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Rome. Antiquité
Résumé
Charles GIuittard, Le problème des limites et subdivisions du jour civil à Morne (Varron, Aulu-Gelle, Macrobe) : conticinium (-
cinum, -cinnum) ou conticuum (-cium)?, p. 815-842.
Le problème des limites du jour civil amène une confrontation entre Macrobe (sat. 1, 3, 1-11) et Aulu-Gelle (3, 2), qui s'appuient
sur Varron. La dépendance de Macrobe envers les Nuits Attiques apparaît totale; la tradition des Saturnales pose des
problèmes en face desquels la tradition gellienne offre un témoignage indispensable pour la restitution de la démarche
varronienne. Les subdivisions du jour civil nous sont connues par des sources qui ne concordent pas et tendent à se compléter.
Un terme apparaît sous cinq formes différentes : conticium, -cuum, -cinium, -cinum, -cinnum. On peut résoudre les difficultés
morphologiques et sémantiques en les divisant en deux familles : conticium et son doublet conticuum désignent le moment où
se fait le silence général, au début de la nuit; conticinium, (-cinum, -cinnum), terme de composition hybride, de création
postérieure, amené par oscen, *oscinium et gallicinium s'applique au silence qui suit le chant du coq. Conticium (-cuum) serait
un terme de la langue augurale désignant le dernier moment de la journée propice à l'interprétation du chant des oiseaux. Enfin
chez Macrobe (sat. 1, 3, 12) il faut lire mediae noctis inclinatio et non media noctis inclinatio (Fr. Eyssenhardt, J. Willis) et dans
les XII Tables (I, 9, Shoell) solis occasus et non sol occasus (Gell. 17, 2, 10). Il faut renoncer à la thèse d'une source unique
(Varron) : les témoignages révèlent le recours à un commentateur de Virgile et une remarque de Macrobe permet de
reconnaître en lui C. Julius Hyginus.
Guittard Charles. Le problème des limites et subdivisions du jour civil à Rome (Varron, Aulu-Gelle, Macrobe) : conticinium (-
cinum, -cinnum) ou conticuum (-ciuum) ?. In: Mélanges de l'École française de Rome. Antiquité, tome 88, n°2. 1976. pp. 815-
842;
doi : https://doi.org/10.3406/mefr.1976.1081
https://www.persee.fr/doc/mefr_0223-5102_1976_num_88_2_1081
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commons
LE PROBLÈME DES LIMITES ET SUBDIVISIONS
DU JOUR CIVIL À ROME
(VARRON, A ULU-GELLE, MACROBE) : CONTICINIVJJI
(-CINVM, -CINlvVLlI) OU CONTICVVM (-CIVM)?
PAR
Charles GUITTARD
*
* *
par Macrobe, dont l'expression est meilleure dans les Nuits Attiques,
comme le faisait déjà remarquer L. Jan dans son commentaire 1 . Aulu-
Gelle semble donc avoir été ici plus fidèle à l'esprit et à la lettre de Varron,
en rédigeant une notice purement technique; Macrobe, au contraire, est
délibérément tombé dans les artifices oratoires, pour satisfaire aux règles
et à la technique du genre du banquet 2 •
Un deuxième point où l'auteur des Saturnales s'écarte des Nuits
Attiques soulève un problème plus difficile et pratiquement insoluble.
