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Chapitre 5

Dynamique des fluides

Objectifs d’apprentissage

• connaître les définitions de :


- particule fluide (dimensions, propriétés)
- libre parcours moyen
- modèle de milieu continu
- trajectoire
- écoulement stationnaire, instationnaire
- ligne de courant
- forces de pression
- forces visqueuses
- écoulement interne, externe
- régimes d’écoulement
- nombre de Reynolds
- débit volumique, débit massique
- écoulement isovolume
- tube de courant
- charge d’un écoulement
• écrire et utiliser la conservation du débit pour un écoulement isovolume
• définir le nombre de Reynolds et le type d’écoulement et en déduire avec le régime d’écou-
lement
• énoncer et démontrer le théorème de Bernoulli
• faire des bilans d’énergie pour des systèmes ouverts

Introduction
Dans l’UE Mécanique Physique 1, vous avez étudié les fluides au repos dans un référentiel galiléen
sous l’effet de leur poids et des forces de pression. Dans ce chapitre, vous allez étudier l’écoulement
de fluides sous l’effet de leur poids, des forces de pression et de forces visqueuses, ces dernières ne se
manifestant que lorsque les fluides sont mis en mouvement.

Objets d’étude - Dans ce cours nous nous intéresserons à l’écoulement de fluides simples, c’est-à-
dire formés de petites molécules. L’air et l’eau en sont deux exemples typiques d’une grande importance

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dans la vie quotidienne. Tous les gaz purs et les mélanges gazeux, la plupart des solutions aqueuses
peu concentrées ainsi que les huiles entrent dans la catégorie des fluides simples. Comme nous le
détaillerons dans ce cours, l’écoulement de ces fluides peut être entièrement décrit dès lors que l’on
connaît trois de leurs propriétés : leur masse volumique, leur compressibilité et leur viscosité. Ces
fluides simples sont appelés des fluides newtoniens.

Par contraste, on appelle fluides complexes ou fluides non newtoniens les fluides qui pré-
sentent une microstructure à des échelles intermédiaires entre l’échelle moléculaire et les échelles
macroscopiques, qui résulte des interactions spécifiques entre entités (interactions électrostatiques,
stériques, visco-élasticité, frottement solide) :

• fluides alimentaires et industriels (miel, ketchup, peintures, shampoings, savons liquides)


• fluides biologiques (sang, mucus)
• fluides géologiques (laves, boues, sables secs et humides, avalanches de neige...)

La description de l’écoulement n’obéit que de manière approchée au modèle newtonien car certains
aspects de leur comportement sous écoulement sont dus à leur microstructure spécifique. L’étude de
l’écoulement de ces fluides sort du cadre de ce cours.

Vocabulaire : aérodynamique et hydrodynamique

L’aérodynamique concerne l’écoulement de l’air, tandis que l’hydrodynamique concerne l’écoule-


ment de l’eau. L’usage de ces deux termes est principalement lié à leurs applications industrielles,
les avions pour l’air, les bateaux et sous-marins pour l’eau. Mais les écoulements de l’air et de
l’eau sont décrits par le même modèle, celui de la mécanique des milieux continus.

5.1 Propriétés des fluides


5.1.1 Solides, liquides, gaz
Point de vue macroscopique - D’un point de vue macroscopique, les solides possèdent une forme
propre et ne s’écoulent pas, tandis que liquides et gaz n’ont pas de forme propre et s’écoulent. Liquides
et gaz épousent la forme des récipients qui les contiennent mais les liquides n’occupent pas tout le
volume qui leur est offert, tandis que les gaz occupent tout le volume qui leur est offert.

Point de vue microscopique - On rappelle que l’échelle microscopique correspond aux dimensions
caractéristiques des atomes et molécules qui sont de l’ordre de l’Angström : 1Å = 10−10 m.
D’un point de vue microscopique, dans un solide, les atomes ou molécules qui le composent sont
animés d’un mouvement vibratoire incessant (d’origine thermique) mais ne changent pas de voisins 1 .
Au contraire, au sein d’un fluide (liquide ou gaz), les atomes ou molécules qui le composent sont
en mouvement incessant et désordonné à cause de leurs interactions et changent en permanence de
voisins (mouvement brownien), même lorsque le fluide ne s’écoule pas d’un point de vue macroscopique.
Ceci explique par exemple que le thé diffuse dans une tasse non remuée. Il faut donc distinguer le
mouvement moléculaire du mouvement macroscopique du fluide, qui est le mouvement d’ensemble
observé à l’échelle d’observation humaine.

1. Lorsqu’on exerce des contraintes sur un solide, il est possible de le déformer. Lorsque les contraintes sont faibles,
le solide reprend sa forme initiale dès qu’elles sont supprimées. On dit que l’on est alors dans un régime de déformation
élastique. Lorsque les contraintes sont plus importantes le solide ne reprend pas sa forme initiale lorsqu’elles sont suppri-
mées. On dit que l’on est alors dans un régime de déformation plastique et dans ce cas, certains atomes vont changer de
voisins au cours de la déformation.

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5.1.2 Phases condensées, phases diluées
Solides et liquides sont des phases condensées au sens où la distance inter-moléculaire est compa-
rable à la taille des molécules (typiquement quelques angström). En conséquence, ils sont très faible-
ment compressibles car les molécules sont impénétrables. La masse volumique des phases condensées
vaut typiquement 103 − 104 kg · m−3 .
Les gaz constituent une phase diluée, c’est-à-dire peu dense, au sens où la distance inter-moléculaire
moyenne est bien plus grande que la taille des molécules. Dans l’air, dans les CNTP 2 , cette distance
vaut environ 3 nm, soit de l’ordre d’une dizaine de fois la taille des molécules. En conséquence, la
masse volumique des gaz varie fortement avec leur pression et leur température et. Dans les CNTP,
la masse volumique de l’air vaut 1,3 kg · m−3 .

5.1.3 Libre parcours moyen


Les interactions entre molécules étant attractives et décroissant rapidement en intensité avec la
distance entre molécules, dans les phases condensées, les molécules sont en interaction attractive forte
du fait de leur proximité.
Au contraire, dans les phases diluées, les molécules sont pratiquement sans interactions du fait
de leur éloignement, sauf lors de collisions au cours desquelles elles échangent énergie et quantité de
mouvement. Du fait de leurs interactions presque toujours nulles, les gaz dilués obéissent au modèle de
gaz parfait étudié en Mécanique-Physique 1. La distance moyenne parcourue par une molécule entre
deux collisions est appelée libre parcours moyen. Il est de l’ordre de 100 nm dans l’air dans les
CNTP.

5.2 Le modèle de milieu continu


5.2.1 Particule fluide
Expérimentalement, on constate que dans la plupart des écoulements rencontrés dans la vie cou-
rante (par exemple dans le cas de l’écoulement d’un robinet), le mouvement d’un fluide varie :
• sur des distances caractéristiques (le diamètre d’un robinet, de l’ordre du centimètre) très grandes
devant (i) la distance moyenne entre deux molécules, (ii) le libre parcours moyen,
• sur des temps caractéristiques (le temps de chute de l’eau dans l’évier, de l’ordre de la seconde)
très grands devant le laps de temps entre deux collisions.
Pour décrire le mouvement d’ensemble du fluide, on n’a donc pas besoin de décrire les trajectoires de
toutes les molécules composant ce fluide, il suffit de décrire son mouvement moyenné sur un grand
nombre de molécules. La modélisation du fluide qui tient compte de ces observations consiste à aban-
donner la description microscopique du fluide (fluide comme un ensemble de molécules) et d’adopter
une description du fluide à une échelle intermédiaire entre l’échelle microscopique (la molécule) et
l’échelle macroscopique (le diamètre du robinet) : l’échelle mésoscopique. A cette échelle, le fluide
est décrit comme un ensemble de Particules Fluides.

Particule Fluide (PF) : une Particule Fluide est un ensemble de molécules identifiées par la pensée
(coloriées en bleu sur la figure 5.1) qui sont celles contenues initialement dans le volume V ∼ L3 où :
• L est très petite devant la distance caractéristique sur laquelle varie la vitesse du fluide (le
diamètre du robinet) : la taille du ”pixel” de résolution de l’image du mouvement du fluide est
petite devant les détails de son mouvement. On décrit donc précisément le mouvement du fluide.
• L est très grande devant la distance moyenne entre molécules. Il y a donc dans V un très grand
nombre de molécules. Les grandeurs moyennées sur V que nous définirons sont donc calculées
sur un grand nombre de molécules, ce qui permet d’utiliser les résultats de la thermodynamique.
2. Conditions Normales de Température et de Pression (CNTP) : T = 300 K, P = 1 bar = 105 Pa

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Particule Fluide
L

Figure 5.1

• L est très grande devant le libre parcours moyen des molécules. Il y a donc dans la PF un
grand nombre de molécules en interaction qui se transmettent de proche en proche les variations
de vitesse et de température imposées par l’écoulement. Cela a donc un sens de définir une
vitesse moyenne et une température moyenne de l’ensemble des molécules contenues dans la PF
puisqu’elles y échangent quantité de mouvement et énergie lors de nombreuses collisions.

Remarques :

• Dans la pratique, une PF définie à un instant t donné se déforme rapidement dans un écoulement,
ce qui empêche de la suivre longtemps (cf. film incomp-fluid-element : déformation des PF
dans un resserrement 3 ). On pourra donc lui appliquer les principes de la mécanique et de la
thermodynamique entre les instants t et t + δt, où δt est un laps de temps suffisamment court
pour que la PF ne soit pas disloquée sur ce laps de temps.
• Comme les molécules d’une PF sont identifiées par la pensée, une PF est par définition un
système fermé, c’est-à-dire qui n’échange pas de matière avec l’extérieur. Sa masse est donc
constante. Seul son volume peut varier au cours de son déplacement.

