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ANALYSE :
poème en prose, comme l’intégralité du recueil. «rendre la prose poétique » est rendu possible
grâ ce à Baudelaire, dans la préface du «Spleen de Paris », dont le sous-titre est «petit poème
en Prose ». Il transforme la boue en or, car il part d’un objet d’une banalité affligeante, pour en
faire un magnifique poème ;
Agencé de façon qu'au terme de son usage il puisse être brisé sans effort, il ne sert pas deux
fois. Ainsi dure-t-il moins encore que les denrées fondantes ou nuageuses qu'il enferme.
A tous les coins de rues qui aboutissent aux halles, il luit alors de l'éclat sans vanité du bois
blanc. Tout neuf encore, et légèrement ahuri d'être dans une pose maladroite à la voirie jeté
sans retour, cet objet est en somme des plus sympathiques - sur le sort duquel il convient
toutefois de ne s'appesantir longuement.
Né à la fin du 20è siècle, Francis Ponge est un écrivain et poète français. Il fréquentait le
groupe surréaliste, sans adhérer pleinement à ce mouvement. C’est en 1942, qu’il publie le
recueil «Le parti pris des choses», dans lequel il propose une nouvelle vision des objets du
quotidien. Dans ce poème en prose, l’auteur décide de s’intéresser au cageot, et d’en faire une
description poétique.
Tout d’abord, ce poème traitant le sujet d’un simple cageot, parvient à lui donner de
l’importance en le sublimant. En effet, le cageot est un objet auquel les Hommes sont habitués
et auquel ils ne prêtent plus d’attention, cependant l’auteur parvient à renouveler son image
auprès du lecteur. Francis Ponge semble organiser son poème en plusieurs étapes, tout
d’abord le premier paragraphe où il définit l’objet, puis le second où il traite d’avantage de sa
durée d’usage, et enfin le dernier dans lequel il mêle l’usage, l’utilisation, et les
caractéristiques du cageot.
Il présente alors cet objet dans une sorte de définition en utilisant un argument d’autorité, car
il a recours au dictionnaire «à mi-chemin de la cage au cachot, la langue française a cageot ».
Exprimé au présent de vérité général, cette information ne peut être contestée par le lecteur,
même s’il en convient d’en douter. L’auteur accumule donc les jeux de mots, comme
l’utilisation du mot valise, résultant de l’association de la cage et du cachot.
La présentation du cageot est marquée par un vocabulaire d’une banalité évidente, «simple
caissette», auquel il ajoute le suffixe «ette» pour minimiser l’importance de l’objet.
Le rô le du cageot est donc de transporter des fruits qui eux mêmes sont évoquées avec des
termes dépréciatifs : «suffocation, maladie». Le détail de sa composition «bois blanc»,
démontre la basse qualité de son matériau. Toutes les mises en apposition ont donc pour rô le
d’insister sur les spécificités du cageot, en rendant cette définition poétique. Par ailleurs, le
poème peut s’apparenter à un calligramme avec ces 3 paragraphes qui se rapprochent de
l’image des bandes ajourées qui composent un cageot.
De plus, l’auteur use d’un ton sérieux, presque culpabilisant avec des paroles empathiques,
évoquant le destin inexorable du cageot «sans retour», «le sort». Tandis que le langage
soutenu, comme avec l’inversion du sujet «dure-t-il», ou la phrase «à la voirie jeté», témoigne
de la volonté de l’auteur à rendre son poème poétique, tout comme les assonances et
allitérations qui donnent une certaine musicalité au poème.
La description «à tous les coins de rues qui aboutissent aux halles», prouve pourtant
l’importance qu’ont les cageots, puisqu’ils sont indispensables à l’Homme, mais ils sont aussi
terriblement banal «sans vanité ». Ce qui est renforcé par les termes qui consistent à prouver
son utilité : « usage», «il sert» … Donc l’image de cet objet est réhabilité et évoque avec
insistance le destin misérable des cageots, «jeté sans retour». L’auteur semble terminer la
présentation du cageot, en en faisant un objet respectable englobant non pas des fruits
menant à une «maladie» , mais «des denrées fondantes et nuageuses», comme l’indique les
adjectifs mélioratifs.
