Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
FACILE
John R. Hampton
DM MA DPhil FRCP FFPM FESC
Emeritus Professor of Cardiology,
University of Nottingham, Royaume-Uni
TRADUCTION DE LA 8e
ÉDITION ANGLAISE
François Jan
Cardiologue, Professeur honoraire de médecine
interne à la faculté de médecine de Créteil
(Paris XII)
Ce logo a pour objet d’alerter le lecteur sur la menace que représente pour l’avenir de
l’écrit, tout particulièrement dans le domaine universitaire, le développement massif
du « photo-copillage ». Cette pratique qui s’est généralisée, notamment dans les éta-
blissements d’enseignement, provoque une baisse brutale des achats de livres, au point
que la possibilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire
éditer correctement est aujourd’hui menacée.
Nous rappelons donc que la reproduction et la vente sans autorisation, ainsi que le
recel, sont passibles de poursuites. Les demandes d’autorisation de photocopier doi-
vent être adressées à l’éditeur ou au Centre français d’exploitation du droit de copie :
20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris. Tél. 01 44 07 47 70.
Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays.
Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées dans
le présent ouvrage, faite sans l’autorisation de l’éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont autorisées,
d’une part, les reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation col-
lective et, d’autre part, les courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d’information de l’œuvre dans
laquelle elles sont incorporées (art. L. 122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle).
L’éditeur ne pourra être tenu pour responsable de tout incident ou accident, tant aux personnes qu’aux biens, qui
pourrait résulter soit de sa négligence, soit de l’utilisation de tous produits, méthodes, instructions ou idées décrits
dans la publication. En raison de l’évolution rapide de la science médicale, l’éditeur recommande qu’une vérification
extérieure intervienne pour les diagnostics et la posologie.
L’édition originale, The ECG Made Easy, 8th edition (ISBN 978-0-702-04641-4), a été publiée par Churchill
Livingstone, une marque d’Elsevier Limited.
This edition of The ECG Made Easy, 8th edition, by John R. Hampton is published by arrangement with Elsevier.
L’ECG facile a été publié pour la première fois en sans la moindre connaissance du fonctionne-
1973, et plus d’un demi-million d’exemplaires ment du moteur, tout comme les jardiniers
des sept premières éditions ont été commercia- n’ont nul besoin d’être botanistes, la plupart
lisés. Ce livre a été traduit en allemand, français, des gens peuvent se servir utilement de l’ECG
espagnol, italien, portugais, polonais, tchèque, sans être submergés de notions complexes. Ce
indonésien, japonais, russe et turc et aussi en livre encourage le lecteur à accepter que l’ECG
chinois simplifié et en chinois traditionnel. soit facile à comprendre et que son utilisation
Les objectifs de cette nouvelle édition sont les soit juste un complément naturel de l’histoire
mêmes qu’auparavant : cet ouvrage n’a pas de la maladie rendant l’examen physique plus
pour objectif d’être un document d’électrophy- performant.
siologie accessible à tous, ni même simplement La 1re édition de L’ECG facile (1973) a été
un ouvrage destiné à l’interprétation de l’ECG reconnue dans le British Medical Journal comme
– il est censé faire office d’introduction à l’ECG un « classique médical ». Il a été l’ouvrage
pour les étudiants en médecine, les techniciens, préféré de générations d’étudiants en méde-
les infirmiers et les auxiliaires médicaux. Il peut cine et d’infirmiers et a beaucoup évolué au
également fournir une révision utile à ceux qui cours des éditions successives. Cette hui-
ont oublié ce qu’ils avaient appris du temps où tième édition diffère des précédentes par sa
ils étaient étudiants. division en deux parties. La première, « les
Il n’y a aucune raison de laisser prise au bases », explique l’ECG de la manière la plus
découragement face à un ECG : tout comme simple possible. Elle peut être considérée
beaucoup de gens conduisent une automobile comme une partie indépendante du reste de
VII
Avant-propos
l’ouvrage. Elle présente les aspects fondamen- l’histoire clinique et l’examen physique du
taux de l’enregistrement, du compte rendu patient et l’ECG, et également des nombreuses
et de l’interprétation de l’ECG, ainsi que variantes de l’ECG observées chez les sujets
les anomalies classiquement rencontrées. La en bonne santé et les malades. L’ouvrage 150
seconde partie, « Comment utiliser au mieux problèmes d’ECG étudie 150 cas cliniques et
l’ECG », a été développée et divisée en trois fournit les ECG dans leur totalité, incitant le
chapitres. Elle met en avant le fait que l’ECG lecteur à interpréter les enregistrements et à
est un simple outil permettant le diagnostic décider du traitement avant d’aller consulter
et le traitement des patients, et qu’il doit être les réponses.
interprété à la lumière de l’histoire clinique et Il me faut témoigner de mon extrême grati-
de l’examen physique du patient chez qui il a tude envers Alison Gale, mon éditeur, qui, au
été enregistré. Les variations qui peuvent être début, savait peu de choses de l’ECG, mais a
rencontrées dans les situations au cours des- fini par en reconnaître la simplicité, et qui
quelles l’ECG est le plus couramment utilisé a fait d’innombrables suggestions pour en amé-
sont traitées dans des chapitres séparés consa- liorer le texte. Laurence Hunter, chez Elsevier,
crés à des sujets en bonne santé (chez lesquels et Rich Cutler d’Helius ont été d’une aide
on observe d’importantes variantes de la nor- majeure pour la réalisation de cette nouvelle
male) et à des patients souffrant de douleurs édition. Le titre L’ECG facile fut suggéré il y a
thoraciques, de dyspnée, de palpitations ou de plus de 30 ans par le regretté Tony Mitchell,
syncopes. professeur de médecine à l’université de Not-
Cette édition est plus volumineuse que la tingham, et depuis cette époque, de nombreux
précédente, ce qui ne signifie pas que l’ECG est ouvrages ont été publiés sous le titre « Facile ».
devenu plus difficile à comprendre. Je lui en suis reconnaissant ainsi qu’à tous ceux
L’ECG facile a pour but d’aider les étu- qui ont fourni leur aide pour peaufiner ce livre
diants à préparer leurs examens, mais pour d’année en année, en particulier à tous les
améliorer leurs compétences cliniques – et étudiants qui, par leurs critiques constructives
leur assurance – il n’existe rien de mieux et leurs utiles commentaires, ont renforcé ma
que la référence à un grand nombre de cas conviction que l’ECG est réellement facile à
cliniques commentés. Deux ouvrages complé- comprendre.
mentaires peuvent aider ceux qui ont maîtrisé
L’ECG facile et veulent encore progresser. La John Hampton
pratique de l’ECG traite des rapports entre Nottingham 2013
VIII
Les bases re
1
Les notions fondamentales
de l’enregistrement, du compte rendu
et de l’interprétation de l’ECG
partie
Avant de pouvoir utiliser l’ECG comme aide La première partie explique également
au diagnostic ou au traitement, il vous faut en comment l’ECG peut être utilisé pour mesurer
comprendre les bases. La première partie de la fréquence cardiaque, pour évaluer la vitesse
cet ouvrage explique pourquoi l’activité élec- de conduction électrique à travers différentes
trique du cœur peut être enregistrée sous forme parties du cœur, et pour déterminer le rythme
de tracé électrocardiographique, et apporte la cardiaque. Les causes des anomalies les plus
signification des 12 « dérivations » de l’ECG qui courantes seront évoquées.
donnent une « image » de l’activité électrique
observée dans différentes directions.
1
L’ECG : de quoi s’agit-il ? 1
Ce qu’il faut attendre de L’ECG 3 CE QU’IL FAUT ATTENDRE DE L’ECG
L’électricité cardiaque 4
Le diagnostic clinique dépend en grande
Les différents éléments de L’ECG 5 partie de l’histoire de la maladie et, à un moin-
dre degré, de l’examen physique. L’ECG peut
L’ECG : Représentation électrique 9
apporter la confirmation de l’hypothèse diag-
La morphologie du complexe QRS 11 nostique et, dans certains cas, il est indispen-
sable à la prise en charge du patient. Toutefois,
Réaliser un enregistrement : en pratique 19
il est important de se représenter l’ECG comme
Comment réaliser un compte rendu d’ECG 32 un outil et non comme une fin en soi.
L’ECG est essentiel au diagnostic et, par
voie de conséquence, à la prise en charge des
Le terme « ECG » désigne soit l’électrocardio-
anomalies du rythme cardiaque. Il aide au diag-
gramme, soit l’appareil – l’électrocardiographe –
nostic étiologique des douleurs thoraciques, et
qui sert à l’enregistrer. Dans certains pays, l’abré-
l’utilisation adéquate de thérapeutiques inter-
viation utilisée est « EKG ». Souvenez-vous de ceci :
ventionnelles précoces dans le traitement de
• lorsque vous aurez terminé la lecture de ce l’infarctus du myocarde repose sur lui. Il peut
livre, vous devrez pouvoir dire : « il est aider au diagnostic étiologique des dyspnées.
facile d’apprendre l’ECG. » Et vous devrez Avec de l’entraînement, l’interprétation
en être persuadé ; de l’ECG est affaire de reconnaissance d’un
• beaucoup d’anomalies de l’ECG modèle. Toutefois, l’ECG peut être analysé à
sont accessibles au raisonnement. partir de principes de base si l’on se souvient 3
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
L’ÉLECTRICITÉ CARDIAQUE
Fig. 1.3
dirigée vers le haut est appelée « onde R », qu’elle grand carreau possède une fréquence de 300/
soit précédée ou non d’une onde Q (figures 1.3b min. La fréquence cardiaque peut être calculée
et 1.3c). Toute déflexion située au dessous de la rapidement en se souvenant de la relation avec
ligne de base et faisant suite à une onde R est l’intervalle R-R montrée au tableau 1.1.
appelée « onde S », qu’elle ait ou non été précé- De même que la longueur du papier entre
dée d’une onde Q (figures 1.3d et 1.3e). deux ondes R fournit la fréquence cardiaque,
la distance entre les différentes parties du
TEMPS ET VITESSES complexe P-QRS-T indique le temps mis pour
Les électrocardiographes enregistrent les modi- que la décharge électrique s’étende aux diffé-
fications de l’activité électrique en inscrivant un rentes parties du cœur.
tracé sur une bande de papier se déroulant. Les L’intervalle PR2 est mesuré à partir du début de
électrocardiographes ont une vitesse de dérou- l’onde P jusqu’au début du complexe QRS ; c’est
lement standard de 25 mm/s et utilisent un le temps nécessaire à l’influx pour diffuser à partir
papier quadrillé standard. Chaque grand car- du nœud sinusal à travers le muscle auriculaire et le
reau (5 mm) représente 0,2 s soit 200 millièmes nœud AV, descendre le long du faisceau de His et
de seconde (200 ms) (figure 1.4). Par consé- gagner le muscle ventriculaire. Il devrait logique-
quent, il y a 5 grands carreaux par seconde et ment s’appeler « intervalle PQ » mais on le nomme
300 par minute. C’est pourquoi un évènement habituellement « intervalle PR » (figure 1.5).
ECG tel qu’un complexe survenant une fois par 2
Ou « espace » PR (NdT).
Fig. 1.4
Relation entre les carreaux du papier ECG et le temps. Sur ce tracé, il existe un complexe
QRS par seconde, la fréquence cardiaque est donc de 60 battements par minute
6
Les différents éléments de L’ECG 1
Fig. 1.5 Tableau 1.1 Relation entre le nombre de grands
carreaux situés dans l’intervalle R-R et la fréquence
Les éléments du complexe ECG cardiaque.
L’intervalle PR normal se situe entre 120 et une conduction anormalement rapide des
200 ms, représenté par 3 à 5 petits carreaux. oreillettes aux ventricules.
Une grande partie de ce temps est consacré au La durée du complexe QRS indique le temps
passage de l’influx dans le nœud AV (figure 1.6). mis par l’influx pour diffuser dans les ven-
Si l’intervalle PR est très court, ou bien les tricules. La durée de QRS est normalement
oreillettes ont été dépolarisées à partir d’une de 120 ms (représentée par 3 petits carreaux),
zone très proche du nœud AV, ou bien il existe voire moins, mais toute anomalie de conduction
Fig. 1.6
7
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
Fig. 1.7
8
L’ECG : Représentation électrique 1
ceux qui aimeraient en connaître le mécanisme,
L’ECG : REPRÉSENTATION ÉLECTRIQUE
il est conseillé de consulter le tableau 1.2. L’élec-
trode reliée à la jambe droite sert d’électrode
Le mot « dérivation » peut être à l’origine de
« de terre » et ne participe à aucune dérivation.
confusion. Il est parfois utilisé pour désigner
les fils métalliques qui connectent le patient à L’ECG 12 DÉRIVATIONS
l’électrocardiographe. En réalité, une « dériva-
tion » n’est rien d’autre qu’une représentation L’interprétation de l’ECG est facile si vous vous
électrique du cœur. souvenez des directions dans lesquelles les dif-
Le signal électrique provenant du cœur est férentes dérivations regardent le cœur. On peut
détecté à la surface du corps par l’intermédiaire imaginer que les six dérivations « standards »
d’électrodes reliées à l’électrocardiographe par qui sont raccordées aux électrodes fixées aux
des fils de métal. Une électrode est fixée à chaque membres regardent le cœur de côté dans un
membre et six sont placées sur la poitrine. plan vertical (figure 1.9).
L’électrocardiographe compare l’activité élec-
trique détectée par les différentes électrodes, et Tableau 1.2 Dérivations de l’ECG.
l’image électrique ainsi obtenue est appelée « déri-
vation ». Ces dérivations « regardent » le cœur Dérivation Connexions
dans plusieurs directions différentes. Par exemple, DI BG et BD
quand l’appareil enregistreur est programmé sur
DII JG et BD
« DI », il enregistre les évènements électriques
détectés par les électrodes fixées sur les bras DIII JG et BG
gauche et droit. Chaque dérivation fournit une vue VR BD et résultante de (BG + JG)
différente de l’activité électrique du cœur et, par
conséquent, une image électrique différente. Il fau- VL BG et résultante de (BD + JG)
drait, stricto sensu, nommer chaque image ECG VF JG et résultante de (BG + BD)
« dérivation », mais souvent ce terme est omis.
V1 V1 et résultante de (BG + BD + JG)
L’ECG est fait de 12 vues caractéristiques du
cœur, six provenant des électrodes fixées aux V2 V2 et résultante de (BG + BD + JG)
membres3 (DI, DII, DIII, VR, VL, VF) et six des V3 V3 et résultante de (BG + BD + JG)
électrodes fixées sur la poitrine4 (V1-V6). Il n’est
pas nécessaire de se souvenir comment les déri- V4 V4 et résultante de (BG + BD + JG)
vations (qui représentent les « vues » du cœur) V5 V5 et résultante de (BG + BD + JG)
sont reliées à l’appareil enregistreur, mais pour
V6 V6 et résultante de (BG + BD + JG)
3
Dérivations « standards » (NdT).
4
Dérivations « précordiales » (NdT). BG : bras gauche ; BD : bras droit ; JG : jambe gauche 9
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
Fig. 1.9
Les dérivations DI, DII et VL regardent la latérale gauche du cœur. Ainsi, les dérivations
face latérale gauche du cœur, les dérivations V1 et V2 regardent le ventricule droit, V3 et
DIII et VF la face inférieure, et la dérivation VR V4 regardent le septum interventriculaire et la
regarde l’oreillette droite. paroi antérieure du ventricule gauche, et V5 et
Les six dérivations « V » (V1-V6) regardent, V6 regardent les parois antérieure et latérale du
dans un plan horizontal, les faces antérieure et ventricule gauche (figure 1.10).
