Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Autres ouvrages
Septoplastie et rhinoplastie par désarticulation – Histoire, anatomie, chirurgie et architecture
naturelles du nez, collection « Techniques chirurgicales ORL », par R. Jankowski. 2016, 384 pages.
Audiologie pratique – audiométrie, 3e édition, par F. Legent, P. Bordure, C. Calais, et al. 2011,
308 pages.
Les vertiges – Diagnostic, thérapeutique, conseils, examens complémentaires, 2e édition, collection
« Abrégés », par A. Chays, A. Florant, E. Ulmer. 2009, 200 pages.
Chirurgie du nez, des fosses nasales et des sinus, collection « Techniques chirurgicales ORL »,
par J.-M. Klossek, C. Beauvillain de Montreuil. 2007, 192 pages.
Chirurgie otologique et otoneurologique, collection « Techniques chirurgicales ORL » par P. Bordure,
A. Robier, O. Malard. 2005, 264 pages.
Collection ORL
Sous la direction du Pr François Legent
Guide d’ORL
Clinique et thérapeutique
Jean-Pierre Sauvage
Professeur des universités, consultant, ancien chef de service ORL au CHU de Limoges
Ce logo a pour objet d’alerter le lecteur sur la menace que représente pour l’avenir de
l’écrit, tout particulièrement dans le domaine universitaire, le développement massif du
« photo-copillage ». Cette pratique qui s’est généralisée, notamment dans les établissements
d’enseignement, provoque une baisse brutale des achats de livres, au point que la possibilité
même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement est
aujourd’hui menacée.
Nous rappelons donc que la reproduction et la vente sans autorisation, ainsi que le recel,
sont passibles de poursuites. Les demandes d’autorisation de photocopier doivent être
adressées à l’éditeur ou au Centre français d’exploitation du droit de copie : 20, rue des
Grands-Augustins, 75006 Paris. Tél. 01 44 07 47 70.
Les figures 1.11, 1.19, 2.1, 2.9, 2.10, 3.12, 5.1, 6.7, 6.10, A.7, et les figures des encadrés 7.1, 7.2 et 7.4 ont été
réalisées par Carole Fumat.
Les figures de la couverture sont issues (de haut en bas) des pages 10, 249 et 14.
Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays.
Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées
dans le présent ouvrage, faite sans l’autorisation de l’éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont
autorisées, d’une part, les reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une
utilisation collective et, d’autre part, les courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d’information
de l’œuvre dans laquelle elles sont incorporées (art. L. 122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propriété
intellectuelle).
Pour avoir une vue complète des structures ana- • Nerf récurrent : fig. 4.4.
tomiques de la face et du cou, reportez-vous aux • Nez, fosses nasales et sinus : fig. 1.13.
figures suivantes : • Oreille externe : fig. 1.8 et 1.9.
• Aires ganglionnaires cervicales : fig. de • Oreille interne et cochlée : fig. A.7, A.8 et
l’encadré 4.2. A.9.
• Espaces péripharyngiens céphaliques : • Oreille interne et labyrinthe membraneux :
fig. 3.12 et 11.6. fig. 9.2.
• Ethmoïde (masse latérale) : fig. 10.2. • Oreille interne et vestibule : fig. 9.1.
• Face (innervation sensitive) : fig. A.4. • Oreille moyenne, mésotympanum, attique et
• Fosses nasales (vascularisation) : fig. 12.1 et mastoïde : fig. 6.7 et 6.11.
12.8. • Oreille moyenne, tympan et chaîne des osse-
• Isthme du gosier et loge amygdalienne : lets : fig. 1.11, 5.1 et A.6.
fig. 1.15 et 11.2. • Parotide : fig. 4.6
• Joue et région rétromolaire : fig. 3.3. • Pharynx et tissu lymphoïde pharyngé :
• Langue : fig. 1.14, 3.4, 4.9 et A.10. fig. 1.16 et 11.1.
• Larynx et hypopharynx : fig. 2.1 et 2.3. • Rhinopharynx : fig. 11.4.
• Loge sous-mandibulaire : fig. 4.8.
Table des compléments
en ligne
Des compléments numériques sont associés à cet ouvrage, ils sont indiqués dans le texte par un picto .
Ils proposent des vidéos. Pour voir ces compléments, connectez-vous sur http://www.em-consulte.com/
e-complements/474503 et suivez les instructions, ou scannez les flashcodes proposés à la fin des
chapitres concernés.
Vidéo e3.4.
Partie 1 Cancer de l’amygdale métachrone.
Chapitre 1 Chapitre 4
Vidéo e1.1. Vidéo e4.1.
Lobo-isthmectomie thyroïdienne.
Endoscopie nasale à l’optique.
Chapitre 6
Chapitre 2
Vidéo e6.1.
Vidéo e2.1. Myringosclérose.
Laryngoscopie directe en suspension.
Vidéo e6.2.
Vidéo e2.2. Pose d’aérateur transtympanique (yoyo ou diabolo).
Leucoplasie de la corde vocale.
Vidéo e6.3.
Vidéo e2.3. Séquelles fibro-adhésives d’otite chronique.
Cancer de la corde vocale (épipharyngoscope).
Vidéo e6.4.
Vidéo e2.4. Poche de rétraction postéro-supérieure.
Cancer du sinus piriforme.
Vidéo e6.5.
Vidéo e2.5. Poche de rétraction incontrôlable.
Laryngectomie totale.
Vidéo e6.6.
Chapitre 3 Cholestéatomes épitympaniques.
Vidéo e3.3.
Cancer de l’amygdale.
XIV Table des compléments en ligne
Chapitre 8 Chapitre 11
Vidéo e8.1. Vidéo e11.1.
Exostoses. Caséum dans le récessus de Tortual.
Vidéo e8.3.
Cholestéatome 2e temps.
Chapitre 12
Vidéo e8.4. Vidéo e12.1.
Clip sur l’artère sphéno-palatine.
Stapédotomie avec interposition.
Vidéo e12.2.
Chapitre 9 Dyspnée laryngée.
Vidéo e9.1.
VPPB du canal semi-circulaire postérieur gauche.
Vidéo e9.2.
Partie 2
Nystagmus horizonto-rotatoire périphérique Vidéo eA.1.
(destruction chirurgicale du vestibule droit). Valsalva sur rétraction tympanique.
Encadré 1.1
• Otorrhée purulente et malodorante : Vertiges (illusions de mouvement le plus
cholestéatome. souvent rotatoire)
• Otorrhée prolongée chez un diabétique : • Positionnels et brefs, déclenchés par le fait de
otite externe nécrotique dite maligne. lever la tête, la baisser, se coucher, se retourner
• Otorragies associées à de violentes douleurs dans son lit et se lever le matin : VPPB.
durant quelques heures : otite phlycténulaire • Spontanés, par crises de quelques heures avec
symptômes auditifs unilatéraux : maladie de
Otalgie Menière.
• Déclenchée par la mobilisation du tragus : • Après traumatisme par coton-tige : frac-
otite externe. ture ou luxation de l’étrier.
• Associée à une surdité sévère : otite moyenne • Avec violentes cervicalgies d’emblée :
aiguë. dissection de l’artère vertébrale.
• En l’absence de surdité avec une otoscopie Masse tumorale cervicale
normale, il faudra rechercher une étiologie
• Gonflant au moment des repas : lithiase
ailleurs (cf. partie 2, fiche « Otalgie réflexe »),
salivaire.
en particulier :
• Dans un contexte d’intoxication alcoolo-
– cavité buccale (molaire inférieure et dent
tabagique : métastase ganglionnaire.
de sagesse) ;
– amygdale palatine (phlegmon) ; Toujours faire préciser
– cancers de l’amygdale palatine, de la • si les symptômes sont unilatéraux ou bila-
base de langue ou du sinus piriforme. téraux. Une pathologie unilatérale est plus
inquiétante ;
Acouphènes (cf. partie 2, fiche • l’ancienneté des symptômes. Des épistaxis
« Acouphènes ») intermittentes se répétant depuis plus d’une
• Pulsatiles : tumeur ou malformation vas- semaine doivent être prises au sérieux, car elles
culaire. entraînent une anémie et une hypotension sus-
• Claquement ou craquement avec sensation de ceptibles d’entraîner le décès par désamorçage
pression dans l’oreille : origine tubaire (trompe de la pompe cardiaque, surtout en cas d’anté-
d’Eustache). cédents vasculaires.
plus nette quand on utilise un éclairage puissant général de 30 cm pour descendre jusqu’au-des-
branché sur le secteur et transmis par des fibres sus du larynx. La résolution est de 5 à 7 milliers
optiques. de pixels. L’éclairage passe par le câble optique
et nécessite un générateur de lumière froide. Il
Microscope de consultation y a aussi des modèles à batterie. La fonction de
béquillage de l’extrémité est commandée par un
binoculaire mural (fig. 1.4)
curseur lui permettant d’atteindre 150° vers le
Il est surtout destiné à l’otoscopie. Le grossis- haut et vers le bas. Ainsi peut être pris le virage
sement utile est de 4 à 16. L’intensité de l’éclairage entre les fosses nasales et le rhinopharynx ; ceci
permet d’apprécier la transparence de la membrane permet également de s’orienter au-dessus du
tympanique. Les microscopes sur pied permettent larynx pour mieux le visualiser. Il faut utiliser
d’examiner un enfant allongé et d’effectuer des un protocole de désinfection validé (cf. partie 2,
gestes de nettoyage du conduit, etc. fiche « Désinfection d’un fibroscope nasopha-
ryngé »). On peut aussi utiliser des gaines
stériles à usage unique. L’inconvénient est alors
Fibroscope nasopharyngé (fig. 1.5) d’augmenter le diamètre et d’avoir des difficul-
Son câble en fibres optiques est d’un diamètre tés de passage en cas de déviation de la cloison
de 4 mm ou de 2 mm pour passer par les fosses nasale.
nasales les plus étroites. La longueur est en
Inspection de la face
et du cou
Un coup d’œil suffit à détecter :
• une paralysie faciale parfois résumée à un simple
retard au clignement (cf. partie 2, fiche « Para-
Figure 1.7. Poste d’examen ORL. lysies faciales périphériques (PFP) ») ;
Il comporte un fauteuil transformable permettant d’allon-
ger le patient, un meuble de consultation avec source de
• une asymétrie oculaire ;
lumière froide, et un microscope binoculaire. • une tuméfaction sous-orbitaire ou cervicale.
Encadré 1.2
Instrumentation ORL
• Abaisse-langues métalliques coudés, indis- permet de dégager la main du champ visuel. Il
pensables pour réaliser une étude correcte de la existe une taille adulte et une taille enfant.
cavité buccale et de l’oropharynx. Leur coudure • Spéculums d’oreille de toutes tailles.
8 ORL thématique
• Spéculums de nez à valve, dont les spéculums • Micropinces d’oreille à pointe fine ou à pince
de Vacher complètement ouverts latéralement. mord-curette pour nettoyer le conduit auditif
• Pinces de Politzer coudées, qui permettent externe avec différents instruments pour rame-
d’exécuter des gestes au fond de cavités sans ner le cérumen.
être gêné par la main qui tient l’instrument. • Canules d’aspiration de tous diamètres.
Il faut plus de temps pour faire l’inventaire (fig. 1.10) et de la main droite pour examiner
neurologique des paires crâniennes (cf. partie 2, l’oreille droite.
fiche « Paralysies des nerfs crâniens »). Trois difficultés peuvent entraver l’otoscopie :
• la première est l’existence de cérumen. Celui-
ci doit être extrait à l’aide de fins porte-
Inspection de l’oreille cotons trempés dans la glycérine. Les fragments
et otoscopie cérumineux sont collés sur le coton par un
double mouvement : rotation et ratissage de la
Avant l’otoscopie, il faut examiner le pavillon profondeur à la superficie. Il faut éviter à tout
de l’oreille avec ses reliefs classiques (fig. 1.8). prix de faire saigner le conduit au cours de ces
Ne pas oublier de le retourner, car on découvre manœuvres. En cas d’échec, si l’on suspecte
parfois une cicatrice rétro-auriculaire témoi- un processus otitique ou une perforation du
gnant d’une intervention ancienne pour otite tympan, une aspiration sous microscope opé-
chronique. ratoire est indispensable. Dans ces cas, il n’est
L’otoscopie proprement dite nécessite un spé- pas question de pratiquer un lavage d’oreille
culum d’oreille adapté à la taille du conduit (cf. partie 2, fiche « Lavage d’oreille pour
auditif externe (fig. 1.9). extraction d’un bouchon de cérumen ») ;
Avec un otoscope à pile, il faut encore effec- • la deuxième est un conduit auditif externe osseux
tuer la même manœuvre en le tenant de la étroit avec une saillie de l’articulation temporo-
main gauche pour examiner l’oreille gauche mandibulaire masquant la partie antérieure du
Figure 1.8. Oreille gauche : pavillon normal.
A. Vue photographique. B. Reliefs schématiques. C. Oreille retournée pour inspecter la mastoïde. Le pavillon de l’oreille
est une lame fibrocartilagineuse repliée sur elle-même dont la partie la plus périphérique s’appelle l’hélix séparé du reste
du pavillon par la gouttière antihélicéenne (c) et se prolongeant dans la conque par la racine de l’hélix (b). L’anthélix est
un relief marquant la plicature entre la conque et le reste du pavillon appelé scapha. Il naît de deux racines, la supérieure
et l’inférieure, délimitant la fossette naviculaire (a).
Boudard P. In : Bessède J.-P. (dir.). Chirurgie plastique réparatrice de la face et du cou – Volume 1. Elsevier Masson, 2011, p. 276 (fig. 20.1).
coude du nerf facial. Le lieu préférentiel de la L’obstruction peut aussi être objectivée par la
paracentèse est classiquement le quart postéro- surface des taches de buée laissées sur un miroir
inférieur, car c’est le segment le plus superficiel de Glatzel froid placé sous le nez du patient. En
du tympan et parce qu’il ne comporte aucun l’absence de miroir, un abaisse-langue métallique
élément dangereux en dedans de lui. On pré- froid peut faire l’affaire.
fère parfois le quart antéro-inférieur, car il est Parfois, la diminution du calibre des narines
situé juste en dessous de la trompe d’Eustache. est inspiratoire. C’est le collapsus des ailes du nez
C’est d’ailleurs le lieu de la mise en place des (cartilages alaires). À chaque inspiration, elles sont
aérateurs tympaniques (yoyos ou diabolos) ; aspirées et se plaquent sur la cloison.
• le triangle lumineux occupe le quadrant antéro- Avant de mettre en place les lames d’un spécu-
inférieur. Ce n’est autre que le reflet de la lum nasal, il faut inspecter les vestibules narinaires
source lumineuse sur un secteur du cône tym- cutanés en relevant la pointe du nez avec le pouce.
panique lorsque le tympan est parfaitement sain On observe parfois des lésions croûteuses, voire
et brillant ; un furoncle.
• chez le nourrisson, la membrane tympanique
est plus horizontale que chez l’adulte et l’apo-
physe externe paraît plus grosse, tandis que le Rhinoscopie antérieure
manche du marteau est vu davantage en fuite.
L’instrument utilisé en consultation est le spé-
culum de nez. Celui de Vacher est ouvert sur le
côté pour faciliter les manœuvres intranasales.
Inspection nasale Ces spéculums comportent deux valves. L’une
et rhinoscopie antérieure est fixe, l’autre est mobile pouvant s’écarter de la
précédente au moyen d’une vis.
Architecture ostéo-cartilagineuse
Utilisation d’un spéculum de nez
Elle peut être sévèrement déformée. Souvent,
cette déformation est seulement inesthétique. L’examen est conduit de la façon suivante :
Mais elle peut aussi provoquer une obstruction • la lame fixe est appliquée sur la cloison et la
nasale avec respiration buccale et voix nason- lame mobile sous l’aile du nez, de telle sorte
née. L’origine est souvent traumatique. Ailleurs, qu’elle puisse facilement la soulever de manière
c’est une diminution permanente idiopathique indolore ;
du calibre des narines et des fosses nasales par • il faut comprendre qu’il est impossible d’avoir
une déviation de la cloison des fosses nasales avec une vue d’ensemble des fosses nasales du fait
luxation de son bord antérieur. que les narines sont étroites et qu’elles sont
dans un plan grossièrement horizontal. Pour
Il est essentiel de comprendre qu’une bonne l’obtenir, le regard doit donc adopter succes-
respiration nasale est indispensable à la phy- sivement deux axes principaux (fig. 1.12) :
siologie muqueuse des voies aériennes supé- – un axe horizontal, parallèle au plancher des
rieures. fosses nasales,
– un axe oblique, parallèle à l’arête du nez.
On inspecte alors la fosse nasale en bas-
Évaluation du flux aérien culant progressivement la tête du patient
de chaque fosse nasale vers l’arrière ;
• la rhinoscopie antérieure est d’abord exécutée
Il est apprécié en obstruant l’autre fosse nasale sans préparation. Ensuite, elle est recommen-
avec un pouce placé sous la narine (plutôt que cée après une pulvérisation de naphtazoline
d’appuyer sur l’aile du nez) et en demandant (vasoconstricteur) pour noter la qualité de la
de respirer normalement la bouche fermée. rétraction des cornets ;
12 ORL thématique
• pour avoir une meilleure vue, il faut utiliser le s’ouvrent les orifices des principaux sinus de
microscope de consultation ou le fibroscope la face (on comprend donc l’importance de la
nasopharyngé (cf. infra). L’idéal est d’utiliser présence de pus à ce niveau dans le diagnostic
une optique rigide après anesthésie de contact des sinusites) ; le méat supérieur est rarement
avec une pulvérisation de xylocaïne naphtazoli- accessible à la vue.
née (vidéo 1.1 ). • Les taches vasculaires droite et gauche siègent
sur la partie antéro-inférieure de la cloison.
Anatomie (fig. 1.13) Elles sont à l’origine de la plupart des épistaxis
de l’enfant.
On observe des éléments symétriques.
• Trois cornets : inférieur, moyen et supérieur (ce
dernier n’étant pratiquement jamais vu de cette
façon). Ces cornets sont faits de tissu érectile Examen de la cavité buccale
et la pulvérisation d’un vasoconstricteur (naph-
tazoline) à l’aide d’un pulvérisateur de Vitbiss Il doit être fait à l’aide de deux abaisse-langues
provoque une rétraction facilitant l’examen. coudés. Sont examinées successivement : les
Un novice peut les confondre avec des polypes lèvres, les gencives et les joues. L’orifice du canal
lisses, clairs et transparents comme des bau- de Sténon est situé en regard du collet de la
druches. 2e molaire supérieure et la pression de la parotide
• Trois méats : ils ont chacun leur importance. peut faire sourdre de la salive. La langue mobile
Le méat inférieur représente le lieu où débou- est inspectée : tant sa face dorsale et ses bords en
chent les voies lacrymales ; le méat moyen est protraction que sa face ventrale en faisant relever
le plus important puisque c’est à ce niveau que la pointe. Enfin, le plancher de la bouche n’est
Chapitre 1. Examen clinique ORL 13
pas oublié (fig. 1.14). En arrière, il s’insinue pour former la luette à la façon d’un pendentif en
entre langue et gencive. En avant, il s’élargit en architecture (fig. 1.15) :
présentant la saillie des glandes sublinguales. Les • le pilier antérieur (muscle glosso-staphylin) naît
deux caroncules situées de part et d’autre du frein à l’extrémité du V lingual (zone de jonction) ;
de la langue représentent les orifices des canaux • le pilier postérieur (muscle pharyngo-staphylin)
de Wharton drainant les glandes sous-maxillaires naît de la paroi pharyngée latérale au niveau de
(cf. partie 2, fiche « Anatomophysiologie de la la base de langue ;
langue »). • les deux piliers limitent de chaque côté une loge
La palpation de toute lésion suspecte est indis- amygdalienne contenant l’amygdale palatine ;
pensable. Elle se fait à l’aide de l’index protégé • le V lingual est la séparation entre langue
par un doigtier. mobile et langue fixe, représentant aussi la
limite inférieure de l’isthme du gosier.
Examen de l’isthme
du gosier (vidéo 1.2 ) Examen du pharynx
Cet isthme constitue la frontière entre la cavité Anatomie
buccale et le pharynx. Elle est représentée par
un rideau : le voile du palais, qui tombe de la Le pharynx comporte trois étages situés entre le
voûte palatine et repose sur quatre piliers. Ces sphénoïde en haut et la bouche œsophagienne en
quatre piliers se rejoignent en ogive, se retournent bas (fig. 1.16) :
Figure 1.14. Examen de la cavité buccale.
A. Face dorsale de la langue. La langue mobile est située en avant du V lingual formé des papilles gustatives caliciformes
de part et d’autre du foramen cæcum. La base de langue recouverte de l’amygdale linguale est située en arrière des
piliers antérieurs. Elle appartient à l’oropharynx. B. Bord libre et pointe de la langue. Parmi les 17 muscles de la langue, le
muscle génioglosse a une insertion osseuse sur la face postérieure de la symphyse mandibulaire. Sa contraction entraîne
donc une protraction de la langue. En cas de paralysie unilatérale du nerf hypoglosse (XIIe paire crânienne), la langue
dévie vers le côté paralysé lorsqu’on demande au patient de tirer la langue. C et D. Face ventrale de la langue avec son
frein (1) et plancher de la bouche situé entre la langue et l’arcade dentaire inférieure. À sa partie médiane se trouvent
les deux caroncules (2) avec latéralement les deux éminences soulevées par les glandes sublinguales. C’est à ce niveau
qu’on palpe la plupart des calculs du canal de Wharton. E. En arrière et latéralement, le plancher de la bouche s’insinue
entre langue et gencive, formant le sillon pelvi-lingual. Pour rechercher de petits cancers à ce niveau, un abaisse-langue
(3) récline la langue, tandis que l’autre abaisse-langue écarte la joue. Chez ce patient, on distingue une plaque de leuco-
plasie blanchâtre remontant jusqu’à la commissure intermaxillaire (4).
A. Rouvière H. Anatomie humaine – Tome I : tête et cou. Paris : Masson, 1959, p. 406 (fig. 259). C. Schuller D.E., Schleuning A.J. DeWeese and
Saunders’Otolaryngology Head and Neck Surgery, 8e edition. Mosby St Louis, 1994, p. 166 (fig. 10.1).
d’Eustache et l’amygdale pharyngée quand elle calmement par la bouche, ce qui a pour effet de
est hypertrophiée. faire reculer le larynx. On place alors le miroir
laryngien de diamètre adapté juste en avant du
voile sans le toucher, la lampe frontale éclairant
Laryngoscopie indirecte ce dernier. Lorsque les cordes vocales sont cor-
Elle permet en même temps de faire une hypo- rectement observées en abduction, on demande
pharyngoscopie en visualisant les deux sinus piri- au patient de prononcer la lettre « è » sur un ton
formes, les vallécules et la base de langue. très aigu. Les cordes s’accolent et on peut ainsi
apprécier la mobilité laryngée.
Technique (vidéo 1.3 )
Résultat chez le sujet normal (fig. 1.18)
C’est Manuel Garcia, un professeur de chant à
Paris puis à Londres, qui a eu l’idée en 1854 Pour bien comprendre l’image observée, il faut
d’utiliser un miroir laryngien pour examiner ses concevoir l’hypopharynx comme un entonnoir
propres cordes vocales. Ce procédé reste utilisé en débouchant dans l’œsophage. Sa paroi anté-
consultation pour examiner de nombreux malades rieure est constituée par la base de langue
avec du matériel peu coûteux et facile à stériliser recouverte de l’amygdale linguale. Le larynx
(ce qui n’est pas le cas des fibroscopes naso- est comme un puits faisant saillie dans la partie
pharyngés). antérieure de l’entonnoir hypopharyngé à la
Une lampe frontale est nécessaire. Le miroir manière d’une margelle constituée de l’épiglotte,
laryngien est tiédi selon la même technique que des aryténoïdes et des bandes ventriculaires.
précédemment. On saisit la langue avec une Entre l’épiglotte et la base de langue se trou-
compresse, et on exerce une traction passive vent deux dépressions nommées vallécules. Ce
de la langue permettant d’attirer le larynx vers puits s’ouvre dans la trachée après avoir franchi
le haut par l’intermédiaire de l’os hyoïde. En l’espace glottique entre les deux cordes vocales.
même temps, on demande au sujet de respirer Ainsi comprend-on l’existence des deux sinus
Chapitre 1. Examen clinique ORL 17
Vidéo e1.2. Examen de l’isthme du gosier. Vidéo e1.4. Laryngoscopie au fibroscope nasopha-
L’isthme du gosier possède une architecture qu’il faut ryngé.
bien comprendre. Le voile du palais tombe comme un Nous allons la faire au cours d’une consultation, après
rideau séparant la cavité buccale du pharynx. C’est une pulvérisation dans chaque fosse nasale d’un anesthésique
structure musculaire reposant sur quatre piliers : les deux local. Ici, c’est une fosse nasale gauche, donc à votre
piliers antérieurs (PA) constitués par les deux muscles gauche vous avez la cloison nasale, et à votre droite
glosso-staphylins s’insérant aux extrémités du V lingual, l’astérisque indique le cornet inférieur gauche avec son
les deux piliers postérieurs (PP) se perdant sur la paroi méat inférieur en dessous. Puis on progresse le long du
latérale du pharynx. Ces quatre piliers se recourbent pour plancher des fosses nasales jusqu’à la choane. Un nouvel
se prolonger par la luette (Lu) se présentant comme un astérisque indique le bourrelet tubaire limitant en arrière
pendentif en architecture. Entre chaque pilier antérieur l’orifice de la trompe d’Eustache. En incurvant l’extrémité
et postérieur, se forme une loge contenant l’amygdale du fibroscope, on pénètre dans le rhinopharynx ou cavum.
palatine. De l’autre côté du voile, on aperçoit la paroi L’astérisque montre la face postérieure de la luette. Après
postérieure du pharynx, appelée oropharynx, en regard de avoir passé la base de langue recouverte de l’amygdale
la cavité buccale. Quand on utilise un abaisse-langue, son linguale, on observe l’épiglotte. On passe derrière elle et
extrémité ne doit ni dépasser, ni toucher le V lingual sous on tombe sur le plan glottique avec ses cordes vocales
peine de déclencher un violent réflexe nauséeux. blanchâtres fixées en arrière sur les aryténoïdes qui
agissent à la manière d’un battant de porte. Lorsque
les aryténoïdes se rapprochent, les cordes vocales se
mettent en adduction permettant la phonation. Lorsque
les aryténoïdes s’écartent, les cordes vocales se mettent
en abduction permettant l’inspiration. Ensuite, on fait
dire « è » au patient pour vérifier la bonne mobilité des
cordes vocales et l’absence de paralysie. Enfin, un dernier
astérisque indique le sinus piriforme droit situé entre la
margelle laryngée et la paroi latérale de l’hypopharynx
droit. On passe ensuite au sinus piriforme gauche. Notons
qu’au cours de la déglutition, on utilise toujours le même
Vidéo e1.3. Laryngoscopie indirecte.
sinus piriforme droit ou gauche, dit préférentiel. C’est lui
La laryngoscopie indirecte est la moins chère des façons
qui sera atteint de cancer en cas de brûlures multiquoti-
d’examiner les cordes vocales. Elle ne nécessite qu’une
diennes liées à l’ingestion d’alcool pendant 20 ans.
lampe frontale, un miroir laryngien tiédi pour éviter la buée
et un manche vissé pour bien maîtriser le miroir. La langue
est tirée à l’aide d’une compresse pour faire monter le
larynx, et le patient respire doucement pour projeter
son larynx en arrière dans l’axe du pharynx. L’image est
renversée latéralement, comme quand on lit une radio
pulmonaire, mais le haut reste le haut et l’épiglotte occupe
le haut de l’image. L’image est excellente, tant par sa
netteté que par ses couleurs. On fait dire « è » au patient
pour voir les cordes vocales en fermeture et en ouverture
et rechercher une éventuelle paralysie récurrentielle. Il ne
faut que 3 à 4 semaines d’entraînement pour devenir un
expert.
Chapitre 2
Cancers du larynx
et de l’hypopharynx
Points forts gique. Leur consommation cumulée augmente le
Plus de 70 % de ces cancers sont diagnostiqués à risque de cancer (encadré 2.1).
un stade tardif, car leurs signes d’appel sont banals Le larynx est divisé en trois étages (fig. 2.1) :
et que le médecin non spécialiste ne dispose pas du • la région glottique, comprenant la corde vocale
matériel adéquat pour trouver une tumeur débutante. (1) : bord libre, face inférieure et commissure
Mais, contrairement aux cancers du poumon, les antérieure (2) ;
cancers du larynx et de l’hypopharynx sont de • au-dessus, se trouve la région sus-glottique
bon pronostic, car leur évolution reste longtemps
séparée du plan glottique par la cavité du ven-
locorégionale, cantonnée derrière des barrières
aponévrotiques, carcinologiquement résistantes. tricule (8). Elle comprend l’épiglotte avec sa
j Ces cancers surviennent chez des fumeurs portion sus-hyoïdienne (3) et sa portion sous-
et des consommateurs d’alcool. hyoïdienne (6), les deux aryténoïdes (5) reliés
j Sur ce terrain, toute dysphonie ou dysphagie à l’épiglotte par les replis ary-épiglottiques (4)
durant plus de trois semaines nécessite une avec les bandes ventriculaires (7) constituant le
pharyngo-laryngoscopie effectuée par un ORL. vestibule laryngé ;
j L’aspect typique est celui de l’ulcération
• en dessous du plan glottique, on trouve la
bourgeonnante des carcinomes épidermoïdes. sous-glotte jusqu’au bord inférieur du cartilage
j Tant que la corde vocale reste mobile, les
thyroïde (9).
survies à cinq ans atteignent 70 à 95 %.
j En cas d’hémilarynx fixé, la laryngectomie
quantité consommée : de 0,5 à 4 paquets par Son existence abaisse de moitié les espoirs de
jour pendant 20 ans. survie à 5 ans de la lésion primitive.
• C’est un consommateur d’alcool : l’alcoolisme,
même non avoué, se reconnaît au faciès, à la
langue trémulante et à l’état fortement conges- Signes tardifs
tif « lie-de-vin » de l’isthme du gosier. Le risque
augmente avec le degré d’alcool des boissons Douleurs et tuméfactions cervicales antérieures
alcoolisées. palpables témoignent de l’extension aux struc-
• La denture est souvent détériorée et l’infection tures cartilagineuses. La filière laryngée finit par
gingivale constitue un facteur de risque sup- être obstruée au point de provoquer une dyspnée
plémentaire. laryngée avec bradypnée inspiratoire imposant
une trachéotomie en urgence. Les hémorragies
par ulcération carotidienne ne surviennent que
Dysphonie ou dysphagie dans les formes très évoluées.
persistante
• La dysphonie est permanente, progressivement Conduite à tenir
croissante, devenant de plus en plus dure (voix
de bois). Il convient d’être très vigilant en cas
Ces signes d’appel plus ou moins regroupés
de laryngite chronique du fumeur.
constituent l’indication formelle d’un examen
• La dysphagie haute est d’abord une simple gêne
complet de la sphère ORL avec palpation des aires
pharyngée mécanique. Elle retentit ensuite sur
ganglionnaires cervicales. En particulier, une pha-
les capacités de déglutition, entraînant un amai-
ryngo-laryngoscopie au fauteuil doit être réalisée
grissement. Elle ne devient douloureuse que
par un spécialiste entraîné, car les réflexes nau-
tardivement (odynophagie).
séeux sont généralement importants en raison de
• Parfois, tout se résume à une otalgie réflexe
l’intoxication alcoolo-tabagique (cf. chapitre 1).
déclenchée ou aggravée par la déglutition.
• Ce peut être une laryngoscopie indirecte au
Elle est liée aux connexions existant entre le
miroir laryngé donnant une excellente image
plexus pharyngien et le nerf glosso-pharyn-
chez un patient docile et décontracté.
gien dont le territoire sensitif comprend aussi
• L’examen au fibroscope nasopharyngé souple
l’oreille (nerf de Jacobson). Toute otalgie
est indispensable. Il est effectué au repos, en
avec otoscopie normale est suspecte sur un tel
phonation et lors de manœuvres de Valsalva
terrain.
pour mieux visualiser les petites lésions du fond
du sinus piriforme et de la région rétro-crico-
Adénopathie cervicale aryténoïdienne.
• Le cancer se manifeste par une tumeur ulcéro-
• Elle est dure, indolore, ronde et de taille pro- bourgeonnante. Stase salivaire, érythème et
gressivement croissante. L’avoir palpée une œdème muqueux sont des signes indirects
seule fois permet ensuite de la reconnaître en devant aussi attirer l’attention. Parfois, on ne
toutes circonstances. met en évidence qu’une laryngite chronique,
• Son siège est le plus souvent sous-digastrique mais elle prend chez le fumeur un véritable
(ganglion de Küttner), soulevant le bord anté- caractère prénéoplasique : dysplasie plus ou
rieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien dans moins kératinisée se présentant le plus souvent
son tiers supérieur. comme une plaque de leucoplasie siégeant sur
• Elle représente une circonstance de découverte une corde vocale, susceptible de dégénérer à
non négligeable des cancers ORL. C’est une tout moment.
métastase ganglionnaire déjà présente d’emblée • Le site anatomique de la lésion doit être
dans 10 à 80 % des cas selon les localisations. précisé : cancer du larynx (étage glottique,
24 ORL thématique
Figure 2.3. Vue laryngoscopique du larynx (A) et coupe frontale de l’endolarynx (B). La flèche indique l’entrée du ven-
tricule laryngé.
D’après Legent F., Perlemuter L., Vandenbrouck C. Cahiers d’anatomie ORL. Sinus piriforme et larynx, Volume 2, 4e édition. Masson, 1986.
Figure 2.4. Cancer de la commissure antérieure par dégénérescence d’une plaque de leucoplasie chez un fumeur.
L’exposition insuffisante de la laryngoscopie directe en suspension ne permet pas de le voir (A). La lésion n’est visible
qu’avec une optique à 30° (B).
26 ORL thématique
tient prêt à faire des biopsies. Pour l’endolarynx, sont des formes pseudo-sarcomateuses de mauvais
on met en place une suspension avec appui thora- pronostic. Elles associent des cellules épithéliales
cique permettant l’emploi du microscope opéra- malignes à des cellules mésenchymateuses don-
toire libérant les deux mains pour manier la pince nant un aspect polypoïde.
à biopsie et l’aspiration. Des optiques à 30 et à 70° Enfin, il existe des états précancéreux : plaques
permettent de ne pas manquer un petit cancer du de leucoplasie blanchâtres sur les cordes vocales ou
ventricule ou une extension à la sous-glotte. On papillomes cornés diffus (vidéo 2.2 ). Ces dys-
profite de l’anesthésie pour palper la base de langue kératoses se caractérisent par des amas de kératine
et les vallécules à la recherche d’une extension remplaçant les cellules épithéliales superficielles.
sous-muqueuse. Pour les bronches, on préfère On y trouve des dysplasies plus ou moins sévères
généralement une fibroscopie décalée en fonction avec parfois un carcinome in situ. Le risque de
des indications données par le scanner thoracique. transformation atteindrait 2 à 25 % (cf. partie 2,
On peut profiter de cette anesthésie pour effec- fiche « Lésions précancéreuses des muqueuses des
tuer la remise en état buccodentaire avant traite- voies aérodigestives supérieures »).
ment radiothérapique. En effet, si des soins et des
extractions dentaires sont ultérieurement néces-
saires, il y a un risque important d’ostéoradioné- Bilan carcinologique global
crose mandibulaire.
À chaque consultation, il faut rester vigilant à
la présence d’un autre carcinome épidermoïde
primitif, résultat des mêmes facteurs carcinogènes.
C’est le chirurgien qui doit pratiquer cet examen avec
un compte-rendu comportant une description morpho-
Il peut être situé au niveau de la cavité buccale,
logique et surtout un schéma de la lésion et des adé- de l’oropharynx, de l’œsophage ou du poumon.
nopathies cervicales, annoté, daté et signé. Il convient Cette tumeur est dite « synchrone » quand elle
aussi de déterminer le caractère exposable de la tumeur est décelée en même temps que le carcinome
en vue d’une exérèse par voie endoscopique (cf. infra). laryngé. Elle est dite « métachrone » quand elle
Enfin, tenant compte du bilan tomodensitométrique, sa est décelée dans la période de surveillance. Ce
conclusion doit comporter une proposition chirurgicale cancer secondaire survient dans 25 à 30 % des
à débattre avec les autres spécialistes (cf. infra). À noter cas. Le traitement reste aussi efficace que celui de
que l’endoscopie sous anesthésie ne remplace pas
la première localisation, sauf pour l’œsophage et
l’examen de la mobilité laryngée au fauteuil chez un
patient conscient et coopérant.
le poumon.
Les métastases sont rares au cours de l’évolu-
tion, mais elles sont souvent multiples au moment
de l’autopsie.
Histopathologie
Dans 85 à 90 % des cas, ce sont des carcinomes Bilan des comorbidités
épidermoïdes. Sous l’effet du tabac associé à et bilan psychosocial
l’alcool, la muqueuse prend un aspect kératinisé
superficiel. La cancérisation se traduit par une L’objectif est d’évaluer les conséquences de
ulcération surinfectée infiltrant peu à peu les tissus l’intoxication alcoolo-tabagique risquant de se
en profondeur. C’est la quantité de kératine qui décompenser à l’occasion du traitement.
détermine si l’épithélioma malpighien est très, Il comporte :
peu ou pas différencié. • un bilan cardiovasculaire pour évaluer l’opé-
Il existe aussi quelques variantes des carci- rabilité (échographie cardiaque, écho-doppler
nomes épidermoïdes, ne changeant pas la stra- artériel des vaisseaux du cou, angioscanner) ;
tégie thérapeutique. Les formes verruqueuses se • des explorations fonctionnelles pulmonaires
présentent comme des papillomes à larges bases (une bronchopneumopathie obstructive aggra-
d’implantation. Les formes à cellules fusiformes verait la survenue de fausses-routes, cf. infra) ;
Chapitre 2. Cancers du larynx et de l’hypopharynx 27
Encadré 2.4
N – Métastases ganglionnaires • N2a : métastase dans un seul ganglion lym-
• N0 : pas de signe d’atteinte des ganglions phatique > 3 cm mais ≤ 6 cm.
lymphatiques régionaux. • N2b : métastases homolatérales multiples
• N1 : métastase dans un seul ganglion lym- toutes ≤ 6 cm.
phatique homolatéral ≤ 3 cm dans sa plus • N2c : métastases bilatérales ou controlaté-
grande dimension. rales ≤ 6 cm.
• N2 : métastase unique dans un seul ganglion • N3 : métastase dans un ganglion lymphatique
> 6 cm dans sa plus grande dimension.
lymphatique régional homolatéral > 3 cm et
≤ 6 cm dans sa plus grande dimension, ou M – Métastases à distance
métastases ganglionnaires multiples toutes • M0 : pas de métastase à distance.
≤ 6 cm. • M1 : présence de métastase(s) à distance.
Hémi-laryngo-pharyngectomie
supracricoïdienne (fig. 2.8C et 2.9)
Cette intervention, encore appelée hémi-laryn-
gectomie verticale, est utilisée pour les tumeurs
Figure 2.7. Laryngectomie horizontale sus-glottique de l’angle antérieur du sinus piriforme obligeant à
(ou supraglottique).
D’après : Lefebvre J.-L., Chevalier D. Cancers du larynx. EMC, Paris sacrifier l’aryténoïde mais restant à distance du cri-
(Elsevier Masson), ORL, 2005, [Article 20-710-A10]. coïde. Les extensions au fond du sinus piriforme
contre-indiquent ce type d’exérèse. L’interven-
moins un des nerfs laryngés supérieurs. Cette tion réalise une exérèse en bloc du sinus piriforme
chirurgie peut être élargie aux vallécules, voire à supracricoïdien et de l’hémilarynx attenant sous
la base de langue. L’intervention est terminée par couvert d’une trachéotomie. L’hémicartilage thy-
une pexie entre les restes du cartilage thyroïde et roïde, l’hémi-épiglotte, la bande ventriculaire, la
la base de langue. Un geste ganglionnaire bilatéral corde vocale avec l’aryténoïde et la partie haute
est systématique. La trachéotomie transitoire est du mur médial du sinus piriforme sont sacrifiés.
nécessaire. L’hospitalisation dure trois semaines. L’hémilarynx controlatéral est conservé, ainsi que
Les résultats fonctionnels sont habituellement tout le cricoïde. La fermeture est effectuée à
satisfaisants. l’aide de la paroi pharyngée postérieure restante
en la mobilisant vers l’avant. L’alimentation est
assurée par une sonde nasogastrique pendant
Cancers hypopharyngés T1-T2 la période postopératoire. Les fausses-routes
sont fréquentes, nécessitant une rééducation. La
Les petites tumeurs de l’hypopharynx respectant canule est progressivement obturée à partir du 6e
la mobilité laryngée sont rares et la chirurgie jour. La dysphonie reste importante. Cette inter-
partielle limitée (fig. 2.8). vention ne doit donc pas être proposée aux sujets
âgés et aux sujets à la fonction respiratoire altérée.
Pharyngectomie partielle
latérale (fig. 2.8A)
Il s’agit de lésions limitées de la paroi pharyngée Cancers du larynx
latérale restant à distance de l’angle antérieur et de l’hypopharynx T3
du sinus piriforme. La résection d’une partie de
La fixation de l’hémilarynx imposait autrefois
l’aile du cartilage thyroïde permet d’accéder à la
l’ablation du larynx. Ainsi, dans les années 1970-
lésion et d’en effectuer l’exérèse. La fermeture est
1980, cette mutilation suivie de radiothérapie
effectuée à l’aide des muscles infrahyoïdiens.
obtenait le contrôle carcinologique locorégional
dans 50 à 60 % des cas. Le taux de survie à 5 ans
Pharyngo-laryngectomie latérale
après laryngectomie totale dans les cancers de
supraglottique (intervention
l’endolarynx était de 60 %. Le taux de survie à
d’Alonso) (fig. 2.8B)
5 ans après pharyngo-laryngectomie totale (PLT)
C’est une intervention réservée aux petites pour cancer du sinus piriforme était de 35 %.
tumeurs de la région des trois replis. Elle comporte L’objectif des protocoles de préservation laryngée
Chapitre 2. Cancers du larynx et de l’hypopharynx 37
Figure 2.9. Vue peropératoire de l’hémilarynx gauche après hémi-laryngectomie verticale droite.
Une sonde nasogastrique pénètre dans l’œsophage. 1 : cartilage thyroïde sectionné sur la ligne médiane ; 2 : entrée dans
la trachée ; 3 : corde vocale ; 4 : bande ventriculaire ; 5 : aryténoïde restant.
38 ORL thématique
est donc encore d’égaler ces résultats sans sacrifier 10 % supplémentaire dans les bras comportant la
le larynx en attendant mieux. chimiothérapie. En tout cas, les hypopharynx res-
Pour les cancers du larynx, il s’agit d’atteinte des tent de plus mauvais pronostic que les endolarynx.
trois étages : glottique, sus-glottique et sous-glot-
tique (cancers transglottiques). C’est par exemple
le cas des cancers du ventricule (cf. supra).
Cancers du larynx
Pour les cancers de l’hypopharynx, il s’agit de et de l’hypopharynx T4
lésions occupant tout le sinus piriforme et enva- La chirurgie radicale avec sacrifice du larynx
hissant rapidement le mur pharyngo-laryngé et reste indiquée pour les T4a (fig. 2.10) qui sont
l’espace paraglottique pour bloquer l’articulation de mauvais candidats à l’induction et à la radio-
crico-aryténoïdienne (cf. supra). chimiothérapie concomitante. En revanche, les
T4b relèvent d’emblée de la radio-chimiothéra-
Protocoles de préservation laryngée pie concomitante, puisqu’en général ce sont des
avec chimiothérapie d’induction tumeurs non résécables.
Le principe est de trier les patients répondeurs à la
chimiothérapie pour les soumettre à une radiothé-
rapie (70 Gy). Les critères de ce tri sont le retour Surveillance
à une mobilité normale du larynx et/ou une dimi-
nution du volume tumoral de 50 à 80 %. Ces chi- L’objectif est de dépister une récidive locoré-
miothérapies d’induction sont utilisées depuis les gionale ou la survenue d’un second cancer. La
années 90-95 avec une association 5 FU-cisplatine Société française d’ORL recommande qu’un
(PF). Dernièrement, une taxane (docétaxel) a été
ajoutée aux deux précédents et la chimiothérapie
d’induction par TPF est considérée comme la réfé-
rence. Dans 20 % des cas, les critères précédents ne
sont pas remplis et une chirurgie sacrifiant le larynx
reste proposée. Le patient doit donc être informé
et accepter le marché à l’avance. Dans 70 %, des
cas, ce sont de bons répondeurs et la question est
ensuite de savoir quoi faire : radiothérapie seule ou
radio-chimiothérapie ? Les résultats définitifs des
essais comparatifs ne pourront être donnés que
dans les années 2020.
premier bilan clinique soit effectué tous les deux La conséquence est de devoir en passer par une
mois la première année et qu’une imagerie de alimentation semi-liquide.
référence post-thérapeutique soit proposée au • Les voies aériennes inférieures ne sont plus
troisième mois. L’examen clinique est renouvelé protégées par les voies aériennes supérieures.
ensuite tous les trois mois la deuxième année, tous L’air respiré n’est plus chauffé ni humidifié. Il
les quatre mois la troisième année, puis enfin tous apparaît une métaplasie de l’épithélium bron-
les six mois. chique avec disparition de la fonction ciliaire.
L’élimination du mucus ne peut plus se faire.
La perte de la fermeture glottique rend la toux
Cas du patient moins efficace. La conséquence est l’apparition
laryngectomisé total humiliante en société de raclements et d’expec-
torations indisposant l’entourage.
Sa prise en charge morale est un point important • Les capacités physiques sont diminuées. Le
de la responsabilité de l’équipe soignante, de port de lourdes charges est devenu difficile, car
la famille et de ses amis. Chez ce grand mutilé, la perte de la fermeture glottique ne permet
souvent guéri, la réinsertion sociale repose sur la plus de maintenir la pression thoracique en
compréhension familiale, la reprise du travail, la soulevant un gros poids.
vie associative (association des mutilés de la voix)
et la réhabilitation de de la voix. Qualité de vie du patient
laryngectomisé
Déficits en rapport avec Un syndrome dépressif réactionnel postopératoire
le trachéostome survient, lié à la perte de l’image de soi vis-à-vis
Lorsque le laryngectomisé total se réveille, il est de la famille et des amis. La conséquence est l’iso-
devenu un grand invalide. Il doit donc entière- lement et la poursuite fréquente de l’intoxication
ment modifier son quotidien de vie. éthylique. La sortie de cet état dépressif dépend
• Il est privé de sa voix naturelle. Même en cas d’une bonne relation avec l’équipe médicale et de
de réhabilitation vocale (cf. infra), le laryn- la pugnacité du patient. Environ un quart d’entre
gectomisé craint de ne pas être entendu dans eux reprennent leur ancien travail. En revanche,
les endroits bruyants. Il est inhibé dans sa vie la vie conjugale est souvent fortement altérée.
sociale et s’isole progressivement. L’attitude du conjoint (rejet ou infantilisation)
• Il respire par un trachéostome. Celui-ci néces- contribue à la stigmatisation sociale. Au contraire,
site un nettoyage quotidien et le port de pro- un conjoint affichant la conservation de son
tection contre les projections de mucus. Au estime malgré la perte de la voix originelle et la
début, le patient ne se sent plus respirer et il a présence d’un trou au milieu du cou redonne
l’impression angoissante de manquer d’air. Il y confiance au laryngectomisé. Les rencontres avec
a aussi un danger d’inhalation d’eau lors de la les personnes valides deviennent moins angois-
douche ou de la baignade. Tantôt le trachéos- santes et moins embarrassantes. Son désir de
tome est large et béant, tantôt il a tendance à se réhabilitation vocale est stimulé.
rétrécir et impose le port d’une canule.