5.2.2 Propriétés du fluide définies à l’échelle de la PF

Pour décrire le mouvement et les propriétés du fluide, on définit donc des grandeurs définies à
l’échelle de la particule fluide :

• vitesse, accélération
• masse volumique
• pression, température...

3. Dans ce film d’un écoulement plan dans un canal présentant un resserrement en aval vu du dessus, les PF sont
matérialisées par de toutes petites bulles de gaz créées en amont dans l’eau par oxydo-réduction qui réfléchissent la
lumière en direction de la caméra, d’où leur aspect blanc. Ces bulles permettent de visualiser les PF au sein desquelles
elles sont transportées. On constate que les PF sont bien observables, qu’elles peuvent être suivies dans leur mouvement,
et qu’elles se déforment dans le resserrement.

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Position d’une PF : c’est le centre de masse C de l’ensemble des molécules {Mi } de masses {mi }
composant la particule fluide (voir la figure 5.1)
−−→
−−→
P
i mi OMi 1 X X
OC = P = mi ~ri avec M = mi
i mi M i i

~i des molécules composant la particule fluide,


Vitesse ~v de la PF : c’est la moyenne des vitesses V
c’est-à-dire la vitesse de leur centre de masse
−−→
dOC 1 X ~
~v = = mi Vi
dt M i

Accélération ~a de la PF : c’est l’accélération de son CM


d~v 1 X ~i
~a = = mi A
dt M i

Remarque : Compte tenu de ces définitions, dans un fluide au repos


• toutes les particules fluides sont immobiles.
• par contre, les molécules sont toujours individuellement en mouvement rapide (agitation ther-
mique).

Masse volumique : La masse volumique ρ d’un fluide au point M à l’instant t est la masse de la
PF centrée sur M à l’instant t divisée par le volume V de la PF (voir la figure 5.1).
P
i mi
ρ =
V

Pression, température : Un fluide en écoulement ne se trouve globalement pas en équilibre ther-


modynamique puisqu’il échange de l’énergie avec l’extérieur. Mais l’expérience montre que dans la
plupart des écoulements rencontrés dans la vie courante, chacune des PF évolue sans jamais s’écar-
ter notablement d’un état d’équilibre thermodynamique si bien qu’on peut considérer que tout se
passe comme si chaque PF se déplaçait en restant à l’équilibre thermodynamique : c’est l’ hypothèse
d’équilibre thermodynamique local (ETL). En conséquence :
• On peut alors attribuer à chaque PF une température et une pression, dont la définition requiert
l’hypothèse d’équilibre thermodynamique, au contraire de l’énergie et de la masse de la PF,
qui sont définies à l’équilibre et hors équilibre. Ces valeurs de la température et de la pression
possèdent une signification locale et sont susceptibles de varier au cours du mouvement des PF.
• les transformations que subissent les PF sont considérées comme quasistatiques.
• La masse volumique, la pression et la température d’un fluide sont liées entre elles par l’équation
d’état du fluide ρ = ρ(P, T ).

Modèle de milieu continu - Dans le cadre de cette description de l’écoulement d’un fluide à
l’échelle mésoscopique, en tout point d’un fluide repéré par le vecteur ~r et à tout instant t il est donc
possible de définir la masse volumique, la vitesse, la pression, la température du fluide comme celles
de la PF située en ~r à cet instant t. Les propriétés d’un fluide ne sont donc plus celles des molécules
discrètes mais des champs des variables continues d’espace et de temps 4 . Le fluide est donc décrit
comme un milieu continu.

4. En physique et en mécanique, un champ est une fonction de plusieurs variables, souvent de l’espace (donc de 3
variables a priori) et du temps. Cette fonction peut être un scalaire (on parle alors d’un champ scalaire), par exemple la
température T (x, y, z, t), ou vectorielle (on parle alors d’un champ vectoriel), par exemple la vitesse ~v (x, y, z, t).

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5.3 Cinématique des fluides
Le mot cinématique a pour étymologie grecque kinèmaticos qui signifie mouvement. La cinématique
est l’étude du mouvement indépendamment de ses causes. Pour illustrer la cinématique des fluides,
considérons un écoulement particulier, celui d’une rivière, schématisée sur la figure 5.2.

5.3.1 Points de vue eulérien et lagrangien


Trajectoire d’une PF : La trajectoire d’une PF est l’ensemble des positions occupées successive-
ment par le centre de masse de la PF. C’est la même notion que la trajectoire d’une fusée matérialisée
par sa traînée de fumée.

Lagrange Je décris ce que je


mesure au pied du
pont à tout instant

A cet instant nous


Je décris ce que je mesurons la même
mesure sous mon vitesse, la même
radeau à tout instant Euler température… Euler

Situation à l’instant t = 0 Situation à l’instant t

Lagrange

rivière rivière

(a) (b)

Figure 5.2 – Points de vue lagrangien et eulérien.

Deux points de vue différents peuvent être utilisés pour décrire le mouvement d’un fluide, il s’agit
du point de vue lagrangien et du point de vue eulérien.

Point de vue lagrangien : l’écoulement du fluide est décrit comme l’ensemble des trajectoires
de toutes les PF constituant le fluide
Point de vue eulérien : l’écoulement du fluide est décrit comme l’ensemble des valeurs de la
vitesse du fluide mesurées en chaque point fixe de l’espace

• Décrire l’écoulement de la rivière du point de vue lagrangien consisterait à enregistrer les va-
riations temporelles de la vitesse, la température, la pression mesurées par un grand nombre
d’observateurs embarqués chacun sur un radeau différent emporté par le courant, c’est-à-dire
lié à une PF en écoulement, voir la figure 5.2 a. L’écoulement serait parfaitement décrit par la
lecture de l’ensemble des journaux de bord tenus par chacun des observateurs embarqués, dans
lesquels seraient consignées leurs mesures.

• Décrire l’écoulement de la rivière du point de vue eulérien consisterait à enregistrer les varia-
tions temporelle de la vitesse, de la température, de la pression mesurées par un grand nombre
d’observateurs postés chacun sur un pont différent, c’est-à-dire possédant chacun une position
fixe par rapport à la rive, voir la figure 5.2 a. L’écoulement serait parfaitement décrit par l’en-
semble des cartes (autant de cartes que d’instants) représentant la vitesse mesurée au pied de

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chaque pont par ces observateurs à chaque instant : cartes du champ des vitesses, températures,
pressions...

Equivalence et complémentarité - Point de vue eulérien et point de vue lagrangien sont deux
points de vue différents sur une même réalité, l’écoulement du fluide. Ainsi, la vitesse mesurée à
l’instant t par Euler s’identifie à la vitesse de la PF se trouvant à l’instant t au pied du pont, c’est-
à-dire celle que mesure Lagrange sur son radeau à l’instant où celui-ci passe sous le pont, voir la
figure 5.2 b.
Ces deux points de vue sont complémentaires. Le point de vue lagrangien est utile pour appliquer
les principes généraux de la mécanique (lois de Newton) et de la thermodynamique (premier principe).
En effet, de ce point de vue on considère le fluide comme une collection de PF, qui sont des systèmes
fermés auxquels les théorèmes généraux s’appliquent naturellement. Le point de vue eulérien est utile
pour se représenter mentalement et visuellement les écoulements sous forme de cartes représentant la
vitesse, la température du fluide en fonction de la position à chaque instant.

(a)

(b)

Figure 5.3 – Cartes des courants de marée dans le Golfe du Morbihan (56) (a) au maximum du flot
(phase de marée montante), (b) au maximum du jusant (phase de marée descendante). L’épaisseur et la
longueur des flèches sont proportionnelles à la vitesse du courant à ces deux moments de l’écoulement
périodique de la marée. En rouge sont représentée deux lignes de courant à ce moment du jusant.
Extrait de A. Rondeau, Pilote Côtier Quiberon-La Rochelle, ed. Praxys Marine (Paris), 1999.

Les cartes de courant de marée dans le Golfe du Morbihan reproduites sur la figure 5.3 sont
un exemple typique de représentation eulérienne du champ des vitesses des eaux marines utile aux
plaisanciers pour anticiper les conditions de navigation dans le golfe.

5.3.2 Ecoulement stationnaire, instationnaire

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Ecoulement stationnaire / instationnaire

• Un écoulement stationnaire est tel que la vitesse du fluide mesurée en chaque point fixe
dans le référentiel d’étude est indépendante du temps.
• un écoulement instationnaire est tel que la vitesse du fluide mesurée en chaque point
fixe dans le référentiel d’étude dépend notablement du temps.

Pour reprendre l’exemple de la rivière, l’écoulement de la rivière est stationnaire si Euler mesure
une vitesse constante (indépendante du temps) au pied de son pont quelle que soit la position du pont,
voir la figure 5.4. Un écoulement dit stationnaire est stationnaire du point de vue eulérien.

Lorsqu’un écoulement varie suffisamment lentement dans le temps, on pourra faire l’approximation
consistant à considérer qu’il se comporte comme un écoulement stationnaire. Ce type d’écoulement
est alors qualifié d’écoulement quasi-stationnaire.

Dans la suite, nous nous restreindrons à l’étude d’écoulements stationnaires ou qua-


sistationnaires.

Accélération d’une PF dans un écoulement stationnaire - Dans un écoulement stationnaire,


la vitesse d’une PF peut varier au cours du temps car la PF se déplace dans l’écoulement. Comme
illustré sur la figure 5.4, Lagrange ralentit dans l’élargissement de la rivière situé en aval du pont,
là où la vitesse du courant diminue par conservation du débit (voir paragraphe 5.4.2), et tourne
dans la boucle de la rivière, donc subit une accélération centripète. En revanche, Euler ne mesure
aucune variation temporelle de la vitesse qu’il mesure au pied de son pont. Il faut donc bien garder
à l’esprit que les PF peuvent parfaitement subir une accélération au sein d’un écoulement
stationnaire. A fortiori, les PF subissent des accélérations au sein d’écoulements instationnaires.

