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Matière : Choix d’investissement et de financement

Chapitre 2 : Le choix d’investissement en avenir incertain

Tout investissement est risqué. Comment apprécier le risque lié à la décision d’investir ?
Comment définir la prime de risque qu’exigera l’investisseur ?
La finance traditionnelle s’appuie sur la notion du temps. La finance moderne a introduit une
autre dimension dans la prise de décision : le risque.
Jusqu’à maintenant, ce n’est qu’implicitement que le risque a été abordé, grâce notamment :
- A la méthode du délai de récupération des capitaux investis puisque indirectement, on
considère que le risque croit avec le temps.
- Au choix d’un taux d’actualisation qui intègre une prime de risque.
I- La décision d’investissement en avenir aléatoire
I.1- Les méthodes empiriques de prise en considération du risque
Dans le premier chapitre, nous avons considéré implicitement que les recettes et les dépenses
futures étaient certaines. La valeur actuelle nette calculée en fonction des flux de trésorerie
était donc certaine elle aussi.
En réalité, les événements futurs sont aléatoires (ou probabilistes, c'est-à-dire qu’on peut leur
affecter une probabilité) ou même, incertaines (c'est-à-dire que leurs probabilités sont
inconnues, ce que nous étudions dans la deuxième section).
Les procédés empiriques suivants permettent traditionnellement la prise en compte du risque
dans le calcul de la valeur actuelle nette.
- La diminution de la durée de vie du projet.
- La méthode de l’équivalent certain.
- L’adjonction d’une prime de risque au taux d’actualisation.
a- La diminution de la durée de vie du projet
Cette méthode consiste à actualiser les flux de trésorerie générés par le projet sur une durée
inférieure à la durée de vie du projet. Plus le projet est risqué, plus le nombre d’années
négligées dans le calcul est grand.

La VAN ajustée au risque =

Avec :
n : la durée de vie du projet.
P : Le nombre de périodes négligés pour tenir compte du risque.
I0 : Investissement initial.
CFNt : Cash-flow net de la période t.
i : Taux d’actualisation.

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b- Méthode de l’équivalent certain


Cette méthode consiste à remplacer, dans les calculs, les recettes risquées par des recettes
certaines. Ces recettes certaines sont inférieures aux recettes risquées. Elles sont supposées
équivalentes aux recettes risquées au point de vue du décideur.
Equivalent certain = Recette risquée x coefficient
Dans l’équation de la VAN, il s’agit d’ajuster les cash-flows nets :

La VAN ajustée au risque =

αt est le coefficient d’ajustement de la période t. Pour tous les investisseurs ayant une attitude
d’aversion au risque (lorsque l’investisseur préfère une valeur actuelle nette certaine) α t est
comprise entre 0 et 1. Il est plus faible pour un décideur prudent que pour un décideur
« audacieux ».

c- Adjonction d’une prime de risque au taux d’actualisation


Cette méthode consiste à majorer le taux d’actualisation par une prime pour minorer les cash-
flows actualisés des projets risqués.

Taux d’actualisation = Taux sans risque + prime de risque

La VAN ajustée au risque =

Avec p = taux d’actualisation sans risque + prime de risque

I.2- L’approche probabiliste


a- Rappel
Soient deux variables aléatoire X1 et X2. Avec, a et b représentant deux coefficients réels :
E(aX) = a E(X)
E(aX1+bX2) = a E(X1) + b E(X2)
V(aX) = a2 V(X)
V(aX1 + b X2) = a2V(X1)+ b2V(X2) + 2 ab.cov (X1,X2)
= a2V(X1) + b2V(X2) + 2 ab. r. δ(X1) δ (X2)
r est le coefficient de corrélation entre les deux variables X1 et X2.

Cas particuliers :
- Si les deux variables aléatoires X1 et X2 sont parfaitement indépendants ( r = 0)
V(aX1 + b X2) = a2V(X1)+ b2V(X2)

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- Si les deux variables aléatoires X1 et X2 sont parfaitement dépendants ( r = 1)

V(aX1 + b X2) = a2V(X1) + b2V(X2) + 2 ab. δ(X1) δ (X2)


