont le parler des enfants nous révèle
les procédés simples, logiques et rapides. A cet
égard, M. de Saint-Quentin a vu juste. La gram-
maire du parler négro-aryen est plus naturelle que
celle du sanscrit, du latin, du français. Mais elle

(') Aag. de Saint-Quentin, p. t.vm et ttniv.


n'est point éclose spontanément à la Guyane, elle
y a été importée d'Afrique. Avec elle, les nègres
y ont introduit leur phonétique; c'est pourquoi ils
ont déformé le plus grand nombredes mots français
que les impérieuses nécessités de l'esclavage les
avaient contraints d'adopter.
Informé, au cours de mes recherches, que la
maison Berger-Levrault avait édité, en 1880, une
Étude <M~ patois créole mauricien par M. Bais-
sac, j'ai pu constater que la phonétique et la
grammaire de ce troisième idiome colonial sont de
provenance malgache ('), et que le parler de l'île
Maurice constitue, non pas une langue malgache-
aryenne, mais bien une langue maléo-aryennedont
la phonétique est malgache.
On sait que la langue de Madagascar fait partie
de celui des trois groupes de la grande famille
maléo-polynésiennequi possède les formes les plus
développées, et que ce développement consiste en
un système de particules amxées aux radicaux
thématiques, de manière à former avec ceux-ci
autant de mots dans lesquels certains éléments de
(') J'ai eu & ma disposition, pour l'étude du malgache, les
trois ouvragessuivants
<htM<MM der Sp)tM&M'M<e<McA<<, t. II, seconde partie.
BM<K de ~rcMMMtM'e m<t<!e&<M~ par M. Chapelier. ( t~oy~e de
<Meot«w<~e<de l'Astrolabe, t. XII.
Grammaire malgache, fondée sur les principes de la CfttMt-
maire y<MXHMM<, paf Marre-DeMarin («te), professeurde langues
orientales. Paris, Maisonneuve, 1876.
relation se trouvent étroitement unis à l'élémentde
signification. Or, par suite des nécessités de leur
condition servile, les nègres de Madagascar trans-
portés a Maurice ont du adopter le vocabulaire
français. Tls ont donc, fatalement, aliéné leurs
formes grammaticales caractéristiques par cela seul
qu'ils substituaient des mots français aux mots
malgaches. Il est d'ailleurs évident que les amxes
ne pouvaient être adaptés à ces mots nouveaux.
Conjugué à la malgache, le verbe <o«~ < tuer m
eût été inintelligiblepour les maîtres: NMM-~M~ou
tK!.<<M~MMje tue; MOta-~M~ ou ni-touyé Mû j'ai
tué; ~<M-<y<f ou ~-<OMy<f mo je tuerai, etc.
Cependant, les habitudes grammaticales des
nègres s'opposaient à ce qu'ils adoptassent la
gram-
maire de la langue française. M. Baissac dit à ce
sujet « Moins encore que les barbares germains a
f l'heure ou la conquête les établissait sur la terre
romaine, nos esclaves n'étaient aptes à se servir de
j l'outil délicat qu'une civilisation vieille de douze
siècles avait lentement perfectionnépour son usage.
Ces rapports exacts de mots entre eux, ce luxe de
modifications dans leur forme ou leur désinence,
suivant leur place ou leur ibnotion~ ces articula-
tiens aussi souples que variées entre les différentes
parties de la proposition ou les différents membres
de la phrase, tous
ces ressorts, tous ces rouages,
autant d'entraves qu'ils devaient nécessairement
briser et qu'ils briseront. Ainsi désagrégée par des
mains malhabiles, la proposition française laissa
tomber un à un tous ses mots, et, dans son impuis-
sance à les rattacher entre eux par quelque lien
nouveau, le créole, se nant sur leur récente cohé-
sion, se borna à les remettre sommairementdebout,
côte à côte et vaille que vaille, dans l'ordre même où
les avait placés le français. ? »
Cette explication des formes grammaticales du
créole mauricien n'est point acceptable. En enet, si
les nègres avaient adopté la grammaire des colons,
en même temps qu'Us leur empruntaient leur voca-
bulaire, le créole serait devenu un jargon, mais le
genre n'eût point été aboli, surtoutdans les pronoms
de la troisième personne; le'verbe aurait conservé
inconsciemment l'une ou l'autre des flexions du
pluriel; l'auxiliaire « avoir et le verbe substantif
n'eussent point été éliminés, etc. En réalité, les
esclaves malgaches ont importé à Maurice leur
grammaire maternelle, moins ies formes dont j'ai
parlé précédemment. C'est qu'a côté de ces formes,
produit d'une évolution qui ne s'est point faite dans
les langues des groupes polynésien et mélanésien, le
malgache a conservé sa grammaire initiale, com-
mune aux langues des trois groupes, et que sur le
sol de Maurice, celle-ci a repris tout son empire.
C'est pourquoi le parler mauricien constitue, ainsi
que je l'ai dit, un dialecte maléo.aryendontia
phonétique seule est malgache.
Comme les nègres de la Guyaneet de la Trinidad,
les nègres de l'Ho Maurice ont plié le vocabulaire
français aux lois de leur phonétique, et, dans cette
accommodation, non moins que dans la substitution
de leur grammaire à celle du français, ils ont
déployé une force de résistance comparable, au
moins dans une certaine mesure, à celle des popu-
lations anglo-saxonnesqui, après la conquête nor-
mande, ont fait prévaloir leur grammaire et leur
phonétique sur la grammaire et sur la phonétique
des conquérants.
Ainsi, par trois fois au moins, si les vainqueurs,
si les maîtres ont imposé tout ou partie de leur
vocabulaire, les vaincus, les esclaves ont maintenu
contre eux ce qui constituaitréellement leur langue
la phonétique et la grammaire.
Ces faits pleinement historiques sont d'une impor-
tance considérable, car ils font toucher du doigt
que les rapprochements de mots chers à l'ancienne
école, sont dénués de toute valeur scientifiqueaussi
longtemps qu'ils n'ont pas été confirmés par des
concordances phonétiques et par des similitudes
grammaticales, vérité fondamentale sur laquelle on
ne saurait trop insister, par la raison que, dans les
temps préhistoriques, bien des langues ont pu se
former, comme les idiomes négro-aryen et maléo-
aryon, l'anglais moderne, le caraïbe ('), a la suite
(') Dtt Parler des commet et du Parler ~e< ~entMee AttM
la !<tttjj;«e caraïbe, par Lucien Adam. Paria, Maisonnouve
1879.
de conquêtes, d'asservissements,d'unions exogami-
ques, de migrations forcées ou volontaires.
J'irai plus loin. Il est, dans la Science, un pro-
blème qui n'a point encore été résolu, je veux
parler du passage de toutes les langues aryennes
anciennes de l'état synthétique a l'état analyti-
que, évolution qui contraste singulièrement avec la
fixité des langues sémitiques. Or, les tribus origi-
naires du plateau de Pamir ont successivement
émigré dans toutes les directions, s'implantant au
milieu de populations anaryennes qui parlaient
d'autres langues, les soumettant par la force de
leurs armes et, a. la longue,~se les assimilant. N'est-
on pas fondé à se demander si le passage de la syn-
thèse a l'analyse n'a point eu pour cause, partielle-
ment au moins, l'enbrt instinctif des vaincus qui,
ayant adopté la langue des vainqueurs, ont main-
tenu leur grarunaire propre dans des patois qui ne
nous sont point parvenus, dans des parler ruraux
analogues à ce latin rustique d'ou les langues ro-
manessontissues?M. Michel Bréal a mis en lumière
que l'altération de la prononciation signalée par
M. Corssen et l'énergie toujours croissante de l'ac-
cent tonique sont « des causes secondes, qui, à leur
tour, ont besoin d'être expliquées par une cause
d'un autre ordre ('). Cette cause d'un autre ordre,
l'éminent linguiste la trouve dans l'ébranlement
(') f<<t JFofMM e< la .Fo<!c<tott <!M mots, par Michel Br<5tt).
Parie, 1878.
causé aux désinences casuelles par les prépositions
employées depuis un temps immémorial. « Conser-
vées par la société polie et dans la langue écrite,
les désinences devinrent incertaines et Menacèrent
peu à peu dans l'usage populaire, » Sans doute,
mais au moment o~ ~e produisit cet effacement, le
peuple se composait en majorité de provinciaux,
d'Italiens auxquels la phonétique romaine était in-
supportable et qui l'altéraient. Est-il certain que
ces descendantsdes vaincus, plus ou moins assimilés
par les vainqueurs, n'avaient point conservé, dans
les provincialismesde leur méchant latin quelques
traces grammaticales des idiomes anaryens parlés
par leurs ancêtres? Je n'ose aller au delà de ces
points d'interrogation, mais j'ai le pressentiment
qu'un jour l'étude de l'hybridologie linguistique
rendra à la science plus d'un service.
Nancy, 22 janvier 1888.
LUCIEN ADAM.

P.-S. Au moment de livrer ces pages à l'im-


pression,je trouve, dans un article écrit par M. Ju-
lien Vinson (1), l'intuition de la nature véritable
des patois créoles
« Le créole diffère de nos patois précisément par
son caractère artificiel (lisez hybride); le patois
(') «tf le yatot'a créole m<tMt'ct'<!)t, par M. C. Baissac
~'<<«!e
(JROMM de .M~M'O~MC, t. XIV, p. 416).
est un langage naturel antérieur, latéral, secon-
daire au langage littéraire le créole est fadap-
tation du français, de ~'NM~aM, de F~~OÏ, au
~HM pour atM< ~'6 PHONÉTIQUE ET GRAMMATtC&L
d'une race linguistiquement inférieure. Les mots
sont profondément altérés; la grammaire est extrê-
mement simplifiée. Nulle part cette adaptation n'a
pris un caractère plus original que dans les colonies,
où elle s'est faite par et pour les esclaves nègres
d'Afrique, c'est-à-direprincipalement aux Antilles,
à la Réuniou et a file de France. »

<
LE
PARLER NÉGRO-ARYEN

PHONÉTIQUE.

Les premiers nègres qui furent transportes de la côte de


Guinée à la Guyane et dans t'tte de la Trinidad, échangèrent
leur vocabulaire africain contre celui de leurs nouveaux
maîtres. Mais, sous l'empire des habitudes phonétiques et
grammaticales contractées dans la mère patrie, ils firent
subir à la plupart des mots qu'ils adoptaient, d'ailleurs de
<tM<K<M, des changements dont l'ensembte permet de recons-
tituer la phonétique générale des dialectes guinéens parlés
par eux antérieurementà leur hansportation.
Le lexique du créole guyanais serait exclusivement français
si des partis d'Indiens qui~e réfugièrent anciennement dans
notre Guyane, pour échapper à la brutale domination des
conquérants lusitaniens, n'y avaient pas introduit quelques
mots portugais, et si les colons eux-mêmes n'avaientpas em-
prunté aux Galibis un certain nombre de noms d'animaux,
de plantes, d'ustensiles. De mots africains, M. Aug. de Saint-
Quentin n'en connaît qu'un seul qui soit, dit-il, authentique.
o Lorsqu'il arrive à un
nègre de heurter quelqu'un involon-
tairement, la politesse veut qu'il s'excuse en disant: Ago1
D'où le proverbe: ~pa~Kenmahw~ l'excuse ne guérit
pas le mal. e Or, le chevalier des Marchais raconte, dans son
Voyage e« Guinée et à fat/MMte (') a que le roi de Juida est
fort jaloux; lorsqu'un de ses sujets frôle en passant une de
ses femmes, si c'est involontairement, on le vend comme
esclave, si c'est volontairement, il est enterré vif. Aussi,
ajoute-t-il, les hommes qui veulent entrer dans les cours du
palais, ou l'on rencontre les femmes du roi plus souvent
qu'ailleurs, ne manquent pas de crier plusieurs fois Ago,
c'est-à-dire: Gare! Prenez garde! Le sens de ce mot s'est un
peu altéré en créole, mais l'étymologie est incontestable (*). B
A ce témoignagehistorique, je joindrai un témoignage plus
probant et très précieux au point de vue ethnographique,
c'est que dans la langue yoruba, <~o signifie littéralement
~e< out o/' ~e woy (')'
Dans l'ile de la Trinidad, la conquête espagnole et la con-
quête anglaise ont successivement agrémenté d'un eert&in
nombre de mots castillans et britanniques, le vocabulaire
demeuré jusqu'à ce jour foncièrement français.

VOYELLES.

Les voyelles neutres e (eu, <BM) et u étaient étrangères à la


phonétique des idiomes parlés par les nègres, car t'nnc et
l'autre ont étérégulièrement remplacées dansées mots français.

VOYELLE <! (~, <B«).

L'e non muet et les prétendues diphtongues eu, o'u ont été
remplacée à la Guyane, par t, < è, o, (), ou; à la Trinidad,
par <,e, è, o, ou.
Parler de ia Guyane pitit petit, chimin chemin, (KmaMt
demain, di de, chivé cheveu, ~MMM:c semaine, misou me-

0 To)M n, p. ta
t~ Ta<r«t)«!ttoM ù !TrM«tMde C«yMtBe,ete., p. tM.
(~) BM<<MM') o/C~e ï'ortth) !«~t<~e, p.tt.
~)~<e fenêtre, diviné deviner, jité jeter; vieux,
sure,
pt-~M premier, <~ adieu, feu, héré heureux,
lakyo queue,
honteux, eux, MOMeM monsieur; ps peur,
odeur,
~ch<) pécheur, mMM menteur, e<)M voleur, Mdô
sfMur,.pim~)MmeU)em-(plus meitteur); choucs!
eccur,
cheval, doumandé demander, p~'MM paresseux.
di
Parler de la Trinidad pitit petit, dMK<!)te demande, de,
jt)MMe génisse,
WtMt retour, simaine semaine, rifè refaire,
silon selon, Mt~ neveu, <H~ feu, /t~ heureux, vie vieux,
?)<! lever, laqué queue, c~M chaleur, /!e fleur, pè peur,
d<nt~ danseur, <!t~~ mener, ~e gueule, c~OH~ cheval,
douvant devant, MMCOM secours, jounou genou.
M. Fried. Mulier ne fait pas ngurer
la voyelle e dans le
&we, Ga, Odschi,
tableau vocalique des langues du groupe
Yoruba. Cependant, le yomba posséderait, suivant M. Bowen,
serait identique à celui de l'u
une voyelle neutre dont le son
mother D'autre part,
et de l'o dans les mots anglais « but,
voyelle ayant
M. Mis prête à l'akwapim, dialecte odschi, une
la valeur de & allemand.

VOYELLE ?.
i à la
Cette voyelle est remplacée à la Guyane, par ou,
Trinidad, par ou, i, o.
Parler de la Guyane OMM un, dou dur, MMOM mesure,
larie rue, ~oMe
lasous sur (tà-dessus), ~t~Me jusque,
culotte, ~MMWe morue, Kmd allumer, mur, tribinal tri-
bunal, m~ muser, pis plus, di du.
quouier
Parler de la Trinidad ~t<~ejusque, mou<~muet,
reçuler, pliché éplucher, tWM~ turbulent,
mt~ muet,
bossi bossu, plis plus, dt du, !/oM un.
mais non dans les
Le son u se rencontre dans l'akwapim,
autres langues ou dialectes du groupe.
VOYELLE 0.

