Dirasat, Human and Social Sciences, Volume 43, No.

3, 2016

Classification des verbes performatifs et leurs domaines sémémiques,

étude lexico sémantique

Mohamed Al-Matalka*

RESUME
Cette recherche propose de classer les verbes performatifs selon l'orientation de leur portée illocutoire. Nous
distinguons les performatifs réflexifs; ceux qui portent sur l'énonciateur lui-même, et les performatifs non
réflexifs; ceux qui portent sur l'énonciataire. Il est possible de dégager des domaines sémémiques qui organisent
le paradigme des verbes performatifs. Nous distinguons ainsi quatre domaines sémémiques, chacun regroupant
un certain nombre de verbe qui présentent des affinités quant à leurs valeurs illocutoires: Conseil, Requête,
Exigence et Ordre.

Keywords: Verbes Performatifs, Valeur Illocutoire, Enonciation, Domaine Sémémique.

Introduction verbes assument la même fonction avec cette différence

Plusieurs verbes employés dans les constructions Je V
Prép. (de/à) P où les verbes sont indicateurs de mande.
Ainsi, les exemples suivants:
Je vous ordonne de partir
Je vous prie de partir
Je vous conseille de partir.
sont des énoncés directifs dont le contenu
propositionnel est le même, mais dont les valeurs
illocutoires sont différentes. Ces verbes introducteurs du
contenu propositionnel spécifient que l'énonciateur
désire que l'état de choses décrit soit réalisé, et
indiquent aussi quelle est la valeur de l'acte effectuée
par et dans chaque énonciation, la prescription avec le
verbe ordonner se situe dans le domaine de l'imposition,
de la sommation, en opposition aux verbes prier et
conseiller qui la situent dans le domaine de la
proposition. Autrement dit, ordonner e'est imposer une
ligne de conduite, un comportement; par contre, prier ou
conseiller, c'est proposer une ligne de conduite ou un
comportement.
Mais si ordonner ou prier, ainsi que d'autres verbes
similaires, permettent d'effectuer des actes de langage
dans le but d'agir sur le comportement d'autrui, d'autres
qu'ils engagent, non pas l'interlocuteur, mais l'énonciateur
lui-même. Il en est ainsi, par exemple, du verbe promettre
dans l'énoncé:
Je vous promets de vous apporter le livre demain.
Dans ce cas, en effet, c'est bien l'énonciateur qui doit
se comporter de telle manière à ce que l'état de choses
décrit dans le contenu propositionnel soit réalisé.
Il s'avère donc possible de classer les verbes
performatifs selon l'orientation de leur portée illocutoire.
On distinguera les performatifs réflexifs, c'est-à-dire ceux
qui portent sur l'énonciateur lui-même, et les performatifs
non réflexifs, c'est-à-dire ceux qui portent sur
l'énonciataire.
1. Classification des verbes performatifs
1.1. Les performatifs réflexifs
Le chef de file du paradigme des performatifs
réflexifs est le verbe promettre. Le sens même de ce
verbe, tel qu'il est fourni par les dictionnaires, explicite la
portée réflexive du mande rendu par le verbe dans la
construction Je V de/à P: il s'adit de s'engager envers
quelqu'un à faire ou à donner quelque chose; autrement
dit, à agir de telle sorte qu'un état de choses, celui décrit
dans P, soit. Par exemple:

Je vous promets de vous aider dans votre entreprise.

* Faculty of Arts, Mutah University, Jordan. Received on
20/5/2015 and Accepted for Publication on 27/9/2015. Je m'engage à vous récompenser pour vos efforts

- 2545 - © 2016 DAR Publishers/The University of Jordan. All Rights Reserved.