• Il présente des troubles de l’alimentation. La Réhabilitation vocale
perte de la ventilation rétropharyngée altère
le goût et l’odorat. La radiothérapie provoque Après l’intervention, la voix reste faiblement chu-
une hyposialie. Les extractions dentaires préo- chotée. Pour recouvrer une communication orale,
pératoires ne sont appareillées que tardive- il existe trois méthodes qui se complètent en cas
ment et les prothèses sont mal supportées. d’échec.
40 ORL thématique
Voix électrique
Les laryngophones sont des appareils en forme
de cylindre que le patient applique sur son cou Vidéo e2.2. Leucoplasie de la corde vocale.
et qui amplifient la voix chuchotée naturelle. Ils Chez ce patient fumeur, les deux cordes vocales sont
sont proposés en cas d’échec des méthodes précé- hyperplasiques avec une leucoplasie très blanche,
dentes. La voix obtenue est monotone et souvent paraissant superficielle, occupant la moitié antérieure de
la corde vocale gauche. Certes, ce n’est probablement
comparée à une « voix de robot ». qu’une lésion précancéreuse, mais elle doit être considé-
rée comme un cancer.
Conclusion
La prise en charge des cancers du larynx et de
l’hypopharynx est lourde. Le patient doit aussi
Chapitre 2. Cancers du larynx et de l’hypopharynx 41
Vidéo e2.3. Cancer de la corde vocale (épipharyngo- Vidéo e2.5. Laryngectomie totale.
scope). Il faut d’abord séparer la base de langue de l’os hyoïde.
Ce cancer occupe la moitié antérieure de la corde vocale Puis on ouvre l’hypopharynx au niveau des vallécules. On
gauche et bourgeonne sur le plancher du vestibule sans saisit l’épiglotte avec une pince de Museux et on découpe
atteindre la commissure antérieure. La mobilité de la la paroi hypopharyngée en contournant le sinus piriforme
corde est normale, sauf le poids de la lésion qui retarde droit à distance du cancer (flèche). On fait la même chose
l’ouverture laryngée. Dans une vue avec une optique du côté gauche en conservant le maximum de muqueuse.
comme l’épipharyngoscope, l’épiglotte est en bas. Au niveau de la région rétrocricoïdienne, on réalise un
tunnel qui permet de séparer l’œsophage de la pièce
opératoire. La trachée est alors sectionnée en sifflet. La
pièce opératoire montre que l’exérèse est passée à plus
de 2 cm du cancer (flèches). On ferme la brèche hypo-
pharyngée en plusieurs plans sur la sonde nasogastrique
qui avait été placée en début d’intervention. La fermeture
cutanée ménagera un orifice pour le trachéostome.
Terrains à risque
j Sujet alcoolo-tabagique : carcinomes épidermoïdes
Cancers survenant sur
de la cavité buccale et de l’oropharynx.
j Travailleurs du bois (ébénistes et menuisiers) :
un terrain alcoolo-tabagique
adénocarcinome de l’ethmoïde.
j Sujet originaire du pourtour méditerranéen Sites concernés
ou du Sud-est asiatique : cancers (cf. fig. 1.14 et 1.15)
indifférenciés du nasopharynx (UCNT).
j Patient immunodéprimé (tout type de cancer).
Ce sont la cavité buccale et l’oropharynx.
Symptômes inquiétants • La cavité buccale comprend les lèvres rouges,
j Ulcération de la cavité buccale. les faces internes des joues, les gencives, la
j Angine unilatérale traînante. langue en avant du V lingual, le plancher de la
j Obstruction nasale unilatérale récente.
bouche, la région rétromolaire, la commissure
j Otalgie à la déglutition avec tympan normal.
intermaxillaire et le palais dur.
j Surdité récente chez un adulte avec tympan(s) opaque(s)
• L’oropharynx comprend d’abord un rideau le
jaune ambré évoquant une otite séromuqueuse. séparant de la cavité buccale et situé à l’aplomb
j Adénopathie cervicale augmentant
du V lingual. Ce rideau est l’isthme du gosier
progressivement de volume.
constitué du voile du palais, des loges amygda-
Cancers concernés liennes avec leurs piliers antérieur et postérieur
Si les cancers du larynx et de l’hypopharynx sont les qui se prolongent dans le voile et se retournent
plus représentatifs des carcinomes épidermoïdes ORL,
pour former la luette à la manière d’un pen-
deux autres types de cancers doivent être connus.
j Le premier survient encore sur un terrain
dentif en architecture. En arrière du V lingual
alcoolo-tabagique : ce sont les carcinomes se trouve la partie cachée de l’oropharynx : la
épidermoïdes de la cavité buccale et de l’oropharynx. base de langue, séparée des parois pharyngées
Ils représentent près de la moitié des cancers des latérales par les sillons amygdaloglosses. La paroi
voies aérodigestives supérieures (VADS). La survie postérieure, les deux vallécules et la face linguale
à 5 ans tous stades confondus est de 50 %. Même de l’épiglotte font aussi partie de l’oropharynx.
guéris, ils laissent encore souvent des troubles de
la respiration, de la déglutition et de l’élocution.
j Les cancers du deuxième type ne sont pas liés Épidémiologie
à l’alcool et au tabac. Cependant, ces cancers
surviennent dans des contextes également L’incidence des cancers de l’oropharynx diminue
évocateurs : les travailleurs du bois pour les légèrement chez les hommes et augmente légère-
adénocarcinomes de l’ethmoïde et des patients ment chez les femmes. Globalement, elle reste stable.
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
44 ORL thématique
En Europe, les facteurs de risque sont l’alcool • Enfin, une lésion précancéreuse déjà connue
et le tabac. En Extrême-Orient, c’est le bétel à (leucoplasie ou érythroplasie) devient doulou-
chiquer qui est un mélange astringent de feuilles reuse ou hémorragique, annonçant sa trans-
de poivrier, de noix d’arec et de chaux. Cette formation (cf. infra).
pratique explique la grande fréquence des cancers • Ce n’est qu’à un stade avancé qu’apparaissent
des faces internes des joues en Inde, en Asie du des saignements, des douleurs, voire un tris-
Sud-Est et en Mélanésie. Le gène p53 et l’EGF mus. Dans les cancers des vallécules et de la face
(epidermal growth factor) seraient également linguale de l’épiglotte, une dyspnée peut sur-
impliqués (cf. partie 2, fiche « Biologie tumorale venir par bascule d’une masse bourgeonnante
et carcinogenèse »). sur l’orifice laryngé.
La stabilité de l’incidence des cancers de la
cavité buccale et de l’oropharynx est en rapport Examen
avec d’autres facteurs de risque. Le virus HPV
jouerait un rôle plus important que pour les • L’examen endobuccal se fait avec deux
cancers du larynx et de l’hypopharynx (cf. partie abaisse-langues pour déplisser chaque repli de
2, fiche « HPV16-18 et cancers des VADS »). Le muqueuse. Il faut relever la langue pour voir sa
rôle de l’immunodépression est aussi reconnu, face ventrale et le plancher antérieur. Puis on
comme chez les porteurs de VIH ou chez les s’insinue entre langue et gencive pour examiner
patients ayant subi une chimiothérapie. Chez le sillon pelvi-lingual jusqu’au pilier antérieur
eux, il faut demander un examen ORL au moin- et la commissure intermaxillaire. Il faut aussi
dre doute. faire basculer la tête du patient en arrière pour
examiner la voûte du palais osseux. Même si ça
Signes d’appel ce ne lui est pas agréable, il faut palper toute la
bouche et surtout le plancher, le doigt protégé
• Dans la plupart des cas, le patient découvre lui- par un doigtier. La palpation de la base de
même une ulcération hémorragique. Elle est à langue ne pourra vraiment être pratiquée qu’au
l’origine de paresthésies, de gêne à la mobili- moment de l’anesthésie générale pour la panen-
sation de la langue et de sensations de brûlure doscopie. Dans la plupart des cas, la lésion
lors de l’ingestion d’épices. Il est fréquent est directement visible à l’examen de la cavité
que, socialement isolés dans leurs addictions, buccale et de 1’oropharynx. C’est une ulcéra-
fatigués, fatalistes et négligents, ces patients ne tion bourgeonnante, indolore et fréquemment
consultent que tardivement, à un stade avancé. surinfectée. La palpation retrouve des bords
• La découverte de la lésion peut aussi être indurés et évalue l’étendue de l’infiltration
fortuite, à l’occasion d’un examen dentaire sous-jacente en centimètres. Il faut noter ses
pour des dents qui bougent. Ailleurs, c’est une rapports avec les structures voisines, y compris
histoire d’angine traînante traitée par plusieurs avec la mandibule.
cures d’antibiotiques. Deux signes évocateurs • La palpation des aires ganglionnaires doit
auraient dû attirer l’attention : le caractère se faire le cou fléchi pour détendre les muscles
unilatéral des symptômes et la présence d’une sterno-cléido-mastoïdiens, au besoin en se pla-
otalgie à la déglutition avec un tympan normal çant derrière le malade. La région sous-maxil-
à l’otoscopie. Sur un terrain alcoolo-tabagique, laire est palpée les doigts recourbés en crochet,
ces signes imposent d’adresser rapidement le en combinant une palpation endobuccale du
patient à l’ORL. plancher avec l’autre index. Toutes les aires sont
• Souvent, c’est l’apparition d’une volumineuse méthodiquement explorées (cf. chapitre 1).
métastase ganglionnaire cervicale dure et indo- • La fibroscopie nasopharyngée étudie la
lore, qui amène à rechercher sa porte d’entrée. base de langue et les sillons amygdaloglosses.
Le contraste entre la grande taille de l’adéno Elle recherche d’autres localisations synchrones
pathie et la petite taille de la tumeur est classique. au niveau du larynx et de l’hypopharynx.
Chapitre 3. Cancers ORL autres que ceux du larynx et de l’hypopharynx 45
Le carcinome de la zone de « jonction linguale » L’aspect est différent d’un sialendocèle de la glande
correspond à une forme développée autour de la sublinguale (cf. partie 2, fiche « Grenouillette »).
base d’implantation linguale du pilier antérieur Dès que la gencive est atteinte, on peut considérer
de la loge amygdalienne. En cas d’extension au qu’il y a une extension osseuse. L’extension gan-
sillon amygdaloglosse, il correspond davantage à glionnaire commence par la loge sous-maxillaire.
un cancer de l’oropharynx.
Région rétromolaire (anciennement appelée
Plancher de la bouche (vidéo 3.1 ) commissure intermaxillaire) (vidéo 3.2 )
Ici, l’ulcération est pelvi-linguale ou pelvi-gingivale Ces tumeurs situées sur l’os sont très agressives.
en feuillets de livre. L’atteinte du plancher buccal Elles s’étendent rapidement vers l’espace mas-
postérieur ne peut être mise en évidence qu’en ticateur et les muscles ptérygoïdiens, entraînant
déplissant le sillon gingivo-lingual postérieur. un trismus gênant l’examen (fig. 3.3).
Chapitre 3. Cancers ORL autres que ceux du larynx et de l’hypopharynx 47
protraction de la langue qui est déviée vers le côté ligne médiane ou s’il existe un envahissement de
atteint. Les formes infiltrantes sont fréquentes, l’espace parapharyngé ou de la médullaire osseuse
s’étendant latéralement vers les sillons amygdalo- de la mandibule.
glosses. Une petite ulcération proche des vallé-
cules peut avoir une extension antérieure suivant Examen TDM cervico-thoracique
les fibres musculaires des muscles hyoglosse et Injecté, il est indispensable pour l’étude des cor-
génioglosse jusqu’à la symphyse mandibulaire. ticales osseuses. Il est également performant dans
Au moment du diagnostic, l’extension ganglion- la recherche de métastases ganglionnaires cervi-
naire est presque toujours présente et rapidement cales. Outre l’augmentation de taille, le caractère
bilatérale. Dans les localisations unilatérales, l’adé- sphérique et la prise de contraste, c’est surtout la
nopathie cervicale peut être controlatérale (croisée). présence d’une zone hypodense au sein de l’adé-
Lésions étendues de l’oropharynx nopathie qui signe son envahissement. Un autre
intérêt de l’examen TDM est d’effectuer le bilan à
II s’agit de volumineux cancers touchant l’amyg- distance : recherche de métastases pulmonaires ou
dale, la langue au niveau de la zone de jonction et d’un second cancer primitif au niveau bronchique
le voile du palais. L’extension déborde largement ou œsophagien.
vers les structures adjacentes. Il est impossible
de préciser le point de départ chez ce patient TEP-scan
en proie à une dysphagie intense avec sialorrhée
hémorragique, nauséabonde et surinfectée (anaé- Il n’est demandé que pour les tumeurs étendues.
robies). L’examen de la lésion est gêné par le tris- L’objectif est d’avoir le statut complet du patient
mus, la fixité de la langue et la douleur déclenchée avant de proposer des chirurgies lourdes et muti-
par le moindre contact. L’adénopathie satellite est lantes. Il sera surtout utilisé en post-thérapeutique
souvent déjà énorme, fixée aux plans profonds et pour différencier les remaniements cicatriciels des
au plan cutané. récidives.
Panendoscopie
Examens complémentaires Elle est effectuée sous anesthésie générale en ven-
Le bilan d’extension repose sur l’imagerie et tilation spontanée pour bien voir toutes les voies
l’endoscopie. L’obtention de la preuve histolo- aérodigestives supérieures. La base de langue est
gique est obligatoire. Le bilan comporte aussi la palpée plus facilement. Des biopsies multiples
recherche d’une seconde localisation tumorale sont réalisées à la recherche de lésions synchrones.
synchrone ou d’une métastase découverte une On en profite pour faire la mise en état dentaire
fois sur dix : au niveau du carrefour aérodigestif, avec un panoramique préalable. Le schéma défini-
de l’œsophage et des poumons. tif de la lésion est arrêté en vue de la RCP.
Bilan d’opérabilité
IRM
On profite de l’hospitalisation pour faire un bilan
Elle doit être réalisée avant les soins dentaires
complet : cardiaque, pulmonaire, hépatique, nutri-
en séquences pondérées en T1, sans puis avec
tionnel et audiogramme de référence si une chimio-
injection de gadolinium, avec éventuellement
thérapie ototoxique est envisagée (sels de platine).
saturation de graisse (SAT-FAT) et en séquences
pondérées en T2. En T2, la lésion est habi-
tuellement en hypersignal. L’IRM est particu- Histopathologie
lièrement utile dans les lésions de la langue, car
elle est supérieure à l’examen TDM pour fixer La biopsie tumorale montre qu’il s’agit de car-
les limites de la tumeur dans les structures mus- cinomes épidermoïdes dans 95 % des cas. Les
culaires. Notamment pour savoir si elle dépasse la tumeurs « micro-invasives » n’infiltrent que
Chapitre 3. Cancers ORL autres que ceux du larynx et de l’hypopharynx 49
les couches les plus superficielles du chorion. Le • T4b (tumeur non résécable) : tumeur envahis-
carcinome « invasif » pénètre largement le chorion sant tout l’espace masticateur (muscle pté-
et les faisceaux musculaires. Il peut être différencié rygoïdien latéral), l’apophyse ptérygoïde, le
et constitué de lobules kératosiques ou indiffé- cavum, la base du crâne ou l’artère carotide
rencié sans kératine. Le carcinome verruqueux interne.
est une forme rare, très différenciée, pouvant être
confondue avec un papillome. De même, le carci- N : adénopathie(s)
nome à cellules fusiformes est une forme très peu • N0 : absence d’adénopathie métastatique.
différenciée, pouvant en imposer pour un sarcome. • N1 : adénopathie métastatique homolatérale
Au niveau de la langue, le diagnostic avec les unique ≤ 3 cm.
tumeurs bénignes est facile pour le papillome, le • N2a : adénopathie métastatique homolatérale
fibrome et le neurinome. Il peut être difficile pour unique > 3 cm et ≤ 6 cm.
le myoblastome granuleux d’Abrikossof. • N2b : adénopathies métastatiques homolaté-
Au niveau du voile, la présence de nombreuses rales multiples ≤ 6 cm.
glandes salivaires accessoires rend compte d’autres • N2c : adénopathies métastatiques bilatérales ou
pathologies tumorales : adénome pléomorphe, controlatérales ≤ 6 cm.
carcinome adénoïde kystique (ou cylindrome) et • N3 : adénopathie métastatique > 6 cm.
adénocarcinomes.
Au niveau de l’oropharynx, les lymphomes sont
M : métastases
d’aspect différent : amygdale unilatéralement très
volumineuse indolore et prenant un aspect bleuté M0/M1 : absence ou présence de métastases à
du fait de la congestion veineuse (cf. partie 2, distance.
fiche « Lymphomes ORL »).
Les lésions précancéreuses dégénèrent dans 4 à
5 % des cas (cf. partie 2, fiche « Lésions précan- Thérapeutique, méthodes
céreuses des muqueuses des voies aérodigestives
Chirurgie
supérieures »).
Avant d’envisager les indications, faisons la liste
des techniques chirurgicales envisageables. Les
Classification TNM exérèses se font en fonction de l’extension et
visent la cavité buccale, l’oropharynx ou l’une
Elle ne dispense pas de décrire la tumeur : bour- débordant sur l’autre (encadré 3.1)
geonnante ou ulcérée, dimension de l’infiltration
et description des adénopathies cervicales. Exérèse de la tumeur primitive
• Glossectomies partielles pouvant intéresser la
T : tumeur pointe de la langue, son bord libre ou sa face
• T1 : tumeur ≤ 2 cm dans sa plus grande dimen- dorsale. Elles sont réalisées par voie endobuc-
sion. cale en électrosection chez un patient intubé.
• T2 : tumeur > 2 cm mais ≤ 4 cm dans sa plus • Hémipelviglossectomie comportant l’exérèse
grande dimension. du plancher latéral et de l’hémilangue adja-
• T3 : tumeur > 4 cm dans sa plus grande dimen- cente.
sion. • Pelviglossectomies intéressant la langue et le
• T4a (tumeur résécable) – tumeur s’étendant plancher. L’intervention classique est le pull
aux structures voisines : larynx, muscles pro- through. Cette intervention consiste à désinsé-
fonds de la langue (génioglosse, hyoglosse, rer la langue et le plancher, à les extérioriser
palatoglosse et styloglosse), sinus maxillaire, par une voie d’abord cervicale, puis à réséquer
muscle ptérygoïdien médial, peau du visage, la lésion sous contrôle de la vue, et enfin à
palais dur ou mandibule. remettre en place les structures restantes.
50 ORL thématique
Encadré 3.1
Figure 3.4. Pelvimandibulectomie antérieure avec en monobloc, curage ganglionnaire radical du côté gauche et sous-
maxillaire du côté droit.
A. Principe de l’intervention en « pull through » désinsérant la langue et l’extériorisant par voie cervicale, permettant une
résection du plancher de la bouche et de la langue à la demande. B. Malheureusement, dans ce cas, l’extension intra-
osseuse obligea à sacrifier la symphyse avec une marge de sécurité de 1 cm suivi de reconstruction par un greffon osseux.
A. D’après Rouvière H. Anatomie humaine – Tome I. Paris : Masson, 1959, p. 26 (fig. 262).
Chapitre 3. Cancers ORL autres que ceux du larynx et de l’hypopharynx 51
• Cicatrisation dirigée en laissant le lit tumoral cavité buccale, il doit être supra-omo-hyoïdien
cruenté. (niveaux I à III) et complété en fonction du
• Lambeau muqueux local (lingual, face interne résultat obtenu en extemporané.
de joue ou boule de Bichat) • Curage ganglionnaire cervical fonctionnel
• Lambeau nasogénien. (modified radical neck dissection), incluant les
• Lambeau de peaucier du cou consistant à lever groupes ganglionnaires ipsilatéraux de I à V,
une palette sous-cutanée fine et malléable dans mais épargnant la veine jugulaire interne et le
le plan sous-platysmal en la pédiculant sur muscle sterno-cléido-mastoïdien. Il est réalisé
l’artère faciale. Cette palette est ensuite passée pour des métastases ganglionnaires qui n’infil-
en bouche et suturée aux berges de la perte de trent pas ces structures.
substance muqueuse. • Curage ganglionnaire cervical radical, incluant
• Lambeau pédiculé de muscle grand pectoral ou les groupes ganglionnaires ipsilatéraux de I à V,
de muscle grand dorsal. Ils sont très utiles si la veine jugulaire interne et le muscle sterno-
un comblement est souhaité, mais ne sont pas cléido-mastoïdien. Le curage peut être étendu à
adaptés à la reconstruction de structures fines d’autres structures anatomiques, mais doit res-
comme le voile du palais. pecter l’artère carotide sous peine d’hémiplégie
• Lambeau libre antébrachial ou lambeau chinois. postopératoire.
Il apporte une grande surface tissulaire facile à • Curage homolatéral à la lésion quand elle est
modeler avec un bon pédicule vasculaire. bien latéralisée (gencive latérale, trigone rétro-
• Lambeau libre composite ostéo-cutané de fibula molaire, face muqueuse de la joue, zone de
(péroné) ou de scapula (omoplate) lorsqu’une jonction linguale, plancher latéral).
mandibulectomie interruptrice a été effectuée. • Curage bilatéral si la lésion se trouve sur la
Des prothèses mandibulaires sont aussi utilisées lèvre, le plancher antérieur et la pointe de la
avec des résultats inégaux. langue (sauf T1 des lèvres).
Radiothérapie et chimiothérapie
adjuvante (cf. partie 2, fiches
« Radiothérapie » et « Chimiothérapie
des carcinomes épidermoïdes ORL »)
Les traitements complémentaires à la chirurgie
Figure 3.6. Sous-groupe des niveaux ganglionnaires peuvent rarement être évités, sauf dans les petites
de I à V.
Prades J.-M., Schmitt T., Timoshenko A. Cancers de la langue. EMC,
tumeurs T1 où l’exérèse s’est effectuée avec de
Paris (Elsevier Masson), ORL, 2003 : 1-14, fig. 6 [Article 20-627-A-10]. bonnes marges de sécurité et où il n’y avait qu’un
Chapitre 3. Cancers ORL autres que ceux du larynx et de l’hypopharynx 53
le neurochirurgien (fig. 3.8 et 3.9). Une recons- En cas d’atteinte du sinus maxillaire, on
truction de l’étage antérieur de la base du crâne réalise une maxillectomie qui est habituellement
doit être effectuée dans le même temps en évi- une intervention très mutilante lorsqu’elle est
tant les greffons osseux qui se nécrosent avec la totale.
radiothérapie postopératoire. Aucune exploration
ganglionnaire n’est nécessaire. La radiothérapie Cancer du rhinopharynx
est particulièrement difficile, compte tenu de (fig. 3.10)
la proximité de nombreux organes à risque :
cerveau, œil et plexus nerveux. C’est un cancer viro-induit (virus Epstein-Barr
Certaines équipes réalisent un abord antérieur ou EBV), analogue du cancer viro-induit de
direct sur la lame criblée non neurochirurgical. l’oropharynx (virus HPV). Son diagnostic reste
Dans certains cas, celle-ci peut même être retirée longtemps méconnu, du fait de son inaccessibilité
par voie endoscopique. à l’examen non spécialisé.
Chapitre 3. Cancers ORL autres que ceux du larynx et de l’hypopharynx 57
Figure 3.9. Résultats d’ethmoïdectomies à double équipe, ORL et neurochirurgicale, pour adénocarcinome
de l’ethmoïde.
Aucune récidive, greffons osseux toujours en place 4 ans après (A) et 15 ans après (B). Noter dans ce dernier cas
la présence d’un comblement cicatriciel stable des cavités ethmoïdo-maxillaires droites.
Épidémiologie
Figure 3.10. Coupe sagittale du nasopharynx ou cavum
en IRM TSE T2 (astérisque). Les pays à haut risque sont la Chine du Sud (18 %
Corps du sphénoïde en haut (flèche). Clivus (tête de de l’ensemble des cancers), l’Asie du Sud-Est et
flèche). La limite virtuelle entre le nasopharynx et l’oropha-
rynx est la ligne partant du palais osseux jusqu’au rebord le Groenland (Inuits). Le risque est très faible en
supérieur de l’arc antérieur de l’atlas (ligne rouge). Europe, au Japon, en Amérique du Nord et en
Dubrulle F., Martin-Duverneuil N., Moulin G. Imagerie en ORL. Elsevier Océanie. Le nord-est de l’Afrique et le pourtour
Masson, 2010, p. 115 (fig. 8.1).
méditerranéen présentent un risque intermédiaire.
En France, ces tumeurs frappent presque toujours
Histopathologie des populations immigrées d’Afrique du Nord
Deux types sont distingués : les carcinomes non et du Vietnam. L’âge moyen est de 50 ans, mais
kératinisés et les carcinomes épidermoïdes kéra- des sujets jeunes entre 10 et 20 ans peuvent être
tinisants. atteints. Il y a une prédominance masculine avec
Les carcinomes non kératinisés touchent des un sex-ratio entre 2 et 3. À Hong Kong, l’inci-
sujets jeunes d’origine géographique typique dence de ce cancer aurait baissé de 50 % en 10 ans.
(cf. infra). Ils sont de deux sous-types : le car- En même temps, la baisse de mortalité de 60 %
cinome épidermoïde peu différencié et le sous- témoigne d’une efficacité thérapeutique modérée.
58 ORL thématique
Extension postérieure
Elle peut se faire directement dans l’espace rétro-
pharyngé à travers le fascia pharyngo-basilaire ou
Vidéo e3.1. Cancer du plancher de la bouche.
par le biais d’une adénopathie rétropharyngée. Pour le dépister, il ne faut pas manquer de vérifier la face
Puis elle s’étend latéralement vers l’espace rétro- ventrale de la langue et le plancher de la bouche. Avec
stylien avec son paquet jugulo-carotidien, les nerfs deux abaisse-langues, on évalue l’extension au frein, aux
IX, X et XI et le sympathique cervical (syndrome caroncules, aux orifices des canaux de Wharton, aux
sillons pelvi-linguaux, et surtout la distance de la lésion
de Claude Bernard-Horner, cf. partie 2, fiche par rapport à l’os mandibulaire. Enfin, on termine par la
« Paralysie des nerfs crâniens »). Au maximum, palpation et une biopsie après avoir pulvérisé un anes-
l’extension gagne l’espace prévertébral. thésique local.
Principe du traitement
En Asie du Sud-est, des chirurgies sont parfois
proposées. Mais en France, le traitement repose
sur l’irradiation exclusive avec modulation
d’intensité associée ou non à une chimiothérapie
concomitante par sels de platine. Dans la plupart
des cas, l’irradiation inclut les aires ganglionnaires
Ib à V des deux côtés et les ganglions rétropha-
ryngés.
Chez ces sujets relativement jeunes, souvent
Vidéo e3.2. Cancer gingival supérieur droit.
guéris, se pose le risque de toxicité à long terme
Ce cancer occupe toute la face vestibulaire de la gencive
de la radiothérapie : supérieure droite avec peut-être extension à la commis-
• paralysie des nerfs crâniens et séquelles neurolo- sure intermaxillaire.
giques dans 40 % des cas ;
• cou très fin avec télangiectasies et trismus ;
• surdité post-radique.
Les organes à risque de la région sont nom-
breux et la radiothérapie particulièrement déli-
Chapitre 3. Cancers ORL autres que ceux du larynx et de l’hypopharynx 61
Encadré 4.1
Tumeurs sus-sternales
Masse latérale et très haut située
Dans l’espace sus-sternal de Grüber peuvent se
Nature parotidienne de la lésion
développer des kystes dermoïdes et des lipomes.
Elles ressemblent à des tumeurs de l’isthme de Elle se reconnaît au fait que le lobule est déjeté
la thyroïde, mais elles ne « montent » pas à la en dehors et que l’espace situé entre le tragus
déglutition. et la mandibule est comblé (fig. 4.5). Quand
Encadré 4.2
Encadré 4.3
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
80 ORL thématique
De ces notions morphologiques découlent la membrane tympanique perd ses reliefs ossicu-
quelques éléments anatomopathologiques essentiels : laires (fig. 5.2).
• le tympan est une fenêtre placée sur une
muqueuse respiratoire dont certains aspects Épanchement
congestifs traduisent l’atteinte de toutes les Sous pression, il repousse le tympan qui bombe
voies aériennes supérieures ; en verre de montre. Ce bombement est surtout
• les aspects otoscopiques pathologiques de la visible en arrière, car la membrane tympanique
membrane tympanique sont provoqués par cinq n’est pas dans un plan seulement sagittal, mais
processus (cf. ci-après). regarde un peu en avant (fig. 5.2).
Inflammation Perforation
Elle se traduit par la perte de la couleur grise Elle permet au pus de s’écouler (otorrhée), ce qui
normale du tympan, remplacée par une couleur oblige à réaliser une aspiration douce pour réaliser
rougeâtre et une hypervascularisation le long du l’otoscopie.
manche du marteau.
Rétraction
Œdème
Elle appartient au diagnostic différentiel
Il réalise un épaississement noyant progressive- (fig. 5.2). Elle rend compte d’un dysfonc-
ment l’apophyse externe qui finit par disparaître : tionnement tubo-tympanique, par exemple une
Chapitre 5. Otites aiguës de l’enfant 81
Encadré 5.1
(80 mg/kg/jour d’amoxicilline) + amoxicilline dans 50 à 75 % des cas. Lorsque l’enfant a eu une
(70 mg/kg/jour) ou monothérapie par cef- ou plusieurs antibiothérapies dans l’hiver, il est
triaxone (50 mg/kg/jour) pour 3 jours. utile de réaliser un bilan audiométrique à la fin de
celui-ci. En cas d’évolution favorable, le contrôle
Indications de l’antibiothérapie systématique des tympans après trois semaines
n’est pas recommandé car une otite séreuse post-
• Chez l’enfant de moins de 2 ans, on prescrit une
infectieuse peut survenir et régresser spontanément
antibiothérapie probabiliste par amoxicilline.
dans les trois mois, surtout aux approches de l’été.
• Chez l’enfant de plus de 2 ans, on ne pres-
Toutefois, à notre avis, en cas de récidive, il importe
crit une antibiothérapie probabiliste d’emblée
de savoir si le tympan était redevenu normal car
par amoxicilline que si le risque infectieux
l’attitude serait différente (cf. infra).
est important (immunodépression, division
palatine, antécédent de mastoïdite) ou en cas
de suspicion d’infection par le pneumocoque Otites récidivantes
(fièvre élevée et otalgie intense).
• Sinon, en cas de symptômes peu bruyants et Chaque cas est particulier. Il est prouvé qu’une
sans risque particulier, on ne prescrit qu’un trai- antibiothérapie en continu n’a pas d’intérêt en
tement antalgique. Une réévaluation est effec- prophylaxie. D’autre part, la vaccination antipneu-
tuée après 48 à 72 heures pour éventuellement mococcique ne fait que substituer les sérotypes
prescrire l’antibiothérapie en cas de persistance non vaccinaux aux sérotypes vaccinaux. Les enfants
ou d’aggravation. sujets aux récidives d’otite sont probablement en
• Dans l’otite congestive, l’antibiothérapie n’est déficits d’IgA et d’IgG2 liés à une immunité imma-
pas recommandée à tout âge. En revanche, il ture. Il existerait aussi une prédisposition familiale
faut surveiller l’enfant et refaire une otoscopie démontrée chez les jumeaux monozygotes. La
après 48 heures d’antalgiques. Dans la plupart division palatine, opérée ou non, augmente consi-
des cas, il y a une amélioration. Rarement, la dérablement le risque d’otite récidivante, car la
situation persiste ou s’aggrave, amenant à pres- musculature tubaire participe à la malformation.
crire l’antibiothérapie.
Le point essentiel est de savoir si le tympan
• En cas d’allergie aux pénicillines, sans contre-
revient ou non complètement à la normale
indication aux céphalosporines, on prescrit le
entre chaque épisode (fig. 5.9).
cefpodoxime. En cas d’allergie à l’ensemble des
β-lactamines, on choisit le cotrimoxazole ou
l’érythromycine-sulfafurazole. Otites indépendantes
• Si une otoscopie correcte est impossible (céru- les unes des autres
men, agitation), l’antibiothérapie ne doit pas Entre les épisodes aigus, l’otoscopie montre le
être prescrite à l’aveugle. Avant l’âge de 2 ans, retour d’une belle membrane tympanique grise,
le recours à l’ORL doit être envisagé. transparente et non rétractée. Il faut alors évoquer
des contaminations à répétition :
Évolution • rhinopharyngites à répétition chez un enfant
gardé en crèche ;
Évolution sous traitement • tabagisme chez les parents ;
• maintien de la tétine au cours du sommeil ;
Elle doit être suivie par l’otoscopie, l’impédancemé- • lavages de nez pluriquotidiens au sérum phy-
trie et l’audiométrie chez l’enfant plus âgé (cf. cha- siologique en position allongée, qui projette les
pitre 8). Le plus souvent, l’évolution est favorable. sécrétions purulentes vers la trompe d’Eustache ;
L’aspect de la membrane tympanique revient à la • reflux gastro-œsophagien.
normale en 7 à 10 jours. L’impédancemétrie peut Pour lutter contre les facteurs environnementaux,
rester anormale pendant plusieurs semaines, car il on doit d’abord isoler l’enfant des autres enfants
peut persister un épanchement intratympanique infectés (le garder seul chez une grand-mère).
88 ORL thématique
Antrites et mastoïdites
Avant l’âge de 1 an, la mastoïde ne s’est pas déve-
loppée et il n’existe qu’une cellule unique appelée
antre dont l’infection est l’antrite. Chez l’enfant
au-delà de 1 an, les cellules mastoïdiennes se
multiplient et leur infection est la mastoïdite. Une
particularité est que la muqueuse tapissant les cel-
lules mastoïdiennes fait office de périoste. Donc
toute inflammation muqueuse à ce niveau est une
sorte de périostite ouvrant la voie à l’ostéite.
Antrite et mastoïdite peuvent encore se voir.
Elles revêtent deux formes.
Figure 5.9. Évolution des otites moyennes aiguës Forme extériorisée (fig. 5.10)
récidivantes.
Si le tympan revient à la normale entre les épisodes aigus, Non exceptionnelle, elle survient généralement
c’est que les otites à répétition sont en rapport avec des dès la première otite de l’enfant. Le seuil de
facteurs environnementaux. Si le tympan reste anormal
l’additus ad antrum (cf. fig. 5.1) faisant commu-
entre deux épisodes, c’est qu’il existe un épanchement
rétrotympanique qui se réinfeste régulièrement. niquer la caisse du tympan avec l’antre se ferme
du fait de son étroitesse sous l’effet de l’inflamma-
Épanchement rétrotympanique chronique tion et de l’œdème de la muqueuse. Il se consti-
tue alors en amont un empyème s’extériorisant
Entre les épisodes aigus, la membrane tympanique rapidement par la peau rétro-auriculaire. Les deux
reste opaque, inflammatoire et rétractée. La cause signes pathognomoniques sont le décollement
en est la présence d’un épanchement liquidien du pavillon de l’oreille et le comblement du
résiduel. Sa réinfestation épisodique explique les sillon rétro-auriculaire. Une otorhée purulente est
récidives. En milieu d’hiver, la mise en place d’un fréquement associée.
aérateur tympanique sous anesthésie générale est Ces signes permettent de distinguer l’antrite
efficace en aérant la caisse du tympan, palliant ainsi ou la mastoïdite extériorisée de l’adénite prémas-
le dysfonctionnement tubaire (cf. partie 2, fiche toïdienne qui provient d’une infection siégeant au
« Myringotomie et paracentèse »). Au printemps, niveau du cuir chevelu.
il existe une dernière chance de guérir médicale-
ment pour attendre l’amélioration estivale : pres-
crire une corticothérapie de 10 jours (Célestène® Une forme subaiguë (décapitée
goutte), sous couvert d’une cure d’amoxicilline par les antibiotiques)
de 21 jours. Avant l’âge de deux ans, l’hypertro- C’est le tableau d’un nourrisson dont l’otor-
phie des végétations adénoïdiennes est rare, mais rhée purulente persiste depuis plus de 21 jours.
son absence est vérifiée au cours de l’intervention. Après tout ce temps, l’infection perdure car elle
Sinon, une adénoïdectomie peut être utile chez a dépassé le cadre anatomique de la caisse du
un enfant de 3 à 4 ans (cf. chapitre 11). tympan pour se cantonner dans la mastoïde. Les
deux signes pathognomoniques sont l’abondance
Complications de cette otorrhée et l’apparition d’un polype. Le
polype est en fait une extrusion de la muqueuse
Septicémies hypertrophiée de la caisse, s’évaginant par une
perforation tympanique postéro-supérieure. À son
Les méningites et les abcès du cerveau liés à la dis- sommet siège un orifice à la manière d’une tétine
sémination du germe par voie hématogène sont par où sourd du liquide infecté (cf. fig. 6.10). À
devenus exceptionnels. peine a-t-on aspiré ce liquide qu’il se reproduit.
Chapitre 5. Otites aiguës de l’enfant 89
Le cancer du cavum se révèle souvent par une au cours des rhinopharyngites, lors de la sur-
otite séreuse douloureuse. D’où la règle chez veillance des enfants ayant fait des otites aiguës,
l’adulte de faire systématiquement une fibro- ou en cas de retentissement sur les acquisitions
scopie nasopharyngée en cas d’OSM. scolaires et après un dépistage scolaire de la sur-
dité (fig. 6.2).
• À l’otoscopie, les membranes tympaniques sont
Clinique opaques et prennent typiquement un aspect
jaunâtre, ambré, avec parfois des bulles d’air
• Il s’agit le plus souvent d’enfants âgés de 6 mois devinées derrière le tympan. Les reliefs ossicu-
à 7 ans. La pathologie est souvent bilatérale. Il laires sont très marqués. L’apophyse externe
peut y avoir quelques otalgies, mais ce n’est pas est saillante et le manche du marteau est hori-
le cas habituel. L’otite séromuqueuse est le plus zontal, car il a pivoté de telle sorte que son
souvent une découverte d’otoscopie effectuée extrémité (umbo) est plaquée sur le fond de la
94 ORL thématique
caisse. À la limite de la membrane de Shrapnell, • La présence d’une otite séreuse impose l’exa-
on devine le relief des deux ligaments tympano- men du cavum à la recherche d’une hyper-
malléaires (cf. fig. 5.2). Le tympan est dit trophie des végétations adénoïdes chez l’enfant
rétracté. Cette position anormale est en rapport (cf. chapitre 11) ou d’une tumeur du cavum
avec la présence d’une pression négative dans chez l’adulte (cf. chapitre 3).
les cavités de l’oreille moyenne. Il n’y a aucun
signe inflammatoire.
• Il existe une surdité de transmission de 15 à Évolution
40 dB selon que 1’épanchement est séreux
ou mucoïde. L’impédancemétrie montre une • Elle est imprévisible. De nombreuses otites
courbe plate (cf. chapitre 7). L’acoumétrie à la séreuses régressent spontanément, surtout à la
voix chuchotée et la recherche d’un Rinne au belle saison.
diapason 250 ou 500 Hz peuvent être réalisés • L’hiver, chez un enfant qui fait des otites à répé-
chez des enfants très jeunes, sauf le signe de tition, dans la plupart des cas, l’otite séromu-
Weber car, avant l’âge de 6 ans, l’enfant ne queuse persiste entre chaque épisode (fig. 6.4).
latéralise pas. Si on faisait une TDM, on trou- Les antibiothérapies multiples deviennent inef-
verait une opacité grisâtre remplissant toutes les ficaces. En pareil cas, l’arrêt du processus passe
cavités de l’oreille moyenne (fig. 6.3). par la mise en place d’un aérateur (cf. infra).
Physiopathologie
Concept d’atélectasie
Il repose sur une double observation. Il y a
simultanément une disparition de la couche
moyenne conjonctive du tympan (atrophie de la
lamina propria d’origine inflammatoire) et une
aspiration de la membrane devenue flasque et
désarmée (pression négative régnant dans l’oreille
moyenne). On distingue plusieurs types d’até-
Figure 6.6. Troubles trophiques débutants (tympan droit). lectasies selon que l’atrophie est localisée (poche
L’otite séromuqueuse est toujours présente avec son de rétraction) ou généralisée à tout le tympan
tympan opaque de couleur ambrée foncée. L’atrophie (atélectasie totale). Schématiquement, on décrit
présente sur la partie postérieure du tympan a la forme
d’une cupule. La région atticale antérieure est aussi le siège
quatre formes cliniques :
d’une rétraction. En avant se trouve une plaque blanchâtre • la poche de rétraction localisée centrale débu-
de myringosclérose, cicatrice des épisodes antérieurs. tant au niveau de l’umbo et allant rapidement
Chapitre 6. Otite moyenne chronique 97
s’accoler et se fixer au promontoire. Ces formes diffusion des gaz aériens à partir des capillaires
sont les moins dangereuses, car vite bloquées sanguins. La trompe d’Eustache ne fait qu’équi-
et éloignées du nerf facial et de la platine de librer les pressions de façon intermittente en
l’étrier ; s’ouvrant 200 fois par jour, lors des dégluti-
• la poche de rétraction localisée atticale tions. Si la muqueuse de l’oreille moyenne est
(cf. infra) ; inflammatoire, la diffusion des gaz se fait mal.
• la poche de rétraction localisée mésotympa- Il s’installe alors une dépression dans l’oreille
nique excentrée postérieure (cf. infra) ; moyenne qui collabe les parois de la trompe
• atélectasie totale : il n’y a plus de cavité d’Eustache et rétracte le tympan. C’est ainsi
aérienne. La caisse du tympan devient virtuelle. que se produisent les poches de rétraction. Elles
Réduite à sa couche épidermique, la membrane évoluent par stades successifs qui se stabilisent
tympanique se moule sur tous les reliefs de la temporairement. La loi de Mariotte veut en
paroi interne à la manière d’un linge mouillé effet que le produit de la pression d’un gaz par
(vidéo 6.3 ). le volume qu’il occupe soit constant. Ainsi, la
Les trois dernières sont des formes dangereuses, poche réduisant le volume de la caisse, elle aug-
car elles s’invaginent en profondeur dans l’anato- mente la pression qui redevient temporairement
mie de l’oreille moyenne. Elles se fixent aux parois normale.
osseuses (stade adhésif). Elles acquièrent alors
des propriétés ostéolysantes. Points de faiblesse
de la membrane tympanique
Défaut d’aération du système La plupart des poches de rétraction se produisent
tubotympanique en deux endroits précis : la membrane de Shrap-
Pour que le tympan vibre de façon optimale, nell au niveau de l’attique et le quadrant pos-
la pression de l’air intratympanique doit être téro-supérieur du tympan (fig. 6.7 et 6.8). Dans
égale à la pression atmosphérique. L’aération de les formes récidivantes, la poche recommence
l’oreille moyenne résulte principalement d’une toujours au même endroit.
Encadré 6.1
était autrefois appelée otorrhée tubaire. On ne que dans un deuxième temps après s’être assuré
peut espérer sécher l’oreille que si la prise en que la myringoplastie a été couronnée de succès.
charge commence par l’éradication des facteurs
favorisants.
Otite ostéitique
Tympanosclérose et fibro-inflammatoire
Il ne faut pas la confondre avec la myringos-
clérose, petites taches blanchâtres en avant du À l’ère des antibiotiques, on ne voit plus ces ostéites
manche du marteau, cicatrice de la pose d’un diffuses à staphylocoques des siècles précédents
aérateur ou séquelles sans conséquence de la (fig. 6.10). Elles succédaient à des infections oti-
guérison d’une otite séromuqueuse. tiques aiguës pendant des semaines, évoluant vers
La tympanosclérose représente des cas où la les complications méningo-encéphaliques avant
caisse du tympan est comme pétrifiée. Le pro- le décès. En revanche, il n’est pas exceptionnel
montoire, les reliquats ossiculaires et les fenêtres de rencontrer des otites fibro-inflammatoires qui
sont recouverts d’une couche blanchâtre en tache en représentent une forme décapitée. Le tympan
de bougie qu’il faut gratter au décolleur sans est opaque, non rétracté car la caisse est pleine,
savoir où est l’aqueduc de Fallope. Il s’agit d’une remplie d’un tissu inflammatoire occupant toute
dégénérescence hyaline de la lamina propria. l’oreille moyenne. Il n’y a plus d’espace aérien. Ce
Le blocage des osselets entraîne des surdités de n’est pas un épanchement liquidien. C’est tantôt
transmission importantes. En cas de perforation un granulome, tantôt une fibrose impossible à
tympanique associée, si le blocage de l’étrier nettoyer chirurgicalement. Certains distinguent un
nécessite une stapédectomie, il ne faut la pratiquer stade fibro-inflammatoire et un stade fibro-adhésif.
102 ORL thématique
marron cuit classique. D’autre part, la basale place d’aérateurs et de tentatives de chirur-
se transforme en matrice ayant acquis des gie otologique. Très souvent, l’atteinte est
propriétés ostéolysantes et se développant de bilatérale. L’interrogatoire s’enquiert de la
façon centrifuge. Le résultat est la destruction présence de surdité, de vertiges et d’otalgies.
progressive des parois de la caisse du tympan, Parfois, l’affection n’est découverte qu’après
de la mastoïde, des osselets (surdité de trans- une douche ou une baignade qui a déclenché
mission), de la cochlée (surdité de perception), un épisode aigu.
du canal semi-circulaire latéral (vertiges) et de
l’aqueduc de Fallope (paralysie faciale). Si on Otoscopie
le laisse faire, il gagne les méninges de l’étage
Parmi les signes cliniques, l’otorrhée est peu
moyen du crâne au travers du tegmen tympani
abondante mais fétide. Elle peut même être
(méningite et abcès du cerveau) et le sinus laté-
absente ou méconnue. L’otoscopie, faite à
ral dans la fosse postérieure (thrombophlébite
l’optique Panoview de 4 mm, découvre une
et septicémie).
perforation marginale de la membrane tympa-
nique au niveau de la pars flaccida (membrane
Diagnostic de Shrapnell) ou au niveau de la région pos-
téro-supérieure. La paroi latérale de l’attique
Le diagnostic de cholestéatome se pose en trois (mur de la logette) ou le cadre tympanique pos-
étapes : térieur ont déjà été érodés par des granulomes
• le reconnaître à l’otoscopie ; inflammatoires infectés. La perte de substance est
• évaluer la perte auditive par l’audiométrie ; couverte d’une croûte sanieuse d’où s’échappent
• juger de son extension par la tomodensitomé- des squames épidermiques blanches et brillantes
trie (TDM). (fig. 6.12). Ses limites ne peuvent être recon-
L’anamnèse permet de reconstruire une nues qu’après une aspiration sous microscope
longue histoire d’otites aiguës, de mise en binoculaire.