La voyelle o est sujette à être remplacée par ou sous l'in-


fluence des nasales m, n.
Parler de la Guyane co~menc~ commencer, coMMeK< com-
ment, MM comme, MtOMM quelqu'un (monde).
Farter de la Trinidad coMment, moune, mounonque pour
tKMMH~Meoncle.
Un phénomène analogue se produit dans plusieurs dialectes
du groupe, t In the Egba and some other dia!ects, o long
when foHowed by M~ and occasionally when preceded by m
or n takes the sound of ou long, as tong again, mo to drink,
<<!0 within, pronouncéd and sometimes writtpn tung, mu,
t)tM. )'

t
DIPHTONGUE M~.

Dans les deux dialectes créoles, cette diphtongue se rem-


place par oui, i.
F ier de la Guyane HOtMte nuit, xouite huître, JapHe
pluie, d<&W< bruit, Ii lui.
Parler de la Trinidad MOMt<e nuit, e~MOM~e ensuite, 'K
lui, <opKe pluie, <MpM depuis, ptt puits.

CONSONNES.

LES ARTICULATIONS yy, ~y. G, CH.


Le créole de Cayenne possède deux consonnes que MX de
Saint-Onentin représentent par et qa'its définissent en
disant de la première < Le son qui en approche te plus est

(T'
celui d'un st dur saivi d'nn </ consonne, le tout fondu eu une
seule émission de voix. Ex. gyo~egaeatM. ) de la seconde
ADAM. S

~7~9~
e Elle est la forte de DY. Ex. qyémbé tenir bien, qy6 cœor,
qyoM~e reculer. »
A ces deux consonnes gnyanaises correspondent, dans le
créole de la Trinidad, les deux consonnes que M. Thomas a
Bgurees par g, eh, imprimées en petites capitales a, en. La
première a la valeur de dans les mots anglais o gypsy,
ginger »; -la secondecellede ch dans les mots a chin, cheat ».
Ex. /iG<eBgnre, aMepegnêpe, eo!e gueule, taseMebagoette.
cm~oMe culotte, caottM reculer, CHt~e quinze, macH~ mar-
quer, &SCH6 embarquer, MmcHMt~M rancunier, etc.
Ces deux paires de consonnes procèdent parallèlement
d'articulations africaines figurées en akwapim par les groupes
< dans lesquels la spirante y correspond au j
allemand. En effet, à Cayenne di et Ei mouillés se changent
en gy, qy dans les mots: 09~ adieu,
&Mtg<~ bondieu,

Mt~K indien, cho«~ chaudière, chcm~~ chantier, qyémbé


tenir bien, cr~ett chrétien. D'antre part, dans le parler de
la Trinidad, où di s'est maintenu (sesadié adieu, choMJM
chandière, ~MM!~ bondieu), les mots a tenir bien, tuer, tune
(anglais) sont devenus ca~tM, CHOM~, CHMtM.

LA VIBRANTE

Dans la langue yoruba, la vibrante ouvre fréquemment soit


la première, soit la dernière syllabe d'un mot. Ex.: radi
récompenser, raM sécher au feu, rè aller, se lever, sttrM
patience, Bure bénir, ga/ftro excuser, gbèro considérer,
idagiri alarme, gtMt~'OK~ reposer, etc. Mais jamais r ne
ferme une syllabe comme dans les mots français jour,
gourmand ». Jamais non plus, elle ne vient à la suite d'une
autre consonne, comme dans les mots bras, grand, frère ».
Dans le dialecte akwapim, r ouvre fréquemment la dernière
la première.
on l'avant-dernière syllabe d'un mot, mais jamais
Ex. tfrf!etatipMF,aA<tM<<'cac)af, ay~/orotajenncépouse,
eberre le temps, etc. Elle ne ctOt jamais une syllabe comme
dans tes mots e jour. gourmand mais cite articate avec ta
plupart des consonnes. Ex. frapper, p~'o balayer, ~r"
descendre, kru le tien, cru ôter, ~ra endnire, etc.
On Ta voir que les nègres transportes dans tes deux colo-
nies parlaient des dialectes intermédiaires entre te* idiomes
yoruba et akwapim.
Tartcr de ta Guyane R finale a été etimin~ acs?i bien
qnand elle pst suivie de consonnes etymotogiques on d'un e
muet qu'alors qu'elle soan'' i-otee. C'est t appUcation d'une
r~gie commune anx deox i<t)om<-s gaiB~ns. Ex. <) corpi?.
~t fort, m~re, fOMp? coiapere, Mt~-tt mesere, ~M< ïner,
JMt jour, '~M dur, f~~ ch<:r, pMho p~ehear.
Daas les mots terminés en -frf, -dre. -t-rf, etc., la vibrante
a été éliminée, tandis qu'elle demecre lorsque ta roycHe fina!~
est sonore. Ex. ma~ mattre, ~mtf hni!r~, pro'n~(~ pro-
mettre. Mnffe ecnnaitre, Mn<~ cendre, p'!Ut< pscTre, ~M
T!egre, ff&< libre, Mn~Mt cancre, po;on patron, dt~utri
dccocTrir, tMafr~ montrer, ~~prtf esprit, et'
Comme dans le diatecte akwapim, r sardcoie avee i<a
aatr~s e<Ms<Mses. Ex- trafayt traTaiHer. cft croire, ~i'~mx
premier, fc~m eoo~nr, &!c.
t~BS !es mets fra'Mis où t-tte c!~t une ST)~b- -c~ie d nse
coBsoase, ta i.'tbrsnSf a e!<: ou &hntia~ ')a. d~p!~c~ d<
B~asière à ce '}o'eHe psus *'artico!<'r &T' ~a eori-<<r'B~
iaiMa! d" la s;)t3b?. Ex. BK-KaK morMac. t~tf barbe.
R'c.j'f mMfiK', ~-{th' per~o, ~jj~ r~ar<i<'r. p~'t' p~r~r, ')*~i
m&fe:. ~.r'Mj"Sf«~ g-ianB&Bd, ~roamt fcDrmi, fit-~m~n~
t'nrn!i:B!er, ~û'jf~ c'jnrb~r, ~Rti dormir. '')3 !r-~a'r~ c':aB-
noics ds ma' c'nn! ~rut t~'or~~r, n'rj' t~rdr~. Mft<
Karter, ~~fK'u t-afe-s~Bï, M~ft~t' ée&rqaU~r. C~ ëïMp-
tMBS&l!e~Tfa~a}b't.si-;3ti'i'.f~t: à iw?' Hf
tes nègres affranchis qui se piquaient de parler comme les
blanes.
Parler de la Trinidad R finale a été éliminée comme à
la Guyane. Ex.: cd corps, f<) fort, frère, ~c* frire, <Ms!
désir, etc.
Pour les mots lerminés en -h'e. -pre, -vre, etc., la règle est
la même qu'à la Guyane. Lorsque la finale -dre est précédée
d'une voyelle nasale, dr s'est éliminé et la nasale sonne.
Ex. attane attendre, fane fendre, MH~ vendre, craine
craindre, ~bM fondre, jo~M joindre, t'~pMte répondre.
Comme à la Guyane, r s'articule avec la plupart des con-
sonnes. Ex. cr<Mt faire crédit, grand grand, MP~ tra-
vailler. Mais cette règle comporte deux curieuses exceptions:
t" devant les voyelles o, OM, r fait place à <o ou se syncope.
Ex. /toom<t~e ou /bnta~e fromage, ~ot~ ou /bt~ frotter,
ctoccht ou eocM crochu, ~too~ gros, coè-.croire., twop trop,
touvé trouver; 2" devant toutevoyelle autre que o, r fait place
à M quand la consonne précédenteest l'une des labiales b, p,
Ex. &toaM brave, bwèche brèche, ~Me bride,
pMta;
v,
prix, ~oacaMe fracasser, frère, Moe vrai, apwès après,
MM~tCt souffrir,boutoique bourrique. H y a dans la grammaire
akwapim, une observation qui met sur la trace de la première
de ces deux particularités. Après avoir constaté que la spi-
ranteto s'articule avec les consonnesg, c,&,< h (ex. gwa
dépecer, ctoaw odoriférant, &<o~ sans fondement, tt~tcam
oiseau, h!p<:t~ lancer), M. RHs s'exprime ainsi « Wahrschein-
lich ist derselbe w, in solchen Lautformen, ursprnnglichaus
Adverb &?<! aus dem Adjektiv
o oder u entstanden, wie das
koa mûssig. 11 y avait dans la phonétique de l'idiome
grande affinité entre
propre aux nègres de la Trinidad, une
les voyelles du rayon labial et la semi-consonne du même
rayon.
Dans les mots où elle clôt une syllabe suivie d'une con-
sonne,la vibrante a été éliminée. Ex. pf<M perdu, mode
mordre, xodte ordure, p<tM parler, ~otfOH garçon, <epeH< ser-
pent, goumandgourmand,/!)nH fourmi, domt dormir, pamt
parmi, méci merci, /btfcAeKe fourchette, code corde, etc.

LA LÏQCtDE

Dans les deux dialectes, la finale -&!e perd la liquide.


Ex. capabe capable, diabe diable, ensembe ensemble,
aimabe aimable, tM&e noble, sabe sable, sensibe sensible.
Dans les deux dialectes également, le groupe M- s'est main-
tenu au commencementdes mots. Ex. M~bicu, bligd obligé,
Mt<~ oublier.
La liquide < est étrangère à la phonétique de l'akwapim.
Dans le yoruba, où cette consonne ouvre un certain nombre
de syllabes (<o&amo~e voleur, !<tg&s fouet, lera être fort), elle
ne s'articule point avec b.

L'ASPIRÉE

A la Guyane, l'aspirée h a été souvent remplacée par la


vibrante r, notamment an commencement de~ mots. Ex.
fOHtd honteux, Mtche hache, roue houe, MMte haut, (<o)'d
dehors, larô la haut, foht haïr, faM hâler, )'e<er héler.
Je n'ai trouvé dans le créole de la Trinidad qu'un seul
exemple de cette substitution rades et /Mdes bardes.
Un assez grand nombre de mots ont l'aspirée h pour con-
sonne initiale, dans les deux idiomes africains.

LA StFFLANTE ET LA StBtLANTE SutVtES DE t.


A la Guyane, la sifflante et la sibilante suivies de la voyelle
t((t==K, si, :ct==~, M==st) se sont chmntécs en ch, Ex.
~MtcAoM finition, nachon
nation, Mae~ott habitation, <Moucy)~
d
monsieur, d~enM deuxième, <)'ot«~!He troisième.
LES FINALES ~e (zc), ge (je).
A la Trinidad, ces Bnales ont été remplacées par ye. Ex.
caye case, c~oyc chose, <a~o~e langage, faca~ ravage.
La finale ce (se) s'y est chuintée en cAe dans le mot
coWaeAe coriace.

LA FINALE <Mt~e.

A la Trinidad, la finale -<tK~e s'est parfois changée en -o~M.


Ex. JMn~Me orange, afcAopMarchange.
Il est manifeste que les dialectes guinéens parlés par les
nègres transportés à la Guyane et à la Trinidad n'avaient
exactement ni la phonétique de l'akwapim ni celle du yoruba,
ce qui n'a rien que de très naturel, puisque ces deux idiomes,
bien qu'étroitement apparentés, présentent des différences
phonétiques assez sensibles.

LEXICOLOGIE.

Les habitudes grammaticales dea nègres transportés dans


les deux colonies les ont conduits à faire subir, à un grand
nombre de mots, tantôt par aphérèse, tantôt par prosthèse,
des changements dont l'étude est fort intéressante.

APHÉRÈSE.

A la Trinidad comme à la Guyane, beaucoup de verbes


français dont la première syllabe consiste en une voyelle, soit
pure, soit nasale, ont perdu cette syllabe.
Parler de la Guyane vaid avaler, <sp~ attrapé, eo~ ac-
coster, rété arrêter, rivéarriver, vancé avancer, limé allumer,
longé allonger, procM approcher, pM appeler, coulé. écouter,
té été, Mtr~ écarter, tranglé étrangler, soué essuyer, c/t<ïp~
échapper, bligé obliger, blié oublier, baqué embarquer, !eH<<~
entendre, w~ envoyer, o~opd envelopper, etc.
Parler de la Trinidad caM avaler, t)et< avertir, Wc~ arriver,
cocM accrocher, pectco~ apercevoir, bimen aMmer, maré
amarrer, )'aH$e arranger, pliché éplucher, chapé échapper,
o'a~ écraser, té été, talé étaler, c!aM'~ éclairer, &acH~ em-
barquer, vlopé envelopper, uo! envoyer, tende entendre, etc.
Cette aphérèse s'explique aisément par ce fait de gram-
maire que dans les langues de la Guinée, la plupart des noms
sont formés des verbes par la preuxatiqn d'une sorte d'aug-
ment consistant en une voyelle parfois nasalisée. M. Riis dit
au sujet de ce procédé « Die erste.und attgemeinste Bedeu-
tung der Yerstarkung im Anlant in der Wortbildung scheint
die m sein, dass durch sie die substantivische Wortform von
den Formen der Verbs unterschieden wird. 9
C'est évidemment parce qu'its étaient accoutumés à voir
dans la syllabe initiale vocalique un simple augment servant
de marque au substantif, que les nègres ont aphérésé, dans
les mots français dont il leur fallait user comme de verbes,
la syllabe qui, à raison de sa nature vocalique, leur paraissait
avoir été prénxée à des noms dérivés. Étant donné, par
exemple, le mot français a avaler e, ils ont supprimé t'a
initial, comme en Guinée ils auraient supprimé l'a initial
de o-~otTo o jeu e pour faire le verbe ~o~'o « jouer e. Une
preuve que telle a bien été la cause des aphérèses prati-
quée sur les verbes, c'est que le nombre des aphérèses de
même nature pratiquées sur les noms, postérieurement et par
une fausse analogie a été très peu considérable & la

Guyane ~!<tte égatité, ~tt<MtM igname, <'a~ abatis, 6t<<!c)t0)t


habitation;–ataTrinidad,c<~0tt acajou, M<o~o)t, habitation~
Pour faire voir que M. Rils a exactement saisi l'objet du
procédé qualifié par lui de renforcement initiât, j'emprunte
un certain nombre d'exemples à dMërents vocabulaires
gaineenB.

Odschi a-berre, mur, berre mûrir.


a-boadyopaix, boadyo être paisibte
a-borro préjudice, borro frapper.
a-dyonne pensée, dyonne penser.
a-ferre honte, ~n-o avoir honte.
a-saw danse, saw danser.
en-da sommeil, da dormir.
eM.ctf<t bénédiction, cira bénir.
eM-A<M souvenir, Aa; se souvenir.

Yoruba: a-Ap~d~pécheur, Ape~a pécher.


a-be couteau, &e couper.
a-aa~o juge, aaazo juger.
a-ae~e menteur, aeAe mentir.
a-6 amour, fe aimer.
e-sinq cheval, sing être rapide.
e-tM créature, dà créer.
o-re siBleur, fe simer.
o-
perte, /b être perdu.
e-tpe feuille, we plier.
on-de prisonnier, de lier.
&we a-du dent, du mordre.
< voleur, souris, fi voler.
prendre
chasse, gibier,
<t-d0 <<c

e-M cheval, M courir.


