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Toussaint Maurice. Gustave Guillaume et l'actualité linguistique. In: Langages, 2ᵉ année, n°7, 1967. Linguistique française.
Théories grammaticales. pp. 93-100;
doi : https://doi.org/10.3406/lgge.1967.2884
https://www.persee.fr/doc/lgge_0458-726x_1967_num_2_7_2884
GUSTAVE GUILLAUME
ET L'ACTUALITÉ LINGUISTIQUE
par les structuralistes ont leur correspondant dans notre cerveau, elles ne
peuvent être de pures oppositions, mais sont aussi nécessairement des
positions, et partant de cette pensée qui n'est pas de Bergson : « le mouvement
est le mode d'existence de la matière », ces positions ne peuvent être
comprises que comme des « saisies », c'est-à-dire des arrêts au sein d'un
déplacement de matière. (Il est vrai que G. Guillaume dit — ce qui
complique les choses — que la réalité mentale est immatérielle et non matérielle.)
Ainsi le concept de « distance », impliqué dans le jeu de « positions s'oppo-
sant », peut, présentement, être délimité partiellement comme suit: une
opération mentale est decomposable en une suite de moments plus ou moins
distants les uns des autres, auxquels correspondent des unités minimales
de sens — autant de quantifications de la généralité-particularité — qui
doivent leur valeur à la nature du mouvement opératif et à l'espace de
temps qui les sépare du début de l'opération.
Tout cela, mise à part la matérialité des faits, se trouve, dans les
travaux de G. Guillaume plus ou moins explicité.
5.1. Quand on sait que G. Guillaume a repris plusieurs fois à son compte
l'affirmation de Meillet : « les faits linguistiques sont qualitatifs » (cf., 1933,
p. 47; 1937, p. 60), il peut sembler vain qu'on veuille prouver que son
analyse sémantique est aussi une analyse quantitative. Qu'on parcoure
seulement l'article de 1937 et on y lira : « to et a : Quantités de temps en énexie
dans le présent... » (p. 60), « interpolation quantitative » (p. 61); qu'on se
rappelle les « quanta dubitatifs » (1929, p. 40), un des derniers mots de
l'article de Moignet : « quantité de mouvement » (Langages, n° 3, p. 66) et
surtout, chez G. Guillaume la volonté de tout rapporter à un temps
d'opération mentale, un temps « très court sans doute, mais non pas infiniment
court et par conséquent réel », donc théoriquement mesurable.
Dans l'opération chronogénétique, le mode quasi nominal est celui
qui est livré par « une première saisie transversale »; le mode subjonctif
et le mode indicatif sont respectivement de « saisies transversales seconde
et tierce » (1951, p. 193); cette dernière pouvant s'analyser en une « saisie
précoce » et une « saisie tardive » (pp. 199 et sv.). Tout ici est quantitatif.
Si le temps nécessaire à la génération d'un élément du mode quasi nominal
est t. o. (q. nom.), on a : t. o. (q. nom.) < t. o. (sub.) < t. o. (passé simple)
< t. o. (imparfait) (cf. p. 200). Et si parfois G. Guillaume fait appel à des
qualités qui ne peuvent pas être ramenées à des quantités, c'est justement
là où il est possible de déceler des contradictions théoriques qui, une fois
levées, font place à une quantification généralisée.
5.2. J. Dubois, rendant compte d'une étude de M. Moignet (Cahier de
linguistique structurale, n° 5) 5, a déjà signalé l'existence d'une parenté
entre la formulation guillaumienne et une analyse faite en termes
informationnels. Mais c'est au niveau de la définition structurale, c'est-à-dire
de la génération des éléments d'un système, que ce rapprochement peut
être fait. A-t-on cherché à établir un lien entre la fréquence d'un infinitif
et la place qui lui est assignée en psychomécanique du langage (premier
élément de la chronogénèse apportant un contenu d'information quasi nul
relativement à la notion de temps)?
C'est toute une linguistique quantitative prenant son départ au niveau
des opérations génératrices qu'on pourrait construire sur les bases de la
psychosystématique et plus encore à partir d'analyses post-guillaumiennes
qui font voir partout des temps d'opération pensés comme des
consommations d'énergie.
6.1. G. Guillaume faisait remarquer que lorsqu'on demande à quelqu'un