En suivant le courant, je tourne


dans la boucle et subis donc
Lagrange une accélération centripète

Je mesure une vitesse


constante au pied du pont :
Particule fluide l’écoulement est stationnaire
dans le référentiel terrestre
Euler

Lagrange

rivière Plus tard, je ralentis dans


l’élargissement de la rivière par
conservation du débit.

Figure 5.4 – Une PF peut parfaitement subir des accélérations au sein d’un écoulement stationnaire.

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5.3.3 Lignes de courant

Pour un écoulement quelconque, on appelle ligne de courant une courbe tangente en tout
point au vecteur vitesse et orientée dans le sens du vecteur vitesse a .
a. Remarque : les lignes de courant sont les lignes de champ du champ de vitesse ; elles sont pour le champ
des vitesses ce que sont les lignes de champ pour le champ électrique en électrostatique.

Les lignes de courant renseignent visuellement sur la structure de l’écoulement. Deux lignes de
courant sont représentées sur la carte des courants sur la figure 5.3 b. La ligne de courant ouverte
indique un courant sortant qui traduit la vidange du golfe dans la mer au jusant, tandis que la ligne
de courant fermée indique une recirculation dans la baie au Nord de Locmariaquer.
Au sein d’un écoulement stationnaire, les lignes de courant sont invariantes, c’est à dire qu’elles ne
se déforment pas au cours du temps. Au contraire, au sein d’un écoulement instationnaire, les lignes de
courant peuvent dépendre du temps. C’est le cas des courants de marées représentés sur la figure 5.3.
Les lignes de courant sont fondamentalement différentes des trajectoires des PF. En particulier
une ligne de courant est définie à tout instant et passe par plusieurs PF, alors qu’une trajectoire est
l’ensemble des positions occupées par une PF au cours du temps.

Propriété fondamentale des écoulements stationnaires

On admettra sans démonstration qu’au sein d’un écoulement stationnaire, les lignes de courant
et les trajectoires coïncident.

5.4 Bilans de matière


5.4.1 Généralités
Dans cette partie nous allons effectuer des bilans de matière pour un fluide en écoulement. La
méthode employée pour effectuer ces bilans est très générale en mécanique, en physique et dans
beaucoup d’autres domaines, comme la démographie, l’économie...

Méthode pour faire un bilan :


• on définit le système d’étude (une baignoire, une entreprise, la population en France)
• on identifie la grandeur G qui fait l’objet du bilan (la quantité d’eau, l’argent, le nombre d’ha-
bitants)
• on définit une durée d’étude (entre un temps initial ti et un temps final tf )
• on évalue pour cette durée d’étude quelle quantité de G
 est entrée dans le système (on la note E) ; par exemple le nombre de personnes entrées dans
le pays au cours d’une année
 est sortie du système (on la note S) ; par exemple le nombre de personnes ayant quitté dans
le pays au cours d’une année
 a été produite à l’intérieur du système (on la note P ) ; par exemple le nombre de naissance
 a disparu à l’intérieur du système (on la note D) ; par exemple le nombre de décès

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• on fait enfin la différence entre les contributions qui ont fait augmenter la quantité de G dans le
système et celle qui ont fait diminuer la quantité de G dans le système :

∆G = G(tf ) − G(ti ) = E − S + P − D

Lorsqu’il n’y a ni création ni disparition, le bilan s’écrit :

∆G = G(tf ) − G(ti ) = E − S

C’est le cas de la baignoire, dans laquelle il n’y a ni création ni disparition d’eau, mais conserva-
tion de la matière ; c’est aussi le de l’entreprise, dans laquelle il n’y a ni création ni destruction
d’argent (sauf si l’entreprise fabrique des faux billets !).

Remarque : si l’on considère un laps de temps très court (on dit aussi "infinitésimal"), que l’on note
alors dt, les quantités E et S ainsi que la variation de G sont alors aussi très petites. On note alors
dG la variation infinitésimale de G, et on note δE et δS les petites quantités (on dit aussi quantités
élémentaires) E et S.

Système - Le système est l’objet d’étude. Il s’agit en général d’un système matériel, c’est-à-dire
contenant de la matière. Définir le système conduit à identifier sa frontière, c’est-à-dire la surface de
séparation entre le système et le reste de l’univers, ce qui définit l’intérieur et l’extérieur du système.
Cette surface de séparation ne doit pas forcément être matérialisée, il suffit de la définir par la pensée :
c’est ce que l’on fait couramment lorsque l’on étudie une PF. On distingue :
• les systèmes fermés : systèmes qui n’échangent pas de matière avec l’extérieur. Leur masse est
donc constante. ex : PF. Ces systèmes peuvent échanger de l’énergie avec l’extérieur.
• les systèmes ouverts : systèmes susceptibles d’échanger de la matière et de l’énergie avec
l’extérieur. ex : le fluide contenu entre deux sections d’un tube dans lequel s’écoule du fluide.

5.4.2 Conservation de la matière et conséquences


En absence de réaction nucléaire conduisant à la création ou à l’annihilation de matière, la matière,
donc sa masse, est conservée au cours de l’écoulement d’un fluide. Nous allons établir les conséquences
de cette propriété de conservation de la matière.

Débit massique, débit volumique


Considérons un écoulement d’un fluide de masse volumique ρ de la gauche vers la droite à la vitesse
v et une surface immatérielle plane d’aire S perpendiculaire à l’écoulement, appelée section droite
de l’écoulement, schématisés sur la figure 5.5 (on suppose que la masse volumique et la la vitesse
du fluide sont homogènes le long de S).

gauche droite
v Dt S S v Dt

v v

DVgàd = S v Dt

à l’instant t à l’instant t + Dt

Figure 5.5 – Débit d’un écoulement de vitesse ~v à travers une section droite S.

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Quel est le volume de fluide traversant cette surface de la gauche vers la droite ∆Vg→d ? Le fluide
traversant cette surface durant ∆t est celui qui aura le temps d’atteindre et de traverser S entre les
instants t et t + ∆t, il est donc contenu dans un cylindre de base S et de longueur v ∆t 5 . Le débit
volumique à travers S de la gauche vers la droite Dv, g→d est par définition le volume de fluide
traversant cette surface de la gauche vers la droite par unité de temps :

∆Vg→d S v ∆t
Dv, g→d = = = Sv
∆t ∆t

La masse de fluide traversant cette surface de la gauche vers la droite ∆mg→d vaut :

∆mg→d = ρ ∆Vg→d

par conséquent, le débit massique à travers S de la gauche vers la droite Dm, g→d est donc :

∆mg→d
Dm, g→d = = ρ Dv, g→d = ρSv
∆t

Débit volumique et débit massique

Pour un fluide de masse volumique ρ s’écoulant à la vitesse v perpendiculairement à la section S :

débit volumique : Dv = S v débit massique : Dm = ρ S v = ρ Dv

Dv s’exprime en m3 /s Dm s’exprime en kg/s

Remarques :
• Le débit est une grandeur algébrique. En effet, si le fluide s’écoule de la droite vers la gauche,
le débit de la gauche vers la droite est négatif. Il faut pour cela définir un sens d’écoulement
positif.
• Si S était parallèle à l’écoulement (si S était horizontale sur la figure 5.5), aucune matière ne
traverserait S et le débit à travers S serait nul.
• Toutes ces propriétés sont contenues dans la définition plus générale du débit volumique : le
débit volumique Dv à travers S dans le sens donné par celui du vecteur surface S~ 6 est défini
comme le flux du vecteur vitesse à travers S, c’est-à-dire :

~
Dv = ~v · S

~
De même, le débit massique Dm à travers S dans le sens donné par celui du vecteur surface S
est défini comme le flux du vecteur ρ ~v à travers S, c’est-à-dire :

~
Dm = ρ ~v · S

La quantité de mouvement d’une PF de vitesse ~v , de volume V et de masse m étant p~ = m~v , le


vecteur ρ ~v vérifie ρ ~v = m
V~v = Vp~ :
⇒ ρ ~v est la quantité de mouvement par unité de volume du fluide.
5. Faisons une analogie avec une file d’attente au cinéma. Le film commençant dans ∆t = 10 min et la caisse ayant
une vitesse de traitement de v = 2 clients par minute, les spectateurs qui entreront dans la salle avant le début du film
sont inclus dans une file d’attente devant la caisse de longueur dN = v∆t = 20 personnes.
6. Rappel : le vecteur surface S~ associé à la surface plane S est S
~ = S~n où ~n est un vecteur unitaire perpendiculaire
à S (deux orientations sont possibles)

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Ecoulement isovolume
Compte tenu de l’hypothèse d’ETL 7 , au sein d’un écoulement, la pression, la masse volumique et
la température d’un fluide sont liées entre elles par l’équation d’état du fluide ρ = ρ(P, T ), que celui-ci
soit liquide ou gazeux. Or au sein d’un fluide en écoulement, la pression n’est pas homogène, donc sa
masse volumique n’est a priori pas non plus homogène : en employant le point de vue lagrangien, la
masse volumique d’une PF peut varier le long de sa trajectoire ; en employant le point de vue eulérien,
la masse volumique du fluide peut dépendre de la position et du temps.
On peut montrer qu’en absence de source de chaleur au sein du fluide (élément chauffant, réaction
chimique exothermique), tant que la vitesse d’écoulement d’un fluide est petite par rapport à la vitesse
de propagation du son c dans ce fluide, les particules fluides évoluent presque sans changer de volume,
donc presque sans changer de masse volumique : c’est l’approximation d’écoulement isovolume
(du grec isos qui signifie égal) 8 . Dans ce cas, si la masse volumique du fluide mis en mouvement est
initialement homogène, elle reste approximativement homogène au cours de son écoulement, bien que
la pression du fluide soit inhomogène 9 . Comme cair = 340 m.s−1 dans les CNTP et ceau = 1, 5 km.s−1 ,
pour la plupart des écoulements de la vie courante et de l’industrie n’impliquant pas de sources de
chaleur, on peut considérer la masse volumique du fluide en écoulement comme une constante.