Après avoir énoncé les limites du jour civil chez les Athéniens, les Baby-
loniens et les Ombriens 3 , Macrobe 4, comme Aulu-Gelle 5 , mentionne la
distinction entre sacra diurna et sacra nocturna; alors qu' Aulu-Gelle se
borne à noter que même les sacra nocturna sont datés en fonction du jour,
non de la nuit, la phrase suivante des Saturnales, telle qu'elle nous est
parvenue dans la tradition manuscrite, n'offre aucun sens plausible ou
acceptable. Elle s'ouvre en effet, sur la mention des sacra diurna et se
termine sur la remarque qu'à partir de la sixième heure de la nuit, le
temps est consacré aux sacrifices nocturnes du jour suivant. Syntaxique-
ment, et quelle que soit la version manuscrite adoptée 6 , on est en présence
d'une proposition subordonnée relative qui ne se rattache à rien. Aussi,
aucune correction se s'avérant décisive 7 , les éditeurs se sont-ils résolus
1 E. Türk (.illacrobe et les «Nuits .Attiques)), dans Latomus, XXIV, 1965, p. 385)
en tire un de ses arguments fondamentaux en faveur de la thèse selon laquelle
Macrobe aurait eu directement recours au texte de Varron. l\Iais d'une part,
la lacune ne laisse pas place à un large développement personnel, d'autre part,
une légère modification peut être l'œuvre de :Macrobe lui-même. E. Türk est
d'ailleurs un ardent défenseur de l'originalité de ce compilateur si souvent dé-
crié. Cf. aussi Jan, édition des Saturnales, ad loc.: Excidisse aliquid apparet :
sed uerba « et ea quae diurna sunt n demonstrant .il/acrobium paulo uberius quam
Gcllium hune locurn tractasse et haec fere esse supplenda : <' et ea quae diurna sunt
suis addicuntur diebus : quae sex prioribus noctis horis fiunt ea praeteriti diei
sacra nocturna. sunt : ab hora sexta noctis sequentis nocturnis sacris tempus impen-
ditur ».
2 Cf. la remarque de Jan ad loc. : Ita si scripserat ..llacrobius, librarius
facile a uerbis « diurna sunt >> aberrare potuit ad nocturna sunt )), ut in iis quae
<(
proxime sequimtur, librarius qui scripsit codicern (s. l. Parisinum Latinum 6371)
a uerbis « post mediam noctem >> transiit ad <c post priniam facem )), ne afferam mulla
eiusmodi exempla quae praebent codices Plinii praeter Barnbergensem omnes.
3 Paris, 1585.
' Par exemple H. Bornecque, dans son édition des Saturnales (1-111),
Paris Garnier, 1937, p. 20.
6 La conjecture est la suivante : <ab initio diei ad 'rnedium noctis proten-
duntur).
6 Comme le fait encore Jan, ad loc., qui écrit : Quae ubi indicaui lacunam,
leguntur inde ab ed. Steph., ea debentur Carrioni.
7 Studi sulla tradizione dei « Saturnali >> di .Macrobio, dans Annali della Scuola
Normale Superiore di Pisa, XXII, 1952, p. 230 n. 3: « Tra le aitre correzioni di t
( Tricassinus 514), bisogna no tare l'integrazione congetturale di I, 3, 6 : et ea
quae diurna sunt <ab initio diei ad medium noctis protenduntur), ab hora sexta
noctis sequentis nocturnis sacris tempus impenditur. L'integrazione era attribuita
dallo Jan a Ludovico Carrione, che curô la edizione stefaniana del 1585; è invece,
corne si vede, medioevale )).
820 CHARLES GUITTARD
sequentis >> non esse jugenda, sed ad « sequentis >> ex iis quae interciderunt tralten-
dum esse « diei ))' uix est quod monea1n.
4 Henri Bornecque donne par exemple, la traduction suivante: « Depuis
minuit de la nuit qui suit ( ?), c'est aux cérémonies nocturnes que le temps est
consacré ... >> (Ed. des Sat., Paris, Garnier, 1933, p. 21). Même erreur dans la
traduction italienne de N . .Marinone : « Per i riti notturni il tempo si calcola
dall'ora sesta della nottc seguente >) (Ed. des Sat., Turin, 1967, p. 119).
6 23, 4 : lndicio sunt sacra publica et auspicia etiam magistratuum, quorum
si quid ante medium noctis est actum, diei qui praeteriit adscribitur, si quid autem
post mediam noctem et ante luce·m factum est, eo die gestum dicitur qui eam sequitur
nocteni (Texte de l'éd. Jahn, Berlin, 1845 et Hidclsheim, G. Olms, 1965 ).