Classification des verbes …
Il ressort de la définition ci-dessus que la valeur
illocutoire des performatifs réflexifs exige que le contenu
propositionnel soit une action future de l'énonciateur lui-
même et qu'une action soit désirée par l'énonciataire. Il
est évident que l'exécution d'une promesse par telle ou
telle action doit théoriquement entraîner des bienfaits au
profit de l'énonciataire envers qui l'énonciateur s'est
engagé à agir.
Plusieurs verbes permettent, en français; d'exprimer
l'engagement de l'énonciateur à agir de telle sorte qu'un
état de choses ait lieu; mais ils n'ont pas tous la même
valeur illocutoire: il y a lieu de différencier entre ceux qui
n'ont qu'une simple valeur de prédication. C'est ce qui
permet de distinguer l'emploi des verbes envisager et
promettre dans les énoncés suivants:
J'envisage de vous faire participer à ce projet de
recherche.
Je vous promets de vous faire participer à ce
projet de recherche.
Dans le premier énoncé, il y a l'expression d'une
simple prédication d'un état de choses; autrement dit, le
verbe performatif envisager permet seulement d'annoncer
l'éventuelle réalisation d'un état de choses. Par contre,
dans le second énoncé, il y a non seulement la prédication
d'un état de choses, mais aussi l'engagement de
l'énonciateur à réaliser cet état de choses; la promesse le
met dans l'obligation d'exécuter l'action énoncée.
L'engagement ^ris par l'énonciateur est fondé sur le
principe déontologique de sincérité qui gère les relations
sociales. Théoriquement, ce principe contraint
l'énonciateur à réaliser l'état de choses annoncé dans le
contenu propositionnel.
Il est néanmoins évident que l'interlocuteur ne dispose
pas de moyens de vérifier la sincérité de l'engagement de
l'énonciateur. Mais si l'énonciateur se révélait non
sincère, et ne tenait pas sa promesse en n'exécutant pas,
au temps opportun, le contenu propositionnel, il y aurait
possibilité, du point de vue moral et déontologique, de le
sanctionner.
En revanche, dans l'énoncé avec le verbe envisager,
l'engagement n'étant pas pris, la réalisation de l'état de
choses décrit dans le contenu propositionnel, en
l'occurrence ''faire participer l'énonciataire au projet de
recherche'', reste dans le domaine du probable; et
l'énonciateur n'est pas tenu, par un quelconque principe
moral et déontologique, d'exécuter impérativement l'état
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Mohamed Al-Matalka
de choses annoncé.
On peut ainsi distinguer, parmi les verbes
performatifs réflexifs, ceux qui ont seulement une valeur
illocutoire predictionnelle, de ceux qui ont une valeur
illocutoire de prédication contrainte par un engagement.
Le premier groupe comporte les verbes tels que:
envisager de, projeter de, prévoir de, se proposer
de, avoir l'intention de, penser à, songer à.
Le second groupe est constitué de verbes tels que:
Promettre de, s'engager à, jurer de.
Indépendamment de cette différence de valeur
illocutoire, les verbes retenus ci-dessus ont la
caractéristique commune d'être réflexifs, c'est-à-dire que
l'exécution de l'état de choses décrit sur lequel ils portent
relève de la compétence de l'énonciateur. Ils s'opposent
ainsi aux verbes performatifs non réflexifs, ceux qui
portent sur l'énonciataire; ce sont ceux là que nous
proposons de décrire dans ce qui suit.
1.2. Les verbes performatifs non réflexifs.
Ordonner, recommander ou conseiller à quelqu'un de
faire quelque chose sont des prescriptions au sens large
du terme. Un certain nombre de verbes en français – tels
ceux mentionnés ci-dessus- permettent la construction
d'énoncés ayant la structure Je V de P où le verbe indique
telle ou telle valeur illocutoire de mande. Ces énoncés
sont directifs et constituent, lors de leur énonciation, des
actes de langage. Ainsi, énoncer:
Je vous ordonner de partir immédiatement.
C'est assigner une valeur illocutoire relative à
l'imposition et effectuer en même temps un acte de
langage qui est ici celui d'ordonner, puisque l'ordre,
comme nous le verrons ci-après, est une prescription
stricte dont l'exécution est impérative.
L'énoncé directif est néanmoins soumis à deux
conditions syntaxiques – en plus de celles qui régissent