Approximation de l’écoulement isovolume

Lorsque la vitesse d’écoulement d’un fluide est petite par rapport à la vitesse de propagation
du son c dans ce fluide, la masse volumique du fluide peut être considérée comme constante.
Dans la suite de cette UE, nous considérerons toujours des écoulements suffisamment lents pour
que cette approximation d’écoulement isovolume soit valable.

Conséquences de la conservation de la matière


(a) Illustration sur un réservoir - Considérons le cas d’un réservoir d’eau muni d’une entrée e
et d’une sortie s, voir la figure 5.6 a. Si le niveau d’eau dans le réservoir ne change pas, le volume
du liquide dans le réservoir est constant, et comme l’eau ne disparaît pas et n’apparaît pas dans le
réservoir, le volume d’eau entrant par l’entrée pendant la durée dt est égal au volume sortant par la
sortie pendant la même durée, donc les débits volumiques entrant et sortant sont égaux :
Dv entrant = Dv sortant
Dans l’approximation d’écoulement isovolume, l’eau étant un fluide homogène, ρe = ρs = ρ donc :
Dm entrant = ρe Dv entrant = ρDv entrant = ρDv sortant = ρs Dv sortant = Dm sortant
les débits massiques entrant et sortant sont donc aussi égaux.

(b) Généralisation à une canalisation


Ce même raisonnement peut être généralisé à une canalisation rigide limitée par son entrée et
sa sortie, voir la figure 5.6 b. En effet, comme le volume de cette canalisation est constant, le débit
volumique de fluide entrant est égal au débit volumique sortant : Dv entrant = Dv sortant . Dans l’ap-
proximation d’écoulement isovolume pour un fluide homogène, Dm entrant = Dm sortant . Cette égalité
est d’ailleurs valable que l’écoulement soit stationnaire ou dépendant du temps.
7. équilibre thermodynamique local
8. Une condition supplémentaire est que le volume total du fluide ne soit pas fixé par le dispositif : par exemple, un
fluide contenu dans une chambre et comprimé par un piston subit une diminution de volume, que la vitesse du piston
soit petite ou grande devant la vitesse du son dans le fluide.
9. Dans le cadre de cette approximation, tout se passe donc comme si la masse volumique du fluide ne variait pas
avec la pression, c’est-à-dire comme si le fluide était de compressibilité nulle ; c’est la raison pour laquelle on qualifie
souvent cette situation d’approximation de fluide incompressible, bien que cette approximation soit une conséquence du
régime d’écoulement plutôt que des propriétés intrinsèques du fluide.

12
(a)   réservoir  

(b)   canalisa0on  

tube  de  courant  

ve   lignes  de  courant  


(c)   dSe  

dSs   v
s  

Figure 5.6

(c) Généralisation à un tube de courant pour un écoulement stationnaire


Enfin, considérons un écoulement stationnaire. Les lignes de courant sont donc immobiles. Consi-
dérons une surface immatérielle élémentaire d’aire dSe au sein de l’écoulement. Le tube formé par les
lignes de courant qui passent par le bord de dSe et limité par dSe en amont et par la surface élémen-
taire d’aire dSs en aval est appelée tube de courant, voir la figure 5.6 c. Comme le tube de courant
est limité par des lignes de courant 10 , le long du tube la vitesse du fluide est tangente à la surface du
tube, donc il n’y a pas de fluide qui traverse les parois du tube de courant : le fluide n’entre et ne sort
du tube qu’à travers les sections d’entrée et de sortie du tube. Les lignes de courant étant immobiles,
le volume du fluide contenu à tout instant dans le tube de courant est constant : tout se passe comme
si le tube de courant était un tuyau matériel avec des parois solides et imperméables. Donc on peut
raisonner de la même manière sur un tube de courant que sur un tube avec des parois solides, une
entrée et une sortie fixes (canalisation) et poser l’égalité des débits volumiques élémentaires entrant
et sortant :
dDv entrant = dDv sortant
dSe et dSs étant petits, la vitesse du fluide est homogène le long de dSe et dSs , donc, en supposant
que les sections d’entrée et de sortie sont des sections droites :

dDv entrant = ve dSe


dDv sortant = vs dSs

Donc :
ve dSe = vs dSs
Dans l’approximation d’écoulement isovolume pour un fluide homogène, on a donc aussi égalité des
débits élémentaires massiques entrant et sortant :

dDm entrant = dDm sortant

10. Rappel : les lignes de courant sont tangentes au vecteur vitesse du fluide en tout point de chaque ligne de courant.

13
5.5 Dynamique des fluides
Le mot dynamique a pour étymologie grecque dynamis : puissance. La dynamique est l’étude des
forces qui sont les causes du mouvement, comme l’exprime le Principe Fondamental de la Dynamique.
Les forces qui s’exercent au sein des fluides peuvent être classées en deux catégories :
• les forces s’exerçant à distance : nous ne considérerons que le poids, c’est-à-dire l’attraction
gravitationnelle de la Terre 11 .
• les forces de contact, c’est-à-dire des forces qui n’existent qu’entre des corps en contact l’un avec
l’autre. Dans les fluides, les corps en contact peuvent être deux PF voisines ou une PF et une
paroi solide. Ces forces de contact se subdivisent en trois types :
◦ les forces de pression, déjà présentées dans l’UE Mécanique Physique 1 : elles sont présentes
que le fluide soit au repos ou qu’il s’écoule.
◦ les forces visqueuses, qui n’apparaissent qu’au sein d’un fluide en écoulement. Ces forces
s’ajoutent aux forces de pression.
◦ les forces exercées par une paroi solide sur le fluide à son contact 12 .

5.5.1 Rappel : forces de pression


Dans la suite, nous allons exprimer les forces exercées sur les PF. Celles-ci étant très petites
à l’échelle macroscopique, on utilise une notation différentielle pour désigner les grandeurs qui s’y
rapportent. Par exemple, on notera dS l’aire d’une face d’une PF, et dF~1→2 la force exercée par la PF
1 sur la PF 2. L’utilisation de cette notation indique que dS ou dF~1→2 correspondent à des grandeurs
infinitésimales (par rapport à l’échelle macroscopique).

Force de pression exercée entre 2 PF


Au sein de tout fluide, au repos ou en mouvement, la PF 1 en contact avec la PF 2 le long de la surface
−→
d’aire dS (voir la figure 5.7 a) exerce sur celle-ci une force dF 1→2 :


• normale à cette surface (donc parallèle à dS 1→2 )
• orientée de l’intérieur vers l’extérieur de la PF 1
−→
• d’intensité kdF k = P dS où P est la pression moyenne du fluide le long de la surface de contact
entre PF1 et PF2.

dS  
dS  
PF  2   PF  1  
paroi   fluide  

dF1à2  
dS1à2   dFFàP  
dSFàP  

(a)   (b)  

Figure 5.7 – (a) Force de pression exercée par une PF sur une autre PF à son contact. (b) Force de
pression exercée par une PF sur une paroi solide à son contact.

11. Il n’est en effet pas nécessaire d’être en contact avec la Terre pour subir son attraction : voir la chute libre !
12. Ces forces sont souvent déterminées en déterminant d’abord les forces exercées par le fluide sur la paroi solide et
en utilisant le principe action-réaction.

14
P est homogène à une force par unité de surface. Elle s’exprime en N · m−2 , ou de manière équivalente
en Pascal (Pa) : 1 Pa = 1 N · m−2 .

Remarques :
• ces forces de pression ont pour origine les collisions entre des molécules de la PF 1 et des molécules
de la PF2 qui se produisent au très proche voisinage de leur surface de contact.
• La pression peut être non seulement inhomogène, c’est-à-dire dépendre de la position dans le
fluide, mais aussi instationnaire lorsque le fluide s’écoule, c’est-à-dire dépendre aussi du temps :
P = P (→−r , t).
• La pression est la même de part et d’autre d’une interface entre deux fluides 13 .
• La pression de l’air atmosphérique vaut environ 105 Pa = 1 bar au niveau de la mer.

Force de pression exercée entre 1 PF et une paroi solide


Considérons une portion de paroi solide d’aire dS en contact avec une PF à la pression P (voir la
−→
figure 5.7 b). La paroi subit de la part de la PF une force de pression dF F →P :
• normale à cette surface
• orientée de la PF vers la paroi
−→
• d’intensité kdF F →P k = P dS.
−→
Par principe action-réaction, la paroi exerce sur la PF à son contact la force opposée : dF P →F =
−→
−dF F →P .

5.5.2 Forces visqueuses


Les forces visqueuses n’apparaissent qu’au sein d’un fluide en écoulement. Elles sont mises claire-
ment en évidence par l’expérience de l’écoulement de Couette plan.

Ecoulement de cisaillement de Couette plan - Cette expérience consiste à déplacer une plaque


de surface S à vitesse U constante parallèlement à une paroi immobile (voir Figure 5.8), l’espace entre
les deux plaques étant rempli par un fluide.
• Au bout d’un certain temps 14 , un profil de vitesse stationnaire parallèle 15 linéaire s’établit dans
le fluide :

− Uy →

v (y) = e x : écoulement de cisaillement
a
• On constate que la vitesse du fluide au contact de chaque paroi est égale à la vitesse de la paroi.
• Pour maintenir la plaque en mouvement uniforme, il faut lui appliquer une force horizontale.


