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EXTRAIT
ISSU DE L’OFFRE

Opérations unitaires. Génie de la réaction chimique

Échange d'ions - Principes de base

par François DE DARDEL

RÉSUMÉ

L'échange d'ions est un procédé dans lequel les ions d'une certaine charge contenus dans une solution sont éliminés de cette
solution par adsorption sur un matériau solide (l'échangeur d'ions), pour être remplacés par une quantité équivalente d'autres
ions de même charge émis par le solide. Cet article présente la structure des résines échangeuses d'ions, leurs propriétés et
les réactions chimiques qui gouvernent l'échange d'ions.

ABSTRACT

Ion exchange is a chemical process in which a solution containing ions with a given charge are removed from solution by
adsorption on a solid material (the ion exchanger) and replaced by other ions with the same charge initially present in the solid
ion exchanger. This paper presents the structure of ion exchange resins, their properties, and the chemical reactions involved
in the ion exchange process.

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Échange d’ions
Principes de base

par François DE DARDEL


Ancien Directeur technique chez Rohm and Haas à Paris, France

1. Structure des divers types d’échangeurs d’ions .......................... J 2 783v2 - 3


1.1 Squelettes .................................................................................................. — 3
1.2 Groupes fonctionnels ............................................................................... — 3
1.3 Résines adsorbantes................................................................................. — 7
1.4 Résines inertes .......................................................................................... — 7
2. Propriétés générales des résines ...................................................... — 7
2.1 Taux de réticulation et porosité du squelette ......................................... — 7
2.2 Capacité d’échange................................................................................... — 8
2.3 Stabilité et longévité ................................................................................. — 9
2.4 Masse volumique ...................................................................................... — 10
2.5 Granulométrie ........................................................................................... — 10
2.6 Rétention d’humidité ................................................................................ — 11
3. Réactions d’échange d’ions................................................................ — 12
3.1 Échange cationique................................................................................... — 12
3.2 Échange anionique ................................................................................... — 12
3.3 Diagramme récapitulatif ........................................................................... — 13
3.4 Équilibre de l’échange d’ions ................................................................... — 14
3.5 Cinétique d’échange ................................................................................. — 16
3.6 Résultats pratiques de l’équilibre et de la cinétique .............................. — 18
4. Conclusion............................................................................................... — 19
5. Glossaire .................................................................................................. — 20
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. J 2 783v2

’échange d’ions est un procédé chimique dans lequel les ions d’une cer-
L taine charge contenus dans une solution (par exemple des cations) sont
éliminés de cette solution par adsorption sur un matériau solide (l’échangeur
d’ions), pour être remplacés par une quantité équivalente d’autres ions de
même charge émis par le solide. Les ions de charge opposée ne sont pas
affectés. Cette technologie a été développée à l’échelle industrielle après la
seconde guerre mondiale, principalement dans les années 1950-1970.
Un échangeur d’ions est un sel, un acide ou une base, solide et insoluble
dans l’eau, mais hydraté, c’est-à-dire gonflé d’eau comme une éponge. La
teneur en eau d’un matériau apparemment sec peut être de plus de 50 % de sa
masse totale et les réactions d’échange se déroulent dans cette eau, dite eau
de gonflement ou d’hydratation, à l’intérieur de l’échangeur.
L’échange d’ions est à la base d’un grand nombre de procédés de l’industrie
ou de laboratoire, qui peuvent se classer en trois catégories principales : subs-
titution, séparation et élimination :
Substitution : un ion noble (par exemple le cuivre) est récupéré dans la solu-
tion et remplacé par un autre sans valeur. De façon analogue, un ion nocif (par
exemple un cyanure) est retiré de la solution et remplacé par un autre inoffensif.