10
La morphologie du complexe QRS 1
Fig. 1.10
Fig. 1.11
12
La morphologie du complexe QRS 1
direction moyenne dans laquelle l’onde de dépo- 5 h d’une horloge virtuelle ; ainsi, la déflexion
larisation gagne les ventricules (figure 1.12). en VR est-elle normalement dirigée vers le bas
Si le complexe QRS est dirigé vers le haut de (négative) alors qu’en DII, la déflexion est diri-
manière prédominante – en d’autres termes, si le gée vers le haut (positive) (figure 1.13).
complexe QRS est « positif » (l’onde R est plus La direction moyenne de l’ensemble de
ample que l’onde S) – l’onde de dépolarisation se l’onde de dépolarisation à travers les ventri-
dirige vers l’électrode (figure 1.12a). Si QRS est cules, vue de face, est appelée « axe cardiaque ».
dirigé vers le bas de manière prédominante (onde Il est utile de préciser si l’axe est de direction
S plus ample que l’onde R), l’onde de dépolarisa- normale ou non. L’axe électrique du cœur peut
tion s’éloigne de l’électrode (figure 1.12b). Quand être facilement calculé à partir des complexes
l’onde de dépolarisation se déplace perpendiculai- QRS des dérivations DI, DII et DIII.
rement à l’électrode, les ondes R et S sont de taille Un axe normal, se situant entre 11 h et 5 h,
identique (figure 1.12c). Les ondes Q, lorsqu’elles signifie que l’onde de dépolarisation se dirige
sont présentes, ont une signification particulière vers les dérivations DI, DII, et DIII, et qu’elle est
dont il sera discuté plus loin. par conséquent associée à une déflexion positive
dans ces trois dérivations ; la déflexion sera plus
élevée en DII qu’en DI ou DIII (figure 1.14).
L’AXE DU CŒUR Quand les ondes R et S du complexe QRS
Les dérivations VR et DII regardent le cœur dans sont égales, l’axe cardiaque forme un angle
des directions opposées. Lorsqu’elle est vue de droit avec cette dérivation.
face, l’onde de dépolarisation s’étend norma- Lorsque le ventricule droit est hypertro-
lement à travers les ventricules entre 11 h et phié, son influence sur le complexe QRS sera
Fig. 1.12
Fig. 1.17
Fig. 1.16
15
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
axiale gauche. De même, si la taille de l’onde R importante que celle de la paroi ventriculaire
est égale à celle de l’onde S en DI, l’axe forme un droite, et c’est pourquoi le ventricule gauche
angle droit avec DI, l’angle étant de +90°. Il s’agit exerce sur l’aspect ECG une influence plus
là de la limite de normalité de la rotation axiale importante que celle du ventricule droit.
vers la droite. Si l’onde S est plus ample que l’onde
Les dérivations V1 et V2 regardent le ventri-
R en DI, l’axe est supérieur à 90°, confirmant la
cule droit ; les dérivations V3 et V4 regardent le
déviation axiale droite (figure 1.15).
septum ; et les dérivations V5 et V6 le ventricule
gauche (figure 1.10).
POURQUOI S’INTÉRESSER La déflexion d’une dérivation ventriculaire
À L’AXE DU CŒUR ? droite est d’abord dirigée vers le haut (onde R)
alors que le septum est dépolarisé. On observe un
Les dérivations axiales gauche et droite sont
aspect inverse dans les dérivations ventriculaires
en elles-mêmes rarement significatives – dévia-
gauches : il existe une petite déflexion négative
tions de quelques degrés entre sujets grands
(onde « Q » septale) (figure 1.18).
et minces d’une part, obèses et de petite taille
d’autre part. Cependant, la présence d’une
déviation axiale devra vous alerter et vous Fig. 1.18
pousser à rechercher d’autres signes d’hyper- Morphologie du complexe QRS : première
trophie droite ou gauche (voir le chapitre 4). étape
Une déviation axiale droite peut évoquer une
embolie pulmonaire et une déviation axiale
gauche, un trouble de conduction.
LE COMPLEXE QRS
DANS LES DÉRIVATIONS PRÉCORDIALES
La morphologie du complexe QRS des dériva-
tions précordiales (V) est déterminée par deux
conditions :
• le septum interventriculaire est dépolarisé
avant les parois des ventricules, et l’onde
de dépolarisation s’étend à travers le
septum de gauche à droite ;
• dans un cœur normal, la masse musculaire
16 de la paroi ventriculaire gauche est plus
La morphologie du complexe QRS 1
Dans les dérivations ventriculaires droites, Quand la totalité du myocarde est dépo-
il existe ensuite une déflexion négative (onde S) larisée, le tracé ECG regarde la ligne de base6
alors que la masse musculaire la plus importante (figure 1.20).
est dépolarisée – en effet, l’influence électrique du Le complexe QRS, en dérivations précor-
ventricule gauche, plus volumineux, l’emporte sur diales, montre une progression de V1, où il
celle du ventricule droit, plus petit (l’onde de dépo- est à prédominance négative, à V6 où il est à
larisation partie de la gauche s’éloigne de l’élec- prédominance positive (figure 1.21). La zone de
trode située face au ventricule droit). Dans une « transition » où les ondes R et S sont d’ampli-
dérivation ventriculaire gauche, la déflexion est tude identique indique l’emplacement du sep-
dirigée vers le haut (onde R) au cours de la dépola- tum interventriculaire.
risation du muscle ventriculaire (figure 1.19).
6
Ligne « isoélectrique ». (NdT).
17
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
Fig. 1.21
18
Réaliser un enregistrement : en pratique 1
POURQUOI S’INTÉRESSER À LA ZONE qui vont suivre ont tous été enregistrés chez
DE TRANSITION ? le même sujet en bonne santé, dont l’ECG,
Si le ventricule droit est augmenté de volume, considéré comme « idéal », est représenté sur la
et occupe une surface précordiale supérieure figure 1.22.
à la normale, la zone de transition sera déviée Il est de la plus grande importance de s’assurer
de sa position normale en V3-V4 vers V4-V5 ou que l’électrode étiquetée BG est bien fixée au bras
parfois V5-V6. Comme on le verra plus loin, gauche, BD au bras droit et ainsi de suite. Si les élec-
on peut imaginer que le cœur a tourné dans le trodes des membres sont incorrectement placées, le
sens des aiguilles d’une montre7. Cette rotation tracé 12 dérivations paraîtra bizarrement anormal
« horaire » est caractéristique des pneumopa- (figure 1.23). L’interprétation du tracé est cepen-
thies chroniques. dant possible mais il est plus facile de reconnaître
l’erreur et de pratiquer un autre enregistrement.
L’inversion des électrodes des membres infé-
RÉALISER UN ENREGISTREMENT : rieurs ne provoque que peu de différence sur le
EN PRATIQUE tracé ECG.
Il est indispensable que les électrodes tho-
Désormais, vous savez à quoi ressemble un ECG, raciques soient positionnées avec précision de
et vous en connaissez le mécanisme. Il nous faut manière à pouvoir identifier des aspects anor-
maintenant réfléchir à l’aspect pratique de la maux dans ces dérivations, et à pouvoir compa-
réalisation de l’enregistrement. Certains – mais rer des enregistrements effectués à des moments
pas tous – appareils ECG fournissent « un tracé différents. Il faut déterminer l’emplacement du
de rythme8 », qui est un enregistrement continu, deuxième espace intercostal en recherchant
habituellement de DII. Ceci est particulièrement l’angle sternal – c’est le point où se rejoignent le
utile quand le rythme est anormal. Les tracés manubrium et le corps du sternum, et il existe
habituellement une arête palpable indiquant
le début du corps du sternum, formant avec le
7
Rotation « horaire » (NdT). manubrium un angle s’ouvrant vers le bas. La
8
« DII long » (NdT). deuxième côte est reliée au sternum au niveau
19
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
Fig. 1.22
de cet angle et le deuxième espace intercostal de palper le troisième puis le quatrième espace
se situe immédiatement au-dessous. Après avoir intercostal où les électrodes V1 et V2 seront
identifié cet espace, la palpation vous permet respectivement fixées, à droite et à gauche du
20
Réaliser un enregistrement : en pratique 1
Fig. 1.23
sternum. Les autres électrodes seront placées du pli cutané qui marque le devant de l’aisselle)
comme il est indiqué sur la figure 1.24, avec et V6 sur la ligne axillaire moyenne.
V4 sur la ligne médioclaviculaire (ligne verticale Un bon contact électrique entre les élec-
imaginaire partant du milieu de la clavicule) ; trodes et la peau est indispensable. Les effets
V5 sur la ligne axillaire antérieure (ligne partant sur le tracé ECG d’un mauvais contact cutané
21
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
sont visibles sur la figure 1.25. La peau doit être électrodes soient appliquées. L’abrasion de la
propre et sèche – la peau des patients utilisant peau est essentielle ; chez la plupart des patients
différentes pommades ou crèmes hydratantes on peut se contenter de frotter la peau avec
(patients souffrant d’affections dermatolo- un mouchoir de papier. Au cours des épreuves
giques, par exemple) devra être nettoyée à d’effort, lorsque le patient risque d’être cou-
l’alcool ; l’alcool devra être essuyé avant que les vert de sueur, des tampons abrasifs peuvent
Fig. 1.24
22
Réaliser un enregistrement : en pratique 1
être utilisés – lorsque ces tests sont pratiqués, l’apprécient guère – on peut à la rigueur écarter
il est préférable de passer du temps à assurer les poils pour assurer un bon contact des élec-
un bon contact, car, dans de nombreux cas, le trodes. Après rasage, la peau devra être nettoyée
tracé peut devenir pratiquement ininterprétable à l’alcool ou à l’aide d’une lingette imbibée de
en fin d’examen. Les poils sont de mauvais savon.
conducteurs du signal électrique et empêchent Même avec le meilleur des électrocardio-
les électrodes d’adhérer à la peau. Le rasage graphes, des interférences électriques peuvent
est préférable, quoique certains patients ne provoquer des oscillations régulières du tracé
Fig. 1.25
Fig. 1.26
24
Réaliser un enregistrement : en pratique 1
tueux, les complexes ECG apparaîtront trop cœur. C’est pourquoi il est indispensable de
grands ou trop petits (figures 1.27 et 1.28). s’assurer que l’étalonnage est correct.
De grands complexes peuvent prêter à confu- Les électrocardiographes sont normalement
sion avec une hypertrophie ventriculaire gauche conçus pour un déroulement du papier à la
(voir le chapitre 4) et de petits complexes peu- vitesse de 25 mm/s, mais avec la possibilité de
vent suggérer la présence d’un épanchement passer à des vitesses plus lentes (qui donnent un
péricardique réduisant le signal électrique du aspect de complexes acuminés et resserrés) ou
Fig. 1.27
25
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
Fig. 1.28
de 50 mm/s (figures 1.29 et 1.30). La vitesse tend à les masquer, et c’est pourquoi cette
accélérée, avec une impression « d’étalement » vitesse accélérée est rarement utile.
de l’ECG, est régulièrement utilisée dans cer- Les électrocardiographes sont « accor-
tains pays européens. Théoriquement, cela peut dés » à la fréquence électrique générée par
rendre plus facile l’identification des ondes P, le muscle cardiaque, mais ils peuvent égale-
mais en réalité, l’aplatissement qui en résulte ment détecter les contractions des muscles
26
Réaliser un enregistrement : en pratique 1
squelettiques. Il est par conséquent essentiel • les électrodes doivent être fixées aux
que le patient soit relaxé, réchauffé et étendu membres, sans inversion de fils ;
confortablement – s’il remue ou s’il frissonne, • il faut s’assurer d’un bon contact électrique ;
ou s’il est animé de mouvements involontaires • il faut s’assurer de la bonne programmation
comme lors d’une maladie de Parkinson, de l’étalonnage et de la vitesse ;
l’enregistrement va recueillir une quantité • il faut s’assurer que le patient est
importante d’activité musculaire qui, dans confortablement installé et relaxé.
les cas extrêmes, peut masquer le tracé ECG
(figures 1.31 et 1.32). Alors, il ne vous reste plus qu’à « appuyer sur
Ainsi, l’appareil d’enregistrement fera pour le petit bouton » et l’appareil vous fournira un
vous le maximum du travail, mais souvenez- superbe tracé 12 dérivations.
vous de ceci :
27
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
Fig. 1.29
28
Réaliser un enregistrement : en pratique 1
29
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
Fig. 1.30
30
Réaliser un enregistrement : en pratique 1
Fig. 1.31
31
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
Fig. 1.32
L’énumération d’une série de données stricte- pathologie sous-jacente doit être identifiée.
ment normales peut être fastidieuse, et n’est, en L’un des problèmes majeurs du compte rendu
réalité, que rarement pratiquée. Cependant, il faut de l’ECG réside dans le fait qu’il existe une
avoir à l’esprit toutes les données de l’enregistre- multitude de variantes de tracés normaux. Les
ment chaque fois que vous interprétez un ECG. figures 1.33 et 1.34 montrent des variantes
L’interprétation permet de dire si le tracé d’ECG 12 dérivations normaux.
est normal ou anormal : s’il est anormal, la
33
L’ECG : de quoi s’agit-il ?
Fig. 1.34
34
Comment réaliser un compte rendu d’ECG 1
RAPPELS
PRINCIPES DE BASE
• L’ECG résulte de phénomènes électriques • Les six dérivations des membres (DI, DII, DIII,
associés à l’activation (dépolarisation) initiale VR, VL et VF) regardent le cœur de côté
des oreillettes suivie de celle des ventricules. dans un plan vertical1.
• La dépolarisation auriculaire est à l’origine des • L’axe cardiaque représente la direction
ondes P. moyenne de la vague de dépolarisation vue
• La dépolarisation ventriculaire est à l’origine de face. Il est calculé à partir des dérivations
du complexe QRS. Si la déflexion initiale est DI, DII, DIII.
orientée vers le bas, il s’agit d’une onde Q. • Les dérivations « V » appelées « dérivations
Toute déflexion orientée vers le haut est une précordiales » regardent le cœur de face et
onde R. Une déflexion orientée vers le bas du côté gauche dans un plan horizontal. La
faisant suite à une onde R est une onde S. dérivation V1 est placée face au ventricule droit
et la dérivation V6 face au ventricule gauche.
• Le septum est dépolarisé de la gauche vers la
droite.
• Dans un cœur normal, le ventricule gauche
exerce sur l’ECG une influence plus
importante que celle du ventricule droit.
• Malheureusement, il existe quantités
de petites variations compatibles avec un
• Lorsque l’onde de dépolarisation se dirige
cœur parfaitement normal. Reconnaître les
vers une électrode, la déflexion est en priorité
limites de la normale est l’une des principales
dirigée vers le haut. Lorsque l’onde S
difficultés de l’interprétation de l’ECG.
s’éloigne de l’électrode, la déflexion est
en priorité dirigée vers le bas. 1
Plan frontal (NdT).
35
La conduction
et ses problèmes 2
Problèmes de conduction dans le nœud AV conduction sont faciles à analyser, pourvu que
et le faisceau de His 38 vous gardiez constamment à l’esprit le schéma
électrique du cœur (figure 2.1).