les mandes de façon générale et que nous avons
présentées précédemment – qui doivent être satisfaites
pour qu'il puisse remplir son office en tant qu'acte de
langage. Les deux conditions concernent respectivement
la personne et le temps du verbe performatif.
1.2.1. Contrainte sur la personne.
Le mande, étant une instruction adressée à
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l'énonciataire pour qu'il agisse de telle manière que l'état
de choses décrit soit réalisé, ne peut, par conséquent, être
pris en charge que par l'énonciateur lui-même. C'est en
effet l'énonciateur qui effectue l'acte de langage, quelle
qu'en soit la valeur illocutoire. Cette Prise en charge du
verbe performatif impose l'emploi du pronom Je qui
représente l'énonciateur, non pas en tant que référence à
laquelle on attribue une propriété, mais en tant que sujet
agissant lors d'une interaction verbale et effectuant une
action qui est verbale.
Les verbes performatifs n'assurent donc leur rôle
illocutoire que s'ils sont accompagnés de la première
personne Je. Le changement de personne neutralise le
sens performatif du verbe et l'énoncé est interprété dans
un sens descriptif avec une valeur assertive. Il en est
ainsi, par exemple, de:
Tu leur ordonnes de sortir.
Il vous ordonne de sortir.
Ces deux énoncés, comparativement à je vous
ordonne de sortir, ne peuvent être utilisés en tant que
mandes; ils décrivent seulement un état de choses, à
savoir l'ordre de sortir donné par l'énonciataire ou par une
autre personne.
Il faut signaler cependant que les énoncés assertifs
peuvent avoir indirectement la valeur illocutoire de
l'ordre à travers un relais inférentiel. L'expression '' ne
faire que transmettre les ordres'' corrobore d'ailleurs cette
possibilité d'assigner aux assertions des valeurs
prescriptives. Illustrons ce fait par la situation fictive
suivante: Imaginons qu'un planton, s'adressant aux
hommes de troupe (ses égaux dans la hiérarchie
militaire), dise:
Le capitaine vous ordonne de sortir.
Les soldats ne peuvent qu'exécuter l'ordre, bien que ce
dernier ne soit pas émis directement par le capitane. C'est
en se fondant sur un raisonnement inférentiel que les
soldats assignent à l'assertion émise par le planton une
valeur illocutoire indirecte de l'ordre. Il faut noter que le
raisonnement inféreniel est, dans cette situation
énonciative, forcé eu égard au code juridique qui régit la
hiérarchie militaire.
On peut imaginer d'autres situations de
communication qui permettent l'interprétation des ordres
rapportés en ordres véritables, s'ils émanent surtout
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d'énonciateurs investis d'une autorité institutionnelle qui
leur confère le pouvoir de commander. La contrainte sur
la personne liée au verbe performatif reste cependant une
condition dont la satisfaction est nécessaire pour qu'il y
ait effectivement l'expression d'un mande.
1.2.2. Contrainte sur le temps du verbe
performatif.
La contrainte sur la personne, bien que nécessaire,
n'est pas toutefois suffisante pour faire d'un énoncé qui
comporte un verbe performatif un acte de langage, en
effet les énoncés tels que:
Je vous ai ordonné de sortir
Je t'ai prié de me pardonner
Je vous avais recommandé de ne pas aller le voir
Ne sont pas des énoncés directifs malgré l'emploi des
verbes ordonner, prier et recommander, et malgré aussi
l'emploi de la première personne représentant
l'énonciateur. Ces énoncés sont de simples assertions
décrivant des états de choses. La preuve en est qu'ils
peuvent être l'objet d'une appréciation relative soit au
jugement de l'énonciateur, soit à celui de l'énonciataire.
Je soutiens que je vous ai ordonné de sortir (mais
vous avez refusé de vous exécuter).
Non, tu ne as pas ordonné de sortir (ou, du moins,
nous n'avions rien entendu).
La confirmation ou l'information relative à la
modalisation ne peuvent porter que sur des assertions, car
ce sont elles qui décrivent des états de choses. Ainsi, les
deux exemples ci-dessus sont des assertions et non des
énoncés directifs. La raison en est que les verbes
ordonner, prier et recommander ne remplissent plus leur
rôle en tant que verbes performatifs; la neutralisation du