6-<&itarc,<!<!tit'<:r.
c-wu tambour, wo battre.
EOk w~<! joie, <<af<t M réjouir,
oM-~& part, bak partager.
t!t.&t'c jeu, <<! jouer.
!bo <<~M demande, dxM demander.
t-M visage, M voir.
o-ku mot, &M parler.
ou-ri chant, ri chanter.
o«-<<t arc, ta tirer.
n-ta chasse, ta tirer.
A la Trinidad comme à la Guyane, l'aphérèse a porté, dans
quelques verbes, sur la syllabe initiale re, t'en. Ex. &j/o«M
reculer, gadé regarder, posé reposer, cottM rencontrer. Ici,
le retranchement a eu vraisemblablement pour cause la mo-
bilité du prenxe français, dans les mots « faire et refaire,
parer et réparer, poser et reposer, couvriret recouvrir, etc.

PROSTHÊ~

Dans les deux colonies, les nègres ont préfixé et soudé à


un assez grand nombre de mots français 1° l'un des articles
simples, & 2° l'un des articles composés di (du), <K (de l'),
dé (des); 3° la sibilante provenant de la liaison euphonique
de 1'~ finale de « les, mes, des avec la voyelle initiale du
mot suivant; 4° l'tt finale de l'article indétini; 5° une prépo-
sition 6° un adjectif possessif; 7° un ou plusieurs pronoms
personnels.
i* Comme, dans les langues de la Guinée, les démonstra-
tifs faisant fonction d'article défini se postposont aux noms
ainsi qu'on te verra plus loin, les nègres ne sachant que faire
de l'article français, l'ont ou fondu avec le nom, ou supprimé.
Parier de la Guyane o:<Kc lamùde une mode, nto ~M'tu:~
ma rivière, votre peau, so
.MM<c <<tpMit <«/e
sa fenêtre,
M <apt!(e sa porto, so lakyo sa queue, oMtM lagrimace une
grimace; ld or, richesse; MtocMtt <(tmo)'tc un peu do morue,
to <(MM~t ta maia, to ~M<a)t< ton reste, etc.
Parler de la Trinidad ~otte htpo<c une porte, /a~eo<e prison,
ladoèze ardoise, ~<ec~ roi, ~tpMte prière, etc.
2* Les articles composés < du, de f, des ".qui servent fré-
quemment de partitifs, ont été traités comme les articles
simples, parce qn'it n'y a point de partitifs dans tes langues
de la Guinée.
Parler de la Guyane: <Mo eau, ruisseau, so difé son feu,
HOM~ dibé notre beurre, ous <<M<!)t~ votre sang, <?<)-<« cette
eau, <H~ sel, détempa quelquefois (des temps), etc.
Parler de la Trinidad <H~ feu, d«M thé, a<ct<t vin, <M<att
eau, dleau f<<t-<a cette eau, etc.
3° Les langues de la Guinée n'ayant ni articles définis pré-
posés, ni adjectifs possessifs, ni pronoms démonstratifs pré-
posés, et n'ayant point non plus de nombre pluriel, les nègres
ont été induits à préfixer au nom I's finale des articles, adjec-
tifs possessifs et pronoms démonstratifs éliminés. De là, les
formes qui suivent
Parler de la Guyane zongue ongle, saute vous autres,
zaute ~o~ vos affaires, mo xo mon os, M dé jM~e ses deux
ailes, zouile huître, z<)r~ oreille, xami ami, zozo oiseau,
zenfant enfant, etc.
Parler de ta Trinidad zo~e affaire, ~to~e étoile, yone
~or~ne une orange, xails aite, zampoule ampoule, xécoce
écorce, .:<t!MtMM ananas, .s~e herbe, ~~b effort, .settti'a~M
entrailles, .sote~e orteil, xc~M~ue épingle, etc.
4° A la Trinidad, quelques noms commençant par une
voyelle ont été préBxés de l'M finale de l'article indénni
français. Ex. MatMte homme, K<!me âme, nannée année,
ninime énigme.
5° Les prépositions françaises < dans, à, en ont été pré-
Sxées à un petit nombre de noms.
Parler de la Guyane M danbois ta forêt; anous attons 1
courage à nous 1 arien rien; afoce & force, tant; enbas socs,
en bas, le dessous; enbas pié la plante des pieds, etc.
6° Quelques adjectifs possessifs français ont été préNxés à
un très petit nombre de noms.
Parler de la Trinidad so moMtMn~ue son oncle, )/one
matante ou tatanie une tante, ~M<Me adieu, etc.
7'* Quelquesverbes ont été préBxés de deux pronoms per-
sonnels.
Parler de la Guyane mo pas MMMMCt~ je ne m'en soucie
pas; tMtpfte je t'en prie men/bMsje m'en f.
tant pis.
En créole, comme dans les idiomesguinéens, les pronoms
régis se placent toujours après le verbe.

COMPOSITION.

La compositionétant un procède lexicologique d'un emploi


de la Guinée, les nègres des
très fréquent dans les langues
deux cotonies ont créé un assez grand nombre de composés
parmi lesquels je citerai: MMMa~ sous marqués, argent;
~~tM&yô tient bien le cœur, déjeuner, goûter; &M<e-oM la
clef de la porte extérieure; bibois une bille de bois, un mor-
ceau de bois; MeMmdeune bille de viande, un morceau de
viande; gfa~tMtpeyegraine de l'œil, pnpitte; oune oeMtn~Me
quelqu'unqui est venu par mer, qui a été amené par le vent,
c'est-à-dire par un navire, un Européen par oppositionà ceux
qui sont nés dans le pays; <ont~p«'e tourner-virer, aller de
coté et d'autre; o~tt-oott vient-ilva-t-il? coureur, rôdeur;
poudravè poudre à ver, contre-ver; maldent mal de dent;
_&t<AoM quelque chose; poM&ou~, poukfè pour quoi faire?
pourquoi? <<MOM~ la-dessns, sur; nMnpotttti! n'y en a point,
plus de; !M6 tout à l'heure, bientôt, etc.
GRAMMAIRE.

LE GENRE.

Les nègres ont aboli la distinction générique qui est étran-


gère aux langues de la Guinée.
M y a bien, dans le créole de la Trinidad,une certaine ten-
dance à distinguer le genre par la flexion des adjectifs. Mais
ainsi que le fait remarquer M. Thomas, les personnes qui
parlent habituellement créole n'emploient jamais que l'article
deBni féminin, lorsqn'ettés affectent de parler à la fran-
çaise. La tentative d'introduire dans le parler créole la dis-
onction du genre a été, suivant l'expression de M. Thomas,
t ill-sustained o, et l'on peut dire qu'eMe a échoué, même en
ce qui concerne les adjectifs, dont la plupart sont demeurés
invariables sous la forme masculine ou sous la forme fémi-
nine. Ex. épais épais, épaisse; faux faux, fausse; ~) fort,
forte; gMtM gros, grosse; gras gras, grasse; adoète adroit,
adroite; M! beau, belle; lasse las, lasse; Mo~ mou, moite;
soude sourd, sourde.

LE NOMBRE DES NOMS.

Dans langue odschi, les noms forment leur pluriel par


tf-
la préfixation de e<m-, en-, eM~ a-, ai-, etc. Ex. p~M
branche de palmier, em-popo; toa botte, CK-<oo; Au&M pot,
ef~-MM; !t tête, a- vurow clou, ai-vurow.
<t En
6we, dit M. Fricd. MOUer, ein und dieMibe Form gilt
for Singular und Plural, z. B. adM Zahn nnd Zâhne; to Ohr
und Ohron; asi Hand und Bande, Dasselbe ist auch der Fall,
wonn das Substantivum mit einem Zahtwort in
Verbindnnp
tritt, z. B. to epe xwei Ohren, âme &~t'c zwanzig Manu, u.
8. \v.t Cependant,ajoute-il,la
pluralité peut être indiquée au
moyen du sumxe o. Ex. dola-o messagers, dota messager;
ame-o hommes, ame homme. Mais cette formation parait
etre récente, car dans le cas où le substantif est affecté par
un adjectif on par un possessif, l'indice do pluralité se place
à la suite. Ex.: cho~o~o une chambre haute, cho Ao~o-o;
ot-nye mon enfant, vi-nye-o. Il importe de noter que le
suffixe o n'est pas autre chose que le pronom pluriel de la
troisième personne.
Dans la langue yoruba, on indique la pluralité i" en pré-
posant le pronom pluriel de la troisième personne, <Koott~
cheval,
eux, elles; 2" par ta répétition du nom. Bx. M!H~
M)H~ eux cheval, chevaux; dye oiseau, c;~ eiye
otCM)~
oiseaux.
Le créole guyanais procède commb la langue èwe, en post-
posant au nom, lorsqu'il y a nécessité de préciser le nombre,
le pronom pluriel de la troisième personne yé, auquel on
peut sumxer le démonstratif là. Ex. Jibi dit mo ca
mane Jibi dit Frère, je me marie; Jibi ffM Ft'e-~ com'age
Jibi cria Frères, courage! Ous plime-yé MNH~ vos
plumes sont un peu noires; f<t /'emme-M cette femme, ra
femme yé-là ~es femmes.
A la Trinidad, on indique la pluralité en préposant an
nom le démonstratif cé (ces) et en lui postposant le démons-
tratif M. Ex. CM poMend c<! ch~ottM-M main MMM cd
maH~-M pace moèn &Moe)t yeaux you may take the sapo-
dillas, but leave the mangoes there, for 1 want them.

L'ARTICLE.

MM. Aug. de Saint-Quentin et Thomas se seraient rendu


exactement compte de la nature véritable de l'article créole,
s'ils l'avaient étudié dans le milieu africain d'oû it est issu.
L'article créole est invariablementla et toujours i! se place
après le nom déterminé, par la raison fort simple que dans
quel-
les langues gainéenncs, les adjectifs démonstratifs dont
ques-uns remplissent la fonction
d'article défini se postposent
aux noms.
En yoruba, les démonstratifs ye this, M<~ that; ni this one,
that one; toon-~ thèse, M<t-Ht those, se placent après les
Nd a d'ordinaire la valeur du
noms. Ex. )? yi cette maison.
démonstratif angtais « that mais dans certains cas, il faut
le rendre par l'article < thé ». Ex. oAoH~W "a ti o
de latta
à
l'homme qui est venu hier. Ni équivaut le plus souvent
l'article denni. Ex. tMa ni la rivière, oba ni le roi, etc.
En odschi, les démonstratifs yi. no se postposent.
Ex.

odang ~t cette maison, AaaHM Ho la chandette. fait sou-


No
aussi il équivaut à
vent fonction d'article défini, et souvent
l'adverbeallemand da o, Ex. od<t~ no yC das Haus da
ist schon.
d agent,
En èwe, le suffixe la, qui sert à dériver des noms
s'emploie aussi en qualité d'article, et alors il se raccourcit
ame-~t, ame-a
le plus souvent en a. Ex. ame homme,
l'homme; <Kpe maison, oMe- enoe-a, aw-a la maison,
Sous t'empire de ces habitudes, les nègres ont cru recon-
celui do
naître un démonstratif-article analogue à ceux ou à
démonstratif là
leurs langues maternelles, dans l'adverbe
qu'Us entendaient émettre à la suite des noms et des pronoms
cela). H
démonstratifs (t'homme-tà, cette femme-là, celui-là,
démonstratif ci, dans les
est à remarquer qu'ils ont négligé le
deux colonies, sans doute parce que dans leurs langues ma-
d'article défini.
ternelles un seul démonstratif jouait le rôle
Parler de la Guyane. La s'emploie en qualité d'article
dans tes exemples qui suivent mé pagaye la
voici la pagaie,
pfj~d ~MOM-nat/e la prends le gouvernail, nègue la M le
qui a passé là.
nègre est là, négresse qui passé dà la la négresse
le compta
Dans ce dernier exemple, l'artMie ilgure après
ment du nom, ainsi que cela se pratique en yomba. Ex. ?
ngdzo ni la maison est en feo.
Parler de la Trinidad. Ex. mtMte ? le monsieur,
chouval la le cheva!, mcMt'ze~e la la demoiselle, lasalle la
ia salle, ~OMM!~ la la poussière.
Dans ces deux derniers exemples, l'article français ayant
perdn toute valeur grammaticate, a eM soudé au nom, lequel
est suivi de l'article africain.

LES ADJECTIFS ET LES PRONOMS DÉMONSTRATIFS.

Parler de ia Guyane. L'adjectif démonstratif se rend


i° par l'article la; 2* parça. la; 3° par ça. Ex. A'&) la
cette eau, ce ruisseau; jou la ce jour; ça coup la ce coup,
fa ouomme la cet homme, fa om~MM la yé/a ces hommes;
fa larestant fromage ce restant de fromage, fa conte ces
contes.
Les pronoms démonstratifssont fa ce, ceci, ce!a; ça-la,
fa-la la cetm-Ià, celle-là; ça-la, ça ici la celui-ci, celle-ci.
Parler de la Trinidad. L'adjectif démonstratif se rend:
1° par l'article la; 2° par ~<<<t ou ça-la postposés au nom;
3° parcé. cd.
la, ça-la. Ex. nomme la cet homme,
jadin moèn la ce jardin qui est à moi, d/MM p:Mt:t la cette
eau vive, zombi çla-la cette apparition, jipe {'a-&! cette jupe,
cé bagaye ça-la ces affaires là.
Les pronoms démonstratifs sont: fa ce; ça-ta celui-ci,
celle-ci; laute la celui-là, celle-là.
L'emploi de l'article comme adjectif démonstratif est abso-
lument dans le génie guinéen, auquel le dialecte de la Trini-
dad s'est montré particntiÈrement Cdete en postposant aux
noms les adjectifs démonstratifs fla-la, ça-la.
LES PRONOMS PERSONNELS.
personnels
Parier de la Guyane. La plupart des pronoms
moi, toi, lui, eux, etc.
ont été formés des pronoms régis <
Sing. 1 mo je, moi, me. Pl. 1 nous nous.
ous vous (respectueux).
2 <o tu, toi, te (familier). 2 ~tevous.
foue tu, toi, te (ironique).
3 Mit,elte,lM,!e,etc. 3 ~ils.Otes.eux.
Parler de la Trinidad. Les pronoms personnels ont été
formés comme à la Guyane.
Sing.l ~0~ je, moi, me. Pl. 1 nous nous

ous vous (respectueux).


2 to tu, toi, te (familier). 2 MMtevous.
toé tu, toi te (ironique).
3 li, i il, elle, lui, etc. 3 yeaux ils, eltes, éux.
singulier, de formes
La création, à la seconde personne du
du français, car
respectueuse, familière et ironique procède
il n'y a rien de semblable dans les langues de la
Guinée.
troisième personne
La non-distinction des deux genres à la
du singulier est directement aMcaine.
demeurent
Dans les deux dialectes, les pronoms personnels
idiomes
invariables à tous les cas, bien qu'il y ait, dans les
légèresentre tes
guinéens à moi connus, quelques différences
pronoms'sujet et les pronoms-objet.