Donc le cageot est certes, un objet banal du quotidien mais il est aussi très utile. Ponge
revendique donc son image dans ce poème qui nécessite un regard renouvelé.
2) humanisation de l’objet :
Par ailleurs Francis Ponge en profite pour faire de ce poème une comparaison implicite à
l’Homme qui est tout autant vulnérable que ce cageot. En effet, le sort du cageot se rapproche
sensiblement de celui des Hommes : « ne sert pas deux fois», «brisé sans efforts», ou bien « au
terme de son usage». L’Homme est à l’image du cageot, puisqu’il n’est en réalité que fragile et
sans importance, lui-même n’a qu’une seule vie, et ne peut défier son destin, puisque l’Homme
est un mortel. Ce banal cageot , qui finira entassé dans un coin de rue, est donc à notre image,
un objet devenant esseulé une fois utilisé. Le cageot est donc présenté avec des expressions
que l’on rattache à l’Humanité avec des personnifications : « légèrement ahuri d'être dans une
pose maladroite ». Il réhabilite donc l’objet en en faisant
Par ailleurs de nombreuses personnifications notamment avec le défaut humain « éclat sans
vanité» ou l’adjectif «vouée» laissent percevoir la volonté de donner vie à ce cageot de plus ,
Ponge nie la vanité avec la négation lexicale «sans». Des caractéristiques humaines lui sont
données, et s’étendent même dans le domaine des sentiments : «cet objet est en somme des
plus sympathiques». Par ailleurs l’évocation de la maladie est étonnante, puisque la maladie
propagée par les fruits concerne davantage le vivant que les objets, ainsi le cageot semble être
acteur du monde humain. Les différentes mises en apposition évoquent avec insistance le sort
à la fois du cageot mais aussi de l’Homme. Le registre devient, alors, tragique et évoque la
mort de l’objet qui demeure «sans retour».
Aussi, une autre réflexion émerge sur la condition des fruits qui sont eux-mêmes mal-traités,
notamment avec le champ lexical de l’enfermement «cage», «cachot», ou «suffocation». Ce qui
contraste avec le champ lexical de la lumière : «blanc», «éclat», «luit».
Enfin, le tiret marque un retournement de situation, où le poète conclu avec un air
provocateur, qu’il ne faut «s’appesantir longuement» sur son sort, ce qui semble plutô t
ironique puisque lui même décide de dédier un poème entier au cageot. Cette dernière phrase
placée sous le signe de l’humour, laisse donc percevoir la manière d’appréhender le poème.
Ainsi ce poème est l’occasion de laisser apparaître l’humanisation du cageot, tout en le
sublimant.
Conclusion :
Pour conclure, je dirai que Francis Ponge parvient à sublimer l’image d’un cageot, à travers la
poésie, tout en représentant l’objet vulnérable et fragile. En effet, il revendique l’image que
l’on se fait de cet objet à première vue insignifiant, pour faire apparaître une métaphore de la
vie. Ainsi FP parvient à sublimer la banalité dans un langage poétique.
QUESTIONS DE GRAMMAIRE :
Agencé de façon qu'au terme de son usage il puisse être brisé sans effort, il ne sert pas deux
fois.
É tudiez l’expression du but : «il puisse être brisé sans effort», Auteur supprimer le pour.
Remplacer la virgule par une conjonction de coordination : relation de causalité, ( donc, car..)
Ainsi dure-t-il moins encore que les denrées fondantes ou nuageuses qu'il enferme.
É tudier «que» : comparatif,
Il dure ainsi, encore moins que les denrées fondantes ou nuageuses qu’il enferme.
A tous les coins de rues qui aboutissent aux halles. Il luit alors de l’éclat sans vanité du bois
blanc.