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ÉCHANGE D’IONS ___________________________________________________________________________________________________________________

Séparation : une solution contenant un certain nombre d’ions différents (par


exemple Li+, Na+, K+, Rb+, Cs+, tous sous forme de chlorures) est passée au
travers d’une colonne de billes de résine. Les ions sont séparés et émergent
par ordre croissant d’affinité pour la résine.
Élimination : en utilisant une combinaison de résine échangeuse de cations
(sous forme H+) et de résine échangeuse d’anions (sous forme OH–), tous les
ions sont enlevés et remplacés par de l’eau (H+OH–). La solution est ainsi démi-
néralisée. Cela est en réalité une variante particulière de la substitution.
Bien que substitution et élimination puissent être réalisées en discontinu
sans agitation, le procédé en colonne compacte de séparation est le plus
souvent adopté pour les trois types d’applications, en raison de la meilleure
efficacité des deux phases du cycle d’échange, à savoir la fixation et l’élution.
L’échange d’ions est une technologie particulièrement adaptée au traitement
de solutions de faible concentration, la plupart du temps inférieure à 1 g/L. Il y
a toutefois des exceptions.
Cet article présente les principes chimiques régissant la fabrication des
résines échangeuses d’ions, leurs propriétés physico-chimiques et les réac-
tions d’échanges les plus couramment utilisées.
L’article suivant [J 2 784] présente les technologies d’application et la mise
en œuvre industrielle des échanges d’ions.

Encadré 1 – Aperçu historique

Précurseurs Aujourd’hui encore, l’échange d’ions est le seul procédé


capable de produire la qualité d’eau requise pour les chaudières
La découverte de l’échange d’ions date du milieu du XIXe à haute pression et pour la fabrication des semi-conducteurs.
siècle : Thompson [1] et Way [2] remarquèrent que du sulfate
d’ammonium, après percolation à travers un tube rempli de
terre, se transformait en sulfate de calcium. Troisième génération : résines macroporeuses
En 1905, Gans [3] adoucit de l’eau pour la première fois en la Pour faire face à deux problèmes d’exploitation, l’empoison-
faisant passer sur un aluminosilicate de sodium. Celui-ci pou- nement des résines par les acides organiques naturels présents
vait être régénéré avec une solution de chlorure de sodium. En dans les eaux de surface et les contraintes mécaniques prove-
1935, Liebknecht [4] et Smit [5] découvrirent que certains char- nant des débits de plus en plus élevés des installations, trois
bons pouvaient être sulfonés pour donner un échangeur de producteurs indépendants (suite [10] [11] inventèrent des rési-
cations chimiquement et mécaniquement stable. Par ailleurs, nes plus fortement réticulées mais contenant des pores artifi-
Adams et Holmes [6] inventèrent les premiers échangeurs de ciels ouverts, sortes de canaux d’un diamètre allant jusqu’à
cations et d’anions synthétiques, produits de la polycondensa- 150 nm, qui permettaient l’adsorption de molécules de grande
tion du phénol avec du formaldéhyde d’une part, avec une poly- taille. Par convention, on appelle résines macroporeuses celles
amine d’autre part. La déminéralisation devenait alors possible. où le polymère est gonflé artificiellement par addition d’une
Aujourd’hui, les silicoaluminates et les résines formophénoli- substance dite porogène, qui est soluble dans le monomère
ques sont réservés à des cas particuliers et le charbon sulfoné a mais ne polymérise pas (§ 2.1.4). Les autres résines sont dites
été remplacé par le polystyrène sulfoné. de type gel.