LES ADJECTIFS POSSESSIFS.


supplées par les
En odschi, les adjectifs possessif sont
modi8cs dans leur forme, à
pronoms personnels Incrément
la première et à la troisième personne du singulier. Ex. me
tM-o le mattre de moi too wa.
le maître de toi ne tH'a le
maître de lui, d'elle; yeng wo le maître de nous; MM Mt'a le
maître de vous; uon~ <<! le maître d'eux, d'elles.
tt en est de même dans la langue yoruba; seulement, les
pronoms personnels s'y postposent au nom, et l'on peut les
faire précéder de la préposition fi, Ex. iwe mi le livre de
moi; Mce <'e-MM le livre à moi.
Dans les deux dialectes, les adjectifs possessifs du français
ont été remplacés par tes pronoms personnels.
Parler de la Guyane. A la 3" personne du singulier, l'ad-
jectif possessif so (son) a pris la place du pronom H. Ex. mo
maman la mère de moi; ? lamain la main de toi; so ~ttdte
la fenêtre de lui, d'elle; nous M~ l'affaire de nons, les
affaires de nons; zaute cô le corps de vous; </ë papa le père
d'eux, d'eues.
Parler de la Trinidad. Les pronoms personnels se post-
posent aux noms. Ex. buache Mo~t laboucheàmoi; bouche
ous la bouche à vous; bouche li la bouche à lui, à elle; bouche
KOM, bouche ;Mt< bouche </MMa:.
Les nègres originaires de la Guadeloupe disent bouche a-
moen, bouche a-ous, bouche <t-H, etc.

LES PRONOMS RÉFLÉCHIS.

En yoruba, les pronoms reMechis sont supplées par les


expressions concrètes mon corps, ton corps, son corps, etc.
Ex., ô fe aM )'ê il aime le corps de lui, il s'aime.
It en est do même en odschi. Ex. me hù le corps de moi,
wo M le corps de toi, et &<Ao tte hù mouvoir son corps, se
mouvoir; daMj/ ne M se tourner.
Dans les deux dialectes, les pronoms rénechis ont été rem-
placés par les mêmes expressions concrètes.
Guyane. Mo ca MM~ mo eu je soigne mon corps, je
me soigne.
L.AOAM
Trinidad. Ca/K~WM M blessé cA li le capitaine a blessé
le corps à lui, le capitaine s'est blessé.

LES PRONOMS PERSONNELS RÉGIS.

Dans les langues de la Guinée, tes pronoms personnels régis


se placent toujours âpre!) le verbe.
Odschi. 0&o Ntt ou obo-m ii me frappe; oma mi ou
etc.
oma-m il me donne; &<<a <cocn 6iM-M il te frappe,
Yoruba. go ra â je l'ai acheté; wo W Mo ri ong je
l'ai vu mo fe awong tt o fe emi j'aime ceux qai m'aiment, tt
en est de même dans les deux dialectes.
Parler de la Guyane. ~fo.M tran~M ? je vais t'étrangler;
li raM di il le hala, le tira, t'entraîna; H wa &KM<! OM il
Jean dit Ii
me laisserait; n'a M~~ to nous te conduirons;

Jean lui dit wo songé to j'ai pensé à toi; esse nous MKde
fi nous bois est-ce qu'il faut que nous lui vendions notre
bois?R
Parler de la Trinidad. I <o~ M il te vit ous pas man-~
&Mn<MttaMM la dit di
nous vous ne nous avez pas amarrés;
la Samaritaine lui dit; m'a rende ous li doub je vous rendrai
le double; K dit moctt con fa elle m'a dit comme cela.

LÉS PRONOMS RELATIFS.

Hn'y a point en odschi de pronoms rdatifs. < Im Dent-


schen wird die Beziehungdes attribntiYenNebensatzes durch
die Reiativ-Pronomen aasgedrOckt. Die Odschi-Sprache er-
mangelt dieser, und BcMiesst den Adjectiv-Satz ohae solche
VerMndung unmittelbnr aa sein Beziehnngswortim Hanpt-
satze an. Die Bœiehnag des Nebensatzes wird jedochMuBg
durch ein dem Pradikat destietben nachfolgendeo demons-
traUves Adjcktiv-Pronomonno oder ~t ausgedrucM, z. B.
ade wt-a-ye {/< m-ent-aMM der Sache (die) ich gethan, diese
schameichmich." D
En yoruba, le pronom relatif s'exprime, dans tous les cas,
au moyen de la particule invariable <t, don! l'origine est dou-
teuse, dit M. Bowen. Bx. Mpo <t n~ôfo toi qui parles, ilé Ii
oba J~o la maison que le roi a construite, okongri « ? rè dxo
t'homme dont la maison a hrn!6.
A ta Guyane, les nègres ont conservé le pronom o qui »,

mais ils ont rejeté les pronoms relatifs régis « que, à qui, de
qui, dont Ex. Papa Piè qui !e-pa patron le papa Pierre
qui était patron; pitite mo <o~ l'enfant que j'ai vu; M~Me mo
ca wè so case le nègre dont je vois la case; moune Mto ca
psM la personne à qni je parle; ma «Mt 60)~~ dit m
je ferai ce que le bon Dieu m'a dit.
Parler de la Trinidad. Il résulte des indications assez
confuses données par M. Thomas i" que seul le pronom
e qui a été conservé; 2" que d'ordinaire les pronoms rela-
tifs régis sont remplacés par la adjectif démonstratif et article
déSni 3° que les enfantset parfois aussi quelques grandes per-
sonnes emptoient cumulativement avec la le pronom démons-
tratif ça. Ex. Simaye la ~eatM? /X épis M~e<s moèn la dis-
persion (semaille) qu'ils ont faite de mes effets; missié la
~/eaM<c pOM~M la ou MKMM la fa ~MMa; poK~M la le
monsieur qu'ils ont chassé.

RELATION DITE DU GÉNtTtF.

Dans les deux dialectes, le nom possédé se place avant le


nom possesseur, sans que ta relation soit indiquée autrement.
Parler de la Guyane. Nègue <*oM~ les nègres du roi; case
so coumé la case de sa commère; ?)<? eoM~t c/MM~e tous les
coins de la chambre; sac ~KMMM pays ~Me di Mo matte
lu sac d'ignames du pays des nègres de mon mattre.
La préposition française n'a été conservée que dans les cas
accnmutation de noms régi!,
assez rares où, par suite d'une
comme dans le dernier exemple, la phrase serait difficilement
intelligible.
Farter de la Trinidad.- Caye~oMla case de Jean; cAspesM
fille; bou-
papa tite ~yc la le chapeau du papa de la petite
tOt~Me HMM~ la tè notMjadtH Ch<HM la bourrique
du mon-
sieur était dans le jardin de Charles.
A la cOte de Guinée, la relation du génitif s'exprime, sans
t'aide d'nne préposition ou d'une particule, en préposant ou
en postposant le nom possédé an nom possesseur.
ESk. Le nom possédé se place avant le nom possesseur.
Ex. e/BA t~MBM le nid de l'oiseau, ete «Mm le patron de
la barque.
Ibo. Le nom possédé se place avant le nom possesseur.
Ex. opara MX~ue le ttls de l'homme, tMt
MM-m la tête de
mon père.
Yoruba. Le uom possédé se place avant le nom posses-
baba la maison
seur. Ex. ttoe OMM le livre de l'enfant,
du père, <~o o&M~ le bord de ta mer. Le nom possédé est
quelquefois suivi de la particule tt. Ex. <M baba la mai-
son du père.
Odschi. Le nom possesseur se place avant le nom pos-
du
sédé. Ex. okolo eni l'œil du crabe, fMnuM la tête
éadavre, w'agya akoa l'esclave de ton père.
gwe. Le nom possesseur se place avant le nom possédé.
Ex. /b/b aro le pied du père, <MOt-nye avo le vétement de
mon frère.

L'ACCUSATIF ET DU DATIF.
LES RELATIONS DITES DE
deux
Dans tes langues do la Guinée, comme dans nos
s'expriment
dialectes, les relations de l'accusatif et du datif
régi.
en postposant au verbe nom
le.
Parler de la Guyane. Li pr~ so camarade il pria son
camarade, li pf~M so il avait prêté à son frère, OM~c~oM
li dit so ooe~tt un jour il dit à son voisin.
Parler do la Trinidad. Si otM ~todte Jean fs-t)O~K<
si vous prêtez à Jean ce cerf-volant, madame la t'Hnete tc?(e
li bagaye la la dame a remis à son enfant cet objet (bagage).
Odscbi. F.<~o akoa il a acheté un esclave, oma ne ba
entama il donna à son fils un vêtement.
Yoruba. La relation du datif s'exprime, dans certains
cas, à t'aide de la particule /«. Ex. e~ aburro wi fu baba
fd ce jeune frère dit a son père. Mais, fu n'est autre chose
qu'un thème verbal signifiant < donner Ex. fit mi donne-
moi, fu wa donne-nous. Or, le créole de la Trinidad possède
une sorte de cas datif dont l'indice baye on ba est, ainsi que
le constate M. Thomas, « a shajrteningof the old french verb
< bailler to give. Ex. H po~ <ownMt< baye /'<tmt< li ho
brought trouble to his retations. »

LES AUTRES RELATIONS.

Dans nos deux dialectes, comme dans la langue yoruba,


les antres relations s'expriment au moyen de prépositions.
Parler de la Guyane. Z~MM<aM CMKfe dans la cendre,
ké MM avec moi, <<MOM~ & snr terre, la <<o~ cMe~ surio dos
du chien, enbas lit sous le lit, pou mo MMpd pour mon sou-
per, bo di «Me vers la case, cou li comme lui, semMJ d~
comme le feu, etc.
Farter de la Trinidad. Nans cMmtM li dans son chemin,
~c lamain moèn avec mes mains, etKKdfHt! sac ous daus
votre sac, ~ot<s dos sur Io dos, enlai (en i'air) ~M mo~tt sur
ma tête, etc.
Yoruba. D<o&o (< ml il s'assit près de moi, ida avec
si contre le
un sabre, M Mt avec mot, ? mi sur moi, orung
?
ciel, tttno dans la maison, Ii MM sur la bouche, etc.
postpositions.
11 y a en odschi des prépositions et des

LE VERBE.
ta
Dans nos deux dialectes, comme dans les langues de
les
cote de Guinée, les thèmes verbaux, invariables à tons
modes, à tous les temps et à toutes les personnes, se con-
personnets pré-
juguent i" à l'aoriste, à l'aide des pronoms
invariables
posés; 2' aux autres temps, à l'aide de particules
et des pronoms personnels préposes.
Il me suJlira, pour démontrer l'identité de
la conjugaison
créole et de la conjugaison guinéenne, de conjuguer succes-
sivement en odschi, en yoruba, en créole guyanais et en
créole de la Trinidad, les quatre verbes ko aller, ri voir, <o<
voir, NMM~ manger.

I. COMt!6A!SON EN OPSCH!.

ïnanitif.
Xo aller.

Impératif.
SinK. ~o ou wo Ao va 1
Plur. go ou mu ko allez 1

Aoriste (pr~Bcnt-passô).
Sing. M~o H. !/e&o
~0 ko mu ~0
o~o vo ko
Présent absolu.
Sing. mi re'&o Pl. ye re-ko
<oore-&o WM~e-~o
o re-ko vo-reko

Fatar.
Sing. mi M-Ao Pl. ycM-Ao
<ooM-&o mu 6c!-&o
o&dC-&o oo<'<Ao

Passé.
Sing. Mt'a-Ao M. y'o-~o
w' a-ko m' <t-&o
e'a-Ao
wa :e v' a-ko

H. COMD&AISON EN YORUBA.

InBmitif.
Bavoir.

Impératif.
JRtou~tooWvots!1

Aoriste (présent-passé).
Sing. emi ri PL <!«'(tW
iwo t't Mtgytft n
OH~W H!00)t~W.

Présent-imparfait.
Sing. Mt<n~-)'{ PL <!MM Mjjf-rt
iwo ng-ri
<tPOM~-t't CH~tM H~<
O~M~-W oawong-ng·9·i
<noon~-tt~-W
Futur.
Sing. emi d-!t Pl. N<o<t <i-t't
ticod-rt eK~yw <W
OM~~ft inwong ~-rt

Passé.
Sing. emt~-ft Pl. <:M)aM-ft
ilvo ti-ri Mj~tM<t-rt
ong <t-W nteon~ ti-ri

DL CONJTJGAtSON EN CRÉOt.E 6DTANAIS.

Inanitif.
voir.
Impératif.
Sing. wè vois Pl. <MMM <o~ voyons 1
saute <co~ qu'ils voient 1
Aoriste (présent-passé).
Sing. mo <o~ PL nous wè
tOM~ MM<eM)S
H~ t/dt0~

Présent al~solm.
Sing. MO ca-toé PL nous ca-wè
? ca-to~ MM<0 C<<0~
Hca-to~ ca-wè

Futur.
Sing. MOtoa-to~ Pl. nous MM-M)~
to wa-wè ~<tu<e <oa-<eë
K<ca-M)~ wa-wè
passé et imparfait.
Sing. <!M te-tc~ PI. nous té-wè
<0~-M)6 <<!M<e ~-tC~
!t~ ~(~-tee

IV. CONJUGAISON EN CM~Ot-E DE LA TRDHDAB.

tnBmtif.
J~H~ manger.
Impératif.
Sing. NaM~ mange tatMdHMta~qm'Hmango!
1

Aori~e.
Sing. MC~M BMK~ Pl. KOtM mangé
OtM~MtM~e ~MM~emangé
Hmo)!~ ~MMMC mangé

Présent absolu.
Sing. moèn ca-mangé Pl. nous ca-mangé
V C!MM-HMtMjf~ .îat<<6 M-maK~e
H MMMf)~ ~MMiC ca-mangé

Futur.
Sing. Mo~M c<tM mangé Pl. nous va-mangé
ous <M-M<M!j~ saute C(t<e mangé
li a-mangé veaux ca-MMt~~
PiM-qme-psrfait.
Siog. mo~t <maM~ Pl. MMM té-mangé
otM t~-mat!~ zaute ~-MM!t~~
ft (d-MMMt~e ~MM!C té-ntangé
L'AORISTE.