sens performatifs est due au temps des verbes qui est,
dans nos exemples, au passé.
Les énoncés directifs, de par même leur dépendance
du moment de l'énonciation et d'une interaction verbale
directe entre l'énonciateur qui produit le mande et
l'énonciataire auquel il s'adresse, exigent que le temps du
verbe performatif soit au présent de l'indicatif. Cette
seconde contrainte syntaxique est nécessaire et est
corollaire à la contrainte sur la personne. Tout autre
temps du verbe performatif annule sa portée illocutoire et
en fait un simple verbe descriptif.
Classification des verbes …
Les deux contraintes, de personne et du temps du
verbe performatif, décrites sont solidaires, et l'une et
l'autre est nécessaire mais non suffisante pour assigner
aux énoncés directifs à modalité lexicale une valeur
illocutoire.
Les verbes qui rendent la modalité lexicale sont
nombreux, nous en avons donné quelques exemples.
Nous n'allons pas les étudier tous; nous nous contenterons
seulement d'une classification sémantique en tenant
compte de leurs valeurs illocutoires.
2. Domaines sémémiques des verbes performatifs.
En se référant aux définitions fournies par les
dictionnaires, il est possible de dégager des domaines
sémémiques qui organisent le paradigme des verbes
performatifs. Les critères de différenciation sont tout
aussi bien sémantique que pragmatique, ces derniers étant
afférents aux statuts des interlocuteurs. Nous
distinguerons ainsi quatre domaines sémémiques, chacun
regroupant un certain nombre de verbe qui présentent des
affinités quant à leurs valeurs illocutoires.
2. 1. domaine sémémique du conseil.
Le conseil est un avis donné à quelqu'un pour orienter
ou modifier sa conduite, une opinion donnée à quelqu'un
sur ce qu'il doit faire ou encore une idée ou un projet que
l'on propose à quelqu'un en lui laissant la liberté de les
accepter ou de les rejeter. Les verbes représentatifs de ce
premier domaine sémémique sont:
Conseiller, suggérer, recommander, proposer,
exhorter, encourager, inciter, inviter.
On relèvera dans la définition donnée deux
paramètres qui régissent la valeur illocutoire de conseil:
a). Le conseil est une simple proposition de conduite
ou de comportement émise par l'énonciateur qui laisse
l'entière latitude à l'énonciataire d'exécuter ou de ne pas
exécuter le contenu du conseil.
b). La réalisation de l'état de choses décrit dans le
contenu propositionnel est généralement bénéfique à
l'énonciataire. C'est lui qui, en principe, doit tirer profit de
la conduite ou du comportement que l'énonciateur lui
conseille d'adopter. Les effets bénéfiques de l'exécution
d'un conseil fondent même sa raison d'être, car, selon la
déontologie qui régit les rapports humains, on ne peut
conseiller à quelqu'un de faire quelque chose que si l'on
croit qu'il en tirera bénéfice. Mais la fourberie et la
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Mohamed Al-Matalka
duplicité ne soit pas toutefois étrangères aux
comportements des hommes.
2.2. Domaine sémémique de la requête.
La requête est liée aux notions de faveur et de grâce.
Tous les verbes performatifs qui ont une valeur
illocutoire de requête comportent, de ce fait, le sens de
demande. Contrairement au conseil, c'est plutôt
l'énonciateur, et non l'énonciataire, qui tire profit de
l'exécution de l'état de choses qui est l'objet d'une requête.
On ne cherche pas alors par l'emploi des verbes à valeur
illocutoire de requête à proposer à l'interlocuteur une
ligne de conduite ou un comportement, ni à, les lui
imposer, mais plutôt à le solliciter, généralement avec
humilité et déférence, g'agir de telle sorte ou un état de
choses, qui nous est bénéfique, ait lieu.
Il faut noter que l'énonciataire n'est pas tenu par une
quelconque loi juridique d'exécuter la requête qui lui est
adressée. Les contraintes relèvent plutôt de
l'indéfinissable bon sentiment que chacun est censé porter
en son cœur: que se soit de la clémence, de l'indulgence,
de la bienveillance, de la magnanimité, de la pitié, de la
compassion…, toutes ces qualités qui fondent même la
notion du Bien en opposition à la notion du Mal.
Accorder une faveur ou une grâce dépend des principes