LE PROBLÈllE DES LUIITE8 ET RUBDIVI~IO~~ Dl: JOUR CIVIL ,\ ROME 821
***
Le parallélisme entre l\Iacrobe et Aulu-Gelle s'arrête avec le problème
du commencement du jour civil 3 • La fin du chapitre des Saturnales, où
sont énumérées les subdivisions du jour, n'a pas d'équivalent dans les
Nuits Attiques. P. vVessner 4 et A. Hahn 5 ont attribué ce passage à Varron,
sans toutefois lui assigner de provenance particulière; l\L E. Türk 6 est
plus catégorique et pense que l\Iacrobe a complété le récit d'Aulu-Gelle
en y ajoutant quelques phrases du De diebus, dont il aurait eu directement
a man ad
m ridi m ridi m
upr ma
uprema
u pera
u p r = r -
pu ulum ulum
n- prima f
fa
onti inium -----------------··-·-·-----·-----1---------1 onti inium
oncubia
1
no int mp ta in
in mp ta
1
824 CIIARLE~ c,rITTARD
*
* *
1 Gonticisco ap. PLACTE, Bac., 798; cf. VARR. ling. 7,79: putem a conti-
ciscendo conticiniurn siue, ut Opillus scribit, ab eo cum conticuerunt hmnines.
(Texte de l'éd. Goct.z-Schoell ).
2 Le dictionnaire de Gaffiot écarte la forme conticinU1n. Le dictionnaire
d'Oxford (Oxford Latin Dictionary, Clarendon, 1969, fasc. II, p. 429) retient
seulement les deux formes conticinium et conticinnum. On trouve seulement
conticiniU1n et conticium ùans le dictionnaire ùc Lewis et Short, et conticiniuni
et conticuum ùans le LeJ"icon de Porcellini.
3 As. 685 : Videbitur; factum, uolo; redito hue conticinio. Texte tlc l'é<l. A.
Ernout, Paris, « Le Belles Lettres n, 1932. Propos de l'esclave Libanus.
4 Le Londinensis, .lfus. Britann., Reg. 15 C XI, sigle J dans l'éd. A. Ernout.
Sur cc ms., cf. L. Havet, Jlanuel de critique verbale, 1619 et suiv.
5 Les ms. Palatinus raticanus 1615, Vaticanus Latinus 3870 et Ambrosianus
J 257 inf.
6 Dans la, eollection d'Oxford, Clarendon, }ère éd. 1904-1905, t. 1.
7 Dans la Locb Classical Library, Londres, Heinemann, 1ère éù., 1916,
t. 1, p. 196.
8 Berlin, Weidmann, 1894-1896, t. l, p. 79.
9 Dans la collection Teubner, Leipzig, 1856, t. 2, p. 38.
10 Egalement dans la collection Teubner, Leipzig, 1902, t. 1, p. 98.
11 Cf. aussi G. Lodgc, Lexicon Plautinum, Hidclsheim, G. Olrns, 1962, l,
p. 306.
12 Ling. 6, 7 : inte1npestam Aelius dicebat cum ternpus agendi est nullum, quod
alii t inconcubium appellarunt, quod ornnes fere tune cubarent; alii ab eo quod
828 CIIARLE8 GUITTARD
sileretur silentium, noctis, quod ideni Plautus tenipus conticinium; scribil e11im
« uidebi-mus, factmn ,uolo. Redito conticinio )). et 7, 19 : in A 8inaria : « l' idebitur,
factum uolo, [ad] redilo conticinio )). Putem, a contiscendo conlicini1tm, siue, ut
07>illns scribit, ab eo cum, conticuerunt lwrnines. Texte '1e l't'·d. d<· G. Goctz et
Fr. Shoell, Leipzig, Tcubner, 1910 et Amsterdam, A. ll. Hakkert, 1964.
1 JI. Cornelii Frontonis Rpistularmn ad Jf. Caesarem. et inuice1n, liber II, G:
Iarn primurn media no:,; te7>ida, Laurentina; tum aute1n gallicinium frigidulurn,
Lanuinum; iam conticinuni atque niatutinum atque diluculuni usque ad 8olis ortum,
gelidu,n, ad Algidmn maxime. Texte de l'éd. Nabcr, p. 31.
2 Le terme ne figure pas dans les fragments du ratfoamts Latinus 57fj0
mais dans le codex A rnbrosianus J.J417 ord. sup., qui en constitue la continuation.
3 Edition fondée uniquement sur les données du codex A nibrosianus. Le
futur bibliothécaire de la Vaticane n'avait pas encore exhum<~ l'autre palimpseste.
4 A tel point que, l'année suivante, Niebuhr, Ph. Battmann et L. F. Hein-
dorf jugèrent nécessaire une nouvelle édition. Cf. aussi E. Ilauler, Neues aus de11i
Frontopalirnpsestdans lVien. Stud., XXXI, 1909, p. 267. A. liai a donné une deu-
xième édition des Lettres, accrue des données du palimpseste du Vatican, à
Rome, en 1823.