Problèmes de conduction dans les branches
On peut se représenter les problèmes de
droite et gauche – blocs de branche 44
conduction dans l’ordre dans lequel l’onde
Problèmes de conduction dans la partie de dépolarisation chemine normalement : nœud
distale de la branche gauche 50 sinusal-nœud AV-faisceau de His-branches du
faisceau de His. Souvenez-vous dans tout ce qui
Conduite à tenir 54
suit que nous convenons que la dépolarisation
débute, lorsque le trajet est normal, dans le
Nous avons déjà vu que l’activation électrique nœud sinusal.
débute normalement dans le nœud sinoauri- Le rythme cardiaque est d’autant plus facile
culaire (SA), et qu’une onde de dépolarisation à interpréter que l’onde P est clairement iden-
s’étend à travers le muscle auriculaire en direc- tifiable sur le tracé. C’est habituellement le cas,
tion du nœud auriculoventriculaire (AV), puis mais pas toujours, en dérivations DII ou VI.
descend dans le faisceau de His et ses branches Vous pouvez avoir la certitude que la totalité
jusqu’aux ventricules. La conduction de cette des bandes d’enregistrement destinées à iden-
onde peut être retardée ou bloquée à n’importe tifier le rythme cardiaque dans ce livre a été
quel niveau. Toutefois, les problèmes de recueillie à partir de l’une de ces dérivations.
37
La conduction et ses problèmes
Fig. 2.1
38
Problèmes de conduction dans le nœud av et le faisceau de his 2
Fig. 2.2
Notez :
• une onde P pour chaque
complexe QRS ;
• un espace PR de 360 ms
39
La conduction et ses problèmes
Fig. 2.3
Fig. 2.4
Notez :
• l’intervalle PR des battements
conduits est constant ;
• il existe une onde P non suivie d’un
complexe QRS.
Les étiologies du bloc AV du 2e degré sont les ou 4/1 peuvent annoncer la survenue d’un BAV
mêmes que celles du bloc du 1er degré. Le phéno- « complet » encore appelé « bloc auriculoven-
mène de Wenckebach est habituellement bénin, triculaire du 3e degré ».
mais le bloc de type Mobitz 2 et le bloc 2/1, 3/1
40
Problèmes de conduction dans le nœud av et le faisceau de his 2
Fig. 2.5
Notez :
• deux ondes P pour un complexe QRS ;
• un espace PR normal et constant pour
les battements conduits.
Fig. 2.6
Notez :
• une onde P « tombant » dans
l’onde T peut être identifiée grâce à
l’existence d’un rythme auriculaire
régulier.
41
La conduction et ses problèmes
Fig. 2.7
Notez :
• la fréquence des ondes P de 90/min ;
• la fréquence des complexes QRS de
36/min ;
• l’absence de relation entre les ondes
P et les complexes QRS ;
• les complexes QRS anormalement
effilés du fait d’une vague de
dépolarisation anormale venue d’un
foyer d’échappement ventriculaire.
42
Problèmes de conduction dans le nœud av et le faisceau de his 2
Fig. 2.8
43
La conduction et ses problèmes
44
Problèmes de conduction dans les branches droite et gauche... 2
BLOC DE BRANCHE DROIT Il faut plus de temps que lorsque le cœur est
normal pour que l’excitation atteigne le ventricule
Dans le BBD, aucune conduction ne descend
droit, du fait de l’altération des voies normales
le long de la branche droite du faisceau de His
de conduction. Dans ces conditions, le ventricule
mais la partie gauche du septum est dépola-
droit se dépolarisera après le ventricule gauche. Il
risée en premier comme à l’habitude, ce qui
en résultera une seconde onde R (R’) en V1 et une
entraîne la formation d’une onde R en déri-
onde S profonde et large, avec pour conséquence
vation ventriculaire droite (V1) et d’une petite
un complexe QRS élargi, en V6 (figure 2.11).
onde Q en dérivation ventriculaire gauche (V6)
Un aspect « RSR’ », avec un complexe QRS de
(figure 2.9).
largeur normale (moins de 120 ms) est parfois
L’excitation s’étend ensuite au ventricule
dénommé « bloc incomplet droit ». Cet aspect
gauche, à l’origine d’une onde S en V1 et d’une
est habituellement sans signification et peut être
onde R en V6 (figure 2.10).
considéré comme une variante de la normale.
Conduction dans le bloc de branche droit : Conduction dans le bloc de branche droit :
première étape deuxième étape
45
La conduction et ses problèmes
46
Problèmes de conduction dans les branches droite et gauche... 2
Fig. 2.13 Fig. 2.14
RAPPELS
BLOC DE BRANCHE
• Le bloc de branche droit est particulièrement identifiable en V1 où l’on note un aspect RSR’
(figure 2.15).
• Le bloc de branche gauche est particulièrement identifiable en V6, où le complexe QRS est élargi,
avec un sommet comportant une encoche ressemblant à la lettre « M », décrit de ce fait comme
un aspect « en M » (figure 2.16). L’image au complet, avec l’aspect de « W » en V1, s’observe
fréquemment mais pas toujours.
47
La conduction et ses problèmes
Fig. 2.15
48
Problèmes de conduction dans les branches droite et gauche... 2
Fig. 2.16
49
La conduction et ses problèmes
Fig. 2.17
50
Problèmes de conduction dans la partie distale de la branche gauche 2
Fig. 2.18
Fig. 2.19
51
La conduction et ses problèmes
Fig. 2.20
Rythme sinusal avec déviation axiale gauche (tracé par ailleurs normal)
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 80/min ;
• déviation axiale gauche : complexes QRS dirigés vers le haut en DI mais dirigés vers le bas (onde S
prépondérante) en DII et DIII ;
• complexe QRS, segment ST et onde T normaux.
Fig. 2.22
Effet de l’association bloc de branche droit (BBD) - hémibloc antérieur gauche sur l’axe
cardiaque
53
La conduction et ses problèmes
Fig. 2.23
Bloc bifasciculaire
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 90/min ;
• déviation axiale gauche (onde S dominante en DII et DIII) ;
• bloc de branche droit (aspect RSR’ en V1 et onde S profonde et large en V6).
54
Conduite à tenir 2
BAV du 2e degré Bloc de branche gauche
• C’est habituellement le témoin d’une • Il faut penser à une sténose aortique
cardiopathie ; il s’observe souvent au cours et à une cardiopathie ischémique.
de l’infarctus du myocarde à sa phase aiguë. • Si le patient est asymptomatique, aucun acte
• Les blocs de type Mobitz 2 ou de type spécifique ne doit être envisagé.
Wenckebach ne nécessitent aucun • Si le patient a ressenti récemment une violente
traitement spécifique. douleur thoracique, le bloc de branche
• Les blocs 2/1, 3/1 ou 4/1 peuvent être gauche peut révéler un infarctus du myocarde
l’indication d’un entraînement électrosystolique et doit faire envisager une thérapeutique
transitoire ou permanent, particulièrement si la interventionnelle.
fréquence ventriculaire est basse.
Déviation axiale gauche
e
BAV du 3 degré • Pensez à l’hypertrophie ventriculaire gauche
et à ses causes.
• Il est toujours le témoin d’une pathologie
du tissu de conduction – fibrose plus • Aucun geste spécifique n’est nécessaire.
souvent qu’ischémie.
• Il faut envisager la mise en place d’un Déviation axiale gauche et bloc
pacemaker temporaire ou permanent. de branche droit
• Indiquent une pathologie sévère du tissu
Bloc de branche droit de conduction.
• Aucun traitement spécifique n’est nécessaire.
• Il faut penser à une communication
• La pose d’un pacemaker est rendue
interauriculaire. nécessaire si le patient présente
• Il n’existe aucun traitement spécifique des symptômes suggérant un BAV complet
du trouble conductif. intermittent.
55
La conduction et ses problèmes
RAPPELS
LA CONDUCTION ET SES CONSÉQUENCES SUR L’ECG
• La dépolarisation débute normalement dans • L’aspect ECG du bloc de branche gauche
le nœud sinusal et s’étend vers les ventricules ou droit peut être envisagé à condition
à travers le nœud AV, le faisceau de His, les de se souvenir que :
branches droite et gauche du faisceau de His – le septum est dépolarisé de la gauche vers
et les faisceaux antérieur et postérieur la droite ;
de la branche gauche.
– la dérivation V1 regarde le ventricule droit
• Un trouble de conduction peut survenir et la dérivation V6 regarde le ventricule gauche ;
à n’importe quel niveau.
– quand la dépolarisation se dirige vers une
• Les troubles conductifs siégeant au niveau électrode, le stylet enregistreur se déplace
du nœud AV et du faisceau de His peuvent vers le haut.
être partiels (blocs du 1er et du 2e degré)
ou complets (bloc du 3e degré).
• Si vous ne pouvez vous souvenir de tout ceci,
rappelez-vous seulement que le bloc de
• Si la conduction est normale à travers le nœud branche droit a un aspect RSR’ en V1 tandis
AV, le faisceau de His et l’une de ses branches, que le bloc de branche gauche présente
alors qu’elle est anormale dans l’autre un aspect en « M » en V6.
branche, on dit qu’il y a bloc de branche
et le complexe QRS est élargi.
• L’hémibloc antérieur gauche provoque
une déviation axiale gauche.
56
Le rythme cardiaque 3
Le rythme intrinsèque du cœur 58 en rythme sinusal. La dépolarisation peut, tou-
tefois, débuter ailleurs. Dans ce cas, le rythme
Rythmes anormaux 59
prend le nom de l’endroit où naît la dépolarisa-
Bradycardies : rythmes lents 60 tion, et on parle d’« arythmie ».
Lorsque l’on essaye d’analyser un rythme
Extrasystoles 64
cardiaque, il faut se souvenir que :
Les tachycardies : les rythmes à fréquence
élevée 67 • la contraction auriculaire est associée
à l’onde P de l’ECG ;
Fibrillation 77 • la contraction ventriculaire est associée au
complexe QRS ;
Le syndrome de Wolff-Parkinson-White
(WPW) 80 • la contraction auriculaire précède
normalement la contraction ventriculaire,
L’origine des tachycardies 82 et qu’il existe normalement une contraction
auriculaire pour une contraction
Conduite à tenir 82
ventriculaire (c’est dire qu’il doit exister
Identifier le trouble du rythme 84 autant d’ondes P que de complexes QRS).
Les clés du diagnostic sont :
Jusqu’à présent, nous avons envisagé la dépola-
risation provenant d’une activation normale du • les ondes P : pouvez-vous les identifier ?
nœud sinusal. Lorsque la dépolarisation débute Recherchez la dérivation où elles sont les
dans le nœud sinusal, on dit que le cœur bat plus nettes ; 57
Le rythme cardiaque
• la relation entre les ondes P et les séquence d’activation commence. Le nœud sinu-
complexes QRS : il doit exister une onde P sal possède normalement la plus haute fréquence
par complexe QRS ; de décharge. En conséquence, la fréquence de
• la largeur des complexes QRS (qui doit être contraction des ventricules sera égale à la fré-
inférieure ou égale à 120 ms); quence des décharges du nœud sinusal. Cette
• puisqu’une arythmie doit être identifiée dernière est influencée par le pneumogastrique1,
à partir de la dérivation où les ondes P et aussi par des zones réflexes situées dans le
peuvent être vues le plus facilement, un tracé poumon. Des modifications de la fréquence
complet « 12 dérivations » est préférable à cardiaque associées à la respiration s’observent
une longue bande d’une dérivation isolée. normalement chez les sujets jeunes, et prennent
le nom d’« arythmie sinusale » (figure 3.1).
Un rythme sinusal lent (bradycardie sinusale)
LE RYTHME INTRINSÈQUE DU CŒUR peut être associé à l’entraînement physique chez
l’athlète, à un état syncopal, à l’hypothermie ou
Le cœur dans son ensemble peut se dépolari- au myxœdème, s’observe souvent au décours
ser spontanément et de manière rythmée, et la immédiat d’un infarctus du myocarde. Un rythme
fréquence de contraction des ventricules sera sinusal rapide (tachycardie sinusale) peut être
contrôlée par la région du cœur qui est dépola- associé à l’effort physique, un accès de frayeur,
risée à la fréquence la plus élevée.
Les étoiles qui figurent sur les schémas de
ce chapitre montrent la partie du cœur où la 1
Qui exerce un « contrôle vagal » (NdT).
Fig. 3.1
Arythmie sinusale
Notez :
• une onde P par complexe QRS ;
• un espace PR constant ;
• une variation progressive, battement
par battement, de l’espace R-R.
58
Rythmes anormaux 3
une vive douleur, une hémorragie ou une hyper- « nodal » ou, plus précisément « jonctionnel ») ;
thyroïdie. Il n’existe pas de fréquence particulière ou le muscle ventriculaire. Bien que la figure 3.2
pour parler de « bradycardie » ou de « tachycar- suggère que l’activation électrique puisse débuter
die ». Ce sont des termes purement descriptifs. à des endroits spécifiques situés dans les muscles
auriculaires ou ventriculaires, un rythme anor-
mal peut prendre naissance en n’importe quel
RYTHMES ANORMAUX point des oreillettes ou des ventricules.
Le rythme sinusal, le rythme auriculaire et
Les rythmes cardiaques anormaux peuvent pren- le rythme jonctionnel constituent ensemble les
dre naissance dans l’un des trois endroits suivants rythmes supraventriculaires (figure 3.3). En ce
(figure 3.2) : le muscle auriculaire ; la région qui concerne les rythmes supraventriculaires,
entourant le nœud AV (ce rythme est appelé l’onde de dépolarisation s’étend aux ventricules
Fig. 3.2
Fig. 3.3
59
Le rythme cardiaque
en empruntant la voie normale, à travers le QRS est de ce fait élargi et de forme anormale.
faisceau de His et ses branches (figure 3.4). Le La repolarisation est également anormale, ce qui
complexe QRS est par conséquent normal et fait que la morphologie de l’onde T est anormale.
identique, que la dépolarisation soit initiée par Souvenez-vous que :
le nœud sinusal, le muscle auriculaire ou la jonc-
tion auriculoventriculaire. • les rythmes supraventriculaires ont des
complexes QRS étroits ;
Dans les rythmes ventriculaires, d’autre part,
l’onde de dépolarisation se propage aux ventri- • les rythmes ventriculaires ont des complexes
QRS élargis.
cules par une voie anormale et plus lente, le long
des fibres de Purkinje (figure 3.5). Le complexe • la seule exception à cette règle s’observe
dans le cas d’un rythme supraventriculaire
avec bloc de branche droit ou gauche du
Fig. 3.4
faisceau de His, ou d’un syndrome
Propagation de l’onde de dépolarisation de Wolff-Parkinson-White (WPW), lorsque
dans les rythmes supraventriculaires le complexe QRS est élargi (voir p. 80).
Les rythmes anormaux survenant dans le
muscle auriculaire, la jonction AV ou le muscle
ventriculaire peuvent être classés en :
• bradycardies : rythme lent et soutenu ;
• extrasystoles : battements prématurés et isolés ;
• tachycardies : rythme rapide et soutenu ;
• fibrillation : l’activation des oreillettes ou des
ventricules est complètement désorganisée.
