Vous êtes sur la page 1sur 34

RHÉTORIQUE ET

FIGURES DE STYLE
VOYAGE AU PAYS DE L’ART ORATOIRE ET DES PROCÉDÉS STYLISTIQUE POUR FAÇONNER UN ÉCRIT
ET/OU UN DISCOURS PARFAIT.
AUTRE TITRE POSSIBLE : BIENVENUE EN ENFER.
LA RHÉTORIQUE

• Art ancien naît chez les Pré-Socratiques et dont Aristote (encore lui) a donné la
définition la plus commune et admise (celle qui nous sert de base encore aujourd’hui) :
« Quand nous possèderions la science la plus exacte, il est certains hommes qu’il ne nous serait pas facile de
persuader en puisant nos discours à cette seule source ; le discours selon la science appartient à
l’enseignement, et il est impossible de l’employer ici, où les preuves et les discours doivent nécessairement
en passer par les notions communes » (Aristote, Rhétorique, I).

• Discours donc qui doit s’adapter en fonction de l’auditoire pour être compris.
LES TROIS GENRES DE L’ÉLOQUENCE

• Trois genres sont distingués : délibératif, judiciaire et épidictique.


• Chacun appelle un auditoire différent :
• Délibératif > une assemblée,
• Judiciaire > des juges,
• Épidictique > genre d’éloge, public déjà acquis.
GENRE DE L’ÉLOQUENCE ET ARGUMENTS

• Trois types d’arguments :


• l’exemple pour le premier
• Le paquet de pâtes pour la baisse des APL
• le syllogisme pour le second
• Tous les hommes sont mortels, or Socrate est un homme, donc Socrate est mortel.
• la narration et l’amplification pour le troisième
• Le but étant de valoriser une histoire peut-être morne, pensez hyperboles, hypotyposes, etc.
GENRES DE L’ÉLOQUENCE ET RAISONNEMENT

• Deux types de raisonnement en découlent :


• inductif pour le délibératif
• du particulier au général = les besoins de telle population aboutissent à une loi pour tous
• déductif pour le judiciaire
• du général au particulier = il est interdit par la loi de voler, donc un voleur sera jugé et condamné
• Pour le genre épidictique, il s’agit de célébrer quelqu’un. Il n’est donc pas question de
raisonnement : la célébration tient plus du pathos que du logos.
LES CINQ PARTIES DE LA RHÉTORIQUE

• 5 parties divisent l’élaboration d’un discours rhétorique.


• L’inventio : recherche des idées et arguments (lesquels feraient mouches, lesquels non ?)
• La dispositio : mise en place des dits arguments, art de classer et ranger selon un plan
(thématique, analytique, schématique, etc.)
• L’elocutio : ensemble des techniques qui permettent d’écrire le discours. Le terme ne se
réfère pas à l’oral. C’est le style, l’ornement et les procédés qui permettent de mettre en
avant les arguments et de faire un beau discours.
• L’actio : ensemble des techniques orales (voix, ton, gestes, etc.) qui permettent de donner vie
au discours.
• Certains traités rajoutent la mémoria qui regroupe les techniques qui permettent de retenir
les arguments sans notes.
L’INVENTIO

• Trois types d’arguments : ethos, pathos et logos.


• Ethos : les arguments d’autorité. Pensez au masque que doit prendre le rhéteur pour affirmer
sa thèse.
• Pathos : joue sur les affects (pitié, haine, colère, admiration, etc.). Pensez au pathétique, qui est
une émotion ressentie par le spectateur voyant le malheur sur scène.
• Logos : les arguments dépassionnés, ceux qui sont logiques (issus d’un raisonnement). Pensez
au suffixe –logie qui induit une science (numérologie, astrologie, philologie, etc.)
LA DISPOSITIO

• Autant de plans que de discours mais un schéma quasi commun.


• 1re étape : l’exorde => captiver et annoncer (le utile dulci) avec une capatatio benevolentiae (« captation
de la bienveillance », bien souvent une posture d’humilité) et la partitio (annonce du plan),
• 2e étape : la narration qui consiste en l’exposé des faits (narration des faits et des lieux, des
personnes ou autre),
• 3e étape : la confirmation est l’exposé des arguments et preuves. Comment les disposer ? Du plus
fort au plus faible ? Ou inversement ?,
• 4e étape : la digression est le moment où l’orateur rattrape son public en excitant le pathos
(anecdote, expérience personnelle, etc.),
• 5e étape : la péroraison où il est question de la harangue finale, du dernier verbe fort tout en
reprenant les grandes lignes du discours (conclusion générale du propos).
L’ELOCUTIO

• Trois styles se distinguent selon les objectifs


• Le style simple convient à l’information et l’explication => narration et confirmation. Style
dépouillé.
• Le style moyen est plus fleuri, plus orné, il convient à l’exorde et la digression.
• Le style élevé est celui qui porte toute la majesté du verbe : il doit faire vibrer => péroraison.