Encadré 6.2
Cholestéatomes rares
• Le cholestéatome congénital de l’oreille • Le cholestéatome post-traumatique corres-
moyenne correspond à l’absence de résorption pond à l’incarcération de fragments d’épiderme
des cellules embryonnaires épidermiques. Il se dans l’oreille moyenne à la suite d’une frac-
développe au début, derrière une membrane tym- ture du rocher ou d’un geste chirurgical. Leur
panique intacte, sans pathologie inflammatoire principale caractéristique est leur survenue sur
muqueuse. Lors des premières années de la vie, des oreilles moyennes bien pneumatisées. Leur
ce cholestéatome a une taille limitée et occupe révélation clinique tardive, plusieurs années
habituellement le quadrant antéro-supérieur de la après le traumatisme, pose des problèmes
caisse du tympan. À la TDM, il a une forme de médico-légaux, compte tenu de la latence des
bille. En l’absence de diagnostic précoce, il peut symptômes révélateurs.
se révéler par une paralysie faciale et une surdité.
Chapitre 6. Otite moyenne chronique 105
Cholestéatome post-traumatique.
La flèche désigne le trait de fracture par où s’est faite
l’inclusion épidermique. Mastoïde bien pneumatisée.
Encadré 6.4
à une épidermisation de cette cavité en quelques • forme latérale dans la poche de Prussak entre
semaines. Mais c’est une intervention chirurgicale pars flaccida et col du marteau avec son liga-
longue et difficile. Il faut fraiser jusqu’aux corti- ment suspenseur.
cales pour ne laisser aucune cellule osseuse. Il faut
abaisser le mur du facial et le mur de la logette
Indications dans le cholestéatome
au maximum pour obtenir une cavité en parfaite
mésotympanique
continuité avec le conduit auditif externe. Des
soins postopératoires pendant plusieurs semaines La partie postéro-supérieure du tympan se rétracte
sont nécessaires pour guider l’épidermisation. En dans le mésotympan, envahissant le récessus facial
respectant ces principes, on obtient d’excellents et le sinus tympani. Dans une chirurgie en tech-
résultats, y compris sur l’audition en construisant nique fermée, on pratique d’abord une mas-
une caisse réduite avec une myringo-stapédopexie toïdectomie, puis on réalise une tympanotomie
(cf. chapitre 8). Toutefois, même techniquement postérieure dans le récessus facial entre l’aqueduc
parfaite, cette cavité peut suinter et faire des de Fallope et l’annulus. Le nettoyage du sinus
croûtes. On peut être amené à proposer une tympani, toujours difficile, nécessite de fraiser
exclusion de l’oreille moyenne avec fermeture du la pyramide après section du muscle de l’étrier
conduit auditif externe et de la trompe d’Eus- (vidéo 6.8 ).
tache (encadré 6.5 et vidéo 6.7 ).
Indications dans le cholestéatome
Indications dans le cholestéatome hypotympanique
épitympanique La chirurgie reste cantonnée à l’atrium en relevant
En technique fermée, on pratique une tympano- la membrane tympanique vers l’avant. Le choles-
tomie antérieure en ouvrant l’attique sans détruire téatome envahit profondément les petites cellules
le mur de la logette. Mais on peut être limité en situées sous le promontoire, dont le fraisage n’est
avant du fait de l’obliquité du tegmen tympani. pas toujours possible du fait de l’étroitesse de l’accès.
Dans ce cas, on réalise une épitympanotomie
transcanalaire détruisant le mur de la logette.
Indications dans le cholestéatome
Le nettoyage de l’attique externe est facilité. Le
holotympanique
cog est fraisé pour ouvrir et nettoyer la fossette
sus-tubaire, et la tête du marteau et l’enclume Il occupe le mésotympan postérieur et s’étend
peuvent être réséquées pour faciliter l’accès à vers l’antre mastoïdien en arrière et vers l’attique
l’attique interne (cf. partie 2, fiche « TDM de interne en haut.
l’oreille normale »). La reconstruction du mur de • Si la mastoïde est petite et sclérotique ou dans
la logette et de l’attique se fait avec du cartilage les formes récidivées, on choisit une technique
de conque ou de tragus façonné pour s’encastrer ouverte en associant le sacrifice de la paroi atti-
dans le défect osseux. cale et en abaissant le mur du facial pour avoir
Ces techniques doivent s’adapter aux trois formes accès à toutes les traînées cellulaires envahies.
de cholestéatome épitympanique (fig. 6.13) : La reconstruction se fait avec de l’os ou des
• forme antérieure naissant au niveau de la partie billes d’hydroxyapatite.
antérieure de la membrane de Shrapnell et • Si la mastoïde est large et très cellulaire, dans
fusant vers le ganglion géniculé du nerf facial ; un premier temps, on associe une large tympa-
• forme postérieure naissant aux dépens de la notomie antérieure et une mastoïdectomie avec
partie postérieure de la membrane de Shrapnell, tympanotomie postérieure. Dans la mesure du
se développant en dehors de la chaîne ossiculaire possible, on évite les techniques ouvertes qui
et fusant le long du corps de l’enclume vers exposent à des cavités très suintantes pendant
l’additus et la mastoïde ; de nombreuses années.
Chapitre 6. Otite moyenne chronique 109
Encadré 6.5
Chirurgies en technique
ouverte (rochers, côté
droit).
110 ORL thématique
Surveillance postopératoire
La récidive du cholestéatome est le risque prin-
cipal. L’examen TDM montre fréquemment des
opacités partielles de la cavité tympanique. Dans
ce cas, l’IRM a une valeur prédictive de 90 %. Elle
visualise des lésions de 5 mm et plus en associant
des séquences conventionnelles en spin-écho T1
(hyposignal, contrairement au granulome à cho-
lestérine) et T2 (hypersignal) à des séquences T1
gadolinium tardives (30 à 45 minutes : pas de
rehaussement, contrairement à la fibrose) et des
séquences en diffusion réalisées en turbo spin-
écho (hypersignal sans artéfacts).
Complications
des otites chroniques
Figure 6.15. Complications neurologiques des choles-
• La labyrinthite purulente est liée à l’irruption téatomes. VII : nerf facial.
Sauvage J.-P., Bessède J.-P. Révision accélérée en ORL. Paris :
des germes dans l’oreille interne par une fistule Maloine, 1987, p. 80 (fig. 23).
siégeant au niveau des fenêtres ou en rapport avec
l’érosion du canal semi-circulaire latéral par un en urgence à la recherche d’un abcès dans la
cholestéatome de l’antre mastoïdien. Le signe de fosse postérieure ;
la fistule est pathognomonique : vertige et nys- – thrombophlébite du sinus latéral : l’extension
tagmus à la compression dans le conduit auditif de l’ostéite ou du cholestéatome vers le
externe (cf. partie 2, fiche « Fistule (signe de la) »). sinus veineux latéral provoque sa thrombose.
• Les complications neurologiques (fig. 6.15) Celle-ci gagne de proche en proche le golfe
demeurent possibles dans l’otite chronique de la jugulaire et la veine jugulaire interne.
cholestéatomateuse, d’où la règle de faire une Cliniquement, c’est un grand tableau septicé-
otoscopie devant toute neuropathie fébrile : mique avec hémoculture positive. Les signes
– paralysie faciale périphérique : elle est liée à d’appels mastoïdiens sont souvent minimes
une atteinte de l’aqueduc de Fallope (2e por- et c’est l’otoscopie qui est le plus souvent
tion et coude) au moment où le nerf traverse décisive. Avant de sacrifier cet axe veineux, il
l’oreille moyenne ; faut vérifier que le sinus controlatéral est bien
– méningite, abcès du cerveau : la méningite présent.
otogène est généralement liée à l’effraction Les complications méningo-encéphaliques des
des espaces méningés par un processus ostéi- otites ne sont pas exceptionnelles. Elles justifient
tique ou cholestéatomateux. L’abcès cérébral la surveillance et le traitement spécialisé de toute
est redouté devant une méningite qui tarde otorrhée chronique, et plus particulièrement de
à guérir et qui se complique d’un tableau l’otite chronique cholestéatomateuse.
d’hypertension intracrânienne. Souvent, les
tableaux sont décapités par des antibiothé-
rapies mal adaptées. Le diagnostic repose `` Compléments en ligne
alors sur l’existence d’une obnubilation pro-
gressive +++ avec élévation du nombre de Des compléments numériques sont associés à ce cha-
polynucléaires dans le liquide céphalo-rachi- pitre, ils sont indiqués dans le texte par un picto .
dien. L’imagerie doit alors être demandée Ils proposent les vidéos du chapitre. Pour voir
Chapitre 6. Otite moyenne chronique 111
une vidéo, scannez le flashcode correspondant à Vidéo e6.4. Poche de rétraction postéro-supérieure.
l’aide de votre smartphone ou de votre tablette, Membrane tympanique gauche. Sa couleur est normale
et il n’y a aucun signe inflammatoire. Le tympan est trans-
ou connectez-vous sur http://www.em-consulte. parent et il n’y a pas d’épanchement rétrotympanique.
com/e-complements/474503 et suivez les ins- En revanche, le tympan est très rétracté : 1) l’apophyse
tructions. externe est très saillante avec un manche du marteau
horizontal ; 2) le ligament tympano-malléaire postérieur
est moulé ; 3) il existe une poche de rétraction postéro-
supérieure ; 4) cette poche de rétraction moule la branche
descendante de l’enclume avec un fort risque d’évolution
Vidéo e6.1. Myringosclérose.
vers la rupture de la chaîne ossiculaire et vers le choles-
Ce tympan droit est presque normal, sauf qu’il est infiltré
téatome. Devant cette grande rétraction avec atrophie
par deux plaques de myringosclérose, stigmates des
de la membrane tympanique, il est urgent de faire un
otites séromuqueuses anciennes et sans conséquence sur
renforcement de la membrane tympanique.
l’audition en l’absence de tympanosclérose ossiculaire.
Vidéo e6.7. Évidement radical et audio (résultats). Vidéo e6.8. Tympanotomie postérieure.
Ce patient avait subi un évidement radical gauche pour La tympanotomie postérieure consiste à réaliser une
cholestéatome multi-opéré étendu de l’attique à la mas- fenêtre entre la mastoïde et la caisse du tympan. Voici la
toïde. À l’époque, une méatoplastie avait été réalisée, fenêtre vue de la caisse du tympan chez un sujet debout.
donnant une bonne vue et permettant une bonne aération. Elle sera creusée dans la zone rose comprise entre le
On peut apercevoir l’attique ouverte en haut (Att), la bosse tympan (Ty) et le facial (VII). Elle donne une vue sur l’étrier
du canal latéral (CL) et celle du massif du facial (MF) qui (Et) et la fenêtre ronde (FR). Voici la même fenêtre en
avait été abaissé de façon insuffisante. La mastoïde (Ma) position opératoire chez un sujet couché (oreille droite :
était bien épithélialisée et propre. Le patient était satisfait NF = nerf facial, CT = corde du tympan, E = enclume, CL =
car la cavité était sèche et l’audition presque normale canal semi-circulaire latéral, CP = canal semi-circulaire
(audiogramme) grâce au rehaussement de l’étrier (Et) et postérieur). L’intervention consiste à prolonger la zone
à la conservation du marteau (M). Un nettoyage annuel rose vers le bas. Oreille droite. On commence par la
de la cavité est suffisant, mais l’introduction d’eau reste mastoïdectomie. Puis on crée la fenêtre à la fraise diamantée
déconseillée. sous bonne irrigation pour ne pas léser le facial qui est juste
en dedans. Voici l’étrier et plus bas, c’est la fenêtre ronde.
Chapitre 7
Examen d’une surdité
Points forts l’oreille interne. Grâce au système tympano-ossicu-
j Les surdités de transmission sont celles qui laire, le rendement passe à plus de 60 %2.
concernent l’oreille externe et l’oreille moyenne.
j Les surdités de perception sont celles qui concernent
l’oreille interne et les voies rétrocochléaires.
j Les épreuves au diapason de Rinne et de Types de surdité
Weber permettent de distinguer surdité de
transmission et surdité de perception.
Les pertes auditives peuvent être classées sui-
j L’audiométrie tonale mesure les pertes
auditives pour chaque fréquence.
vant deux catégories : les surdités de transmis-
j L’audiométrie vocale mesure la sion (altération du système tympano-ossiculaire)
discrimination et l’intelligibilité. et les surdités de perception (altérations endo- et
j L’impédancemétrie teste la mécanique rétrocochléaires). En fonction du siège de la lésion,
de l’oreille moyenne. on distingue encore plusieurs types de surdité
j Les oto-émissions acoustiques provoquées (fig. 7.1) :
testent la mécanique de l’oreille interne. • les surdités de transmission sont en rapport avec
j Les potentiels évoqués auditifs testent une obstruction de l’oreille externe ou avec une
seulement les fréquences aiguës.
lésion de l’oreille moyenne (tympan, osselet,
j Les ASSR (auditory steady-state responses) testent
les fréquences graves et les fréquences aiguës.
épanchement rétrotympanique, cholestéatome,
etc.) ;
L’oreille interne nous vient des poissons. Conçue • les surdités de perception (ou neurosenso-
pour capter des vibrations liquidiennes, elle a rielles) sont en rapport avec une atteinte de
dû s’adjoindre l’oreille moyenne pour capter les l’oreille interne ou avec une atteinte sur les
vibrations aériennes quand la phylogenèse s’est voies nerveuses ;
poursuivie sur les continents. C’est la fonction du • les surdités de perception peuvent encore être
tympan et de la chaîne des osselets. Ils mettent les classées par rapport à la cochlée :
liquides de l’oreille interne en vibration (cf. partie – surdités cochléaires (ou endocochléaires),
2, fiche « Anatomophysiologie de l’audition »). lorsque l’affection siège au niveau de la coch-
Le son n’est que le déplacement local des molé- lée (traumatisme sonore, ototoxicité, maladie
cules de part et d’autre de leur position moyenne. Il de Menière),
se propage dans l’air à une vitesse de 340 m/sec et – surdités rétrocochléaires, lorsque la lésion
dans l’eau à une vitesse 1 500 m/sec. L’air et l’eau est située sur le nerf cochléaire (VIIIe paire
sont des milieux d’impédance1 très différente : crânienne) ou sur les voies cochléaires du
92 dyn/sec/cm3 pour l’air et 0,35 × 106 dyn/ tronc cérébral et du diencéphale (tumeur de
sec/cm3 pour les liquides de la cochlée. Sans la fosse postérieure) ;
un système d’adaptation d’impédance, seulement • la surdité est dite corticale lorsque c’est le lobe
1,6 % de l’énergie des sons serait transmise à temporal ou les aires associatives qui sont en
cause.
1. Impédance : rapport de l’amplitude d’une grandeur
sinusoïdale (pression acoustique, tension électrique) à
l’amplitude de la grandeur sinusoïdale induite (flux de 2. Buser P., Imbert M. Neurophysiologie fonctionnelle. 3,
vitesse, courant électrique). Audition. Paris : Herman, 1987.
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
114 ORL thématique
60 dB (gauche par exemple), où le patient côté sain. L’otoscopie est normale. Le diagnos-
entend la voix haute mais pas la voix chuchotée tic de neurinome de l’acoustique est redouté
au ras du conduit, deux situations peuvent se en pareil cas, déclenchant la batterie des tests
présenter. audiométriques objectifs (cf. chapitre 8).
• Dans la première, c’est une surdité de transmis-
sion. Dans l’épreuve de Rinne, la conduction Autres caractéristiques des surdités
osseuse du côté gauche est normale. Mais le de transmission
patient n’entend pas le diapason quand on le Toutes les fréquences sont généralement atteintes,
présente devant le pavillon. La confirmation surtout les graves. Il s’agit de simples décalages
du caractère transmissionnel est apportée par des seuils auditifs sans distorsion sonore. Ce sont
l’épreuve de Weber où le patient latéralise du des sujets qui « entendent mal » (cf. supra). Les
côté gauche (côté sourd). Si l’otoscopie est surdités de transmission isolées ne sont jamais
anormale, il peut s’agir de séquelles d’otite totales, elles atteignent au maximum 60 dB et
chronique (cf. chapitre 8). Si le tympan est sont toujours facilement appareillables et presque
normal, il peut s’agir d’une ankylose de l’étrier toutes opérables.
(otospongiose). Quoi qu’il en soit, cette surdité
de transmission est une bonne indication de Caractéristiques des surdités de perception
chirurgie de la surdité. Au contraire des surdités de transmission, elles
• Dans la seconde, c’est une surdité de percep- s’accompagnent fréquemment d’importantes dis-
tion. Le diapason présenté à gauche en conduc- torsions, en particulier les surdités d’origine cen-
tion osseuse n’avait été entendu que pendant trale. Le plus souvent, la surdité prédomine sur
3 à 4 secondes. En revanche, présenté devant les fréquences aiguës. Elles représentent les cas
le pavillon, en conduction aérienne, le patient typiques où le sujet entend mais comprend mal.
l’avait encore entendu au moins 20 secondes. La Elles sont difficiles à appareiller. Au maximum, la
confirmation du caractère perceptif est apportée destruction de l’oreille interne entraîne une perte
par l’épreuve de Weber latéralisée à droite du complète de l’audition : c’est la cophose.
Chapitre 7. Examen d’une surdité 117
Principe
L’audiométrie tonale doit être effectuée en cabine
insonore. Les sons sont présentés au patient
à l’aide d’un casque comportant un écouteur
sur chaque oreille, entouré d’un bourrelet pour
améliorer l’insonorisation. D’autres transducteurs
sont nécessaires : un vibrateur osseux applicable
sur l’os frontal et l’os mastoïdien et des haut- • Les sons vobulés sont des sons comportant
des cycles de modulation de fréquence très
parleurs pour l’audiométrie en champ libre. Les
proches du son étudié. L’analyse spectrale
sons sont produits par un audiomètre permet- montre une bande étroite. Ils sont utilisés
tant de choisir le type de son, sa fréquence en pour vérifier l’efficacité d’un appareillage :
hertz (Hz) et son intensité en décibels (dB) en champ libre avec des haut-parleurs. Si on
(encadré 7.1). Sur l’audiogramme, on indique utilisait des sons purs, on créerait des ondes
non pas l’intensité physique réellement perçue stationnaires et des résonnances perturbant
par le sujet, mais la perte auditive par rapport aux l’examen.
sujets normaux (encadré 7.2).
118 ORL thématique
Encadré 7.2
Pratique
Le testeur doit d’abord expliquer au patient testé
comment il doit répondre lorsqu’il a perçu le Seuils tonaux exprimés en dB SPL.
son. Une première méthode est de lui demander La plus petite intensité physique qu’un sujet normal
peut entendre est 20 µPa aux fréquences 1 000 et
d’appuyer sur un bouton lorsqu’il a entendu. Un
2 000 Hz. Pour chaque fréquence, le seuil auditif est
voyant lumineux s’allume alors sur l’audiomètre. obtenu en augmentant la stimulation du nombre de
Mais ce n’est pas la meilleure méthode, car elle décibels SPL requis indiqués dans la figure.
oblige à quitter le patient des yeux pour rester
fixé sur le voyant. Or, il est capital d’observer le
patient au moment de sa réponse qui peut être la méthode des niveaux ascendants. Des pas de
franche ou hésitante. L’autre méthode consiste à 5 dB sont utilisés en pratique courante. Plusieurs
lui demander de lever la main du côté où il entend mesures successives sont parfois nécessaires pour
le son. Ce point est essentiel dans les surdités valider un seuil douteux.
unilatérales ou fortement asymétriques (cf. infra). Ensuite, on étudie la conduction osseuse. Le
L’examen débute par l’oreille présumée la meil- transducteur est alors le vibrateur osseux. On
leure à partir des données de l’interrogatoire. commence par le placer sur l’os frontal pour une
Le test commence en conduction aérienne à épreuve de Weber audiométrique destinée à mettre
1 000 Hz, se poursuit par les fréquences aiguës en évidence une asymétrie en conduction osseuse
et se termine par les fréquences graves en ordre (cf. supra). Puis on étudie la conduction osseuse
décroissant. À chaque niveau, le temps de stimu- en plaçant le vibrateur sur la mastoïde de l’oreille
lation doit être de 1 à 2 secondes. Il est recom- testée. Dans cette dernière mesure, le vibrateur ne
mandé d’effectuer la recherche des seuils selon doit pas toucher le pavillon de l’oreille, sinon le
Chapitre 7. Examen d’une surdité 119
résultat est faussé. Il faut donc toujours bien veiller Le masquage de l’oreille controlatérale à
à ce qu’il y ait un écart entre les deux. l’oreille testée est basé sur l’emploi d’un bruit
blanc dont le delta d’assourdissement est de
Masquage ou assourdissement l’ordre de 15 dB pour une audition normale. En
L’écueil en audiométrie est que le patient réponde cas de surdité asymétrique, l’assourdissement uti-
en se basant sur le côté opposé à celui testé. lise un bruit masquant par voie aérienne, prenant
Le transfert transcrânien controlatéral est source en compte l’énergie du transfert transcrânien
de mesures erronées. Des courbes fantômes se capable de masquer la conduction osseuse du
produisent en cas d’asymétrie entre les deux côté opposé, soit environ 50 dB (encadré 7.3).
oreilles dépassant 50 dB en conduction aérienne En retour, ce bruit masquant ne doit pas être
et 10 dB en conduction osseuse. Autant dire trop intense pour ne pas retentir sur la sensibilité
qu’en conduction osseuse, on ne sait jamais quelle de l’oreille testée. Il y a donc un assourdissement
est l’oreille qui répond. La conséquence est que minimum permettant de masquer efficacement
l’on peut confondre une surdité de perception l’oreille controlatérale. Il y a aussi un assourdis-
sévère inopérable avec une surdité de transmission sement maximum au-delà duquel le masquage
justiciable d’une chirurgie par ossiculoplastie. retentit sur l’oreille testée.
Encadré 7.3
Limites techniques
de l’audiométrie tonale
En conduction osseuse, la fréquence 8 000 est
impossible à mesurer. En conduction aérienne,
Figure 7.7. Audiogramme tonal d’une surdité de si les mesures entre 500 et 4 000 Hz sont fiables
perception. jusqu’à 120 dB HL, elles le sont moins pour les
Conduction osseuse et conduction aérienne sont abais-
sées simultanément et dans la même proportion, de telle
fréquences graves, ce qui peut faire ignorer une
sorte qu’elles restent superposées (le Rinne est dit fermé). sensibilité aux basses fréquences et faire confon-
Sauvage J.-P., Bessède J.-P. Révisions accélérées en ORL. Paris : dre une surdité profonde avec une cophose (sur-
Maloine, 1987, p. 92 (fig. 29).
dité totale). Si le Rinne de l’oreille à masquer
dépasse 45 dB, le masque en bruit blanc modifiera
Voici la plus simple (PM = perte moyenne,
les seuils de l’oreille que l’on désire étudier. Une
P500 = perte à la fréquence 500, etc.) :
épreuve de Rainville avec masquage par voie
osseuse est alors nécessaire. Enfin, les audiomètres
1 × (P500 Hz) + 2 × (P1000 Hz) et les transducteurs doivent être vérifiés et étalon-
+1 × (P2000 Hz) nés tous les 6 mois par un technicien muni d’une
PM =
4 chaîne de calibrage.
122 ORL thématique
Certains patients peuvent présenter une fatiga- donc une mesure de l’intelligibilité de la parole
bilité en cours d’examen. Elle est liée à l’âge ou à qui teste non seulement l’appareil neurosensoriel
des traitements médicamenteux. Il faut alors limiter de l’audition, mais aussi l’intelligence, la connais-
le nombre de fréquences testées pour privilégier la sance de la langue et le pouvoir de la suppléance
précision des réponses. En cas d’acouphènes, avec mentale. Elle est complémentaire de l’audiomé-
ou sans hyperacousie, le masquage et les stimuli trie tonale à laquelle il faut toujours l’associer en
peuvent être mal tolérés. Le risque de majoration vue de réhabiliter une surdité (encadré 7.4).
des acouphènes doit être pris en compte et incite à
limiter les stimulations acoustiques intenses. En pratique
Il vaut mieux utiliser des voix enregistrées, de
Audiométrie vocale préférence par des hommes, le spectre étant plus
riche. En français, on utilise des listes de mots
Principe dissyllabiques. Les listes de Fournier sont les plus
Les signaux utilisés en audiométrie vocale sont utilisées. L’étude se fait oreille par oreille avec
des listes de mots que le sujet doit répéter. C’est masquage de l’autre oreille. Les listes cochléaires
Encadré 7.4
Spectre de la parole.
Pour toutes les langues, les fondamentaux sont entre 125 et 250. La zone du
2e formant est la plus importante pour les fréquences conversationnelles. Exem-
ples de formants pour le « è » et le « o ».
Chapitre 7. Examen d’une surdité 123
de J.-C. Lafon utilisent des mots dont la struc- traduisant par une courbe en cloche. Le bénéfice
ture et la signification interfèrent le moins pos- attendu d’un appareillage risque d’être décevant.
sible avec leur compréhension. Elles mesurent
mieux les distorsions, mais sont d’utilisation plus Concordance avec la tonale
complexe. La différence entre le seuil d’intelligibilité vocal
L’audiogramme vocal est un graphique où on et le seuil tonal moyen (500, 1 000, 2 000 Hz)
reporte les intensités en abscisse. En ordonnée, on en dB HL ne doit pas excéder 5 à 10 dB. Une
reporte le pourcentage de mots correctement répé- vocale meilleure que la tonale peut s’expliquer en
tés dans une liste de 5 ou 10 mots. Chaque liste cas d’acouphènes rendant difficile la distinction
est présentée en augmentant le niveau vocal de 5 à des sons testés proches de la fréquence de l’acou-
10 dB selon les performances. On trace une courbe
phène. Il faut alors recourir à des sons pulsés (cf.
d’intelligibilité vocale en extrapolant à partir de 5 à
encadré 7.1). Si l’écart entre la tonale et la vocale
10 points. Elle a une forme de S allongé.
est important, il faut penser à une simulation.
Le résultat se traduit en trois scores (fig. 7.9) :
Si la vocale est moins bonne que la tonale d’un
• le seuil d’intelligibilité est l’intensité sonore à
seul côté, on recherche une atteinte rétrococh-
partir de laquelle le sujet perçoit plus de 50 % des
léaire par les potentiels évoqués auditifs (PEA)
mots. Chez le sujet normal, il est égal à 10 dB ;
(cf. infra). Si la disparité est bilatérale, on évoque
• le maximum d’intelligibilité est le pourcentage
des troubles centraux.
maximal de mots correctement perçus. Chez le
sujet normal, il est égal à 100 % ;
• le pourcentage de discrimination est le pour- Audiométrie objective
centage de mots compris lorsque l’intensité est
35 dB au-dessus du seuil d’intelligibilité. Chez Les épreuves objectives se passent de la partici-
le sujet normal, il est égal à 100 %. pation du patient et sont donc utilisables chez
Parfois, le point culminant de la courbe ne l’enfant et le simulateur. Encore faut-il que le
dépasse pas 60 %. De plus, ce score se dégrade sujet soit suffisamment calme.
en continuant d’augmenter l’intensité. On est
alors en présence de distorsions en amplitude, se
Impédancemétrie
Elle comprend deux mesures : la tympanométrie
et la mesure des seuils de réflexe stapédien.
Principe de la tympanométrie
Rappelons que l’impédance acoustique corres-
pond au pourcentage d’énergie transmise ou réflé-
chie par un système. La tympanométrie mesure les
variations d’impédance de l’oreille moyenne en
faisant varier la pression dans le conduit auditif
Figure 7.9. Audiométrie vocale avec listes de Fournier.
Le seuil d’intelligibilité se lit au croisement de la ligne du externe de − 400 mm d’eau à + 400 mm d’eau.
50 % de mots compris et de la courbe d’intelligibilité La tympanométrie teste simultanément la méca-
extrapolée à partir de 5 à 10 listes présentées à des nique du tympan, celle de la chaîne des osselets et
intensités différentes.1 : courbe chez un sujet normal ; 2 :
la pression dans les cavités de l’oreille moyenne.
courbe chez un patient présentant une surdité de trans-
mission : elle est sans distorsion, simplement décalée, Une sonde à trois orifices est introduite dans
restant parallèle à la précédente ; 3 : courbe en cloche le conduit auditif externe, le fermant hermé-
chez un sujet présentant une surdité de perception avec tiquement. Par le premier de ces orifices, elle
distorsions.
Sauvage J.-P., Bessède J.-P. Révisions accélérées en ORL. Paris :
émet un son de 220 Hz. La réflexion de ce son
Maloine, 1987, p. 94 (fig. 31). sur la membrane tympanique est enregistrée par
124 ORL thématique
Figure 7.10.
Technique et résultat
de la tympanométrie.
Classification de Jerger.
Sauvage J.-P., Bessède
J.-P. Révisions accélérées
en ORL. Paris : Maloine,
1987, p. 94 (fig. 32).
un capteur situé dans le deuxième orifice. Le épanchement, la compliance devient nulle, quelle
calcul de compliance (inverse de l’impédance) que soit la pression appliquée dans le conduit
est effectué à partir du son émis et du son réflé- auditif externe : la courbe est dite plate (type B).
chi. Le troisième orifice communique avec une Ce peut être une otite séromuqueuse ou un
pompe qui fait varier la pression dans le conduit cholestéatome. Un tympanogramme avec un très
auditif externe par rapport à la pression atmo- fort pic en tour Eiffel évoque une disjonction
sphérique. de la chaîne ossiculaire, rendant le tympan très
mobile.
Résultat
Principe de la mesure
Normalement, la courbe de tympanométrie
des réflexes stapédiens
typique (fig. 7.10) présente un pic étroit centré
sur la pression atmosphérique (courbe de type A). Le muscle de l’étrier (plus petit muscle de l’orga-
En effet, la compliance est maximum lorsque les nisme) est innervé par le nerf facial (VII). Par
pressions de part et d’autre du tympan sont iden- voie réflexe, il se contracte pour des sons dépas-
tiques : en l’occurrence, chez un sujet normal, sant le seuil auditif de 85 dB. Ceci bloque la
c’est la pression atmosphérique quand le système platine de l’étrier pour protéger l’oreille interne.
tubotympanique d’aération de la caisse fonc- Cette action mobilise la chaîne ossiculaire en
tionne bien. Si le pic de compliance est décalé vers provoquant une brusque variation de compliance
les pressions négatives, cela signifie qu’il règne du tympan qui peut être détectée à l’impédan-
dans la caisse du tympan une pression négative cemétrie. La voie de ce réflexe passe par le VIII
par rapport à la pression atmosphérique (courbe et par des connexions croisées et non croisées
de type C). C’est un catarrhe tubaire, traduisant entre les noyaux cochléaires et celui du nerf facial
une inflammation isolée de la trompe d’Eus- (fig. 7.11). Cette recherche peut donc s’effectuer
tache. Si la caisse du tympan est remplie par un en controlatéral ou en ipsilatéral.
Chapitre 7. Examen d’une surdité 125
Figure 7.12. Report des seuils de réflexes stapédiens sur l’audiogramme tonal.
Du côté droit, il existe une surdité de perception prédominant sur les fréquences 2 000 à 4 000. Les réflexes ipsilatéraux
sont notés par un symbole « I » et les réflexes controlatéraux par un symbole « C ». La présence de ces réflexes témoigne
que la chaîne ossiculaire est intacte des deux côtés, et en particulier que les deux étriers sont bien mobiles. On constate
aussi que les seuils des réflexes ne changent pas, quel que soit le seuil tonal. Les écarts entre les seuils tonaux et les
seuils de réflexes se réduisent, en particulier pour la fréquence 2 000. Ceci témoigne d’un recrutement sur les fréquences
aiguës. S’il s’était agi d’une surdité de transmission, les écarts seraient restés constants.
SFA, « Guide de bonnes pratiques en audiométrie de l’adulte », www.sfaudiologie.fr.
millisecondes suivant chaque « click ». Ils repré- Le patient doit être relaxé, ce qui nécessite
sentent les relais s’activant successivement depuis parfois le recours à une benzodiazépine. Avant
la cochlée jusqu’à la partie haute du tronc céré- l’âge de 6 mois, l’examen doit être réalisé au
bral. Par sommation, sont obtenues cinq ondes biberon en période post-prandiale. Après l’âge de
qui ont chacune une signification (fig. 7.14). 6 mois, une prémédication, voire une anesthésie
générale, peuvent être indispensables. Après l’âge
de 5 ans, les conditions sont proches de celles
rencontrées chez l’adulte.
L’onde V est la plus facile à déterminer jusqu’au
seuil. En diminuant l’intensité, la latence aug-
mente et l’amplitude des ondes diminue. Le seuil
est défini par l’intensité minimale permettant
l’obtention d’une onde V clairement identifiable
(fig. 7.15). Ainsi, par cet examen non invasif, il
est facile de déterminer objectivement les niveaux
d’audition.
Figure 7.14. Ondes recueillies par l’étude des potentiels La mesure des latences peut aussi mettre
évoqués précoces. en évidence des retards de conduction carac-
L’onde I correspond au ganglion spiral de l’oreille interne téristiques de la topographie des lésions. Par
(celle qui était enregistrée par électrocochléographie).
Onde II : noyaux cochléaires du bulbe. Onde III : complexe
exemple, dans le neurinome de l’acoustique, la
olivaire protubérantiel. Onde IV : lemniscus latéral. latence de l’onde I reste normale, mais toutes
Onde V : colliculus inférieur (tubercule quadrijumeau pos- les ondes suivantes sont décalées du fait que la
térieur). ∆ I-V : temps que mettent les potentiels à passer tumeur siège sur la huitième paire crânienne
de la cochlée au colliculus (4 à 5 millisecondes).
Sauvage J.-P., Bessède J.-P. Révisions accélérées en ORL. Paris :
(allongement de l’écart I-V caractéristique des
Maloine, 1987, p. 96 (fig. 34). surdités rétrocochléaires).
ASSR (auditory
steady-state response)
La méthode des ASSR ou potentiels évoqués
auditifs stationnaires fait partie des méthodes
objectives permettant l’évaluation des seuils audi-
tifs d’un patient, y compris pour les fréquences
graves. La stimulation ASSR est une stimulation
auditive de fréquence constante (fréquence por-
teuse), mais modulée en amplitude pour générer
des stimulations périodiques de fréquence 500,
1 000, 2 000 et 4 000 à la manière d’une audio- Figure 7.16. Stimulation ASSR avec une fréquence
métrie tonale (fig. 7.16). L’enregistrement se fait porteuse modulée en amplitude à une fréquence 500.
à partir d’électrodes de surface, comme pour un
enregistrement de PEA. L’ordinateur extrait les
réponses électriques correspondant aux quatre Il est aussi possible d’enregistrer simultanément
fréquences étudiées. C’est de cette manière qu’est plusieurs réponses ASSR de fréquences diffé-
contourné le handicap des PEA qui sont inca- rentes en utilisant plusieurs fréquences porteuses.
pables de fournir des renseignements sur la per- L’avantage est de raccourcir un examen qui pré-
ception des fréquences en dessous de 2 000 Hz. sente l’inconvénient d’être long.
Chapitre 8
Diagnostic des surdités
Points forts Surdités de transmission ou
Les surdités de transmission avec otoscopie
mixtes à otoscopie anormale
j
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
130 ORL thématique
une tumeur vasculaire aspect poivre et sel en T2. scope de consultation à l’aide d’une pointe fine.
L’artériographie est caractéristique et doit être Ils seront ensuite maintenus en apposant une
réalisée pour une embolisation préchirurgicale. fine lame de silastic. En tout cas, proscrire l’ins-
• Cholestéatome tympanique congénital avec sa tillation de gouttes auriculaires (risque d’oto-
masse arrondie blanchâtre vue par transparence toxicité et de surinfection de l’oreille moyenne).
(fig. 8.9). L’hémotympan violacé est rencontré dans les
• Malformation vasculaire avec l’ectasie bleutée suites d’un traumatisme de l’os temporal suivi
convexe d’un golfe procident de la veine jugu- d’hypoacousie (fig. 8.10). S’il est isolé, l’épan-
laire entraînant une surdité de transmission par chement sanglant se résorbe spontanément avec
obturation de la fenêtre ronde ou blocage de la retour à l’audition antérieure. En cas de fracture
chaîne ossiculaire. Battement artériel caractéris- du rocher ou de la platine, il peut s’accompa-
tique d’une carotide interne ectopique. gner de cophose ou de paralysie faciale. Un
• Traumatisme : après une gifle, la déchirure tym- simple traumatisme par coton-tige peut aussi
panique cicatrise spontanément dans la plupart entraîner une cophose progressive en cas de
des cas. On peut aussi colmater cette déchirure fracture de la platine de l’étrier entraînant une
en dépliant les lambeaux de tympan sous micro- fuite de liquide périlymphatique (fig. 8.11).
Chapitre 8. Diagnostic des surdités 133
L’otoscopie montre une perforation voir une lyse de la longue branche de l’enclume
tympanique sèche ou purulente ou de la superstructure de l’étrier. Pour faire
la distinction entre la surdité provoquée par la
L’interrogatoire révèle un riche passé otologique perforation myringienne et la surdité en rapport
avec parfois des antécédents chirurgicaux du type avec les lésions ossiculaires, on applique une
évidement d’oreille. Il s’agit d’une otite chro- fine lame souple de silastic sur la perforation
nique encore évolutive ou au stade des séquelles. pour la fermer. Puis on réalise un audiogramme
après sa mise en place. L’amélioration du Rinne
Appréciation de l’évolutivité audiométrique rend compte de la responsabilité
de la perforation dans la surdité du patient.
• Une micro-aspiration en décubitus avec micro-
scope est indispensable. L’idéal est de faire un
Bilan
examen à l’optique d’oreille de 4 mm pour voir le
fond des poches de rétraction. L’otite chronique • L’audiogramme tonal confirme l’existence et
peut être encore évolutive avec un cholestéatome l’importance de la surdité de transmission. La
attical ou occupant la région postéro-supérieure du surdité est souvent mixte avec un facteur per-
tympan (cf. chapitre 6). Une situation fréquente ceptif témoignant d’une labyrinthisation sur les
est aussi la simple persistance d’une inflammation fréquences aiguës, laissant peu d’espoir à une
tubotympanique compromettant la réussite d’une réhabilitation chirurgicale complète. L’audiomé-
future réhabilitation chirurgicale. L’indice est la trie vocale a au moins un intérêt médico-légal.
présence d’une perforation avec stase mucoïde et • La TDM fait le bilan des destructions et des difficul-
filante à l’aspiration. Il convient de ne pas être trop tés prévisibles : mastoïde petite et éburnée, dénu-
optimiste chez un patient fumeur, éthylique ou dation du nerf facial, fistule labyrinthique, position
encore travaillant dans la poussière. de la méninge, etc. Ce n’est qu’au moment de
• L’otite chronique peut aussi être au stade des l’exploration chirurgicale qu’on pourra vraiment
séquelles. L’oreille est sèche, mais la membrane faire l’inventaire des dégâts concernant la chaîne
tympanique présente des pertes de substance des osselets : lyses de l’enclume ou de l’étrier, gros
(perforations myringiennes). Elles sont associées blocs crayeux de tympanosclérose bloquant la tête
à des zones flaccides, rétractées, adhérant au fond du marteau. Les plaques de myringosclérose doi-
de caisse (fig. 8.12). Une perforation peut laisser vent être respectées autant que possible, car elles
rigidifient les restes du tympan sans habituellement
entraîner de surdité.
Techniques de réhabilitation
chirurgicale
L’idéal est d’être en technique fermée avec
tympanotomie postérieure. La réhabilitation de
l’audition peut se faire en même temps que
l’éradication complète des lésions ostéitiques et
cholestéatomateuses. Elle peut aussi se faire dans
un deuxième temps, quelques mois après, avec
vérification de l’absence de récidive ou traitement
Figure 8.12. Perforation tympanique subtotale sèche. d’une récidive suspectée sur la TDM.
La flèche indique une lyse de l’extrémité de la longue apo-
physe de l’enclume. L’étrier, dont on distingue la tête, est Myringoplastie (vidéo 8.2 )
encore présent. Il existe une myringosclérose antérieure et
un amas de tympanosclérose plaqué sur le promontoire
C’est la reconstitution du tympan par une greffe
sous le manche du marteau. La surdité de transmission conjonctive, le plus souvent d’aponévrose temporale
atteint 60 dB en moyenne. ou de périchondre (fig. 8.13). Lorsqu’aucun geste
Chapitre 8. Diagnostic des surdités 135
Labyrinthisation
Outre la surdité de transmission, l’otite chronique
finit par atteindre l’oreille interne. Il est dit que
l’oreille se labyrinthise brutalement ou progres-
sivement.
L’infection passe par la fenêtre ronde ou par
une fistule au travers de la platine de l’étrier ou au
travers de la coque du canal semi-circulaire latéral
(cf. partie 2, fiche « Fistule (signe de la) »). En
Figure 8.16. Otospongiose.
même temps qu’une otorrhée purulente, apparais- Blocage entre la platine de l’étrier et le vestibule par un
sent une brutale aggravation de la surdité et de bloc d’otospongiose. 1 : périlymphe ; 2 : étrier s’articulant
violents vertiges témoignant d’une labyrinthite normalement avec l’apophyse lenticulaire de l’enclume ;
bactérienne. Après une préparation antibiotique de 3 : enclume ; 4 : bloc dystrophique.
Sauvage J.-P. Bessède J.-P., Révisions accélérées en ORL. Paris :
quelques jours, l’intervention chirurgicale s’impose Maloine, 1987, p. 101 (fig. 35).
pour traiter l’otite chronique avant l’apparition de
complications méningo-encéphaliques.
Ailleurs, la labyrinthisation est progressive. Elle entre la platine de l’étrier et l’oreille interne
est le résultat du passage intermittent de toxines (fig. 8.16). C’est un processus dystrophique
au travers de la fenêtre ronde. osseux primitif avec ostéolyse de la capsule otique,
suivi de néoformation osseuse. L’affection est
bilatérale et héréditaire à pénétrance variable. Elle
Surdités de transmission ou atteint principalement les Caucasiens. D’autres
mixtes à otoscopie normale causes d’atteintes ossiculaires sont possibles : les
aplasies mineures de l’oreille ou la tympanos-
La cause la plus fréquente est l’otospongiose qui clérose secondaire à un processus otitique subaigu
est une ankylose stapédo-vestibulaire, c’est-à-dire ou chronique.
Chapitre 8. Diagnostic des surdités 137
Otospongiose
La surdité commence entre 20 et 45 ans, le plus
souvent chez la femme (deux femmes pour un
homme) à l’occasion d’une grossesse ou d’un
épisode de la vie génitale. La surdité s’aggrave
par à-coups et s’accompagne parfois de bour-
donnements d’oreille et de vertiges. Le sujet
suit mieux la conversation en milieu bruyant du
fait que l’interlocuteur élève la voix et que le
bruit ambiant n’entraîne pas d’assourdissement
(paracousie de Willis). L’interrogatoire retrouve
souvent des antécédents familiaux. Figure 8.17. Foyer de dysplasie otospongieuse (TDM
L’audiogramme montre une surdité de trans- oreille droite).
mission avec un faible Rinne audiométrique à la Hypodensité nodulaire supramillimétrique préstapédienne
avec contact vestibulaire (flèches). A. Coupe axiale. B.
fréquence 4 000, ce qui indique que la chaîne Coupe coronale.
des osselets est continue (cf. fig. 7.6). De plus, il
existe fréquemment une encoche dans la conduc-
tion osseuse sur la fréquence 2 000 Hz, appelée
encoche de Carhart. La courbe de tympanométrie
est normale avec un pic centré. Mais il n’y a pas
de réflexe stapédien, car l’étrier est bloqué dans
la fenêtre ovale (cf. chapitre 7). Cet argument
doit être obtenu avant toute intervention pour
éliminer un diagnostic différentiel : la déhiscence
du canal semi-circulaire antérieur (cf. partie 2,
fiche « Minor (syndrome de) »).
Dans tous les cas, une TDM doit être effectuée
pour visualiser les foyers de dysplasie osseuse de
la capsule otique. Ce sont des hypodensités au Figure 8.18. Atteinte otospongieuse péricochléaire
(TDM oreille gauche).
contact de la partie antérieure de la platine ou Patient atteint d’une surdité mixte. Aspect en double
fissula ante fenestram, parfois accompagnées d’un anneau péricochléaire caractéristique. Il fut opéré avec un
épaississement de la platine de l’étrier (fig. 8.17). bon résultat.
L’absence de signe radiologique est rare avec les
scanners de dernières générations. Dans ces cas, il de la cochlée ouvrant l’espace périlymphatique au
s’agit d’une atteinte isolée du ligament annulaire liquide céphalo-rachidien (LCR). La conséquence
qui joue le rôle de joint entre la platine de l’étrier serait un écoulement de LCR par l’oreille après
et la paroi osseuse vestibulaire. En cas d’atteinte stapédotomie (otoliquorrhée). La TDM permet
sévère de la cochlée, celle-ci prend l’aspect en aussi d’établir le diagnostic différentiel avec une
double contour caractéristique (fig. 8.18). malformation des canaux semi-circulaires évo-
La TDM doit aussi rechercher des anomalies quant un Mondini, un élargissement de l’aqueduc
rendant la chirurgie plus difficile : procidence vestibulaire (syndrome de l’aqueduc large), une
de la 2e portion de l’aqueduc de Fallope au- déhiscence du canal semi-circulaire antérieur.
dessus de la fenêtre ovale, obstruction de la Le traitement chirurgical (fig. 8.19) consiste à
fenêtre ronde, anomalie de l’enclume. L’oreille remplacer la superstructure de l’étrier par un pis-
geyser est une contre-indication anatomique à ton en téflon. Celui-ci est fixé à l’enclume par un
la chirurgie. C’est une communication anormale crochet serré à la micropince. L’autre extrémité
entre le fond du conduit auditif interne et la base traverse un mini-trou dans la platine de l’étrier,
138 ORL thématique
Surdité de perception
unilatérale brutale
En quelques minutes, le patient perd la totalité
ou une grande partie de son audition. Il s’y
associe souvent un acouphène insupportable et
des vertiges. L’épreuve de Weber montre une
latéralisation du diapason vers le côté sain. On fait Figure 8.21. Zona.
bien la différence avec un catarrhe tubaire aigu et Éruption érythémato-vésiculaire dans la zone de
un bouchon de cérumen où elle se ferait vers le Ramsay-Hunt.
côté sourd. L’interrogatoire ne retrouve aucun
contexte évocateur : ni traumatisme sonore aigu, Thrombose de l’artère labyrinthique
ni traumatisme du rocher, ni barotraumatisme
(plongée sous-marine ou en aéronautique). La surdité est totale (cophose). Elle s’associe à un
syndrome vestibulaire déficitaire harmonieux (cf.