Fig. 3.5
BRADYCARDIES : RYTHMES LENTS
Propagation de l’onde de dépolarisation
dans les rythmes ventriculaires
C’est un réel avantage que plusieurs régions du
cœur puissent initier la séquence de dépolarisa-
tion, car cela fournit au cœur une série de méca-
nismes de sauvetage qui vont lui permettre de
continuer à battre si le nœud sinusal est défail-
lant et ne génère plus la dépolarisation, ou si la
conduction de l’onde de dépolarisation est blo-
quée. Toutefois, les mécanismes de protection
60
doivent être normalement désactivés pour éviter
Bradycardies : rythmes lents 3
une compétition entre les sites normaux et L’ÉCHAPPEMENT AURICULAIRE
anormaux de dépolarisation spontanée. Cette
Si la fréquence de la dépolarisation dans le nœud
condition est réalisée par des sites secondaires
sinusal s’abaisse et si un foyer auriculaire différent
possédant une fréquence intrinsèque de dépola-
prend le contrôle de l’activité cardiaque, le rythme
risation plus faible que celle du nœud sinusal.
qui prend ainsi naissance est nommé « échappe-
Le cœur est sous le contrôle de n’importe quel
ment auriculaire » (figure 3.6) Un battement lié à
site se dépolarisant spontanément à la fréquence
un échappement auriculaire peut être isolé.
la plus élevée : normalement c’est le nœud sinu-
sal, entraînant le cœur à une fréquence d’environ ÉCHAPPEMENT JONCTIONNEL
70/min. Si le nœud sinusal est dans l’impossibi-
lité de se dépolariser, la prise en charge sera assu- Si la région située autour du nœud AV prend
rée par un foyer situé dans une autre partie du le contrôle de la dépolarisation, le rythme est
muscle auriculaire ou dans une région voisine du appelé échappement « nodal » ou plus correcte-
nœud AV (jonction auriculoventriculaire), ayant ment jonctionnel (figure 3.7).
en commun une fréquence de dépolarisation
spontanée de l’ordre de 50/min. En cas de défail- ÉCHAPPEMENT VENTRICULAIRE
lance de ce système, ou si la conduction dans le L’échappement ventriculaire s’observe plus
faisceau de His est bloquée, un foyer ventricu- communément lorsque la conduction entre les
laire prendra le relais, fournissant une fréquence oreillettes et les ventricules est interrompue par
ventriculaire d’environ 30/min. un bloc AV complet (figure 3.8).
Les rythmes lents « de protection » sont appelés Les rythmes d’échappement ventriculaire
« rythmes d’échappement », parce qu’ils survien- peuvent survenir en l’absence de bloc complet
nent lorsque les sites secondaires générant la dépo- et les battements d’échappement ventriculaire
larisation se libèrent de leur inhibition liée à l’effet peuvent être isolés (figure 3.9).
normalement prépondérant du nœud sinusal. Le rythme cardiaque peut occasionnellement
Les rythmes d’échappement ne doivent pas être contrôlé par un foyer ventriculaire dont la
être considérés comme des perturbations pri- fréquence intrinsèque de décharge est plus élevée
maires mais à l’inverse comme une solution que celle que l’on observe dans le BAV complet.
fournie à des anomalies provenant des voies de Ce rythme est appelé « rythme idioventriculaire
conduction situées en amont. Ils sont commu- accéléré2 » (figure 3.10), et est souvent observé
nément observés à la phase aiguë de l’infarctus au cours de l’infarctus myocardique aigu. Bien
du myocarde et peuvent être associés à de la que l’aspect de l’ECG soit identique à celui de
bradycardie sinusale. Il est important de ne pas la tachycardie ventriculaire (décrite plus bas),
essayer de supprimer un rythme d’échappe- le rythme idioventriculaire accéléré est bénin et
ment, sans lequel on risquerait de voir survenir
61
un arrêt cardiaque. 2
Communément appelé RIVA (NdT).
Le rythme cardiaque
Fig. 3.6
Échappement auriculaire
Notez :
• après chaque battement sinusal, il
existe un défaut de dépolarisation ;
• avec retard, survient une onde P
anormale car l’excitation de l’oreillette
est survenue en une région autre que le
nœud sinusal ;
• l’onde P anormale est suivie d’un
complexe QRS normal, car l’excitation
s’est répandue normalement dans le
faisceau de His ;
• les battements suivants montrent un
retour à l’arythmie sinusale.
Fig. 3.7
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 100/min ;
• rythme d’échappement jonctionnel
(débutant après la flèche) à la fréquence
de 75/min ;
• absence d’onde P lors des battements
jonctionnels (signifiant soit l’absence
de contraction auriculaire, soit une
onde P masquée dans le complexe
ventriculaire) ;
• des complexes QRS normaux.
62
Bradycardies : rythmes lents 3
Fig. 3.8
Notez :
• la régularite des ondes P (dépolarisation
auriculaire normale) ;
• la fréquence auriculaire de 145/min ;
• des complexes ventriculaires très
anormaux du fait de la conduction
anormale dans le muscle ventriculaire ;
• la fréquence des complexes
ventriculaires de 15/min (échappement
ventriculaire) ;
• l’absence de relation entre ondes P et
complexes QRS.
Fig. 3.9
Échappement ventriculaire
Notez :
• après trois battements sinusaux, la
défaillance du noeud sinusal ;
• aucun échappement auriculaire ou
nodal ne survient ;
• après une pause, on observe un complexe
QRS anormalement large et isolé (flèche)
suivi d’une onde T anormale ;
• un foyer ventriculaire prend le contrôle
pendant un seul battement puis le
rythme sinusal est restauré.
63
Le rythme cardiaque
Fig. 3.10
ne doit pas être traité. La tachycardie ventricu- et le terme « contraction prématurée » possède
laire ne sera évoquée que lorsque la fréquence la même signification.
cardiaque dépasse 120/min. L’aspect électrocardiographique d’une extra-
systole naissant dans le muscle auriculaire, dans
la jonction auriculoventriculaire dans le nœud
EXTRASYSTOLES AV, ou dans le muscle ventriculaire, est iden-
tique à celui d’un battement d’échappement
N’importe quelle partie du cœur peut se dépo- dans la région correspondante – la différence
lariser plus tôt que prévu et le battement qui en étant que l’extrasystole survient plus tôt et que
résulte est appelé extrasystole. Le terme « ecto- l’échappement survient plus tard.
pique » est parfois utilisé pour indiquer que la Les extrasystoles auriculaires ont des ondes P
dépolarisation est générée en un lieu anormal, anormales (figure 3.11). Dans une extrasystole
Fig. 3.11
Fig. 3.12
Extrasystole ventriculaire
Notez :
• le tracé du haut montre cinq
battements sinusaux, puis un battement
prématuré avec un complexe QRS large
et une onde T anormale : c’est une
extrasystole ventriculaire (flèche) ;
• sur le tracé du bas, les extrasystoles
ventriculaires (flèches) surviennent
au sommet des ondes T des battements
sinusaux précédents : c’est le
phénomène « R/T ».
65
Le rythme cardiaque
Fig. 3.13
Extrasystole supraventriculaire
Notez :
• trois battements sinusaux sont suivis
d’une extrasystole jonctionnelle ;
• aucune onde P n’est visible au moment
supposé de sa survenue, et l’onde P
suivante est retardée.
66
Les tachycardies : les rythmes à fréquence élevée 3
Fig. 3.14
Extrasystole ventriculaire
Notez :
• trois battements sinusaux sont suivis d’une
extrasystole ventriculaire ;
• aucune onde P n’est visible aux alentours
de l’extrasystole mais l’onde P suivante
(sinusale) survient au moment prévu.
Fig. 3.15
Tachycardie atriale
Notez :
• après trois battements sinusaux,
la tachycardie atriale s’installe à la
fréquence de 150/min ;
• les ondes P peuvent se superposer aux
ondes T des battements précédents ;
• les complexes QRS ont la même forme
que les complexes d’origine sinusale.
rythme sinusal, le nœud AV et/ou le faisceau de faut regarder attentivement le tracé pour iden-
His ne conduisent pas normalement. tifier les ondes P supplémentaires (figure 3.17).
Une tachycardie à complexes fins avec une
Flutter auriculaire fréquence ventriculaire d’environ 125/min doit
Le flutter auriculaire s’observe lorsque la fré- toujours vous orienter vers la possibilité d’un
quence auriculaire est supérieure à 250/min, et flutter auriculaire avec bloc 2/1.
qu’il n’existe pas de retour du tracé à la ligne de Toute arythmie devra être identifiée à partir
base4 entre les ondes P (figure 3.16). de la dérivation où les ondes P sont le plus
Quand la tachycardie atriale ou le flutter facilement identifiables. Sur l’enregistrement
auriculaire sont associés à un bloc 2/1, il vous de la figure 3.18, le flutter auriculaire est bien
visible en DII, mais il est tout aussi évident en
4
On parle souvent de « ligne isoélectrique » (NdT). VR et VF.
68
Les tachycardies : les rythmes à fréquence élevée 3
Fig. 3.16
Flutter auriculaire
Notez :
• on observe des ondes P à la fréquence
de 300/min, donnant un aspect en
dents de scie ;
• il existe quatre ondes P (flèches)
par complexe QRS ;
• l’activation ventriculaire est
parfaitement régulière à 75/min.
Fig. 3.17
Notez :
• flutter auriculaire avec fréquence
auriculaire de 250/min et bloc
2/1 responsable d’une fréquence
ventriculaire de 125/min ;
• la première des deux ondes P
associées à chaque complexe QRS
peut être confondue avec l’onde T du
complexe précédent. Cependant, il est
possible d’identifier les ondes P grâce à
leur régularité ;
• sur ce tracé, les ondes T ne peuvent être
clairement identifiées.
69
Le rythme cardiaque
Fig. 3.18
70
Les tachycardies : les rythmes à fréquence élevée 3
Tachycardies jonctionnelles (nodales) par la voie normale empruntant le faisceau de
His.
Si la région du nœud AV se dépolarise à une
L’ECG 12 dérivations de la figure 3.20 mon-
fréquence élevée, les ondes P peuvent appa-
tre que lors d’une tachycardie jonctionnelle5
raître très près des complexes QRS, voire ne
aucune onde P ne peut être mise en évidence
pas être du tout visibles (figure 3.19). La mor-
quelle que soit la dérivation.
phologie des complexes QRS est normale, tout
comme lors des autres arythmies supraven- 5
Le terme de « tachycardie de Bouveret » est souvent utilisé
triculaires puisque les ventricules sont activés chez les francophones (NdT).
Fig. 3.19
Notez :
• sur le tracé du haut, il n’y a pas
d’ondes P, et les complexes QRS sont
parfaitement réguliers ;
• le tracé du bas, enregistré chez le même
patient, est en rythme sinusal. Les
complexes QRS ont pratiquement la
même forme que ceux de la tachycardie
jonctionnelle.
71
Le rythme cardiaque
Fig. 3.20
Tachycardie jonctionnelle
Notez :
• l’absence d’ondes P ;
• les complexes ventriculaires réguliers à la fréquence de 200/min ;
• les complexes QRS étroits de morphologie normale ;
• des ondes T normales.
72
Les tachycardies : les rythmes à fréquence élevée 3
Compression du sinus carotidien AV. Il en résulte une réduction de la fréquence
6 de décharge du nœud sinusal et une augmen-
La compression du sinus carotidien peut être
tation du délai de conduction dans le nœud
un traitement efficace des tachycardies supra-
AV. C’est ce dernier qui est important pour le
ventriculaires et mérite toujours d’être essayé
diagnostic et le traitement des arythmies. Le
car il peut faciliter l’interprétation du type de
massage carotidien réduit totalement certaines
tachycardie (figure 3.21). Le massage du sinus
arythmies supraventriculaires, alors qu’il ralen-
carotidien déclenche un réflexe qui provoque la
tit seulement la fréquence ventriculaire pour
stimulation vagale du nœud sinusal et du nœud
d’autres, mais ce traitement n’a aucun effet sur
6
Le terme « massage » est habituellement utilisé (NdT). les arythmies ventriculaires.
Fig. 3.21
Notez :
• dans ce cas, le massage du sinus
carotidien (effectue durant la période
indiquée par les flèches) a majoré le
bloc entre oreillettes et ventricules et a
permis d’identifier le rythme anormal
comme étant un flutter auriculaire.
73
Le rythme cardiaque
Fig. 3.22
Tachycardie ventriculaire
Notez :
• après deux battements sinusaux, la
fréquence s’élève à 200/min ;
• les complexes QRS s’élargissent et
les ondes T deviennent difficiles à
identifier ;
• le dernier battement montre un retour
au rythme sinusal.
74
Les tachycardies : les rythmes à fréquence élevée 3
Fig. 3.23
Tachycardie ventriculaire
Notez :
• l’absence d’ondes P ;
• des complexes QRS réguliers à la fréquence de 200/min ;
• des complexes QRS élargis, d’une durée de 280 ms, et de morphologie très anormale ;
• l’absence d’ondes T identifiables.
75
Le rythme cardiaque
Fig. 3.24
Notez :
• rythme sinusal : chaque complexe QRS
est précédé d’une onde P, avec espace
PR constant ;
• les complexes QRS sont larges et les
ondes T sont inversées ;
• ce tracé a été enregistré en V6 et l’aspect
en « M » ainsi que les ondes T inversées
caractéristiques d’un bloc de branche
gauche sont facilement identifiables.
77
Le rythme cardiaque
Fig. 3.25
Fibrillation auriculaire
Notez :
• l’absence d’ondes P et une ligne de base
irrégulière ;
• des complexes QRS irréguliers ;
• des complexes QRS de morphologie
normale ;
• en V1, on peut observer des ondes P
ayant une certaine ressemblance avec
celles du flutter auriculaire – ce qui est
courant dans la fibrillation auriculaire.
78
Fibrillation 3
Fig. 3.26
Fibrillation auriculaire
Notez :
• l’absence d’ondes P ;
• une ligne de base irrégulière ;
• des complexes QRS irrégulièrement espacés, une fréquence variant de 75 à 190/min ;
• des complexes QRS fins de forme normale ;
• un sous-décalage du segment ST en V5-V6 (effet de la digoxine – voir page 103) ;
• des ondes T normales.
79
Le rythme cardiaque
Fig. 3.27
Fibrillation ventriculaire
Le syndrome de Wolff-Parkinson-White
Notez :
• rythme sinusal à la fréquence de 125/min ;
• déviation axiale droite ;
• intervalle PR court ;
• aspect empâté de la pente ascendante de QRS, mieux vu en V3 et V4 ;
élargissement de QRS dû à cette onde « delta » ;
• onde R dominante en V1.
81
Le rythme cardiaque
Fig. 3.29
Notez :
• au cours d’une tachycardie par réentrée,
on ne peut voir aucune onde P.
Le seul intérêt clinique de cette anomalie d’autres sont dus à des circuits de réentrée sié-
anatomique est sa responsabilité dans la sur- geant à l’intérieur du myocarde. Les tachycardies
venue d’une crise de tachycardie paroxystique. que nous avons décrites comme étant « jonction-
La dépolarisation peut descendre dans le fais- nelles » sont habituellement dues à des circuits
ceau de His puis remonter par la voie acces- de réentrée situés dans la région du nœud AV.
soire, et ainsi réactiver l’oreillette. Un circuit de Il serait plus correct de les appeler « tachycardies
« réentrée » est ainsi initié, responsable d’une par réentrée nodale ». Il n’est pas possible de faire
tachycardie soutenue (figure 3.29). la différence entre tachycardies par augmentation
de l’automaticité et tachycardies par réentrée sur
un ECG standard, mais fort heureusement cette
L’ORIGINE DES TACHYCARDIES distinction n’a pas de conséquences pratiques.
Fig. 3.30
Pacemaker
Notez :
• des ondes P sont visibles de temps
à autre, mais sans relation avec les
complexes QRS ;
• les complexes QRS sont précédés d’un
« spike » bref et représentant le stimulus
fourni par le pacemaker ;
• les complexes QRS sont larges car le
pacemaker stimule le ventricule droit,
déclenchant les systoles ventriculaires.