• Tous ces styles sont soutenus par les figures de style.


MYLÈNE ET LES 1001
FIGURES DE STYLE
LES FIGURES DE STYLE, QUESTION DE CLASSEMENT

• Figures de sens ou tropes : métaphore, • Figures de mots : néologismes,


comparaison, métonymie, synecdoque, archaïsmes, assonances, allitérations, etc.
etc.
• Figures de construction : chiasme,
• Figures de pensée : ironie, paradoxe, parallélisme, anacoluthe, anaphore, etc.
hyperbole, prolepse, analepse, etc.
CHAPITRE 1 :
LES TROPES ET FIGURES DE SUBSTITUTION
• Deux systèmes : métaphorique ou métonymique.
• Le premier se base sur l’analogie (x selon y)
• Le second sur la base la contiguïté (x pour y)
• Il faut, dans tous les cas, distinguer Signifiant, Signifié 1 (sens propre) et Signifié 2 (sens
figuré) notés Sa-Sé1-Sé2.
LA COMPARAISON

• Rapprochement entre deux termes avec un lien explicite.


• Deux modes : figuratives ou non. Elle est figure lorsqu’elle rapproche deux termes qui
n’appartiennent pas à la même isotopie.
« La culture, c’est comme la confiture, plus on en a moins on l’étale ». Culture est le thème ou
comparé, confiture est le phore (comparant) et les deux n’appartiennent pas à la même famille de
sens.
LA MÉTAPHORE

• Le plus dur des tropes (on y vient enfin).


• Trope qui joue sur un rapport analogique comme la comparaison mais sans outil de
comparaison explicite (définition la plus simple). On complique les choses.
• Pour qu’il y ait métaphore, il faut rapprocher des éléments sémantiques communs à deux
isotopies (là où la métonymie fonctionne sur une seule isotopie).
« Vous êtes le sel de la terre » : le Sa « Sel » renvoie au condiment et aux disciples mais Sé1 et Sé2
font partie de deux isotopes différentes mais dont on peut trouver des points communs : exhausteurs
de goût, de saveur, de savoirs.
• Lorsqu’une métaphore permet de « nommer » quelque chose que le langage n’a jamais réussi
à faire, elle devient une catachrèse : une « bouche » de métro.
COMPLIQUONS LA MÉTAPHORE

• Deux types de métaphore : in absentia et in praesentia.


• Une métaphore in praesentia est une métaphore où Ca et Cé se retrouvent dans une certaine
proximité (juxtaposition, apposition, complément de nom, verbe « être »). Elle n’a pas besoin
d’être justifiée puisque les deux sont explicites, elles sont donc plus « claires »

• Une métaphore in absentia consiste en l’absence du Cé (moins souvent du Ca) et a donc


besoin d’être justifiée. Bien souvent il faut poursuivre la lecture ou regarder le paratexte
pour comprendre la métaphore.
« Mais pourvu qu’elles soient douces / D’un poète tu n’as que la lune en tête […] Tout est beau si
c’est vu de dos » (Pourvu qu’elles soient douces) où il faut voir derrière la lune comme les fesses.
LA MÉTAPHORE FILÉE

• Il s’agit d’une métaphore continuée sur plusieurs vers/phrases. Elle est continuée à partir
d’un réseau de Signifiants (Sa) cohérents à un même réseau sémantique.
• Ainsi la métaphore de la marine et de la mer déchaînée pour parler des périodes
révolutionnaires en France par Musset utilise des termes issus du même réseau
sémantique (houle, mer déchaînée, vents violents, traversée par quelques navires,
naufrages, etc.)
• Elle peut être in praesentia ou in absentia.
ALLÉGORISME ET ALLÉGORIE

• Il s’agit d’une image développée sous la forme d’un récit ou d’un tableau.
• L’allégorie, dans son sens le plus simple, est la représentation concrète d’une idée
abstraite. Cette définition, issue des arts plastiques, n’est valable en littérature que lorsque
l’allégorie est soutenue par un ensemble d’attributs et de tropes cohérents. Si on humanise
des idées abstraites de manière elliptique, il s’agit d’une personnification.
• Vois cette veuve noire / Tu l'as aimée / Pauvre amoureux d'un soir de mai / Vois cette dame noire /
L'heure a sonné / Tu périras ce soir de mai (La Veuve Noire).