M. Mis dênnit ainsi l'aoriste ou temps indéterminé e La


langue odschi distingue, en dehors des trois relations fonda*
mentales du présent, du passé et du futur, une relation ver-
bate indifférente, une relation indéterminée. Es Bndethierin
freilich auch eine ZeitbeMehung statt, denn ohneeino solche
kanu der zeitgebundene Geist die Vorstottung einer ausge-
sagten Thatigkeit gar nicht reatisirën; aber das Yerhattniss
dieser Beziehung ist ein froies, unbeschranktes;sie ist eine
bewegliche, und kann gteichermassen in die Vergangenheit,
Gegenwart oder Znkuntt gestellt werden. e
Cette définition s'applique exactement à l'aoriste dn verbe
guyanais dont MM. de Saint-Quentinn'ont pas saisile véritable
caractère. Le présent absolu MM ca-crè « je crois diaëre de
l'aoriste mo crè, en ce qu'il spécifie une croyance actuelle
récemment admise,tandis que celui-cidénote une sorte d'état,
une habitude, c'est-à-dire une action mentale que l'on ne peut
rapporterexclusivement à l'une ou à l'autre des trois divisions
du temps passé, présent, futur. De même mo ca-wè dinere
de mo wé, en ce qu'il spécule qu'en ce moment je vois telle
wé signifie
ou telle chose, au lieu que pris en lui-même mo
aussi bien « j'ai vu que « je vois ou que a je verrai
A la Trinidad, l'aoriste s'est atrophié. Dans le
plus grand
nombre des verbes, il correspond au passé déterminé et au
passé
passé indéterminé. Mais il correspond au présent et au
dans la conjugaison des vingt et quelques verbes qui ne

prennent qu'accidentellement la particule ca. 11 suit de
était
qu'au moment où ce dialecte s'est formé, l'aoriste y
odschi.
identique à celui du créole guyanais et de la langue
LE PRÉSENT ABSOLU.

dialectes,
Le présent absolu est caractérise, dans les deux
invariable de la particule
par la préBxation au thème verbal
Saint.Quentin, <- une
action
M indiquant, disent MM. de Selon
actuelle qui se continue, se complète, se développe D.
M. Thomas, cette particule dénote « thé
continuance most
usnalty with a progressive import, as ~M!<a: ca-d~t~'t they
moment e.
are breakfasting, ils déjeunent en ce
à
Au fond, l'emploi de la particule ca sert à spécifier,
préciser que l'action s'accomplit actuellement, qu'elle vient
de commencer et qu'elle se poursuit, en un mot, que l'action
n'a rapport ni au passé ni à l'avenir, mais exclusivement au
ta* conjugaison des vingt et
temps présent. En euet, dans
quelques verbes dont je viens de parier, la prénxation de ca
a is inceptive and denotes
the beginning of a mental feating 6.
or condition, as: NMen M-atmeK p&re am getting found
of the place, je commence à aimer la place; Veaux ca-honte
growing ashamed of their
gens }/eo«iC <tpou~etK they are
people now, ils commencent à avoir honte de leurs gens
d'à présent
Préfixée aux mêmes thèmes verbaux, la particule ca sert
produit lorsqu'elle est pro-
encore à indiquer que l'action se
voquée par quelque autre action. Ex. MM~K<M-M moune
!M NMtta! ca-fè MMe ~pM c<~ je me prends & hau- les gens
quand ils se moquentd'eux-mêmes.

LE FUTUR.

Le futur est caractérise, dans le créole g&yanais, par la


particule <o<t laquelle provient de t'indicatiftprésent du verbe
irregnUcr aller a. !t'a est sujet à s'aphcroscr en a. Ex.
n'a-~M!<e nous parierons, H'o-poxce nous pourrons, m'a ?)<-
JoM Mte je serai toujours libre. En odschi, les pronoms per-
sonnels s'apocopent également devant la voyelle a, particule
caractéristique du passé.
Indépendamment de ce futur absolu, le créole guyanais
possède un futur teinté de présent dont l'indice calé (ca-alé
je vais) se syncope parfois en ké. Ex. mo caM ~roMend je
vais me promener, HO!M hé-réglé nous allons régler, mo M-
/oMte ? je vais te rosser, etc.
A la Triuidad, les deux formes s'emploient concurremment
et alternativement. Calé se syncope parfois en cae. Ex.
MM~K ca~-maHgJ je vais manger, je mangerai.

LE PASSÉ.

Ce temps est caractérise dans les deux dialectes par la par-


ticule té, laquelle provient du participe passé dn verbe < être
Cette même particule, composéeavec ca et avec tpa, forme
un imparfait et un conditionnel MM) !e-Mt-<M je voyais; MM
t~-tca-to~ je verrais, j'aurais vu.
Ces développements,inconnns à la conjugaison gnineenne,
sont dus à l'influence de la conjugaison française.

LE VERBE NÉGATIF.

Le verbe se conjugue négativement an moyen de l'adverbe


pas placé, à tons les temps, avant le thème verbal. Ex. mo
pas M-M~ ou mo p-M-M~ je ne vois pas; mo pas to~ je n'ai
pas vn, je ne vis pas; mo té pas ca-wè ou p-ca-wè je ne
voyais pas; mo tè pas <p~ je n'avais pas vn mo pas ~-toa-
wè on mo p-M-to~ je ne verrais pas.
Yomba. Le verbe négatif est formé par la préposition,
au thème verbal, de la particule &!), t). Ex. cmi ~() ri, cm!'
()njenevoispas.
Odschi. L'indice de la conjugaison négative est préfixé
au thème verbal. Ex. ntt )~m<! je ne donne pas, Htt <t-ye je
lie fais pas, mi ng-ho je ne vais pas.
C'est évidemment sons l'empire de leurs habitudes gui-
neennes que les nègres ont modMe la conjugaison négative
française caractérisée par la préposition de « ne et la post-
position de « pas t.

LE VERBE PASSIF.

Dans les langues de la Guinée, le verbe n'a point de passif,


et l'on y supplée en se servant de la troisième personne du
pluriel du verbe actif.
Odschi. « In der dritten Pprson~ Plural wird das Yerb
sehr haufig gebraueht, wie im Deutschen, mit dem unbe-
stimmten Pronom man, wennmaneineThMigkeit~ohnehe-
stimmtes Subject, aber als eine dem persontichen Subject
uberhaapt zukommende aussagen will. Dieiie Form vertritt
daher auch die SteUe des der Sprache fehlenden Passivs.
Ex. okro vo-harre tM a/~ e)tM ein Boot wird an beiden
Seitea geradert.
Yoruba. Ex. d (pour <Mo<Mt~ eux, its) W mi ils voient
moi, je suis vu.
Le passif, qui fait défaut dans nos deux dialectes, est de
même supplée par la troisième personne du pluriel du verbe
actif.
Guyane. Ex. yé ca-~roMMM~e mo ils me tourmentent,
je suis tourmenté
Trinidad. Ex. </eat<!C aimèn li ils l'aiment, il est aimé.
LES VEKBES IMPERSONNELS.

Au lieu de dire, comme en français il tonne,it pleut, it


vente, etc., les nègres des deux colonies disent, comme à la
cote de Guinée: M)te M-~rMMM le.tonnerre gronde, &tpHe
ca-tombéla pluie tombe, OM< ca-soufflé le vent soume.
Odscbi. Ex. osu <o la pluie tombe, opoHtM &om das
Gcwitter donnert, opranna pai das Gewiller blitzt.

L'AUXILIAIRE AVOIR.

L'auxitituro avoir a été rejeté par les nègres des deux


colonies, bien qu'il soit en français d'un emploi si utile et si
fréquent. Gela tient exotusivement à ce que les verbes qui
signinent <t posséder o n'ont point fourni un auxiliaire ana-
logue aux langues de la côte de Guinée.

LE VERBE ÊTRE.

Odschi. Cette tangue possèdetrois verbes qui s'emploient


en qualité de verbes substantifs ~a faire, si placer, di manger.
Le premier correspond à notre verbe < être Ex. o !/a
tenteng il est long, o bibini il est nègre, dade y~ deng le
fer est dur, odang <t0 yd /e la maison est belle, etc. Ce
verbe s'emptoie aussi au passé. Ex. v' <t-~s ak-oh-oi-a il est
un vieillard, odang Ko a-~ go la maison est délabrée.
Quand aucune méprisen'est possible, on peut sous-entendre
ce verbe substantif. Ex. ade ni ~t/o/S la chose (est) très
belle.
Très souvent ce même verbe est remplacé par les pronoms
démonstratifs ni, onH!. Ex. o&o&o~fffe tt< c'est une poule.
me traberre ni ~'ropfn~ ma résidence est Akropong.
Enfin, on n'emploie jamais les verbes substantifs dans le
sens de demeurer, se trouver x.
Yoruba. Le nombre (les verbes SK&~an~ s'élève jus-
qu'à onze en y comprenant Ii ou ni qui, suivant la remarque
de M. Bowcn, n'est pas autre chose qu'un pronom démons-
tratif employé comme copule. Ex. oba Il wo tu es roi, ~Ht
ni baba rc qui est ton père ?
Partir de la Guyane. Le verbe substantif « être a été
remplacé par le pronom démonstratif fa, auquel on peut pré-
Sxer la particule du passé, mais non celles du présent et du
futur. Ex. MM* fa catibe je suis esclave, MM fa sodat vous
êtes soldat, fa Ii c'est lui, ? papa Ac /o m<MmaH té-ça nègue
ton père et ta mère étaient des nègres, fa ous qui fa cap-
tatne c'est vous qui êtes capitaine.
Qnand il s'agit d'exprimer l'imparfait, le futur, le condi-
tionnel, on prépose les particules de conjugaison au prédicat,
comme si cetui-ci était un thème Verbal. Ex. c/i<m!H ~jpas
bon le chemin n'était pas bon, fa M'a so /st~e ce sera sa faute,
Mt'a toujou H&e je serai toujours libre, mo té-wa pis mal je
serais plus mal.
Le verbe substantif ~a se sous-entend quand aucune mé-
prise n'est possible, notamment quand le prédicat n'est point
nn substantif. Ainsi, on dira mo' malade je suis malade, mo
content je suis content, mo là je suis là, mais non mo ca«'6e
< je suis esclave a, car mo calibe signifie a ['esclave de moi,

mon esclave s. Il faudra dire pour éviter l'équivoque mo fa


catibe ou mo o:<M catibe.
Non plus qu'en odscbi, le verbe substantif ne s'emploie
jamais dans le sens de a se trouver ».
Parler de la Trinidad. Le verbe substantif, qui se sous-
entend fréquemment, se rend, au présent par c'é (c'est), au
passé par té ou c'<i~, au conditionnel par sé (serait). Ex.
ous grand p<M~ vous êtes plus grand que lui, g<m~(!n)M
~MM. aussi vié qui moMMK~Me <!0! leur grand'mére est
«~ ~«M.
aussi vieille que notre onde;
~Hd 9~~
yMM~m~ chacun e.t quelque chose d'important
selon tui.m6me; M- 0~ .'<! you P~~M jeTOis
bon étaient
que vous 6tes un prophète;
la chose ne serait pas
de bonnes gêna; bagaye !« P~ bon
bonne.
LE
PARLER MALÉO-ARYEN

PHONÉTIQUE.

VOYELLES.
t
Les voyelles neutres e (eu), u et ta voyelle
étrangëres au
malgache, ont été régulièrement remplacées dans les mots
français.

VOYELLE C (CM, ??).


La voyelle. e (ett, au), a été remplacée par i, ou, o.
Ex. ptttt petit, cimin chemin, dimain demain, dt de,
cimise chemise, CMK venir, bisoin besoin, tini tenir, dimandé
demander, sen!, Mr~ heureux, oM vieux, dé deux, M/'
boenf, guéte gueule, laquée queue, mié mieux, bondié bon
Dieu, blé bleu, honté honteux, sécond second, sére sceur,
faMrechatear,doMMfe douleur; çouval cheval, ~oMMotfgenon,
S'OMraoM~e grenouille ploré pleurer, co~M' voleur, etc.

VOYELLE ?.
La voyelle u a été remplacée par i, OM,
Ex. m«e< mulet, prine prune, di du, plis plus, ~MtJoMe
&-AU*M 4
culotte, pMteM punaise, écumer, <K~M<! sucre,
<<t)'&me rhume, pMme plume; xoMfe jurer, <<OM dur, 6oMfM
brûlé éne une, un.

LA VOYELLE (<M, C~).

ptntOt, dit
La voyelle è (at, e<) a été remplacée par é, on
M. Baissac, par un son intermédiaire entre et
é, mais plus
voisin de ce dernier
Ex. f~e tête, rn~e mattre, fëre faire, pégne
peigne, la-
pléne plaine, lapéne peine, ~~Me seine, m~ mais,
payer.
Dans quelques mots, la voyelle é été remplacée par t, a.
discende descendre,
Ex. siprit esprit, siquisé excuser,
M~hattt éléphant, acoute écoute aspère espère 1

LA TOYELLE 0 (CM).
voyelle o (au) a été
Dans un certain nombre de mots, la
dormir, boucoup
remplacée par la voyelle ou. Ex. dourmi
prouménépromener, oussi aussi,
beaucoup, poMt-tr~ portrait,
galoper, MtM-<t sorti, touctouc toctoc, tourtie tortue,
gouyave goyave.
11 y a en malgache une telle
affinité entre les sons o et ot<,
langue, tous deux sont Bgures
que dans l'alphabet de cette
par le mémo signe. La voyelle o se prononce ou. Quand elle
eUe prend le son de
est surmontée de l'accent circonflexe,
notre o. D

LA DIPHTONGUE
M.
t. Ex. <hMMt/-
Gette diphtongue a été remplacée par oui,
condire
Buif hoMtte huit, <atoMt<e nuit, dt~o~e huile,
depuis, etc.
conduire, aivrd suivre, li lui, laplie pluie, dipis
LA DIPHTONGUE Oi.

Dans un certain nombre de mots, oi a été remplacé par o.


poisson,
Ex. sogne soigner, M-cante soixante, posson
famofjfMtd moitié.

CONSONNES.

LES HNGCO-JPALATALES C~, j.


Ces deux articulations, étrangères an malgache, ont été
remplacées par les iinguo-dentaies s (c doux), z. Ex. nMKce
manche, ptoce pioche, Mm~e chemise, c~e chaise, Hctfn
.chien MMe<jamais, MtfHOu genou, moztM~ imaginer, ttM~e
manger, zox~ jurer, zene JMMM, &)'zM Georges, etc.

LA VIBRANTE r.
M. Baissac constate que a dana les sons difficiles: 6< 6<,
c)', <:<, dr; d<, etc., souvent la
prononciation interpose, plus
la brève
ou moins rapidement, suivant l'agilité des organes,
de la voyellelongue qui va suivre. Ainsi, au lieu de crabe
on entend plus ou moins nettement carabe; au
lieu de
a plume
pilime; au lieu d' « étrangler «-angueM. Des
mots français a trou, clou, gratte, crier, trépied, troupeau
la plupart des anciens font tourou, coulou, ~<tM(M, quirié,
~r~ted, (oMfOt'pMM n.
Cette particularité de la phonétique mauricienne trouve
son explication dans la phonétique malgache. a Deux con-
suivre
sonnes différentes, dit M. Marre-de Marin, ne peuvent se
sans voyelle interposée, à moins qu'ciies ne soient précédées
d'une uasate. Le malgache rejette la combinaison des li-
quides l, r avec une autre consonne, combinaison t'rcquem-
ment admise dam le malay et dans le javanais. C'est pourquoi
les mots d'origine française qui ont cours dans le malgache
sont adoucis par l'intercalation de voyelles, toutes les fois
que deux consonnes se suivent immédiatement. Ex. kiMsy
cloche, Mr<~ brosse, biriqua brique, cJfdn~ corniche,
fa/brtMfN fourchette. e
En malgache, < tous les mots finissent par une voye'te, le
plus souvent a, o, y (t) Mais, par l'ettct de règles eupho-
niques très délicates, le son de la voyelle finale est souvent
< presque
imperceptible souvent aussi, cette voyelle est
< complètement
muette ('). On comprend dès lors comment
t'r finale a été maintenue dans les mots français alors même
qn'eHe n'est pas suivie d'un e muet. Ex. moM- noir, pour
pour, Mcct~s corps, souffert souffrir, mort mourir, etc.
Dans les mots français terminés en -tre, -dre, -&re, etc.,
l'r a été éliminée. Ex. vente ventre, lacende cendre, lombe
ombre, disique sucre, ~e~Me encre, ~tM tigre, /Mce fièvre,
eo~! coffre, etc.