Quatrième génération : échangeurs d’anions polyacryliques


Deuxième génération : résines polystyréniques
Entre 1970 et 1972, un nouveau type de résines échangeuses
C’est en 1944 que d’Alelio inventa la première résine à base d’anions à squelette polyacrylique apparut sur le marché. Ces
de polystyrène [7], fabriquée selon le procédé décrit dans le produits ont une résistance exceptionnelle à l’empoisonnement
paragraphe 1. Deux ans plus tard, Mc Burney [8] produisait les organique et une très bonne stabilité mécanique due à l’élasti-
échangeurs d’anions correspondants, par chlorométhylation et cité du polymère et leur utilisation va en augmentant.
amination du même type de squelette.
Les échangeurs d’anions connus jusqu’alors étaient faible- Nouveaux développements
ment basiques et ne fixaient que les acides minéraux. Les nou-
velles résines produites selon le procédé de Mc Burney, de plus La technologie de fabrication des résines a atteint une cer-
forte basicité, permirent l’adsorption des acides faibles tels que taine maturité ; l’effort des fabricants porte aujourd’hui davan-
le dioxyde de carbone ou la silice. On pouvait maintenant démi- tage sur la stabilité des résines et sur l’uniformité de leur
néraliser totalement l’eau et produire une pureté que l’on n’obte- distribution granulométrique (§ 2.5) que sur la recherche de
nait précédemment que par distillation multiple dans du platine. nouveaux polymères ou de groupes fonctionnels inédits.

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___________________________________________________________________________________________________________________ ÉCHANGE D’IONS

1. Structure des divers types


d’échangeurs d’ions CH2 CH2
CH CH
Les différents types de squelette puis les groupes fonctionnels
sont examinés. Styrène Divinylbenzène
(S) (DVB)
CH
CH2
1.1 Squelettes

1.1.1 Squelette polystyrénique S S DVB

La polymérisation du styrène (ou vinylbenzène), sous l’influence


d’un catalyseur d’activation, le plus souvent un peroxyde organi-
que, produit un polystyrène linéaire, matière plastique malléable,
transparente, soluble dans certains solvants, avec une température
de ramollissement définie. Si une certaine proportion de divinyl-
benzène (DVB) est mélangée au styrène, le polymère se réticule et
devient alors totalement insoluble (figure 1).
S S S Polystyrène réticulé
Dans la fabrication des résines échangeuses d’ions, la polyméri-
sation se fait généralement en suspension. Des gouttelettes d’oli-
gomère se forment dans ce milieu et croissent jusqu’à devenir des
billes dures et sphériques de polymère. Figure 1 – Polymérisation du styrène et réticulation
par le divinylbenzène

1.1.2 Squelette polyacrylique


En polymérisant un acrylate, un méthacrylate ou de l’acryloni-
CH2 CH2 CH2 CH2
trile que l’on peut réticuler avec du divinylbenzène (comme le sty-
rène), on obtient par exemple le squelette de la figure 2. CH CH CH CH
H CH2
C + COOCH3 COOCH3
1.1.3 Autres types de squelettes COOCH3
CH CH
Les autres types sont moins courants, mais il faut citer : CH2
Acrylate CH2
– les résines formophénoliques mentionnées dans l’historique ; de méthyle DVB Polyacrylate
de méthyle réticulé
– les résines polyalkylamines obtenues à partir de polyamines
(par exemple la diéthylènetriamine) par condensation avec de
l’épichlorhydrine.
Figure 2 – Exemple de squelette polyacrylique
Dans ce dernier cas, on obtient directement un échangeur
d’anions en une seule étape.

CH2 CH2
CH CH CH
1.2 Groupes fonctionnels H2SO4
Polystyrène
réticulé
1.2.1 Échangeurs de cations sulfoniques (cf. figure 1) SO3H SO3H SO3H
CH2 CH2 CH
ou carboxyliques fortement acides
CH CH CH2 CH
Les billes chimiquement inertes de polystyrène sont traitées par
de l’acide sulfurique ou sulfochlorique concentré.
SO3H SO3H SO3H

On obtient alors un sulfonate de polystyrène réticulé


(figure 3). Ce produit est la résine échangeuse de cations la Figure 3 – Structure de sulfonate de polystyrène réticulé
plus courante.

1.2.2 Échangeurs de cations faiblement acides


Exemples Ceux-ci sont pratiquement toujours obtenus à partir d’un sque-
Amberlite IR120, Dowex Marathon C, Duolite C20, Lewatit S100, lette polyacrylique que l’on hydrolyse. On peut partir de
etc. polyacrylate de méthyle ou de polyacrylonitrile (figure 4).