• L’allégorisme ne doit se lire que dans son sens figuré : ainsi, le texte de Musset est un
allégorisme (d’où la proximité entre métaphore filée et allégorisme). Toutefois, les deux ne
sauraient se confondre au sens où un allégorisme n’est toujours que la représentation
concrète d’une abstraction. La métaphore filée peut aller dans un sens comme dans l’autre.
MÉTONYMIE ET SYNECDOQUE

• Si la métaphore appelle deux isotopies différentes, le système métonomyco-


synecdochique n’en appelle qu’une.
• Dans le cas de la métonymie, Sa perd son Sé1 pour le Sé2 sur le principe de contiguïté
(« Bouteille » = récipient > vin). Dans le cas de la synecdoque, Sé2 est inclus dans Sé1.
• La proximité des figures appelle aujourd’hui un traitement global du trope.
• Il convient d’analyser le rapports entre les deux pour savoir duquel des deux tropes il
s’agit (si traitement global, il faut tout de même préciser le rapport).
LES RAPPORTS MÉTONYMIQUES

• Contenant/contenu : « boire une bouteille, boire un verre ». • Physique/moral : « avoir du nez » pour être perspicace.

• Instrument/utilisateur : un « tambour » (désignant le • Objet propre/personne : « le petit chaperon rouge ».


percussionniste).
• Maître/entité : « Napoléon fut vainqueur » pour l’armée
• Effet/cause : « trembler » (avoir peur). napoléonienne.

• Cause/effet : « un coup de soleil » (pour une plaque suite à • Abstrait/concret : une « horreur » (une œuvre horrible)
l’exposition).
• Concret/abstrait : le « fer » pour la servitude.
• Lieu/chose : « l’Elysée » (le Président).

• Lieu d’origine du produit : un « cantal » pour le fromage.

• Signe/chose : la « Couronne » pour la royauté.


LES RAPPORTS SYNECDOCHIQUES

• Tout/partie : une usine en grève (les ouvriers), une voile (un bateau)
• Matière/objet : un marbre (une statue)
• Genre/espèce : le pain (pour désigner l’ensemble de la nourriture)
• Pluriel/singulier : le lecteur (pour les lecteurs), des de Gaulle (ériger de Gaulle en modèle)
AUTRES TROPES

• L’antonomase : consiste à remplacer un nom commun par un nom propre ou inversement.


• Un « Alceste » = un misanthrope, un « Harpagon » = un avare.
• Le « Père des peuples » = Staline.

• La périphrase : il s’agit de remplacer un nom par un énoncé plus long, qualifiant ou désignant
un trait saillant du nom (physique, moral, etc.)
• Roi des astres = Soleil
• La veuve d’Hector : Andromaque.

• La métalepse : remplacer un idée par quelque chose qui la précède.


• « Vous avez bu » pour « vous dîtes des sottises ».
CHAPITRE II :
FIGURES DE MOTS
• Tous les procédés qui touchent aux signifiants et non plus aux signifiés (tropes).
JEUX LEXICAUX : CRÉATIONS

• Pataquès et malproprisme : faute de liaison, déformation d’un mot, régionalismes. (schuc pour du sucre)
• Néologisme : création consciente d’un mot nouveau (s’il n’apparaît qu’une seule et unique fois, hapax).
• Mot-valise : combinaison de deux mots donnant un mot nouveau. (Brangélina, etc.)
• Archaïsme : usage d’un lexique, d’un sens de mot ou d’une tournure grammaticale désuète (lexical,
sémantique ou grammatical).
• Etymologisme : utilisation d’un mot ou d’une expression dans son sens historique.
• Histoire de fesses / C’est un con, c’est un cas / Je le confesse (Histoire de fesses). L’étymologie de con étant culus,
il partage son étymon avec le mot « cul ».

• Hypocorisme : volonté de rendre un discours tendre et affectueux (fifille, pauvrette, etc.)