LA LIQUIDE <.

Les observations qui précèdent sont applicables à la liquide


t. Ex. pilime plume, COM~OM clou, lasabe sabre, etMem&e
'ensemble, simpe simple, etc.

LA SYLLABE <
Lo son français a éM remplacé par le normand quid.
Ex.: cimiquiére cimetière, <<MMt</tM<!amitié, «t&o~Mtdfe taba-
tière, ~mogut<! moitié. Les vieux noirs ne prononcent pas
autrement.

(') Dans tM vocabulairespuMM*pu Dttmont d'Of~Ue, nombre de moto n'ont


puint do voyoth BMte,
LEXIOLOGIE.

APHÉRÈSE.

Un assez grand nombre de verbes et quelques noms dont


la première syllabe consiste en une voyelle soit pure, soit
nasale, ont perdu cette syllabe.
Ex. a) ta~Md attaquer, tacé attacher, /t'o~ anronter,
affûter, ~Mtmd écumer, f<tpd échapper, ~a~ essayer, MK~d
essayer, tourdi étourdir, toné étonner, crasé écraser, <~)td
éteindre, reinté éreinter, vité éviter, cor~Mtt/e écarquiller,
pHc~ éplucher, MM étaler, corcc écorcher, c~t~ éclater, cou~
écouter, ctaboussé eciaboussen,, borgné éborgner, <rsn~M
étrangter, m<mncimaginer, Mtz~ obliger, &!)< oublier, ~bMC~
enfoncer, tende entendre.
b) tranzé étranger, jjfou~e et zégouye aiguille, bitation et
j~MMMfMK habitation.
M. Baissac explique cette aphérèse par le dissyllabisme qui
serait la norme du créole, comme il est celle du matgache (').
< Le dissyllabe, dit-il, semble être le type du mot, substantif
ou verbe. Le monosyllabe y arrive par dilatation ou addition
tOMt'ott trou, K~M; nez, Mtt lit, cot<!oM clou, <0!<<oMp loup,
&MMHd Dieu, asoir soir, d<~m eau, lérat rat, lasabe
sable, lipied pied, dourix riz, etc. le polysyllabe, par sous-
traction ou contraction ta~
attaquer, blié oublier, .sd~~e
araignée, <s<:<! attacher, <~ devenir, M~<M' maitre d'armes,
auùter, etc. Ainsi certains verbes en -d soumis & l'apocope
ou à la syncope reprennent la syllabe supprimée quand l'e
(') Dhjent~n ï.fmMompiMO, woloho don Wnrzoln UMeMr BptM~n eut-
tprechet), dto mbef itt der Tbat ce nielit ttad, da <to towuht WttniM) <t)< "')<))
BmuMn,JO Mgar ote tetttjtet Wort o<*tu k<tttMU, tiad < u den mtt)~)'~ehou tipnt.
o))M In dor Ittito) jiwubU))))! t. (frtod. tUtUcr, (). )))).)
muet final, en se substituantdevant le complémentà l'é ferme,
quand nao cau~ ? doite coulé
en ferait des monosyllabes.Ex.
quand je parle, tu dois écouter; acoMte mot écoute-moi!1
Si to cond ~a~ ~ottpe lacase madame si tu sais courir,
cours chez Madame, etc.
Que les formes redoublées nénez, lilit, louloup soient
explicables par < l'éloignement du malgache pour les mono-
syllabes et par sa tendance à les transformer en mots de deux
syllabes s ('), je n'y contredirai point. Mais, sans sortir du
créole, on peut objecter à M. Baissac que la prénxation
de l'article français a produit bon nombre de polysyllabes
tels que ~tne, lavianne, h!p<t)-<a.:e, larestanl, que < ma-
tinest devenu bomatin, a année banande, que Ms~~ a
remplacé « asseoir t, enfin que l'aphérèse en question porte
presque exclusivement sur les verbes.
C'est, à mon sens, dans l'économie du verbe malgache
qu'il faut chercher l'explication de ce phénomène.
a Le
verbe dans sa forme première, à l'état de racine, sans
nul affixe, indiqué un passif. Ce sont les divers préfixes qu'on
lui impose qui en font un verbe actif, ou neutre, on cau-
satif, ou réciproque, etc. On ne saurait trop insister snr ce
fait si curieux et qui est l'une des assises fondamentales des
grammaires malgache, malayse et javanaise..?-<«:et m<Mt-
~<M signifient aimer » à cause de leurs preSxesrespectt&,
mais ces verbes réduits à leur forme native donnent tia, et
lia est un verbe passif. Si on le fait suivre du pronom per-
sonnel contracté ko, le pronom personnel est alors régime
indirect, et tia-ko signifie « aimé par moi c'est-à-dire
o j'aime et non pas « je suis aimé De même ponr toute
autre racine vono, par exemple, dépouille de tout amxe, a
le sens passif a tué, assassiné o, et, pour lui donner le sens
actif, il faudrait le préfixe MMM, d'où le verbe ms-MMMM

(') MMM-deMarin, t ?.
(pour MtOK-WMo) a tuer, assassiner e; eono'&o < tué par
moi signinera donc e je tue et non < je suis tué
Le passif est tellement dans le génie de la langue que l'im-
pératif revêt le plus souvent la forme de cette voix. Or, l'im-
pératif passif des verbes actifs se forme par la suffixation de
-o, -z, -o, après aphérèse de l'ttt initiale du preBxe, ce qui
fait apparattre en tête dn verbe une voyelle soit pure, soit
nasate. Bx. m<t-M<y~ amincir, a-w~-o qu'il soit aminci;
M<Mt-&o~donner du go&t à, att-Aa~o qu'il soit donné du
goût à, MM-pe~ot placer, a-petf~-o qu'it soit placé.
On verra plus loin que les nègres transports à Maurice ont
dû renoncer au système des prcnxes malgaches et s'en tenir
à la conjugaison dite passive. Il est dès lors vraisemblable
que la syllabe vocalique initiale de la plupart des verbes,
leur paraissant être un indice de l'impératif, a partagé le sort
des prénxes.
PMSTHÊSE.

Les nègres ont preBxé et soudé à un assez grand nombre


de mots français f
l'un des articles simples li (le), lé (le),
la, l'; 2° l'un des articles composés <H (de), doM (de), <M
(de 1'); 3* la sibilante j: provenant de la liaison euphonique
de t'< finale de a tes, mes, des avec la voyetle initiale du
mot suivant; 4° l'm finale de l'article indenni; 5° une prépo-
sition.
1'* <t Quand la langue malgache adopte un mot français,
elle lui laisse ordinairement l'article a le, la, du Ex.:
charette <<Mere~, musique ~tmo~tAs, bière labiery, four-
chette <(t/bfMe<a, cuisine !o&o~, vin dtoetM, etc. (').
Les nègres transportés à Maurice ont fait de même. Ex.
ëMe latabe une table, ~e Mcfe<t un chien, mo Mcoty! mon

C)B<dtm«.p.t.r3 L.
?
corps, M Kj!<d ses yeux, éne Mrot un roi, lédos ton dos,
<MO Mrew mes reins, so labouce sa
bouche, ïo labec son bec,
~ae ~t-Me une oie, etc.
2" Ex. ~Me dtpatH un pain, éne maKp~s dt~OM~e une
mauvaise huile, éne bon <h'Mtj5 un bon riz, ~Me <Mot< un
morceau de bois, disouif suif, divin vin, dt/~ feu, <M-j~/o
teof, etc.
3* Ex. éne MH)mat< un animal, ~a&<< habit, ~or~e
oreille, zaffére aNaire, ~ttHaze image, .:eM/<t~ enfant, etc.
4° Ex. <th<tM< habit, Home &me, fantôme.
a" Ex. <!MM' soir, acote où (à coM), a~OMfat aujourd'hui,
aulière au lieu de, en~M sous, etc.

REDOUBLEMENT.

Très fréquent en malgache, le redoublement y est tantôt


intensif, tantôt minoratif, tantôt purement iexiotogiqne.
M en est de même en mauricien.

a) Redoublement intensif. Ex. etreoM se tourner en tous


sens, battebatté frapper à coups redoublés, roderodé aller çà
et là, ~Mt~M~OK~Ke très long, <t/brM béssobésseà force de me
baisser, mo guétéguété je regarde soigneusement, bèlebèle
superbe, causceausé bavarder, /ra~e/rotM ferraiUer, eae
'catacata une coquette.
b) Redoublement minoratif. Ex. ~tM s'M<H~MtKe un tout
petit peu, blanblancblanchâtre, MMMt'OMwrougeâtre, fouca-
/bt<cc un peu fou.
c) Redoublement purement lexiologique. Ex. K~KM nez,
lilit lit, louloup ionp, etc.
Le malgache redouble les noms de nombre pour exprimer
la succession, le partage, etc. Ex. M-otray un à nn,/Mo/Mo
dix par dix. Le créole dit de même eMe<M un à un, sissesisse
par six, <<!Me~'Me par dix, etc.
GRAMMAIRE.

LE GENRE.

Le créote mauricien ne connalt pas la distinction générique,


qui est étrangère au malgache.
S'il a préfixe aux noms tantôt l'article masculin K, M (te),
tantôt l'article féminin la, c'est que les nègres ont été induits
à prendre pour des préfixes nominaux l'une et l'autre de ces
particules, mais il est à remarquer que certains noms mascu-
lins en français ont reçu te préfixe la, ce qui exclut toute
distinction du genre. Ex. lasabe sable, labec bec, ~apafta~e
partage, lamarc café marc de café, lamance pioce manche
de pioche, etc.
Les adjectifs ont revêtu indifféremment, les uns la forme
masculine, les antres la forme féminine. Ex. MM &on ma-
dame une bonne dame, éne vid &MMM'/e!Hme une vieille bonne
femme, éne MJos p,late un dos plat, ça &onAomme-M sourde
ce vieillard est sourd.

LE NOMBRE DES NOMS.

En créole, comme en malgache, le nombre du nom est


indiqué analytiquement par la préposition on la postposition
d'un nom de nombre, d'un adjectif, d'un adverbe, ce qui
revient à dire que le nom n'a point de nombre.
C'est par erreur que M. Fried. Multer attribue au démons-
tratif ny ou t:(, la fonction d'indiquer la pluralité. Celui-ci
se prépose aussi bien à des noms représentant plusieurs indi-
vidus ou plusieurs objets qu'à des noms auxquels correspon-
drait en français un substantif au nombre singotier. Ex. n!/
zanaky J<KM~ les enfants de toary, ny ta'osa nay nos offenses,
nay notre père, ny tompo le maître, etc.

L'ARTtCLE.

Bien que le malgache possède un pronom démonstratif fai-


sant fonction d'article dénni et se préposant au nom comme
Maurice n'en ont pas
nos articles, les nègres transportés à
moins méconnu la fonction remplie par le, la, <
puisqu'ils
particules
ont, ainsi que nous l'avons vu, préBxéet soudé ces
à la plupart des noms françaiscreoUses. C'est, vraisemblable-
nomi-
ment, qu'ils ont cru voir dans ces articles des préBxes
à dériver
naux analogues à ceux qui, en malgache, servent
soit des ad-
un très grand nombre de noms, soit des verbes,
jectifs.
Comme l'articledeCni malgache est invariable,les mutations
vocaliques de nos articles < le, la les a auront occasionné la
méprise.

LES PRONOMS PERSONNELS.

Le malgache possède deux séries composées l'une, de


pronoms-sujet l'autre, de pronoms-objet.
Pronems-sniet. Pronoms-objet.
Sing. 1. izaho, zaAo, a~fo. Sing. i. & aA~.
2. hianao, <MMO. 2. nao, ao.
3. My. 3.
PL 1. Inclusif ~Ata. Pl. i.(<MM!
1. Exclusif Ma&<t}/. <

? hMtMt'eo.atMfM. 2. ttareo.
3. ireo. 3. reo.
premières per-
Le créole mauricien distingue, aux deux
sonnes du singulier seulement, les pronoms régis par te verbe
(moi, toi) des pronoms régis par le nom, ces derniersTaisant
fonction de pronoms-sujet (MM, ?).
Sing. t. NMt–MO. Pl. t. MOtM.HMM.MK~.
2. toi ?. 2. vous, zaute.
3. li. 3. &??, eMa? zaute.
Les nègres ont trouve dans la construction française de
l'adjectif « autre x avec le pronom HOM, t'équivalent du plu-
riel inclusif. a De même, dit M. Baissac, que notre français
familier construit e autres o après les pronoms « nous, vous
le créole dit nous zoM<e, vous ~<!t«e; mais, tandis que le
pronom nous persiste toujours, te pronom vous se sous-entend
volontiers. Ex. j'irai avec vous, mo M f~/e av .au<f.

<
LES ADJECTIFS POSSESSIFS.

Les adjectifs possessifs du français ont été remplace, sauf


à la troisième personne du singulier, où so (MM, M) s'est
maintenu, par les pronoms personnels mo, to, <tcMs, vous,
jMMtte. Ex. mo lacase la maison de moi, <o lacase la maison
de toi, so lacase la maison de lui, d'elle; nous lacase la mai-
son de nous, vous lacase la maison de vous; zaule <acsM la
maison d'eux, d'elles.
En malgache, les pronoms de la secondesérie se postposent
au nom possédé. Ex. (rano ko la maison de moi, «'(Mo nao
la maison de toi; <t'<Mo ny la maison de lui, d'elle, etc.
Le changement de place du pronom que l'inllueiice de la
syntaxe française a imposé au créole, est un fait sans impor-
tance aucune, car nous Yerrons plus loin que les pronoms-
sujet se préposent ou se postposent au verbe.
LES PRONOMS REFLECHIS.

Dansle parler mauricien, comme dans le malgache, les


pronoms réfléchis sont remplacés par les expressions con-
crètes mon corps, ton corps, son corps, etc.
Créole Ex. wo va touye mo lécorpsje me tuerai.
Malgache lia MMo nao tu aimes ton corps, tu t'aimes
toi-même.

LES PRONOMS PERSONNELS REGIS PAR LE VERBE,

Les pronoms personnels régis sont toujours postposés.


Parler de Maurice. Ex. vous haye nous vous nous haïs-
sez, M Mt~fe doM li son maitre lui donne, H dire j:SM!e il leur
dit, mo <<OKe toi je te donne, etc.
Malgache. Ex. zaho mao~oHg! nao je te remercie, M-
n<!A<:r)/ MaAoMMe nay amiroe Dieu nons a donné une âme,
mi-tia ko oMao je t'aime, tia ko t~y je l'aime, etc.