Cette force compense la force de frottement visqueux F exercée par le fluide sur la plaque et


qui est opposée à U :



− U
F = −ηS
a
• η est appelée viscosité dynamique du fluide 16
[η] = M L−1 T −1 , s’exprime en Pa.s dans le système international.
ηeau = 10−3 Pa.s, ηair = 2.10−5 Pa.s dans les CNTP
• La paroi en mouvement est freinée par le fluide. Par principe action-réaction, la paroi exerce sur


le fluide à son contact la force − F : elle entraine le fluide dans la direction de son mouvement.
• Force visqueuses et adhérence aux parois sont deux conséquences de la viscosité du fluide.
13. Ceci est vrai tant que l’interface n’est pas trop courbée, ce que nous considérerons comme toujours vérifié dans le
cadre de cette UE.
14. La durée du régime transitoire est d’autant plus courte que la viscosité du fluide est grande. Le régime transitoire
s’observe sur les films 1_04010, 1_04015.
15. Un écoulement parallèle est un écoulement dont les lignes de courant sont parallèles.
16. La viscosité dynamique (du grec dynamis : puissance, force) relie une force à une vitesse.

15
y U
plaque en mouvement

a
fluide
x

plaque immobile

Figure 5.8 – Ecoulement de cisaillement de Couette plan

Forces visqueuses au sein du fluide

• Des forces visqueuses s’exercent aussi localement au sein du fluide en écoulement quel que soit
son profil de vitesse : considérons deux PF en contact au sein d’un écoulement parallèle de
cisaillement : la force visqueuse exercée par la PF 1 sur la PF 2 à son contact le long de la
surface d’aire dS, représentées sur la figure 5.9, lorsque deux PF glissent l’une sur l’autre est :

−→ →

v2−→ −v1
dF 1→2 = −η dS
d1−2

La PF1 freine la PF2, tandis que par principe action-réaction, la PF2 entraîne la PF1 dans son
mouvement.
• Comme les forces de pression, les forces visqueuses ont pour origine microscopique les collisions
entre les molécules le long de la surface de contact entre PF ou le long de la paroi solide en
contact avec les fluide, cf figure 5.9.
• Les forces visqueuses s’ajoutent aux forces de pression.

PF 2 V2
dF1è2
d1-2
PF 1
dS V1

Figure 5.9 – Forces visqueuses s’exerçant entre deux PF en contact au sein d’un écoulement.

16
5.6 Ecoulements
5.6.1 Types d’écoulements
Les écoulements se classent en deux catégories selon ce qui est imposé au fluide à sa frontière :
• les écoulements externes :
◦ un objet solide (ex : avion, voiture, bateau, oiseau, poisson, plancton, hélice, maison, mon-
tagne, cf. figure 5.10 b, c) de dimension caractéristique d est en mouvement relatif à la
vitesse U par rapport à un fluide illimité (la mer, la rivière, l’atmosphère, le vent).
◦ un liquide (ex : de l’eau) de profondeur caractéristique d s’écoule avec la vitesse caractéris-
tique U et est en contact avec un gaz (ex : l’air) à une pression au repos homogène (ex : la
pression atmosphérique) le long d’une surface qu’on appelle surface libre (fleuve, rivière,
mer, cf. figure 5.10 a). Le long de la surface libre, l’air est entraîné par le liquide mais la
masse volumique et la viscosité du gaz sont tellement plus faibles que celles du liquide en
écoulement que tout se passe comme si l’air était au repos et n’exerçait aucune autre force
que des forces de pression homogènes dues à sa pression au repos.
• les écoulements internes : un fluide s’écoule à la vitesse caractéristique U à l’intérieur d’une
conduite cylindrique de diamètre caractéristique d (canalisation d’eau, gazoduc, oéloduc, circu-
lation sanguine, cf. figure 5.10 d, e) : le fluide est toujours entouré de parois immobiles auxquelles
il adhère par viscosité.

5.6.2 Régimes d’écoulements


Considérons un écoulement déclenché par une différence de pression entre l’amont et l’aval. Comme
pour un point matériel et un solide, la dynamique d’une PF de masse m = ρV est déterminée par le
Principe Fondamental de la Dynamique (PFD) :

m × accélération
| {z
de la PF} = forces de pression + forces visqueuses
inertie

En isolant le terme moteur à droite et les termes dépendant de l’écoulement du fluide à gauche, le
PFD se réécrit :
inertie − forces visqueuses = forces de pression
On définit le nombre de Reynolds comme le rapport des ordres de grandeur des deux termes de
réponse du fluide à ce qui le met en mouvement :
inertie
Re =
effets visqueux
On peut montrer que ce nombre sans dimension a pour expression :

Nombre de Reynolds

ρU d Ud
Re = =
η ν
η : viscosité dynamique du fluide
ρ : masse volumique du fluide
U : vitesse du fluide
η
ν= : viscosité cinématique du fluide
ρ

Comme le montre le tableau 5.1, les écoulements usuels présentent une grande diversité de valeurs
du nombre de Reynolds.

17
Ecoulements externes Ecoulements internes

(a) (d)

(b)

(e)

artères
(c)
capillaires

Figure 5.10 – (a) Ecoulements externes : (a) d’un fleuve, (b) autour d’un planeur, (c) autour de
plancton copépode. Ecoulements internes (d) dans une conduite d’alimentation d’une centrale hydro-
électrique, (e) du réseau sanguin.

objet type dimension vitesse fluide Re


d’écoulement caractéristique caractéristique
planeur externe longueur 10 m 20 m · s−1 air 107
fleuve externe profondeur 10 m 1 m · s−1 eau 107
plancton externe 1 mm 1 mm · s−1 eau 1
copépode
conduite interne diamètre 1 m 10 m · s−1 eau 107
hydro-électrique
artère interne diamètre 2, 5 cm 10 cm · s−1 sang 40
(η = 6 · 10−3 Pa.s)
capillaire sanguin interne diamètre 10 µm 0, 5 mm · s−1 sang 10−6

Table 5.1 – Caractéristiques d’écoulements usuels.

L’observation a permis de mettre en évidence que l’allure d’un écoulement, appelée aussi le régime
d’écoulement, dépend essentiellement de la valeur du nombre de Reynolds :
◦ Ecoulements à nombre de Reynolds petit à modéré :
Pour Re . 1, c’est-à-dire lorsque les forces visqueuses dominent l’inertie du fluide, les écoule-

18
ments, qu’ils soient internes ou externes, sont laminaires : les trajectoires des PF sont parallèles
et régulières (cf. film circle1 : écoulement à Re . 1 autour d’un cylindre 17 ). Si l’écoulement en
amont est stationnaire, l’écoulement reste stationnaire. Les forces visqueuses jouent un rôle dé-
terminant dans l’écoulement. Dans la limite Re  1, ces écoulements sont décrits exactement
par l’équation de Stokes.
◦ Ecoulements à grand nombre de Reynolds :
Pour Re  1, c’est-à-dire lorsque l’inertie du fluide domine les forces visqueuses :
+ dans le cas d’écoulements externes à surface libre ou autour d’obstacles profilés (qui pré-
sentent une dimension d face à l’écoulement bien plus petite que leur longueur L, par ex :
aile, avion, oiseau, la plupart des poissons : voir la figure 5.11 a, b) : si l’écoulement en
amont est laminaire, l’écoulement reste laminaire presque partout autour de l’obstacle,
sauf dans un fin sillage derrière l’obstacle (cf. film air_foil_00_deg : écoulement à Re  1
autour d’un profil d’aile d’avion à angle d’incidence nul 18 ). Les forces visqueuses ont un
effet négligeable dans presque tout l’écoulement (hors sillage) : tout se passe comme si le
fluide possédait une viscosité nulle et glissait le long des parois solides au lieu d’adhérer :
glissement apparent. On modélise ces écoulements à l’aide du modèle d’écoulement
parfait 19 : écoulement d’un fluide sans viscosité et qui glisse le long des parois solides.
+ dans le cas d’écoulements externes autour d’obstacles non profilés (qui présentent une
dimension face à l’écoulement comparable à leur longueur, : voir la figure 5.11 c), par ex :
ballon de football, boulet de canon, aile à fort angle d’incidence (cf. films air_foil_25_deg
et 276 : écoulement à Re  1 autour d’un profil d’aile d’avion à un angle d’incidence
de 25◦ , d’un cylindre)) : le sillage occupe un volume bien plus important que dans le
cas des obstacles profilés. Dans le sillage, l’écoulement est turbulent : l’écoulement est
fortement instationnaire et présente de nombreux tourbillons ; les trajectoires des PF sont
de forme complexe, enchevêtrées. De ce fait, l’écoulement présente deux zones distinctes,
l’écoulement laminaire rapide, qui est bien décrit par le modèle d’écoulement parfait, et le
sillage turbulent, dans lequel les forces visqueuses ont un rôle déterminant. La modélisation
complète de l’écoulement est donc plus délicate.
+ dans le cas d’écoulements internes (par ex dans une conduite cylindrique), malgré la grande
valeur du nombre de Reynolds, le fait que les PF évoluent toujours au voisinage de parois qui
les freinent par viscosité implique que les forces visqueuses ne peuvent jamais être négligées.
Dans une canalisation droite, il existe de deux régimes d’écoulements :
− pour Re < 2000, l’écoulement est laminaire (film laminar2_ovrly) et est précisément
décrit par le modèle d’écoulement de Poiseuille.
− entre Re = 2000 et Re = 3000, l’écoulement présente une transition laminaire-turbulent
(film reynolds2) qui fait encore aujourd’hui l’objet de recherches actives.
− pour Re > 3000, l’écoulement est turbulent (film reynolds). Sa modélisation est de
niveau Master.
Ces différents cas de figure sont résumés dans le tableau 5.2.

