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NUMERO NEUF - 28 NOVEMBRE 2020
1830-18801890-19501960-début 19701970-présent
Si l'appel à la libération est ici tout à fait clair, Engels l'agrémenta d'autres
affirmations plus sujettes à caution. L'abolition de la propriété et de la
famille bourgeoise libérerait l'humanité et lui permettrait de poursuivre
sa sexualité intrinsèque, une forme de famille librement choisi par
l'avenir, celle de la monogamie : « La prostitution disparaît ; la
monogamie, au lieu de péricliter, devient enfin une réalité, - même pour
les hommes. ». Le mariage trouverait sa véritable réalisation dans l'amour
communiste : « comme l'amour sexuel est exclusif par nature – bien que
cet exclusivisme ne se réalise pleinement, de nos jours, que chez la femme
– le mariage fondé sur l'amour sexuel est donc, par nature, conjugal. »
Queer addendum
Bien que Karl Ulrich n'ait jamais appelé à la dictature queer, Marx a
vraisemblablement rencontré une utopie sexuelle de ce genre chez
Charles Fourier. Marx a lu Fourier de près. Dans La Sainte famille, Marx
cite favorablement Fourier lorsqu'il écrit dans que « le degré de
l'émancipation féminine est la mesure naturelle du degré de
l'émancipation générale ». Il semble que Marx éprouvait moins de
sympathie envers la défense par Fourier de la liberté sexuelle. Dans le
Manifeste, Marx et Engels se moquent de la bourgeoisie lorsqu'elle craint
que l'abolition de la propriété ne débouche sur la « libre communauté des
femmes » et soulignent sa logique implicite qui considère les femmes
comme une propriété de la classe bourgeoise. Mais ils rejettent aussi
implicitement l'insistance sur l'amour libre, les relations ouvertes et le
plaisir sexuel dans la politique socialiste utopique de Fourier.
ME O'Brien.
M E O'Brien est autrice et enseignante vivant à Brooklyn. Elle travaille
régulièrement avec le Trans Oral History Project, et participe à la
conception du journal queer-communiste Pinko.
[1] A lire également l'interview de John d'Emilio, Le capitalisme a rendu l'identité gay
possible. Maintenant, nous devons détruire le capitalisme, paru dans le numéro #8 de
Trou Noir.
[3] L'histoire qui suit se base sur les travaux suivants : Wally Seccombe, Weathering the
Storm : Working-Class Families from the Industrial Revolution to the Fertility Decline
(Verso, 1993) ; Peter Drucker, Warped : Gay Normality and Queer Anticapitalism (Brill,
2015) ; John D'Emilio, « Capitalism and Gay Identity » ; Geoff Eley, Forging democracy :
The History of the Left in Europe 1850-2000 (Oxford, 2012) ; Alice Echol, Daring to be
Bad : Radical Feminism in America, 1967-1975 ; Claudia Goldin, Understanding the
Gender Gap : An Economic History of American Women (Oxford, 1990). Je cite aussi
largement les trois volumes des Communist Interventions du Communist Research
Cluster, tous disponibles en ligne. Le traitement du sujet est particulièrement influencé
par mon expérience du troisième volume, Revolutionary Feminism.
[4] Seccombe, Weathering the storm, p. 74.
[5] Ibid.
[7] Karl Marx, Le Capital, Livre I, 4ème section, 15ème chapitre, 8ème partie, «
Révolution opérée dans la manufacture, le métier et le travail à domicile par la grande
industrie ».
[8] Une grande part de cette analyse de la politique de genre de l'esclavage américain
est redevable, outre aux auteurs cités ci-dessus, au travail de Hortense Spillers et de
Saidiya Hartman.
[9] Angela Davis, « Reflections of the black woman's role in the community of slaves »,
1972, in Black revolutionaries in the United States, Communist interventions, vol. 2.,
édité par le Communist Research Cluster (CRC 2), pp. 329-330.
[11] Angela Davis, « Reflections of the black woman's role in the community of slaves »,
CRC 2, pp. 332-333.
[15] Charles Fourier, Théorie des quatre mouvements et des destinées générales, 1808.
[17] Chris Chitty, manuscrit d'un travail académique non publié, rendu disponible par
l'amabilité de Max Fox.
[18] Au 18ème siècle à Londres, une mollie house était un café, une auberge ou une
taverne où les hommes pouvaient se rencontrer en secret pour socialiser et avoir des
relations sexuelles. Molly ou moll était un terme d'argot pour un homme gay, pour une
femme de classe inférieure, ou une femme vendant du sexe.Bien qu'à cette époque, en
Angleterre, les relations sexuelles entre hommes étaient passibles de la peine de mort,
les molly houses faisaient partie d'une sous-culture gay et trans florissante. (N.d.T.)
[19] Fanny et Stella furent deux Mary-Anns arrêtées et inculpées à Londres ; elles
raillaient les clients du théâtre Strand en « piaillant », offraient vraisemblablement des
prestations sexuelles et perturbaient certainement le lieu. Leur penchant pour le
travestissement était indéniable, mais les médecins du tribunal furent fascinés par leur
physique et leur peau supposément féminines. Six médecins saisirent l'opportunité de
l'examen médical pour introduire leurs doigts dans leurs anus. Neil McKenna, Fanny
and Stella : the young men who shocked victorian England (Faber, 2013). L'estimation du
nombre de bordels est celle de McKenna.