LES PRONOMS RELATIFS.

Parler de Maurice. 'Le créole ne connalt que le pro-


nom qui, et cet unique pronom suffit à traduire toutes les
formes françaises « qui, que, dont, auquel tant au pluriel
qu'au singulier, au féminin qu'au masculin. < Ex. éne dou-
moMM<!6 qui Mo/Me quelqu'un qui mange, préte <t ~K'.MH<
qui vous &tsotM~ empruntez-lui l'argent dont vous avez be-
soin qui vous aprés fd<M que cherchez-vons?
Malgache. «Beaucoup de pronoms relatifs (qui, que,
dont, à qui, par qui) se sous-entendent, quand le sens de la
phrase n'a pas à en souffrir et que le contexte permet que
cela se fasse sans qu'il en résulte d'équivoque. Quand ou
veut donner un sens plus clair, exempt'de toute ambiguïté,
on emploie le pronom relatif <xay (').

LA RELATION DITE DU GÉNITIF.

Cette relation s'exprime dans les deux idiomes: f en pré-


posant le nom possédé an nom possesseur 2° en affectant le
nom possédé du pronom de la troisième personne.
Parler mauricien. –Ex. lacase /erot la maison du roi, so
Ma~ cardinal roM~e le mâle du cardinal est ronge, so ptttt
~M Axor l'enfant de papa Azor.
Malgache. Ex. < teny M&a~a ko les paroles de mon
ami, c<~OHt 0/otM la vie de l'homme, trano ny ny M~a~sa ko
la maison de mon ami, o'not'an~ ny ~o~a~a le nom de l'en-
fant, rarny o<ona la race des hommes.
t
LE VERBE.
Il y a, en malgache, deux conjugaisons f ceUe dn verbe
nn ou passif; 2*celle du verbe muni de prénxes.
Conjugaisondu verbe nu on passif.
On a va plus haut que, dans sa forme première, le verbe
est une sorte de participe passé M conjuguant à l'aide des
pronoms personnels de la seconde série. Ex. tM &o aimé do
moi, par moi, j'aime; tia nao aimé de toi, par toi, tu aimes;
tia &o t~ aimé de moi lui, jel'aime; vono ko M</ tué de moi
lui, je le tue; MKan-o M~ soit poursuivi lui, poursuivez-le!1
Le passé et le futur sont formés analytiquement et grossiè-
rement par la préposition de deux particules Ko <ta ko t.H/
anciennement aimé de moi lui, je l'ai aimé; ho eotto ko My
pour tué de moi lui, je le tuerai.
En réalité, le verbe nu ou passif no se distingue point du

C) Mm-re-de-MMia.M MS, M4.


qui
nom; c'est pourquoi, il se conjugue à l'aide des pronoms
tiennent lieu d'adjectifs possessifs tratto ko maison de moi,
tia ko amonr de moi; lia ko aimé de moi, j'aime.
Tel a été primitivement le verbe dans tontes les langues de
la famille maléo-potynésienne. < Mais, ainsi que le dit M. Fried.
Muller, il s'est produit dans la branche malaise à laquelle
appartientle malgache, un effort énergique vers la distinction
phonétiquedu verbe et du nom. Tandis que, dans les langues
polynésiennes et dans la plupart des langues mélanésiennes,
le nom, abstraction faite des particules qui servent à déter-
miner la ptace occupée dans la phrase par chacune des parties
du discours, ne se distingue point phonétiquement du verbe,
puisque le plus souvent un seul et même thème s'emploie,
tantôt comme nom et tantôt comme verbe sans éprouver au-
dans les langues
cune variation phonétique, nous trouvons
malaises un effort manifeste pour distinguer phonétiquement
le nom d'avec le verbe avant que l'un et t'autre soient enga-
gés dans des relations syntaxiques ('). C'est au moyen
d'amxes et notamment de préfixes, que s'opère la distinction.
Ainsi, par exemple, de tia amour, aimé, aimer o, le malga-
che forme les noms Aa-fM, ~-Ca amour o et tes verbes mi-
<M, MM)t-A<t-«a <' aimer de deha marche, pas, passé,
mjMK-<~M marcheur,
passer les noms fan-deha marche,
et le verbe NMM-deha marcher.
Il. Conjugaison du verbe muni de préfixes.
Le thème verbal, invariable à toutes les personnes, se
conjugue i° au présent, à l'aide du préBxe de l'infinitif et
mt.<M
des pronoms de la première série MK-~a aimer, M/M
l'aide de la particule no
ou mi-tia aho j'aime; 2° au passé, à
fondue avec le préfixe de l'infinitif; n-Mt pour no-mi-tia;
3-' au futur, à l'aide do la
particule ho fondue avec le préfixe
de l'infinitif M-tM pour ho-nii-tia.

(t) fttet. MOttet, t. n, p. MB.


a) Conjugaison du verbe mt-«a, d'après Chapelier.
Présent.
Sing. t. Mho!Ht.<M. Pl. 1. ~M</Mtt-«a.
2. anao mi-tia. 2. aMfMMt-tM.
3. WMt-<M. 3. f€OMt!-<M.

Passé.
Sing. i. ;Mtho!M-tMt. PI. 1 ~aha!/<K-<M.
2. <MMOMt-<M. 2. att<!)'<'OKt-
3. t'i Mt.fM. 3. reo Mt-tM.
Futur.
Sing. t. ho-tia.
zaho P!. t. M~yho-<M.
2. anao lto-tia. 2. aM<!t-<'oAo-tta.
3. W~o-tM. 3. reo ho-tia.

Chapelierforme le futur irrégulièrement, car ho-<M appar-


tient à la conjugaison du verbe nu ainsi qu'à celle dn verbe
passif proprement dit ho tia ho j'aimerai, ho sahiranina
aho je serai tourmenté. Je relève, dans sa grammaire, les for-
mes qui suivent man-deffou sagayer, zaho ho-de~bM je sa-
gaierai maha pouvoir, zaho ho maha je pourrai; mampi-
pOM~o renvoyer, zaho Iw tnamp~ou~o je renverrai.

b) Conjugaisondu verbe man-diM piler, d'après M. Marre-


de Marin.
Présent.
mait-disa (izika.
M!tA«.
Sing. 1. m~K-~aaho.
man-disa aho. Pl.
Pt. t,
I. NMK-<KM<~

2. man-dMa hianao. 2. man-disa hMKtafeo.


3. maM-dtMt. 3. wan-~tMM'eo.
Passé.

mg..1. naK-~tttho.
Sing.l.
sing. nan- W1 aho.
%an-dîsi a 10. t.
Pl. 1.
PL nan-
(tZtA<t.
fxahay.
~a~.
nan-disa hianao. 2. <M)t-<fM<! hianareo.

c
2.
3. !MH-~t!t' 3. fMHt-dtMtM-eO.

Futur.
han-disa aho.
Sing. 1. han-dMacAo. t.
PI. 1.
~}~a&o,
(tZt&O. `

2. h<t-<aM<:KOO. 2. han-dMahtattoreo.
3. ~aH-dMNt~. 3. A<Ht-<MMttMO.
c) Conjugaison du verbe haro mêler, d'après M. Fried. Mutter.
Présent nMM~-Aaro aho on MaAo mang-haro.
Passé nang-haro aho on HMho nang-haro.
Futur hang-haro aho ou Ma~o Aatt~-ha)~.
La conjugaison du verbe mauricien procède de la conju-
gaison dn verbe nn ou passif; mais, le créole, influencé par
la syntaxe française, a retenu de la conjugaison du verbe
muni de préfixes, la faculté de préposer les pronoms person-
nels. Soit le verbe MON~ manger.
présent.
Sing. 1. moMMMM< pi. i. nous manzé.
2. <0 manzé. 2. vous mangd.
3. HtMNK~. 3. MMtCNMtMd.
Malgache tia ko, ~a<Mto, <M ny ou tia Ha~, <ta fMfeo,
tia MO.
C'est précisément parce que mo manzé équivaut à s mangé
de moi que le pronom régi revêt la forme subjective moi,
toi au lieu de la forme objective MO, to. ~o matt~ toi mange
par moi toi. L'analogie avec le malgache tia ko anao < aimé
par moi toi x est frappante.
Passé.
Sing. 1. mo~tTMMe. Pl. 1. ttomM~M)~.
2. to té manzé. 2. ootM té <na)H!
3. té manzé.
<f 3. zaute té t)MH~.
Malgache <M !M &o, no <ta nao, etc.
La particuie té (été) n'est qu'un simple indice temporal
remplissant la même fonction que no malgache.
Futur.
Sing i. ttM~CtHMttt~. MMpOtM'maHM.
2. to va m~Me. to pour mmtse.
3. H va MMH~, etc. li pour nMWse.
Malgache ~to tia Ao, ho <M nao, etc.

La forme mo pour nMM~, issue du provincialisme e je suis


pour e, a été créée avec d'autant ptus de facilité qu'en
malgache « la particule ho marque le but, le souhait, et
que souvent elle joue le rOte de la préposition française
pour (').
LES AUTRES TEMPS.

Le créole possède un passé absolu formé par la préposition


au thème verbal de fine nnn), et un plus-que-parfait formé
par la préposition des deux particules, té et fine. Ex. mo fine
wattzdj'ai mangé, j'ai fini de manger; mo té ~?M fnanzé j'a-
vais mangé, j'eus mangé; M)o ~M /nM j'ai fini.
Le créole possède, en outre 1° un passé récent mo /<9tM
maM~ je ne fais que de manger, je viens de manger; 2° un
futur antérieur formé par la préposition de va et de fine.
Ex. MM va ~<te m<Mt~ j'aurai mangé.
Malgache. Efa est un participe-racine qui signifie
« Nni o. Ce mot est très usité. Il seli à former le ptus-que-
parfait efa ttt-ant&nM alina j'avais fini de veitter. jE/
suivi de ho ou de h désigne un futur très prochain efa ho
roso My il est sur le point de partir.
L'emploi de /!)t6 comme indice temporal a été suggéré
aux nègres par ta souvenir du malgache efa.
(') MMfo.de Marin, M tM, t?0.
t-.AMM
LE VERBE NÉGATIF.

Dans les deux idiomes, le verbe négatif est formé par la


préposition d'un adverbede négation au thème verbal Mopos
(il n'y a pas) en créole, tsy en malgache.
Créote. Ex.: mo M~M <:<MM'je ne connais pas li Haji)<M
MMftt ils ne
va causé il ne parlera pas, ~M(e napas pour
sortiront pas.
Malgache. Ex. tsy M«t ko je ne vois pas, z~o tsy me<y
je ne veux pas.

LE VERBE PASSIF.

M. Fried. Muller a mis en relief l'une des particularités du


malgache en disant: < Die passive Construction ist in den ma-
layischen Sprachen sehr beliebt, und wird selbst in FaUen
verwendet wo sie nachunsererAunassungbeinahennmoguch
erscheint('). e
Non seulement l'emploi du verbe nu, qui est en réalité un
verbe passif, s'est conservé à côté do celui des verbes munis
de préfixes, mais encore il existe, dans cette langue, une con-
-jugaison passive proprement dite, laquelle a pour thème le
participe passé. Ex.: sahiranina aho je suis tourmenté; no
sahiranina aho j'ai été tourmenté; ho sahiraninaaho je serai
tourmenté.
Créole mauricien. Le verbe e être n'existant pas. il
semblerait que le passif dût être inconnu au créole. tt n'en
vrai,
est rien cependant. L'emploi du passif est fort rare, il est
rétablit la
et, dans la très grande majorité des cas, le créole
tournure active. Ex.: je suis aimé de mon fils Mo garçon
passive
content moi. Mais, il est des cas où la construction

(~) Grot.MM <t<r ~M<hM'Me)K'/<,t. H. p. tM.


est manifeste. Ex. vous n'êtes pas assez couvert, étendez sur
vous cette couverture, vous napai assez couvert, to~e tapis
la <<t&OM< vous. De même qu'on disait MM malade pour <' je
suis malade e, on dit ici vous couvert pour a vous êtes cou-
vert x. Or nao couvert veut dire à l'actif je couvre au pas-
sif, « je suis couvert e.11 est un cas où la phonétique vient

fournir un étémeut à ta clarté. La plupart des verbes termi-


nés en font de cet d un e muet quand la prononciation les
?
lie au complément qui suit ainsi, MM~d tu manges, mais
<o manze posson tu manges du poisson; de même, mo tombé
je tombe, mais mo tombe dans di/eau je tombe dans l'eau; Ii
t~<e il met, li méte souliers il met des souliers. Ce change-
ment de t'~ fermé en e muet n'a pas lieu quand ces verbes
sont employés au sens passif. Ainsi, mo lé manze av <smf:;tt
j'ai mangé avec la main, mais text <a<MMtte mo disang té
manzé av ptK~jse toute la nuit mon sang a été mangé par les
punaises; l'é fermé conservé en dépit du complément qui suit
montre que le verbe est un passif (').

LE VERBE SUBSTANTIF.

Le malgache possède un verbe substantifimpersonnel aB!r-


matif misy il y a n et un verbe substantif impersonnel
négatif isi <M~ (tsy a~) il n'y pas o. Ex. misy oMst il y
en a peu, misy <Mtd)'OM <M<'a il fait gmnd jour, mxt-a /o/)(!-
zavana dia nisy M!/ /o/tcxat)OMa que la lumière soit et la
lumière fut; alahady tsy M'i/ <M(<roj/ anay uy /te''t<Mtt~'o il
n'y a pas deux dimanches dans la semaine.
De même, le créole mauricien possède deux verbes imper-
sonnels 1° ~Kt ou~Ht et aussi ;/<tcM<! « il y a 2° <M;)~)M
(napas ~o) il n'y a pas o. )!x. ~c'no ene &oH[<c it y a un
Dieu, té ~M ~tM rois il y avait une fois pottf <~M laplie aMt')'
ou pour gagne ~)Ke «soH' il y aura de la ptuie cc soir.
(') Bet~M, p. au at Mttt..
Ni le créoie ni le malgache ne possède de verbe substantif
proprement dit, aussi la copule est-elle toujours sous-entenduè
dans les deux idiomes.
Parier de Maurice. –Ex. mo malade jesuismaiade,acotMe
triste.
to p<tS oM parce que tu es plus vieux, li ~a~Wn il est
Malgache. Ex. &e~f aho je snis petit, MMra~ aho jo
suis malade, tOM zaka seb est juste.

L'AUXILIAIRE AVOIR.

Le malgache possède un verbe mahazo < avoir, posséder,


obtenir, jouir, pouvoir dont le primitif azo a eu, obtenu,
gagné, pu employé comme auxiliaire, c'est-à-dire placé
devant un autre verbe, signifie e pouvoir «.Ex.: t~/M azo
avoaka izy ou azo AacoaAa izy on ne pourra pas le faire
sortir; tsy azo aHdW<MO on ne peut pas dormir.
Parler de Maurice. Le verbe avoir qui lui a fourni
l'impersonnel <~M ou jéna (il y en a), n'est jamais employé
comme auxiliaire.