5.7 Bilan d’énergie mécanique


Bilan d’énergie pour un tube de courant
Considérons un écoulement isovolume stationnaire d’un fluide homogène de masse volumique ρ.
Considérons un tube de courant limité par la surface-frontière Σ, représentée en traits pointillés rouges
17. Dans ce film, l’écoulement stationnaire laminaire d’un liquide visqueux autour d’un cylindre est matérialisé par des
particules solides qui suivent les PF, ce qui permet de visualiser des trajectoires, et par du colorant injecté continument
en amont, qui dessine des lignes d’émission. Trajectoires, lignes d’émission et lignes de courant coïncident.
18. Dans ce film, l’écoulement stationnaire laminaire d’air autour du profil d’aile est matérialisé par de la fumée injectée
continument en amont, qui dessine des lignes d’émission.
19. Appellation usuelle : "modèle d’écoulement de fluide parfait". Cette expression semble relier ce modèle à une
propriété intrinsèque du fluide, alors que l’expression "modèle d’écoulement parfait" met l’accent sur une propriété de
l’écoulement résultant de son nombre de Reynolds élevé.

19
(a)

obstacles profilés
d⌧L
L

<latexit sha1_base64="IXVmSrHMM6yfy8T8RpdzU0kUQM0=">AAACynicjVHLSsNAFD2Nr1pfVcGNm2ARXJVEF7osunHRRQX7kLZIkk5r6OTBZCKU4s4fcGn9MPEP9C+8M01BLaI3JDlz7j1n5s51Y+4n0rLecsbC4tLySn61sLa+sblV3N5pJFEqPFb3Ih6JluskjPshq0tfctaKBXMCl7OmO7xQ+eY9E4kfhddyFLNu4AxCv+97jiSq2TM7nJvV22LJKls6zHlgZ6BU2bt5ppjUouIrOughgocUARhCSMIcDhJ62rBhISauizFxgpCv8wwPKJA2pSpGFQ6xQ/oOaNXO2JDWyjPRao924fQKUpo4JE1EdYKw2s3U+VQ7K/Y377H2VGcb0d/NvAJiJe6I/Us3q/yvTvUi0ceZ7sGnnmLNqO68zCXVt6JObn7pSpJDTJzCPcoLwp5Wzu7Z1JpE967u1tH5d12pWLX2stoUH+qUNGD75zjnQeO4bJ+Uj69o0ueYRh77OMARzfMUFVyihrru8gkTvBhVQxgjYzwtNXKZZhffwnj8BGXHlRI=</latexit>
(b) d

L
non profilés
obstacles

d'L
(c)
d
<latexit sha1_base64="CLstKuh6xljY6P/rMvpk/K+44yg=">AAACzXicjVHLSsNAFD2Nr1pfVZeCBIvgqqS60GXRjQvBFuwD2yJJOq1D8zKZCKXqTvwBt/od/RPxDxR/wjvTFNQiOiHJmXPvOTP3XitweCQM4zWlTU3PzM6l5zMLi0vLK9nVtWrkx6HNKrbv+GHdMiPmcI9VBBcOqwchM13LYTWrdyTjtWsWRtz3zkQ/YC3X7Hq8w21TEHXe1psRd9mVfnKRzRl5Qy19EhQSkCtmh+WP+81hyc++oIk2fNiI4YLBgyDswERETwMFGAiIa2FAXEiIqzjDLTKkjSmLUYZJbI++Xdo1EtajvfSMlNqmUxx6Q1Lq2CaNT3khYXmaruKxcpbsb94D5Snv1qe/lXi5xApcEvuXbpz5X52sRaCDA1UDp5oCxcjq7MQlVl2RN9e/VCXIISBO4jbFQ8K2Uo77rCtNpGqXvTVV/E1lSlbu7SQ3xru8JQ248HOck6C6my/s5XfLNOlDjFYaG9jCDs1zH0Uco4QKeXt4xBOetVMt1m60u1Gqlko06/i2tIdPy0KWaQ==</latexit>

Figure 5.11 – Obstacles profilés : (a) rapace, (b) bombardier B2. (c) Obstacle non profilé : camion.

Re type régime d’écoulement réponse du fluide modèle


d’écoulement généralement observé dominante
1 externe autour d’ laminaire partout inertie écoulement parfait
obstacle profilé
ou à surface libre
1 externe autour d’ laminaire inertie écoulement parfait
obstacle non profilé + sillage turbulent + inertie & visc. + turbulence
< 2000 interne laminaire effets visqueux écoulement
de Poiseuille
> 3000 interne turbulent inertie et turbulence
effets visqueux
.1 externe ou interne laminaire effets visqueux équation de Stokes
valable pour Re  1

Table 5.2 – Régimes d’écoulements et modélisation associée

sur la figure 5.12, qui est formée en amont par une section d’entrée dSe d’altitude ze , par une surface
latérale formée de lignes de courant passant par le pourtour de la section d’entrée, et en aval par la
section de sortie dSs d’altitude zs . La vitesse du fluide traversant dSe est notée ve . La vitesse du fluide
traversant dSs est noté vs . On suppose les sections d’entrée et de sortie droites (perpendiculaires à
l’écoulement).
La conservation de la matière implique :

dDv entrant = dDv sortant

soit :
ve dSe = vs dSs = dDv
Comme du fluide s’écoule dans le tube de courant, le système constitué du fluide contenu à tout
instant dans Σ est un système ouvert, noté S : en permanence du fluide entre et sort du tube en

20
z
g vs

Système ouvert
zS dSs

Système fermé

dSe
à l’instant t ve
ze Surface frontière S
vs dt

dSs

dSe

ve dt
à l’instant t+dt

Figure 5.12

traversant Σ. Pourtant, comme l’écoulement est stationnaire, le fluide situé à l’intérieur de Σ possède
à chaque instant la même masse et la même énergie mécanique, notée E. Le bilan d’énergie pour ce
système ouvert entre deux instants proches t et t + dt s’écrit donc :

E(t + dt) = E(t) (5.1)

Considérons maintenant le fluide situé dans Σ à l’instant t, entouré en traits continus bleus et noté
S ∗ . Suivons-le durant le laps de temps dt. Ce fluide constitue donc un système fermé. Notons E ∗
son énergie mécanique, éventuellement dépendante du temps. A l’instant t, ce système fermé S ∗ est
entièrement contenu dans Σ, il coïncide avec le système ouvert S. On a donc :

E ∗ (t) = E(t) (5.2)

A l’instant t + dt, une partie du fluide appartenant à S ∗ , d’énergie dEs , est sorti de Σ par l’aval à
travers dSs , tandis que du fluide nouveau, d’énergie dEe , a pris sa place en amont en entrant par dSe
dans Σ. Relions l’énergie du système ouvert S constitué du fluide contenu dans la surface de contrôle
Σ représentée en rouge à celle du système fermé S ∗ constitué du fluide limité par la surface mobile
représentée en traits continus bleus :

E ∗ (t + dt) = E(t + dt) + dEs − dEe (5.3)

En soustrayant (5.2) à (5.3) et compte tenu de (5.1) :

E ∗ (t + dt) − E ∗ (t) = dEs − dEe (5.4)

Cette égalité relie l’énergie d’un système fermé, auquel nous pourrons appliquer le théorème de l’énergie
mécanique, à celle d’un système ouvert fixe dans les référentiels d’étude.

Application du théorème de l’énergie mécanique


Energie mécanique : Faisons l’inventaire des forces intérieures et extérieures qui s’exercent sur le
fluide en écoulement formant le système fermé S ∗ :

21
• son poids : force extérieure (exercée par la Terre sur le fluide)
• les forces de pression :
◦ forces de pression extérieures exercées par le fluide extérieur à S ∗ sur S ∗ le long de la surface
délimitant S ∗
◦ forces de pression intérieures à S ∗ , c’est-à-dire exercées par les PF de S ∗ les unes sur les
autres
• les forces visqueuses :
◦ forces visqueuses extérieures exercées par le fluide extérieur à S ∗ sur S ∗ le long de la surface
délimitant S ∗
◦ forces visqueuses intérieures à S ∗ , c’est-à-dire exercées par les PF de S ∗ les unes sur les
autres
La seule force conservative étant le poids, l’énergie mécanique du fluide a pour expression :

E = énergie cinétique + énergie potentielle de pesanteur

On rappelle que l’énergie mécanique d’un système fermé de masse m, de vitesse v et d’altitude z est :

1 1 2
 
E = mv 2 + mgz = m v + gz à une constante près
2 2

Exprimons l’énergie dEe du fluide entrant dans Σ pendant la durée dt. Son volume étant d2 Ve = dSe ve dt
(voir la figure 5.12), sa masse élémentaire d2 me a pour expression :

d2 me = ρ d2 Ve = ρ dSe ve dt

L’énergie mécanique de cette masse de fluide a donc pour expression :

1 2 1 2 1 2
     
2
dEe = d me ve + gze = ρ dSe ve dt ve + gze = ρ dDv dt v + gze (5.5)
2 2 2 e

De même, l’énergie mécanique dEs du fluide sortant de Σ pendant la durée dt s’écrit :

1 2 1 2 1 2
     
2
dEs = d ms vs + gzs = ρdSs vs dt vs + gzs = ρ dDv dt v + gzs (5.6)
2 2 2 s

Théorème de l’énergie mécanique : S ∗ étant un système fermé, l’évolution de son énergie mé-
canique E ∗ entre les instants t et t + dt obéit au théorème de l’énergie mécanique :

E ∗ (t + dt) − E ∗ (t) = δWPint + δWPext + δWVint + δWVext (5.7)

où :
• δWPint est le travail élémentaire des forces de pression intérieures
• δWPext est le travail élémentaire des forces de pression extérieures
• δWVint est le travail élémentaire des forces visqueuses intérieures
• δWVext est le travail élémentaire des forces visqueuses extérieures