Névrite cochléaire chapitre 9). Une IRM en urgence mérite d’être
obtenue car cette thrombose peut s’inscrire dans
• Le zona auriculaire (herpes zoster oticus) en est le cadre d’une thrombose de l’artère cérébelleuse
l’illustration typique. C’est une ganglio-radicu- antéro-inférieure dont est issue l’artère labyrin-
lite aiguë due à Herpes virus varicellae resté thique. Dans ce cas, il est difficile de distinguer
quiescent dans le ganglion géniculé du nerf inter- ce qui revient au syndrome cérébelleux de ce
médiaire de Wrisberg (VII bis). L’atteinte virale qui revient au syndrome labyrinthique. Le bilan
touche le protoneurone. Il apparaît une violente vestibulaire retrouve parfois des signes centraux
otodynie1 centrée sur l’orifice du conduit auditif évocateurs.
externe et irradiant vers l’articulation temporo-
mandibulaire et la pointe de la mastoïde. Une Surdité brusque
éruption érythémato-vésiculaire apparaît au
4e-5e jour, siégeant dans la zone de Ramsay- C’est une surdité unilatérale neurosensorielle de
Hunt (fig. 8.21). Le zona otitique de Sicard début brutal, d’origine inconnue. Souvent attri-
(Ramsay Hunt syndrome) s’accompagne d’une buée à une atteinte du nerf cochléaire, il peut
paralysie faciale, d’une surdité brutale et d’un aussi s’agir d’une labyrinthite. Dans ce cas, il y
vertige rotatoire survenant successivement a des signes vestibulaires associés. L’hypothèse
à quelques jours d’intervalle. Le virus saute actuelle est qu’il s’agirait de l’équivalent de la
d’un nerf à l’autre dans un ordre variable pour paralysie faciale a frigore pour le nerf cochléaire.
atteindre tous les éléments du pédicule acous- C’est-à-dire la reviviscence de virus herpès dor-
tico-facial. Un traitement urgent par antiviraux mants dans l’appareil cochléaire. On retrouve aussi
ne permet pas toujours de limiter les séquelles. cette hypothèse pour les névrites vestibulaires (cf.
• Maladie de Lyme : elle donne plutôt des para- chapitre 9). Ce serait pourquoi les sérodiagnostics
lysies faciales (cf. partie 2, fiche « Paralysies ne témoignent que d’infections virales anciennes.
faciales périphériques (PFP) »). L’audiogramme doit mettre en évidence une
surdité de perception d’au moins 30 dB sur trois
1. L’otodynie est une douleur d’oreille liée à une patholo-
fréquences consécutives. Tous les intermédiaires
gie d’oreille, contrairement à l’otalgie qui peut ne pas l’être existent avec une cophose. C’est un diagnostic
(ex. : otalgie réflexe, cf. partie 2, fiche « Otalgie réflexe »). d’exclusion après que l’examen clinique et l’examen
140 ORL thématique
neurologique se sont avérés normaux. Toutefois, le acouphènes ipsilatéraux sont fréquemment asso-
diagnostic de surdité brusque impose la réalisation ciés. L’audiogramme confirme la surdité et son
d’examens complémentaires, dont une IRM à la type (encadré 8.1). C’est une atteinte prédomi-
recherche d’un neurinome de l’acoustique. La sur- nant sur les fréquences aiguës. L’audiométrie
dité est alors en rapport avec une hémorragie vocale montre l’existence d’importants troubles
intratumorale. Une surdité brusque récidivante est d’intelligibilité avec courbe en cloche, voire
très évocatrice de tumeur de la fosse postérieure. aucune intelligibilité. Les épreuves caloriques
L’enregistrement des potentiels évoqués auditifs ne chaudes et froides mettent en évidence une aré-
peut être pratiqué qu’à partir du 15e jour en raison flexie vestibulaire du côté de la tumeur, contras-
du risque d’aggravation par traumatisme sonore. Il tant avec l’absence de vertiges. C’est qu’au fur
confirmerait la prescription d’imagerie en montrant et à mesure de la destruction progressive du nerf
l’allongement unilatéral de l’écart I-V (cf. infra). vestibulaire s’est développée une bonne compen-
En cas de surdité brusque, l’attitude à adop- sation centrale (cf. chapitre 9). L’enregistrement
ter est la suivante : hospitalisation en urgence, des potentiels évoqués auditifs montre un allon-
repos, carbogène et corticoïdes. Ce traitement gement de l’écart I-V par rapport au côté opposé,
ne préjuge pas de l’étiologie et peut être admi- soit un ∆ I-V > 0,35 milliseconde). Toutefois, la
nistré après avoir éliminé le zona ophtalmique normalité de cet examen ne permet pas d’éliminer
contre-indiquant les corticoïdes. Le pronostic est un petit schwannome. La réalisation d’une IRM
bon lorsque la surdité est partielle et mauvais de l’angle ponto-cérébelleux et du méat acous-
lorsqu’elle est complète. tique interne en T2 et en T1 avec injection de
gadolinium permet de confirmer le diagnostic en
Surdités de perception mettant la tumeur en évidence. La sensibilité est
brutales bilatérales de 100 %. Dans 1 à 5 % des cas, le neurinome est
intralabyrinthique (fig. 8.22).
Outre la fracture bilatérale des rochers, elles
peuvent se voir dans le cadre de méningites bacté-
riennes ou carcinomateuses. Phase neurochirurgicale
La lésion déborde le conduit auditif interne et
Surdité de perception comprime les autres éléments nerveux de la fosse
unilatérale progressive postérieure. L’anesthésie cornéenne, la dysesthé-
sie du V, le syndrome cérébelleux, la paralysie
Dans cette situation, le diagnostic de neurinome faciale, l’hypertension intracrânienne sont des
de l’acoustique est la principale préoccupation signes tardifs atteints après de nombreuses années.
(cf. partie 2, fiche « Schwannomes et autres À ce stade, le pronostic n’est plus fonctionnel,
tumeurs neurogènes bénignes »). C’est un mais vital. L’intervention est souvent grevée de
schwannome développé aux dépens de la portion lourdes séquelles (cf. partie 2, fiche « Syndromes
vestibulaire de la VIIIe paire crânienne. Il occupe neurologiques de la face »).
le conduit auditif interne ou la fosse postérieure,
accolé au tronc cérébral. Il comprime tous les Diagnostic différentiel
éléments du pédicule acoustico-facial. C’est la En réalité, toute tumeur de la fosse postérieure
plus fréquente des tumeurs bénignes de la fosse peut se présenter de cette façon. La découverte
postérieure. Certains cas se révèlent aussi par une d’une boucle vasculaire dans l’angle ponto-céré-
surdité brutale (cf. supra). belleux ou dans le conduit auditif interne conduit
parfois au diagnostic de conflits vasculo-nerveux.
Phase otologique De tels rapports entre artère cérébelleuse antéro-
Les signes comportent une surdité de percep- inférieure et VIIIe paire crânienne sont fréquents
tion unilatérale progressive avec petits vertiges et parfaitement asymptomatiques. On ne doit donc
présents seulement au début de l’évolution. Des pas conclure hâtivement à leur rôle pathogène.
Encadré 8.1
Figure 1. A. Audiogrammes tonal et vocal. B. Déficit calorique gauche atteignant 100 % bien compensé sans prépon-
dérance directionnelle significative (en haut, papillon de Freyss ; en bas, cumulée des phases lentes des nystagmus).
directionnelle (fig. 1B). Une IRM fut donc voie translabyrinthique (fig. 3B). Les suites
demandée. Elle montra un schwannome du opératoires furent simples sans paralysie faciale.
VIII pluricentimétrique, centré sur le conduit Aucune rééducation vestibulaire de l’équilibre
auditif interne et rehaussé par une injection de ne fut nécessaire. En revanche, la surdité gauche
gadolinium en T1 (fig. 3A). Elle fut opérée à était devenue totale. On proposa une prothèse à
double équipe ORL et neurochirurgicale par ancrage osseux (BAHA).
Figure 3. Schwannome de l’acoustique gauche. A. IRM en T1 avec gadolinium. B. TDM postopératoire ; image de la
voie d’abord translabyrinthique qui avait été effectuée (flèches).
Chirurgie
Les neurinomes du conduit auditif interne ne
débordant pas dans la fosse postérieure sont
une bonne indication du Gamma Knife®. Cette
technique de radiochirurgie de grande précision
est appliquée en une seule séance, ne néces-
sitant qu’une journée d’hospitalisation. Le tissu
irradié est détruit ou modifié biologiquement.
Pour l’exérèse chirurgicale, la voie sus-pétreuse
n’est plus utilisée car le nerf facial s’interpose au-
dessus de la tumeur et les paralysies faciales post-
opératoires étaient fréquentes.
Les tumeurs plus importantes sont opérées
à double équipe ORL et neurochirurgicale.
empêche l’acquisition du langage de façon irré- de 5 à 6 ans suggérait une origine ourlienne.
versible si aucune réhabilitation n’est mise en La vaccination contre les oreillons a réduit
place ; leur fréquence. La décision d’appareiller
• la période périlinguale (entre 2 et 4 ans), après vise à rétablir la stéréophonie par un sys-
que l’enfant commence à parler. La survenue tème CROS (contralateral routing of sound)
d’une surdité entraîne une régression réversible consistant à renvoyer le son du côté sourd
du langage ; vers le côté sain par un système Wi-Fi ou par
• la période post-linguale (au-delà de l’âge de la mise en place d’une prothèse à ancrage
4 ans), quand le langage est bien en place. osseux (cf. infra) ;
À ce stade, la survenue d’une surdité ne • la survenue d’une surdité sévère bilatérale
provoque une stagnation des acquisitions post-méningitique, après l’acquisition du
lexicales et grammaticales qu’en l’absence de langage, entraîne une régression de celui-ci,
réhabilitation. d’autant plus importante que le sujet est plus
jeune ;
• entre 8 et 12 ans, une surdité « psycho-
gène » ou pseudo-hypoacousie est caractéri-
Surdités post-linguales sée par des seuils en audiométrie subjective
Les plus fréquentes sont des surdités acquises autour de 50 dB sur toutes les fréquences.
après l’apparition du langage. Il faut prendre en On ne détecte aucun retentissement sur
compte les soupçons des parents et réaliser une la perception de la parole. Les PEAP sont
audiométrie. L’enfant est distrait, crie et parle normaux. Il faut évoquer avec prudence
fort, ou au contraire est trop calme et réservé. l’équivalent d’une conversion hystérique
Le dépistage scolaire des troubles de l’audition (causes familiales ?).
trouve une surdité chez 2 à 4 % des enfants.
Pour la plupart, ce sont des otites séromuqueuses
bilatérales entraînant une perte auditive de 30 à
40 dB. Le traitement repose sur l’adénoïdecto- Surdités prélinguales
mie et la mise en place d’aérateurs tympaniques. La survenue d’une surdité de perception bilatérale
L’efficacité est instantanée et les progrès sont sévère ou profonde avant l’âge de 1 an empêche
rapides. Ils peuvent nécessiter une rééducation l’acquisition normale du langage oral et entrave
orthophonique. le développement de l’intelligence par manque de
Cinq cas particuliers doivent être signalés : support linguistique.
• le cholestéatome congénital à tympan fermé
est découvert avant l’âge de 5 ans. C’est le
résultat d’une inclusion épidermique d’origine
embryologique. Il se présente à la TDM sous la Causes des surdités dites
forme d’une opacité arrondie ou d’une lacune « congénitales »
régulière à bord convexe ; La vaccination des petites filles contre la rubéole
• les surdités de transmission non expliquées par a fait disparaître la cause principale survenant
une otite séromuqueuse évoquent une malfor- au cours des quatre premiers mois de grossesse.
mation ossiculaire (aplasies mineures). Elles se À part la prématurité, les causes obstétricales et
voient essentiellement dans le cadre des malfor- post-natales ont disparu (souffrance fœtale, ictères
mations du premier arc et plus particulièrement nucléaires, incompatibilités fœto-maternelles). La
dans le syndrome de Franceschetti avec aplasie raison en est les progrès de la prévention et de la
du pavillon de l’oreille ; néonatologie. Les causes génétiques ont donc pris
• la découverte d’une cophose unilatérale la première place, survenant sur un mode récessif
jusqu’alors passée inaperçue chez un enfant ou dominant.
146 ORL thématique
les parents d’un enfant sourd à consulter. Le Bilan d’une surdité du nourrisson
dépistage néonatal doit maintenant permettre et du jeune enfant
un diagnostic avant l’âge de 6 mois dans 85 % Des potentiels évoqués auditifs précoces (PEAP)
des cas. Reste que dans 15 % des cas, la surdité sont d’abord réalisés. Avant 3 mois, on les
apparaît ou s’aggrave secondairement (méningite, pratique après un biberon. Ensuite, un sédatif
surdité évolutive liée à une embryofœtopathie léger (hydroxyzine ou mélatonine) peut être
à cytomégalovirus [CMV] et surdité génétique utilisé. Le seuil obtenu ne correspond qu’aux
pouvant évoluer à tout âge). Il faut donc rester fréquences 2 000 à 4 000 Hz. Leur évaluation
vigilant. Le dépistage néonatal a le mérite d’attirer est donc pessimiste, car ces surdités prédominent
l’attention des parents sur les troubles de l’audi- sur les sons aigus. Avant 3 mois, les réponses
tion. Quelques repères doivent donc être connus obtenues avec les ASSR sont moins amples et
pour ne pas manquer un décalage par rapport aux les seuils plus élevés de 10 à 15 dB que chez les
acquisitions normales (tableau 8.1). adultes.
Un retard d’apparition du langage n’est pas Un examen audiométrique comportemental
non plus synonyme de surdité. Les troubles du doit être tenté dès l’âge de 5 mois. Un bandeau
spectre autistique sont aussi caractérisés par un en conduction osseuse donne des réactions inté-
retard de langage. Mais un trouble de la relation ressantes, mais on peut avoir l’impression d’une
est associé : rareté des regards vers l’interlocuteur, meilleure perception pour des fréquences de 250
peu de sourires, pas de geste signifiant comme à 750 Hz, du fait de la sensation vibratoire
« au revoir » ou « bravo », intérêt limité aux somesthésique. Une audiométrie tonale peut être
jeux répétitifs avec stéréotypies. Enfin, le retard réalisée à partir de 2 ans et demi. Douceur et
de langage peut s’intégrer dans un retard de patience sont toutefois requises pour obtenir un
développement global. Il concerne alors autant la bon conditionnement visuel et ludique. Pour
compréhension que l’expression et s’associe à un l’audiométrie vocale, on utilise des listes de mots
retard des acquisitions psychomotrices. correspondant au vocabulaire des jeunes enfants
accompagnées d’images.
Tableau 8.1. Repères indiquant un retard par rapport Une situation particulière est réalisée par la
aux acquisitions normales. neuropathie-dyssynchronie auditive, associant
Acquis normaux Retard une désynchronisation des réponses des PEAP
3 mois Réagit au bruit en sursautant avec des oto-émissions acoustiques (OEA) res-
ou en arrêtant son activité. tant présentes, attestant d’une fonction nor-
Dit « aaa…eu » male des cellules ciliées externes. C’est une
Entre Se retourne vers un bruit Appauvrissement du anomalie de la synapse entre cellules ciliées
6 et 9 produit hors de sa vue. Aime babil sans apparition internes et fibres nerveuses afférentes observées
mois les jouets musicaux. Fait du de syllabes variées
bruit avec les lèvres. Babille chez des nouveau-nés ayant nécessité une réa-
nimation néonatale. L’implantation cochléaire
12 mois Dit des syllabes redoublées. Absence de réponse
Reconnaît une mélodie. à des ordres simples reste indiquée.
Comprend certains mots et ou au prénom Les examens complémentaires comportent :
des ordres simples. Réagit à • une sérologie CMV chez l’enfant de moins de
son prénom 2 ans ;
18 mois Dit quelques mots déformés. Absence de • une TDM des rochers, pour détecter une mal-
Reconnaît les bruits fami- mots (« papa »,
liers. Comprend les phrases « maman »)
formation de l’oreille moyenne et déterminer la
courtes (sans gestes) faisabilité de l’implantation cochléaire ;
24 mois Montre sur ordre une partie Absence de mots-
• une IRM labyrinthique à la recherche d’une
du corps. Phrases à deux phrases (« à boire », agénésie du nerf cochléaire et, après méningite
mots : « papa parti » « pipi pot », « papa bactérienne, pour détecter une fibrose intra-
parti ») à 2 ans cochléaire, rendant l’implantation cochléaire
148 ORL thématique
Surdités de perception
Réhabilitation
L’appareillage conventionnel peut être mis en
La prise en charge repose sur trois acteurs : place dans les premiers mois de vie, dès que les
l’audioprothésiste, l’orthophoniste et parfois le phases d’éveil s’allongent et que l’enfant tient sa
chirurgien. tête. Ce sont des « contours d’oreille ». Ils sont
bien acceptés par les enfants, qui en ressentent le
L’oreille interne comporte deux comparti- perpendiculaires entre eux, tout mouvement de
ments hydrauliques. Le premier est constitué la tête est analysé dans les trois plans de l’espace.
d’endolymphe remplissant le labyrinthe mem- Le fonctionnement d’un canal semi-circulaire
braneux. Le deuxième est le compartiment est basé sur l’inertie de l’anneau d’endolymphe
périlymphatique constitué de périlymphe rem- qu’il contient (fig. 9.3). Le capteur est situé
plissant l’espace compris entre le labyrinthe dans l’ampoule. C’est un diaphragme (cupule),
membraneux et le labyrinthe osseux. La compo- l’obturant complètement. En fonction du sens de
sition de l’endolymphe est riche en potassium, rotation, la force d’inertie enfonce la cupule dans
intervenant dans la physiologie des cellules un sens ou dans l’autre.
sensorielles. La périlymphe, issue du LCR, joue La crête ampullaire (fig. 9.4) sur laquelle
plutôt un rôle amortisseur, protégeant le laby- s’insère la cupule est tapissée d’un épithélium
rinthe membraneux des vibrations et des chocs qui possède des cellules sensorielles ciliées dont
parasites. le pôle apical possède une touffe de stéréocils qui
La vascularisation de l’oreille interne est de s’engagent dans la base de la cupule. Parmi eux, se
type terminal, c’est-à-dire sans possibilité de trouve un cil plus long : le kinocil. Tous les stéréo-
suppléance. Comme la cochlée, elle dépend de cils se trouvent du même côté que le kinocil. Sous
l’artère labyrinthique, branche de l’artère céré- l’effet de la mise en rotation de la tête dans le
belleuse antéro-inférieure. Une thrombose dans plan du canal, l’anneau endolymphatique exerce
son territoire donnera à la fois une surdité et des une force d’inertie sur la cupule. En fonction du
vertiges. sens de rotation, cette force incline les stéréocils,
soit vers le kinocil (excitation), soit en sens inverse
Fonctionnement des canaux (inhibition).
semi-circulaires Si on enregistre les potentiels d’action dans
le nerf ampullaire (fig. 9.5), on constate que,
Chaque canal semi-circulaire détecte les accé- même au repos, il persiste un tonus vestibulaire.
lérations angulaires (rotatoires) effectuées C’est ce tonus vestibulaire qui est augmenté par
dans son plan. Comme les trois canaux sont l’excitation ou diminué par l’inhibition. Cette
information est transmise aux centres par le nerf le plan des canaux horizontaux, l’un est excité et
ampullaire. l’autre est inhibé du fait que les ampoules sont
Enfin, tous les canaux semi-circulaires travaillent symétriquement placées en avant. Ce jeu d’excita-
en couple. Dans le cas simple des canaux hori- tion-inhibition est appelé push-pull ou interaction
zontaux, le canal horizontal droit travaille avec le réciproque. Il est à la base de l’extrême sensibilité
canal horizontal gauche, car ils sont dans le même du système, capable de détecter des rotations
plan (fig. 9.6). Dans une rotation de la tête dans d’accélérations inférieures à 0,1 deg/s2.
Chapitre 9. Vertiges 155
la plainte de vertige n’est plus qu’un symptôme de flèches rectilignes horizontales, verticales et
déclaratif. C’est alors l’interrogatoire qui prend le obliques (respectivement nystagmus horizontal,
dessus. Comme en matière criminelle, certains cas nystagmus vertical ou oblique) ou sous forme de
ne se résolvent qu’après un long temps d’inves- flèches circulaires (nystagmus torsionnels horaire
tigations. ou antihoraire pour l’observateur).
Les nystagmus spontanés sont ceux observés,
le sujet étant en position assise, la tête immobile,
Nystagmus vestibulaires les yeux ouverts dans la lumière avec le regard
spontanés pathologiques en position primaire (droit devant soi) tandis
que l’environnement reste stable. On recherche
Le nystagmus vestibulaire est un déplacement ensuite l’effet de la fixation en la supprimant avec
rythmique des globes oculaires dit à ressort, car des lunettes éclairantes de Frenzel équipées de
il est constitué d’une secousse lente d’origine ves- verres de 20 dioptries. L’effet d’une excentration
tibulaire (cf. supra) et d’une secousse rapide d’ori- du regard vers la droite de 30° puis vers la gauche
gine centrale ramenant l’œil à son point de départ. et vers le haut est ensuite observé dans ces trois
Il est pathologique parce qu’il ne correspond pas conditions. L’idéal est de faire une vidéonys-
au mouvement de la tête. Par convention, c’est tagmoscopie dans l’obscurité en infrarouge avec
le sens de la secousse rapide qui définit le côté des lunettes dont un côté est muni d’une mini-
du nystagmus. Il est noté (fig. 9.10) sous forme caméra vidéo.
Par nystagmus vestibulaire périphérique, on
entend qu’il est provoqué au niveau du labyrinthe
ou du nerf vestibulaire. Par nystagmus vestibulaire
central, on entend qu’il est provoqué dans le
tronc cérébral ou le cervelet (tableau 9.1). Les
nystagmus ophtalmologiques sont pendulaires
(les deux phases sont égales, contrairement au
nystagmus à ressort) et s’accompagnent d’un
contexte ophtalmologique.
Examen clinique
L’interrogatoire fait préciser l’histoire du vertige
Figure 9.10. Sens des nystagmus. et des signes associés (acouphènes, hypoacousie,
g : horizontal gauche ; d : horizontal droit ; b : vertical nausées, vomissements, céphalées). Schématique-
inférieur ; h : vertical supérieur.
Sauvage J.-P. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation,
ment, l’histoire du vertige peut se résumer à trois
2e édition. Elsevier Masson, 2014. situations (fig. 9.11) :
Chapitre 9. Vertiges 159
un patient assis, la tête rétrofléchie de 60° pour un vertige et un nystagmus horizontal : soit par
verticaliser le canal horizontal qui est anatomi- inhibition (épreuve froide), soit par excitation
quement basculé en arrière de 30°. On irrigue (épreuve chaude). Le réchauffement diminue
successivement les conduits auditifs externes avec la densité de l’endolymphe et crée un courant
une eau à 44° (épreuve chaude) puis avec une de convection ascendant ampullipète excitateur.
eau à 30° (épreuve froide), soit quatre épreuves Le refroidissement augmente la densité de l’endo-
(fig. 9.14). Pour ce faire, on utilise un distributeur lymphe et crée un courant de convection des-
d’eau thermorégulé. Chaque épreuve déclenche cendant ampullifuge inhibiteur.
Chapitre 9. Vertiges 161
d’une hémorragie intralabyrinthique ou en cas difficulté est la présence d’un niveau d’anxiété
de syndrome destructif cochléo-vestibulaire bila- si important qu’on la suspecte d’être consubs-
téral si on suspecte une connectivite du type tantielle du vertige sous le nom d’angoisse ves-
périartérite noueuse ou syndrome de Cogan. On tibulaire. En retour, le médecin peut compter
a parfois la surprise de découvrir un petit neuri- sur un effet placebo puissant (60 à 70 % dans les
nome intralabyrinthique (cf. chapitre 8). études cliniques pharmaceutiques).
L’indication d’une étude IRM en T2 de la Seront successivement envisagés le vertige posi-
fosse postérieure se pose aussi quand l’attention tionnel paroxystique bénin (VPPB), la névrite ves-
se porte sur le tronc cérébral en cas de patho- tibulaire (déficit unilatéral brusque), la maladie de
logie des nerfs crâniens : diplopie (III, IV, VI), Menière et les relations entre vertige et migraine.
troubles sensitifs de la face (V), paralysie faciale
centrale (VII), dysphagie et dysphonie (IX, X).
On recherche plus particulièrement un infarc-
Vertige positionnel
tus latéro-bulbaire. En plus de l’IRM du tronc
cérébral et du cervelet, s’il existe des facteurs de
paroxystique bénin (VPPB)
risque vasculaire, c’est l’indication d’une angio- Les VPPB sont des vertiges positionnels pro-
IRM à la recherche d’une hypoplasie ou d’une voqués par des calculs piégés dans les canaux
sténose de l’artère vertébrale (fig. 9.15). Enfin, semi-circulaires. Ces calculs ou canalolithiases
une dilatation ventriculaire peut être soupçonnée sont constitués de débris d’otolithes dégénérés
sur l’association : trouble d’équilibre, troubles plus ou moins agglomérés et gluants de densité
visuels et céphalées. supérieure à celle de l’endolymphe. Sous l’effet
de la pesanteur, ils se mobilisent dans le canal
en fonction des positions de la tête en créant
Pathologies vestibulaires des courants endolymphatiques ampullipètes ou
les plus fréquentes ampullifuges générant des nystagmus spécifiques
du canal atteint. Soulignons que l’imagerie n’est
Ce sont des entités objectivées par le bilan coch- pas encore capable de les visualiser. Mais cette
léo-vestibulaire, mais dont les causes ne sont pas hypothèse fait l’objet d’un consensus mondial
connues avec certitude. Pourtant, leur prise en du fait de l’efficacité prouvée des manœuvres
charge est efficace dans la plupart des cas. La libératrices.
Figure 9.16. Manœuvre de Dix et Hallpike modifiée (lithiase du canal postérieur droit).
C’est aussi le premier temps de la manœuvre de Sémont. A. Vue de face avec une rotation de la tête de 45° vers la
gauche. B. Vue de dessus correspondante. C. La rotation de la tête de 45° vers la gauche met le canal postérieur droit
dans le plan de bascule biscapulaire. CP : canal postérieur ; CH : canal horizontal ; CA : canal antérieur. L’étoile indique le
côté atteint.
Sauvage J.-P. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Elsevier Masson, 2014.
son amplitude va crescendo puis, après une rotation de la tête. Le patient arrive sur la table
phase d’état, il diminue decrescendo jusqu’à nez en bas. Au bout de quelques secondes, le
s’arrêter spontanément sans que la position de nystagmus libératoire apparaît. Il est identique
la tête soit modifiée. En moyenne, il dure 10 à au précédent, indiquant que la lithiase canalaire
20 secondes. Au maximum, chez une personne a poursuivi son chemin dans le canal postérieur
âgée, il peut durer une minute. pour atteindre la crus commune et tomber dans
l’utricule où elle sera désagrégée et réabsorbée.
Principe de la manœuvre libératrice de Sémont Attention ! Certains auteurs l’avaient nommé
Le diagnostic est certain si la manœuvre provoca- nystagmus géotropique, pensant que sa compo-
trice a déclenché un nystagmus possédant tous les sante verticale supérieure était devenue verticale
critères décrits précédemment et s’accompagnant inférieure. Mais c’est parce que le patient a été
d’un violent vertige que le patient reconnaît. On retourné. Pour lui, le nystagmus reste bien verti
passe alors directement à la manœuvre libéra- cal supérieur, comme le montre la vidéo 9.1
trice de Sémont (fig. 9.17C et D). Elle consiste où la caméra vidéo fixée par un bandeau s’est
à retourner le patient de 180° sans modifier la retournée avec le patient.
Figure 9.17. Manœuvre de Sémont modifiée pour une lithiase du canal semi-circulaire postérieur droit.
Dans chaque colonne, le patient (en bas) et l’oreille (en haut) sont vus sous le même angle. A. Premier temps, manœuvre
provocatrice de Dix et Hallpike modifiée : le patient est assis au bord du lit face à soi ; faire tourner la tête de 45° du
côté gauche pour mettre son canal postérieur droit parallèle au plan biscapulaire ; la lithiase est bloquée en « a » contre
la cupule de l’ampoule. B. Basculer le patient vers sa droite dans le plan biscapulaire. La tête arrive dans une position
nez en l’air ; sous l’effet de la pesanteur, la lithiase tombe de « a en b », provoquant un courant ampullifuge excitateur1 ;
observer le nystagmus caractéristique qui a été déclenché. Attendre quelques minutes pour que les particules se
rassemblent à mi-canal. C. Manœuvre libératrice : basculer l’ensemble tête et corps de 180° dans le plan biscapulaire
pour coucher le patient sur son épaule gauche en maintenant la rotation de la tête jusqu’à ce que la pommette du patient
touche le matelas, le nez étant cette fois dirigé vers le bas. Après un temps de latence de quelques secondes, la lithiase
tombe de « b en c » à l’entrée de la crus commune (cf. fig. 9.2). Elle déclenche encore un courant ampullifuge provoquant
un vertige et un nystagmus libératoires. D. Le patient est relevé doucement, le cou fléchi de 20° pour verticaliser la crus
commune. Lors du retour en position assise, la lithiase tombe dans l’utricule « c en d ». Le patient a l’impression d’être
projeté en avant et réagit par une violente rétropulsion, nécessitant de le tenir fermement.
Sauvage J.-P. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Elsevier Masson, 2014.
1.Pour le canal postérieur, ce sont les courants ampullifuges qui sont excitateurs, contrairement au canal horizontal.
Chapitre 9. Vertiges 165
En cas de non-récupération, les symptômes tronc cérébral. Le résultat est insuffisant dans les
disparaissent grâce à la compensation centrale. La mouvements rapides de la tête, d’où la persistance
qualité de la compensation centrale dépend de d’oscillopsies.
la capacité des centres à utiliser les informations
de l’appareil vestibulaire controlatéral resté sain
Rééducation vestibulaire
(adaptation) et les informations visuelles et pro-
prioceptives (substitution). Le traitement en urgence repose sur les cor-
Mais le réflexe vestibulo-oculaire du côté lésé ticoïdes, les antiémétiques (odansétron) et les
reste définitivement déficitaire. Le head impulse antivertigineux (isoleucine).
test (HIT) (fig. 9.21) montre que, pour rem- Jadis, on laissait le patient alité dans l’obscurité
placer l’appareil vestibulaire, la stabilisation de et gavé de sédatifs. Il persistait alors d’importantes
l’œil utilise le système saccadique généré par le séquelles du fait d’une mauvaise compensation
168 ORL thématique
Figure 9.21. Test impulsionnel céphalique ou test d’Halmagyi ou HIT (head impulse test). On demande au patient de fixer
une cible droit devant lui. Puis on écarte sa tête de 15 à 20° tandis qu’il continue de fixer la cible. On ramène alors sa tête
en position médiane par une impulsion haute vitesse (3 à 400°/sec). A. L’œil se recentre harmonieusement chez le sujet
normal. B. S’il existe un déficit du réflexe vestibulo-oculaire du côté vers lequel on tourne la tête (*), l’œil ne se recentre
pas, mais revient en position médiane grâce à plusieurs saccades en sens inverse du mouvement.
Sauvage J.-P. Vertiges : manuel de diagnostic et de réhabilitation, 2e édition. Elsevier Masson, 2014.
centrale. Il a été démontré, chez l’animal, qu’après crises sont répétées, invalidantes avec vomis-
une neurotomie vestibulaire, le sujet compensait sements et instabilité majeure. Elles durent de
beaucoup plus vite si on le laissait libre de ses un quart d’heure à 24 heures, mais sont souvent
mouvements par rapport à un sujet entravé dans suivies d’une période de malaise pouvant durer
l’obscurité. plusieurs jours. Entre deux crises, le sujet est
Dès le début de la névrite, le kinésithérapeute normal (cf. fig. 9.11B).
rencontre le patient pour le convaincre de ne pas
rester alité, mais de se lever, de bouger et d’arrêter Diagnostic
les traitements sédatifs antivertigineux dès que Il repose sur la présence de signes auditifs asso-
possible (sauf les antiémétiques). Puis il le prend ciés. La crise comporte une triade : acouphène,
en charge pour une rééducation vestibulaire par surdité et vertige. Elle débute par une sensation
adaptation-substitution, basée sur des exercices de plénitude dans une oreille avec un acou-
de coordination œil-tête, de maintien postural et phène de tonalité grave. En quelques minutes,
des exercices giratoires. Ainsi, sous la guidance l’hypoacousie devient majeure. Soudainement, se
du kinésithérapeute, sont créés de nouveaux déclenche le vertige rotatoire avec son cortège de
processus fonctionnels par la pratique d’exer- signes associés. Au début de l’évolution, l’audi-
cices vestibulaires actifs dans un environnement tion revient à la normale entre les crises ou fluctue
visuel normal. C’est un apprentissage positif qui d’un jour à l’autre (fig. 9.22). Après quelques
requiert la participation motivée du patient. Non années, la surdité persiste définitivement, prédo-
seulement la compensation centrale se fait plus minant toujours sur les fréquences graves.
vite, mais il y a moins de séquelles.
Physiopathologie
Évolution
Une maladie de Menière évolue spontanément
en cinq à dix ans. Au début, les crises typiques se
succèdent à un rythme variable d’un individu à
l’autre. Au stade de Menière dit vieilli, les crises
disparaissent pour laisser la place à des périodes
d’instabilité avec chutes brutales de Tumarkin.
En fin d’évolution, l’audition descend jusqu’à une
moyenne de 60 dB et ne régresse plus.
Traitement
Le traitement symptomatique des crises repose
sur les antiémétiques, les anticholinergiques
comme la méclozine (Agyrax®), et d’autres trai-
tements d’action inconnue comme l’acétylleucine
(Tanganil®).
Au plan étiopathogénique, on utilise les diuré-
tiques comme l’acétazolamide (Diamox®) et une
restriction hydrosodée pour diminuer la pression
dans l’oreille interne. La flunarizine (Sibélium®)
est utile, car il existe souvent un contexte migrai-
neux. La bétahistine (Serc®) agit sur les récepteurs
histaminergiques H3.
Le handicap des patients atteints de la maladie
de Menière est très important et souvent sous-
estimé. Ce n’est pas tant la durée totale des crises
par an qui est handicapante que la peur d’avoir
une crise. Les patients n’osent plus sortir ni partir
en voyage. Au travail, l’employeur ne comprend
pas cet employé que l’on doit renvoyer réguliè-
rement chez lui titubant et vomissant. Ainsi, le
patient déclenche une anxiété maladive et réduit
Figure 9.22. Maladie de Menière : audiogrammes.
Patiente ayant présenté, au cours de l’automne, trois son activité, même en l’absence du symptôme
crises de vertige rotatoire ayant duré chacune 45 minutes. de vertige. C’est la raison pour laquelle, chez
L’audiogramme montre une surdité fluctuante unilatérale un patient jeune, chargé de famille et en pleine
sur les fréquences graves (250 à 1 000 Hz) et un respect
carrière professionnelle, nous proposons une
relatif des fréquences aiguës de 2 000 à 8 000 Hz. En
ordonnées, les pertes auditives atteignent en moyenne de neurotomie vestibulaire. Les crises cessent immé-
30 à 70 décibels selon les fréquences. diatement avec une dernière crise d’instabilité,
170 ORL thématique
régressant en quelques jours avec la rééducation migraineuses, parfois au rythme des menstruations.
vestibulaire. Chez ces femmes, la ménopause fait disparaître les
Cette intervention doit se faire avec toutes crises de migraine qui sont remplacées ensuite par
les précautions de la neurochirurgie. Elle ne des crises de vertiges (vertiges de Slater).
nécessite qu’une mini-ouverture rétro-auriculaire Dans la migraine, le patient ne fait pas la corré-
permettant d’atteindre directement le pédicule lation des vertiges avec les céphalées, car il a appris
acoustico-facial. Il faut séparer le nerf auditif du à vivre avec et ne pense pas à en parler. D’ailleurs,
nerf de l’équilibre et sectionner ce dernier. seulement une minorité de patients ont des accès
Une destruction vestibulaire du côté atteint de céphalée migraineuse à chaque crise de vertige.
peut aussi être réalisée en pratiquant des injec- Les autres ont tantôt l’un, tantôt l’autre, parfois
tions transtympaniques de gentamicine (labyrin- les deux ensemble et parfois jamais les deux
thectomie chimique). L’antibiotique diffuse dans ensemble. On découvre aussi des périodes d’insta-
l’oreille interne par la fenêtre ronde et détruit les bilité et de nausées déclenchées par le stress et le
cellules sensorielles ciliées vestibulaires. Nous la manque de sommeil (préparation des concours ou
proposons chez les sujets âgés. Les résultats sur les manifestations sportives).
vertiges sont moins bons que ceux de la neuroto- Les arguments sont que pendant les états verti-
mie vestibulaire, car le risque d’atteinte auditive gineux, le patient ne supporte ni la lumière, ni les
oblige à faire le moins d’injections possible. bruits forts, ni le mouvement. L’idéal est d’exami-
ner le patient en crise. On découvre alors un nys-
Migraine et vertiges tagmus horizontal de position d’origine centrale
(fig. 9.23). L’examen neurologique est normal.
La relation entre migraine et vertiges est souvent Certains auteurs demandent qu’une IRM élimine
contestée du fait de la grande fréquence de ces une pathologie de la fosse postérieure. Dès lors,
deux symptômes dans la population et de pos- on peut faire un test thérapeutique : essayer un
sibles coïncidences. Aussi faut-il être très prudent traitement de fond de la migraine (ex. : flunari-
et construire lentement le diagnostic. De nom- zine ½ comprimé le soir pendant un maximum de
breux auteurs affirment que c’est la deuxième 2 mois en respectant les contre-indications). En
cause de vertige après les VPPB. cas de bon résultat, la patiente gérera elle-même
Le polymorphisme du vertige migraineux est ses périodes de traitement.
très grand. Dans la moitié des cas, ce sont des crises
rotatoires isolées sans symptômes auditifs ou avec Catalogue du vertige
des acouphènes bilatéraux. Certaines crises sont
très brèves et très violentes. Parfois, elles ressem- Le VPPB, la névrite vestibulaire, la maladie de
blent à une névrite vestibulaire, mais sans le syn- Menière et le vertige migraineux sont des entités
drome vestibulaire harmonieux. Souvent, c’est un
véritable état de mal vestibulaire avec des vertiges
positionnels et une intolérance au mouvement
persistant pendant des semaines. Le patient dit
qu’il se croit en bateau. D’ailleurs, il est souvent
sujet au mal des transports. Des troubles visuels
sont fréquents : flou visuel, syndrome de désorien-
tation de l’automobiliste. La survenue d’authen-
tiques VPPB serait plus fréquente sur ce terrain.
La suspicion repose sur la découverte d’un ter- Figure 9.23. Nystagmus de position central (Nylen).
rain migraineux souvent familial apparaissant très Aucun nystagmus spontané en position primaire, mais
nystagmus horizontal antigéotropique lorsque le patient
tôt au cours de la vie, y compris chez l’enfant se couche sur une oreille puis sur l’autre. Faible vertige
(vertige paroxystique bénin de l’enfant). C’est une associé. Il dure tant que la position est maintenue. C’est
cause fréquente de vertiges chez les femmes jeunes, un nystagmus en négatif de celui du VPPB.
Chapitre 9. Vertiges 171
dans le cadre d’une thrombose de l’artère céré- Vidéo e9.2. Nystagmus horizonto-rotatoire périphérique
belleuse antéro-inférieure, hémorragie intra- (destruction chirurgicale du vestibule droit).
Voici un cas analogue à celui d’une névrite vestibulaire
labyrinthique chez un patient au traitement droite. La patiente est allongée dans son lit et ne bouge
anticoagulant mal contrôlé. pas. Un masque comportant une caméra vidéo en
• Surdité progressive unilatérale rétrocochléaire infrarouge sur l’œil gauche enregistre son mouvement
aux PEA avec aréflexie vestibulaire ipsilatérale : dans l’obscurité. Il existe un nystagmus horizonto-rotatoire
typiquement périphérique par destruction chirurgicale de
neurinome de l’acoustique (cf. chapitre 8). l’oreille droite. Le nystagmus spontané a une composante
• Cophose ancienne avec crises de violents ver- horizontale rapide qui bat à gauche et une composante
tiges ressemblant à celle de la maladie de lente qui bat à droite. Dans le regard gauche, le
Menière : hydrops endolymphatique retardé nystagmus accélère. Dans le regard droit, le nystagmus se
bloque et on voit bien sa composante torsionnelle horaire.
(cf. partie 2, fiche « Delayed vertigo ou hydrops Après avoir retiré le cache sur l’œil droit et fait fixer le
endolymphatique retardé »). doigt, le nystagmus s’arrête presque complètement.
`` Compléments en ligne
Des compléments numériques sont associés à ce
chapitre, ils sont indiqués dans le texte par un picto
. Ils proposent les vidéos du chapitre. Pour voir
une vidéo, scannez le flashcode correspondant à
l’aide de votre smartphone ou de votre tablette,
ou connectez-vous sur http://www.em-consulte.
com/e-complements/474503 et suivez les ins-
tructions.
successives correspondant à la valve nasale anté- microbiens. Le rôle du battement ciliaire des
rieure, à la tête du cornet inférieur et enfin cellules ciliées est de balayer ce mucus vers le pha-
à la choane. On en déduit des surfaces (0,5 à rynx. Une cytologie nasale par brossage permet
1,5 cm2). Cette fois, c’est une évaluation volu- d’étudier les populations cellulaires. La clairance
métrique des fosses nasales. mucociliaire peut être mesurée en déposant un
Malheureusement, il n’y a pas de consensus peu de saccharine au dos du cornet inférieur afin
concernant la corrélation entre les mesures et de voir en combien de temps le patient ressent
la symptomatologie. Leur reproductibilité est la saveur sucrée (10-15 minutes). La mesure
contestée, car il y a de grandes variations en de la fréquence du battement ciliaire nécessite
fonction de la température, de l’hygrométrie et des techniques sophistiquées (stroboscopie ou
de l’état de nervosité du patient. C’est pourquoi micro-cinéma).
certaines mesures sont effectuées après pulvérisa- Dans les rhinites et les rhinosinusites chro-
tion nasale de vasoconstricteurs (oxymétazoline). niques, il y a une diminution du nombre de
cellules ciliées et une augmentation du nombre
C’est une atteinte unilatérale de cellules à mucus. Avec un rapport inversé entre
cellules ciliées et cellules à mucus, le mucus trop
La perspective de gestes chirurgicaux augmente.
abondant est bloqué et favorise l’infection (rhi-
L’exploration morphologique dentaire doit être
norrhée postérieure). D’autre part, il apparaît des
complétée par un panoramique et une TDM
cellules immunitaires, en particulier des cellules
de l’arcade maxillaire supérieure. On recherche
éosinophiles en grand nombre. Ainsi naît une
ainsi des corps étrangers et des lyses osseuses au
maladie inflammatoire chronique auto-entretenue
contact d’implants dentaires. Le cone beam CT a
(cf. infra).
l’intérêt de bien voir les granulomes interapicaux
Les dyskinésies mucociliaires peuvent être
pour une faible irradiation.
primitives (syndrome de Kartagener) ou secon-
Une IRM complétant la TDM est demandée
daires après radiothérapie ou chimiothérapie pour
pour distinguer entre inflammation, rétention,
cancer.
tumeur et nécrose.
L’allergie nasale ne peut se déduire qu’indirec-
La bactériologie doit être interprétée avec pru-
tement des tests cutanés qui ne témoignent que
dence en sachant que la flore commensale est
d’une allergie cutanée. Seul le test de provocation
à base de Staphylococcus epidermitis et que le
nasal donne la certitude. L’antigène peut être
portage sain de Staphylococcus aureus est de 30 %
administré en aérosol ou en pulvérisation (pneu-
(cf. infra).
mallergènes, substances pharmacologiques). La
Si une anatomopathologie est nécessaire, le
réponse peut être mesurée sur une échelle d’éva-
fragment peut être mis dans le formol pour
luation visuelle ou par rhinomanométrie.
une microscopie et une immunohistochimie. En
La mesure de l’oxyde d’azote (NO) dans l’air
revanche, le prélèvement doit rester à l’état frais
broncho-pulmonaire expiré se fait couramment
pour une recherche de lymphome ou de sarcome.
en pneumologie. Il existe en effet une relation
La microscopie électronique et la cytogénétique
entre cette concentration et le battement ciliaire,
nécessitent des milieux spéciaux et la biologie
au point que c’est un marqueur de l’inflamma-
moléculaire nécessite une congélation.
tion. En ORL, la concentration augmente dans
la rhinite allergique, probablement du fait de
C’est une atteinte bilatérale cytokines en taux élevés. Au contraire, dans la
On est sur le versant médical de la pathologie, polypose nasosinusienne, la concentration dimi-
nécessitant un bilan complémentaire. nue parce que les espaces aériens sont bloqués.
Normalement, l’épithélium respiratoire nasal Dans les dyskinésies ciliaires et la mucoviscidose,
doit comporter des cellules ciliées et des cellules les concentrations en NO sont effondrées.
à mucus dans un rapport de 5 à 3. Le rôle du L’étude histologique des lésions peut aussi
mucus est de capter les allergènes et les agents amener à découvrir une vascularite (cf. infra).
178 ORL thématique
On les qualifie parfois de rhinites vasomotrices âgées (représentées trivialement avec la goutte au
primitives. Elles seraient en rapport avec une nez). Elle est parfois provoquée par l’alimentation
dysrégulation neurovégétative sympathique ou (syndrome de la soupe chaude). L’examen est
parasympathique. normal ou retrouve une atrophie globale de la
muqueuse nasale parfois croûteuse.
Rhinite médicamenteuse
L’abus de pulvérisations nasales de vasocons- Ozène
tricteurs alpha-mimétiques (dérivés de l’oxymé- C’est une rhinite atrophique primitive pouvant
tazoline et de la phényléphrine) engendre une atteindre les sujets jeunes, se traduisant par une
véritable dépendance. La conséquence peut être large vacuité des cavités nasales. Les cornets
une hypertension artérielle sévère. sont minuscules et il se forme de volumineuses
La rhinite à l’aspirine et aux autres anti-inflam- croûtes malodorantes. Exceptionnel de nos
matoires non stéroïdiens (AINS) fait partie de jours, l’ozène était autrefois attribué à la diph-
l’intolérance à l’aspirine (déviation du métabolisme térie ou à Klebsiella ozona. De telles atrophies
de l’acide arachidonique vers les leucotriènes). se rencontrent encore après radiothérapie ou
D’autres médicaments peuvent être en cause : après exérèse des cornets inférieurs (turbinec-
les antihypertenseurs (en particulier la réserpine) tomie), connue sous le nom de syndrome du
et les médicaments des troubles de l’érection. nez vide.
Rhinite alimentaire
Certains aliments provoquent une libération Sinusites aiguës
d’histamine : la tyramine, présente dans le pois-
son fermenté, dans le chocolat, dans certains vins La sinusite est souvent alléguée par les patients,
rouges. Il y a aussi la caféine, la théobromine, mais son diagnostic repose sur des critères précis.
les sulfites. D’autres procèdent d’un mécanisme
cholinergique (piments) ou par irritation du nerf
trijumeau (moutarde, poivre, raifort). Sinusite maxillaire aiguë
C’est une infection bactérienne survenant au
Rhinite professionnelle non allergique décours d’une rhinite aiguë (sinusite rhinogène)
Toutes sortes de substances peuvent être accusées. ou après un bain en rivière polluée.
Pathergie Interrogatoire
C’est une intolérance aux conditions physiques de Il révèle l’apparition rapide de signes unilatéraux :
l’air respiré : hygrométrie, température, empous- • douleur sous-orbitaire avec irradiations den-
sièrement, etc. taire, temporale et mastoïdienne. Son caractère
continu, pulsatile, accentué par la position de la
Rhinite hormonale tête penchée en avant, est en faveur d’une
origine sinusienne. Son siège et son rythme
Environ 20 à 30 % des femmes enceintes rappor-
dans la journée (vespérale se poursuivant la
tent des symptômes rhinologiques au cours de la
nuit, empêchant le sommeil et s’atténuant dans
grossesse.
la matinée) sont en faveur de son origine
maxillaire ;
Rhinite liée au vieillissement
• obstruction nasale du même côté ;
Une rhinorrhée discontinue, associée à une séche- • rhinorrhée purulente ipsilatérale intermittente,
resse nasale, est fréquente chez les personnes diminuant la douleur et souvent striée de sang.