5 Jf. Cornelii Frontonis Epistulae, Leyde, Brill, 1954, p. 31, 1. 5 (liber Il,
8 dans la répartition de cette édition).
LE PHOBLÈ~IE DES LDlITE8 ET 8UBDIVISI0~8 DU JOt.:R CIVIL .\ RO::\clE 829
Naber, dans une édition qui fait aujourd'hui encore autorité 1, écarte cette
lecture et propose conticinum. Quoi qu'il en soit, une seconde main 2 a
porté la correction conticinium dans la marge du manuscrit, et c'est la
forme retenue, par exemple, par l'éditeur de la Loeb Classical Library,
M. C. R. Haines 3 • La valeur de ces lectures sera examinée plus loin.
On trouve ensuite le terme chez les grammairiens et compilateurs
tardifs, sans parler rles glossateurs. Chez Servius 4, Nonius Marcellus 5 ,
Priscien Isidore de Séville et dans les scholies de Servius Danielis
6
,
7
8
Les corrections de cette seconde main sont datées d'environ 500 de notre
ère par 11. Van den Hont (07J. cit., Proleg., p. XLI). Sur ce point, cf. aussi L.
Ilavet., De Réviseur du manuscrit de Fronton, dans Rev. Pkil., X, 1886, p. 189. Pour
une datation plus tardive, cf. E. Hauler, A,us deni Frontopalirnpsest, dans lVien.
Stud., XXXIV, 1912, p. 253 et sq.
3 1'he Correspondence of JI arcus Cornelius Fronto, Londres, Il(•im•mann
Jerc (~d. 1919, t. l, p. 141.
4 In Acn. 2, 268 : 8unt auteni solidae noctis partes secundinn l'arronem hae,
uespera, conticinium, intempesta nox, galliciniwm, lucifer; diei, mane, ortus 'tneri-
dies, occasus. De crepusculo uero, quod est dubia lu.r, narn creperum dubium., signi-
ficat, quaeritur, Texte de l'é<l. G. Thilo et H. Hagen, Leipzig, Tcubner, 1881,
t. 1, p. 264.
5 XONIUS, De proprietatesernwnurn(<~d.Lindsay, Lcipzig,Teubner, 1903,
p. 87) : conticiniurn, noctis prirnum, tem,pus, quod omnia quiescendi gratia conti-
cescu,nt. A uctores multi S'Unt mihi, sed auctoritate deficiunt.
6
1 De die natali 24, 2 : sequitur gallicinium, cun1, galli canere incipiunl; dein
conticiniurn, cum conticuerunt; tune a11,telucem, et sic diluculuni, cuni sole nondwm,
orto iam lucet. Texte de l'éd. O. Jahn, Berlin, 1845 et Hidclshcim, G. Olms, 1965.
:Même leçon conticinium chez F. Hultscl1, Leipzig, Teubner, 1867, p. 51.
2 Les manuscrits D (codex olim Coloniensis, nunc Darnistadiensis 166, saec.
Vil) et R (Vaticanus Latinus 4229, saec. X) de l'éd. O. Jahn : codices D et R
enim soli autoritatem habent (Prolegoniena, p. xx11).
3 Sat. 1, 3, 12 : primum tempus diei dicitur media noctis inclinatio, deinde
galliciniuni, inde conticuum, cum, et galli conticescunt et homines etiani tum quie-
scunt, deinde diluculum id est cum incipit dinosci dies, inde mane cum dies clarus
est. Conticuum est notamment la leçon des manuscrits fondamentaux, Bamber-
gensis ]Jf. L. V. 5 n. 9, Parisinus Latinus 6371 et Neapolitanus VB 10. Cependant
un manuscrit de Cambridge, Universitatis 260, porte conticinium. Dans un autre
Cantabrigiensis, Corporis Christi Collegii 71 l"'. 4, une seconde main a corrigé la
leçon contituum (pour conticuum) en conticinum. De même, dans le Napolitanus
V B 12, contituuni a été malencontreusement corrigé en conticinum.