Evaluation de WPint : les forces de pression intérieures sont les forces exercées par des PF intérieures
sur d’autres PF intérieures avec lesquelles elles sont en contact. L’écoulement étant supposé isovolume,
les PF ne changent pas de volume ; on admet que cela entraîne que le travail des forces de pression
intérieures est nul (démonstration rigoureuse de niveau L3) :

δWPint = 0 (5.8)

22
Evaluation de WPext :

La force de pression exercée par le fluide extérieur à la pression P sur le fluide de S le long d’une
portion de la surface Σ d’aire élémentaire dS est :
dF~ = P dS ~n
où ~n est le vecteur unitaire normal à dS orienté de l’extérieur vers S. Si le point d’application de cette
force qui est la PF sur laquelle s’exerce cette force se déplace du vecteur déplacement d~r pendant la
durée dt, le travail élémentaire δ 2 W de cette force est :
δ 2 W = dF~ · d~r
Décomposons δWPext en l’écrivant comme :

δWPext = δWPext, lat + δWPext, e + δWPext, s

où δWPext, lat est le travail des forces de pression le long de la partie latérale de Σ formée par des lignes
de courant, δWPext, e celui le long de la section d’entrée du tube de courant et δWPext, s celui le long de
sa section de sortie.

vs
Ps
ns dSs
surface de contrôle S P
v dFs
dF
dSe dFe

ve
Pe
ne

Figure 5.13

• le long de la partie latérale de Σ formée par des lignes de courant : par définition d’une ligne
de courant, le fluide s’écoule parallèlement à la ligne de courant donc parallèlement à la paroi
latérale, donc les points d’application des forces de pression extérieures se déplacent parallèlement
à la paroi latérale, voir la figure 5.13 : durant la durée dt, leur déplacement d~r = ~v dt est parallèle
à la paroi. Or les forces de pression sont perpendiculaires à la paroi donc δ 2 W = dF~ · d~r = 0.
Par conséquent :
δWPext, lat = 0
• le long de la section d’entrée du tube de courant : en notant Pe la pression du fluide le long de
la section d’entrée d’aire élémentaire dSe , la force de pression est dF~ = Pe dSe ~ne où ~ne est le
vecteur unitaire normal à la section d’entrée orienté de l’extérieur vers S, c’est-à-dire dans le sens
de l’écoulement, voir la figure 5.13 . Durant la durée dt, le déplacement du point d’application
de cette force de pression est d~r = ~ve dt. La section d’entrée étant droite, ~ne et ~ve sont colinéaires
de mêmes sens. Donc finalement :
δWPext, e = Pe dSe ~ne · ~ve dt = Pe dSe ve dt = Pe ve dSe dt = Pe dDv dt
δWPext, e > 0 : la force de pression amont est orientée dans le même sens que la vitesse du fluide,
donc la pression amont constitue un moteur du mouvement du fluide en le poussant.

23
• le long de la section de sortie du tube de courant : en notant Ps la pression du fluide le long de
la section de sortie d’aire élémentaire dSs , la force de pression est dF~ = Ps dSs ~ns où ~ns est le
vecteur unitaire normal à la section de sortie orienté de l’extérieur vers S, c’est-à-dire dans le
sens opposé à l’écoulement, voir la figure 5.13. Durant la durée dt, le déplacement du point
d’application de cette force de pression est d~r = ~vs dt. La section d’entrée étant droite, ~ns et ~vs
sont colinéaires de sens opposés. Donc finalement :

δWPext, s = Ps dSs ~ns · ~vs dt = Ps dSs vs dt = −Ps vs dSs dt = −Ps dDv dt

δWPext, s < 0 : la force de pression aval est orientée dans le sens opposé à la vitesse du fluide,
donc la pression aval constitue un frein du mouvement du fluide.
Finalement :
δWPext = dDv (Pe − Ps )dt

Evaluation de δWV int et δW ext : De manière générale, l’évaluation de ces travaux des forces
V
visqueuses nécessite une connaissance détaillée de l’écoulement. Les forces visqueuses intérieures sont
les forces visqueuses exercées par des PF intérieures sur d’autres PF intérieures en contact. Par analogie
avec les frottements internes à un vélo, dont on sait d’expérience qu’ils induisent toujours un effort
supplémentaire, on peut comprendre que le travail des forces visqueuses intérieures est toujours négatif
(démonstration rigoureuse de niveau L3) :

δWVint < 0 (5.9)

Forme finale du bilan d’énergie mécanique : En combinant (5.4), (5.5), (5.6) (5.7), (5.8), (5.9) :

1 2 1 2 δWVint + δWVext
   
dDv ρv + ρgzs + Ps − ρv + ρgze + Pe = = δPVint + δPVext (5.10)
2 s 2 e dt

où PVint est la puissance des forces visqueuses intérieures et PVext la puissance des forces visqueuses
extérieures.

Charge : on définit la charge infinitésimale dC de l’écoulement dans le tube de courant comme :

1 2
 
dC = dDv ρv + ρgz + P (5.11)
2

La charge est le débit volumique d’énergie mécanique associée à l’écoulement. Le bilan


d’énergie mécanique (5.10) se réécrit :

dCs − dCe = δPVint + δPVext (5.12)

5.7.1 Cas des écoulements parfaits


Dans les situations où l’écoulement est bien décrit par le modèle d’écoulement parfait, cela signifie
que les effets visqueux sont négligeables. Par conséquent, δPVint = δPVext = 0 et le bilan d’énergie
mécanique pour un tube de courant s’écrit :

dCs = dCe : conservation de la charge

qui se réécrit :
1 2 1
ρvs + ρgzs + Ps = ρve2 + ρgze + Pe
2 2
Ceci constitue la démonstration du théorème de Bernoulli :

24
Théorème de Bernoulli
Au sein d’un écoulement isovolume stationnaire parfait,
 
1 2
• la charge dC = dDv 2 ρv + ρgz + P de l’écoulement est conservée le long de tout tube
de courant.

• de manière équivalente : le long de toute ligne de courant, la quantité


1 2
ρv + ρgz + P est constante
2
La valeur de la constante dépend a priori de la ligne de courant considérée.

5.8 Exemples d’écoulements parfaits


5.8.1 Écoulement de Torricelli
Considérons un réservoir rempli d’eau en contact avec l’air atmosphérique le long d’une surface
libre, voir la figure 5.14a. Le réservoir se vide lentement en un jet à travers un trou situé au fond du
réservoir. Le jet débouche à l’air libre, voir la figure 5.14a et la photo b pour le cas particulier d’un
barrage hydro-électrique subissant un lâcher d’eau. Quel est le temps de vidange du réservoir ?

z SR

atmosphère
E dSE g
h
lign
ed
tu
be

e co
de

uran
co
ur
an

eau
t

dSS atmosphère
S
jet
O ST
atmosphère

(a) (b)
Figure 5.14 – (a) Schéma du réservoir. (b) Barrage hydro-électrique subissant un lâcher d’eau.

Le réservoir cylindrique a la surface SR = 1 km2 . Le trou, de section ST = 1 m2 , se trouve à


l’altitude zéro. La surface libre de l’eau se trouve à l’altitude h = h(t) qui est lentement variable.
Pour déterminer le temps de vidange du réservoir T , connaissant sa contenance initiale en eau
V0 = h(0)SR , il faut déterminer le débit volumique à travers le trou Dv . Connaissant la section de trou
ST , il reste donc à déterminer la vitesse de l’eau sortant à travers le trou VT , sachant que Dv = VT ST .
Au sens strict du terme, l’écoulement n’est pas stationnaire, puisqu’il commence à t = 0 et se
termine à t = T , et que le niveau d’eau baisse continûment. Néanmoins, l’écoulement est lent, si bien
qu’il peut être considéré comme quasi-stationnaire.
On anticipe que le nombre de Reynolds associé à l’écoulement à travers de trou est grand devant
l’unité (à vérifier a posteriori). L’eau débouchant à l’air libre sans être contrainte de s’écouler dans

25
une canalisation, l’écoulement est assimilable à un écoulement à surface libre ce qui permet donc de
le supposer parfait, voir le tableau 5.2. Enfin, on le suppose suffisamment lent pour être isovolume de
masse volumique ρ (à vérifier aussi a posteriori). Ces hypothèses permettent d’appliquer le théorème
de Bernoulli à une ligne de courant/un tube de courant bien choisis.
La surface libre descendant continûment, toute PF d’eau en contact avec la surface libre est en
mouvement à la même vitesse ḣ~uz avec ḣ < 0. L’eau sortant par le trou, quel que soit le point E
considéré de la surface libre, il existe une ligne de courant reliant ce point à un point S de la section
du trou de sortie, voir la figure 5.14a. Un tube de courant centré sur cette ligne de courant, représenté
sur la figure 5.14a, s’affine jusqu’au trou : sa section d’entrée dSE est bien plus grande que sa section
de sortie dSS . En effet, toute ligne de courant partant de la surface libre, de surface SR  ST , converge
vers le trou. Les débits volumiques d’eau étant identiques en entrée et en sortie du tube de courant,
les vitesses en entrée vE et en sortie vS du tube de courant vérifient :

vE dSE = vS dSS = dDv


dSS
donc vE = dS E
vS  vS .
D’après le théorème de Bernoulli appliqué à la ligne de courant ES :
1 2 1
ρvE + ρgzE + PE = ρvS2 + ρgzS + PS
2 2
soit :
1
ρ(vS2 − vE
2
) = ρg (zE − zS ) +PE − PS
2 | {z }
h