83
Le rythme cardiaque
RAPPELS
RYTHMES CARDIAQUES ANORMAUX
1. La plupart des structures cardiaques sont 6. La contraction désynchronisée du myocarde
capables de se dépolariser spontanément. auriculaire ou ventriculaire est appelée
2. Les rythmes anormaux peuvent prendre « fibrillation ».
naissance dans le myocarde auriculaire, 7. Exception faite de la fréquence différente,
la zone entourant le nœud AV (jonction l’aspect d’un complexe ECG d’un rythme
auriculoventriculaire) et le myocarde d’échappement, d’une extrasystole et d’une
ventriculaire. tachycardie prenant naissance dans n’importe
3. Les rythmes d’échappement sont des rythmes quelle partie du cœur est le même.
lents et bénéfiques. 8. Tous les rythmes supraventriculaires ont
4. La dépolarisation précoce et occasionnelle des complexes QRS normaux, fournissant la
de n’importe quelle partie du cœur produit preuve qu’il n’existe pas de bloc de branche
une extrasystole. ou de syndrome de pré-excitation (WPW).
5. La dépolarisation répétée de n’importe 9. Les rythmes ventriculaires sont à l’origine
quelle partie du cœur provoque une de complexes QRS élargis et anormaux, et
tachycardie. d’ondes T anormales.
84
Identifier le trouble du rythme 3
Tableau 3.1 Reconnaître les anomalies de l’ECG.
Anomalies Ondes P Rapport QRS Rythme
P/QRS Régularité Morphologie Fréquence
Occasionnelles Normale Supraventriculaire
(ex :
Anormale Ventriculaire
extrasystoles)
Soutenues Présentes P/QRS = 1/1 Régulier Normale Normale Rythme sinusal
≥ 150/min Tachycardie atriale
Légèrement Normale Normale Arythmie sinusale
irrégulier Lente Echappement auriculaire
Plus Régulier Normale Rapide Tachycardie atriale
d’ondes avec bloc
P que de Lente BAV deuxième degré
complexes
QRS Anormale Lente BAV complet
85
4
Anomalies des ondes
P des complexes QRS
et des ondes T
87
Anomalies des ondes P des complexes QRS et des ondes T
Fig. 4.1
Fig. 4.2
88
Anomalies des complexes QRS 4
ANOMALIES DES COMPLEXES QRS à augmenter son activité électrique, et augmen-
ter la hauteur des complexes QRS.
Un complexe QRS normal présente quatre
caractéristiques : Hypertrophie ventriculaire droite
1. Sa durée ne doit pas dépasser 120 ms (trois L’hypertrophie ventriculaire droite est le mieux
petits carreaux). vue dans les dérivations ventriculaires droites
2. Sur une dérivation ventriculaire droite (V1), (spécialement V1). Comme le ventricule gauche
l’onde S est plus grande que l’onde R. ne produit pas son effet dominant habituel sur
3. Sur une dérivation ventriculaire gauche (V5 l’aspect de QRS, le complexe QRS augmente
ou V6), la hauteur de l’onde R doit être d’amplitude en V1 (c’est-à-dire que la hauteur
inférieure à 25 mm. de l’onde R dépasse la profondeur de l’onde
4. Sur les dérivations ventriculaires gauches, on S) – ceci est pratiquement toujours anormal
peut voir des ondes Q dues à la dépolarisation (figure 4.3). On observera également une onde
septale mais leur durée est inférieure à 1 mm S profonde en V6).
et leur profondeur inférieure à 2 mm.
Fig. 4.3
ANOMALIES DE LARGEUR DES COMPLEXES
QRS Le complexe QRS dans l’hypertrophie
ventriculaire droite
Les complexes QRS sont anormalement larges en
présence d’un bloc d’une des branches du faisceau
de His (voir le chapitre 2), ou lorsque la dépolari-
sation provient d’un foyer situé en plein myocarde
ventriculaire générant soit un « échappement »,
soit des extrasystoles, soit une tachycardie ecto-
pique (voir le chapitre 3). Dans chacun de ces cas,
l’augmentation de largeur de QRS signifie que la
dépolarisation a gagné les ventricules par une voie
anormale, par conséquent plus lente. Les complexes
QRS sont également élargis dans le syndrome de
Wolff-Parkinson-White (voir le chapitre 3).
AUGMENTATION DE HAUTEUR
DU COMPLEXE QRS
Une augmentation de la masse musculaire de
l’un des ventricules, quel qu’il soit, va conduire 89
Anomalies des ondes P des complexes QRS et des ondes T
L’hypertrophie ventriculaire droite s’accom- (hypertrophie auriculaire droite), et dans les cas
pagne habituellement d’une déviation axiale sévères, d’une inversion de l’onde T en V1 et V2
droite (voir le chapitre 1), d’une onde P ample et parfois en V3 et même V4 (figure 4.4).
Fig. 4.4
Fig. 4.5
Embolie pulmonaire
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 75/min ;
• déviation axiale droite ;
• augmentation d’amplitude des ondes P, spécialement en DII ;
• persistance des ondes S en V6 ;
• inversion des ondes T de V1 à V4.
91
Anomalies des ondes P des complexes QRS et des ondes T
Fig. 4.6
Fig. 4.8
du ventricule droit (se dirigeant vers l’électrode de l’ECG est semblable à celui de l’hypertro-
située en V1) est occultée par la dépolarisation phie ventriculaire droite, bien que les autres
du ventricule gauche (qui s’éloigne de V1). Il éléments ECG témoignant d’une hypertrophie
en résulte une onde S en V1. Avec l’infarctus ventriculaire droite (voir plus haut) n’apparais-
du mur postérieur du ventricule gauche, la sent pas ici.
dépolarisation du ventricule droit est moins La présence d’une onde Q ne fournit aucune
contrariée par les forces du ventricule gauche, indication sur l’ancienneté de l’infarctus, car
et devient ainsi mieux perceptible, une onde l’onde Q lorsqu’elle apparaît sur le tracé est en
94 R dominante apparaît alors en V1. L’aspect principe indélébile.
Anomalies des complexes QRS 4
Fig. 4.9
95
Anomalies des ondes P des complexes QRS et des ondes T
Fig. 4.10
96
Anomalies des complexes QRS 4
Fig. 4.11
97
Anomalies des ondes P des complexes QRS et des ondes T
Fig. 4.12
Le segment ST
Fig. 4.13
98
Anomalies du segment ST 4
s’observe le sus-décalage indiquent la région le sous-décalage du segment ST peut sur-
du cœur qui est altérée – atteinte antérieure venir durant l’exercice, en particulier quand
observée en dérivations précordiales, et atteinte l’effort provoque une crise d’angine de poitrine
inférieure en DIII et VF (figures 4.8 et 4.10). (figure 4.14).
La péricardite n’est pas habituellement affaire L’inclinaison en pente douce2, contrairement
de localisation, le sus-décalage du segment ST au sous-décalage horizontal du segment ST, est
s’observant dans la plupart des dérivations. habituellement dû au traitement digitalique
Le sous-décalage horizontal du segment ST (traitement par la digoxine, voir page 103).
est habituellement un signe d’ischémie, par
contraste avec le sus-décalage de l’infarctus. 2
On utilise habituellement, pour qualifier cet aspect, le terme
Lorsque l’ECG enregistré au repos est normal, de « cupule digitalique » (NdT).
Fig. 4.14
Notez :
• sur le tracé du haut (normal), la
fréquence cardiaque est de 55/min
et le segment ST est isoélectrique ;
• sur le tracé du bas, la fréquence est de
125/min et le segment ST est
sous-décalé et horizontal.
99
Anomalies des ondes P des complexes QRS et des ondes T
100
Anomalies de l’onde T 4
Fig. 4.15
Notez :
• trois tracés ont été enregistrés
durant 24 h ;
• le rythme est sinusal et l’axe est normal
sur chacun des trois ECG ;
• le premier tracé est pratiquement
normal ;
• 6 h après le début de la douleur, le
segment ST est surélevé en DII, DIII et
VF, et sous-décalé en D1, VR et VL. Une
onde Q est apparue en DIII ;
• 24 h après le début de la douleur, une
petite onde Q est apparue en DII, et des
ondes Q plus évidentes sont présentes
en DIII et VF. Le segment ST a rejoint
la ligne de base, et les ondes T sont
désormais inversées en DIII et VF.
101
Anomalies des ondes P des complexes QRS et des ondes T
Fig. 4.16
102
Autres anomalies du segment st et de l’onde T 4
Fig. 4.17
Effet de la digoxine
Notez :
• fibrillation auriculaire ;
• complexes QRS fins ;
• aspect en pente douce du segment ST
(« en cupule ») ;
• ondes T inversées.
DIGOXINE
complexe QRS jusqu’à la terminaison de l’onde
L’administration de digoxine provoque une
T) sont le plus souvent concernés.
inversion des ondes T avec un sous-décalage
Une hypokaliémie provoque un aplatisse-
caractéristique en pente douce du segment ST3
ment de l’onde T et l’apparition d’une bosse à la
(figure 4.17). Il est utile d’enregistrer un ECG
fin de l’onde T appelée « onde U ». Une hyper-
avant de débuter un traitement par la digoxine,
kaliémie donne un aspect de grandes ondes T
pour éviter une confusion ultérieure concernant
pointues et la disparition du segment ST. Les
la signification de modifications morpholo-
complexes QRS peuvent être élargis. Les consé-
giques de l’onde T.
quences d’un taux anormal de magnésium peu-
vent être identiques.
AUTRES ANOMALIES DU SEGMENT ST Une hypocalcémie provoque un allongement
ET DE L’ONDE T de l’intervalle QT, et une calcémie élevée rac-
courcit ce dernier.
ANOMALIES ÉLECTROLYTIQUES
Les anomalies des taux plasmatiques de potas- MODIFICATIONS NON SPÉCIFIQUES
sium, calcium et magnésium affectent l’ECG,
De modestes anomalies du segment ST et de
alors que les modifications du taux de sodium
l’onde T (aplatissement de l’onde T, etc.) sont fré-
plasmatique n’ont pas d’influence. L’onde T et
quentes et sans grande signification, et sont tout
l’intervalle QT (ce dernier mesuré du début du
au plus considérées comme des « anomalies non
3
« Cupule digitalique » (NdT). spécifiques de ST-T ».
103
Anomalies des ondes P des complexes QRS et des ondes T
RAPPELS
LES CAUSES D’ANOMALIES DES ONDES P, DES COMPLEXES QRS ET DES ONDES T
• De grandes ondes P sont la conséquence • Le sous-décalage du segment ST et
d’une hypertrophie auriculaire droite, et l’inversion de l’onde T peuvent avoir
des ondes P élargies la conséquence d’une pour causes de l’ischémie, une hypertrophie
hypertrophie auriculaire gauche. ventriculaire, une conduction
• L’élargissement des complexes QRS indique intraventriculaire anormale ou une
un trouble de conduction intraventriculaire. imprégnation par la digoxine.
C’est ce que l’on observe à l’occasion d’un • Une inversion de l’onde T est normale
bloc de branche ou lorsque les complexes en DIII, VR et V1. L’inversion de l’onde
prennent naissance dans le myocarde T est associée au bloc de branche,
ventriculaire. On l’observe également au à l’ischémie, et à l’hypertrophie
cours du syndrome de Wolff-Parkinson-White. ventriculaire.
• L’augmentation de hauteur des complexes • Un aplatissement de l’onde T ou, à l’inverse,
QRS est le témoin d’une hypertrophie une grande onde T pointue peuvent être
ventriculaire. L’hypertrophie ventriculaire dus à des anomalies électrolytiques, mais
droite s’observe en V1 et l’hypertrophie beaucoup d’anomalies mineures de ST-T
ventriculaire gauche en V5-V6. n’ont aucune spécificité.
• Des ondes Q dépassant 1 mm de largeur et
2 mm de profondeur sont en faveur d’un ET SOUVENEZ-VOUS DE CECI
infarctus du myocarde. • Comprendre l’ECG est facile.
• Le sus-décalage du segment ST est en faveur • La plupart des anomalies rencontrées
d’un infarctus myocardique aigu ou d’une sur un tracé ECG reçoivent une explication
péricardite. rationnelle.
104
e
Comment utiliser 2
au mieux l’ECG
Interprétation clinique d’ECG individuels
partie
En termes pratiques, l’ECG est simplement un comment l’ECG peut aider dans certaines situa-
outil servant au diagnostic et au traitement des tions au cours desquelles il est particulièrement
patients, et doit toujours être interprété à la utilisé – dépistage chez des sujets en bonne
lumière de l’histoire clinique du patient et des santé, et chez des patients se plaignant de dou-
signes recueillis par l’examen physique. Ceci leurs thoraciques, essoufflement, palpitations ou
du fait que des aspects électrocardiographiques syncope. En reprenant les anomalies classiques
identiques – « normaux » ou non – peuvent de l’ECG décrites en première partie, nous envi-
s’observer chez des sujets en bonne santé ou sagerons quelques variantes qui peuvent rendre
malades. plus difficile l’interprétation de l’ECG, en utili-
Dans cette partie de l’ouvrage, nous nous sant des tracés provenant de patients présentant
écarterons des tracés basiques et envisagerons des problèmes courants.
105
L’ECG des sujets en bonne
santé 5
Le rythme cardiaque normal 107 symptômes alors que des anomalies cependant
importantes peuvent être évidentes sur leur
L’onde P 114
tracé ECG. À titre d’exemple, la figure 5.1
Conduction 114 montre l’ECG d’un patient asymptomatique
qui, contre toute attente, révèle la présence
Le complexe QRS 118
d’une fibrillation auriculaire. Les anomalies
Le segment ST 124 sont inhabituelles chez ce groupe d’individus,
mais représentent peut-être la meilleure raison
L’onde T 126
d’utiliser l’ECG comme examen de dépistage.
Ondes U 127 L’ensemble des tracés ECG de ce chapitre pro-
vient de dépistages chez des sujets cliniquement
L’ECG des athlètes 127
en bonne santé, et on peut affirmer que ces
sujets se considèrent comme étant eux-mêmes
L’ECG est fréquemment utilisé dans le cadre en bonne santé.
du dépistage des sujets bien portants, mais il
est important de se rappeler que ceux chez qui
ce dépistage est pratiqué ne sont pas tous réel- LE RYTHME CARDIAQUE NORMAL
lement asymptomatiques – la procédure peut
être utilisée comme alternative à un besoin Le rythme sinusal est l’unique rythme réel-
d’avis médical. Inversement, les personnes exa- lement normal. On considère parfois qu’il y
minées peuvent être totalement dépourvues de a « bradycardie sinusale » quand la fréquence
107
L’ECG des sujets en bonne santé
cardiaque est inférieure à 60/min, et on dit termes ne sont pas d’une réelle efficacité, et il
parfois qu’il y a « tachycardie sinusale » en est beaucoup plus utile de noter que le patient
présence d’une fréquence cardiaque supé- présente « un rythme sinusal de ×/min »
rieure à 100/min (encadré 5.1), mais ces (figure 5.2).
Fig. 5.1
108
Le rythme cardiaque normal 5
Fig. 5.2
109
L’ECG des sujets en bonne santé
Fig. 5.3
Arythmie sinusale
Notez :
• rythme sinusal, fréquence d’environ 65/min pour l’ensemble du tracé ;
• la bande d’enregistrement « DII long » montre une fréquence initiale d’environ 80/min qui se ralentit
progressivement à 60/min ;
• les complexes QRS, les segments ST et les ondes T sont normaux.
110
Le rythme cardiaque normal 5
la population, leur présence ne permet pas d’iden- Les extrasystoles peuvent disparaître après
tifier un groupe ayant un risque plus élevé que la réduction de la consommation d’alcool ou de
moyenne de développer une affection cardiaque. café, et ne justifient un traitement médical que
À titre individuel, toutefois, leur présence n’est lorsque leur fréquence est telle qu’elle compro-
pas un bon facteur prédictif d’un tel risque. met la fonction cardiaque.