moraux qui régissent les comportements sociaux de
chacun.
Les verbes rendent la valeur de requête sont le verbe
prier et ses congénères tels que:
Conjurer, adurer, convier, implorer, inviter, supplier,
solliciter, mendier, quémander, postuler, appeler.
Ces verbes, bien qu'ayant tous une valeur illocutoire
de requête, comportent, chacun, de par son contenu
lexical, une nuance sémantique relativement à la manière
dont la requête est effectuée.
L'adjuration est un appel aux sentiments religieux: la
requête est dans ce cas effectuée au nom de Dieu et/ou de
ses saints, implorer et supplier réfèrent plutôt à ce
sentiment profond de bonté que chacun de nous porte
dans son for intérieur, l'imploration et la supplication sont
des demandes faites généralement de manière humble et
touchante cherchant à émouvoir, à attendrir et à apitoyer
l'énonciataire dont on sollicite une faveur. Mendier et
quémander accentuent davantage l'abaissement jusqu'à la
servilité, traduite en attitudes obséquieuses et rampantes.
La conjuration est une demande pressante et instante.
Prier et solliciter exigent de la déférence et de l'humilité;
le second verbe tend néanmoins à être codifié par l'usage
Dirasat, Human and Social Sciences, Volume 43, No. 3, 2016
en tant que forme réservée aux demandes s'adressant à
une autorité ou à quelqu'un d'influent.
Ces nuances sémantiques caractérisant les verbes à
valeur illocutoire de requête ne sont pas cependant
exclusives. Leur manifestation dépend de la situation de
communication et des rapports sociaux entre les
interlocuteurs, et aussi du caractère et du tempérament de
chacun. Les personnes habituées aux courbettes
obséquieuses quémandent même leurs droits au lieu de
les exiger.
2.3. Domaine sémémique de l'exigence.
Contrairement à la requête qui est liée à la faveur,
l'exigence porte sur le droit, c'est-à-dire sur ce qui est du.
Ainsi, les fonctionnaires peuvent exiger l'augmentation
des salaires dans la mesure où les lois et les institutions
qui régissent leurs statuts leur confèrent le droit de le
faire. L’exigence ne fait donc pas appel aux bons
sentiments, mais à l'application du code juridique, de la
justice. L'exigence porte ainsi sur le nécessaire, le requis,
l'indispensable dans l'ordre des choses.
Mais si l'on ne peut exiger que ce que l'on a le droit
d'avoir, on peut aussi exiger ce que l'autorité dont on est
investi nous permet de faire faire. Les rapports de
subordination, de dépendance et d'assujettissement sont
fondés sur l'exigence dans la mesure où les règles qui
président au fonctionnement des rapports sociaux, dans
ce type de situations, instituent une hiérarchisation
statutaire.
La notion d'autorité n'est pas cependant clairement
définie, elle dépend de la légitimation qui la sous-tend.
Dans son sens large, l'autorité est le pouvoir acquis, d'une
manière ou d'une autre, qui donne le droit de commander,
d'imposer l'obéissance. La légitimation peut être
institutionnelle, profane ou sacrée, ou simplement morale
et déontologique.
Ainsi, un chef de service peut exiger de sa secrétaire
l'exécution d'un état de choses; de même qu'un père peut
exiger de son fils de faire ou de ne pas faire telle chose.
Mais autant dans le premier cas l'exigence est fondée sue
une hiérarchie administrative, autant dans le second elle
est fondée sur un principe moral qui contraint la
progéniture à l'obéissance à son géniteur. La
désobéissance de la secrétaire peut entraîner des sanctions
réelles, le fils récalcitrant sera simplement considéré par
la vox populi comme une mauvaise graine, le père peut
toutefois, bien que n'ayant pas le droit, sévir et châtier son
rejeton.
- 2549 -
L'exigence est liée par ailleurs aux rapports de force.
La raison du plus fort étant toujours la meilleurs, le
dominant exige souvent, sinon toujours, du dominé
l'exécution des états de choses qui lui sont bénéfiques.
Ainsi, un kidnappeur exige une rançon, au même titre
qu'une majorité parlementaire peut exiger la démission
d'un chef d'Etat hostile à sa politique. Les deux exigences
sont légitimées conjoncturellement par la force acquise
soit de manière violente (kidnapping, rapt, terrorisme…),
soit de manière pacifique (élections, suffrage…).