= a2 δ2(X1) + b2 δ2(X2) + 2 ab. δ(X1) δ (X2)
= (a δ(X1) + b δ(X2))2
δ(aX1 + b X2) = a δ(X1) + b δ(X2)
b- Espérance mathématique de la VAN : E(VAN)
Désignons par CFN1, CFN2…..CFNn les cash-flows nets respectifs des années 1, 2….n.
E(VAN) = E[-I0 + CFN1(1+i) -1 + CFN2(1+i) -2 + CFN3(1+i)-3……+ CFNn(1+i)-n]
La valeur actuelle nette est une variable aléatoire (combinaison de variables aléatoires).
E(VAN) est égale à la VAN des espérances mathématiques des cash-flows nets.
E(VAN) = -I0 + (1+i)-1 E(CFN1)+ (1+i)-2 E(CFN2)+ (1+i)-3E(CFN3)……+ (1+i) -n E(CFNn)
L’espérance mathématique de la VAN constitue :
- Un critère de rejet : sera rejeté tout projet dont E(VAN) est négative.
- Un critère de sélection : Entre deux projets sera retenu celui dont E(VAN) est la plus
élevée.
Exemple 1 : Un investissement de 80 millions de dinars est supposé procurer les cash-flows
suivants :
Probabilité Année 1 Année 2 Année 3
Hypothèse pessimiste 0,3 20 25 30
Hypothèse moyenne 0,5 30 40 50
Hypothèse optimiste 0,2 40 50 50
Le coût du capital est de 10%.
Calculer l’espérance mathématique de la valeur actuelle nette de ce projet.

c- Variance de la VAN
Le critère de l’espérance mathématique ne tient pas compte de la dispersion des valeurs
actuelles nettes autour de la moyenne, et donc du risque attaché à la distribution des
probabilités. Plus la distribution est dispersée, plus le risque est grand. Le calcul de la
variance ou de l’écart type, indicateur des valeurs centrales, permettra d’évaluer le risque de
la distribution.

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c.1- Application aux flux indépendant dans le temps


Si les CFN1, CFN2…….CFNn sont mutuellement indépendants dans le temps ( r = 0 ) alors :
V(VAN) = (1+i)-2V(CFN1) + (1+i)-4V(CFN2) + (1+i) -6V(CFN3) +……+ (1+i) -2nV(CFNn).
Avec V(I0) = 0
δ(VAN) =
La variance ou l’écart type de la VAN constituent :
- Un critère de rejet : sera rejeté tout projet dont le risque est supérieure à la norme
fixée.
- Un critère de sélection : Entre deux ou plusieurs projets, sera retenu celui dont
l’espérance mathématique est la plus élevée, et le risque est le plus faible.

Exemple 2 : Reprenons l’exemple 1, et supposons que les cash-flows sont indépendants.


Calculer (VAN) et déduire δ(VAN).

c.2- Application aux flux parfaitement corrélés dans le temps


Si les CFN1, CFN2…….CFNn sont parfaitement dépendants dans le temps ( r = 1) alors :
δ(VAN) = (1+i) -1 δ(CFN1)+ (1+i) -2 δ(CFN2)+……..+ (1+i)-n δ(CFNn)
V(VAN) = δ2(VAN)

Exemple 3 : Reprenons l’exemple précédent en supposant que les cash-flows sont


parfaitement corrélés dans le temps.

Remarques :
- Plus E(VAN) est élevée, plus risque augmente. L’investisseur devra alors procéder à des
arbitrages privilégiant :
- La rentabilité avec un niveau de risque élevé ;
- Un moindre risque avec une rentabilité faible.
- Pour comparer les risques de deux projets, il est pertinent de calculer l’écart réduit ou le
coefficient de variation de la VAN :

Ecart réduit (ou coefficient de variation de la VAN) =

- L’approche probabiliste n’est applicable que lorsque les distributions des probabilités des
cash-flows suivent la loi normale.

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I.3- Décisions séquentielles et arbres de décisions


a- Définition :
Lorsque le projet implique plusieurs décisions d’investissement qui se succèdent dans le
temps, on représente l’ensemble des décisions et des évènements par un arbre de décisions.

Une décision est un choix effectué librement par le décideur.


Un évènement est imposé de l’extérieur au décideur. Il est affecté d’une probabilité.
b- Structure des arbres de décision
L’arbre de décision est un graphe orienté qui représente la succession des décisions et des
évènements. Parmi les sommets du graphe (ou nœuds), on distingue des nœuds de décisions et
des nœuds d’événements.
- Les nœuds de décisions
Un nœud de décision représente un choix entre plusieurs décisions. Il est schématisé par un
carré. Chaque décision conduit à un nœud d’évènement. La racine de l’arbre de décision est
toujours un nœud de décisions.

Décision A
Décision B

- Les nœuds d’évènements


Un nœud d’évènement représente une alternative entre plusieurs évènements. Il est
schématisé par un cercle. A chaque évènement sont attachées une VAN et une probabilité. La
somme des probabilités affectées aux évènements d’un nœud est égale à 1. Pour chaque
nœud, on calcule E(VAN) et V(VAN).
Evénement 1, probabilité 1
VAN 1 P1.VAN1
Evénement 2, probabilité 2 E(VAN) P2.VAN2
VAN 2
Evénement 3, probabilité 3 P3.VAN3
VAN 3

- Procédure
A chaque nœud de décisions, la décision qui a la préférence est celle qui conduit au nœud
d’évènement pour lequel E(VAN) est maximale.
Pour calculer E(VAN) attachée à une décision, il faut seulement tenir compte des probabilités
des événements postérieurs à la décision. En effet, une décision n’est conditionnée que par
des évènements futurs. Elle ne meut pas modifier le passé. Le calcul s’effectue en remontant

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le temps de la fin vers le début. L’arbre est progressivement modifié en éliminant, à chaque
nœud de décisions, les branches de décisions dominées.