DISTINCTIONS

• Diaphore et antanaclase : reprise d’un mot sous deux acceptions différentes pour les
confronter voire les opposer. Si le mot vient du même interlocuteur = diaphore, s’il est repris
par un autre interlocuteur = antanaclase. Tendance à confondre les deux admise.
• « L’amour, le loup est risque . […] L’amour, mon loup se risque » (Oui mais… non)
• Syllepse oratoire : employer un mot pour son sens propre et son sens figuré.
• « Penché sur l'onde et sur l'immensité », V. Hugo. Ici, il faut lire l’immensité comme l’immensité de
l’océan, et l’immensité immatérielle des pensées.
• Polyptote : reprendre un même terme en lui faisant subir des changements morphosyntaxiques.
Possible uniquement pour les verbes en langue française.
• Dérivation : rapprocher deux termes issus du même radical (dont les affixes changent).
JEUX SUR LES SONORITÉS ET LES RESSEMBLANCES :
RESSEMBLANCE, MIMÉTISME
• Assonance : répétition d’un même son voyelle.
• Allitération : répétition d’un même son consonne.
• Harmonie imitative : ensemble de procédés phonétiques qui permettent d’imiter quelque
chose de la nature ou de suggérer un sentiment.
• Appelle mon numéro • Délit de l'émoi
Compose ma vie Mon au-delà c'est l'i...
Appelle mon numéro ...vresse du geste
Fais-moi l'hallali À la folie j'ai "l'a...llo"
Appelle mon numéro Qui me dit : Au lit, là !
Donne-moi le "la" L'embellie c'est l'o...
Lalalala ...reiller, de rêve
Lalalala (Appelle mon numéro)
Appelle-moi
JEUX SUR LES SONORITÉS ET LES RESSEMBLANCES :
RESSEMBLANCE, MIMÉTISME
• Homéotéleute : ressemblance entre les finales de mots situés à proximités les uns des
autres.
• Destin fragile et monde hostile, on devient fou (Oui mais… non)
• Ton regard oblique, en rien n’est lubrique, ta maman t’a trop fessé (Pourvu qu’elles soient
douces)

• Homéoptote : ressemblance entre les finales due à la conjugaison


• Veni, vidi, vici = je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu.
JEUX SUR LES SONORITÉS ET LES RESSEMBLANCES :
RESSEMBLANCE, MIMÉTISME
• Homographie : ressemblance graphique entre deux mots (des parents, ils parent).
• Homonymie : ressemblance phonique et graphique (un page, une page).
• Homophonie : ressemblance phonique entre deux mots = seule cette dernière est figure.
• C’est celle qui, à la rime, donne la notion de rime équivoquée.

• Paronomase : ressemblance phonique entre deux termes paronymiques (quasi


ressemblance).
• Bulle de chagrin, boule d’incertitude (Ainsi soit je)
CHAPITRE III :
FIGURES DE PENSÉE
• Catégorie floue puisque moins précise que les tropes (moins rigoureuse). On peut
comprendre un texte sans saisir toutes les figures de pensée qui s’y trouvent (là où si on
rate une métaphore, les choses se compliquent…)
IRONIE ET PROCÉDÉS

• Traditionnellement : dire le contraire de ce que l’on pense. Mais se limiter à cela


reviendrait à dire que l’ironie = antiphrase (qui est le nom de la figure).
• L’ironie peut évidemment s’appuyer/s’embrayer sur un énoncé antiphrastique, mais
d’autres procédés peuvent venir appuyer.
• Polyphonie : plus un procédé qu’une réelle figure, il s’agit de voir que plusieurs voix
parlent dans un même texte : personnage, auteur, lecteur virtuel, etc.
PROCÉDÉS DE L’ANTIPHRASE

• Diasyrme : faux éloge.


• Astéisme : faux blâme.
• Chleuasme : fausse modestie où l’on feint échouer pour mieux réussir (procédé de la
captation benevolentiae).
• Épitrope : inviter l’autre à faire le mal dans le but de lui interdire.
• Concession : formuler l’objection qu’on prête au destinataire pour mieux la réfuter.
PARADOXES

• Paradoxisme : association de termes contradictoires.


• « Il tomba sur le trône » : il y a antithèse entre l’idée de tomber et l’élévation du trône.
• « La Mélancholie, c’est le bonheur d’être triste » - V. Hugo.

• Antilogie : paradoxe poussé jusqu’à l’absurde.


• « Je mentirais si je disais la vérité »

• Paryponoïan : idée qui jaillit de son contraire.


• « Ses yeux pétillaient de bêtises » - M. Proust. L’association paradoxal de pétiller et de bêtise permet de se
moquer du personnage en question

• Oxymore : association de deux termes antithétiques dans un même syntagme.


• « Clair obscur »
PROCÉDÉS D’INTENSITÉ : AUGMENTATION

• L’hyperbole : consiste à exagérer un énoncé. Si elle porte un sens positif = auxèse, si elle
porte un sens négatif = tapinose, si elle produit une image impossible = adynation.
• Un rien devient l’Éverest (L’instant X).

• La litote : atténuer la valeur d’un énoncé pour lui donner plus de force.
• Il est un peu demeuré = il est complètement idiot.
PROCÉDÉS D’INTENSITÉ : DIMINUTION

• Euphémisme : adoucir une réalité grossière, violente (souvent la mort, la blessure, etc.)
• Petit bonhomme s'est endormi
Comme une pomme, on t'a cueilli
Ta tête penche, est-ce pour me voir?
Au loin balance la corde noire (Jardin de Vienne)

• Exténuation : volonté d’atténuer un propos. À ne pas confondre avec la litote. Il s’agit de


réellement réduire le sens d’un énoncé
• Ça n’est pas du gâteau.

Vous aimerez peut-être aussi