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Texte BAC 7

Madame de Lafayette est une femme du monde lettré, elle fréquente l’hotel Rambouillet,
connu pour avoir accueilli le mouvement de la préciosité. En 1678, elle écrit La Princesse de
Clèves, relatant l’histoire de Mademoiselle de Chartres qui fait son apparition à la cour.
Celle-ci rencontre le Prince de Clèves qui devient son mari. Cependant, la princesse
rencontre le Duc de Nemours dont elle tombe éperdument amoureuse. Ce passage relate la
rencontre des 2 protagonistes du roman, la Princesse et le Duc. Cette rencontre a lieu dans
le cadre d’un bal organisé à la Cour des Valois à l’occasion de fiançailles.

Lecture à haute voix

Nous pouvons d’ores et déjà soulever la problématique suivante : En quoi cette scène de
rencontre est-elle révélatrice ? Nous pouvons décomposer le texte en 4 mouvements. Le
premier, de la ligne 1 à la ligne 12, est la rencontre et le coup de de foudre. Le deuxième
mouvement, qui s’étend de la ligne 12 à 16, relate les effets produits sur la cour. Le
troisième mouvement, de la ligne 17 à 24 est un dialogue qui en dit long. Dans le quatrième
mouvement, de la ligne 25 à la fin du texte, est le passage où l’on saisit que Nemours est
amoureux.

Le premier mouvement constitue la rencontre très attendue et le coup de foudre certain.


Déjà, comme toute héroïne, Mme de Clèves se prépare avec soin pour le bal, elle se “pare”,
pendant une journée entière. Dans la suite du texte, l’effet attendu est bien présent : Mme
de Clèves est admirée, aussi bien pour sa beauté naturelle que pour le soin qu’elle a
apporté à son apparence : “l’on admira sa beauté et sa parure”. Or, il en est de même pour
Nemours qui agit exactement comme la princesse, ils se ressemblent donc par leur beauté
et par l’importance donnée à leur apparence : “le soin qu’il avait pris à se parer”. Ensuite,
l’effet d’attente est maintenu chez le lecteur : la rencontre n’est pas immédiate, elle est
différée par l’entrée en scène de Nemours, qui est assez remarquée d’où l’hyperbole “un
assez grand bruit”. Puis, le destin s’accomplit, la princesse semble entièrement étrangère à
ce qui va se produire, puisqu’elle recherche un partenaire, et que le roi lui en impose un,
mais comme si une prophétie s’accomplissait : la plus belle femme doit rencontrer le plus bel
homme. La vue engendre le coup de foudre comme indique la polyptote du verbe voir “vit”,
“voir”, “vu”. Ces polyptotes sont employées pour les deux héros, Il s’agit bien d’un coup de
foudre : ils s’aiment au premier regard. Le coup de foudre est révélé également par l’effet
produit sur chacun des personnages : Clèves est “surprise” et Nemours ressent “un grand
étonnement”. Mais aussi, ils se rapprochent par leur beauté ainsi en est-il du champ lexical
“sa beauté”, “sa parure” pour la princesse, ou encore “l’air brillant” pour Nemours. Enfin, le
point de vue interne glisse ici vers Nemours : le lecteur découvre l’effet produit par cette
rencontre. L’hyperbole “tellement surpris” reflète son sentiment. De plus, les deux héros
dansent ensemble ce qui rapproche leurs corps alors même qu’ils ne se connaissent pas.
Mais Nemours n’a pas l’habitude de masquer ses sentiments comme le fait la princesse :
son admiration est visible, il dit : “il ne put s’empêcher”.

Dans un deuxième mouvement, nous allons étudier les effets produits sur la cour par cette
rencontre.
En effet, l’évènement exceptionnel est visible par tous et rien n’échappe au regard de la
cour. A présent, le point de vue du roi et de la reine nous est donné, d’où le terme mélioratif
qui désigne les deux danseurs : “louanges”. Là encore, comme Nemours, la cour ne peut
s’empêcher de donner des marques d’admiration d’où le mot “murmure” : on ne peut qu’en
parler. Leur point de vue est évoqué par les verbes de pensée “souvinrent” et “trouvèrent”.
Ces personnages interviennent dans l’accomplissement du destin et décident pour les deux
héros : le roi a ordonné à la princesse de prendre nemours comme partenaire, à présent, ils
les appellent. La princesse et Nemours sont obligés de s’exécuter, ils n’ont aucun pouvoir
sur leurs actes.
Cette scène de bal finit par ressembler à une scène de théâtre où la cour joue le rôle de
spectateur qui observent et jugent face aux deux héros entrée en scène.

Le troisième mouvement est un dialogue qui en dit long.


A travers ce dialogue, les sentiments transparaissent. En effet, le dialogue est entrepris par
la reine dauphine, il est vrai de dire que les deux héros ne s'adressent jamais la parole, ils
répondent chacun leur tour à la dauphine. Nemours déclare clairement l’intérêt qu’il porte à
la princesse en faisant un compliment tout en paraissant modeste : il feint de ne pas
connaître la bonne réputation qui court à son sujet. En revanche, il rend hommage à la
beauté de la princesse “que celles que j’ai pour la reconnaître". Ensuite, la dauphine traduit
les pensées de la princesse, qui, par pudeur et vertu ne peut admettre le connaître : cela
signifierait qu’elle le trouve beau, or elle est mariée, d’où la négation et l’adverbe d’intensité
“si”, “je ne devine pas si bien”. Et elle emploie un terme mélioratif sous la forme d’une litote
pour signifier cet intérêt de la princesse : “il y a même quelque chose d’obligeant pour M. de
Nemours”. Elle sent la réticence de la princesse en employant le terme “avouer”. La
dauphine est en quelque sorte une entremetteuse qui rapproche les deux héros et révèle à
Nemours que cette dernière n’est pas indifférente, nous le voyons avec les expressions “elle
le sait aussi bien que vous le savez” et “vous devinez fort bien”.

A présent, dans ce quatrième mouvement, nous saisissons que Nemours est amoureux.
Nous percevons que le duc est troublé. A nouveau , la dauphine agit en reine : elle coupe
court au dialogue “elle les interrompit”. L’hyperbole “la beauté parfaite” qui souligne la
grande beauté de la dauphine ne touche pas Nemours ce qui montre l’importance du coup
de foudre. De plus, la négation restrictive souligne que le duc a l’esprit occupé par la
princesse “il ne put admirer que Mme de Clèves”

Par conséquent, nous assistons à une rencontre romanesque, prédestinée, mais détournée
par le jeu social. Cette rencontre laisse également apparaître de profondes différences entre
les personnages par-delà leurs points communs. Tout d’abord, les sentiments des deux
héros ne sont pas exactement les mêmes, Nemours manifeste de l’étonnement, de la
surprise et son admiration, mais la princesse se montre embarrassée. Mais encore, leurs
discours et leurs comportements diffèrent : la princesse respecte la bienséance, Nemours,
quant à lui, fait preuve de hardiesse, voire de désinvolture. Il n’a pas à se cacher,
contrairement à elle. Ce qui s’apparentait d’abord à un conte de fées peut donc être perçu
comme le début d’une tragédie.

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