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La poésie baudelairienne est toute entière tournée vers la fuite de ce monde

(out of this world) qui le plonge dans une mélancolie profonde et le poète se
sent oppressé par cette atmosphère épouvantable de la ville de Paris. Le
Mauvais vitrier représente cette recherche constante de la crise libératrice qui
va délivrer l’art et le poète de la consternante réalité et de son spleen.

En effet, la condamnation de “ Fleurs du mal”, laisse l’auteur amer et dégouté


par la société qui méprise sa création. Le poème en prose “Le mauvais vitrier”
évoque la présence de l’auteur dans la capitale sans but précis. Baudelaire
est fasciné par les individus (les habitants des quartiers pauvres de la
capitale) qui incarnent la solitude dans la multitude, ainsi que la laideur de la
vie quotidienne à Paris qui est accentuée par la laideur et la saleté de la ville.
Il parvient à son rêve esthétique par la rencontre de l'insolite et du quotidien,
sous la forme d'un récit qui illustre une réflexion sur la nature humaine : la
contemplation peut conduire à des actes de violence. Ici le poète s'emporte
contre le vitrier qui, sans carreaux de couleurs, ne sait pas transfigurer la
laideur du quotidien par son art.Cette seconde partie du récit débute par une
page de description de Paris. Il s’agit pour le poète d’une ville sale, triste et
sans beauté. Elle représente le spleen c’est-à-dire la morosité et la
mélancolie. Le poète y semble oppressé. La ville n’est pas synonyme de
beauté la, de la gaité. Elle représente l’aspect urbain et dépressif. Il utilise une
rythmique en mettant en place des assonances (les voyelles : lourde, sale) et
des allitérations (consonnes). Cela indique l’aspect réaliste de Paris.
Baudelaire fréquentait des milieux peu recommandables : lieux de prostitution,
bars pour l’absinthe et l’opium.

La rue est un lieu d’inspiration pour le poète (c’est en voyant un vitrier dans la
rue que lui est venu L'idée d'écrire ce poème). Il ne s’inspire pas de la nature,
de la beauté des fleurs pour écrire ses poèmes. Par ailleurs, il décrit un
environnement urbain. Il peint d’ailleurs un quartier populaire voire pauvre : «
j’aperçus dans la rue « la chambre au 6ème étage » (en référence aux
chambres de bonnes), « l’escalier fort étroit « je m’approchais du balcon b.
Ainsi, la chambre représente une prison pour lui car c’est un lieu clos, fermé à
double tours.

Voici la façon dont l’auteur révèle et montre l’état dans le lequel il se trouve :
un matin que le poète se lève, « fatigué d’oisiveté, et poussé, [lui] semblait-il,
à faire quelque chose de grand, une action d’éclat », le cri « discordant » d’un
vitrier parvient jusqu’à lui. « Il [lui] serait d’ailleurs impossible de dire pourquoi
[il] fut pris à l’égard de ce pauvre homme d’une haine aussi soudaine que
despotique ». Il lui crie de monter, se réjouit de le savoir dans l’escalier étroit
avec toute sa fragile marchandise sur le dos et d’avoir à escalader six étages.
Quand le vitrier paraît épuisé, le poète s’exclame : -Comment ? Vous n’avez
pas de verres de couleur ? des verres roses, rouge, bleu, des vitres
magiques, des vitres de paradis ? Impudent que vous êtes ! vous osez vous
promener dans les quartiers pauvres, et vous n’avez pas même de vitres qui
fassent voir la vie en beau ! » (5) Il le repousse avec excitation dans les
escaliers, et claque la porte ; puis il se dirige vers le balcon, prend un petit pot
de fleurs, et sitôt que le vitrier est en vue « laisse tomber perpendiculairement
[son] engin de guerre sur le rebord postérieur [des] crochets ». Tout se brise
en rendant admirablement « le bruit éclatant d’un palais de cristal crevé par la
foudre ». « Et, ivre de [sa] folie, ajoute le Poète, [il] lui cria furieusement : ‘La
vie en beau ! la vie en beau ! ‘ »

La présence du vitrier témoigne aussi de la pauvreté du quartier. Il s’agit d’un


artisan ambulant qui connaît une vie difficile. Il s’agit d’un homme usé qui doit
crier pour montrer son existence. II a une vie sans couleur comme ses vitres.

La dimension symbolique du récit Le mauvais vitrier est la figure de l’artiste


raté. Il s’agit d’un marchand intégré à la société. Il est caractérisé par son « cri
discordant » et sa production est signifiée par la banalité de la marchandise :
« Comment?

Vous n’avez pas de verres de couleurs? » Le poète narrateur l’incrimine alors


immédiatement : « vous osez vous promenez dans des quartiers pauvres, et
vous n’avez même pas de vitre qui fassent voir la vie en beau! » Le tort du
vitrier/artiste raté est donc de ne pouvoir offrir à la vie une vision transfigurée.
La couleur devient le symbole du pouvoir transfigurateur de l’art. La colère
irrationnelle du narrateur poète est personnifiée (« une haine aussi soudaine
que despotique ») comme pour mieux manifester son étrangeté, s’explique
dès lors : le mauvais vitrier est l'image de ce qu’il récuse, l’art conventionnel ,
traditionnel.
Le coup d’éclat (sans jeu de mot) auquel il se livre a d’ailleurs immédiatement
un pouvoir de transfiguration ce qu’explicite la métaphore : la « pauvre fortune
ambulatoire » (périphrase pour désigner les vitres réduites à leur fonction
nourricière pour le vitrier) devient métaphoriquement « un palais de cristal
crevé par la foudre » la destruction est métamorphosée en métaphoriquement
« un palais de cristal crevé par la foudre » la destruction est métamorphosée
en beauté par l’usage de la métaphore et des jeux de sonorités.

Au-delà du récit, il s’agit de comprendre la portée symbolique du texte. C’est


implicite car c’est au lecteur de décrypter et de comprendre que Baudelaire veut
souligner le désir que l'homme a de s’évader pour ne pas voir la réalité (Paris).
Solliciter le lecteur, le rendre plus actif est donc une conséquence du choix de la
fiction.

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