180 ORL thématique
Encadré 10.1
Classification de Chandler.
A. Stade I : œdème palpébral seul avec cellulite péri-orbitaire préseptale. B. Stade II : cellulite orbitaire
avec exophtalmie réductible. C. Stade III : abcès orbitaire sous-périosté avec exophtalmie non réductible
et ophtalmoplégie partielle. Stade IV : exophtalmie importante, ophtalmoplégie et abcès orbitaire nécessitant
un drainage.
Chapitre 10. Rhinites, sinusites et rhinosinusites 183
n’entraîne ni modification de l’acuité visuelle,
ni trouble de la mobilité de l’œil ou des réflexes
photomoteurs. En revanche, l’extension rétro-
septale du processus infectieux met en jeu
le pronostic fonctionnel (baisse de l’acuité
visuelle et ophtalmoplégie) et le pronostic vital
(thrombose du sinus caverneux). Le septum
orbitaire est la cloison fibreuse qui unit le
rebord orbitaire osseux au bord périphérique
de la charpente fibro-élastique de la paupière
ou tarse. Dans la moitié des cas, il y a un abcès
sous-périosté. La surveillance ophtalmologique
repose sur l’échographie orbitaire qui est fiable,
non irradiante comme la TDM, et peut être
répétée au lit du malade sans sédation de
l’enfant. Dans la plupart des cas, l’antibio-
thérapie parentérale seule amène la guérison Abcès sous-périosté sur ethmoïdite.
(céphalosporine de 3e génération + fosfomy- TDM axiale en fenêtre parenchymateuse : comblement
des cellules ethmoïdales gauches avec abcès
cine +/− métronidazole). Seul un abcès sous-
sous-périosté en regard, refoulant le muscle droit
périosté, dont le volume atteint ou dépasse médial (flèche) avec en arrière des zones denses
300 à 500 mm3, nécessite un drainage chi- d’inflammation au sein de la graisse hypodense.
rurgical effectué par voie externe ou par voie Modifié d’après : Dubrulle F., Martin Duverneuil N., Moulin G.
endonasale. Imagerie en ORL. Elsevier Masson, 2010, p. 37 (fig. 2.22).
nasosinusienne, pourvu qu’elles durent plus de territoire du nerf sous-orbitaire, il ne faut pas
trois mois. Par définition, ces pathologies ont incriminer l’image radiologique arrondie du
en commun une maladie inflammatoire multi- polype muqueux témoin d’une sinusite ancienne
factorielle auto-entretenue avec des facteurs (image en coucher de soleil). Au contraire, il faut
étiologiques extrinsèques (infectieux et aller- penser à d’autres causes, comme les algies vascu-
géniques) et intrinsèques (génétiques, mor- laires de la face (cf.partie 2, fiche « Algie faciale »).
phologiques et structurels). Même la polypose Les sinusites frontales chroniques sont plus
nasosinusienne, autrefois conçue comme une bruyantes : céphalées toujours unilatérales à type
entité à part, est une RSC avec polypes. La prise de tension sus-orbitaire déclenchée par le travail
en charge médicale est complexe. La chirurgie visuel, l’exposition au froid ou le travail intense.
est souvent décevante en dehors d’indications Quelle que soit la topographie des lésions, on
précises. retrouve l’obstruction nasale, les éternuements,
une rhinorrhée purulente antérieure ou pos-
térieure, une anosmie ou une hyposmie, voire
Clinique une cacosmie. Chez des patients en pleine activité
professionnelle, cet inconfort nasal s’associe à un
Symptômes
contexte général handicapant: céphalées, pous-
Les sinusites maxillaires chroniques sont presque sées de fièvre, asthénie, toux, sensation de plé-
toujours indolores (sauf au moment des pous- nitude de l’oreille et même parfois des douleurs
sées de réchauffement). En cas d’algie dans le dentaires.
184 ORL thématique
Encadré 10.2
RSC granulomateuses
Un aspect granuleux des lésions nasosinu- neuropathies, atteinte digestive, myocardiopa-
siennes doit déclencher une étude histologique thie coronarienne. Il existe un asthme sévère,
à la recherche d’une vascularite caractéristique. une hyperéosinophilie sanguine et tissulaire et,
Cette prolifération granulomateuse pseudo- à la TDM, une ostéosclérose des parois sinu-
tumorale s’accompagne de nodules sous- siennes. Ici, les auto-anticorps sont périnu-
muqueux (cf. infra, sarcoïdose), de signes cléaires (ANPA).
crâniens extrasinusiens (diplopie, hypoesthé-
Autres étiologies
sie faciale, ptosis, baisse de l’acuité visuelle).
L’association à une atteinte pulmonaire ou • Sarcoïdose : granulomatose multiviscérale, en
rénale est déterminante. Ces pathologies sont particulier respiratoire, avec lymphadénopathies
rares mais multiples. hilaires bilatérales et atteinte parenchymateuse.
RSC dans 10 % des cas avec anosmie, épiphora
Granulomatose de Wegener (larmes), xérophtalmie (infiltration des glandes
C’est une vascularite auto-immune avec gra- lacrymales).
nulome nécrosant. Étant donné la sévérité • RSC fungique invasive survenant dans les
de l’atteinte pulmonaire et de l’insuffisance immuno-incompétences.
rénale, c’est une urgence thérapeutique. La • Tuberculose : Mycobacterium tuberculosis ou
découverte d’auto-anticorps anticytoplasme des mycobactéries atypiques (HIV + ).
polynucléaires neutrophiles (ANCA) oriente le
• Granulomatoses infectieuses (lèpre, rhinos-
diagnostic pour instituer un traitement par
clérome [Klebsiella rhinoscleromatis]).
corticoïdes, cyclophosphamide et anti-TNF.
• Granulome malin centro-facial ou lymphome
Syndrome de Churg-Strauss nasal T/NK : ce n’est pas une maladie de sys-
C’est encore une vascularite auto-immune tème comme la maladie de Wegener.
avec granulome mais non nécrosant. L’atteinte • Vascularite cocaïnique : granulomatose des-
est multiviscérale : infiltrations pulmonaires, tructrice avec perforation septale.
L’idéal serait de pratiquer une ponction de sinus Processus inflammatoire non allergique
dont l’intérêt serait non seulement qualitatif, mais En fait, l’infection bactérienne enclenche un
aussi quantitatif avec un CFU/mL 104 (colony- processus inflammatoire chronique non spéci-
forming unit). On peut remplacer la ponction fique chez certains patients. Les super-antigènes
par un prélèvement endoscopique au niveau du microbiens (SAG) sont des toxines bactériennes
méat moyen avec une bonne valeur prédictive sécrétées par Staphylococcus aureus et Strepto-
de la présence dans le sinus de Streptococcus coccus pyogenes activant la prolifération massive
pyogenes, Haemophilus influenzae et Streptococ- de lymphocytes T avec production de cytokines
cus pneumoniae. pro-inflammatoires. D’autre part, des réactions
À ce stade, une antibiothérapie de spectre immunologiques à IGE antibactérien se dévelop-
large avec une bonne pénétration tissulaire serait pent avec une fréquence 5 à 6 fois supérieure à
efficace si on la donne pendant quatre semaines celle de la rhinite allergique.
(amoxicilline-acide clavulanique). Toutefois, Ainsi se développe un infiltrat cellulaire dans le
l’antibiothérapie s’attaque à la flore pathogène conjonctif de la muqueuse nasosinusienne (lamina
mais détruit aussi la flore nasale normale qui propria). Cet infiltrat est constitué non seulement
sécrète des protéines bactéricides. de lymphocytes, mais aussi de polynucléaires
188 ORL thématique
éosinophiles, de macrophages. Au stade le plus opacité unique au sein du sinus maxillaire. Il n’est
sévère, par l’intermédiaire d’une explosion de pas rare de constater la présence de mycétome au
cytokines, les cellules structurelles sont lésées (épi- sein d’une polypose.
théliales, endothéliales et fibroblastes). Il apparaît Le traitement est chirurgical. Ce n’est que
des modifications d’adhérence entre ces cellules et dans les formes invasives que sera envisagé un
une ouverture des canaux ioniques sodiques. Au traitement général antifungique.
minimum, se produit un œdème. Dans le méat
moyen, apparaît un petit bouquet de polypes.
Au maximum, c’est une polypose nasosinusienne Formes cliniques
multirécidivante (cf. infra).
Sous-groupes de la RSC
Le traitement est local : lavage au sérum
physiologique et rhino-corticoïdes pendant 4 à S’agissant en fait de la même affection, on peut les
6 semaines. classer par scores de sévérité.
• Forte : RSC hyperplasique avec infiltrat éosi-
Processus inflammatoire allergique nophilique (œdème + polypes + éosinophilie
tissulaire). Le polype est le stade ultime de
Dans les RSC les plus sévères, l’association à une
l’hyperplasie inflammatoire (avec asthme associé
rhinite allergique atteint 40 à 50 %. La fréquence
dans 50 % des cas). Plus il y a d’éosinophiles,
d’un asthme associé est de 25 à 50 %. C’est en fait
plus la maladie inflammatoire est sévère.
la même maladie qui s’exprime différemment. En
• Moyenne : RSC hyperplasique non éosino-
présence de l’allergène, le patient multiplie l’appa-
philique.
rition des éosinophiles dans les sinus. L’œdème,
• Modérée : RSC éosinophilique non hyper-
la dysfonction ciliaire et la production de mucus
plasique.
s’aggravent.
• Faible : RSC non hyperplasique et non éosino-
Le traitement est encore une indication des
philique.
corticoïdes locaux, éventuellement remplacés
Les choses n’étant pas fixées, il y a aussi une
par de brèves cures de corticoïdes oraux. Les
notion d’évolutivité (vitesse du passage d’une
antihistaminiques sont très utiles. L’efficacité des
forme à une autre).
autres traitements n’est pas prouvée : immuno-
thérapie sous-cutanée sublinguale, macrolides à RSC avec polypose (encadré 10.3)
visée anti-inflammatoire qui aurait la propriété Sa prévalence est de 1 à 4 % de la population (cf.
de faire baisser les cytokines, anticorps monoclo- fig. 10.7D et figure de l’encadré 10.3). Par ordre
naux à visée immuno-modulatrice visant certaines de fréquence, on en distingue quatre formes :
interleukines. • la forme isolée ou associée à une poly-allergie ;
• la forme avec asthme ;
Processus fungique • la forme avec asthme et intolérance à l’aspirine
Les levures sont des êtres unicellulaires. Les (maladie métabolique de Widal) ;
moisissures forment des mycéliums pluricel- • mucoviscidose.
lulaires. Leurs spores se disséminent par voie Dans toutes ces formes, on retrouve le même
aérienne, d’autant mieux que l’air est chaud infiltrat cellulaire de la lamina propria.
et humide. Il y a des milliers d’espèces. On Les phénomènes inflammatoires se produisent
décrit une RSC fungique allergique à IGE et à en trois étapes :
éosinophiles. • altération de l’épithélium cilié respiratoire nasal
La TDM montre plusieurs aspects. Les petites déclenché par les exotoxines de Staphylococcus
opacités représentent des mycétomes disséminés aureus (super-antigène), les virus, les polluants
au sein de l’opacité sinusienne (cf. fig. 10.8C). aériens, les allergènes et les champignons. Au
L’aspect de balle fungique aspergillaire réalise une départ, c’est une RSC simple ;
Chapitre 10. Rhinites, sinusites et rhinosinusites 189
Encadré 10.3
de la face et la repousse d’une muqueuse respira- Dans les formes bilatérales, chez certains
toire fonctionnelle. C’est une chirurgie difficile, patients, un traitement local ne peut pas être entre-
non exempte de complications ophtalmologiques pris, du fait de l’obstruction nasale en rapport avec
ou de blessures de la lame criblée de l’ethmoïde. les déformations septales, l’hyperplasie turbinale
Aussi, après un engouement souvent déçu, les ou de l’importance de la polypose. Dans ces cas,
indications sont devenues raisonnables. la situation peut être débloquée par une vidéo-
Dans les formes unilatérales de RSC, cette chirurgie endoscopique bilatérale. L’objectif est
chirurgie donne d’excellents résultats, surtout seulement de permettre le traitement local par
s’il y a un facteur fungique de type Aspergillus lavages et corticoïdes locaux. Mais il ne faut pas
(fig. 10.11 et 10.12). promettre de miracle (vidéos 10.1 à 10.3 ).
Vidéo e10.2. Résultat d’une chirurgie endoscopique Vidéo e10.3. Truffe aspergillaire sphénoïdale.
ethmoïdo-sphénoïdo-maxillaire. Patient souffrant de violentes céphalées depuis plusieurs
Cette patiente a été prise en charge pour une polypose mois. Un scanner en coupes axiales montre une opacité
nasosinusienne bilatérale comportant des mycétomes complète du sinus sphénoïdal gauche, avec en coupe
aspergillaires. Du côté droit, les cavités ont bien cicatrisé. coronale une opacité évoquant un mycétome aspergillaire.
On aperçoit le reliquat de cornet moyen (CM), l’ethmoïde Il n’y a pas d’érosions osseuses. L’intervention commence
antérieur et postérieur (EA et EP), les sinus maxillaire par une section de la lame verticale du cornet moyen puis
et sphénoïdal (SM et SP). On pénètre dans le sinus de sa racine cloisonnante horizontale. Le cornet moyen
sphénoïdal avec ses deux reliefs caractéristiques : le nerf vient ainsi en deux morceaux. On découvre alors l’orifice
optique horizontal et la carotide interne verticale. Du côté sphénoïdal gauche rempli par une balle fungique noirâtre.
gauche, c’est la même chose avec les ouvertures béantes Il est élargi à la pince emporte-pièce et la totalité de la
du sinus maxillaire sur la droite et du sinus sphénoïdal truffe peut être enlevée. Les céphalées ne se reproduisent
en arrière. plus.
Chapitre 11
Infections pharyngées
et péripharyngées
Points forts organisme et l’écosystème. C’est aussi le lieu où
j La présence de formations lymphoïdes amygdaliennes se trouve du tissu lymphoïde en abondance au
au contact direct de l’air inspiré constitue contact des agents infectieux aériens de toutes
l’originalité du rhinopharynx et de l’oropharynx. natures : d’abord au niveau du rhinopharynx lors
j L’indication de l’ablation des végétations adénoïdes
des deux premières années, puis au niveau de
repose sur la présence de signes otologiques :
tympans rétractés, otite séromuqueuse et surdité.
l’oropharynx quand le jeune enfant passe d’une
j L’indication de l’amygdalectomie repose respiration exclusivement nasale à une respiration
sur la présence d’angines à répétition (plus mixte, nasale et buccale. Chez l’adulte, le pharynx
de 4 dans l’année précédente) ou sur la est aussi le lieu où se répercutent les consé-
survenue de phlegmons péri-amygdaliens. quences d’une mauvaise hygiène de vie. Ce tissu
j Dans les suites d’une pharyngite, trismus, torticolis ou immunitaire constituant l’anneau de Waldeyer est
tuméfaction cervicale annoncent des complications. donc directement opposé aux agressions de toutes
j Dans les phlegmons péri-amygdaliens, natures. Il possède aussi sa propre pathologie avec
l’association d’un œdème de la luette, d’un
ses propres complications (encadré 11.1). Même
élargissement du pilier antérieur et d’un
trismus indique la ponction suivie d’incision.
si les aspects symptomatiques et évolutifs diffèrent
j Les trois espaces péripharyngiens (préstylien, selon l’âge de survenue, il s’agit en fait souvent
rétrostylien et rétropharyngien) sont des mêmes sujets : des enfants qu’on retrouvera
repérés à la TDM par leurs rapports avec à l’âge adulte.
l’hypodensité de la graisse préstylienne.
j L’abcès préstylien se développe au contact de
l’amygdale palatine et se draine par voie endobuccale. Anneau de Waldeyer
j L’infection rétropharyngée est un adénophlegmon
en rapport avec une rhinopharyngite et
se draine par voie endobuccale. C’est un réseau de formations lymphoïdes placé
j L’infection rétrostylienne au contact du paquet en sentinelle à l’entrée de l’organisme. Entre les
jugulo-carotidien est un adénophlegmon en amas bien individualisés (amygdales pharyngée,
rapport avec une pharyngite. Petit, il se traite palatines et linguale) existent des follicules isolés
médicalement. Si un drainage chirurgical est qui parsèment la muqueuse (fig. 11.1). Il est
nécessaire, la voie d’abord est choisie en fonction fréquent d’observer leur hypertrophie après une
de sa position par rapport aux gros vaisseaux amygdalectomie ou dans les états inflammatoires
(voie endobuccale ou voie cervicale externe). chroniques de l’oropharynx (vicariance).
j En dehors des adénites rétropharyngées et
L’amygdale pharyngée occupe le rhinopharynx.
rétrostyliennes de l’enfant qui restent habituellement bien
circonscrites, toutes les infections des espaces profonds Elle croît rapidement après la naissance jusqu’à
de la face et du cou peuvent évoluer vers une cellulite l’âge de 4 ans. Elle régresse ensuite pour dis-
cervicale profonde (synonyme : fasciite nécrosante). paraître à l’âge de 12 ans. Son hypertrophie
constitue les végétations adénoïdes (cf. fig. 1.16).
L’immunité de l’enfant se construit d’abord dans Les amygdales palatines sont les formations lym-
le pharynx. C’est la première frontière entre son phoïdes paires et symétriques que l’on peut voir
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
196 ORL thématique
Encadré 11.1
Infections pharyngées :
définitions
• Rhinopharyngite : atteinte inflammatoire
de l’étage supérieur du pharynx (rhinopha-
rynx), associée à une atteinte nasale. Maladie
infectieuse très fréquente chez le petit enfant,
la rhinopharyngite est d’origine virale.
• Angine : infection localisée à l’ensemble
ou à une partie de l’oropharynx. Elle est plus
souvent virale que bactérienne. Elle entraîne
fièvre, dysphagie (difficultés à la déglutition)
et odynophagie (douleurs à la déglutition).
• Adénite aiguë : inflammation ganglion-
naire fréquente datant de moins de 15 jours.
Chez l’enfant, elle est plus souvent virale
(rhinovirus, virus para-influenza, adénovirus,
CMV, EBV, etc.) que bactérienne (20 %). Les
adénites rétropharyngées et rétrostyliennes se
présentent comme des infections péripharyn- Figure 11.1. Anneau lymphatique de Waldeyer.
Le pharynx a été incisé au niveau de sa paroi postérieure.
gées.
1 : amygdale pharyngée ; 2 : amygdale tubaire ;
• Abcès : tissu infecté nécrosé, réalisant une 3 : fossette de Rosenmüller (cf. fig. 3.11) ; 4 : orifice
cavité purulente que l’on peut drainer chirur- de la trompe d’Eustache ; 5 : choane droite ; 6 : cloison
gicalement. nasale ; 7 : amygdale palatine ; 8 : amygdale linguale ;
• Phlegmon : infection circonscrite non 9 : épiglotte ; 10 : larynx ; 11 : paroi du pharynx ; 12 : voile
encore nécrosée. Le phlegmon péri-amyg- du palais et luette ; 13 : follicules lymphoïdes formant
une traînée qui relie entre elles les diverses amygdales ;
dalien n’est plus un phlegmon lorsqu’il est
14 : cornet inférieur ; 15 : cornet moyen ; 16 : œsophage.
collecté, car c’est alors un abcès développé Testut L., Jacob O. Traité d’anatomie topographique. Tome 1,
dans l’espace péri-amygdalien en dedans de 2e édition. Paris : Doin Éditeurs, 1909, p. 278 (fig. 20.6).
l’aponévrose péripharyngée.
• Cellulites : les cellulites superficielles ou
dermo-hypodermites des tissus graisseux ne la couche profonde s’est transformée en organe
sont pas d’origine pharyngée. Les cellulites lymphoïde. Les amygdales palatines atteignent
profondes sont plutôt dénommées fasciites leur plus gros volume à la puberté, puis régressent
nécrosantes, mettant en avant le rôle des et sont atrophiées lors du vieillissement.
fascias dans la propagation du processus La muqueuse pharyngée et son tissu lym-
infectieux. phoïde participent à la défense immunitaire. Les
phagocytes (cellules dendritiques) et les mas-
à l’examen de l’isthme du gosier (cf. fig. 1.15). tocytes jouent un rôle dans la présentation antigé-
Elles sont contenues dans la loge amygdalienne nique. Ils expriment à leur surface des récepteurs
située entre les piliers antérieur et postérieur du reconnaissant les motifs moléculaires associés aux
voile. Entre l’amygdale et les piliers se trouvent pathogènes. Les germes piégés dans les cryptes
des récessus plus ou moins profonds, dont le plus vont constituer une flore tolérée. En cas d’agres-
important est le récessus palatin (fig. 11.2). Si on sion nouvelle, l’inflammation est la première
pratique une coupe transversale de l’amygdale, réponse du tissu lymphoïde. Elle est induite par
on constate l’existence de cryptes naissant de la les facteurs chimiques relargués par les cellules
profondeur et s’étendant plus ou moins large- détruites : histamine, bradykinine, sérotonine,
ment à la surface. Au point de vue anatomique, leucotriènes et prostaglandines. Il apparaît de la
l’amygdale n’est qu’une portion de la muqueuse douleur, de la rougeur, de la chaleur et un gon-
buccopharyngienne, plissée sur elle-même, dont flement. Une cascade biochimique (complément)
Chapitre 11. Infections pharyngées et péripharyngées 197
Immunisation normale
de l’enfant
Le nourrisson naît avec un capital immunitaire Figure 11.3. Taux des IgM dans le sérum en fonction
suffisant qui lui est donné par la mère (fig. 11.3). de l’âge.
Cette résistance aux infections s’estompe progres- Sauvage J.-P., Bessède J.-P. Révisions accélérées en ORL. Paris :
Maloine, 1987, p. 138 (figure 41).
sivement jusqu’à atteindre la période critique du
6e mois où la sienne commence tout juste à se
former. Puis ce capital se reconstitue progres- fragilité maximale s’étend du 6e au 18e mois. Puis
sivement pour redevenir équivalent à celui d’un sa résistance augmente peu à peu et, à partir de
adulte lorsque l’enfant atteint l’âge de 7 ans. l’âge de 7 ans, il n’apparaît de nouvel épisode
Cliniquement, le nourrisson est donc à l’abri des infectieux qu’en cas de rencontre avec un germe
conflits infectieux jusqu’au 5e mois. La période de inconnu ou mutant.
198 ORL thématique
Chez la plupart des enfants, l’immunisation maternelle. Parfois, une contamination d’ori-
vis-à-vis des agents microbiens et viraux se fait de gine familiale peut être mise en évidence : sinu-
façon silencieuse et inapparente. L’enfant n’est site chronique, bronchite chronique favorisée
pratiquement jamais malade et tout se résume à par le tabagisme chez un ou les deux parents.
un nez qui coule ou à un accident fébrile sur- • Ailleurs, il existe un terrain immunologique
venant de loin en loin. déficient dont attestent des antécédents fami-
liaux particuliers. Chaque contact avec un nou-
veau virus ou un nouveau germe déclenche
Immunisation difficile une rhinopharyngite aiguë fébrile, une otite,
chez l’enfant une bronchite, voire de simples accès fébriles
itératifs ou subintrants. Le nez coule en perma-
Chez de nombreux enfants, l’immunisation se nence et seul l’été apporte une franche amélio-
fait de façon bruyante. Le rôle du médecin est de ration. L’interrogatoire découvre dans la famille
leur permettre d’arriver à l’âge de 7 ans indemnes des antécédents d’asthme, d’allergie, d’otites
de toute séquelle : pas d’otite chronique, pas de de l’enfance ; les cicatrices d’amygdalectomie
cardiopathie ni de néphropathie d’origine strep- témoignent chez les parents de difficultés au
tococcique. cours de leur propre enfance.
La succession de ces étapes n’est pas obli- L’attitude thérapeutique comporte :
gatoire. Certaines d’entre elles peuvent être • la lutte contre les surinfections bactériennes
atteintes directement ; ailleurs, l’évolution tourne dominées par Streptococcus pneumoniae et à un
court. Rien ne permet de prévoir le cours de moindre degré Haemophilus influenzae (vacci-
l’immunisation, sinon la fréquence d’antécédents nation). Les otites à répétition sont au premier
identiques chez les parents. plan (cf. chapitre 5). Les ethmoïdites à Haemo-
philus influenzae sont plus rares mais bruyantes
(cf. chapitre 10) ;
Première étape : de 0 à 5 mois • la prévention des épisodes rhinopharyngés, qui
passe surtout par la soustraction au milieu
Les infections sont exceptionnelles. Lorsqu’elles
infectieux (encadré 11.2).
surviennent, il s’agit généralement de germes
dangereux : otites à Gram négatif ou staphylo-
coques résistants. Troisième étape
L’hyperplasie lymphoïde au niveau de l’anneau
Deuxième étape : de Waldeyer entre en scène, généralement entre
de 6 mois à 3 ans 3 et 5 ans.
L’hyperplasie de l’amygdale pharyngée (végé-
Le conflit entre agents pathogènes et défenses
tations adénoïdes), conséquence des rhinopha-
immunitaires siège dans le rhinopharynx, du fait
ryngites à répétition, inaugure cette nouvelle
de la respiration nasale obligatoire du nourrisson.
période. Puis l’apparition d’une respiration buc-
Ce sont donc les rhinopharyngites qui dominent
cale provoquée par l’obstruction rhinopharyngée
la scène. Deux ordres de circonstances favori-
déplace alors le théâtre des infections du cavum
santes sont possibles.
à 1’oropharynx avec manifestations itératives au
• L’enfant reçoit des stimulations infectieuses
niveau des amygdales palatines.
trop fortes pour son âge. C’est habituellement
le cas d’un enfant mis en crèche vers l’âge de
Végétations adénoïdes
6 à 18 mois, âge où il est justement particu-
lièrement fragile aux infections. C’est encore Elles se développent dans une cavité aux parois
l’histoire d’un cadet constamment contaminé osseuses inextensibles dans laquelle débouchent les
par un aîné « porteur sain » fréquentant l’école deux trompes d’Eustache (fig. 11.4). Le diagnostic
Chapitre 11. Infections pharyngées et péripharyngées 199
Encadré 11.2
Encadré 11.3
Angines
La plupart des angines sont d’origine virale, peu à une agranulocytose, à une primo-infection
fébriles et associées à une rhinite et à de la toux. par le VIH.
L’odynophagie aggravée par la déglutition évo- Les angines nécessitant un traitement antibio-
lue spontanément favorablement en 3-4 jours. tique (amoxicilline) sont celles dont le test de
Un même germe peut donner plusieurs aspects diagnostic rapide (TDR) est positif. Ce test,
cliniques. La classification reste donc anatomo- systématique après l’âge de 3 ans, détecte la
clinique. présence de streptocoque bêta-hémolytique du
• Angines érythémateuses et érythémato-pulta- groupe A (SGA), responsable de la scarlatine, de
cées (80 à 90 % des cas). la glomérulonéphrite aiguë et surtout du rhuma-
• Angines pseudo-membraneuses faisant sus- tisme articulaire aigu (RAA) pouvant laisser des
pecter une mononucléose infectieuse ou une séquelles cardiaques valvulaires. L’antibiothéra-
diphtérie (restant possible en Algérie en Afrique pie pour prévenir le RAA est efficace jusqu’au
et dans les pays de l’ex-Union soviétique). 9e jour. On peut attendre avec du paracétamol et
• Angines vésiculeuses, toujours d’origine des boissons abondantes pour faire saliver.
virale : gingivo-stomatite herpétique et her- Chez l’adulte, un score de Mac-Isaac ≤ 2 per-
pangine. Le zona pharyngien et buccal est met de ne pas faire de TDR et de ne pas pres-
caractéristique par sa topographie unilatérale. crire d’antibiotiques (score calculé de la façon
• Angines ulcéreuses unilatérales recouvertes suivante : fièvre > 38 °C = 1 ; absence de toux
d’un enduit blanchâtre : angine de Vincent à = 1 ; adénopathies cervicales sensibles = 1 ;
anaérobies. En cas d’ulcérations nécrotiques augmentation du volume des amygdales ou
et hémorragiques, penser à la leucémie aiguë, présence d’exsudats = 1 ; âge > 44 ans = -1).
Angines.
A : à fausses membranes de la mononucléose infectieuse. Sont associées : une asthénie importante, des
adénopathies diffuses, une hépatomégalie, une éruption cutanée. B. Ulcération d’une angine de Vincent.
Chapitre 11. Infections pharyngées et péripharyngées 201
Formes de l’adulte
Il y a des écoulements postérieurs. Le patient dit :
« Je ne mouche pas ». Un simple courant d’air
déclenche une pharyngite ou une angine avec
Figure 11.5. Angine érythémateuse sur amygdalite
des poussées fébriles à 40 °C. La gorge est irritée
cryptique. en permanence avec sensations de « peaux qu’on
n’arrive pas à décrocher », il y a des raclements
érythémateuses ou érythémato-pultacées hémorragiques, surtout le matin au réveil. Les
s’accompagnant d’adénites cervicales (fig. 11.5). oreilles bourdonnent et les épisodes de dysphonie
Dans l’intervalle de deux accidents pharyngés, se multiplient. Toute cette symptomatologie est
la persistance d’adénites et de cryptes amygda- liée aux conséquences de l’inflammation pha-
liennes infectées (exsudats) est un bon argument ryngée muqueuse chronique. Ici encore, l’âge et
pour l’indication opératoire. les antécédents constituent d’importants repères
En l’absence d’angines, l’amygdalectomie est (vidéo 11.2 ).
justifiée en cas d’hypertrophie obstructive se
manifestant par des troubles du sommeil (apnées, Adolescent et adulte jeune
énurésie, agitation) et un défaut de concentration
diurne. L’adolescence est brutalement marquée par un
En cas de tuméfaction unilatérale de l’amygdale retour de la pathologie amygdalienne, généra-
palatine, rapidement évolutive, une amygdalec- lement au moment d’un changement de milieu
tomie unilatérale à visée diagnostique peut être antigénique : internat, métier exercé dans le froid,
proposée (lymphome). sorties nocturnes arrosées, et autrefois service
militaire. Le patient fait des angines bactériennes
Quatrième étape : après 7 ans à chaque refroidissement. Les amygdales palatines
restent très grosses, anfractueuses et infectées,
L’évolution déjoue les pronostics et le nez reste laissant sourdre du pus à la pression des cryptes.
bouché, les accès fébriles persistent. La pathologie C’est l’âge du phlegmon d’amygdale (cf. infra).
se localise aux fosses nasales et aux sinus maxil- Parfois, un contexte de rhinite spasmodique
laires qui sont maintenant bien développés. associée attire l’attention sur une origine aller-
Le tableau typique de la rhinosinusite chronique gique. Il apparaît des poussées de rhinorrhée
de l’enfant comporte une obstruction nasale quasi séreuse claire, d’obstruction nasale et d’éternue-
permanente avec rhinorrhée séreuse chronique. ment en période pollinique, à une date fixe suivant
À la rhinoscopie, il existe une hyperplasie de la l’allergène en cause. Il faut faire noter ces dates
muqueuse avec cornets inférieurs hypertrophiés pour anticiper un traitement antihistaminique à
œdémateux pâles et violacés, obstruant toute la débuter une quinzaine de jours auparavant.
fosse nasale. Les clichés radiologiques en inci- Quant aux ulcérations unilatérales taillées à
dence de Blondeau donnent l’aspect caractéris- pic de l’angine de Vincent, elles évoquent l’asso-
tique « en cadre ». ciation fuso-spirillaire classique. Une mauvaise
Une enquête allergologique soigneuse doit être hygiène dentaire est habituellement la cause de
entreprise : interrogatoire, dosage des IgE, test ces ulcérations amygdaliennes à anaérobies (cf.
de provocation nasale. Une réduction chirurgicale encadré 11.3, fig. B).
202 ORL thématique
Encadré 11.4
Après 50 ans
Signes de complication après une
Certains sujets, jusque-là sans problèmes ORL, angine évoluant depuis plusieurs
voient apparaître les manifestations de l’atrophie jours
muqueuse. Chez la femme, elle est généralement • Symptômes pharyngés bilatéraux devenant
post-ménopausique : sensations de sécheresse unilatéraux.
nasale ou pharyngée avec croûtes nasales nau- • Trismus traduisant l’atteinte inflammatoire
séabondes et rhinorrhée postérieure paradoxale. des muscles masticateurs, faisant évoquer un
Seuls les soins locaux en station thermale appor- phlegmon péri-amygdalien ou une infection
tent quelque soulagement à ces malades. préstylienne (diagnostic différentiel : accident
Mais l’adulte est aussi souvent victime des mani- de la dent de sagesse et tétanos).
festations de l’angoisse induisant des dysesthésies • Torticolis récent peu douloureux avec
dépourvues de substratum clinique évocateur. On inclinaison latérale du cou, rotation de la tête
et regard positionné vers le haut, traduisant
parle de globus hystericus pour les dysesthésies
l’atteinte inflammatoire du fascia cervical
du carrefour pharyngo-laryngo-trachéal, de pares- prévertébral, rencontré dans les adénites
thésies pharyngées pour les sensations siégeant au rétropharyngiennes et rétrostyliennes (diag-
niveau de 1’oropharynx et de la base de langue, nostic différentiel : torticolis post-trauma-
et de glossodynie pour les sensations situées sur la tique, spondylodiscite cervicale).
langue. Encore faut-il s’assurer par une surveillance • Tuméfaction cervicale unilatérale haut
minimale que ces symptômes ne correspondent située, déjetant le lobule de l’oreille et
pas à une pathologie carcinologique, notamment comblant l’espace rétromandibulaire, tradui-
chez l’alcoolo-tabagique, et le diagnostic de pares- sant une parotidite souvent associée à une
thésies pharyngées ne peut être affirmé qu’après sous-maxillite évoquant une infection présty-
lienne.
un examen ORL soigneux et répété.
• Tuméfaction cervicale unilatérale sous-
parotidienne, témoignant d’une adénite
rétrostylienne dont on ne palpe que le pôle
Complications locorégionales inférieur.
des pharyngites • Tuméfaction cervicale unilatérale située à la
partie moyenne du cou : adénite jugulo-caro-
tidienne dont on peut distinctement sentir le
Les complications cervicales infectieuses bacté- pôle supérieur.
riennes des pharyngites de l’adulte et de l’enfant
Chapitre 11. Infections pharyngées et péripharyngées 203
surveillant la ventilation et l’état de vigilance du se continue vers le bas avec l’espace rétrovis-
patient. Chez l’enfant, cet examen peut décom- céral puis dans le médiastin supérieur jusqu’à la
penser l’état respiratoire. Il faut disposer d’une bifurcation trachéale ;
aspiration, car un contact appuyé de l’abaisse- • Latéralement, se trouvent deux espaces. L’un,
langue contre la paroi pharyngée risque d’entraî- antérieur, est para-amygdalien, ou préstylien ;
ner la fistulisation d’un abcès péripharyngé avec l’autre, postérieur, est sous-parotidien pos-
risque de pneumopathie d’inhalation. térieur ou rétrostylien. Ils sont séparés l’un
de l’autre par le rideau stylien qui comporte
des muscles et des aponévroses tendues depuis
Anatomie l’apophyse styloïde jusque vers le pharynx et
l’os hyoïde :
L’espace péripharyngé entoure le pharynx comme – l’espace préstylien, situé en dedans de la
un fer à cheval ouvert en avant. Il est cloisonné en loge parotidienne et en dehors de la région
trois parties (fig. 11.6) : amygdalienne, s’ouvre en bas vers la région
• l’une, postérieure médiane, est l’espace rétro- sous-maxillaire. Il ne contient que de la
pharyngé, limité en avant par la paroi pos- graisse facile à identifier à la TDM par une
térieure du pharynx, en arrière par l’aponévrose opacité triangulaire,
prévertébrale, et latéralement, classiquement, – l’espace rétrostylien ou sous-parotidien
par les lames de Charpy. L’espace rétropharyngé postérieur est situé en arrière de la région
contient des ganglions lymphatiques qui régres- parotidienne sous la partie haute du muscle
sent vers 7 à 8 ans. L’espace rétropharyngé sterno-cléido-mastoïdien. Il contient les gros
vaisseaux du cou, carotide interne et jugulaire • médialement, dans le cas d’une parotidite ;
interne, et les nerfs qui les accompagnent, • antérieurement, dans le cas d’une atteinte de
le glosso-pharyngien, le pneumogastrique, l’espace rétrostylien (espace carotidien des
le grand hypoglosse et, à sa partie toute radiologues) ;
supérieure, le spinal. L’espace rétrostylien • postérieurement, dans le cas d’une atteinte
se continue directement vers le bas avec la inflammatoire du muscle ptérygoïdien interne
région jugulo-carotidienne. d’origine dentaire.
Les atteintes de l’espace rétropharyngé sont
Diagnostic topographique localisées en arrière du pharynx et en dedans
radiologique de la carotide interne. Les espaces rétropha-
ryngé et rétrostylien sont en étroite continuité
Le diagnostic topographique radiologique se fait anatomique. Pour décider d’une voie d’abord
par rapport à la graisse préstylienne (fig. 11.7). de drainage endobuccale ou par cervicotomie,
Si un drainage chirurgical est décidé, il faut aussi il faut repérer la position d’un abcès rétro-
localiser le paquet jugulo-carotidien (cf. infra). pharyngé et/ou rétrostylien par rapport à la
L’acquisition TDM est réalisée d’emblée avec carotide interne.
un produit de contraste. Elle doit inclure la
base du crâne et descendre jusqu’au médiastin Étage sous-hyoïdien
inférieur. Avant 3 ans, une sédation profonde ou
Les collections sont recherchées en avant dans
une anesthésie générale sont nécessaires.
l’espace viscéral autour de la thyroïde et de l’axe
laryngo-trachéal, et en arrière dans l’espace rétro-
Étage sus-hyoïdien
pharyngé puis rétro-œsophagien. Toute anomalie
En cas de disparition de la clarté graisseuse, il péripharyngée doit systématiquement conduire à
s’agit d’une atteinte de l’espace préstylien (espace explorer l’étage médiastinal.
parapharyngé des radiologues). L’injection de produit de contraste distingue
Si la clarté graisseuse est encore visible, il les différents types d’atteinte par une prise de
faut apprécier la direction dans laquelle elle est contraste modérée et mal limitée. La cellulite
déplacée : infiltre les tissus graisseux. La fasciite épaissit les
• latéralement, dans le cas d’un phlegmon péri- aponévroses. La myosite infiltre les muscles. Une
amygdalien ; collection se manifeste par une zone délimitée
Adénites rétropharyngées
et rétrostyliennes
Figure 11.10. Vue TDM d’un phlegmon péri-amygdalien
Elles s’observent le plus souvent chez l’enfant, car
gauche collecté.
Flèche rouge : collection. Flèche blanche : luette ces ganglions régressent habituellement vers l’âge
œdématiée. Astérisque blanc : graisse préstylienne de 7 ans. Les rhinopharyngites sont plus souvent
refoulée latéralement. en cause que les angines. Comme pour toute
adénite, leur histoire naturelle passe par les stades
(fig. 11.9). La TDM n’est pas indispensable au d’adénophlegmon présuppuratif puis collecté.
début (fig. 11.10). Cette ponction confirme la Tantôt ces adénopathies appartiennent au
présence d’une collection purulente et élimine groupe rétropharyngé paramédian (fig. 11.11),
l’existence d’un pseudo-anévrysme de la carotide entraînant un bombement antérieur de la paroi
qui peut mimer un phlegmon péri-amygdalien. pharyngée postérieure, tantôt elles sont rétrosty-
Une incision-drainage peut être pratiquée ensuite. liennes, provoquant un bombement souvent dis-
L’antibiotique en première intention est encore cret situé en arrière du pilier postérieur ainsi
l’association amoxiciline-acide clavulanique. qu’un empâtement cervical de la région sous-
L’imagerie est habituellement inutile. parotidienne. Que la localisation soit rétropharyn-
On distingue le phlegmon antérieur, où le gée ou rétrostylienne, l’inflammation de la lame
bombement prédomine au pôle supérieur du prévertébrale du fascia cervical est responsable
pilier antérieur, et le phlegmon postérieur, plus d’un torticolis (fig. 11.12 et 11.13).
Chapitre 11. Infections pharyngées et péripharyngées 207
Dans les formes évoluées, ces adénites s’éten- respiratoire, mais limités à une dose unique. Quand
dent aux deux territoires rétropharyngé et rétro- le diamètre des lésions radiologiques est inférieur
stylien. En revanche, du fait de l’existence d’une à 1,5 cm, un traitement médical exclusif peut être
coque (capsule ganglionnaire ou coque d’abcès) tenté, même si le scanner montre une hypoden-
freinant leur extension, elles ne s’étendent habi- sité centrale cernée par un halo rehaussé par le
tuellement pas au-delà de ces deux espaces. contraste. En cas d’échec ou de taille supérieure à
Notons enfin que ces adénites sont habituelle- 2 cm, le drainage chirurgical est indiqué. Il se fait
ment médianes par rapport aux gros vaisseaux du par voie endobuccale, à condition que l’infection
cou, ce qui a des répercussions sur le choix de la voie soit située en dedans de la carotide interne sur
d’abord en cas de drainage chirurgical (cf. infra). l’imagerie ; sinon, il se fait par voie externe.
La prise en charge médicale ne doit pas uti- La principale complication d’un adénophleg-
liser d’antalgiques dépresseurs respiratoires. Les mon rétrostylien est la survenue d’un pseudo-
corticoïdes sont prescrits en cas d’obstruction anévrysme mycotique carotidien, annoncé par la
208 ORL thématique
Figure 11.16. TDM d’un abcès préstylien droit chez un enfant âgé de 5 ans.
A. Refoulement de l’amygdale palatine en dedans. B. TDM : abcès avec disparition de la graisse préstylienne droite.
Évacuation par amygdalectomie.
tuméfaction cervicale. La palpation peut détecter pourcentage d’entre elles est sécréteur de bêta-
une crépitation sous-cutanée témoignant d’une lactamases. La flore pathogène est le plus souvent
production de gaz par les germes impliqués. Le plurimicrobienne, ce qui représente un facteur de
déterminisme par lequel certains individus sont virulence accru.
prédisposés au risque de développement d’une
cellulite reste à élucider. Des patients infectés avec
la même souche bactérienne peuvent développer `` Compléments en ligne
des manifestations très différentes. Ces différences
peuvent s’expliquer par une réponse variable de Des compléments numériques sont associés à ce
l’hôte à certains facteurs de virulence des bac- chapitre, ils sont indiqués dans le texte par un
téries, comme s’il existait une susceptibilité du picto . Ils proposent les vidéos du chapitre.
patient à l’infection. Pour voir une vidéo, scannez le flashcode corres-
Les cellulites cervicales profondes engagent le pondant à l’aide de votre smartphone ou de votre
pronostic vital, soit du fait de la sévérité de tablette, ou connectez-vous sur http://www.em-
l’atteinte générale (infection sévère, choc sep- consulte.com/e-complements/474503 et suivez
tique, syndrome de défaillance multiviscérale), soit les instructions.
du fait de l’extension médiastinale du processus
infectieux : défaillance respiratoire par obstruction Vidéo e11.1. Caséum dans le récessus de Tortual.
des voies aériennes, médiastinite, pleurésie puru- Le patient se plaint d’odynophagie droite depuis de
lente, péricardite avec risque de tamponnade. nombreuses années. La pression sur l’amygdale palatine
droite au niveau du récessus de Tortual fait sourdre une
La prise en charge de ces patients nécessite la importante quantité de caséum, et même si importante
réunion en urgence d’une équipe multidiscipli- qu’on peut se demander s’il ne s’agit pas de l’orifice
naire. Le traitement médical associe les mesures interne d’une fistule de la 2e fente borgne, c’est-à-dire
de réanimation générale à une antibiothérapie, à sans orifice cutané cervical.
posologie élevée. Le traitement chirurgical doit
être précoce, répété et radical pour contrôler
l’extension de l’infection. Son objectif est de
laver et de drainer les espaces concernés. Le choix
des incisions tient compte des espaces cervicaux
atteints : incision oblique suivant le bord anté-
rieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien, voire Vidéo e11.2. Amygdalite chronique.
Patiente d’une trentaine d’années, handicapée par des
incision en U bimastoïdienne. maux de gorge à répétition. L’examen de l’oropharynx
montre des amygdales palatines enchatonnées avec
cryptes remplies de caséum blanchâtre. Il n’y a aucun
Bactériologie antécédent de phlegmon péri-amygdalien. On refuse
l’amygdalectomie en raison de la présence d’un ptyalisme
Pour les adénites cervicales suppurées, les germes (sialorrhée ou hypersialie) s’observant dans les névroses,
la grossesse, les aphtoses, la myasthénie et des
en cause sont Staphylococcus aureus et Streptococ- intoxications diverses (mercure).
cus pyogenes. Mais souvent, aucun germe n’est
retrouvé. Les bactéries impliquées dans les phleg-
mons péri-amygdaliens, les infections péripharyn-
gées et les cellulites cervicales ont pour origine la
flore commensale oro- et nasopharyngée. Un fort
Chapitre 12
Urgences : hémorragies,
dyspnées laryngées, corps
étrangers, brûlures caustiques
pharyngo-œsophagiennes
Points forts j À la radio pulmonaire, les corps étrangers
j La plupart des épistaxis à répétition de l’enfant trachéo-bronchiques de l’enfant sont situés du côté
sont en rapport avec une hyperhémie de la tache le plus clair (emphysème par trapping aérien).
vasculaire et sont traitées par cautérisation. j Dans les brûlures caustiques de
j Chez le jeune garçon présentant des l’œsophage, une œsophagoscopie doit
épistaxis à répétition avec obstruction nasale, être réalisée dans les 48 heures.
penser au fibrome nasopharyngien.
j Chez l’adulte, il faut évaluer la gravité de Les urgences ORL représentent de vraies détresses
l’épistaxis sur sa durée (plusieurs jours), vitales. Les gestes utiles sont souvent considérés
sur l’existence d’une hypovolémie, d’une comme violents et dramatiques : tamponnement
anémie aiguë et sur les antécédents (risque
pour épistaxis, intubation difficile, trachéotomie à
mortel en cas de coronaropathie).
j Une TDM, voire une IRM, doivent être
la volée, ablation des corps étrangers.
demandées en urgence dans les épistaxis
secondaires à un traumatisme crânien ou Hémorragies
associées à une exophtalmie pour rechercher
une fistule carotido-caverneuse.
j Dans les épistaxis, l’escalade thérapeutique La vascularisation cervico-faciale est assurée par le
comporte un tamponnement antérieur, puis des système carotidien externe qui est connecté au sys-
sondes à double ballonnet, puis des ligatures de tème carotidien interne par l’artère ophtalmique. Les
l’artère sphéno-palatine et des artères ethmoïdales. hémorragies ORL ne sont pas toujours extériorisées.