Le chef de fils du paradigme lexical des verbes
performatifs à valeur illocutoire d'exigence est justement
le verbe exiger, d'autres verbes similaires peuvent être
employés avec la même valeur illocutoire. Il en est ainsi,
par exemple, des verbes:
Revendiquer, réclamer, requérir.
Le premier concerne une demande insistante dont
l'objet est considéré comme du et comme juste; le second
permet de demander avec force ce sur quoi on a un droit;
le troisième est employé s'il s'agit d'une demande faite au
nom de la loi.
Ces différences de portée illocutoire n'instaurent pas
cependant une étanchéité entre ces trois verbes; autrement
dit, il est possible d'employer l'un à la place de l'autre
sans que la valeur illocutoire exprimée soit altérée.
Remarquons cependant que le verbe requérir tend à se
spécialiser dans le registre lexical juridique.
Nous devons noter néanmoins que si l'exigence réfère
à la justice, au droit ou à l'application de la loi, elle n'est
pas pour autant une prescription stricte au même titre que
l'ordre. Le non exécution de l'état de choses exigé
n'entraîne pas obligatoirement des sanctions, d'autant plus
que l'exigence ne s'adresse pas toujours directement à
ceux qui disposent de la compétence et des moyens
nécessaires à la réalisation de l'état de choses exigé.
2.4. Domaine sémémique de l'ordre.
La valeur illocutoire de l'ordre, par rapport aux autres
verbes précédemment décrites, est sans doute la plus
restreinte quant à sa manifestation et aussi la plus
contrainte par des conditions d'emploi. L'ordre est en
effet lié au code juridique et à l'autorité institutionnelle.
Ce sont des lois bien précises qui confèrent le pouvoir de
donner des ordres.
L'exemple type de l'institution qui codifie l'ordre st la
hiérarchie militaire. Dans ce cas, les règles qui régissent
Classification des verbes …
les interactions verbales entre les différents grades de
l'armée non seulement légalisent l'aptitude à imposer des
lignes de conduite et des comportements aux subalternes,
mais contraignent aussi des derniers à l'obéissance,
aveugle parfois, allant même jusqu'au sacrifice de soi-
même.
Circonscrite ainsi, la valeur illocutoire de l'ordre
n'apparaît donc que dans des interactions verbales
particulières, bien que, dans le pouvoir qui en est la
raison d'être, mais aussi la notion de devoir. En effet le
commandement, la sommation, le décret, la prescription
stricte mettent en jeu, d'une part, la notion d'autorité
institutionnelle qui pourvoit l'énonciateur de l'aptitude
juridique à émettre des ordres, et de l'autre, le devoir
institutionnel qui oblige l'énonciataire à exécuter les
ordres qu'il reçoit.
La relation entre l'autorité et le devoir institutionnels
est fondée sur la notion de sanction celle-ci est
généralement codifiée en ce sens que la désobéissance est
considérée comme un manquement au devoir et est, par
conséquent, sanctionnée par l'application des lois qui
régissent l'institution.
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- 2550 -
Mohamed Al-Matalka
Conclusion
Les quatre domaines sémémiques présentés ci-dessus
sont sans doute les plus représentatifs des valeurs
illocutoires afférentes au mande. Chaque domaine
comporte un certain nombre de verbes qui en assurent
l'expression. Il convient de noter cependant que si les
valeurs illocutoires de conseil, de requête, d'exigence et
de l'ordre sont suffisamment différenciées, l'emploi des
verbes n'est pas exclusif à l'un ou à l'autre des domaines
du mande.
Il arrive, en effet, dans des interactions verbales
réelles, qu'un verbe destiné à émettre une requête soit
employé pour transmettre un ordre ou une exigence.
Généralement même les énonciateurs investis d'une
autorité institutionnelle et juridique qui leur permet
d'ordonner usent de moyens plus atténué pour se faire
obéir. Il convient de noter aussi que l'atténuation imposée
par les règles déontologiques de politesse est exprimée
par d'autres moyens linguistiques telles que les formules
s'il vous plait, voulez-vous qui accompagnent souvent les
mandes rendus par les verbes performatifs.
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Dirasat, Human and Social Sciences, Volume 43, No. 3, 2016