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ÉCHANGE D’IONS ___________________________________________________________________________________________________________________

H CH2 CH2 CH2 CH2


C CH CH CH
[H2SO4]
CN CN CN CN
Acrylonitrile
CH2 CH2
CH CH CH

COOH COOH COOH

[NaOH]
H CH2 CH2 CH2 CH2
C CH CH CH

COOCH3 COOCH3 COOCH3 COOCH3


Acrylate
de méthyle

Pour simplification, le divinylbenzène n’est pas représenté.

Figure 4 – Préparation d’un échangeur de cations carboxylique

Exemples sable. Celles de type 2, de basicité légèrement plus faible, sont


Amberlite IRC86, Dowex MAC3, Lewatit CNP80, Relite CC, etc. toutefois assez basiques pour éliminer tous les anions et se régé-
nèrent plus facilement à la soude caustique ; elles donnent donc
une capacité d’échange élevée avec un meilleur rendement de
1.2.3 Échangeurs d’anions régénération (§ 3.6.1) ; en contrepartie, elles sont moins stables
chimiquement et produisent une fuite en silice plus élevée que les
1.2.3.1 Polystyréniques résines de type 1.
Des billes de polystyrène réticulé sont traitées avec du chloro- On appelle généralement faiblement basiques les résines dont le
méthyl méthyl éther CH2Cl—O—CH3 , en milieu anhydre en pré- groupe actif est une amine. Cependant, leur basicité peut varier
sence d’un catalyseur, AlCl3 ou SnCl4 . On obtient du polystyrène considérablement : les amines tertiaires sont parfois appelées
chlorométhylé (figure 5). moyennement basiques, alors que les amines primaires, d’ailleurs
Au cours d’une seconde étape, on peut remplacer le chlore du assez rares, ont une basicité très faible.
groupe chlorométhylé par une amine ou même de l’ammoniac.
Selon le réactif choisi, on obtient un échangeur d’anions plus ou
moins fortement basique (figure 6). Alors que les échangeurs de Les résines faiblement basiques les plus utilisées sont celles
cations courants se divisent en deux classes seulement selon leur à fonction amine tertiaire. Elles fixent les acides forts présents
groupe actif : dans la solution à traiter mais ne fixent ni les sels neutres, ni
– fortement acide (groupe sulfonique) ; les acides faibles.
– faiblement acide (groupe carboxylique),
Une variété bien plus grande existe pour les échangeurs
Les fabricants n’indiquent pas toujours la structure chimique
d’anions, dont la basicité peut être choisie sur mesure en raison du
dans leur documentation, même détaillée. Il faut donc se garder de
grand nombre d’amines disponibles. Les échangeurs d’anions
considérer comme chimiquement identiques des résines ayant
représentés dans les réactions de la figure 6 sont classés par ordre
simplement des caractéristiques générales voisines.
de basicité décroissante.
Les résines ayant des groupes ammonium quaternaire sont tou-
Exemples
tes fortement basiques. Par convention, on appelle :
– type 1, les groupes benzyltriméthylammonium, les plus forte- Fortement basiques type 1 : Amberjet 4200, Dowex Marathon A,
ment basiques ; Lewatit Monoplus M500
– type 2, les benzyldiméthyléthanolammonium, dont la basicité Fortement basiques type 2 : Amberjet 4600, Dowex Marathon A2,
est légèrement plus faible. Lewatit Monoplus M600
Les résines de type 1 sont utilisées là où l’élimination totale de Faiblement basiques : Amberlite IRA96, Dowex Marathon WBA,
tous les anions, même ceux d’acides faibles (silice), est indispen- Lewatit Monoplus MP64

CH2 CH2 CH2 CH2


CH CH [AlCl3 ou SnCl4] CH CH
+ 2 CH2CI-O-CH3 + 2 CH3OH

CH2Cl CH2Cl

Figure 5 – Préparation du polystyrène chlorométhylé à partir de polystyrène réticulé

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