Fig. 5.4
Extrasystoles auriculaires
Notez :
• rythme sinusal ; la fréquence, appréciée à partir des battements sinusaux jouxtant les extrasystoles, est
d’environ 35/min ;
• la fréquence cardiaque globale, calculée en incluant les extrasystoles, est d’environ 45/min ;
• les extrasystoles sont identifiées par la présence d’ondes P prématurées dont la morphologie est
différente de celle des ondes P associées aux battements sinusaux ;
• les complexes QRS et les ondes T sont identiques qu’il s’agisse de battements sinusaux ou de battements
auriculaires.
111
L’ECG des sujets en bonne santé
Fig. 5.5
Extrasystoles ventriculaires
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 50/min ;
• fréquentes extrasystoles ventriculaires, identifiées par leur survenue précoce, non précédées d’une onde
P, avec un complexe QRS élargi et anormal, ainsi qu’une onde T de forme différente, en comparaison
avec les complexes d’origine sinusale ;
• les complexes QRS et les ondes T des battements sinusaux sont normaux.
112
Le rythme cardiaque normal 5
RYTHME AURICULAIRE ECTOPIQUE est instauré (figure 5.6). Cette situation est
asymptomatique et habituellement sans signifi-
Lorsque la dépolarisation est initiée à partir
cation clinique. C’est une découverte loin d’être
d’un foyer auriculaire autre que le nœud sino-
exceptionnelle lors d’un bilan systématique.
auriculaire, un « rythme auriculaire ectopique »
Fig. 5.6
113
L’ECG des sujets en bonne santé
114
Conduction 5
Fig. 5.7
Ondes P bifides
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 60/min ;
• il existe deux extrasystoles ventriculaires ;
• dans les dérivations V2, V3, et V4, l’onde P est « bifide ». Ce peut être un signe d’hypertrophie auriculaire
gauche, mais on l’observe souvent sur des tracés normaux ;
• les complexes QRS, les segments ST et les ondes T des battements sinusaux sont normaux.
115
L’ECG des sujets en bonne santé
Fig. 5.8
Un complexe QRS orienté vers le bas (c’est- orienté vers le bas en DII, mais néanmoins dans
à-dire que l’onde S est d’amplitude supérieure à les limites de la normale de 120 ms, indique
celle de l’onde R) en DII et DIII témoigne d’une la présence d’un hémibloc antérieur gauche
déviation axiale gauche, et un complexe QRS (figure 5.9).
116
Conduction 5
Fig. 5.9
Une déviation axiale droite s’observe sans importance à moins qu’il n’existe d’autres
lorsque les complexes QRS sont orientés arguments en faveur d’une hypertrophie ven-
vers le bas en DI. Cette déviation axiale est triculaire droite, ou encore que le patient ait
fréquente chez les sujets bien portants, en dans ses antécédents un infarctus du myocarde,
particulier de grande taille, comme sur le tracé augmentant alors l’éventualité d’un hémibloc
ECG de la figure 5.10, et dans ce cas, elle est postérieur gauche.
117
L’ECG des sujets en bonne santé
Fig. 5.10
Fig. 5.12
120
Le complexe QRS 5
S en V1. On parle d’hypertrophie ventriculaire attribué à un enregistrement « sous tension »
gauche pour des chiffres supérieurs à 35 mm. mais ce terme est habituellement sans signifi-
En réalité, ces critères sont peu fiables et un cation.
complexe QRS supérieur à 25 mm s’observe Lorsque les complexes QRS paraissent
volontiers chez l’adulte jeune en bonne santé. d’amplitude trop faible pour être compatibles
L’hypertrophie ventriculaire gauche ne peut avec les symptômes cliniques, vérifiez l’étalon-
être diagnostiquée avec certitude que lorsque nage de l’appareil d’enregistrement. Si celui-ci
de grands complexes QRS sont associés à une est correct, l’explication possible de cette faible
inversion de l’onde T en dérivations latérales amplitude peut être l’obésité, l’emphysème ou
(voir le chapitre 4). Parfois, cet aspect est l’épanchement péricardique.
Fig. 5.13
121
L’ECG des sujets en bonne santé
Les ondes Q sont la marque la plus accom- profondes, peuvent se révéler tout à fait nor-
plie des modifications ECG observées au males.
cours d’un infarctus du myocarde s’accompa- Une onde Q en DIII mais non en VF est vrai-
gnant d’un sus-décalage du segment ST, mais semblablement normale, même lorsqu’elle est
résultent également de la dépolarisation du sep- associée à une onde T négative (figure 5.15). Ces
tum interventriculaire (voir page 16). Des ondes aspects disparaissent souvent lorsque le tracé
Q étroites en dérivations inférieures et latérales ECG est répété en demandant au patient de
(figure 5.14), et parfois même certaines assez prendre une inspiration profonde et prolongée.
Fig. 5.14
123
L’ECG des sujets en bonne santé
Fig. 5.16
125
L’ECG des sujets en bonne santé
Fig. 5.18
Des ondes U aplaties faisant suite à des ondes T L’ECG des athlètes peut présenter une large
elles-mêmes aplaties, accompagnées d’un allon- variété d’anomalies que l’on pourrait considérer
gement de l’espace QT, peuvent être un signe comme « anormales » (encadré 5.3).
d’hypokaliémie. Cependant, le meilleur exem-
ple d’ondes U proéminentes est celui que l’on
observe chez des sujets normaux (figure 5.20).
127
L’ECG des sujets en bonne santé
Fig. 5.20
129
6
L’ECG des patients souffrant
de douleurs thoraciques
ou de dyspnée
L’ECG des patients souffrant d’une douleur Il existe peu de tableaux cliniques de dou-
thoracique permanente 132 leurs thoraciques qui permettent un diagnostic
d’emblée évident. La douleur thoracique qui irra-
L’ECG des patients se plaignant de douleur
die à la joue ou à la mâchoire est probablement
thoracique intermittente 147
d’origine cardiaque ; la douleur qui est majorée à
L’ECG des patients souffrant de troubles l’inspiration est soit d’origine pleurale soit d’ori-
respiratoires 150 gine péricardique ; et la douleur dorsale peut être
due soit à de l’ischémie myocardique soit à une
La douleur thoracique est un symptôme très dissection aortique. L’ECG va aider à différencier
courant, et lorsqu’on étudie le tracé ECG d’un ces multiples causes de douleurs mais il n’est pas
patient se plaignant de douleur thoracique il est infaillible – par exemple, si une dissection aor-
essentiel de se rappeler qu’il existe d’autres causes tique touche l’ostium d’une artère coronaire, elle
que l’ischémie myocardique (encadré 6.1). peut provoquer une ischémie myocardique.
Fig. 6.1
134
L’ECG des patients souffrant d’une douleur thoracique permanente 6
Fig. 6.2
135
L’ECG des patients souffrant de douleurs thoraciques ou de dyspnée
Fig. 6.3
136
L’ECG des patients souffrant d’une douleur thoracique permanente 6
Fig. 6.4
137
L’ECG des patients souffrant de douleurs thoraciques ou de dyspnée
Fig. 6.5
138
L’ECG des patients souffrant d’une douleur thoracique permanente 6
Fig. 6.6
139
L’ECG des patients souffrant de douleurs thoraciques ou de dyspnée
Fig. 6.7
140
L’ECG des patients souffrant d’une douleur thoracique permanente 6
Les figures 6.8 à 6.10 sont des tracés ECG aspect classique d’infarctus inférieur avec sus-
enregistrés chez un patient quelques heures décalage du segment ST et, en supplément, une
après la survenue d’une douleur thoracique et inversion de l’onde T en VL. Quelques jours
quelques jours plus tard, et montrant un aspect plus tard (figure 6.9), les ondes Q sont apparues
d’infarctus inférieur. La figure 6.8 montre un en DIII et VF, le segment ST a presque regagné
Fig. 6.8
la ligne de base, et l’onde T en VL n’est pas plus pour exemple le bloc auriculoventriculaire du
longtemps inversée. Au cours de la phase aiguë 2e degré visible sur la figure 6.10, montrant le
d’un infarctus inférieur avec sus-décalage de ST, « DII long » enregistré quelques heures après
les troubles de conduction sont habituels, avec le tracé de la figure 6.8.
Fig. 6.9
Infarctus du myocarde ancien de territoire inférieur (même patient que figures 6.8 et 6.10)
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 60/min ;
• axe de QRS normal ;
• ondes Q en DIII et VF ;
• le segment ST en DII, DIII et VF a pratiquement regagné la ligne de base ;
• ondes T inversées en DII, DIII et VF ;
• les complexes QRS et les ondes T sont normaux sur les dérivations antérieures.
142
L’ECG des patients souffrant d’une douleur thoracique permanente 6
Fig. 6.10
Lorsqu’un infarctus touche la paroi posté- (figure 6.11). Cet aspect doit être différencié de
rieure du ventricule gauche, les ondes Q peuvent l’onde R dominante en V1 que l’on observe au
être identifiées uniquement en plaçant les élec- cours de l’hypertension artérielle pulmonaire
trodes thoraciques dans le dos du patient. Sur (voir plus bas) et d’une onde R, variante de la
un tracé ECG de routine, on observera une onde normale. Cette distinction est plus facile à effec-
R dominante en V1, liée au fait que la dépolari- tuer à la lumière de l’histoire clinique du patient
sation antérieure ne rencontre pas d’opposition et des données de l’examen physique.
143
L’ECG des patients souffrant de douleurs thoraciques ou de dyspnée
Fig. 6.11
144
L’ECG des patients souffrant d’une douleur thoracique permanente 6
RAPPELS
INFARCTUS DU MYOCARDE AVEC SUS-DÉCALAGE DU SEGMENT ST
Séquence des modifications ECG Siège de l’infarctus
1. ECG normal. • Infarctus antérieur : modifications classiques
2. Sus-décalage du segment ST. en V3-V4, mais souvent, également, en V2 et V5.
3. Apparition d’ondes Q. • Infarctus inférieur : modifications en DIII et VF.
4. Normalisation du segment ST. • Infarctus latéral : modifications en DI, VL et V5-V6.
5. Inversion des ondes T. • Infarctus postérieur authentifié : ondes R
dominantes en V1.
145
L’ECG des patients souffrant de douleurs thoraciques ou de dyspnée
Fig. 6.12
146
L’ECG des patients se plaignant de douleur thoracique intermittente 6
Tableau 6.1 Protocole de Bruce.
L’ECG DES PATIENTS SE PLAIGNANT
DE DOULEUR THORACIQUE Niveau Vitesse Vitesse Inclinaison
INTERMITTENTE (km/h) (miles/h) (degrés)
ou d’une quelconque arythmie est également 2 mm. Si le segment ST est sous-décalé mais
une indication à l’arrêt immédiat de l’épreuve avec une pente ascendante, il n’existe pro-
d’effort. bablement pas d’ischémie. Les figures 6.13
Un diagnostic d’ischémie myocardique peut et 6.14 montrent l’ECG d’un patient au
être posé avec une bonne valeur prédictive repos et après effort responsable d’une crise
s’il existe un sous-décalage de ST d’au moins d’angine de poitrine.
Fig. 6.13
Au repos
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 65/min ;
• axe de QRS normal ;
• complexe QRS, segment ST et onde T normaux.
148
L’ECG des patients se plaignant de douleur thoracique intermittente 6
Fig. 6.14
149
L’ECG des patients souffrant de douleurs thoraciques ou de dyspnée
RAPPELS
HYPERTROPHIE CARDIAQUE
Hypertrophie auriculaire droite Hypertrophie auriculaire gauche
• Ondes P pointues. • Ondes P bifides.
151
L’ECG des patients souffrant de douleurs thoraciques ou de dyspnée
Fig. 6.15
Embolie pulmonaire
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 95/min ;
• déviation axiale droite (complexes QRS orientés vers le bas en DI) ;
• ondes P pointues en DII, suggérant une hypertrophie auriculaire droite ;
• persistance d’une onde S en V6 ;
• ondes T inversées de V1 à V5, DII, DIII et VF ;
• aspect de bloc de branche droit.
152
L’ECG des patients souffrant de troubles respiratoires 6
Pneumopathies chroniques horaire du cœur (figure 6.16). Ceci s’explique
par une rotation du cœur, le ventricule droit
Les affections chroniques du poumon de type
occupant une place plus importante qu’à l’habi-
obstructif, la fibrose pulmonaire et d’autres
tude dans le précordium.
pathologies pulmonaires essentielles n’occa-
sionnent habituellement pas de modifications
ECG en rapport avec une hypertension arté-
rielle pulmonaire, mais il peut exister une dévia-
tion axiale droite, et plus souvent une rotation
Fig. 6.16
Pneumopathie chronique
Notez :
• Rythme sinusal, fréquence 100/min ;
• Déviation axiale droite ;
• Ondes P pointues, mieux visibles en V1-V2 ;
• Bloc de branche incomplet droit ;
• Ondes S profondes en V6, sans qu’une dérivation précordiale quelconque mette en évidence un aspect
d’hypertrophie ventriculaire gauche.
153
L’ECG au cours de palpitations
ou de syncope 7
L’ECG d’un patient non symptomatique 155
L’ECG D’UN PATIENT
L’ECG d’un patient symptomatique 168 NON SYMPTOMATIQUE
Stimulateurs cardiaques 172
Lorsqu’un patient est asymptomatique au
Arrêt cardiaque 176 moment de l’enregistrement, quatre aspects ECG
possibles peuvent orienter vers un diagnostic :
Les « palpitations » ont des significations dif- • tracé normal ;
férentes chez différents individus, mais d’une • tracé orientant vers une cardiopathie ;
manière générale, signifient le ressenti de ses • tracé orientant vers une tachycardie
battements cardiaques. La « syncope » signifie paroxystique ;
une brusque perte de conscience. Le seul moyen • tracé orientant vers une syncope due à une
d’avoir la certitude qu’un problème cardiaque bradycardie.
est la cause de l’une ou l’autre de ces manifes-
tations est d’enregistrer un ECG au cours d’un ECG NORMAUX
accès évocateur, ce qui est rarement possible. Les symptômes peuvent ne pas être en rapport avec
Néanmoins, l’ECG peut être utile, même en une affection cardiaque – le patient peut souffrir de
l’absence de symptômes. crises d’épilepsie ou d’autres affections. Cependant,
155
L’ECG au cours de palpitations ou de syncope
un ECG normal ne permet pas d’écarter une aryth- à une sténose aortique ; une hypertrophie ven-
mie paroxystique, et la description par le patient triculaire droite, quant à elle, peut être due à
de ses symptômes peut être cruciale. Par exemple, une hypertension artérielle pulmonaire. Chez un
si les accès sont en rapport avec l’exercice (penser sujet jeune, chez qui une coronaropathie est peu
à l’anémie) ou l’anxiété, et si les palpitations aug- probable, cet aspect évoque une cardiomyopathie
mentent puis s’atténuent, une tachycardie sinusale hypertrophique (figure 7.2), qui peut avoir pour
est habituellement la cause des symptômes. Au conséquences arythmie, syncope ou mort subite.
cours d’une tachycardie paroxystique, les crises
surviennent brusquement, souvent sans raison
évidente, et peuvent disparaître soudainement.
ASPECTS ECG EN FAVEUR D’UNE
Un ECG ambulatoire de 24 h, utilisant, par exem-
TACHYCARDIE PAROXYSTIQUE
ple, la technique du Holter peut être nécessaire Syndromes de pré-excitation
si l’on veut obtenir un enregistrement de l’accès Un espace PR court (inférieur à 120 ms), avec
(figure 7.1). un complexe QRS et élargi, oriente vers le syn-
drome de Wolff-Parkinson-White (WPW). Un
ASPECTS ECG EN FAVEUR D’UNE espace PR court avec complexe QRS normal
CARDIOPATHIE évoque un syndrome de Lown-Ganong-Levine
Une inversion prononcée de l’onde T peut évo- (LGL). Dans les deux cas, une voie anormale
quer soit une hypertrophie ventriculaire gauche, court-circuite le nœud AV, générant le raccour-
soit un bloc de branche gauche, pouvant être dus cissement de l’espace PR.