La pression étant la même de part et d’autre des interfaces eau-air,


• la pression de l’eau en E est égale à la pression de l’air atmosphérique Pa
• S étant situé à l’intérieur d’un jet d’eau très fin débouchant à l’air libre, il n’est pas au contact
d’une interface eau-air mais est très proche de l’interface eau-air, donc la pression de l’eau en S
est aussi égale à Pa .
Donc PE = PS = Pa .
2 ) ' 1 ρv 2 . Donc :
Comme vE  vS , 21 ρ(vS2 − vE 2 S

1 2 p
ρvS ' ρgh soit : vS ' 2gh
2
C’est la formule de Torricelli.
Comme vS ne dépend pas de la position de S le long de la section du trou, la vitesse de sortie de
l’eau est homogène le long de la section du trou. On en déduit le débit volumique sortant Dv :
p
Dv = S T vS = S T 2gh

Par définition du débit volumique, le volume d’eau sortant pendant le durée infinitésimale dt est :

dV = Dv dt

Cette sortie d’eau conduit à un abaissement −dh de la surface de l’eau dans le réservoir correspondant
au même volume :
dV = SR (−dh) = Dv dt.
Donc h vérifie l’équation différentielle suivante :
dh ST p
=− 2gh
dt SR
En séparant les variables :
dh S p
√ = − T 2g dt
h SR

26
V0
puis en intégrant cette égalité entre l’instant t = 0 auquel h = h(0) = SR et l’instant T auquel h = 0 :
Z 0
ST p
h−1/2 dh = − 2gT
V0 /SR SR

on obtient :
ST p
[2h1/2 ]0V0 /SR = − 2gT
SR
soit finalement : s
2V0 SR
T =
gST2

5.8.2 Effet Venturi


Un écoulement d’eau que l’on suppose isovolume et laminaire pour simplifier, stationnaire et de
nombre de Reynolds suffisamment grand pour pouvoir être considéré comme parfait, est établi dans une
conduite cylindrique horizontale de section S1 qui est localement rétrécie jusqu’à atteindre S2 = S1 /4
(diamètre divisé par 2), voir la figure 5.15a. La pression de l’eau en amont de la constriction vaut la
pression atmosphérique. On constate que l’eau se vaporise (ce phénomène s’appelle la cavitation) en
aval de la constriction à partir d’une certaine vitesse d’écoulement vS , voir la la figure 5.15b. On sait
que la cavitation se produit lorsque la pression de l’eau dans la constriction s’approche de zéro. Que
vaut vS ?

S1 S1 constriction
S2
v1 v2
P1 P2 cavitation
A1 A2
constriction

(a) (b)

Figure 5.15 – (a) Conduite avec constriction. (b) Cavitation d’eau du robinet à température ambiante
dans une constriction et en aval (extrait de An Album of Fluid Motion, de M. Van Dyke, Parabolic
Press, 1982).

Le débit volumique Dv est le même en tout point de la canalisation. En supposant la vitesse du


fluide homogène le long de toute section droite de la canalisation, Dv s’écrit :

Dv = S1 v1 = S2 v2

donc :
S1
v2 = v1 > v1
S2
L’écoulement vérifie les hypothèses du théorème de Bernoulli. Considérons la ligne de courant
confondue avec l’axe de révolution de la conduite. Au point A1 situé en amont de la constriction, la
vitesse du fluide vaut v1 et la pression vaut la pression atmosphérique : P1 = Pa . Donc :
1 2 1
ρv1 + ρgz1 + Pa = ρv22 + ρgz2 + P2
2 2
La conduite étant horizontale, z1 = z2 . Donc :
2 !
1 S1

Pa − P2 = ρv12 −1
2 S2

27
La cavitation se produit lorsque P2 ' 0, c’est-à-dire pour :
s 2 !−1/2
2Pa S1

v1 = vS = −1
ρ S2

Pour S1 /S2 = 4, vS = 3, 6 m · s−1 .


La cavitation peut causer de nombreux problèmes : elle génère de fortes fluctuations de pression
dans les circuits hydrauliques et est une source importante de bruit. Par ailleurs, les bulles d’air
abîment les surfaces internes des canalisations.

5.9 Ecoulements internes : perte de charge en conduite droite


Considérons l’écoulement stationnaire et isovolume d’un fluide dans une conduite droite horizontale
cylindrique de section S, de diamètre d et de longueur L  d, représentée sur la figure 5.16. Nous
supposons que le nombre de Reynolds associé à cet écoulement est inférieur à 2000, si bien que
l’écoulement est laminaire. Pour effectuer un bilan d’énergie mécanique, choisissons comme système

S
ve vs
Pe Ps
S
L

Figure 5.16

ouvert l’intégralité de la veine de fluide en écoulement, voir la figure 5.16. La différence entre le tube
de courant étudié dans la partie 5.7 et la veine de courant étudiée ici est que la veine est latéralement
en contact avec une paroi intérieure de la conduite. Par conséquent, en plus des forces de pression et
des forces visqueuses, la veine subit aussi des forces de contact de la part d’une paroi solide immobile
dont le travail WS intervient a priori dans le bilan d’énergie mécanique analogue à (5.7) :

E ∗ (t + dt) − E ∗ (t) = dEs − dEe = WPint + WPext + WVint + WVext + WS

Les parois de la conduite étant immobiles, à cause de sa viscosité, le fluide adhère à la paroi. Par
conséquent, au contact de la paroi, il est immobile. En conséquence, les points d’application des forces
exercées par le solide sur le fluide à son contact sont immobiles, donc ces forces ne travaillent pas :

WS = 0 (5.13)

Par ailleurs, on admet que :


• la pression est homogène le long de toute section droite de l’écoulement
• bien que la vitesse puisse varier le long d’une section droite de l’écoulement, la méthode mise
en oeuvre pour établir le bilan d’énergie mécanique (5.10) est applicable en remplaçant v par la
vitesse moyenne de l’écoulement hvi = DSv .
Les mêmes arguments que ceux développés pour le tube de courant conduisent à :
1
 
dEe = ρ Dv dt hve i2 + gze
2

28
1
 
dEs = ρ Dv dt hvs i2 + gzs
2
La conservation de la matière permet d’écrire :

SDv = Shve i = Shvs i = Shvi

soit :
hve i = hvs i = hvi
De plus, la conduite étant horizontale, ze = zs , donc :

E ∗ (t + dt) = E(t + dt) = dEs − dEe = 0

Par ailleurs,
WPint = 0,
WPext = Dv (Ps − Pe ) dt
WVint < 0
donc le bilan d’énergie mécanique (5.10) s’écrit :

Dv (Ps − Pe ) = Cs − Ce = PVint + PVext

Comme l’écoulement est le même tout le long de la canalisation, la puissance des forces visqueuses
extérieures exercées en amont compense celle des forces visqueuses extérieures exercées en aval, si bien
que PVext = 0. On en déduit :

Cs − Ce = PVint < 0 : il y a perte de charge entre l’amont et l’aval


qui se récrit :
PVint
Ps − Pe = < 0 : baisse de pression entre amont et aval
Dv
Le fluide en écoulement subit donc une perte de charge essentiellement due aux frottements vis-
queux internes dans les conduites longues, et qui est donc a priori proportionnelle à la longueur
de la canalisation. La valeur de cette perte de charge dépend crucialement du régime d’écoulement,
mais aussi marginalement de la rugosité des parois de la canalisation. Sa prédiction théorique faisant
toujours l’objet de recherches, pour l’évaluer on utilise plutôt des mesures de référence.
En notant V = Q S la vitesse moyenne de l’écoulement (Q le débit volumique, S l’aire de la section
droite de la conduite), la différence de pression Pe − Ps entre l’amont et l’aval d’une canalisation de
longueur L et de diamètre d a pour expression générale :

ρV 2
Pe − Ps = λL (5.14)
2d
où λ, appelé “facteur de friction”, est un nombre sans dimension fonction de Re et de ε, hauteur
moyenne des rugosités des parois de la conduite. Les variations de λ avec Re et ε/d sont représentées
sur la figure 5.17. Ces variations peuvent être approximativement décrites par intervalles comme suit :
64
• pour Re . 2000, λ décroît avec Re selon la loi λ = Re : ce régime est appelé régime de Poiseuille.
C’est le seul régime dont la description théorique soit exacte. En injectant cette expression de λ
dans l’égalité (5.14) :
V
Pe − Ps = 32µL 2
d
Pour Re . 2000, la perte de charge est donc proportionnelle à V .
• entre Re ' 2000 et Re ' 3000 se produit la transition laminaire-turbulent, qui consiste en
l’apparition au sein de l’écoulement laminaire de zones turbulentes d’extension spatiale et de
durée restreintes, de plus en plus fréquentes et envahissantes au fur et à mesure que Re augmente.
Dans cet intervalle de Re, λ, qui est de l’ordre de 0.03, augmente d’un facteur 2 environ.

29
Figure 5.17

• pour Re > 3000, l’écoulement est partout et toujours turbulent : λ décroît faiblement avec Re
puis sature à une valeur qui croît avec la rugosité de la conduite, et qui est de l’ordre de 10−2 dans
la pratique. Ceci indique que la perte de charge au sein d’un écoulement turbulent en conduite
est bien plus importante que celle qui se produirait si l’écoulement était laminaire à la même
valeur de Re : la turbulence induit une forte dissipation d’énergie par frottements visqueux.
En considérant λ comme constant :
λ V2
Pe − Ps = Lρ
2 d
Pour Re > 3000, la perte de charge est donc approximativement proportionnelle à V 2 .
On peut donc retenir de cette étude du diagramme de Moody que, de la même manière que la traînée
hydrodynamique, la perte de charge dépend de la vitesse de l’écoulement d’une manière qui dépend
de la valeur du nombre de Reynolds :
• Pour Re . 2000, la perte de charge est proportionnelle à la vitesse.
• Pour Re > 3000, la perte de charge est approximativement proportionnelle à la vitesse au carré.

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