II- Choix d’investissement dans un avenir indéterminé


La prévision des flux monétaires en avenir aléatoire suppose que l’on puisse affecter une
probabilité à chacun des flux. Au contraire l’avenir est incertain (ou indéterminé) lorsqu’on a
aucune idée de la probabilité des recettes ou charges futures. Dans cette situation
l’investisseur est totalement incapable d’affecter une probabilité de réalisation à un
événement. Il peut seulement qualifier l’événement de favorable ou non.
Exemple :
Un investisseur compte se lancer dans un projet d’investissement. Une étude de marché lui
permet de prévoir les cash-flows attendus, selon la capacité de production disponible et les
recettes escomptées :
Capacité de production en Cash-flows nets
milliers de pièces 8000 9000 10000 11000
A : 100 -50 -20 0 10
B : 120 -80 -10 50 110
C : 140 -110 -30 80 150

Quelle décision doit-on prendre ?

1- Critère de Laplace
Le critère de Laplace consiste à calculer pour chaque projet, la moyenne arithmétique des
VAN possibles et à choisir le projet pour lequel la moyenne est la plus grande. Ceci revient à
calculer, pour chaque projet, l’espérance mathématique de la VAN en attribuant implicitement
une même probabilité à chaque état de la nature. Ce critère est donc une simplification du
critère de l’espérance mathématique.

2- Critère de Wald (ou Maxi Min)


Le critère du Maximin (maximum des maxima) consiste à déterminer la VAN la plus faible de
chaque projet et à choisir le projet pour lequel cette VAN est la plus grande. Le critère de
Maximin limite le risque de faibles recettes. Il est adapté à la psychologie d’un décideur
prudent qui craint surtout les mauvais résultats.

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Résultat minimum
A -50
B -80
C -110

Selon ce critère, la décision A est optimale.

3- Critère de Maximax
Ce critère privilégie l’attitude la plus risquée, le plus optimiste. Sera retenu la décision offrant
le résultat maximum le plus élevé.
Résultat maximum
A 10
B 110
C 150

Selon ce critère, la décision C est optimale.

4- Critère d’Hurwicz
Le critère d’Hurwicz permet de relativiser la prise de décision. En utilisant les critères
précédents, on considère implicitement que les décisions sont équiprobables. Hurwicz
recommande de pondérer les résultats probables minimum et maximum selon un coefficient
subjectif reflétant le degré d’optimisation ou de pessimisme, la nature offensive ou prudente
du décideur. Les coefficients de pondération sont compris entre 0 et 1.
Retenons les coefficients de 0,4 et 0,6 à appliquer respectivement aux valeurs maximales et
aux valeurs minimales.
Moyenne pondérée
Décision A 0,6 x (-50) + 0,4 x (-110) = -26
Décision B 0,6 x (-80) + 0,4 x 110 = -4
Décision C 0,6 x (-110) + 0,4 x 150 = -6

Selon ce critère la solution B sera retenue.

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5- Critère de Savage (ou critère de Mini Max Regret)


Le critère de Savage consiste à :
- Identifier, pour chaque état de la nature, le projet qui donnerait le meilleur résultat si
cet état de la nature se réaliserait.
- Calculer, pour chaque état de la nature supposé réalisé, les manques à gagner (ou
regrets) qui résulteraient de l’adoption des autres projets que celui identifié à la
première étape. On obtient ainsi une matrice des regrets.
- Déterminer, pour chaque projet, le regret maximal (Max).
- Choisir le projet pour lequel le regret maximal est minimal (Mini Max).
Comme le critère du Maxi Min, le critère du Mini Max Regret correspond à la psychologie
d’un décideur prudent qui cherche à limiter son manque à gagner possible.
8000 9000 10000 11000
Projet A -50 –(-50) = 0 -10 – (-20) = 10 80 – 0 = 80 150 – 10 = 140
Projet B -50 – ( -80) = 30 -10 – (-10) = 0 80 – 50 = 30 150 – 110 = 40
Projet C -50–( -110) = 60 -10-(-20) = 20 80 – 80 = 0 150 – 150 = 0

Regret Maximum
A 140
B 40
C 60

Selon le critère de Savage, la décision optimale est la décision B.

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