Fig. 7.1
Cardiomyopathie hypertrophique
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 70/min ;
• axe de QRS normal ;
• hypertrophie ventriculaire gauche reposant sur des critères de voltage (onde S en V1 = 28 mm, onde R
en V5= 30 mm) ;
• inversion profonde des ondes T en DI, DII, VL et V3-V6, avec un maximum en V4 ;
• cet ECG pourrait être plus en rapport avec une hypertrophie ventriculaire gauche qu’avec une
cardiomyopathie hypertrophique, mais l’inversion de l’onde T est spectaculaire et maximale en V4 et non
en V6. De même, une ischémie antérolatérale est peu probable du fait de l’importance de l’inversion
de l’onde T.
157
L’ECG au cours de palpitations ou de syncope
Au cours du syndrome de WPW, la voie anor- gauche, responsable d’une onde R dominante en
male assure la connexion entre l’oreillette et le V1 (figure 7.3 ; un autre exemple est fourni par la
ventricule, et le complexe QRS est élargi, avec figure 3.28). Cet aspect peut être confondu avec
un aspect « escamoté » du début de la branche celui d’une hypertrophie ventriculaire droite.
ascendante1. Dans le syndrome de WPW de type Moins communément, la voie anormale peut
A, la voie accessoire est située à gauche, assurant être située à droite, assurant la connexion entre
la connexion entre oreillette gauche et ventricule oreillette droite et ventricule droit, réalisant alors
1 le syndrome de WPW de type B (figure 7.4).
Habituellement appelé « onde delta » (NdT).
Fig. 7.3
159
L’ECG au cours de palpitations ou de syncope
Dans ce cas, il n’existe pas d’onde R dominante bien que l’aspect caractéristique en « M » des
en V1 mais une onde S profonde, et il existe une complexes QRS dans le bloc de branche gauche
inversion de l’onde T de territoire antérieur, ce ne s’observe pas au cours du syndrome de WPW.
qui pourrait orienter vers un diagnostic erroné Au cours du syndrome de LGL, la voie anor-
d’ischémie antérieure. L’élargissement du male connecte l’oreillette au faisceau de His, ce
complexe QRS observé dans les deux types de qui permet de comprendre que l’espace PR est
syndrome de WPW peut également conduire raccourci alors que le complexe QRS est normal
à une erreur diagnostique de bloc de branche, (figure 7.5).
Fig. 7.5
Le syndrome de Lown-Ganong-Levine
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 65/min ;
• axe de QRS normal ;
• espace PR court, 100 ms ;
• complexes QRS et ondes T normaux ;
• au cours du syndrome de LGL la voie accessoire connecte l’oreillette plutôt au faisceau de His qu’aux
ventricules droit ou gauche, raison pour laquelle le complexe QRS est normal.
160
L’ECG d’un patient non symptomatique 7
Intervalle QT long Quelle qu’en soit la cause, un intervalle QT
corrigé de 500 ms ou plus peut favoriser la sur-
L’intervalle QT varie avec la fréquence car-
venue d’une tachycardie ventriculaire paroxys-
diaque (ainsi qu’avec le sexe et le moment de
tique de type particulier appelée « torsade de
la journée). L’intervalle QT corrigé (QTc) peut
pointes », pouvant provoquer soit une sympto-
être calculé grâce à la formule de Bazett :
matologie typique de tachycardie paroxystique
soit une mort subite. La figure 7.7 montre l’enre-
QT gistrement continu d’un patient qui était traité
QTc =
(intervalle R - R) à l’aide d’une drogue anti-arythmique et qui a
présenté une fibrillation ventriculaire pendant
le monitorage. Quelques secondes avant l’arrêt
Un intervalle QTc supérieur à 450 ms est cardiaque, était apparu un accès transitoire de
vraisemblablement anormal. L’allongement de tachycardie à complexes larges montrant des
l’intervalle QT peut être d’origine congénitale complexes QRS dirigés vers le haut dans un
mais est plus souvent la conséquence de médi- premier temps, pour se diriger vers le bas par la
caments, en particulier les thérapeutiques anti- suite. Cet aspect est typique d’une tachycardie
arythmiques (encadré 7.1 et figure 7.6). ventriculaire de type « torsade de pointes ».
161
L’ECG au cours de palpitations ou de syncope
Fig. 7.6
Allongement de l’espace QT
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 75/min ;
• axe cardiaque normal ;
• ondes P difficiles à identifier dans certaines dérivations, mais mieux visibles en DI et VL ;
• complexes QRS normaux ;
• inversion des ondes T en DI, VL et V1-V6 ;
• espace QT 480 ms, espace QTc 520 ms ;
• chez ce patient, l’allongement de QT est dû à l’amiodarone.
162
L’ECG d’un patient non symptomatique 7
Fig. 7.7
163
L’ECG au cours de palpitations ou de syncope
Pathologie du nœud sino-auriculaire (figure 7.8). Elle peut également être associée
à des troubles de conduction variés, rythmes
La maladie du nœud sino-auriculaire, connue
d’échappement ou tachycardie paroxys-
sous le nom de « maladie du sinus2 » provoque
tique (encadré 7.2). Les patients peuvent par
typiquement une tachycardie sinusale inap-
ailleurs accuser vertiges ou syncopes, voire
propriée, mais est souvent asymptomatique
des symptômes évocateurs de tachycardie
2
Encore appelée « maladie rythmique auriculaire » ou parfois paroxystique.
syndrome « bradycardie-tachycardie » (NdT).
Fig. 7.8
Maladie du sinus
Notez :
• tout d’abord, observez la bande de « DII long » ;
• les trois premiers battements sont dus à un échappement du nœud auriculoventriculaire,
avec une fréquence de 35/min ;
• les ondes P peuvent être vues immédiatement devant ou immédiatement après le complexe QRS ;
• les trois battements suivants sont en rythme sinusal, à la fréquence de 68/min ;
• les complexes QRS et les ondes T sont normaux ;
• l’association de bradycardie sinusale et d’échappement nodal auriculoventriculaire est typique
164 de « maladie du sinus ».
L’ECG d’un patient non symptomatique 7
Encadré 7.2 Rythmes cardiaques associés Encadré 7.3 Étiologies des blocs
à une maladie du sinus auriculoventriculaires
BAV complet
• Idiopathique (fibrose du tissu de conduction).
• Congénital.
ASPECTS SUGGESTIFS D’UNE SYNCOPE • Cardiopathie ischémique.
• Rétrécissement valvulaire aortique.
SECONDAIRE À UNE BRADYCARDIE • Chirurgie et traumatismes.
Chez les sujets en bonne santé apparente qui
se plaignent d’accès de lipothymies, l’ECG au
repos peut montrer, en l’absence de symptômes,
une déviation axiale, une maladie du sinus, ou ambulatoire doit être envisagé afin de dépister
n’importe quelle variété de bloc intracardiaque. un bloc intermittent du 2e ou du 3e degré.
Le BAV du 1er degré, le BAV du 2e degré d’aspect Chez un patient porteur d’un bloc AV du 2e
« Wenckebach de type Mobitz 1 » et le bloc de degré (Mobitz de type 2, avec bloc 2/1 ou 3/1)
branche ne justifient en eux-mêmes aucun trai- ou un bloc AV complet (BAV du 3e degré), il
tement. Il en va de même de la combinaison de est vraisemblable que tout malaise ou syncope
ces différents blocs, telle que l’association BAV sont la conséquence d’une fréquence cardiaque
du 1er degré et bloc de branche (figure 7.9), basse, et la mise en place d’un stimulateur est
ou le bloc bifasciculaire (hémibloc antérieur indiquée sans le besoin d’un enregistrement
gauche et bloc de branche droit, figure 7.10). ambulatoire préalable.
Toutefois, de telles combinaisons peuvent être Il est important de prendre en compte les pos-
également associées à des blocs auriculoven- sibles causes sous-jacentes du bloc intracardiaque
triculaires de haut degré, et un enregistrement et celles-ci sont résumées dans l’ encadré 7.3.
165
L’ECG au cours de palpitations ou de syncope
Fig. 7.9
166
L’ECG d’un patient non symptomatique 7
Fig. 7.10
Bloc bifasciculaire
Notez :
• rythme sinusal, fréquence 70/min ;
• déviation axiale gauche (onde S plus ample que l’onde R en DII et DIII) ;
• bloc de branche droit - complexes QRS élargis (135 ms) ; aspect RSR’ en V1, et onde S élargie et mal définie
en V6.
167
L’ECG au cours de palpitations ou de syncope
RAPPELS
LES RYTHMES SUPRAVENTRICULAIRES
• En général, les rythmes supraventriculaires – aspect en dents de scie ;
sont caractérisés par des complexes QRS fins – bloc 2/1, 3/1 ou 4/1 ;
(moins de 120 ms), avec pour exception le bloc – accentuation du bloc au cours du massage
de branche gauche et le syndrome de WPW, du sinus carotidien.
qui comportent des complexes QRS larges.
• Fibrillation auriculaire :
• Rythme sinusal :
– le rythme le plus irrégulier de tous ;
– une onde P par complexe QRS ;
– la fréquence des complexes ventriculaires
– intervalle P-P variable avec la respiration est de manière caractéristique supérieure
(arythmie sinusale). à 160/min en l’absence de traitement mais
• Extrasystoles supraventriculaires : peut être moins élevée ;
– complexe QRS précoce ; – aucune onde P identifiable, mais la
– absence d’onde P, ou onde P malformée ligne de base est totalement variable
(atriale) ; et irrégulière.
– complexe QRS fin et normal ; • Tachycardie par réentrée nodale AV
– onde T normale ; (jonctionnelle) :
– l’onde P suivante est « remise à zéro ». – communément mais improprement
• Tachycardie auriculaire : appelée « tachycardie supraventriculaire » ;
– fréquence des complexes ventriculaires – absence d’ondes P ;
supérieure à 150/min ; – fréquence habituelle 150-180/min ;
– ondes P anormales, avec habituellement – le massage du sinus carotidien peut
un intervalle PR court ; provoquer le retour au rythme sinusal.
– habituellement une onde P par complexe • Rythmes d’échappement :
QRS, mais parfois fréquence des ondes P – bradycardies, dont les aspects ont été décrits
de 200 à 240/min, avec bloc 2/1. précédemment, la fibrillation auriculaire
• Flutter auriculaire : quant à elle ne saurait être considérée
– fréquence des ondes P de 300/min ; comme un rythme d’échappement. 169
L’ECG au cours de palpitations ou de syncope
et ceux d’une tachycardie ventriculaire, mais les La figure 7.11 montre un ECG présentant tous
recommandations suivantes (Rappels) pourront les éléments habituels d’une tachycardie ventricu-
vous aider. laire – déviation axiale gauche, complexes QRS
d’une durée de 180 ms, et tous les complexes des
dérivations précordiales dirigés vers le haut.
BRADYCARDIE INTERMITTENTE
RAPPELS
Une bradycardie intermittente secondaire à un
TACHYCARDIES À COMPLEXES LARGES trouble du rythme cardiaque, quel qu’il soit,
• Lorsqu’elle s’observe dans le contexte d’un peut provoquer un malaise ou une syncope si la
infarctus myocardique aigu, une tachycardie fréquence cardiaque est suffisamment abaissée.
à complexes élargis présente une forte Les athlètes peuvent être dans une forme parfaite
probabilité d’être d’origine ventriculaire. avec une fréquence cardiaque de 40/min, mais
une personne âgée peut présenter des malaises
• La comparaison avec un enregistrement
si la fréquence cardiaque chute au-dessous
effectué durant un épisode de rythme sinusal
de 60/min quelle qu’en soit la raison.
(si possible) montrera si un bloc de branche
Une fréquence cardiaque basse peut être due à
est normalement présent.
un bloc auriculoventriculaire du 2e ou du 3e degré
• Il faut tenter d’identifier les ondes P. (voir pages 38-43) ou à des « pauses », lorsque
• La déviation axiale gauche associée à un bloc la dépolarisation du nœud sinusal fait défaut.
de branche droit oriente habituellement C’est ce que l’on observe au cours de la maladie
vers un problème ventriculaire. de l’oreillette3. La figure 7.12 montre un enregis-
• Des complexes QRS fortement élargis (au-delà trement ambulatoire chez un patient atteint d’une
de 160 ms) sont habituellement le témoin maladie de l’oreillette, qui se plaignait d’accès de
d’une tachycardie ventriculaire. lipothymies dues à des pauses sinusales de 3,3 s.
Il n’existe pas de traitement médical efficace
• Lorsqu’il y a concordance : la tachycardie
d’une bradycardie symptomatique, et la sti-
ventriculaire est vraisemblable si les complexes
mulation cardiaque permanente peut devenir
QRS sont tous dirigés de manière prédominante
nécessaire.
vers le haut en dérivations précordiales.
Dans le contexte d’un infarctus myocardique
• Un rythme irrégulier à complexes larges est aigu, en particulier l’infarctus du myocarde
vraisemblablement une fibrillation auriculaire inférieur avec sus-décalage du segment ST, un
avec bloc de branche, ou une fibrillation bloc auriculoventriculaire complet n’est pas
auriculaire au cours du syndrome de WPW
(association dangereuse).
170 3
« Sick sinus syndrome » des Anglo-Saxons (NdT).
L’ECG d’un patient symptomatique 7
inhabituel. Il est habituellement transitoire et ne complique un infarctus du myocarde antérieur
nécessite pas d’entraînement électrosystolique avec sus-décalage de ST, une grande quantité de
en dehors d’un trouble hémodynamique dû tissu myocardique a habituellement été endom-
au ralentissement de la fréquence cardiaque. magée, ce qui peut rendre nécessaire l’entraîne-
Lorsqu’un bloc auriculoventriculaire complet ment électrosystolique transitoire.
Fig. 7.11
Tachycardie ventriculaire
Notez :
• tachycardie à complexes élargis, réguliers, fréquence 200/min ;
• aucune onde P visible ;
• déviation axiale gauche ;
• durée des complexes QRS de 180 ms (au dessus de 160 ms, le rythme est plus vraisemblablement
d’origine ventriculaire que supraventriculaire avec bloc de branche) ;
• les complexes QRS sont tous orientés dans la même direction (orientés vers le haut) en dérivations
« précordiales » (ici encore, l’origine ventriculaire est plus vraisemblable).
171
L’ECG au cours de palpitations ou de syncope
Fig. 7.12
173
L’ECG au cours de palpitations ou de syncope
Fig. 7.13
Stimulation ventriculaire
Notez :
• rythme de stimulation ventriculaire : il existe un spike1 effilé de stimulation avant chaque complexe QRS ;
• les complexes QRS sont élargis et anormaux ;
• fréquence sinusale 75/min ;
• allongement de l’espace PR, 280 ms ;
• chaque battement stimulé fait suite à une onde P ;
• ce pourrait être une stimulation de type VVI mais le pacemaker est probablement réglé sur la fréquence
auriculaire grâce à un cathéter de détection situé dans l’oreillette droite (stimulation de type DDD).
1
Mot à mot : « pointe effilée ». Le terme anglo-saxon spike est en pratique le seul utilisé(NdT).