L’embolisation ne peut être utilisée que pour Elles sont aussi souvent dégluties et sous-estimées.
l’artère sphéno-palatine et pas pour les artères Chez un patient en décubitus dorsal, seul l’examen
ethmoïdales qui dépendent de la carotide interne. de l’oropharynx peut surveiller la persistance ou
j Une épistaxis chez un menuisier doit faire penser
l’arrêt de l’hémorragie. Enfin, certaines techniques
aux adénocarcinomes de l’ethmoïde professionnels.
j La maladie de Rendu-Osler est une maladie opératoires ORL reposent sur l’hémostase sponta-
génétique à caractère dominant, caractérisée née : amygdalectomie, adénoïdectomie et chirurgie
par des télangiectasies nasales commençant endoscopique des sinus. La chirurgie ambulatoire
à saigner à partir de 20 à 30 ans. dans ces conditions n’est pas exempte de risques.
j Une dyspnée laryngée est une bradypnée inspiratoire.
j La laryngite œdémateuse sous-glottique de l’enfant
se présente avec une dyspnée laryngée rapidement Épistaxis
progressive, un tirage, un cornage, une voix
rauque et une toux aboyante caractéristique. Le C’est l’urgence ORL la plus fréquente. Les
traitement repose sur la bétaméthasone injectable. hémorragies nasales atteindraient 5 à 10 % de la
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
212 ORL thématique
Anatomie
La vascularisation des fosses nasales repose sur
les artères ethmoïdales (carotide interne) et les
branches de l’artère sphéno-palatine (carotide
externe). La tache vasculaire (de Kisselbach) est Figure 12.2. Tache vasculaire de Kisselbach (côté droit).
une zone située à la partie antéro-inférieure de la
cloison nasale. Elle est constituée d’anastomoses • l’épistaxis postérieure, où l’écoulement sanglant
de l’artère nasopalatine avec l’artère de la sous- se fait sur la paroi pharyngée postérieure en
cloison (artère faciale) et avec les branches de arrière du voile du palais. Il est surtout visible à
l’artère ethmoïdale antérieure (fig. 12.1). l’examen de l’oropharynx.
En fonction de l’abondance du saignement, on
Clinique distingue encore deux autres formes :
Chez un patient tête droite, en position assise, • l’épistaxis de faible abondance, mais pouvant
les hémorragies nasales se distinguent en deux devenir grave par sa répétition ;
variétés topographiques : • l’épistaxis de grande abondance, reconnue non
• l’épistaxis antérieure, où l’écoulement se fait pas tant sur une extériorisation impressionnante
par les narines. La rhinoscopie antérieure met que sur les signes d’examen :
en évidence la zone qui saigne : tache vasculaire – pâleur des téguments, décoloration des
de Kisselbach à la partie antéro-inférieure de la lèvres, anxiété, agitation, lipothymies,
cloison (fig. 12.2), convexité du cornet infé- – accélération du pouls, chute de la tension
rieur, ou encore plancher des fosses nasales ; artérielle,
– numération sanguine ou hématocrite témoi-
gnant de la spoliation sanguine,
– on profite des prélèvements sanguins pour
déterminer le groupe sanguin et évaluer la qua-
lité de la coagulation : taux de prothrombine
(TP) et taux de prothrombine normalisé (INR),
temps de céphaline activée (TCA), groupe Rhé-
sus, recherche d’agglutinines irrégulières (RAI).
Le facteur pronostic essentiel est l’ancienneté
de l’hémorragie : extériorisée depuis plusieurs
jours, sans compter le sang dégluti.
Diagnostic étiologique
II repose sur l’âge du sujet, sur l’interrogatoire et
Figure 12.1. Vascularisation des fosses nasales (septum). quelques examens complémentaires.
1 : artère ethmoïdale postérieure ; 2 : nerf nasopalatin ;
3 : artère nasopalatine ; 4 : vomer ; 5 : artère ethmoïdale Parfois, la cause est évidente
antérieure ; 6 : tache vasculaire ; 7 : artère de la • Traumatisme : il peut s’agir d’une simple contu-
sous-cloison ; 8 : arcade coronaire supérieure.
Dufour X., Lebreton J.-P., Gohler C., et al. Épistaxis. EMC, Paris
sion jusqu’à la fracture des os propres du nez.
(Elsevier Masson), ORL, 2010 : 1-7 [Article 20-310-A-10]. Une épistaxis qui s’éclaircit progressivement
Chapitre 12. Urgences 213
Prise en charge
Dans tous les cas, le premier geste est de faire
moucher les caillots. On est souvent impressionné
par leur taille. Ce geste suffit souvent à arrêter le
saignement (au moins provisoirement).
Formes bénignes
Elles cèdent le plus souvent à la compression de
l’aile du nez contre la cloison ou à la mise en
place d’un tamponnement vestibulaire à la partie
antérieure des fosses nasales (alginate de calcium
ou produit résorbable, cf. encadré 12.1). Après
anesthésie locale de contact, on pourra pratiquer
une cautérisation chimique (cf. partie 2, fiche
« Cautérisation de la tache vasculaire ») du point
qui saigne par application de nitrate d’argent, de
Figure 12.4. Télangiectasies de la maladie de Rendu-Osler.
solution d’acide chromique ou d’acide trichlora-
Sur la langue, la lèvre inférieure et le menton, elles sont cétique (fig. 12.5).
protégées par l’épaisseur de l’épithélium et ne saignent pas.
Formes moyennes et graves
(escalade thérapeutique)
reçu jusqu’à 200 ou 250 transfusions sanguines Mieux vaut hospitaliser le sujet pour placer un
au cours de leur vie. Le pronostic est aux loca- abord veineux de bon calibre et une surveillance
lisations pulmonaires, hépatiques et cérébrales ; de la volémie. Le traitement général vise à calmer
• l’artériosclérose explique le caractère récidivant l’anxiété du malade et à compenser le choc
de l’épistaxis chez les personnes âgées. Ce sont hémorragique. Le traitement local dépend de la
de micro-anévrysmes se développant sur les topographie du saignement.
branches muqueuses de l’artère sphéno-pala- • Le patient est en position assise ou demi-assise
tine, souvent dissimulés sous l’auvent du cornet (fig. 12.6). On commence par un tampon-
moyen. C’est presque toujours une hémorragie nement antérieur. Après avoir fait moucher
de grande abondance, souvent postérieure et les caillots, à l’aide d’une pince de Politzer,
précédée de céphalées. on introduit une longue mèche de coton
hydrophile imbibée de Xylocaïne naphazoline® dégluti. En fonction des moyens dont on dis-
pour anesthésier la cavité nasale et entraîner une pose, il peut s’agir d’un tamponnement posté-
vasoconstriction réduisant l’hémorragie. On rieur ou nasopharyngien classique (cf. partie 2,
laisse la mèche en place pendant 10 minutes. fiche « Tamponnements choanal et nasopha-
Ensuite, on introduit le tamponnement avec la ryngien ») ou d’une coagulation de l’artère
pince de Politzer en restant dans un plan paral- sphéno-palatine par voie endoscopique :
lèle au plancher de la fosse nasale (cf. figure de – hémostase de l’artère sphéno-palatine :
l’encadré 12.1). Le tamponnement peut être la lame verticale du palatin est repérée en
constitué de mèche grasse, de mèche résor- regard de la queue du cornet moyen et la
bable, de mèche à base d’alginate de calcium. muqueuse est incisée verticalement. Le lam-
• En cas d’échec du tamponnement antérieur, on beau muqueux est décollé en sous-périosté
réalise un tamponnement antéro-postérieur jusqu’à la découverte du foramen sphéno-
avec une sonde à double ballonnet (fig. 12.7). palatin. Les branches de l’artère sphéno-pala-
Après anesthésie locale, la sonde lubrifiée avec tine sont repérées, puis coagulées ou clippées
de la glycérine est introduite en totalité dans la (fig. 12.8 et vidéo 12.1 ) ;
cavité nasale. Le ballonnet postérieur est gonflé – hémostase des artères ethmoïdales : on
en premier à l’aide de sérum physiologique. Puis pratique une incision cutanée verticale cur-
on le tire vers l’avant pour qu’il se bloque dans la viligne entre la racine du sourcil et le sillon
choane. On gonfle alors doucement le ballonnet para-latéro-nasal (canthotomie). Le périoste
antérieur pour obstruer complètement toute la est ruginé en respectant le ligament palpébral
fosse nasale et arrêter l’hémorragie. Le risque interne. L’artère ethmoïdale antérieure, située
d’escarres oblige à le dégonfler toutes les 6 heures à 2 cm du rebord orbitaire interne, est coagu-
et à ne pas le laisser en place plus de 36 heures. lée et/ou clippée. L’artère ethmoïdale pos-
• Après un temps d’observation, si l’examen de térieure est située 15 mm en arrière de l’artère
l’oropharynx confirme la persistance d’une ethmoïdale antérieure et à 5 mm en avant
hémorragie postérieure, il faut passer à un geste du canal du nerf optique. Compte tenu du
sous anesthésie générale. Il faut toutefois risque de cécité, mieux vaut se contenter d’un
accepter un risque élevé d’inhalation de sang tamponnement avec du matériel résorbable.
216 ORL thématique
Encadré 12.1
1D’après Huth J. Méchage des fosses nasales : actualités. La lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale 2015 ;
340 : 25-26.
Figure 12.8. Foramen sphéno-palatin et artère sphéno-palatine (paroi latérale des fosses nasales).
1 : branche du septum nasal de l’artère labiale supérieure ; 2 : septum nasal relevé ; 3 : rameau nasal externe de l’artère
ethmoïdale antérieure ; 4 : rameaux alaires de l’artère nasale ; 5 : anastomose entre la branche septale inférieure de
l’artère sphéno-palatine et l’artère grande palatine dans le canal incisif ; 6 : anastomose entre le rameau septal de l’artère
sphéno-palatine et l’artère grande palatine dans le canal incisif ; 7 : rameau septal et nasal latéral de l’artère ethmoïdale
postérieure ; 8 : rameau septal postérieur de l’artère sphéno-palatine ; 9 : artère sphéno-palatine ; 10 : foramen
sphéno-palatin ; 11 : rameaux nasaux postérolatéraux de l’artère sphéno-palatine ; 12 : artère maxillaire ; 13 : artère
grande palatine.
Dufour X., Lebreton J.-P., Gohler C., et al. Épistaxis. EMC, Paris (Elsevier Masson), ORL, 2010 : 1-7 [Article 20-310-A-10].
Dyspnées laryngées
Une dyspnée d’origine laryngée se caractérise par
une bradypnée inspiratoire avec tirage et cornage.
La bradypnée inspiratoire s’oppose à la bradypnée
expiratoire de l’asthme. Le tirage peut être sus-
claviculaire, sus-sternal, épigastrique ou intercos-
tal. Le cornage est inspiratoire et représente le
bruit provoqué par le passage de l’air au travers de
la filière laryngée rétrécie. Les troubles de la voix
donnent une indication sur le siège de l’obstacle :
Figure 12.9. Angiofibrome de la cloison.
• cordes vocales (glotte) : il y a une dysphonie
associée (sauf dans la paralysie des dilatateurs de
les 24 heures suivant l’acte opératoire. Mais elles la glotte) ;
peuvent aussi survenir par chute d’escarre jusqu’au • sous-glotte : la voix est conservée ;
8e jour après l’intervention. Il faut faire une • sus-glotte (ou vestibule laryngé) : la voix est
ligature serrée des piliers antérieur et postérieur. étouffée.
Chapitre 12. Urgences 219
Nourrisson
Clinique
Jusqu’à 6 mois, l’origine laryngée de la dyspnée
peut être difficile à reconnaître car la polypnée y
est plus fréquente que la bradypnée. Lorsque la
polypnée devient superficielle, il s’agit d’un signe Figure 12.10. Syndrome de Pierre Robin.
de gravité majeur qui précède de peu les troubles Glossoptose à la naissance avec langue verticale
de la conscience et la cyanose. Il s’y associe obstruant l’oropharynx. Seule l’expiration est possible.
fréquemment un stridor : bruit de gloussement Il faut désenclaver la langue à la naissance et mettre en
place une canule de Riedel. S’il existe une malformation
inspiratoire ressemblant au cri du dindon. associée (division palatine), envisager une trachéotomie.
complémentaire n’est nécessaire (fig. 12.12). Dans à la présence d’un corps étranger du ventricule
tous les cas, le traitement repose sur l’injection laryngé ou encore à une papillomatose laryngée.
sous-cutanée d’une ampoule de bétaméthasone
4 mg et, en même temps, une injection intramus- Épiglottite
culaire d’une deuxième ampoule. On ajoute la C’est une septicémie à Haemophilus influenzae
moitié de la dose quotidienne de prednisone orale comportant une atteinte élective et caractéris-
à raison de 1 à 2 mg/kg. Il a été aussi proposé tique de l’épiglotte. Celle-ci, œdémateuse, gon-
une oxygénothérapie aux lunettes, des aérosols de fle, énorme, entraînant le tableau caractéristique :
corticoïdes et des aérosols d’adrénaline (aérosols enfant assis, en proie à une infection générale
de Bompard1). d’allure très sévère avec frissons. Il existe une
L’enfant est mis dans une chambre calme en bradypnée inspiratoire avec tirage, majorée par les
atmosphère humide. Une antibiothérapie per tentatives d’allongement dans le lit. Il s’y associe
os comporte une amoxicilline. La surveillance une dysphagie avec sialorrhée et une voix étouffée
s’impose de demi-heure en demi-heure. La signant le siège sus-glottique de l’obstruction.
régression doit commencer une demi-heure après Dans tous les cas, l’hospitalisation est impéra-
l’institution du traitement. Si l’état de l’enfant tive. L’intubation est particulièrement difficile.
continue de s’aggraver, l’intubation endotrachéale Heureusement, la généralisation de la vaccination
est décidée. La chute de la pression partielle contre Haemophilus influenzae B fait disparaître
d’oxygène (PO) et l’augmentation de la pression cette pathologie (Infanrix-Hexa).
partielle de gaz carbonique (PCO2) sont toujours
tardives et peu fiables. Croup laryngé (diphtérie)
En cas de récidives, il faut penser aux pous-
sées inflammatoires d’angiome sous-glottique ou Bien que devenu très rare, il ne doit pas rester
ignoré. Dans la majorité des cas, il succède à une
angine diphtérique et ne pose pas de problème
1. Bétaméthasone, 2 mL (8 mg) ; adrénaline à 1/1000, diagnostique. Mais il peut s’agir d’une forme
1 à 2 mg ; sérum physiologique : 10 cc. laryngée succédant à une atteinte rhinopharyngée
222 ORL thématique
Figure 12.13. Extraction d’un corps étranger de la fosse nasale (perle chez un jeune enfant).
A. Il ne faut pas chercher à l’attraper avec une pince. On risque alors de lui faire franchir l’obstacle du cornet inférieur qui
l’empêchait de tomber dans le rhinopharynx. B. Avec une spatule courbée et fenêtrée, il faut passer au-dessus du corps
étranger et le ramener vers soi en le plaquant sur le plancher des fosses nasales en un seul geste.
brutale d’une obstruction et d’une rhinorrhée la suspicion est apportée par l’apparition brutale
unilatérale purulente, entraînant une cacosmie d’une dysphagie avec aphagie et sialorrhée.
objective. Certains corps étrangers méconnus La preuve est apportée par un simple cliché
incrustés s’entourent de couches minérales les cervical de profil qui visualise les corps étrangers
transformant en rhinolithes. métalliques (fig. 12.14). L’ingestion d’une pile
bouton est une nouveauté. Le danger est la
Hypopharynx et œsophage survenue d’une réaction chimique corrosive
entraînant une brûlure suivie de perforation
• Chez l’enfant, il s’agit souvent d’une pièce de muqueuse de la paroi œsophagienne.
monnaie bloquée au-dessus de la bouche de • Chez l’adulte, le corps étranger se situe dans
l’œsophage. Si personne n’a assisté à l’accident, l’œsophage cervical. Dans la plupart des cas,
224 ORL thématique
il s’agit de sujets édentés, porteurs de pro- son, la respiration complètement bloquée. Puis,
thèses dentaires, et le corps étranger comporte en quelques minutes, il s’abat inanimé avant que
habituellement un os pointu venant se ficher quiconque n’ait compris ce qui se passait. C’est
dans la paroi œsophagienne. Outre les signes un gros fragment alimentaire qui s’est encastré
précédents, il peut déjà y avoir des signes en dans le larynx. La seule façon de le désenclaver est
faveur d’une perforation : état fébrile, empâ- d’exécuter la manœuvre de Heimlich (fig. 12.15).
tement cervical, emphysème sous-cutané. La Cette manœuvre exploite le fait que le corps
preuve du corps étranger est également faite par étranger se bloque dans le larynx à la fin d’une
un cliché sans préparation de l’œsophage. Sur la inspiration profonde. Il y a donc une réserve d’air
TDM, l’élargissement cervico-médiastinal, un dans les poumons. Si on applique une pression
pneumomédiastin ou un épanchement pleural
sont en faveur de la perforation œsophagienne.
Dans tous les cas, la confirmation est apportée
par l’œsophagoscopie faite au tube rigide sous anes-
thésie générale avec intubation. Celle-ci doit être
proposée devant toute dysphagie brutale survenant
au cours d’un repas. Elle permet d’extraire le corps
étranger et de confirmer l’existence éventuelle d’une
déchirure de la paroi de l’œsophage. L’existence
d’une médiastinite impose le drainage chirurgical
et l’admission en réanimation médico-chirurgicale.
Toute tentative d’opacification œsophagienne avec
de la baryte doit être proscrite car, outre le risque
infectieux en cas de perforation, elle gêne la visuali-
sation du corps étranger au cours de l’endoscopie.
Larynx
Le tableau est stéréotypé. Généralement, au cours
d’un repas, le sujet se lève brutalement, porte
les mains à la gorge, incapable de prononcer un Figure 12.15. Manœuvre de Heimlich.
Chapitre 12. Urgences 225
brutale sur l’épigastre, l’hyperpression pulmo- très altéré. Chez un enfant assis, pâle, aux
naire peut obtenir l’expulsion de l’intrus. yeux cernés, surviennent de temps à autre
Chez l’enfant, toute dyspnée laryngée aiguë des quintes de toux majorant transitoirement
non fébrile est un corps étranger jusqu’à preuve l’asphyxie. L’auscultation met en évidence le
du contraire. En urgence, c’est la manœuvre classique bruit du drapeau correspondant au
de Mofenson (équivalent de celle de Heimlich). va-et-vient du corps étranger dans la trachée.
L’extraction ne peut se faire qu’avec un laryngo- Le plus urgent est de pratiquer la trachéo-bron-
scope et une pince de Magill. choscopie salvatrice.
• Deuxième situation : le syndrome de péné-
tration a été suivi d’un calme rassurant, faisant
Trachée et bronches même douter de la réalité de l’inhalation. Mais
Leurs corps étrangers sont l’apanage de l’enfant l’auscultation pulmonaire révèle l’abolition du
dès l’âge de 5 mois. Les corps étrangers végétaux murmure vésiculaire d’un côté (généralement
sont les plus fréquents : cacahuètes, amandes, le droit, car le corps étranger s’enclave dans la
noisettes et haricots qui ne doivent jamais être bronche souche la plus verticale) :
laissés à leur portée avant l’âge de 4 à 5 ans. Il – l’aspect réalisé est celui d’un emphysème obs-
s’agit aussi souvent de petits objets en plastique. tructif avec tympanisme à l’auscultation et à la
La suspicion de corps étranger trachéo-bron- radio pulmonaire : horizontalisation des côtes
chique repose sur la notion de syndrome de et hyperclarté du côté atteint (fig. 12.16
pénétration. C’est un accès de suffocation brutal, et 12.17). La cause de cet emphysème est
associé à des quintes de toux et à une cyanose. Le qu’à l’inspiration, la bronche se dilate, et qu’à
syndrome est spontanément résolutif et ne dure l’expiration, elle se contracte. L’air est donc
que quelques minutes. À lui seul, il commande piégé en aval (trapping) ; il peut s’y associer
la trachéo-bronchoscopie exploratrice, même s’il un emphysème sous-cutané.
n’y a plus aucun symptôme. Il faut prendre quand – plus rarement, il s’agit d’une atélectasie avec,
même le temps de faire des clichés pulmonaires de à la radio pulmonaire : pincement costal,
face et de profil, en expiration et en inspiration. opacité systématisée et déplacement médias-
Après ce bref bilan, trois situations sont possibles. tinal vers le côté atteint ;
• Première situation : l’intrus est mobile dans – sur les clichés, le corps étranger est parfois
la trachée et l’état général est habituellement visible lorsqu’il est radio-opaque.
Figure 12.16. Fragments de noix dans les bronches droites (enfant âgé de 3 ans).
A. Avant bronchoscopie. Emphysème discret du poumon droit avec horizontalisation des côtes et refoulement du cœur
vers la gauche. B. Après extraction.
226 ORL thématique
• Troisième situation : le corps étranger bron- • Les brûlures dans un but suicidaire, par ingestion
chique n’est découvert qu’à l’occasion d’un massive de caustiques : ici, le pronostic est vital
bilan pulmonaire effectué devant des hémop- avec risque de perforation gastrique et digestive.
tysies, une toux chronique ou un abcès du Sont en cause tous les produits contenant de la
poumon long à guérir ou récidivant, survenant soude caustique ou du chlorate de potasse. Il faut
toujours au même endroit. Dans ces corps y ajouter les acides, l’eau de Javel (seule la forme
étrangers tardivement reconnus, il n’est pas concentrée est caustique) et le permanganate de
rare de devoir procéder à une thoracotomie potassium.
latérale après une préparation antibiotique et
corticoïdes.
Dans tous les cas, la bronchoscopie sous anes-
Examen
thésie générale, au tube rigide, avec optiques Il comporte :
et pinces adaptées, s’impose. Elle confirme la • la recherche de signes en faveur d’une périto-
présence du corps étranger, reconnaît sa nature et nite ou d’une médiastinite ;
permet de l’extraire. • l’examen de la cavité buccale, sachant que
l’absence de brûlure n’est pas un argument
formel contre la brûlure œsophagienne.
Brûlures par caustiques
(voies digestives Œsophagoscopie
supérieures et œsophage)
Une fois résolus les problèmes de réanimation, une
Deux types de brûlures œsophagoscopie doit être réalisée dans les 48 pre-
doivent être distingués mières heures. Si les lésions sont trop importantes
et hémorragiques, on s’arrête à leur pôle supérieur.
• Les brûlures accidentelles de l’enfant de 2 L’œsophagoscopie peut être réalisée au tube rigide
à 8 ans, où le produit est recraché et où le ou en fibroscopie (avec pour cette dernière un
pronostic est surtout fonctionnel : risque de risque d’accident au moment de l’insufflation).
sténose définitive de l’œsophage. Cette endoscopie a au moins l’intérêt d’éliminer
Chapitre 12. Urgences 227
toute brûlure et de rassurer les parents. Un transit • Dans les formes sévères, la sonde nasogastrique
œsophagien de contrôle sera toutefois demandé de calibrage ne fait pas l’unanimité. Pour les
quatre semaines après. Ailleurs, on pourra classer uns, elle met l’œsophage au repos, le calibre
l’œsophagite en différents stades : et oblige la sténose à respecter une filière
• érythème simple (brûlure du premier degré res- droite facile à dilater. Pour les autres, elle est
pectant la musculeuse) ; irritante, provoque un reflux gastro-œsopha-
• brûlure du second degré avec atteinte de la gien et entraîne une sialorrhée. Les dilatations
musculeuse et risque de cicatrisation rétractile sont effectuées à l’aide de cathéters pourvus de
et sténosante ; ballons gonflables. Ces dilatations peuvent aussi
• brûlure du troisième degré avec diffusion péri- être réalisées par voie rétrograde avec un fil sans
œsophagienne ; fin lorsqu’une gastrostomie a été pratiquée.
• ulcération, dont le caractère circulaire est déter- • L’œsopharyngoplastie utilisant l’estomac ou le
minant pour la formation d’une sténose. côlon est le dernier recours pour rétablir une
Classiquement, on laisse en place une sonde déglutition satisfaisante. C’est une chirurgie qui
naso-œsophagienne (cf. infra). exige un plateau médico-chirurgical de qualité.
Traitement
• Il faut proscrire les lavages gastriques ou la Vidéo e12.2. Dyspnée laryngée.
provocation de vomissements à l’aide d’apo- Patient présentant depuis plusieurs semaines une
morphine, qui ne feront qu’aggraver les lésions. dyspnée laryngée aux deux temps inspiratoire et
Il faut aussi proscrire les pansements œsogas- expiratoire avec une sorte de cornage surtout expiratoire
très bruyant. Sous neuroleptanalgésie, on constate la
triques qui ne feront que gêner l’œsophago- présence d’une volumineuse formation kystique à la fois
scopie. aspirée et expirée à chaque temps respiratoire. L’incision
• Les formes légères ne requièrent pas la mise en de ce kyste permet d’aspirer une grande quantité de
place d’une sonde, mais ne doivent pas faire mucus. Le kyste est implanté à la partie antérieure du
ventricule laryngé gauche. Il est facilement réséqué.
relâcher la surveillance car le risque de sténose
tardive est toujours possible.
• Les formes graves d’emblée relèvent d’une
chirurgie de sauvetage : œsophagectomie, gas-
trectomie, etc.
A
Acouphènes
Ce sont des bruits perçus par le malade en – une surdité professionnelle ou une surdité
l’absence de stimulation acoustique extérieure. par traumatisme sonore est soupçonnée sur
On distingue les acouphènes objectifs, percep- la présence d’une « encoche » centrée sur le
tibles à l’auscultation périotique, et les acou- 4 000 Hz ;
phènes subjectifs non auscultables. – une étude des hautes fréquences au-delà de
• Les acouphènes pulsatiles et objectifs doivent 8 000 Hz est utile en cas d’acouphènes de
faire rechercher une malformation vasculaire ou tonalité aiguë avec audiométrie tonale normale
un paragangliome temporal (cf. encadré « Acou- chez un patient en cours de chimiothérapie par
phènes pulsatiles »). Parfois, ce sont des bruits sels de platine (cf. chapitre 7) ;
musculaires : myoclonies du muscle stapédien. – en cas de surdité de transmission à tympan
• Les acouphènes subjectifs non pulsatiles sont normal, la TDM recherche les hypodensités
les plus nombreux. Ils peuvent accompagner labyrinthiques de l’otospongiose ;
n’importe quel type de surdité ou rester complè- – en cas d’acouphènes unilatéraux fluctuants
tement isolés. C’est un symptôme monomorphe de tonalité grave avec atteinte sur les graves
pauvre. Le patient n’a que peu de mots pour les en audiométrie tonale, il faut rechercher des
décrire : sifflements, grésillements, jets de vapeur, symptômes d’hydrops : plénitude d’oreille,
bruits de moteur, dans l’oreille, dans toute la tête. fluctuations auditives, troubles de l’équilibre
Ce patient est surtout en demande d’un traite- (maladie de Menière, migraine) ;
ment médicamenteux. Aujourd’hui, on ne peut – une surdité de perception unilatérale pro-
que lui répondre qu’il n’y a pas de médicament gressive doit faire pratiquer une IRM à la
efficace. recherche d’un neurinome de l’acoustique ;
L’habituation devrait être la loi générale de leur – en cas de surdité sévère ou profonde, un
évolution. Toutefois, chez de nombreux patients, bilan en vue d’une implantation cochléaire peut
cette habituation ne se produit pas et la présence être programmé.
de ce symptôme angoissant signifie que plus rien • En l’absence de surdité, l’IRM est demandée
ne sera pareil et que c’est la fin des plaisirs. pour éliminer un accident vasculaire cérébral et
une tumeur de la fosse postérieure. Toutefois,
le patient doit être prévenu que l’imagerie des
Bilan ORL acouphènes est le plus souvent normale. Une
Outre l’otoscopie et l’auscultation à la recherche réponse comme la mise en évidence d’un conflit
d’un souffle dans le cadre d’un acouphène pul- vasculo-nerveux de l’angle ponto-cérébelleux
satile, il faut rechercher un trouble temporo- ne peut qu’exceptionnellement être validée, car
mandibulaire et de l’articulé dentaire (syndrome l’artère doit présenter un certain calibre, aborder
de Costen). Mais c’est le bilan auditif qui est le perpendiculairement le nerf, exercer un effet de
plus important. masse sur celui-ci au niveau de sa zone de faiblesse
• Les acouphènes peuvent apparaître en cas de à la jonction entre le nerf myélinisé et le nerf non
lésion de n’importe quel élément de la chaîne myélinisé.
de l’audition, depuis les structures de l’oreille
moyenne jusqu’au cerveau. L’audiométrie tonale Prise charge psychologique
et vocale, l’impédancemétrie doivent donc dépis-
ter une atteinte auditive et la caractériser : Si nous n’avons pas de médicament actif contre
– la découverte d’une presbyacousie fait les acouphènes, une erreur serait de déclarer au
s’engager dans une procédure d’appareillage ; patient : « Je ne peux rien faire pour vous, il n’y
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
232 Fiches ORL de A à Z
a pas de traitement, c’est dans la tête, il faut vivre à 8 000 Hz avant de retourner sur une fréquence
avec, ce n’est pas la peine de revenir me voir. » un peu moins grave que la première, et ainsi de
Il faut comprendre que chez nombre d’entre eux, suite jusqu’à la détermination de la fréquence
la souffrance morale les déborde et génère une la plus proche de l’acouphène perçu. En cas de
aggravation. Cette aggravation réside dans l’inter- perte auditive, la fréquence de l’acouphène est
prétation que le patient fait de son acouphène. habituellement localisée dans la zone déficitaire.
Cette interprétation est propre à la structure de sa • L’intensité est mesurée en présentant au
personnalité. Il faut la deviner. Une intervention patient un son de fréquence différente de celle
psychologique peut ensuite être nécessaire pour le de son acouphène, d’intensité croissante, et en
faire sortir de ce cercle vicieux. lui demandant de signaler le moment ou le son
présenté est de même intensité que l’acouphène
L’interrogatoire perçu.
• Niveau de masquage : à l’aide d’un bruit blanc,
Il représente l’occasion de gagner la confiance du il est possible de déterminer à quelle intensité
patient, souvent déjà démoralisé par des confrères. l’acouphène n’est plus perçu et s’il existe une
Il faut prêter une oreille bienveillante à l’écoute inhibition résiduelle.
de sa souffrance. Branché sur son regard, on
reformule tout ce qu’il dit. Un premier objectif
est de savoir si l’acouphène varie dans son inten-
Que dire ?
sité et dans la gêne ressentie et de comprendre « Il n’y a aucun doute que vous soyez atteint
pourquoi. Un deuxième objectif est de savoir à d’une pathologie organique. En aucun cas, ce
quel point le patient se remet en question : « Je n’est un phénomène psychique. Mais la ten-
n’y arriverai pas » ; « J’aurai cela toute ma vie » ; sion psychique aggrave la situation en générant
« Ça ne peut que s’aggraver » ; « Personne n’y de l’anxiété1. Pire, elle empêche le phénomène
connaît rien » ; « Ça va me rendre sourd ». naturel d’habituation. Nous allons voir ensemble
Cet acouphène est-il ancien ou récent ? D’appari- ce qu’on peut mettre en place pour que vous
tion brusque ou progressive ? Uni- ou bilatéral ? développiez un processus d’adaptation et que
Permanent ou intermittent ? Isolé ou associé à des vous preniez du recul avec votre acouphène. »
vertiges, à une hypoacousie, à une hyperacousie ?
On arrive aux points essentiels : un événement Quelle thérapie pour les
particulier est-il à l’origine du symptôme (trau- patients acouphéniques ?
matisme sonore, accident et agressions diverses) ?
Les aggravations coïncident-elle avec le revécu Ces patients ne consultent pas pour qu’on leur
de cet événement ? Les troubles du sommeil dise que c’est psychologique. Il faut proposer une
sont un bon témoin de cette situation, traduisant prise en charge technique : abord sophrologique,
l’importance du stress qui le réveille chaque nuit. psychanalytique ou comportemental. Le patient
doit repartir rassuré, confiant, devenu acteur de
L’acouphénométrie sa prise en charge.
utilisent des mécanismes de pensée consciente. Solutions proposées
Le but est que le patient n’écoute plus son acou- par l’audioprothésiste
phène de façon obstinée dans l’espoir de redeve-
nir la personne qu’il était avant ce traumatisme. L’acouphénométrie comparée à l’audiométrie
Cette obstination anxieuse est le principal facteur tonale renseigne sur la forme du signal qui doit
d’amplification. être proposé aux patients. Elle cherche aussi à
savoir si cet acouphène subjectif est susceptible
d’être inhibé temporairement par un bruit mas-
Psychothérapies psychanalytiques
quant adapté.
Ici, l’hypothèse est que l’acouphène a déstabilisé En cas de surdité, l’amplification par une aide
une personnalité sous-jacente. Sa morbidité est auditive est souvent efficace. Cette réafférence de
donc le résultat d’un retour dans le corps de la zone sous-stimulée par la perte auditive fait dimi-
conflits refoulés. C’est le réveil des sentiments de nuer le gain sur la zone de l’acouphène. Certes,
dépendance, de régression, de frustration, avec l’acouphène réapparaît au retrait de l’aide audi-
résurgence d’angoisses infantiles. La psychothé- tive. Toutefois, il existe une période d’inhibition
rapie ne prend donc pas en charge directement résiduelle, pouvant parfois durer plusieurs heures.
l’acouphène, mais l’ensemble du patient dans Actuellement, les combis associent un générateur
toutes ses dimensions, conscientes et incons- de bruit à l’amplification qui reste nécessaire.
cientes. Le patient se découvre au fur et à mesure En l’absence de surdité, la technique du mas-
et se réapproprie son histoire personnelle avant quage seule n’est plus guère utilisée. Elle n’a pas
l’accident acouphénique, pendant et après. d’efficacité durable. Elle ne permet pas l’habitua-
tion. À l’arrêt de la stimulation sonore, l’acou-
Prise en charge d’une névrose phène peut être plus intense. Toutefois, en cas
d’hyperacousie, le recours à un bruit blanc de
Chez des patients possédant une prédisposition
faible émergence apporte des améliorations en
psychotique, en particulier paranoïaque, l’acou-
trois mois avec diminution du seuil d’inconfort.
phène peut déclencher un processus d’inter-
Enfin, un audiogramme « normal » ne permet
prétation persécutive visant une cible extérieure
pas d’exclure des distorsions supraliminaires. Il
supposée avoir l’intention de lui nuire. Apparaît
peut être proposé des solutions d’enrichissement
alors une angoisse massive avec risque de repli
de l’environnement sonore. Par exemple, pour
total ou de passage à un acte agressif. Il est donc
une gêne dans le calme principalement ou pour
parfois nécessaire de passer par une consultation
faciliter l’endormissement.
psychiatrique pour associer un traitement antidé-
Les résultats sont très variables. Le patient doit
presseur et antipsychotique.
avoir connaissance de l’existence de ces systèmes.
À lui de se décider pour un essai.
Conclusion
1. Sensation de boule dans la gorge, déglutition
Pour améliorer le vécu du patient, il est important
difficile, reflux, ballonnements, tensions musculaires,
de prendre en compte la structure psycholo- douleurs cervicales, maux de tête, manque de som-
gique du patient pour diminuer toutes les sources meil et difficultés de concentration, réactions cuta-
anxieuses, amplificatrices des acouphènes. nées avec sueurs froides, rougeurs, eczéma, etc.
de la gaine des nerfs optiques. La ponction lombaire TDM de l’os temporal
fait disparaître l’acouphène et le traitement repose sur Elle recherche :
l’acétazolamide ; • une procidence ou une ectasie du golfe de la veine
• fistule durale. L’acouphène est souvent objectif. La jugulaire ;
fistule est visible à l’angio-IRM dynamique sous la forme • une malposition carotidienne et une artère stapédo-
d’une opacification précoce d’un réseau anarchique hyoïdienne naissant de la carotide et circulant sur le
vasculaire postérieur au niveau d’un des sinus latéraux, promontoire jusqu’à la fenêtre ovale ;
l’autre ne présentant encore aucun signal. Il faut la • une déhiscence des canaux semi-circulaires antérieurs
confirmation d’une artériographie diagnostique, permet- sur les incidences dans le plan de Pöschl (cf. fiche « Minor
tant aussi l’embolisation ; (syndrome de) »). Dans ce cas, l’acouphène pulsatile est
• paragangliome jugulaire. L’angio-IRM dynamique en rapport avec la transmission des battements du liquide
montre une prise de contraste lésionnelle au temps céphalo-rachidien.
artériel de l’injection. a Acquisitions séquentielles avec injections réalisées toutes les
5 secondes pendant une minute.
A 235
Principe
Au moment de la déglutition, la trompe
d’Eustache s’ouvre tandis que le voile se relève,
obturant l’espace rhinopharyngien. L’air qu’on
envoie sous pression dans une fosse nasale passe
dans l’oreille moyenne.
Protocole
Le sujet est assis. Lui faire prendre une gorgée d’eau
dans la bouche sans l’avaler. Introduire dans l’une
des narines l’embout olivaire de la poire à insuffla-
tion de Politzer. Obturer hermétiquement la narine
opposée et, par les mêmes doigts, serrer l’embout
qui a été introduit dans la fosse nasale (fig. A.2).
Demander au sujet d’avaler le liquide contenu dans
sa bouche. Presser sur la poire. Le sujet doit entendre
Figure A.1. Manœuvre de Valsalva.
l’air siffler dans son oreille. Il faut faire attention qu’il
236 Fiches ORL de A à Z
Algies faciales
Une douleur permanente est habituellement sinus correspond au blocage d’un ostium sinusien
symptomatique d’une sinusite, d’un cancer avec survenant à la descente d’un avion. Brutalement,
envahissement osseux, d’une affection stomato- le passager se plaint d’une violente douleur uni-
logique, ophtalmologique ou systémique. Les latérale, frontale ou maxillaire qui cède peu à
douleurs paroxystiques sont des douleurs par peu après l’atterrissage ou après pulvérisation de
crises séparées de périodes asymptomatiques. vasoconstricteur.
Ces manifestations sont dites essentielles quand
aucune cause n’est retrouvée. On les distingue
encore en névralgique ou non névralgique selon
Douleurs d’origine
qu’elles résultent de l’irritation d’un nerf à fibre ophtalmologique
sensitive (névralgie du trijumeau) ou non (algies Les douleurs du glaucome chronique sont habi-
de type vasculaire). Il faut se méfier d’une névral- tuellement orbitaires et s’accompagnent d’une
gie lorsqu’elle survient sur un fond continu, avec douleur à la pression du globe. L’hétérophorie,
hypoesthésie dans son territoire, car il pourrait un trouble de la réfraction, provoque des cépha-
bien y avoir une tumeur sous-jacente (névralgie lées maximales le soir et accentuées par la fatigue.
secondaire du trijumeau) (fig. A.4).
Troubles fonctionnels
Douleurs d’origine de l’articulation
nasosinusienne temporo-mandibulaire
Un simple rhume peut simuler une sinusite par Ce sont souvent des femmes jeunes avec hyper-
congestion des orifices de drainage. Le vacuum laxité ligamentaire. La douleur siège dans la région
parotido-massétérique avec otalgie. L’association
de bourdonnements à une sensation d’oreille
bouchée forme le syndrome de Costen. Les algies
sont en rapport avec une contracture musculaire
provoquée par un déséquilibre de l’articulé den-
taire. Il y a eu souvent des soins stomatologiques
récents (amalgame trop épais). Les douleurs sont
maximales le soir à la fatigue, après un repas ou
encore le matin en cas de bruxisme (mouvement
involontaire de grincement des dents pendant le
sommeil). Le diagnostic repose sur la découverte
d’un blocage à l’ouverture de la bouche, d’une
subluxation temporo-mandibulaire à l’ouverture
maximale de la mâchoire. Le meulage des appuis
anormaux et le rétablissement d’un bon articulé
dentaire sont d’abord nécessaires. Ensuite, on
peut aussi proposer une rééducation.
Figure A.4. Innervation sensitive de la face.
Les trois territoires du nerf trijumeau (V1, V2, V3).
L’angle de la mâchoire et la région occipitale
Maladie de Horton
sont innervés par les branches du plexus cervical
superficiel ; la conque ou zone de Ramsay-Hunt est
C’est une affection systémique touchant la per-
innervée par les fibres sensitives du VII (flèche). sonne âgée. Elle se caractérise par de violentes
Doyon D., Marsot-Dupuch K., Francke J.-P. Nerfs crâniens. céphalées temporales s’accompagnant d’une
Anatomie, clinique, imagerie. Paris : Masson, 2002, p. 102 hypersensibilité du cuir chevelu. La preuve en est
(figure 6.1).
238 Fiches ORL de A à Z
faite par la biopsie de l’artère temporale, montrant et para-amygdalienne. La zone gâchette est située
une artérite granulomateuse à cellules géantes. au niveau de l’amygdale ou de la paroi latérale du
La vitesse de sédimentation et la CRP (protéine pharynx. Elle est actionnée par la déglutition ou
C-réactive) sont très élevées. la phonation. Son irradiation à l’oreille est atroce
(nerf de Jacobson) avec impression d’éclatement
du tympan, de « flamme sortant de l’oreille ».
Névralgie du trijumeau Chez un sujet alcoolo-tabagique, il faut se méfier
(tic douloureux de la face car l’otalgie réflexe est un signe fréquent de
ou maladie de Trousseau) cancer de la base de langue et du sinus piriforme
(cf. chapitres 2 et 3).
Dans sa forme essentielle, elle survient après l’âge
de 50 ans, plus fréquemment chez la femme.
Les douleurs réalisent des décharges électriques Névralgie du ganglion géniculé
brèves, unilatérales, se répétant en salves pendant
quelques minutes. Dans deux tiers des cas, elles La névralgie essentielle du VII bis siège au niveau
débutent dans une mâchoire en regard des pré- du conduit auditif externe. Elle est le plus souvent
molaires ; dans les autres cas, elles partent de la secondaire au zona auriculaire.
région orbitaire, irradiant vers la joue ou la région
nasale. Elles sont typiquement déclenchées par la Névralgie du grand nerf
stimulation d’une zone gâchette : attouchement occipital (C1-C2)
de certaines portions cutanées lors du rasage, par
exemple. Bien que son siège soit à point de départ occipital,
L’examen est strictement normal. Il n’y a pas les irradiations se font aux vertex, à l’hémicrâne
en particulier d’hypoesthésie. La carbamazépine et jusque dans la région latérale de la face. C’est
est efficace au début. Dans la plupart des cas, une douleur unilatérale, réveillée par les mouve-
la cause est un conflit vasculo-nerveux entre le ments brusques de la tête : flexion, et éternue-
segment cisternal du V et une boucle formée par ments. L’efficacité de l’infiltration de xylocaïne
une branche de l’artère cérébelleuse supérieure. à l’émergence de C1-C2 constitue un bon test
La non-visibilité de la boucle à l’IRM n’exclut pas thérapeutique.
le diagnostic. L’intervention neurochirurgicale
consiste à interposer une mousse de téflon entre
Algie vasculaire de la face
la boucle et le nerf. Les résultats sont souvent
spectaculaires. Elle réalise schématiquement l’équivalent d’une
Il faut se méfier de douleurs atypiques durant migraine dans le territoire de la carotide externe :
plusieurs heures et siégeant sur deux branches artère faciale, artère temporale superficielle ou
du nerf. Surtout s’il existe des signes otologiques artère maxillaire interne (ancien syndrome de Slu-
associés, il faut rechercher un cancer du rhinopha- der, syndrome de Charlin, sympathalgies, migrai-
rynx par fibroscopie nasopharyngée. Par ailleurs, nous nevralgia, cluster headache). C’est un homme
le moindre déficit sensitif dans le territoire du le plus souvent entre 10 et 30 ans. Les douleurs
trijumeau (abolition d’un réflexe cornéen +++) sont unilatérales, siégeant toujours du même côté.
doit faire pratiquer une IRM à la recherche d’une L’accès douloureux débute à la racine du nez, dans
tumeur de la fosse postérieure ou d’une métastase l’angle interne de l’œil, au niveau de l’aile du nez,
cérébrale lésant le ganglion de Gasser (névralgie ou encore au front ou à la tempe. La douleur,
symptomatique du trijumeau). souvent pulsatile, s’accroît progressivement en
intensité et en territoire jusqu’à atteindre son acmé
Névralgie du glosso-pharyngien en 10 à 15 minutes. Puis brusquement, la douleur
cède au bout de 30 à 180 minutes. Les crises sur-
Dans sa forme essentielle, la douleur est localisée viennent typiquement 1 à 3 fois par jour, tous les
à la région parotido-massétérique, amygdalienne jours pendant quelques semaines. Les rémissions
A 239
sont souvent longues. Il existe des signes neurové- souffrir tous les jours depuis des années. Leur
gétatifs accompagnateurs : larmoiement, signe de siège peut être évocateur : langue (glossodynie),
Claude Bernard-Horner, injection conjonctivale, sensation de brûlure de l’aile du nez. L’abord
photophobie, obstruction nasale, écoulement nasal, de ces malades est difficile car, d’une part on
rougeurs de la face. Un bon test thérapeutique est craint de méconnaître une affection organique,
constitué par l’efficacité du tartrate d’ergotamine en et d’autre part la multiplication des examens
pulvérisation nasale ou par voie parentérale, utilisé complémentaires installe le malade dans son
dès les premiers signes (1 à 2 mg). Le traitement de « système pathologique ». En pratique, il faut
fond est celui des migraines. essayer de retrouver la nature de l’agression
sociale ou familiale qui engendre l’angoisse et
amener le malade à faire le lien avec les algies.
Douleur faciale Il faut traiter le facteur local de manière aussi
d’origine psychique peu agressive que possible, car la thérapeutique
On y pense lorsque la douleur est mal défi- ne sert que de soutien jusqu’à ce que le malade
nie, qu’elle est ancienne et que le malade dit puisse se prendre en charge.
240 Fiches ORL de A à Z
Anatomophysiologie de l’audition
Les vibrations aériennes pénètrent par l’oreille Troisième transducteur :
externe. Elles sont transformées en vibrations l’oreille interne
liquidiennes par l’oreille moyenne au niveau de
la platine de l’étrier. La cochlée (oreille interne) La cochlée possède une structure vibratoire méca-
convertit les vibrations liquidiennes en un signal nique et un système de cellules ciliées sensorielles.
électrochimique véhiculé par les voies auditives Mais la sensation est affinée par un contrôle
jusqu’au cortex. central géré par l’oreille interne elle-même.
Structure sensorielle
• Le canal cochléaire longe toute la longueur du
limaçon. Il est rempli d’endolymphe. C’est lui qui
contient les cellules ciliées de l’organe sensoriel
auditif de Corti. Sur une coupe (fig. A.8), on dis-
tingue la rampe vestibulaire, la rampe tympanique
et le canal cochléaire. Le canal cochléaire repose
sur la membrane basilaire et est séparé de la rampe
vestibulaire par la membrane de Reissner.
• Les cellules sensorielles ciliées situées dans le
canal cochléaire constituent une sorte de piano
où chaque touche représente une fréquence : fré-
quences aiguës à la base du limaçon et fréquences
graves au sommet. La base des cellules ciliées
repose sur la membrane basilaire, mais le sommet
Figure A.5. Membrane tympanique droite et marteau. des cils est enchâssé dans une membrane vibrante
TM : tête du marteau ; An : annulus.
Sauvage J.-P., Vergnolles P. Anatomie de l’oreille moyenne. EMC
qui longe aussi tout le limaçon : la membrane
(Elsevier Masson Paris), ORL, 2008, 18 p. [Article 20-015-A-10]. tectoriale.
A 241
• Sous l’effet des vibrations transmises par l’étrier Cellules ciliées internes, cellules
aux liquides labyrinthiques, la membrane tecto- ciliées externes et courbes d’accord
riale et la membrane basilaire entrent en vibration.
La cochlée traite le signal acoustique en périphérie
Cette vibration est analysée par les cellules ciliées
pour une meilleure compréhension des sons au
dont l’activité est transmise aux centres par les
niveau central.
axones du nerf cochléaire.