4 Ed. des sat., Qucdlinburg et Leipzig, 1852, p. 19.
5 Leipzig, Teubner, 1868, 1893.
6 Turin, 1967.
7 R. ::\Iarache, JJ.Iots nouveaux et mots archaïques chez Fronton et Aulu-
Gelle, Thèse complémentaire, Rennes, 1956, p. 45.
LE PIWBLÈ}lE DES LDIITEf; ET f;UBDIVIf;IO~:'- DC JOUR CIVIL ,\ RO~lE 831
***
1 Ainsi après avoir employé le terme conlicu-wrn parmi les subdivisions <lu
jour, ( 'accina Albin us utilise les expressions nocf11,futura et die crastini de préfo-
rence ü nocfe futura et die crastino (sat. 1, 3, l f>). Le chapitre suivant <·st d'ailleurs
consa<·d~ à la discussion de tournures archaïques.
2 Sur c<·s dérivés <·n latin, d. A. Ernout, Des composés latins (!n -cen,
-cinium et -cino(r), dans Philologica, Paris, Klincksieck, 1946, I, p. 73-82. Extrait
des Jlélanges ,J. J'endryè.-;, Paris, 1925, p. 141 et suiv. ('f. aussi I◄'r. Bader, /,a
formation des compo.-;ù nmninaiu du latin, Paris, Thèse, 1962, p. 65-66.
a D'après Ernout-)leillct, Dictionnctire étymologique de la langue latine,
4c éd., Paris, 1959, s.11. taceo.
4 FE8T. p. 214, 9, éd. Lindsay : mwinum : fripudium est, quod oris canltt,
signi/icaf quid portendi; cum cecinit coruus, corni.r, noctua, parra, picus. Cf. ég-a-
fomcnt, PA l'L. FEST. p. 215, 2 : oscinum, augurium a cantu auium; à propos
des oscine8, VARR. (Ling. 6, 76) donne la dMinition suivante : Oscines dicuntur
apud augures, quae ore faciwit auspiciurn. Cf. à ce sujet, PEST. p. 214,14 : Oscines
aues .1 p. Claudius esse ait quae ore canentes faciant auspicium ut coruus, cornix,
noclua; SERY. in Aen. 3, 3(H : Oscines quae ore futura praedicunl; ISID., orig.
12, 7, 76 : Oscines aues uocant quae ore canluq·ue auspiciuHi faciunt, ut coruus,
corni.x, picus.
6 ('f. ISID. orig. (>, 19, 6 : Cum autem .. unus canit, Oraece r,wnodia, Latine
sicinium diciiur; c·um uero dtw canunt, bicinium appellatur; cum 1nulti, chorus.
LE PHOBLÈ'.\IE DEf-\ LL\IITEE-- ET f-\UBDIVI~IOXf-\ DU JOl;R CIVIL .\ RO'.\lE 833
1 SY.:\DIAQCE, Epist. 1, 4, 1.
834 CHARLES GUITTARI>
nium, qui désigne une sorte de danse dans le drame satirique, car, ici, c'est
le mot grec cr(x.1.w1.çet la coex1stence d'un terme latin et <l'un terme dérivé
du grec qui sont la cause d'un flottement morphologique qui se comprend
aisément. l\Iais comment comprendre conticinum et conticinnum? Y voir,
avec R. l\.:1arache, des << formations aberrantes » 1, c'est encore leur recon-
naître une certaine existence autre que paléographique. Dans la forme
conticinum que l'on doit lire, selon toute vraisemblance, dans le palim-
pseste de Fronton, nous serions tenté de voir une faute palé•ographique :
en effet, là où elle apparaît, la forme est précisément encadrée de deux
termes qui présentent une terminaison analogue en -inum (lanuinum et
matutinum) et l'on relève encore, dans le voisinage d'autres mots offrant
une consonnance semblable (Tu1wulanum, Oceanum, Tiburtinum). Ces ter-
minaisons ont donc pu influer sur celle de conticinium qui serait devenu,
par la faute du scribe, conticinum. La forme conticinnum est peut-être
née d'une confusion avec la famille concinnare (((agencer», <<ajuster»),
concinnus («proportionné))), par l'intermédiaire d'un verbe de la famille de
canere, concinere (((former un ensemble de sons»). On trouve d'ailleurs dans
les manuscrits (chez Plaute par exemple) concinium pour conticinium. l\Iais
ce n'est qu'une hypothèse et l'on ne peut que répéter la condamnation
catégorique prononcée par G. Goetz et Fr. Schoell dans leur édition <le
Varron 2 •
On peut donc esquisser une classification, peut-être un peu trop
simplificatrice, <les termes relevé>s. Dans une première famille, on pourrait
placer les deux dérivés en -ium et -uum qui font intervenir des modes de
suffixalisation normaux et courants. Une seconde famille pourrait regrouper
les termes où interviennent des t\largissements plus complexes qui oriente-
raient le mot vers une autre valeur sémantique : conticinium, conticinum
et conticinnum, ces deux dernières formes étant considérées comme des
avatars du dérivé en -cinium. Cela nous amène à considérer le sens du (ou
des) terme(s) étudié(s).