P.-S. Le premier fascicule du tome XVI de la Revue de


Linguistique, paru hier 15 février, renferme une version du
Conte du Chat &o<~ en patois créole de l'He de la RéNnion. J'y
relève, à la hâte, quelques particularités phonétiques plus
complètement matgaches que celles de même nature qui ca-
ractérisent le parler mauricien.
M. J. V. fait remarquer e que le tangage créole de l'tte de
la Réunion, formé dans la bouche des anciens esclaves mal-
et
gaches (service domestique des cases) cafres (service cul-
tural extérieur), est caractérisé par l'accentuation généraie des
pénultièmes et par l'harmonisation des voyelles suivantes
MtaftM, font bolo,
avec a voyelle accentuée. BcMe, chattr,
patto, Mf' avec o, a, e finales sourdes f. Dans sa Grammaire
ma~ac/ff, M. Marre-de Marin décrit le même phénomène, en
tonique. Cet ac-
ces termes o § 24. Chaque mot a son accent
cent porte presque toujourssur la voyelle faisant partie de la
pénultième syllabe, et donne à cette voyelle une prononcia-
tion un peu plus forte qu'aux autres. § 21. Si les sy llabes

muettes suivent une syllabe accentuée, leur voyelle perd sa


valeur propre et se prononce comme un écho de celle qui
porte l'accent dans la syllabe précédente. Ex. !'?« a fade
syllabe finale
se prononce presque !-<M;o. § 22. Dans tonte
suivant immédiatement une syllabe accentuée, la voyelle a
un son presque imperceptible qui peut être changé en celui
d'une autre voyelle, et très souvent elle n'est qu'un écho de
celle de la syllabe précédente. s'
Le créole de la Réunion empêcherégulièrement la rencontre
des consonnes par l'intercalation d'une voyelle très-brève.
Ex. boulanc blanc, pt~ plus, bilé blé, pt<<tH)e plaine, sou-
Ms< soldat, f<MKptMm<!)!< compliment, liguilise église, ptMn
plein, tourouas trois, ~Mn~HM partage, férémé fermer, ça-
~Mu'w chagrin, garand grand, gouros gros, /n'ere frère,
quérévé crever, fou)'ouce trouver, garidien gardien, tnenct
merci, lissicalié eMatier, .sMs~oH'a histoire, etc.
Dans un grand nombre de mots, la voyelle o (au) a été
remplacée par la voyelle ot<. Ex. bounhoumou bonhomme,
dormir,
coumou comme, doune donne, moun mon, dourimi
boucoup beaucoup, souriti sortir, courent content, doumis-
liqui domestique, poM:'OMHtettd promener, -souK joli, souricié
sorcier, etc.
POST-SCRIPTUM

Pendant l'impression de cet essai, j'ai découvert que la


question des patois créoles a été abordée successivement par
MM. Bertrand-Bocandé,P. Meyer, D' Bos, B. Tesa, Ad. Coelho,
Hugo Schuchardt.

Dans une Note sur la Guinde portugaise ou ~~<!M&te


méridionale('), M. Bertrand-Bocandéconsidère le créole por-
tugais comme étant une « altération de la langue portugaise t,
et voici comment il explique la formation de ce dialecte: « On
conçoit que des hommes accoutumes à se servir d'un idiome
aussi simple (') ne purent facilement élever leur intelligence
au génie d'une langue européenne. Quand ils furent en con-
tact avec les Portugais et forcés de s'entendre avec eux, en
parlant une même langue, il a fallu que l'expression variée
des idées acquises pendant tant de siècles de civilisation se
déponiltat de sa perfection pour s'adapter aux idées naissan-
tes et aux /b)'MtM barbares du langage des nations à demi
MtM~M. Le mot adopté dut conserver toujours le même son,
et perdre ces désinences variées qui servent à distinguer les
nombres, les genres, les pronoms, les temps ou les modes;i

0 j6Btt«ht<h !« SoeMM<!<t~<9<Me <!e Pt'-t', tM9.proearerte terne XM de


M Q'Mt 9.t cet Mtome <t simple ? N'~y~tt pn me
BtttMt" <!<fa SMMMa< ~foj!)-<tj)M<,J'tt dt me eoatmter d'an extratt de t* note
d~ M. BB. tmerë par M. OoeUio dtM mm m~motre pttbIM, 9)t tMe.dMt te ~f?-
t«!x de ta SoeMMd< ~o~<vMe<!<MttoMM.
il M soumisseulement aux transformationsabsolument indis-
pensables an discours, pour qu'il ne devint pas uniquement
des sons insigniuants. H se fit même un retranchemcnt gra-
duel de toutes ces modifications qui servent à exprimer tes
diverses nuances de la pensée, et quand il ne fut plus possi-
ble de rien retrancher pour conserver le discours encore in-
telligible, l'idiome fut fixé dans sa graMMOffe~Mtt<cM<t~e
devenue aussi ~tn~ que peuvent le permettre les règles de
la grammaire générale de toute langue. U exista alors ce que
l'on appelle la langue créole portugaise, e
Si M. Bertrand-Bocandéavait comparé méthodiquement la
grammaire particulière du créole portugais à celle de quel-
qu'une des langues partees par tes nègres de la Guinée, il se fût
convaincu que l'adaptation du portugais aux formes barbares
du langage des nations à demi sauvagess'est faite par la substi-
tution de la grammaire guineeUne à la grammaire portugaise,
et non par un retranchementgraduel des désinences variées
servant à distinguerles nombres, les genres, etc.

11

Après avoir comparé le créole de la Trinidad à celui de


Maurice, M. P. Meyer (') estime que la formation de ces deux
dialectes présente des analogies avec la formation des langnes
romanes. Mais, ajoute-t-il, < os uegros, quando aprenderam
o francez, estavam habitnados a uma Kn~!M absoliftamente
<H~reK<e e nunca souberam mais que as palavras e as formas
mais usuaes de seu novo idioma, emquanto o latim vulgar
de que sairam por desenvolvimentos individuaes e locaes as
tingnas romanicas, foi sempre um idioma sufficientemente
completo, cujas transformacôes foram assàs lentas para que
as lacunas tenham tido tempo de se encher facilmenteao pa~o
0 JhttM er«tt~, MM. Je ne mamhOoetho.
de t'~MMe publié par M. P. Meyer
que t'extmtt donné en portugais par M.
que se formaram C'est la contexture des divers temps com-
P. Meyer la
posés du dialecte mauricien qui a suggéré à M.
celle des lan.
pensée de rapprocher la formation du créole de
le constate M. Coelho, l'é-
gues romanes. Cependant, ainsi que
minent philologue n'admet pas que la formation des dialec-
lois parfaite-
tes de la Trinidad et de Maurice ait obéi à des
ilha de Franca
ment identiques « Parece que o patois da
da Tri-
onerece, na deformaçao de francez, analogias con o
nidad que nâo eâo explicadas sumeientemente pela communi-
dade do ponto de partida. »
s'expli-
Les analogies auxquelles M. P. Meyer fait allusion
quent aisément par la parité du degré de développement au-
quel sont parvenues les langues de la Guinée et les langues
malaises. M. Gustav Oppert (') donne pour les unes et les
heterologons, agglu-
autres la même formule G B'Y (concrete,
tinative). Mais, il y a aussi, entre les deux dialectes, des
divergences notables, lesquelles sont dues à la diSërence des
langues antérieurement parlées par les esclavesnègres impor-
Meyer a
tés dans les deux colonies. Malheureusement, M. P.
absolu-
omis de rapprocher des patois créoles ces langues
ment différentes du français.

lu
Suivant M. le D' Bos ('), Os diverses creolosfrancezes que
ilhas Mascarenhas,
se fatlam nas Antilhas, na America, nas
de familia, uma
no Oeeano Indico, teem todos am ar
Mmilhança ainda mais accentuada que a que existe entre as
tingnas neo-tatinas, e devida provavelmente à sua maior mo-
cidade e à sua maior proximidade da lingua mae ».
La vérité est que tous les patois créoles français ont un

(')Ottit<)ct<;Mt<t«'<o/tttttetMtjtM.MttdM!),lM~.
0 Bom<.)t.<t, tX. Je ne Mtm~to do l'article de M. le Dr Bet qae les extraits
donné. en pot~ieet'par M. Oee!ite.
vocabulaire commun, mais qu'au point du vue grammatical J
et phonétique, tes dialectes de l'Océan Indien (Réunion, Mau-
'j-
rice) diffèrent sensiblement de ceux de l'Amérique (Guyane,
Trinidad, Guadeloupe,Martinique). M. le D'Bos a négligé, lui
aussi, de comparer les patois créoles aux langues de la côte
de Guinée et de Madagascar.

IV

M. TeM, auteur d'une étude sur le créole de Curaçao ('),


incline à expliquer la formation des dialectes créoles par
e uma accomodacâo das formas
romanicas à eRAMMATicAdas
dinguas dos povos entre os ~xaes esses dialectos se /bf!tM<K
Mais, au lien de s'adresser à la grammaire des langues afri-
caines pariées antérieurement par les nègres transportes à
Curaçao, le professeur itatie& vise la langue des aborigènes,
sans faire d'ailleurs aucun rapprochement grammatical entre
le créole négro-espaguol et le galibi ou t'arronague. tt dit en
effet: foi sarebbe utile a conoscere quate dialecto vi
parlassero gli aborigeni. Certo da questo breve studio sul
Cnrassese saremo condotti a ristringere la opinione di Au-
gusto Fuchs che to spagnuoto, dominatore in tanta parte di
America, non si mescoto a nessuna detie lingue indigene da
formare mno nnovodiatetto.(Cfr. Die fOMaHMcfMKSpracheK.
Hatte, t849, p. 7.) Non s'è mescoiato ma il pensiero nazio-
nale trascinô dietro a sè le forme spagnuole e gli avanzi;
cosi che ne dérivé una favella che non assomiglia certo a
uscirebbe
nessuno dei dialetti metapireneici. À me pare che
un bel libro, ma da non farsi in Europa, chi si ponesse a
ricercare come le lingue latine rimutassero il francese ne!
Canada, in tt-uti; il portoghese net Bmsitc(') c iungo lecoste

(') FoiMtMttM,vol. XX[. Lœ ctt~ttom sout extraites du mtmutre de M. Ooelho


t
(~ A~emm MitdtMt brasileiros, conhacadorcsdos dt~<MtO<)ndi)!«nM, admit-
tem Mttemettt erMMMtte~ d'ette* dMMtm sobre 0 purtttgM!! de aeu p~t.
(Coelho, p. 190.)
dindia; a Cuba, a Portorico e via via to spagnnoto. Sarebbe
a ~McopWt'M la ~'aHttttattM tn~t~oM; e <te<!«)'Ke le leggi
dtMohd!oe di ~xcMa parola, là inerte o quasi che fa stro-
mento a forti pensiere e atte grazie dett'arte in boccaaDante,
a Cervantes, a Voltaire.

M. Ad. Coelho, auteur d'un important travail publié dans


le Boletim da Sociedade de Geo~ra~a Lisboa ('), a formulé
la thèse diamétratement opposée à ceUe que je maintiens, eu
ces deux propositions
« f Os dialectesromanicose creolos, indo-portugucz e todas
as formaçoes similhantes representam o primeiro ou pri-
meiros estadios na acqnisic&o de uma lingua estraageira por
um povo que fatta ou faUou outra.
a 2° Os dialectos romanico-creolos,
indo-portugues e todas
as formacôes similhantes devem a origem à açcâo de leis
psychotogicasou physiologicas por toda a parte as mesmas,
e nâo à itifluenciadas tingnas anteriores dos povos em que se
acham esses dialectos. D
Il va de soi que M. Coelho n'a pas même songé à vérifierle
mérite de ses affirmations par l'examen grammatical des
langues antérieurement parlées par les nègres qui, aux xvi*
et xvu* siècles, furent transportés dans les diverses colonies.

VI

M.Hugo Schuchardt (') a procédé autrement, et il lui a


suNi de comparer le négrq-portugais de San-Thomé à la
langue nbundu d'Angota, pour découvrir entre les deux

(') Ot dialectos fo<MtthM a ttM-MttM na Afrka, ~*<m <! ~tMr<ce.


(') &MtMe)t<Sitt~)).î. C~<fAM~<t<FOWt<t<<M*<S. MtM)t<(!fM-
tf/rtta). Wiea, !M<.
idiomes des concordances telles, qu'après avoir rappel la
seconde proposition de M. Coe)ho, il affirme la coopération
de causes particulières aux causes générales toujours iden-
tiques à elles-mêmes. « Ich glaube, ncben den attgemeinea
Ursachen, haben hier doch noch besondere nutgewirkt.
!t est vrai que M. Schuchardt se laisse aller à concéder que
ces concordances pourront ne point parattre essentielles
(nicht wssenttich). Mais s'il avait étendu le champ de la com-
paraison jusqu'aux diverses tangues de la Guinée supérieure,
je suis convaincu que ses conclusions eussent été aussi anir–
matives que les miennes, car, au point de vue grammatical,
le créole de San-Thomé constitue un dialecteafricain à classer
dans la famille des nordtoestlichen ~Ve~eMprsc/ten plutôt que
dans celle des langues bantu. On sait, d'ailleurs, que les nègres
de la Guinée inférieure ou Congo se rattachent ethnologique-
ment, non à la race cafre, mais cette de la Guinée supérieure,
encore bien que leurs idiomes fassent partie du groupe lin-
guistique bantu ('),
Quoi qu'il en soit, je demanderai à M. Coelho comment on
peut expliquer, en dehors de l'action exercée par les langues
nègres, les faits grammaticaux qui suivent
a) L'abolition de la catégorie du genre jusque dans les
pronoms de la 3* personne du singulier.
b) La formation du plurieldes noms par la préposition on la
postposition du pronom de la 3* personne du pluriel.
c) La postposition aux noms de l'article défini et des
démonstratifs.
d) L'expression de la relation dite du datif au moyen du
verbe a donner e devenu simple particule da à San-
Thomé &a ou baye (bailler) ù la Trinidad; gi (give) à Suri-
nam.
e) La formation du présent absolu à l'aide de la particule

(') Voir ~it~emtfte Btttto~fMevon Me.t. MMtor, p. MO.


<M, non seulement dans les colonies françaises, mais encore &
San-Thomé.
f) L'élimination de i'auxitiatre avoir D.
~) La préttxation d'une particule vocalique (o ou t) aux
pronoms personnels régis, dans les dialectesde San-Thoméet
du Cap-Vert, ainsi que dans le dialecte de la Snadetonpe, etc ?
L'antériorité à laquelle je croyais être en droit de prétendre
appartient iegitimement à M. le professeur Schuchardt, mais
jt) me console de cette tegere déconvenue, en voyant que tes
faits constatés par lui dans le negro-portugais, viennent à
l'appui de la thèse que j'ai soutenue isolément, en opérant
sur les dialectes négro-français.
Quand les progrès de la linguistique africaine auront per-
mis d'étendre lé champ des investigations, la vérité de cette
thèse s'empèsera aux linguistes qui n'ont pas songé à aUer
chercher la clé de la grammaire creote à ta côte d Afrique.
Nancy, le 16 mars 1883. <

Lucien ADAM/~
F ~)
\~i~3'

Naxoy, imp. Berger-Levrault et 0'

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