242 Fiches ORL de A à Z
Figure A.8. Tubes hélicéens
de la cochlée.
A : rampe vestibulaire ; B :
canal cochléaire ; C : rampe
tympanique ; 1 : organe de
Corti ; 2 : membrane basilaire ;
3 : membrane de Reissner ;
4 : ligament spiral. Au piano,
l’organe de Corti longeant tout
le limaçon.
Il y a deux sortes de cellules ciliées dans l’organe 235 et vérifier que c’est bien la bonne note qui
de Corti. Les vraies cellules sensorielles sont les a été entendue. C’est le principe de l’affinement
cellules ciliées internes, dont il n’existe qu’une des courbes d’accord (fig. A.9) où le gain de
seule rangée. Ce sont elles qui informent les sélectivité au niveau de la fibre nerveuse est très
centres. En revanche, les cellules ciliées externes, supérieur à ce qu’on pourrait attendre de la mem-
distribuées en trois rangées, ont un rôle différent. brane basilaire. La perte des cellules ciliées avec
Elles ont des propriétés contractiles. En fait, l’âge a donc un effet désastreux. Le sujet entend
elles agissent pour tendre la membrane tectoriale mais ne comprend plus.
et affiner la perception par les cellules ciliées
internes.
Supposons qu’on fasse entendre une note : un La Conclusion
235. Ce n’est pas une seule cellule ciliée interne
qui est mise en jeu, mais tout un groupe de L’oreille interne n’est pas un simple microphone
cellules de part et d’autre de cette fréquence. Le envoyant passivement des messages auditifs aux
message qui parvient aux centres est donc flou. centres. C’est plutôt un micro-ordinateur dialo-
Les centres vont alors agir pour tendre la mem- guant avec l’encéphale pour affiner et ajuster ses
brane tectoriale de part et d’autre de la zone La réponses.
A 243
Anatomophysiologie de la langue
Cf. aussi fig. 1.14, 1.15 et 3.3. muscles de la face dorsale. Elle est mince et
La langue mobile appartient à la cavité buccale. non adhérente à la face inférieure, expliquant la
Elle représente les deux tiers antérieurs de la formation d’œdèmes jusqu’au plancher.
langue. Son tiers postérieur est la base de langue Les lymphatiques de la langue mobile se drainent
qui appartient à l’oropharynx. Ces deux parties vers les nœuds lymphatiques submentaux et sub-
sont séparées par le V lingual, constitué par mandibulaires. Les lymphatiques de la base de
les papilles gustatives caliciformes. Le V lingual langue se drainent vers les nœuds lymphatiques
est ouvert en avant et se termine latéralement submandibulaires et jugulo-carotidiens. Les zones
par l’insertion des piliers antérieurs de la loge médio-linguales ont un drainage bilatéral.
amygdalienne. En arrière, il se termine en pointe L’innervation motrice est principalement assu-
au niveau du foramen cæcum, vestige de l’orifice rée par le nerf hypoglosse (XII). L’innervation
du canal thyréoglosse. sensitive et gustative des deux tiers antérieurs de
La langue mobile présente une face dorsale, deux la langue dépend du nerf lingual (V3) puis de la
bords latéraux se terminant par la pointe et une corde du tympan et du nerf facial rejoignant le
face ventrale divisée en deux par le frein de la ganglion géniculé, et enfin du nerf intermédiaire
langue se prolongeant jusqu’au plancher de la de Wrisberg (VII bis) qui finit en se connectant
bouche. De part et d’autre du frein, le plancher au noyau gustatif supérieur du plancher du 4e
est soulevé par les caroncules sublinguales et les ventricule. Le nerf glosso-pharyngien (IX) assure
abouchements des canaux de Wharton (glandes l’innervation de la base de langue. La gustation
submandibulaires) et des sublinguales. basi-linguale passe par une connexion au noyau
La base de langue est presque verticale et ne peut gustatif inférieur.
être examinée qu’avec un miroir laryngien. Sa
palpation est donc primordiale.
Le squelette ostéo-fibreux de la langue est formé
de l’os hyoïde avec la membrane hyoglosse et
le septum lingual réalisant une lame fibreuse et
verticale tendue de la membrane hyoglosse en bas
jusqu’à la pointe de la langue en haut (fig. A.10).
C’est sur ce squelette que s’appuient les muscles
de la langue pour obtenir sa protraction (dix-sept
muscles dont les fibres s’entrecroisent dans les
trois plans de l’espace). Figure A.10. Squelette de la langue.
La muqueuse linguale est formée d’un épithélium Rouvière H. Anatomie humaine. Tome I. Tête et Cou.
Paris : Masson, 1959, p. 408 (fig. 261).
pavimenteux, non kératinisé, très adhérent aux
244 Fiches ORL de A à Z
Appareil branchial
À l’examen de la région céphalique d’un embryon
de poisson, on constate une série de fissures dorso-
ventrales alternant avec des épaississements dorso-
ventraux : ce sont les fentes et les arcs de l’appareil
branchial. Les fentes sont constituées de poches
ectoblastiques et de poches endoblastiques, se
creusant en regard les unes des autres et s’acco-
lant pour former une membrane obturante. En Figure A.12. Région branchiale d’un très jeune
revanche, les arcs séparant les fentes possèdent embryon humain.
une masse épaisse de mésoblastes entre les deux La flèche en pointillés indique le stomodæum. BF :
épithéliums. bourgeon frontal ; BMS : bourgeon maxillaire supérieur.
Giroud A., Lelièvre A. Éléments d’embryologie. Paris : Librairie E.
Dans chaque arc se développent : un squelette, des Le François, 1960, p. 216 (fig. 143).
éléments musculaires, des vaisseaux et des nerfs.
Ces nerfs constitueront les paires crâniennes : ces arcs aortiques qui, par leur réunion à droite
pour le 1er arc, la Ve paire ; pour le 2e arc, la VIIe et à gauche, constituent les aortes dorsales de
paire ; pour le 3e arc, la IXe paire ; et pour le 4e arc l’embryon (fig. A.11). Chez les poissons, la mem-
et les suivants, la Xe paire. Les vaisseaux sont des brane obturante disparaît, formant des ouvertures
branches des aortes ventrales qui montent dor- directes avec l’extérieur qui, en se garnissant de
salement chacune dans un arc différent. Ce sont lamelles branchiales richement vascularisées, vont
assurer l’hématose et la respiration.
Chez les embryons humains (fig. A.12), on ne voit
extérieurement que la trace de quatre arcs séparés
par leurs poches ectoblastiques. La dépression du
stomodæum est située entre le bourgeon frontal
doublé par le bourgeon maxillaire supérieur et
bordée en bas par le 1er arc dit mandibulaire.
En arrière de l’arc mandibulaire, on trouve le
2e arc, dit arc hyoïdien. Le développement de
l’encéphale entraîne une inflexion considérable de
l’extrémité céphalique. Le 2e arc vient alors passer
au-dessus des 3e et 4e arcs pour limiter la cavité
du sinus cervical dont la coalescence de ses parois
amène rapidement à son occlusion (fig. A.13).
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
C
Cautérisation de la tache vasculaire
Ce sont des enfants scolarisés de moins de 7 ans pour éviter la récidive des épistaxis. Dans ce but,
devant quitter fréquemment la classe pour l’infir- son efficacité est certaine ; toutefois, sa répéti-
merie en raison de saignements de nez itératifs. tion risque d’entraîner des troubles trophiques
favorisant eux-mêmes les saignements de nez.
On peut quand même pratiquer les cautérisations
Matériel au moment de l’hémorragie lorsque l’artériole
• Spéculum de Duplay (ouvert sur le côté) ou qui saigne est directement visible à l’examen des
mieux spéculum de Palmer (fig. C.1A). fosses nasales.
• Stylet (porte-caustique plat).
• Coton, Xylocaïne® à 5 %. Préparation
• Pinces de Politzer.
• Lampe à alcool. • Examiner d’abord la cloison avec un bon éclai-
• Crayons de nitrate d’argent ou cristaux d’acide rage : on repère ainsi la tache vasculaire au niveau
chromique. de la partie antéro-inférieure de la cloison. Parfois,
En principe, le malade n’est pas en période une petite croûte de sang séchée révèle le point
hémorragique et la cautérisation est employée qui saigne. Cette croûte surmonte fréquemment
la saillie acuminée de l’artériole en cause. Parfois, même avec le crayon de nitrate d’argent tenu
celle-ci est au ras du vestibule cutané qu’il faut par son protecteur.
retrousser pour la distinguer. Un tampon imbibé de
Xylocaïne® à 5 % est appliqué sur la cloison pendant Cautérisation proprement dite
15 minutes en demandant à l’enfant de pincer son
nez. Après avoir mis en place le spéculum de Palmer,
• Préparer une application de produits chi- enfoncer le coton imbibé d’anesthésique au-delà
miques comme l’acide trichloracétique ou de la tache vasculaire : il protégera la partie pos-
l’acide chromique au tiers. Leur action est térieure des fosses nasales. Appliquer la perle
surtout sclérosante. Pour les appliquer, il faut sur la zone hypervascularisée en insistant plus
préparer un porte-coton bien serré et très fin longuement sur les vaisseaux directement visibles.
(fig. C.1B). On peut préférer confectionner une La cautérisation est terminée lorsque l’escarre
perle d’acide chromique à l’abri du regard de est nette, brune et exsangue. Le coton est alors
l’enfant pour ne pas l’effrayer. Le stylet porte- ramené en avant, essuyant les coulées d’acide ou
caustique est chauffé au rouge dans la flamme de nitrate. Un ou deux éternuements violents sont
de la lampe à alcool, le cristal d’acide chro- à prévoir : ils éprouvent la qualité de l’hémostase.
mique est déposé sur le plat du porte-caustique La coagulation bipolaire est une méthode agres-
(fig. C.1C). On en dirige la fusion pour obtenir sive qui, trop répétée, risque de produire une
« une perle » (fig. C.1D). On peut procéder de perforation du septum nasal.
C 251
d’administration systémique. Connue depuis Résultats
20 ans, la CIA reste une technique difficile,
réservée à quelques équipes. Une CIA d’induc- Chimiothérapie exclusive
tion ou avec radiothérapie concomitante a été Elle ne doit pas être considérée comme un traite-
utilisée à la manière des protocoles de préserva- ment standard.
tion laryngée.
Radio-chimiothérapie
Effets secondaires et toxiques concomitante avec cisplatine
• Leucopénie granulocytaire exposant à des chocs Versus radiothérapie exclusive, elle a donné de meil-
septiques graves (tous les cytotoxiques). leurs résultats avec une réponse clinique complète
• Atteinte des muqueuses : stomatite doulou- dans 10 à 50 % des cas et une réponse histologique
reuse, diarrhées sévères, colites nécrotiques et complète entre 5 et 30 %. La radio-chimiothéra-
perforations (5-FU, taxanes). pie concomitante est actuellement le traitement
• Dénutrition imposant la surveillance du poids, reconnu des carcinomes épidermoïdes de la tête
pouvant amener le recours à une alimentation et du cou à un stade avancé, améliorant significa-
entérale par sonde nasogastrique ou gastrostomie. tivement la survie sans récidive et la survie globale.
• Polyneuropathie sensitive distale (paresthésies)
et autres atteintes neurologiques (cisplatine). Schéma PF
• Acouphènes et surdité de perception bilatérale C’est le premier utilisé dans les chimiothérapies
imposant une surveillance audiométrique (cis- d’induction pour la préservation laryngée.
platine).
• Tubulonéphrites (cisplatine). Schéma TPF
• Éruptions cutanées maculo-papuleuses et éry-
thémateuses, suivies d’une desquamation des Pour la préservation laryngée, il obtient de meil-
mains et des pieds (syndrome main-pied), d’une leures réponses que le schéma PF. Toutefois,
alopécie (docétaxel) et d’un rash acnéiforme il augmente aussi significativement le risque de
(cétuximab). neutropénie et de décès par choc septique. Le
• Syndrome de rétention hydrique avec œdèmes schéma TPF est le nouveau standard dans la
périphériques, ascite, pleurésie et péricardite chimiothérapie d’induction.
(docétaxel).
Tumeurs avancées mais
résécables de la cavité
Indicateurs prédictifs buccale et de l’oropharynx
de chimio-radiosensibilité
L’apport d’une chimiothérapie d’induction, y
C’est une importante voie de recherche. Par compris par TPF, n’est pas validé pour le moment.
exemple, la présence dans le carcinome épider-
moïde de la protéine p53 indique un meilleur Cétuximab
taux de réponse à la chimiothérapie néo-adjuvante
et une meilleure survie. Cette présence est aussi Il n’est utilisé qu’en seconde intention dans les
corrélée aux cancers des VADS, associés aux tumeurs localement évoluées inopérables ou réci-
human papillomavirus (HPV positifs). divées et/ou métastatiques.
C 253
Chirurgie ganglionnaire
Quelle que soit la porte d’entrée des cancers • Évidement postéro-latéral correspondant à
ORL, la présence d’une extension ganglionnaire l’évidement du triangle cervical postérieur de
impose des gestes chirurgicaux qualifiés d’évide- niveau V et de la chaîne jugulaire profonde de
ments ganglionnaires. Historiquement, la valeur niveaux II, III et IV, adapté aux mélanomes et
pronostique négative de cette extension régionale cancers épidermoïdes postérieurs.
a dicté une attitude dite radicale, en bloc, vis-à-
vis de tout le tissu ganglionnaire cervical, même
au prix d’importantes séquelles. Puis le concept Technique chirurgicale
d’évidement fonctionnel s’est développé, basé de l’évidement fonctionnel
sur la dissection des plans de clivage du cou,
considérés comme des barrières carcinologiques • L’incision classique de Sébileau-Carrega, avec
permettant de préserver les structures principales son incision en Y, comporte une zone de cica-
non envahies (travaux d’Yves et Bernard Guer- trisation difficile à la réunion de ses trois branches.
rier, de Montpellier). Récemment, est apparu le Elle a été supplantée par l’incision de Paul André
concept de ganglion sentinelle. donnant le meilleur accès possible à tous les
groupes ganglionnaires (fig. C.2).
Évidements radicaux • Séparation du muscle sterno-cléido-mastoïdien
de son aponévrose après ligature de la veine jugu-
traditionnels complets
laire externe. Dissection antérieure, le long des
Ce sont des évidements emportant le tissu cellulo- fibres musculaires des faces antérieure et médiale
ganglionnaire des niveaux I à V (cf. encadré 4.2) du muscle (fig. C.3).
avec sacrifice du muscle sterno-cléido-mastoïdien, • À la jonction entre le tiers supérieur et le
du nerf spinal et de la veine jugulaire interne. tiers moyen du muscle sterno-cléido-mastoïdien,
L’évidement pouvait facilement être élargi à apparaît le nerf spinal à l’entrée du muscle. Il
d’autres structures, telles que les nerfs crâniens, est exposé jusqu’au niveau de la veine jugulaire
les muscles, la peau, etc. interne (fig. C.4).
• Dissection du triangle sous-mandibulaire en
suivant le muscle digastrique jusqu’au muscle
Évidement radical modifié
mylo-hyoïdien en préservant les nerfs lingual et
Dans le type I, on préserve le nerf spinal. Dans grand hypoglosse. Toute la loge sous-maxillaire
le type II, on préserve le nerf spinal et le muscle est réséquée après repérage du croisement du
sterno-cléido-mastoïdien. Dans le type III ou rameau mentonnier du nerf facial avec l’artère
évidement fonctionnel, on préserve le nerf spinal, faciale.
le muscle sterno-cléido-mastoïdien et la veine • Triangle postérieur : l’accès à la région supra-
jugulaire interne. claviculaire se fait en arrière du muscle sterno-
cléido-mastoïdien. La limite inférieure est le bord
Évidements sélectifs supérieur de la clavicule, la limite postérieure le
bord antérieur du muscle trapèze, et la frontière
• Évidement sus-omohyoïdien correspondant à supérieure le nerf spinal à sa sortie du muscle
l’évidement des niveaux I, II et III, adapté aux sterno-cléido-mastoïdien jusqu’à sa pénétration
cancers de la cavité buccale. dans le muscle trapèze. Le pédicule cervical trans-
• Évidement jugulaire correspondant à l’évide- verse et le ventre postérieur du muscle omo-
ment des niveaux II, III et IV, adapté aux cancers hyoïdien sont repérés, ainsi que le plexus brachial
du pharynx et du larynx. et le nerf phrénique.
• Évidement du compartiment central corres- • On termine par la dissection de la gaine caro-
pondant à l’évidement récurrentiel dans le cadre tidienne entourant la veine jugulaire interne, la
des carcinomes thyroïdiens. carotide interne et le nerf vague (fig. C.5). Elle
254 Fiches ORL de A à Z
reste encore actuellement au stade de la recherche
clinique. Son intérêt serait de diagnostiquer les
patients porteurs de métastases cervicales occultes
et d’éviter ainsi la réalisation d’évidements cervi-
caux systématiques chez les patients N0.
Curiethérapie
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
258 Fiches ORL de A à Z
Prétraitement
En salle d’examen, essuyer la gaine externe avec
des compresses non tissées à usage unique, imbi-
bées d’une solution d’Hexanios®.
Définition
Le diverticule pharyngo-œsophagien de Zenker
est une hernie de la muqueuse hypopharyngée
s’extériorisant entre le muscle constricteur infé-
rieur du pharynx et le muscle cricopharyngien
constituant le sphincter supérieur de l’œsophage.
Ces deux muscles délimitent une zone de fai-
blesse (triangle de Killian) où se situe le collet
du diverticule (fig. D.2). C’est le résultat d’un
mécanisme de pulsion sur un obstacle en aval,
créé par un dysfonctionnement du muscle crico- Figure D.2. Triangle de Killian.
pharyngien consistant en une relaxation retardée Voie d’abord cervicale gauche. CI : muscle constricteur
au moment du temps pharyngo-œsophagien de inférieur du pharynx ; MCP : muscle cricopharyngien ;
la déglutition. La cause serait une dégénérescence D : diverticule pharyngo-œsophagien ; O : œsophage
fibreuse des fibres de ce muscle. cervical ; T : thyroïde. Flèche : direction de l’extrémité
céphalique.
S. Périé, J. Lacau St Guily. Diverticules pharyngo-œsophagiens.
EMC, Paris (Elsevier Masson), ORL, 1998 :1-0 [Article 20-840-A-10].
Bilan
La fibroscopie nasopharyngée montre une stase salivaire
dans les sinus piriformes. Si le diverticule est volumineux,
il s’extériorise en région cervicale et devient palpable. Sa
pression provoque des régurgitations et des bruits hydro-
aériques. Le transit baryté pharyngo-œsophagien est
demandé en première intention (fig. D.3). Le diverticule se
présente comme une poche arrondie se projetant souvent
à gauche de l’œsophage cervical. De profil, le collet se
projette en regard de la sixième vertèbre cervicale. En cas
de corps étranger bloqué dans la bouche œsophagienne,
l’œsophagoscopie au tube rigide doit être prudente en
raison du risque de perforation du fond de la poche
diverticulaire.
Traitement chirurgical toute sa hauteur au laser CO2, au laser KTP/532 ou
Voie endoscopique (fig. D.4) avec une pince coupante autosuturante. La poche
Elle réalise une myotomie transmuqueuse du collet marsupialisée persistera, mais communiquera largement
diverticulaire (diverticulotomie). Le diverticule est d’abord avec l’œsophage. Ces procédés sont bien adaptés aux
exposé grâce à un diverticuloscope à valves positionné à sujets âgés, permettant une réalimentation dès le premier
cheval sur le collet. Le collet est sectionné sur presque jour postopératoire.
262 Fiches ORL de A à Z
Voie cervicale (fig. D.5)
La cervicotomie latérale est pratiquée à gauche pour
mieux respecter le nerf récurrent. Le diverticule est dis-
séqué jusqu’à son collet. Il est indispensable de réaliser
une myotomie extramuqueuse du sphincter, étendue
au muscle cricopharyngien et à la musculature striée
de l’œsophage cervical sous peine de récidive. On
termine en pratiquant une diverticulectomie. Certains
opérateurs ne la font pas, mais suspendent la poche
en position verticale pour qu’elle se vide naturelle-
ment dans l’œsophage (diverticulopexie). D’autres ne
pratiquent qu’une simple myotomie pour réduire la
morbidité opératoire. Figure D.5. Diverticule pharyngo-œsophagien géant.
Injections de toxine botulique Exérèse par voie cervicale.
Elles ont été proposées dans les achalasies. Mais elles ne
sont vraiment efficaces que dans les rares et véritables
dystonies du sphincter, comme dans les séquelles du
syndrome de Wallenberg.
F
Fistule (signe de la)
Le signe de la fistule caractérise une communica- peut même contrôler les variations de pression
tion anormale entre l’oreille moyenne et l’oreille positives ou négatives avec précision.
interne. Sa recherche consiste à exercer une aug- Le nystagmus est observé avec des lunettes de
mentation de pression dans le conduit auditif Frenzel ou de vidéonystagmoscopie.
externe. Le signe est positif quand on déclenche
ainsi un nystagmus, un vertige et une déviation Significations
de la posture. Cette variation de pression dans le
conduit peut être obtenue par une simple pression • Lorsque la compression déclenche un nystagmus
du doigt. Le spéculum de Siegle est bien adapté, horizontal battant vers l’oreille comprimée, il s’agit
car il présente un joint permettant d’obtenir probablement d’une fistule de la coque du canal
une adaptation étanche avec le conduit auditif semi-circulaire latéral en rapport avec une otite
externe. Avec une sonde d’impédancemétrie, on chronique cholestéatomateuse (fig. F.1 et F.2).
Figure F.1. Vues coronale et axiale : TDM d’une fistule du canal latéral droit d’origine cholestéatomateuse (flèches).
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
264 Fiches ORL de A à Z
• Lorsque le nystagmus bat vers l’oreille opposée Il est attribué à une hyperlaxité du ligament
à la compression, la fistule siège au niveau de la annulaire de la platine de l’étrier (classiquement
platine de l’étrier. C’est ce que l’on obtient en cas d’origine syphilitique). On l’a aussi décrit dans
de fracture de la platine de l’étrier. l’hydrops de la maladie de Menière et les patho-
• Le signe de Hennebert ou « signe de la fistule logies pressionnelles labyrinthiques en général.
sans fistule » appartient à la seconde catégorie.
F 265
Fistules complètes
L’orifice externe est situé dans une zone de pro-
jection cutanée définie par E. Poncet qui réalise
un triangle oto-hyo-mandibulaire dont le sommet
est le plancher du conduit auditif externe et la
base est une ligne réunissant la pointe du menton
et le milieu de l’os hyoïde (fig. F.3). Souvent,
cette fistule externe est secondaire à l’ouverture
d’un kyste surinfecté associé.
L’orifice supérieur passe souvent inaperçu. Une
otoscopie minutieuse peut retrouver un petit
orifice punctiforme du plancher du conduit
Figure F.4. Fistule auriculo-branchiale gauche.
Otoscopie.
Bride prémyringienne (flèche rouge). Orifice supérieur
(flèche noire).
Chirurgie
Toute fistule auriculo-branchiale doit être opérée
avant la survenue des surinfections. Si le diagnos-
tic n’est porté qu’après des épisodes infectieux,
il convient de n’opérer qu’après refroidissement
complet des lésions (fig. F.5). Aucun examen
complémentaire n’est indispensable avant de
proposer l’exérèse chirurgicale. La fistulographie
ne peut que rarement opacifier tout le trajet
fistuleux.
La voie d’abord est celle utilisée pour une paroti-
Figure F.3. Aire de projection des fistules dectomie en associant une petite résection circu-
auriculo-branchiales. laire de l’orifice fistuleux externe. L’intervention
Vazel L., Martins C., Potard G., et al. Fistules et kystes
congénitaux du cou. EMC, Paris (Elsevier Masson),
commence par le repérage du nerf facial (fig. F.6).
ORL, 2006 : 1-6 [Article 20-860-A-10]. Ce premier temps est rendu délicat par l’existence
266 Fiches ORL de A à Z
Figure F.5. Double fistule auriculo-branchiale gauche. Figure F.6. Découverte du nerf facial gauche.
Jeune femme de 18 ans. Suppurations sous-auriculaires La branche temporo-faciale cravate une formation
et sous-angulo-maxillaires à répétition depuis l’enfance. tubulaire cartilagino-ectodermique : la fistule
Plusieurs incisions. de la 1re fente branchiale.
Kystes et fistules des troisième
et quatrième poches
endobranchiales
Ces kystes et fistules ont en commun d’avoir un
orifice interne au niveau du sinus piriforme : à sa
partie haute pour la 3e poche et au niveau du fond
pour la 4e. Puis leur trajet se fait au contact du
lobe thyroïdien (fig. F.13). Il n’y a pas d’orifice
cutané primitif. Ces fistules se révèlent habituelle-
ment par une complication infectieuse simulant
Figure F.11. Exérèse d’une fistule de la 2e fente une thyroïdite suppurée. Une fistulisation secon-
(incision basse). daire est toujours possible.
L’endoscopie réalisée sous anesthésie générale
retrouve l’orifice fistuleux sous le carrefour des
trois replis pour la 3e fente et au fond du sinus
piriforme, sous un repli muqueux, pour la 4e. Il
laisse sourdre du pus lors du massage cervical.
L’échographie et la tomodensitométrie cervicales
permettent d’éliminer une pathologie tumorale
thyroïdienne et précisent les rapports du kyste précédentes. Il faut repérer le nerf récurrent
avec la thyroïde et l’axe laryngo-trachéal. jusqu’au sinus piriforme (fig. F.14 et F.15) et
Le traitement chirurgical est toujours difficile parfois emporter le lobe thyroïdien ipsilatéral du
du fait d’incisions ou des tentatives d’exérèse fait de l’importance des adhérences.
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
H
HPV 16-18 et cancers des VADS
Ce sont des virus à ADN qui ont un tropisme pour d’HPV dans un carcinome buccal est cinq fois
les épithéliums malpighiens. On les retrouve dans plus élevée que dans la muqueuse orale saine de
les cancers du col de l’utérus et dans les cancers voisinage. Deux sous-types d’HPV, 16 et 18, sont
de la cavité buccale et de l’oropharynx. Certains carcinogènes et associés à une mutation de p53
HPV (human papillomavirus), notamment HPV- (cf. fiche « Biologie tumorale et carcinogenèse »).
16 et HPV-18, auraient un rôle étiologique dans Il existe donc une relation étroite entre l’infection
le développement des cancers des VADS, que à HPV-16 et le cancer de l’oropharynx. Cette
les patients présentent ou non une intoxication relation entre infection à HPV et cancer est
alcoolo-tabagique. moins nette pour les tumeurs de la cavité buc-
cale. L’infection par le virus de la papillomatose
humaine HPV est donc suspectée d’être à la base
Argumentation de nombreux cancers de l’oropharynx en raison
Le risque de carcinome épidermoïde de la tête et des pratiques sexuelles oro-génitales.
du cou chez les sujets séropositifs pour HPV-16
est multiplié par deux. La présence d’HPV dans les Une forme clinique particulière
tissus néoplasiques de la cavité orale varie de 14 à
91 %. L’acide désoxyribonucléique (ADN) viral est Sur le plan pronostique, les cancers des VADS
retrouvé dans 72 % des tumeurs de l’oropharynx. associés à l’infection à HPV semblent présenter
Étudiés par PCR (polymerase chain reaction), 50 % un meilleur pronostic qu’en l’absence d’infection
des carcinomes oropharyngés et 14 % des carci- virale. Cependant, cette différence évolutive n’a
nomes de la langue contiennent de l’acide désoxy- été bien mise en évidence que pour les tumeurs
ribonucléique (ADN) de HPV-16. L’expression de l’oropharynx.
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
L
Laryngocèle externe
Elle est formée par une dilatation du ventricule Traitement chirurgical (fig. L.2)
laryngé sous l’effet d’un gradient de pression
endolaryngé positif sus-glottique brutal, comme Après un abord cervical latéral, on dissèque la
on en rencontre chez les trompettistes et les poche. Il est nécessaire de réséquer la partie
souffleurs de verre. Sa caractéristique est d’être supérieure de l’aile thyroïdienne pour lier le
réductible à la pression en s’accompagnant de collet le plus en dedans possible. Les laryn-
bruits hydro-aériques. Elle se reproduit lorsque le gocèles internes se traitent par voie endosco-
patient bloque sa glotte comme lorsqu’on soulève pique : marsupialisation en réséquant la bande
un poids. Le larynx présente un aspect normal. ventriculaire.
Lors de la manœuvre de Valsalva, à l’auscultation,
on entend un sifflement.
Signes cliniques
Dans le cas présenté ici (fig. L.1), c’est une
pseudo-tumeur remplie d’air, située en avant du
bord antérieur du muscle sterno-cléido-mastoï-
dien. Elle fait issue en arrière du larynx au niveau
des membranes thyro-hyoïdienne ou cricothy-
roïdienne. Le patient a consulté pour des accès
de suffocation laryngée avec dysphonie inter-
mittente. Ailleurs, il peut aussi s’agir d’une laryn-
gocèle interne qui ne fait que soulever la bande
ventriculaire jusqu’à faire bomber la vallécule
Figure L.1. Laryngocèle externe : TDM.
sans s’extérioriser. Si le collet herniaire se ferme, Matar N., Remacle M. Tumeurs bénignes du larynx.
il apparaît un pyolaryngocèle. La cause peut être EMC, Paris (Elsevier Masson), ORL, 2015 ; 10(3) : 1-12
une tumeur du ventricule. [Article 20-700-A-10].
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
276 Fiches ORL de A à Z
Diagnostic et réductible lors de la pression de son pôle
supérieur et elle est située nettement en dessous
On ne peut pas confondre une laryngocèle avec du larynx.
une phlébectasie de la veine jugulaire interne
car celle-ci n’apparaît qu’à l’effort, elle est molle
Contre-indications
• Antécédents d’otite chronique ou de perfora-
tion tympanique.
• Bouchons épidermiques : il s’agit de squames
épidermiques provoquées par une dermite du
conduit auditif externe, appelée souvent à tort
« eczéma du conduit ».
Dans ces cas, le lavage risque de déclencher une
poussée inflammatoire douloureuse, voire une
otite externe. Le nettoyage de l’oreille dans ces
conditions doit être fait avec des porte-cotons ou
Figure L.3. Lavage d’oreille pour extraction
mieux avec une aspiration après avoir fait pratiquer
d’un bouchon de cérumen.
pendant plusieurs jours des bains d’oreilles avec A. Énéma. B. Amorçage. C. Le jet d’eau est dirigé vers la
une solution auriculaire antibiotique et corticoïde paroi postéro-supérieure du conduit auditif externe.
278 Fiches ORL de A à Z
Lymphangiomes kystiques
Sous ce nom, on désigne des malformations lym- prévoir les conséquences à venir : envahissement
phatiques par absence de communication des de la base de langue et compression du carrefour
lymphatiques avec le système périphérique. Elles pharyngo-laryngé. Le rôle d’un staff de diagnos-
réalisent des tuméfactions molles, dépressibles, tic prénatal est d’aider les parents à décider de la
indolores, pouvant atteindre des tailles impres- poursuite ou non de la grossesse et des modalités
sionnantes à la naissance (Elephant Man). Elles de naissance à envisager avec l’équipe obstétricale.
évoluent ensuite par poussées, en rapport avec • Après la naissance, plusieurs options se
des infections sur les voies aériennes supérieures. présentent :
D’autres formes se déclarent plus tard, jusqu’à – surveillance : le caractère rapidement évolutif
l’adolescence, restant de taille modeste et plus de ces malformations oblige rapidement à pas-
facilement contrôlables. ser à l’action ;
– ponction à l’aiguille : elle peut être proposée
pour soulager transitoirement une compres-
Anatomopathologie sion des voies aériennes dans un contexte
Ce sont des lésions kystiques polylobées avec des d’urgence ;
cloisons non vascularisées constituant des cavités – trachéotomie : elle s’impose dans les formes
de 1 mm à 10 cm de diamètre. Des hémorragies dyspnéisantes, associée à une alimentation enté-
intrakystiques peuvent donner lieu à un hémo- rale par sonde nasogastrique ;
lymphangiome. – injection d’agents sclérosants : elle a pour
Les lymphangiomes kystiques siègent surtout but théorique de bloquer l’apport de lymphe
dans la région cervico-faciale au niveau du trian- au niveau du kyste en provoquant une réaction
gle postéro-inférieur du cou, de la parotide et de inflammatoire locale ;
la région sous-mandibulaire. On distingue deux – chirurgie d’exérèse : ces tumeurs ont des
formes topographiques : limites anatomiques imprécises, difficiles à dis-
• d’une part, les lymphangiomes macrokystiques tinguer des tissus sains. Les kystes sont incon-
sous-hyoïdiens en rapport avec la persistance sistants, fragiles et souvent hémorragiques.
d’une communication entre les voies lympha- L’exérèse d’un lymphangiome kystique est
tiques et la veine jugulaire interne ; donc toujours difficile en raison d’absence de
• d’autre part, les lymphangiomes microkystiques plan de clivage. Dans la plupart des cas, il faut
sus-hyoïdiens atteignant la langue, le plancher de donc se résoudre à une exérèse incomplète
la bouche et l’espace parapharyngé. Ils sont dits pour éviter des séquelles nerveuses, musculaires
capillaires, mal limités et infiltrants, résultant d’un et cutanées.
trouble de connexion des vésicules lymphatiques
entre elles.
Indications
L’échographie précise s’il existe un contenu liqui-
dien et le caractère mono- ou multikystique. • Dans les formes sous-hyoïdiennes, souvent
À la TDM, il y a des masses homogènes de très impressionnantes, l’exérèse complète est plus
densité liquidienne ne se rehaussant pas après souvent possible au prix du sacrifice de la veine
injection de produit de contraste. L’IRM montre jugulaire interne ou du tronc veineux linguo-
un hypersignal en T2 montrant les différents facial. La sclérothérapie est aussi plus efficace, car
cloisonnements. ce sont des formes macrokystiques.
• En revanche, le pronostic des formes sus-
hyoïdiennes est réservé, car l’exérèse chirurgi-
Prise en charge
cale complète est souvent impossible et il s’agit
• À la période anténatale, l’échographie et l’IRM de formes microkystiques difficiles à scléroser
peuvent arriver à un diagnostic permettant de (fig. L.5).
280 Fiches ORL de A à Z
• Quelle que soit la méthode choisie, le risque
de récidive ou de poussée sur reliquats est majeur
chez un enfant soumis aux infections ORL de
la petite enfance. L’adéno-amygdalectomie est
proposée plus facilement que dans les recom-
mandations officielles. Les associations antibio-
tique-corticoïde par voie générale sont également
largement prescrites.
Lymphomes ORL
Les lymphomes malins sont des proliférations souvent nécessaire, mais il ne faut pas compter
de cellules lymphocytaires B et T formant des avoir le résultat en extemporané.
tumeurs ganglionnaires ou extraganglionnaires.
Les voies aérodigestives supérieures (VADS) sont
riches en cellules lymphoïdes immunocompé- Formes cliniques
tentes, expliquant que le lymphome non hodgki-
nien est la seconde étiologie des tumeurs malignes • Au niveau des VADS, ils touchent préféren-
de la tête et du cou, derrière les carcinomes tiellement l’adulte et sont représentés par les
épidermoïdes. lymphomes B folliculaires, les lymphomes de
type MALT (lymphome extraganglionnaire de
la zone marginale du tissu lymphoïde associé aux
Épidémiologie muqueuses) et les lymphomes diffus à grandes
cellules B. Les localisations aux fosses nasales, au
Leur fréquence a augmenté au cours de ces 25 cavum (amygdale pharyngée) et à l’oropharynx
dernières années. Les facteurs de risque sont (amygdale palatine) se présentent sous forme
l’immunodéficience (en particulier les traitements d’une tumeur molle, pâle ou violacée, évoquant
immunosuppresseurs pour greffes d’organes) et d’emblée un lymphome malin non hodgkinien
la manipulation de pesticides et d’insecticides. (fig. L.6). Les adénopathies cervicales sont sou-
Ce sont aussi des pathologies virus-dépendantes : vent volumineuses et homogènes, atteignant tous
virus EVB (Epstein-Barr), notamment pour les les territoires, y compris les chaînes ganglionnaires
fosses nasales. du tronc. Les lymphomes de la parotide et de la
thyroïde sont plutôt de type MALT. Chez le sujet
Classification plus âgé, une macropolyadénopathie débutant
au niveau du cou fait évoquer une leucémie lym-
Elle prend en compte l’architecture folliculaire phoïde chronique.
ou diffuse de la prolifération tumorale, le phéno- • Le lymphome de Burkitt, d’évolution rapide
type B ou T/NK (natural killer) et les données avec adénopathies, est le plus grave. En Afrique,
permettant d’identifier certaines translocations il se présente sous la forme d’une tumeur cervico-
ou la présence d’un génome viral. Les trois faciale avec atteinte maxillaire. En Occident, la
principales entités anatomo-cliniques rencontrées maladie, plus rare, se présente avec une atteinte
en ORL sont les lymphomes non hodgkiniens de abdominale. Le lymphome de Burkitt est fréquent
phénotype B, les lymphomes non hodgkiniens de chez l’enfant (fig. L.7). Classiquement, il débute
phénotype T et les lymphomes hodgkiniens ou par le signe de la houppe du menton : anesthésie
maladie de Hodgkin. localisée en rapport avec une atteinte du tronc
cérébral.
Bilan • Les formes plasmocytaires sont tantôt des
plasmocytomes osseux (formes particulières de
Le bilan de l’extension locale et disséminée repose maladie de Kahler localisées à l’os), tantôt des
sur le PET-scan (tomographie à émission de formes muqueuses. En cas de myélome à immu-
positons). L’imagerie classique précise l’exten- noglobuline de type A (IgA), une amylose est
sion osseuse sinusienne (TDM) et les atteintes associée dans 10 % des cas avec macroglossie,
ganglionnaires (IRM). Biologiquement, les lym- atteintes glottique et oculaire. Ce sont des dépôts
phomes sont caractérisés par un taux de LDH de fibrilles prenant la coloration rouge Congo.
(lacticodéshydrogénase) élevé et la présence de • Forme sinuso-nasale : parmi les lymphomes
marqueurs de l’hémophagocytose. Le cytodia- T/NK extraganglionnaires, la forme localisée aux
gnostic par ponction à l’aiguille fine peut être fosses nasales et au palais était autrefois appelée
complété par une cytométrie. La biopsie est granulome malin centro-facial. Elle est fréquente
282 Fiches ORL de A à Z
Figure L.6. Lymphome folliculaire de l’amygdale palatine droite avec adénopathie cervicale.
Noter l’aspect violacé de l’amygdale palatine droite (*). L’adénopathie cervicale satellite mesure 9 cm de diamètre.
Il existe aussi une adénopathie inguinale droite envahie.
en Asie, mais rare en France. Il s’agit de lésions fait de proche en proche. Un prurit, des sueurs et
médio-faciales nécrosantes et destructrices. En de la fièvre sont évocateurs. Le pronostic est bon,
Europe, on trouve des formes héréditaires chez car le traitement consiste en l’induction d’une
des migrants asiatiques, dont l’incidence diminue immunité T détruisant les cellules tumorales.
au fil des générations. On a incriminé des facteurs
alimentaires (poissons séchés), des facteurs géné- Traitement
tiques (groupes HLA [Human Leucocyte Anti-
gen]) et des facteurs viraux (EBV différents dans Les formes ORL localisées réagissent bien à la
les populations asiatiques). Le principal diagnostic radiothérapie. Les formes disséminées relèvent de
différentiel est la maladie de Wegener. la chimiothérapie. Pour les lymphomes T/NK
• Lymphome hodgkinien ou maladie de Hodg- extraganglionnaires, la L-asparaginase apporte un
kin : elle survient chez l’adulte jeune entre 15 progrès important. Son principe repose sur le fait
et 30 ans et chez l’adulte après 50 ans. Dans la que les cellules pathologiques sont incapables de
plupart des cas, la maladie débute par une atteinte synthétiser l’asparagine, qui est un précurseur pep-
ganglionnaire cervicale. Elle est caractérisée par la tidique. Toutefois, comme c’est une protéine, une
cellule de Sternberg. L’évolution est lente et se immunité peut se développer contre le médicament.
M
Myringotomie et paracentèse
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
288 Fiches ORL de A à Z
Otite externe
L’otite externe diffuse est une infection caractérisée finit par permettre de voir le tympan en quelques
par une violente douleur exacerbée par la mastica- jours. Rappelons que les aminosides locaux sont
tion, une traction sur le pavillon de l’oreille ou une contre-indiqués en cas de perforation tympanique.
pression sur le tragus. Elle est très fréquente après L’otite externe nécrosante dite maligne est sou-
une baignade sur une plage chaude, humide et pol- vent déclenchée par un lavage d’oreille chez
luée. L’otoscopie est gênée par une sténose presque des sujets diabétiques ou immunodéprimés. Elle
complète du conduit auditif externe, empêchant commence par une cellulite diffuse qui se trans-
de voir le tympan. Le traitement est local. Il faut forme en chondrite, puis en ostéite de l’os tym-
réussir à introduire un coin de mèche à lisière de panal. Le germe responsable est Pseudomonas
1 cm pour conduire les gouttes auriculaires le plus aeruginosa. La TDM montre d’importantes des-
profondément possible (fig. O.2). Ces gouttes tructions osseuses, évoluant rapidement en dépit
auriculaires sont composées d’antibiotiques et de d’antibiothérapies de plusieurs mois (biantibio-
corticoïdes. Les germes ne sont pas ceux de l’otite thérapie par ceftazidime et ciprofloxacine). Para-
moyenne aiguë. Ce sont des germes Gram négatif lysie faciale, cophose et syndrome vestibulaire ne
ou des staphylocoques seulement sensibles aux sont pas rares dans cette pathologie.
aminosides ou aux quinolones. Le corticoïde local Voir aussi le chapitre 8 « L’otoscopie découvre
finit par dégonfler la peau du conduit. La mise en une atteinte de l’oreille externe » et les vidéos O.1
place successive de mèche et de pop de Merocel® et O.2 .
Vidéo eO.1. Ostéite bénigne circonscrite Vidéo eO.2. Otomycose à Candida albicans.
de l’os tympanal. Cet aspect de papier buvard ou de coton mouillé
Voici un conduit auditif externe droit. La troisième avec quelques reflets verdâtres est caractéristique
portion du nerf facial a été complètement dénudée par de l’otomycose à Candida albicans. Les lésions ne sont
le processus ostéitique. Le nerf facial lui-même est intact pas douloureuses mais fréquemment prurigineuses.
sans paralysie. Le tympan est normal. L’ostéite bénigne Dans la plupart des cas, des bains d’oreille avec
circonscrite de l’os tympanal n’est pas une otite externe antibiotiques ont déjà été prescrits et se sont avérés
banale. C’est une pathologie nécrotique silencieuse inefficaces. L’association à des corticoïdes a même
primitive bilatérale et symétrique. L’ostéite siège avec pu entraîner une aggravation. Le traitement est local
prédilection sur le plancher et la paroi postérieure du avec des antifongiques.
conduit auditif externe osseux. Au début, elle est difficile
à distinguer d’un bouchon épidermique avec érosion
osseuse. Pour terminer, voici le côté gauche qui est
également atteint.
P
Paragangliomes temporaux
Les paragangliomes (PG) sont des tumeurs du carotidienne, du ganglion du pneumogastrique,
système neuro-endocrinien diffus issu des cellules de l’adventice du dôme du golfe jugulaire et du
de la crête neurale (fig. P.1). Durant l’embryoge- nerf de Jacobson et de la branche auriculaire
nèse, ces cellules migrent des crêtes neurales vers du X). On distingue les paragangliomes jugu-
les nerfs crâniens et certains gros vaisseaux pour y laires et les paragangliomes tympaniques, les deux
constituer les cellules paraganglionnaires. Ce sys- étant regroupés sous le terme de paragangliomes
tème est composé de cellules capables de sécréter temporaux.
des catécholamines ou de réguler la fonction de À noter qu’historiquement, ces paragangliomes
cellules adjacentes. Elles entretiennent d’étroites avaient été successivement appelés : apudomes,
relations avec les cellules nerveuses, d’où le terme chémodectomes, tumeurs glomiques, glomérocy-
de cellules neuro-endocrines. Ce système est dif- tomes, réceptomes et tumeurs non chromaffines.
fus, car il est présent dans de nombreux organes Le terme de chémodectome reste utilisé pour les
au sein desquels on trouve d’autres tumeurs chémodectomes de la bifurcation carotidienne.
neuro-endocrines : pancréas, poumon, thyroïde,
leptoméninges, peau et paraganglions. Ainsi, les
PG peuvent-ils être associés à d’autres tumeurs :
Caractéristiques
astrocytome, cancer médullaire thyroïdien, phéo- anatomo-cliniques
chromocytome, adénome parathyroïdien, etc. Les PG affectent davantage la femme que l’homme
Les paragangliomes se distinguent en deux avec un sex-ratio de 6/1. L’âge moyen du diag-
groupes : ceux liés au système sympathique du nostic se situe entre 40 et 60 ans. Leur crois-
médiastin postérieur et du rétropéritoine (phéo- sance est lente avec un temps de doublement de
chromocytome d’origine médullo-surrénalienne), 4,2 ans, voire beaucoup plus. Ce sont des tumeurs
et ceux liés au système parasympathique de la bénignes, mais elles présentent une agressivité
tête et du cou (paraganglions de la bifurcation locale importante avec érosions osseuses et infil-
trations des tissus mous avoisinants. En particu-
lier, leur croissance requiert beaucoup d’énergie
et d’oxygène, expliquant le caractère hypervas-
cularisé des paragangliomes.
Environ 30 % des cas sont associés à une mutation
d’un gène, dont celui de la SDH (cofacteur AF2
de l’enzyme mitochondrial succinyl-déshydrogé-
nase). D’autres mutations expliquent l’association
à une néoplasie endocrinienne multiple (NEM2), à
une neurofibromatose (NF1) ou à un syndrome
de Von Hippel-Lindau. Ainsi distingue-t-on
les formes sporadiques des formes familiales et
Figure P.1. Crêtes neurales chez un embryon
à l’issue de la gastrulation et de la neurulation.
héréditaires où la multicentricité synchrone ou
1 : somites ; 2 : crêtes neurales ; 3 : tube neural ; métachrone est très fréquente. Le mode de trans-
4 : ectoderme ; 5 : pièce intermédiaire ; 6 : somatopleure ; mission est autosomique et dominant. Toutefois,
7 : splanchnopleure ; 8 : aorte ; 9 : notochorde ; cette transmission est soumise à l’empreinte géno-
10 : endoderme. mique maternelle. L’enfant ne pourra développer
Catala M., Grapin-Botton A., Garabédian E.-N. Arcs branchiaux :
aspects normaux et pathologiques. EMC, Paris (Elsevier Masson), la maladie que s’il a hérité la mutation de son père.
ORL, 2000, 12 p. [Article 20-850-A-10]. En revanche, s’il reçoit la maladie de sa mère, il
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
292 Fiches ORL de A à Z
ne développera pas l’affection, mais pourra la Bilan biologique
transmettre à la génération suivante. Un test
Il est effectué dans tous les cas, que le paragan-
génétique peut être proposé comme test diagnos-
gliome soit ou non sécrétant : dosage des métané-
tique ou dans le cadre d’une enquête familiale.
phrines plasmatiques et urinaires (la mesure de
l’acide vanylmandélique n’est plus pratiquée).