174
Stimulateurs cardiaques 7
Fig. 7.14
Stimulation auriculaire
Notez :
• rythme de stimulation auriculaire, montrant un spike effilé de stimulation précédant chaque onde P ;
• intervalle PR normal ;
• les complexes QRS sont étroits mais il manque l’augmentation d’amplitude des ondes R en dérivations
antérieures, ce qui est en faveur d’un infarctus myocardique antérieur ancien ;
• ondes T inversées en DII, VL et V4-V6, compatibles avec une pathologie ischémique ;
• au cours de la stimulation auriculaire, les complexes QRS et les ondes T peuvent être analysés, alors
que dans la stimulation ventriculaire, ils sont nécessairement anormaux.
175
L’ECG au cours de palpitations ou de syncope
Fig. 7.15
177
Le moment est venu
de vous évaluer 8
Électrocardiogrammes avec histoires 3. Examinez bien toutes les dérivations et
cliniques 184 décrivez l’ECG toujours dans le même ordre :
– fréquence et rythme ;
Description et interprétation des ECG 190
– conduction ;
– espace PR si le rythme est sinusal ;
Vous devez à présent être capable de reconnaître – axe cardiaque ;
les aspects les plus communs de l’ECG, et ce der- – complexes QRS :
nier chapitre contient 10 tracés-12 dérivations • durée,
que vous devrez interpréter. Mais n’oubliez pas • hauteur des ondes R et des ondes S,
deux éléments importants : tout d’abord, l’ECG • présence d’ondes Q ;
provient d’un individu, le « patient », et doit être – segment ST ;
interprété tout en ayant à l’esprit l’histoire de – onde T.
ce patient ; ensuite, l’enregistrement et l’inter- 4. Gardez présente à l’esprit la fourchette
prétation du tracé servent à bien peu de choses de normalité, et en particulier souvenez-vous
si vous n’êtes pas déjà préparé à mettre en route des dérivations qui peuvent présenter une
les gestes découlant de votre diagnostic. onde T inversée sur un tracé normal.
Lorsque vous effectuez le compte-rendu d’un
C’est seulement après avoir soigneusement
ECG, souvenez-vous de ce qui suit :
réfléchi à l’ensemble des particularités du tracé
1. L’ECG, c’est facile. ECG, et à l’histoire clinique du patient, que vous
2. Un compte rendu comprend deux parties : pourrez poser un diagnostic. Vous pouvez trouver
la description et l’interprétation. utile de consulter les rappels fournis ci-dessous. 179
Le moment est venu de vous évaluer
RAPPELS
CE QU’IL FAUT RECHERCHER
1. Le rythme et la conduction : au niveau du septum interventriculaire
• rythme sinusal ou arythmie débutante ; (normalement en V3 ou V4) ;
• mise en évidence de bloc – une rotation horaire (onde S persistante en
auriculoventriculaire du 1er, 2e ou 3e degré ; V6) témoigne d’une pathologie pulmonaire
chronique.
• mise en évidence d’un bloc de branche.
2. Anomalies des ondes P :
• ondes Q :
– septales ?
• ondes P amples et pointues – hypertrophie
auriculaire droite ; – liées à un infarctus ?
• ondes P bifides et élargies – hypertrophie 5. Le segment ST :
auriculaire gauche. • surélevé dans l’infarctus du myocarde et la
3. L’axe cardiaque : péricardite ;
• déviation axiale droite – complexe QRS à • sous-décalé lors de l’ischémie myocardique
orientation prédominante vers le bas en DI ; ou d’un traitement par la digoxine.
• déviation axiale gauche – complexe QRS à 6. Les ondes T :
orientation prédominante vers le bas en DII et • pointues en présence d’une hyperkaliémie ;
DIII. • aplaties et allongées dans l’hypokaliémie ;
4. Le complexe QRS : • inversées :
• largeur : – normal dans certaines dérivations,
– s’il est élargi, origine ventriculaire, bloc de – ischémie,
branche ou syndrome de WPW.
– infarctus,
• hauteur : – hypertrophie ventriculaire gauche ou
– grandes ondes R en V1 dans l’hypertrophie droite,
ventriculaire droite ;
– embolie pulmonaire,
– grandes ondes R en V6 dans l’hypertrophie
– bloc de branche.
ventriculaire gauche.
7. Ondes U :
• zone de transition :
– les ondes R et les ondes S sont d’égale
• peuvent être normales ;
180 amplitude en dérivations précordiales • hypokaliémie.
8
RAPPELS
TROUBLES DE CONDUCTION
Bloc AV du 1er degré • Ondes T négatives en V1, et parfois en V2-V3.
• Une onde P par complexe QRS. • Ondes S larges et profondes en V6.
• Intervalle PR supérieur à 200 ms.
Hémibloc antérieur gauche
e
Bloc AV du 2 degré • Importante déviation axiale gauche – ondes S
• Wenckebach (Mobitz type 1) : allongement profondes en DII et DIII, avec, habituellement,
progressif de l’espace PR jusqu’à une onde P un complexe QRS légèrement élargi.
non conduite puis répétition du cycle.
• Mobitz type 2 : battements non conduits de Bloc de branche gauche
manière aléatoire. • Durée des complexes QRS supérieure à
• Bloc AV 2/1 (ou 3/1) : deux (ou trois) ondes 120 ms.
P pour un complexe QRS, la fréquence • Aspect en « M » en V6, et parfois en V4-V5.
auriculaire étant normale. • Absence d’ondes Q septales.
• Ondes T négatives en DI, VL, V5-V6 et, parfois,
Bloc AV du 3e degré (BAV complet) en V4.
• Aucune relation entre ondes P et complexes
QRS. Boc bifasciculaire
• Complexes QRS habituellement élargis. • Hémibloc antérieur gauche et bloc de
• Fréquence du complexe QRS habituellement branche droit (voir ci-dessus).
inférieure à 50/min.
• Fréquence des complexes QRS
habituellement inférieure à 50-60/min.
RAPPELS
CAUSES DE DÉVIATION AXIALE
Déviation axiale droite Déviation axiale gauche
• Variante de la normale – sujets grands et minces. • Hémibloc antérieur gauche.
• Hypertrophie ventriculaire droite. • Syndrome de WPW.
• Infarctus du myocarde de siège latéral • Infarctus du myocarde de siège inférieur
(bloc péri-infarctus). (bloc péri-infarctus).
• Dextrocardie ou inversion des électrodes • Tachycardie ventriculaire.
bras droit/bras gauche.
• Syndrome de Wolff-Parkinson-White (WPW).
• Bloc fasciculaire postérieur gauche.
RAPPELS
IMPLICATIONS POSSIBLES DE CERTAINS ASPECTS ÉLECTROCARDIOGRAPHIQUES
P/QRS apparemment différent de 1/1 • si la fréquence des complexes QRS est basse, il
Si vous ne pouvez identifier une onde P s’agit probablement d’un rythme d’échappement.
par complexe QRS, envisagez ce qui suit : P/QRS supérieur à 1/1
• si l’onde P est réellement présente mais Si vous pouvez observer plus d’ondes P
difficile à identifier, fixez particulièrement
que de complexes QRS, considérez ce qui suit :
votre attention sur les dérivations DII et V1 ;
• si la fréquence des ondes P est de 300/min,
• si les complexes QRS sont irréguliers, le le rythme est un flutter auriculaire ;
rythme concerné est probablement de la
• si la fréquence des ondes P se situe entre 150
fibrillation auriculaire, et ce que vous pensez
et 200/min, et qu’il existe deux ondes P pour
être une onde P est une fausse impression ;
un complexe QRS, le rythme
• si la fréquence des complexes ventriculaires est une tachycardie atriale avec bloc ;
est rapide et qu’il n’existe pas d’ondes P, des
• la fréquence des ondes P est normale
si
complexes QRS élargis sont en faveur d’une (c’est-à-dire 60-100/min) et que la conduction
tachycardie ventriculaire, et des complexes est de type 2/1, le rythme est sinusal avec
QRS fins sont en faveur d’une tachycardie par bloc AV du deuxième degré ;
réentrée nodale AV (jonctionnelle ou nodale) ;
suite
182
8
RAPPELS
IMPLICATIONS POSSIBLES DE CERTAINS ASPECTS ÉLECTROCARDIOGRAPHIQUES— suite
ECG 1
ECG enregistré chez une jeune étudiante de 20 ans accusant une douleur thoracique non spécifique ;
aucune anomalie décelée à l’examen clinique.
184
Électrocardiogrammes avec histoires cliniques 8
ECG 2
ECG enregistré chez une étudiante présentant un souffle systolique de timbre éjectionnel et un deuxième
bruit très nettement dédoublé.
ECG 3
ECG d’une femme de 80 ans se plaignant de malaises lipothymiques. Par ailleurs, elle semble être en bonne santé. 185
Le moment est venu de vous évaluer
ECG 4
ECG d’un homme hospitalisé en unité de soins coronariens pour un infarctus du myocarde, qui brutalement
accuse un accès de dyspnée accompagné d’une recrudescence de la douleur thoracique.
ECG 5
186 ECG chez un homme âgé de 60 ans qui avait ressenti une violente douleur thoracique deux jours plus tôt.
Électrocardiogrammes avec histoires cliniques 8
ECG 6
ECG d’un homme de 60 ans qui se plaignait de lipothymies et d’une gène thoracique à la marche en montée.
ECG 7
ECG enregistré chez une femme de 70 ans de petite taille, en insuffisance cardiaque, dont les symptômes
cliniques les plus importants sont nausées et somnolence. 187
Le moment est venu de vous évaluer
ECG 8
ECG enregistré chez un homme de de 30 ans souffrant d’hypertension artérielle. Le pouls des chevilles est
difficilement perçu.
ECG 9
188 ECG d’un homme de 25 ans se plaignant de palpitations, dyspnée et malaises lipothymiques.
Électrocardiogrammes avec histoires cliniques 8
ECG 10
ECG d’un homme de 50 ans se plaignant d’une violente douleur thoracique ayant duré deux heures. Il n’existait
pas d’anomalies à l’examen clinique.
189
Le moment est venu de vous évaluer
190
Description et interprétation des ECG 8
Interprétation de l’ECG aider à la prise de décision thérapeutique (modali-
tés et moment de la fermeture chirurgicale).
Il n’existe pas de problème de conduction entre
oreillettes et ventricules car l’intervalle PR est
ECG 3
normal et ne varie pas. L’allongement de la durée
des complexes QRS est le témoin d’un retard de Cet ECG montre :
conduction à l’intérieur des ventricules. L’aspect
RSR’ en V1 et l’onde S profonde et large en V6
• rythme sinusal ;
(voir des extraits du tracé ci-dessous) sont carac-
• battements alternativement conduits et non
conduits ;
téristiques d’un bloc de branche droit (BBD).
Un problème ? Si tel est le cas, reportez-vous
• espace PR normal des battements conduits ;
aux pages 45-46.
• déviation axiale gauche (ondes S profondes
en DII et DIII) ;
• complexes QRS élargis (durée 160 ms) ;
Prise en charge clinique • aspect RSR’ en V1 ;
Cette histoire évoque la possibilité d’une cardio- • notez : les « pseudo-spikes » effilés sont dus
pathie congénitale chez cette jeune femme. Un aux changements de dérivations et non à un
dédoublement net et permanent du deuxième pacemaker.
bruit est la manifestation clinique du BBD, associé
au retard de fermeture de la valve pulmonaire. Le Interprétation de l’ECG
bloc de branche droit est caractéristique d’un défaut
L’alternance d’ondes P conduites et non conduites
septal interauriculaire, et un échocardiogramme
témoigne d’un bloc auriculoventriculaire du 2e
est indispensable pour confirmer le diagnostic et
degré, ce qui explique la fréquence cardiaque
basse. La déviation axiale gauche témoigne d’un
blocage de la conduction dans le faisceau anté-
rieur de la branche gauche du faisceau de His,
et l’aspect RSR’ en V1 témoigne d’un bloc de
branche droit (voir plus bas les extraits des tracés).
Mention en a été faite au chapitre 2.
193
Le moment est venu de vous évaluer
194
Description et interprétation des ECG 8
d’urgence, dans l’optique d’un remplacement
valvulaire aortique dans de brefs délais.
ECG 7
L’ECG montre :
• fibrillation auriculaire ;
• axe cardiaque normal ;
• complexes QRS normaux ;
• segment ST incliné vers le bas, bien visible
en V4-V6 ;
• onde U bien visible en V2.
en « M », le plus visible en dérivations latérales
Interprétation de l’ECG
(voir l’extrait de V6, ci-dessus), indique qu’il s’agit
d’un bloc de branche gauche (BBG). Au cours du Le rythme totalement irrégulier avec complexes
BBG, les ondes T sont habituellement inversées en QRS fins est nécessairement dû à la fibrillation
dérivations latérales et n’ont pas de signification auriculaire, même si l’irrégularité habituelle de la
supplémentaire. En présence d’un BBG, l’ECG ne ligne de base n’est pas très évidente. L’aspect en
peut pas être interprété plus avant et par consé- cupule du segment ST indique la prise de digoxine
quent il n’est pas possible de donner un avis sur la par la patiente, ce qui permet d’expliquer le bon
présence ou l’absence d’ischémie. contrôle de la fréquence ventriculaire (en l’absence
Si vous avez besoin de vérifier, reportez-vous de traitement de la fibrillation auriculaire, la
aux pages 44 et 46. fréquence ventriculaire serait habituellement
rapide) ; et les ondes U suggèrent une hypokalié-
Prise en charge clinique mie (voir plus bas l’échantillon de tracé : en V5,
L’histoire clinique évoque de l’angine de poi- l’aspect en cupule est indiqué par une flèche).
trine, mais lorsque l’angor est associé à des épi- Si vous avez commis une erreur d’interpréta-
sodes de malaise, il faut toujours avoir à l’esprit tion, reportez-vous à la page 103.
l’hypothèse d’une sténose aortique, qui peut
aussi être à l’origine d’angor, même lorsque les Prise en charge clinique
artères coronaires sont normales. Le BBG est Si cette patiente traitée par de la digoxine se
habituel au cours de la sténose aortique. Un plaint de nausées, il s’agit probablement d’une
patient porteur d’une sténose aortique et qui res- toxicité de la digoxine, et l’hypokaliémie peut
sent des malaises à l’effort est gravement menacé être en rapport avec le surdosage. L’hypoka-
de mort subite, ce qui justifie une exploration liémie s’observe généralement chez les patients 195
Le moment est venu de vous évaluer
Interprétation de l’ECG
Les complexes QRS sont fins, il s’agit donc
d’une tachycardie supraventriculaire. Elle est
régulière, ce n’est donc pas de la fibrillation
auriculaire. Aucune onde P n’est visible, ce n’est
donc pas un rythme sinusal, une tachycardie
atriale ou un flutter auriculaire (voir l’échan-
tillon du tracé, plus bas). Ce doit être une tachy-
Si vous avez besoin d’aide concernant cette
cardie par réentrée nodale auriculoventriculaire
énigme, relisez les pages 92-93.
ou jonctionnelle (parfois – ce qui n’est pas très
logique – qualifiée de tachycardie supraventri-
Prise en charge clinique culaire ou TSV).
Ce patient présente des critères évidents, En cas de difficulté, reportez-vous aux pages
cliniques et électriques, d’hypertrophie ven- 71-72.
triculaire gauche, mais le diagnostic n’est pas
complet – quelle peut être la cause de l’hyper-
tension artérielle ? Un adulte jeune hypertendu,
chez qui, de surcroît, les pouls des membres
inférieurs sont mal perçus, est presque certai-
nement porteur d’une coarctation de l’aorte,
laquelle justifie investigations et traitement.
ECG 9
Cet ECG montre :
• complexes QRS fins (durée inférieure
à 120 ms) ;
• tachycardie à 200/min ; 197
Le moment est venu de vous évaluer
202