1 C'est notamment ainsi que le terme est interprété dans les gloses : primum
ternpus noctis cU'm ornnia quiescunt (C. G. L. IV, 223, 34); prima pars noctis a
conticiscendo (0. O. L. V, 650, 25); est quando omnes silent : conti<ce)scere enini
silere est (PLAC. V, 58, 25 ; mais PLAC. V, 15, 24 = V, 58, 24 : conticinio lem-
pore nocUs post galli cantum, quod (quo G, quando Maius) cecinit et conticuit.
Voir aussi Gloss. Philox. CO 674 :
2 Edition de PLA"CTE, Paris, « Les Belles Lettres», 1932, t. l, p. 124.
3 Des composés latins en -cen, -ciniu1n, et -cino(r), dans Philologica,
Paris, Klinocksicck, 1946, I, p. 80.
4 La même ambivalence se produit à propos du terme crepusculum,, moment
où la lumière est douteuse, incertaine, qui s'applique tantôt au soir, à la tombée
du jour, tantôt au matin, avant le lever du jour. Cf. SERV. in .Aen. 2, 268 :
De crepusculo uero, quod est dubia lux, nam « creperurn ii dubiurn significat, quaeri-
tur. Et licet utrique tempori possit iungi, usus tamen ut matutino iungamus obti-
nuit, licet Statius dixerit : « Longa repercusso niruere crepuscula Phoebo )). Mais ici
il n'y a pas de véritable problème, car le terme est bien établi morphologiquement
et s'applique à un phénomène naturel simple.
836 CIIAl{Ll·:~ caTrTARD
1 Cf. FEST. éd. Lindsay, 56, 17 : Caduca auspicia dicunt cum aliquid in
tewplo e.rcidit ueluti uirga e manit.
2 FEST. l~d. Lindsay, p. 474, 7 <Silentio surgere) . .. t dici, ubi qui 7>osl
medimn (noctem) ...... tandi causa ex lectulo suo si <lens surr)exit et liberatu8 a
lecto, in solido ...... <se)detque, ne quid eo ternpore deiciat, <cavens, donec s)e
in leclnm reposuit : hoc enirn est <proprie sil)entium, omnis vitii in auspiciis vacui-
tas. rerwnius ait, non utique e.r lecto, sed ex cubili, ne<c> rursus se in lectu1n repo-
nere necesse esse.
Ll-: PRORI.t:,rn ))Ef-- LDIITEf- ET ~rnoIVIf--lO~!-- nr .JOl;H CIVIL ,\ R<nn: 837
* **
***
1 VARR. ling. 6, 5 et 7, 51; 1IACR. sat. l, 3, 14; CENS. 24, 3; FEST. s.v.
supprernurn. Cf. Schocll, l, 9.
2 17, 2, 10.
3 Du type ante occasurn solem (PLA rTE Ep. 144 ).
4 Cf. Ernout-Thomas, Synta;re Latine, 2e éd., Paris, Klincksieck, 1964,
p. 280-281.
MEFRA 1976, 2.
840 CJJARLJ<.;8 GUITTARD
ces à Virgile chez des auteurs comme Aulu-Gelle ou Censorinus. Force est
de recourir à des traités antérieurs, ou sur l'œuvre de Virgile ou sur le droit
pontifical. Sans doute N. Marinone a-t-il raison d'avancer le nom de Cor-
nelius Labeo 1 . Mais une remarque incidente de Macrobe suggère une autre
hypothèse encore. Parmi les nombreux commentateurs de Virgile cités
dans les Saturnales , un seul fait l'objet d'une mention spéciale pour sa
2