Jordanians’ Teaching and Learning of French through

Role-Playing Game in Classrooms

Batoul M. Al-Muhaissen*

ABSTRACT
This research aims to classify performative verbs in the orientation of their illocutionary force. We distinguish
the reflexive performative; those on the speaker himself, and not reflexive performative; those on the enunciatee.
It is possible to identify areas that organize the sememic paradigm of performative verbs. Thus, we distinguish
four sememic domains, each containing a number of verbs that have affinities about their illocutionary force:
Council, Request, Requirement and Order.

Keywords: Performative Verbs, Illocutionary Value, Enunciation, Sememic Field.

‫اﻟﺻﻔﻳﺔ‬
ّ ‫ﺗﻌﻠّم وﺗﻌﻠﻳم اﻷردﻧﻳﻳن ﻟﻠﻐﺔ اﻟﻔرﻧﺳﻳﺔ ﻣن ﺧﻼﻝ ﻟﻌﺑﺔ اﻷدوار ﻓﻲ اﻟﻘﺎﻋﺔ‬

* ‫ﻣﺣﻣد ﻣﺣﻣود اﻟﻣطﺎﻟﻘﻪ‬

‫ﻣﻠﺧـص‬
‫ وﻟﻘد ﻣﻳزﻧﺎ ﺑﻳن اﻷﻓﻌﺎﻝ اﻷداﺋﻳﺔ اﻻﻧﻌﻛﺎﺳﻳﺔ واﻟﺗﻲ ﺗﻘﻊ‬.‫ﻳﻘﺗرح ﻫذا اﻟﺑﺣث ﺗﺻﻧﻳف اﻷﻓﻌﺎﻝ اﻷداﺋﻳﺔ ﺑﺣﺳب اﺗﺟﺎﻩ وﻗﻌﻬﺎ اﻟﺗﺣﻘﻳﻘﻲ‬
‫ ﺑﺣﻳث أﺻﺑﺢ ﻣن اﻟﻣﻣﻛن ﺗﺣدﻳد اﻟﻣﺟﺎﻻت‬،‫ﻋﻠﻰ اﻟﻼﻓظ وﺑﻳن اﻷﻓﻌﺎﻝ اﻷداﺋﻳﺔ ﻏﻳر اﻻﻧﻌﻛﺎﺳﻳﺔ واﻟﺗﻲ ﺗﻘﻊ ﺑدورﻫﺎ ﻋﻠﻰ اﻟﻣﺧﺎطب‬
‫ ﺑﺣﻳث ﻳﺣﺗوي ﻛﻝ ﻣﻧﻬﺎ‬،‫ ووﺻﻝ اﻟﺑﺣث إﻟﻰ اﻟﺗﻣﻳﻳز ﺑﻳن أرﺑﻌﺔ ﻣﺟﺎﻻت ﻣﻔﻬوﻣﻳﺔ‬.‫اﻟﻣﻔﺎﻫﻳﻣﻳﺔ اﻟﺗﻲ ﺗﻧظم ﺟدوﻝ اﻷﻓﻌﺎﻝ اﻷداﺋﻳﺔ‬
.‫ واﻻﻟزام واﻟطﻠب‬،‫ واﻟطﻠب‬،‫ اﻟﻧﺻﻳﺣﺔ‬:‫ﻋﻠﻰ ﻋدد ﻣن اﻷﻓﻌﺎﻝ واﻟﺗﻲ ﻟدﻳﻬﺎ ﺗﻘﺎرب ﻓﻲ وﻗﻌﻬﺎ اﻟﺗﺣﻘﻳﻘﻲ وﻫﻲ‬
.‫ اﻟﻣﺟﺎﻝ اﻟﻣﻔﺎﻫﻳﻣﻲ‬،‫ اﻟﺗﻌﺑﻳر‬،‫ اﻟوﻗﻊ اﻟﺗﺣﻘﻳﻘﻲ‬،‫ اﻷﻓﻌﺎﻝ اﻷداﺋﻳﺔ‬:‫اﻟﻛﻠﻣـﺎت اﻟداﻟـﺔ‬

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.2015/9/27 ‫ وﺗﺎرﻳﺦ ﻗﺑوﻟﻪ‬،2015/5/20 ‫ ﺗﺎرﻳﺦ اﺳﺗﻼم اﻟﺑﺣث‬.‫ اﻷردن‬،‫ ﺟﺎﻣﻌﺔ ﻣؤﺗﺔ‬،‫ ﻛﻠﻳﺔ اﻵداب‬،‫* ﻗﺳم اﻟﻠﻐﺎت اﻷوروﺑﻳﺔ‬

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