Diagnostic
Imagerie
Circonstances de découverte
• La tomodensitométrie montre l’opacité tis-
Le patient consulte pour un acouphène pulsa-
sulaire homogène de la tumeur et en précise
tile objectif perçu à l’auscultation. Il s’y associe
l’extension, aux berges du foramen jugulaire, au
souvent une surdité. Les vertiges sont plus rares,
plancher de la caisse du tympan, aux parois du
traduisant un envahissement de l’oreille interne.
canal carotidien, au canal de Fallope et à la coque
Une dysphonie, des troubles de la déglutition,
labyrinthique.
une rhinolalie, une gêne à la mobilisation d’une
• L’angioscanner avec injection d’un produit de
épaule ou un signe de Claude Bernard-Horner
contraste iodé met en évidence un rehaussement
traduisent l’atteinte des IX, X, XI et du sympa-
massif synchrone de celui de l’axe carotidien
thique dans le compartiment nerveux antérieur
externe, témoignant de l’hypervascularisation.
du foramen jugulaire. Les capacités sécrétrices des
• L’IRM en séquences T1, T2, avec injection
PG jugulo-tympaniques sont rares, 5 % des cas se
de gadolinium et suppression de graisse, révèle
manifestant par une hypertension artérielle.
l’aspect typique « poivre et sel » de la tumeur.
La composante « poivre » reflète les zones
Otoscopie hypo-intenses correspondant au flux artériel
Elle peut montrer une masse pulsatile, rouge rapide. La composante « sel » traduit la pré-
framboise, comblant l’hypotympanum réalisant le sence de la composante charnue de la tumeur.
classique signe du « soleil levant » (fig. P.2). Le rehaussement sous gadolinium est intense.
L’IRM recherche aussi une extension à la fosse
postérieure.
Examen audiologique
• L’angio-IRM identifie les pédicules nourriciers
Il reste normal ou montre une surdité de transmis- carotidiens externes et internes ou vertébraux.
sion parfois déjà mixte, témoignant de l’atteinte Elle confirme le rehaussement très précoce par
de la coque labyrinthique. gadolinium. Elle étudie aussi le retour veineux
homo- et controlatéral.
• Scintigraphie à l’Octréoscan® : le pentétréo-
tide est un analogue de la somatostatine qui se
fixe sur les récepteurs de la somatostatine para-
ganglionnaires. La contre-indication est la gros-
sesse. La scintigraphie comprend un corps entier
et un examen tomographique couplé à une
acquisition scanner centrée sur les zones cibles.
Sa sensibilité diagnostique est de 95 % pour les
PG jugulaires. Elle permet de révéler une mul-
ticentricité et de suivre les patients à risque de
récidive.
• Angiographie : elle est pratiquée en préambule
Figure P.2. Paragangliome oreille droite. Otoscopie. de l’embolisation.
P 293
Classification • Type C : tumeur née du golfe jugulaire, pou-
vant s’étendre dans toutes les directions (veine
• Type A : tumeur localisée à la caisse du tympan jugulaire interne, nerfs mixtes, capsule otique,
(fig. P.3). méat auditif interne et oreille moyenne) (fig. P.5).
• Type B : tumeur tympano-mastoïdienne res- • Type D : tumeur jugulaire avec extension intra-
pectant le dôme jugulaire (fig. P.4). crânienne extradurale ou intradurale (fig. P.6).
Une tuméfaction cervicale haute rétro- ou sous-
angulo-maxillaire pourrait correspondre à une
extension cervicale ou à la coexistence d’un PG
vagal développé au niveau du pneumogastrique.
Plus bas située, elle évoquerait plutôt un chémo-
dectome carotidien (fig. P.7).
Chirurgie
1. Type A : exérèse par voie endaurale.
2. Type B : évidement pétro-mastoïdien avec frai-
sage des traînées cellulaires sous-faciales.
3. Type C : voie infratemporale avec contrôle du
golfe jugulaire, du sinus pétreux inférieur et de
l’artère carotide interne intrapétreuse. La trans-
position antérieure du nerf facial (ou déroutation
du VII) sous monitorage procure une bonne
exposition, mais occasionne des paralysies faciales
du fait d’une dévascularisation du nerf.
4. Type D : en cas d’extension extradurale, le
clivage de la tumeur de la méninge est aisé,
sauf au niveau du conduit auditif interne. En
cas d’extension intradurale, l’exérèse neurochi-
rurgicale pose le problème de l’étanchéité de la
fermeture durale.
Figure P.7. Paragangliome (chémodectome)
intercarotidien.
Angiographie montrant l’aspect en lyre caractéristique. Radiothérapie
Elle est souvent préférée en traitement primaire
Traitement chez le sujet de plus de 60 ans ou en complément
d’une chirurgie subtotale dans tous les cas. Cette
Embolisation attitude trouve sa justification chaque fois qu’une
Elle n’est indiquée que pour les PG de type B, chirurgie radicale compromettrait la qualité de vie
C ou D. au-delà du supportable pour une lésion bénigne.
P 295
Figure P.8. Synthèse des paralysies des nerfs crâniens, auxquelles on a ajouté les atteintes du sympathique
cervical (syndrome de Claude Bernard-Horner).
Gouazé A. Neuro-anatomie clinique, 4e édition. Paris : Expansion scientifique française, 1994, pp. 157-164 (fig. 67 à 70).
• une éruption vésiculaire dans la zone de Ramsay- Toutefois, 30 % d’entre elles vont présenter des
Hunt ; séquelles après une évolution plus ou moins
• des signes otoscopiques d’infection de l’oreille longue : absence de régression ou régression
moyenne ; incomplète, récidive homolatérale, existence
• une masse tumorale parotidienne par la d’autres signes neurologiques. L’IRM confirme
palpation ; le diagnostic en montrant une prise de contraste
• d’autres paralysies des nerfs crâniens. linéaire après injection de gadolinium au niveau
L’audiométrie tonale, vocale, la tympanométrie et de la portion canalaire du VII, de la portion laby-
les potentiels évoqués auditifs seront demandés en rinthique et du ganglion géniculé. Elle élimine la
fonction du contexte. présence d’une tumeur au contact du nerf facial.
Le test de Schirmer compare la sécrétion lacry- La prise en charge rééducative a pour but d’éviter
male des côtés sain et paralysé. Une bandelette l’évolution vers la contracture et les syncinésies.
de buvard est accrochée au rebord palpébral Les injections de toxine botulique permettent de
inférieur. On fait renifler de l’ammoniaque et on les minimiser. Les stimulations électriques qui les
compare les zones imprégnées de larme. Quand favorisent doivent être proscrites.
il est pathologique, il témoigne d’une atteinte en
amont de l’origine du nerf grand pétreux ou sur Paralysie zostérienne
son trajet. Le réflexe stapédien est aboli quand
la lésion siège en amont de l’origine du nerf du La réactivation du virus de la varicelle et du zona
muscle de l’étrier (cf. chapitre 7). La gustométrie au niveau du ganglion géniculé ou syndrome
est pathologique si la lésion est en amont du de Ramsay-Hunt est responsable d’un tableau
départ de la corde du tympan. clinique proche de celui de la paralysie faciale
L’électroneurographie d’Esslen détermine le pour- idiopathique. Les otalgies sont plus intenses avec
centage de fibres axonales dégénérées du côté une éruption vésiculeuse au niveau de la conque
atteint par rapport au côté sain. Elle utilise une et une atteinte vestibulaire (cf. fig. 8.21).
stimulation électrique du tronc du nerf facial au
foramen stylo-mastoïdien de durée 0,2 ms. On Maladie de Lyme
recueille le potentiel d’action musculaire évoqué
La maladie de Lyme se complique d’une PF dans
par une électrode de surface unique placée dans la
10 % des cas. Elle est bilatérale dans 25 % des
région nasogénienne. Une perte axonale supérieure
cas. L’IRM montre une multinévrite avec rehaus-
à 90 % survenant avant le dixième jour est de mau-
sement de plusieurs paires crâniennes. Elle frappe
vais pronostic. Cet examen doit être réalisé avant
surtout l’enfant. Il faut effectuer des sérologies
le dixième jour suivant l’installation de la paralysie.
dans le sang et le LCR, qui ne sont pas toujours
contributives.
Formes cliniques
Paralysie faciale post-traumatique
Paralysie faciale idiopathique
Les fractures longitudinales extralabyrinthiques
C’est une réactivation virale (herpès simplex virus du rocher s’accompagnent d’une PFP dans 20 %
de type 1), responsable d’une inflammation pré- des cas. Le nerf est le plus souvent atteint au
dominant au niveau du ganglion géniculé. La voisinage du ganglion géniculé. Dans les fractures
paralysie faciale s’installe brutalement, précédée transversales translabyrinthiques, il y a une PFP
de prodromes à type d’otalgie, de dysesthésie dans 50 % des cas. Elle est souvent immédiate et
faciale et d’hyperacousie douloureuse. Elle peut complète, par transsection.
se compléter entre 24 à 48 heures. L’examen cli-
nique est normal en dehors de la paralysie faciale.
Elle représente 80 % des paralysies faciales périphé-
Pathologie inflammatoire
riques. Son évolution est le plus souvent favorable de l’oreille moyenne
sans traitement. Le témoin de ce bon pronostic Une otite moyenne aiguë peut être responsable
est l’ébauche d’une récupération dès le 15e jour. d’une PFP régressant après traitement. La TDM
P 299
doit rechercher une déhiscence du segment tym- l’otoscopie oriente le diagnostic en montrant
panique du facial. Dans les otites chroniques une masse rétrotympanique blanchâtre (choles-
cholestéatomateuses, la TDM situe le site de la téatome primitif) ou rosée (glomus). Dans la
compression et montre la destruction des parois parotide, toute masse associée à une PF est sus-
du canal facial. Une PFP survenant sur une pecte de malignité.
otite chronique non cholestéatomateuse doit
faire évoquer le diagnostic de tuberculose. L’otite Paralysies faciales néonatales
nécrosante externe survient chez le sujet âgé
diabétique. Elle est due à une infection par Pseu- La paralysie faciale obstétricale est liée à la pres-
domonas aeruginosa. Elle envahit le VII par le sion des forceps sur la troisième portion du canal
foramen stylo-mastoïdien. Le diagnostic diffé- facial, très exposée en l’absence de mastoïde. Elle
rentiel avec les tumeurs malignes est difficile. régresse spontanément en quelques semaines.
L’hypoplasie isolée du VII est bien visible en
TDM haute résolution. Le syndrome de Mœbius
Pathologie tumorale associe une diplégie faciale et une paralysie des
Les PFP y sont soit progressives, soit brutales nerfs abducens. Il serait dû à une atteinte d’ori-
mais récidivantes. Dans le tronc cérébral, les gine ischémique, anténatale des noyaux dans le
tumeurs primitives ou secondaires donnent une tronc cérébral.
atteinte de plusieurs paires crâniennes. Les lésions Les paralysies faciales idiopathiques sont moins
de la fosse postérieure sont les plus fréquentes : fréquentes que chez l’adulte, mais restent majo-
neurinome du VIII et méningiome. En IRM, le ritaires (40 à 60 % des cas). Il faut noter la
premier est centré sur le conduit auditif interne. fréquence des PFP post-traumatiques (fig. P.9). Il
Le méningiome, au contraire, possède une large n’est pas rare qu’un cholestéatome congénital se
base d’implantation. Dans la caisse et la mastoïde, révèle par une paralysie faciale.
Figure P.9. Paralysie faciale droite traumatique chez un enfant âgé de 3 ans.
A. Plaie par ciseau. B. Paralysie faciale droite. C. Exploration ne montrant qu’une simple contusion.
300 Fiches ORL de A à Z
Figure P.10. Enquête étiologique devant une paralysie récurrentielle gauche isolée.
P 301
anévrysme lors de son trajet autour de l’aorte • syndrome de Collet-Sicard : paralysie du IX,
est une cause classique. Mais c’est le cancer du X, du XI et du XII (lésion située dans le crâne
du poumon qu’on redoute le plus. L’imagerie au-dessus du trou déchiré postérieur) ;
pulmonaire est donc le troisième examen complé- • syndrome de Jackson : paralysie du X, du XI et
mentaire à demander. Enfin, après avoir évoqué du XII (lésion située dans le crâne au-dessus du
quelques rares causes toxiques (plomb, oxyde de trou déchiré postérieur, elle épargne le IX plus
carbone et arsenic), aucune cause n’étant trouvée, antérieur) ;
il faut alors se résoudre au diagnostic de paralysie • syndrome de Vernet ou du trou déchiré pos-
cryptogénétique, probablement d’origine virale. térieur : paralysie du IX, du X et du XI ;
La rééducation vocale est essentielle en atten- • syndrome de Schmidt : paralysie du X et du XI ;
dant sous surveillance une forte probabilité de • syndrome d’Avellis : paralysie du X et du XI au
récupération. niveau de l’émergence du nerf laryngé supérieur ;
• syndrome de Tapia : paralysie du X, du XI et
du XII au-dessous de l’émergence du nerf laryngé
Atteinte unilatérale du nerf supérieur et au-dessus de l’émergence du nerf
pneumogastrique en amont récurrent.
Tout autre est l’apparition d’une paralysie laryn-
gée en association avec d’autres atteintes des nerfs Paralysie des dilatateurs
crâniens (fig. P.11) : ou syndrome de Gerhardt
• syndrome de Garcin : paralysie unilatérale de
tous les nerfs crâniens du même côté (tumeur C’est une paralysie des deux cordes vocales en
de base de crâne) ; adduction. Elle entraîne une dyspnée nécessitant
• syndrome de Villaret ou syndrome de l’espace souvent une trachéotomie en urgence. La cause
sous-parotidien postérieur : paralysie du IX, du X, périphérique est postopératoire, mais elle peut
du XI, du XII et du sympathique ; aussi être centrale : syringobulbie ou sclérose
latérale amyotrophique avec atteinte de la péri- graisse autologue ou polymère de silicone en
phérie des noyaux des nerfs pneumogastriques suspension. On peut aussi proposer des thyro-
(atteinte en lunette). plasties consistant à mettre en place un implant
inerte par l’intermédiaire d’une fenêtre réalisée
dans l’aile cartilagineuse thyroïdienne ipsilatérale
Techniques chirurgicales (silastic, silicone, hydroxyapatite, titane, cartilage
autologue).
Paralysies unilatérales
Les techniques chirurgicales consistent à rappro-
cher passivement le bord libre de la corde vocale
Paralysies bilatérales
paralysée de la ligne médiane (action de médiali- Les plus fréquentes sont en fermeture. Les pro-
sation). Le but est de favoriser son affrontement cédés visent donc à élargir la filière respiratoire :
avec la corde controlatérale au cours de la pho- cordotomie et aryténoïdectomie au laser. Par voie
nation. Pour atteindre ce but, on injecte divers cervicale, on propose une aryténoïdopexie. En
matériaux au sein de la corde vocale paralysée : dernier recours, il reste la trachéotomie.
diverses circonstances : parotidite de l’enfant, Sarcoïdose ou maladie
mégacanaux, sténoses des canaux excréteurs et de Besnier-Boeck-Schaumann (BBS)
syndrome de Gougerot-Sjögren. L’échographie
C’est une granulomatose d’étiologie inconnue
met en évidence la destruction du parenchyme
en rapport avec une réponse immunitaire anor-
parotidien et les dilatations canaliculaires. La sia-
male. Dans 5 % des cas, elle comporte une
lographie montre les dilatations des canaux et
parotidomégalie indolore, bilatérale, d’installation
les images dites en pommier japonais portant ses
progressive. L’atteinte des glandes salivaires acces-
fruits. La sialographie avait un effet thérapeutique
soires survient dans 50 % des cas. L’association
bénéfique lorsque le lipiodol était encore autorisé.
d’une hypertrophie parotidienne bilatérale, d’une
L’évolution est très récidivante chez l’enfant, mais
uvéite et d’une paralysie faciale réalise le syn-
s’arrête à la puberté. Une parotidectomie n’est
drome de Heerfordt. En cas d’association avec
indiquée que dans les malformations canalaires
une atteinte des glandes lacrymales, c’est le syn-
sévères (mégadolichosténon). La dissection du
drome de Mikulicz. Les autres manifestations sont
nerf facial y est toujours diabolique.
cutanées, osseuses, pulmonaires, ganglionnaires,
viscérales et neurologiques. L’intradermoréaction
Sialite lithiasique à la tuberculine est négative.
Les lithiases salivaires touchent trois fois moins Le syndrome biologique comporte une accé-
la glande parotide que la glande sous-maxillaire. lération de la vitesse de sédimentation, une
Les coliques salivaires typiques ne comportent hypergammaglobulinémie, une hypercalcémie.
que des douleurs survenant au moment des repas. L’activité plasmatique de l’enzyme de conversion
L’association à une augmentation de volume de de l’angiotensine est typiquement augmentée.
la glande correspond à une hernie salivaire régres- L’examen histologique au niveau des glandes sali-
sant entre les repas. L’échographie permet le diag- vaires accessoires montre des nodules contenant
nostic. Le tableau de sialite aiguë suppurée fébrile des cellules géantes, des cellules épithélioïdes, des
avec pérennisation de la tuméfaction glandulaire macrophages et des lymphocytes T sans caséum.
s’accompagne d’une inflammation cutanée en La corticothérapie est réservée aux localisations
regard. L’IRM est intéressante en cas de sus- sévères.
picion d’abcès. L’exérèse des lithiases peut être
réalisée par voie endoscopique ou par lithotripsie. Syndrome de Gougerot-Sjögren
Les sténoses canalaires représentent 10 à 25 % des
C’est un syndrome dit sec. À la parotidomé-
cas de pathologie obstructive des parotides. Un
galie bilatérale s’associe une sécheresse ocu-
aspect classique est celui des mégacanaux salivaires
laire (xérophtalmie) et buccale (xérostomie). Il
avec parotidomégalie bilatérale d’origine incon-
entre dans le cadre des maladies auto-immunes
nue. L’aspect radiologique associe un chapelet de
comportant de multiples manifestations associées
sténoses et de dilatations des canaux parotidiens,
possibles : polyarthrite rhumatoïde, lupus éry-
bien visible en sialo-IRM.
thémateux disséminé, atteintes digestives, rénales,
musculaires et neurologiques. Ce sont des femmes
Sialoses de la parotide entre 40 et 60 ans. Le diagnostic est fait sur la
biopsie d’une glande salivaire accessoire. Il peut
Une sialose est une augmentation de volume évoluer vers un lymphome parotidien.
chronique asymptomatique de plusieurs glandes
salivaires ; dans la sialadénose, le gonflement sali-
vaire s’associe à une sécheresse buccale et oculaire.
Autres sialadénoses
Les glandes salivaires atteintes sont tuméfiées, Le tableau clinique ressemble au syndrome de
indolores, de consistance ferme et élastique. Leur Gougerot-Sjögren, mais les affections générales
augmentation de volume est chronique, mais sous-jacentes identifiées sont très nombreuses.
varie dans le temps. Il y a presque toujours une Insistons sur le rôle de la carence protidique illus-
pathologie générale sous-jacente. trée par trois causes :
P 305
• l’anorexie mentale avec aménorrhée et paro- Maladie de Kimura
tidomégalie bilatérale, connue autrefois sous le
nom de chlorose des jeunes filles ; Le tableau clinique comprend une parotidoméga-
• causes iatrogéniques (antidépresseurs, phéno- lie bilatérale, des nodules sous-cutanés cervicaux
thiazines, réserpine) ; indolores et une polyadénopathie cervicale. C’est
• alcoolisme. une prolifération lympho-plasmocytaire avec
Parmi d’autres causes, citons le diabète, l’hypo- fibrose touchant de jeunes hommes d’origine asia-
thyroïdie, l’hyperfolliculinémie de la ménopause. tique. Le diagnostic est anatomo-pathologique.
L’IRM est en faveur d’une lésion maligne en Les indications chirurgicales diffèrent selon qu’il
montrant plusieurs éléments : s’agit de parotidectomie ou de sous-maxillectomie.
• la tumeur est en hyposignal T2 avec des Le geste chirurgical sur la parotide comporte le
contours irréguliers ; risque de paralysie faciale définitive. Il ne doit donc
• le coefficient apparent de diffusion est inférieur être pris qu’en connaissance de cause. Le geste
à 1 (du fait de l’augmentation de la cellularité) ; chirurgical sur la glande submandibulaire ou sur
• l’injection de gadolinium montre une prise la glande sublinguale comporte un risque nerveux
de contraste hétérogène avec des séquences moindre : lésion du nerf lingual ou du rameau men-
dynamiques de type C (pic précoce et lavage tonnier du facial. Il sera proposé plus facilement.
progressif) ;
• il existe des adénopathies suspectes dépassant Pathologies ganglionnaires malignes
15 mm de diamètre, arrondies avec un hile non
échogène. • Lymphome parotidien développé à partir d’un
ganglion intraparotidien : en échographie, il s’agit
de masses pseudo-kystiques souvent multiples et
Cancers bilatérales. Du fait de la forte cellularité du lym-
• Carcinome muco-épidermoïde (souvent kys- phome, le coefficient ADC est très bas (inférieur
tique et de bas grade). à 0,5). Le traitement repose sur la radio-chimio-
• Carcinome adénoïde kystique (ou cylin- thérapie.
drome) : ce cancer a une propension naturelle à • Lymphome parotidien de forme parenchyma-
s’étendre par l’intermédiaire des gaines des nerfs. teuse primitive se présentant avec une augmen-
L’injection de gadolinium permet d’apprécier son tation de volume global de la glande et des
extension le long du VII dans l’aqueduc de antécédents de maladie auto-immune (Gougerot-
Fallope, nécessitant une exploration transmas- Sjögren) ou un contexte d’infection VIH : l’IRM
toïdienne. Il donne des métastases à distance, en retrouve un aspect plurinodulaire et bilatéral avec
particulier pulmonaires. des adénopathies cervicales.
• Carcinome à cellules acineuses. • Métastase ganglionnaire intraparotidienne : elle
• Adénocarcinome (le plus souvent de haut est évoquée en cas d’association à d’autres adéno-
grade). Son pronostic reste très sévère malgré le pathies cervicales. La prise en charge dépend de
traitement. la tumeur primitive. Elle est chirurgicale s’il s’agit
Leur traitement repose sur la parotidectomie d’un épithélioma cutané ou d’un mélanome situé
totale avec exploration ganglionnaire cervicale dans les territoires cutanés de la face (pavillon de
suivie de radiothérapie. l’oreille, régions temporales et frontales, etc.).
R
Radiothérapie
La radiothérapie est un traitement permettant le utilisée d’emblée en association avec une chi-
contrôle local du cancer au même titre que la chi- miothérapie (3). À noter que l’avantage d’une
rurgie. La radiothérapie est délicate à manier. Une radiothérapie postopératoire est que les stratégies
radiothérapie de qualité insuffisante impacte néga- peuvent être adaptées en fonction de l’examen
tivement le contrôle locorégional de la tumeur de anatomopathologique des pièces opératoires.
20 % (Peters L. JCO 2010). Pour la radiothérapie
externe, les faisceaux de rayonnements ionisants
Radiothérapie conformationnelle 3D
sont produits par un accélérateur linéaire de parti-
cules. Les rayonnements les plus utilisés sont des La distribution de la dose peut être calculée en
photons et des rayonnements d’électrons pour fonction des volumes tumoraux macroscopiques,
détruire les cellules cancéreuses. La dose est déli- des volumes à risque d’extension microscopique
vrée en séances quotidiennes cinq fois par semaine et des organes à risque. L’irradiation des tissus
pendant 5 à 7 semaines. sains avoisinants est ainsi réduite.
2e étape : contention rigide (masque entre la chirurgie et l’irradiation postopératoire de
thermoformable à 5 points) plus de 7 semaines.
L’objectif est d’obtenir une immobilisation avec
un alignement du patient parfaitement reproduc- Effets secondaires
tible à chaque séance. Un repose-tête doit être
également adapté. Les erreurs de positionnement Mucite
sont évitées et aussi contrôlées régulièrement par C’est une inflammation de la muqueuse avec
des imageries. parfois des ulcérations. Elle apparaît deux à trois
semaines après le début de l’irradiation et se
3e étape : simulation (contourage) manifeste par une sensation d’irritation, des dou-
Les machines utilisées permettent de contourer leurs à la déglutition, des difficultés d’élocution.
plusieurs volumes pour évaluer l’extension tumo- Cette mucite augmente le risque de candidose.
rale et ganglionnaire et contourer les organes à Elle atteint son maximum cinq semaines après le
risque (parotide, larynx, plexus brachial et surtout début de l’irradiation. Si des difficultés d’alimen-
le tronc cérébral et la moelle cervicale). Il y a le tation risquent de provoquer une pause dans le
volume cible tumoral macroscopique tumoral traitement, il faut recourir à la nutrition par sonde
et ganglionnaire, palpé ou repéré par l’imagerie nasogastrique, voire à une gastrostomie perendo-
(gross target volumes) : GTV-T et GTV-N. Il y a scopique.
aussi les volumes des prolongements visibles ou
invisibles microscopiques définissant une zone de Conséquences cutanées
sécurité ou CTV (clinical tumor volume) avec des et sous-cutanées
marges variables autour du GTV. La conjonction
Elles vont du simple érythème cutané à la nécrose
des deux volumes précédents et les paramètres
tissulaire. Elles sont plus fréquentes chez le sujet
physiques des faisceaux d’irradiation définissent
âgé et dénutri. Le cétuximab les aggrave. Elles
enfin un volume traité irradié homogène ou PTV
peuvent être responsables de l’arrêt de la radiothé-
(planning treatment volume). Schématiquement,
rapie. Moins graves et tardives sont les séquelles
sont ainsi déterminées deux sortes de zones :
esthétiques : pigmentation, alopécie et fibrose. Le
celles devant recevoir une irradiation thérapeu-
risque d’apparition d’un trismus est proportionnel
tique et celles devant recevoir une irradiation
à la dose reçue par les muscles masticateurs.
prophylactique.
Xérostomie
Doses d’irradiation
et fractionnement Conséquence de l’irradiation des glandes sali-
vaires, cette hyposialie entraîne des carries et des
Elles sont de 64 à 66 Gy pour les irradiations thé- candidoses buccales. Elle apparaît en même temps
rapeutiques et de 50 à 54 Gy pour les irradiations que la mucite et peut être irréversible.
prophylactiques. Le fractionnement convention-
nel comprend 2 Gy par fraction, une fraction par
jour, à raison de 5 par semaine jusqu’à atteindre
Ostéoradionécrose mandibulaire
70 Gy en irradiation thérapeutique (35 fractions) Elle est la conséquence de soins dentaires après la
et 50 Gy en irradiation prophylactique (25 frac- radiothérapie. Un bilan dentaire avant traitement
tions). Il faut souligner qu’une pause d’une avec remise en état dentaire si nécessaire est indis-
semaine peut compromettre le contrôle local par pensable. L’application fluorée quotidienne par
accélération de la repopulation des clones tumo- des gouttières doit aussi durer jusqu’à la fin de
raux. C’est également le cas à partir d’un délai vie du patient.
S
Schwannomes et autres tumeurs neurogènes bénignes
• Le schwannome est une tumeur nerveuse osseux comme le schwannome de l’acoustique. La
bénigne composée de cellules de Schwann diffé- lenteur de leur évolution et le relatif respect des
renciées. C’est une tumeur sphérique, de consis- fibres du tronc à partir duquel elles se développent
tance variable. expliquent la rareté des déficits neurologiques.
• Le neurofibrome se développe aussi à partir des C’est leur volume qui finit par entraîner une sen-
cellules de Schwann, mais celles-ci sont différentes sation de corps étranger, une gêne à la déglutition
des cellules normales. Contrairement au schwan- ou des modifications de la voix. Leur découverte
nome, sa transformation maligne est possible. Des est le plus souvent fortuite au cours d’un examen
neurofibromes multiples peuvent entrer dans le de la cavité buccale. Elles se traduisent par une
cadre de la maladie de Recklinghausen. voussure de la paroi pharyngée latérale refoulant
• Le névrome traumatique se développe à l’extré- le pilier postérieur et l’amygdale palatine en avant
mité proximale d’un nerf sectionné ou traumatisé. et en dedans. Le toucher pharyngien indique leur
Il se présente sous la forme de petits nodules consistance et leur caractère non pulsatile. Il faut
composés de filets nerveux au sein d’une prolifé- rechercher un signe de Claude Bernard-Horner,
ration anarchique de cellules de Schwann. évocateur d’un ganglioneurome.
• Le ganglioneurome se développe à partir de
cellules ganglionnaires du système sympathique Localisations latéro-cervicales
prenant alors le nom de sympathome. Il est
toujours bénin. Le neuroblastome et le gan- Elles sont plus rares : tumeurs neurogènes du
glioneuroblastome sont développés aux dépens nerf pneumogastrique (X) et du grand hypoglosse
des cellules souches sympathiques. Ce sont des (XII). La tuméfaction est de forme allongée dans
tumeurs malignes. l’axe du nerf intéressé et mobile dans le sens
Formes cliniques
La plus fréquente des tumeurs nerveuses bénignes
est le schwannome de l’acoustique ou neurinome
du VIII (cf. chapitre 8). Une tumeur nerveuse
cervicale peut aussi se développer à partir des
troncs nerveux des nerfs crâniens (VII, IX, X, XI,
XII), du ganglion sympathique cervical supérieur
ou des plexus cervical et brachial. Elle peut aussi
se développer à partir de leurs branches les plus
fines (fig. S.1).
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
312 Fiches ORL de A à Z
transversal à cet axe. Les adénopathies cervi- Chirurgie
cales, les kystes congénitaux latéro-cervicaux, les
En l’absence de paralysie préopératoire, l’exérèse
tumeurs glomiques et les anévrysmes carotidiens
chirurgicale intracapsulaire (fig. S.3) doit être
constituent le diagnostic différentiel.
proposée avec prudence, car la conservation de la
continuité nerveuse n’est pas garantie. Elle peut
Imagerie laisser d’importantes séquelles qui ne seraient
Elle montre un processus expansif arrondi, bien apparues que des années après : paralysie laryngée,
limité, d’aspect iso-dense au muscle en TDM, linguale ou d’un membre supérieur. Quand la
avec une prise de contraste importante et homo- tumeur devient grosse et compressive, c’est un
gène, après injection de produit de contraste. dilemme difficile.
L’IRM montre une lésion iso-intense au muscle
en T1 devenant hyper-intense. Le signal en T1
se rehausse après gadolinium. L’IRM permet
parfois de situer le nerf au sein de la masse : en
périphérie pour le schwannome (fig. S.2) et au
centre pour le neurofibrome. Une angiographie
est parfois nécessaire pour éliminer une patholo-
gie vasculaire.
Figure S.2. Schwannome du nerf pneumogastrique : échographie et TDM. Patient âgé de 47 ans qui présentait
depuis quelques mois une tuméfaction arrondie latéro-thyroïdienne droite isolée mesurant 3 × 5 cm de diamètre.
La fibroscopie nasopharyngée montrait une mobilité laryngée normale. L’échographie-Doppler montra une masse
cloisonnée partiellement kystique avasculaire située entre la veine jugulaire interne et la carotide primitive droite.
S 313
Sialendoscopie
La sialendoscopie est la dernière-née des tech- chirurgicaux proposés jusqu’alors. Le traitement
niques endoscopiques. Elle est indiquée dans les classique d’une sialadénite sous-maxillaire est en
sialadénites lithiasiques pour retirer les calculs et effet la sous-maxillectomie. Pour la parotide, le
traiter les sténoses. De plus, c’est une méthode traitement proposé est plus souvent médicamen-
diagnostique permettant de chercher et de repé- teux à cause du risque élevé de paralysie faciale
rer les lithiases, les sténoses et les dilatations après parotidectomie dans un contexte inflamma-
des canaux salivaires, mieux qu’à l’imagerie. Les toire. D’autre part, les études anatomopatholo-
sténoses sont plus fréquentes qu’on ne le pense. giques ont montré que les glandes retirées étaient
La moitié d’entre elles sont asymptomatiques normales dans un grand nombre de cas. Pour
et découvertes lors de la sialendoscopie. Elles les auteurs suisses, la sialendoscopie a permis de
peuvent être dilatées au ballonnet ou à l’endo- diviser par 10 les indications chirurgicales.
scope modulaire. On laisse un calibrage pendant La complication possible est la perforation. Au
une quinzaine de jours. niveau du canal de Sténon, elle est le plus souvent
C’est une technique qui peut se faire sous anesthésie asymptomatique. Lorsqu’elle se situe au niveau
locale ou sous anesthésie générale avec ventilation du canal de Wharton, il y a un risque d’emphy-
au masque laryngé. Ses résultats sont plus satisfai- sème du plancher buccal et du cou avec infection
sants que ceux des traitements médicamenteux ou à traiter par antibiothérapie.
314 Fiches ORL de A à Z
Stridor de l’enfant
Le stridor de l’enfant est un bruit inspiratoire de Le signe de gravité principal est la présence d’une
tonalité aiguë, exacerbé par les pleurs et comparé bradypnée inspiratoire avec tirage sus-sternal,
au cri du dindon. Il est intermittent durant l’éveil intercostal et sous-xiphoïdien. La stagnation pon-
et variable durant le sommeil. II commence entre dérale est le témoin du retentissement de la dys-
le 8e et le 15e jour après la naissance. Dans 90 % pnée. L’alimentation devient une lutte, la durée
des cas, le stridor de l’enfant est en rapport avec de prise alimentaire augmente : jusqu’à 1 heure
une laryngomalacie (stridor laryngé congénital pour chaque biberon, sans pouvoir le finir.
essentiel). C’est un collapsus isolé des structures Dans les formes sévères de laryngomalacie, une
supralaryngées à l’inspiration sans signes de endoscopie laryngée au bloc opératoire doit être
gravité. envisagée. Si le diagnostic reste confirmé, une
La confirmation est apportée par une fibroscopie supraglottoplastie ouvrant le larynx consiste à
pharyngo-laryngée dynamique sans prémédica- sectionner les replis ary-épiglottiques, ce qui a
tion chez un enfant à jeun depuis plus de 3 heures. pour effet de déployer l’épiglotte.
Dans une laryngomalacie, elle montre une épi- Ailleurs, l’existence de symptômes associés sug-
glotte tubulisée avec des replis ary-épiglottiques gère la présence d’une malformation laryngée qui
raccourcis et des cordes vocales bien mobiles sera confirmée par l’endoscopie sous anesthésie
(fig. S.4). générale :
Le stridor congénital essentiel s’aggrave jusqu’au • un stridor et une dyspnée dès la naissance
quatrième mois puis se stabilise pour régresser traduisent des lésions kystiques intralaryngées ou
ensuite lentement jusqu’à l’âge de 12 à 18 mois. siégeant dans la vallécule glosso-épiglottique ;
• un stridor avec dysphonie congénitale évoquent
des palmures laryngées ou une atrésie laryngée ;
• des fausses-routes associées au stridor peuvent
témoigner d’une paralysie laryngée, d’une dyski-
nésie laryngée ou d’un diastème laryngo-trachéal
(fente interaryténoïdienne de la paroi postérieure
du larynx s’étendant vers la trachée et faisant
communiquer œsophage et trachée) ;
• une toux rauque avec apparition retardée du
stridor et présence d’un angiome plan facial font
craindre un angiome sous-glottique ;
• un stridor, des troubles de déglutition, des
apnées périphériques et centrales dressent un
Figure S.4. Caractéristique d’une laryngomalacie :
tableau neurologique complexe ;
épiglotte tubulisée, replis ary-épiglottiques courts. • un stridor après séjour en service de néonatolo-
Photo : Dr Stéphane Orsel. Service ORL, CHU Limoges. gie suggère une sténose post-intubation.
S 315
Nutrition
Suites de l’irradiation
• Surveillance du poids, dont la chute témoigne
d’un obstacle à une alimentation correcte (mucite • Œdème facial et cervical sont aggravés par
post-radique, sténose de l’orifice œsophagien). l’exposition des zones irradiées au soleil : prescrire
• Recherche d’une complication de la nutrition des séances de drainage lymphatique.
entérale : constipation liée à l’absence de résidus, • Hypothyroïdie et sténose carotidienne survien-
diarrhée liée à un excès d’alimentation lactée ou nent parfois plusieurs années après. Les patients
à une malposition de la sonde nutritive, vomis- irradiés doivent donc bénéficier d’un dosage
sements liés à un bol alimentaire trop abondant annuel de la TSH et d’un Doppler cervical au
ou mal fractionné, dénutrition par carence pro- moindre doute.
tidique, déficits vitaminiques, etc. Dans cette • Asialie : définitive, elle est responsable de
situation, il est important de faire appel à une sécheresse des muqueuses, de nécrose des racines
diététicienne afin de mieux gérer la nutrition dentaires, d’ostéite après extraction dentaire et
artificielle. d’ostéoradionécrose. Il est essentiel que le patient
• L’utilisation d’une nutripompe à débit continu comprenne qu’il doit appliquer quotidiennement
et le recours aux traitements antiémétiques et ses gouttières fluorées toute sa vie. À défaut, les
antispasmodiques, ainsi qu’une surveillance atten- dents restantes noirciront et finiront par être res-
tive de la sonde de nutrition entérale (rinçage ponsables de complications infectieuses.
de la sonde après chaque administration et rem-
placement mensuel) sont des éléments importants
pour prévenir les complications.
Suites opératoires
• Hygiène de la canule au moins une fois par jour
par une infirmière à domicile en cas de trachéoto-
mie. Prescription de deux jeux de canule (canule,
chemise et mandrin), location d’un aspirateur,
d’un générateur d’aérosols. La surveillance du tra-
chéostome est plus facile en cas de laryngectomie
totale : trachéite croûteuse, granulome, bouchon,
récidive trachéale (fig. S.5). Figure S.5. Trachéostome après laryngectomie totale.
316 Fiches ORL de A à Z
Douleurs alerté par de petits saignements annonçant une
rupture cataclysmique de la carotide primitive.
Les séquelles douloureuses et la limitation de Embolisation et ligature de la carotide externe
l’amplitude articulaire de l’épaule en abduction doivent être proposées à temps.
sont la conséquence de l’évidement ganglion-
naire, spécialement en cas de section du nerf spi-
nal. Il est donc souhaitable de prescrire de façon Dyspnée
systématique une rééducation précoce de l’épaule Elle est laryngée. Souvent précédée d’une agi-
par un kinésithérapeute. Antalgiques : paracéta- tation liée à l’hypercapnie, il ne faut pas donner
mol, puis paracétamol + codéine, puis morphines de sédatifs mais des corticoïdes à doses massives.
orales… L’intubation est souvent impossible et il n’y a pas
d’autre solution que de pratiquer la trachéotomie
Hémorragies sous anesthésie locale.
Guide d'ORL
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
320 Fiches ORL de A à Z
x
• Après avoir fermement bloqué le tampon dans • Enfin, les deux chefs sont noués sur une
le nasopharynx, on procède à un tamponnement compresse roulée protégeant la columelle. Un
antérieur bilatéral par Merocel®. fil de rappel sortant par la bouche est gardé pour
faciliter le déméchage (fig. T.2C).
Les pathologies ORL sont d’une incomparable chirurgie à risque où l’on compte sur l’hémostase
diversité. Face à la médecine et à la chirurgie spontanée, où on tutoie les nerfs crâniens et où il
de consommation (cardiologie, orthopédie, y a une obligation de résultat.
ophtalmologie, etc.), l’oto-rhino-laryngologie La rançon de cette indépendance est parfois
peut apparaître comme une médecine de col- l’incompréhension de nos confrères, tant dans
lectionneurs. l’appréciation d’un mauvais que d’un bon résul-
À la fois médecin et chirurgien, l’ORL fait ses tat. Heureusement, la gratitude des patients que
examens complémentaires, pose ses indications, nous faisons bénéficier des progrès de l’imagerie,
opère ses malades et suit leur évolution de la de l’anesthésie et des nouveaux matériels est notre
naissance au quatrième âge. Sa chirurgie est une récompense.
Index
A –– du vestibule laryngé, 29
Acoumétrie, 104, 114 –– folliculaire, 68
Acouphènes –– indifférencié, 68
–– pulsatiles, 231, 233 –– médullaire (CMT), 68
Acouphénométrie, 232 –– papillaire, 68
Adénite Cautérisation, 249
–– aiguë bactérienne, 205 Cellules ciliées
–– rétropharyngée, 206 –– externes, 241
–– rétrostylienne, 206 –– internes, 241
Adénocarcinome de l'ethmoïde, 54 Cellulite
Adénome pléomorphe, 70, 307 –– cervicale profonde, 208
Aérateur –– orbitaire, 181
–– transtympanique, 111 Cervicotomie exploratrice, 76
–– tympanique, 95 Chémodectome, 294
Algie vasculaire de la face, 238 Chimiothérapie
Amygdalite chronique, 210 –– adjuvante, 251
Angine –– d'induction, 251
–– de Vincent, 200 Chirurgie endoscopique au laser CO2, 30
Anneau de Waldeyer, 195 Cholestéatome
Antibiothérapie probabiliste, 85 –– congénital, 105, 133
Anticoagulant, 216 –– épitympanique, 108
Antrites, 88 –– mésotympanique, 108
Appareil branchial, 244 –– post-traumatique, 105
Appareillage auditif, 148 Cisplatine, 251
ASSR, 128 Classification TNM, 28, 49
Audiométrie, 104 Claude Bernard-Horner
–– tonale, 117 –– Signe de, 311
–– vocale, 122 Clou de Lermoyez, 190
B Concha bullosa, 186
Brûlure par caustique, 226 Conflit vasculo-nerveux, 231
Buccopharyngectomie transmaxillaire, 51 Corps étranger, 222
C Croup laryngé, 221
Cancer Curiethérapie, 256
–– de l’amygdale, 47 Cystadénolymphome, 71
–– de l’oropharynx, 43 Cytoponction, 63, 66, 70
–– de la cavité buccale, 43 D
–– de la commissure antérieure, 27 Déhiscence, 234, 283
–– de la corde vocale, 27 –– du canal antérieur, 161, 284
–– de la margelle laryngée, 29 –– du canal semi-circulaire antérieur, 137
–– de la parotide, 71 Delayed vertigo, 257
–– du plancher de la bouche, 46 Désinfection d'un fibroscope
–– du rhinopharynx, 56 nasopharyngé, 258
–– du sinus piriforme, 30 Diverticule pharyngo-œsophagien, 259
–– du ventricule laryngé, 29 Dyspnée laryngée, 218
326 Index
E L
Échographie, 66, 70 Labyrinthectomie chimique, 170
EGF (epidermal growth factor), 247 Labyrinthisation, 136
Endoscopie nasale, 173 Labyrinthite, 110, 171
–– à l'optique, 18 Langue
Épiglottite, 221 –– Base de, 243
Épistaxis, 3, 211 –– mobile, 243
Épreuve calorique, 161, 166 Laryngectomie
Ethmoïdite aiguë extériorisée, 182 –– fronto-latérale, 34
Évidement –– horizontale sus-glottique, 35
–– ethmoïdal, 192 –– supracricoïdienne, 35
–– fonctionnel, 253 –– totale, 31
–– radical, 112, 253 Laryngite
F –– œdémateuse sous-glottique, 220
Fibrome nasopharyngien, 213 –– striduleuse, 219
Fibroscopie nasopharyngée, 17, 19 Laryngocèle externe, 275
Fistule Laryngomalacie, 314
–– branchial, 245 Laryngoscopie
–– de la deuxième fente branchiale, 267 –– directe, 25, 40
–– de la première fente branchiale, 265 –– indirecte, 16
–– de la quatrième fente branchiale, 269 Lavage d'oreille, 277
–– de la troisième fente branchiale, 268 Lésions précancéreuses, 49, 278
–– Signe de la, 171, 263 Leucoplasie, 26, 40, 278
G Lithiase salivaire, 72, 306
Gaine pour fibroscope nasopharyngé, 258 Lobo-isthmectomie thyroïdienne, 68
Ganglion Lymphangiome kystique, 77, 279
–– de Troisier, 76 Lymphome
–– sentinelle, 254 –– de Burkitt, 282
Gène p53, 247 –– ORL, 281
Globus hystericus, 202 M
Glomus tympanique, 131 Maladie
Glossectomies partielles, 49 –– auto-immune, 171
Goitre multinodulaire, 66 –– de Basedow, 67
Grenouillette, 271 –– de Hodgkin, 282
H –– de Horton, 237
Hémi-laryngo-pharyngectomie, 36 –– de Kimura, 305
Hémostase de l'artère sphéno-palatine, 215 –– de Lyme, 139, 298
Hémotympan gauche, 133 –– de Menière, 143, 168, 257
HIT (head impulse test), 168 –– de Rendu-Osler, 214
HPV 16-18, 273 –– métabolique de Widal, 188
Hydrops endolymphatique retardé, 172 Manœuvre
Hypertrophie des amygdales palatines, 200 –– d’Epley, 165
I –– de Dix et Hallpike, 163
Impédancemétrie, 123 –– de Sémont, 164
Implantation cochléaire, 147–149 –– de Valsalva, 235
Infections préstyliennes, 208 Masquage de l'oreille, 119
K Mastoïdites, 88
Kyste Méchage des fosses nasales, 216
–– amygdaloïde, 77 Méningite, 110
–– branchial, 245 Métastase ganglionnaire, 30
–– dermoïde, 63 Migraine, 170
–– du tractus thyréoglosse (KTT), 64 Mucite, 310
–– lympho-épithélial, 305 Myoblastome granuleux d'Abrikossof, 49
Index 327
Sinusite Test
–– aiguë, 179 –– d'Halmagyi, 168
–– aspergillaire, 185 –– impulsionnel céphalique, 168
–– frontale aiguë, 180 Thérapies cognitivo-comportementales (TCC), 232
–– maxillaire d'origine dentaire, 180 Thrombophlébite du sinus latéral, 110
Sonde à double ballonnet, 215 Thrombose de l'artère labyrinthique, 139, 171
Sous-maxillites, 73, 306 Thyroïdites d'origine auto-immune, 67
Stapédotomie, 138 Tomodensitométrie des sinus, 175
Sténose du méat acoustique, 131 Torticolis, 202
Stridor, 314 Trachéostome, 39, 315
Surdité Traumatisme par coton-tige, 133
–– auto-immune, 144 Tumeurs salivaires, 307
–– brusque, 139 Tympanoplastie, 135
–– de l'enfant, 144 Tympanosclérose, 101
–– de perception, 138, 148 Tympanotomie postérieure, 112
–– de transmission, 129 V
–– génétique, 146 Végétations adénoïdes, 198
–– iatrogénique, 143 Vertige positionnel paroxystique bénin (VPPB),
–– post-linguale, 145 162
–– prélinguale, 145 Vestibulopathie bilatérale, 171
–– professionnelle, 143 Vidéochirurgie endoscopique des sinus, 190
–– syndromique, 146 Voie
Syndrome –– rétrolabyrinthique, 143
–– de Gougerot-Sjögren, 304 –– rétrosigmoïdienne, 143
–– neurologique de la face, 317 –– translabyrinthique, 143
T Voix
Tache vasculaire de Kisselbach, 212 –– oro-œsophagienne, 40
Tamponnement –– trachéo-œsophagienne, 40
–– antérieur, 214 W
–– nasopharyngien, 215, 319 Weber, 115
–– postérieur, 215, 319 X
Taxanes, 251 Xérostomie, 310
Technique Z
–– fermée, 104, 107 Zona, 298
–– ouverte, 106, 109 –– auriculaire, 139