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DANS LE SECRET D'UNE CASSOLETTE, UN HÉRITAGE PAR «

NATURELLE FILIATION »
Résurgences et palingénésies dans la littérature algérienne
Beïda CHIKHI

Klincksieck | Revue de littérature comparée


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2010/1 - n° 333
pages 83 à 93

ISSN 0035-1466

Article disponible en ligne à l'adresse:


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http://www.cairn.info/revue-de-litterature-comparee-2010-1-page-83.htm
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Pour citer cet article :


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CHIKHI Beïda, « Dans le secret d'une cassolette, un héritage par « naturelle filiation » » Résurgences et palingénésies
dans la littérature algérienne,
Revue de littérature comparée, 2010/1 n° 333, p. 83-93.
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Dans le secret d’une cassolette,
un héritage par « naturelle filiation »
Résurgences et palingénésies dans la
littérature algérienne

La résurgence de certains motifs ou figures du passé dans la littérature


algérienne illustre une quête multiple et une remontée vers l’inaugural, qui
inscrit le sujet dans une histoire longue mais fragmentaire tout en relatant
sa naissance à l’écriture. La référence à l’Arabie heureuse apparaît pour la
première fois, explicitement, chez Jean Amrouche à la faveur d’une de ses
« auscultations intérieures » :

Cependant au cœur de ce désert, une source nourrissait la palme courbe,


le pampre et la grappe, l’ombre douce où saignait la fleur dure du grena-
dier. Cela c’était mon secret : une cassolette à moi, pour moi seul, hur-
lait tous les parfums de l’Arabie. Oui, un autel était en permanence élevé
dans ma mémoire, et au-delà dans mon âme même, où brûlait un encens
composé, la source, ni le brûle-parfum ne m’appartenait en propre. J’en
étais cependant l’héritier par naturelle filiation. 1

Dans sa poésie mystique, Jean Amrouche a cultivé un flux sensible et


ascensionnel vers l’absent de l’histoire. Il a croisé les thèmes et reconsti-
tué la symbolique d’un Idéal perdu. En contexte colonial, l’Arabie heureuse
anime le sujet à travers ses arrachements et sa division ; le questionne-
ment douloureux des origines martyrise autant l’esprit que les sens. Dans le
même temps, ce questionnement, entamé dès 1934 dans Cendres 2, annonce
le traitement littéraire de plus en plus résiduel de l’Arabie heureuse. Ainsi
nommée, la contrée est soumise à des jeux d’anamorphose entre une par-

1. « Pages de carnet », fragments de son Journal (1928-1961) publiés dans Études médi-
terranéennes, n° 11, Paris, 1963.
2. Son premier recueil de poésies, Paris, L’Harmattan, 1983.

Revue 1-2010
de Littérature comparée
Beïda Chikhi

celle de l’origine issue d’une immigration yéménite vers le nord de l’Afrique 3


et un enracinement africain, bien plus ancien 4.
Si la cassolette renferme les secrets d’une « clandestinité-rempart »
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contre la récupération idéologique des origines, elle préserve également
les héritages que l’histoire s’est chargée d’emmêler. L’Arabie continue de
se manifester dans sa plénitude comme langue, culture et histoire, mais
oscillant entre proximité et distance, elle participe, par « naturelle filiation »,
d’un complexe de traces 5. Les textes littéraires estampillés par des motifs
récurrents de cette référence, — l’opulence, la divination, la poésie antéisla-
mique, les savoirs, les palingénésies, les reines arabes —, ont d’abord une
visée symbolique : l’héritage critique des civilisations qui se sont succédé en
Algérie et ont tressé une généalogie multiple.
Les motifs font miroir et suscitent l’analogie critique à partir d’une focali-
sation dominante : l’histoire algérienne qu’il s’agit d’articuler sans exclusive
aucune. Le motif des cités perdues, décadentes ou détruites par un cata-
clysme, se recycle au contact des imaginaires méditerranéens et devient
palingénésie sociale ou appréhension utopique de l’espace. Dans une vision
plus récente, le mythe du simorgh, qui se substitue à lui, oriente l’œuvre
littéraire vers des questions politiques plus incisives. Là encore, l’histoire
décompose les mythologies initiales en les mettant à l’épreuve de l’actua-
lité. Quant aux figures historiques ou légendaires des reines arabes, elles
produisent des avatars enrobés d’une ambiguïté qui résiste mal à l’analyse
historique des romancières algériennes.

Simorgh : palingénésies et utopies

« La Cité du Simorgh est là. Et on est là. Qui, On ? Nous ! » 6


Corrélative du conflit entre absence et présence, mort et naissance, et
étroitement liée à la scène double de la source cachée, la quête poétique
algérienne s’approprie de larges espaces sur lesquels l’écriture espère se
donner un pouvoir : pouvoir sur l’adversité, sur la tragédie historique, sur
le désert qui avance… La source au cœur du désert est éblouissante de
promesses, elle est l’image même du désencombrement qui rend au mot
« Je » toute sa disponibilité : « Cela c’était mon secret : une cassolette à
moi, pour moi seul, hurlait tous les parfums de l’Arabie. » 7 Autel en perma-
nence élevé, mémoire en éveil, âme sensible aux senteurs composées, — en

3. Supposée par Ibn Khaldoun, notamment dans Le Livre des exemples ou Livre des consi-
dérations sur l’histoire des Arabes, des Persans et des Berbères.
4. Jean Amrouche, L’Éternel Jugurtha. Propositions sur le génie africain (1946), Paris,
Études méditerranéennes, 1953.
5. Voir à ce propos Beïda Chikhi, Maghreb en textes, écriture, histoire et symbolique,
Paris, L’Harmattan, 1996 ; Littérature algérienne, désir d’histoire et esthétique, Paris,
L’Harmattan, 1997.
6. Mohammed Dib, Simorgh, Paris, Albin Michel, 2003, p. 13.
7. Jean Amrouche, op. cit.

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Résurgences et palingénésies dans la littérature algérienne

somme quelques morceaux du paradigme traditionnel en train de se per-


dre —, constituent le départ de feu nécessaire à la renaissance. Mohamed
Dib se saisit de ces morceaux dans L’Incendie (1952), les attisera dans Qui
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se souvient de la mer (1962), puis dans Cours sur la rive sauvage (1964), récit
poétique de la renaissance d’une cité prestigieuse.

Si l’auteur rejoue à sa manière une somme de scénarios mythologiques


pour forger sa propre philosophie de l’espérance, la cité qui se fragmente et
se reconstruit est aussi un texte aux signes cryptés. Le palimpseste des villes
algériennes se fonde « sur des courants multiples et changeants, les mêmes
qui entouraient la cité d’une brume impalpable » 8. La ville rassemble, dans
une figure syncrétique idéale, ses formes successives, depuis l’antique cité
— grecque, phénicienne, romaine, arabe — jusqu’à la ville européenne, lumi-
neuse, mais brusque, brutale, impétueuse, impitoyablement conquérante.
Mais avant d’en arriver au site idéal, capable d’accueillir la ville désirée, « un
dialogue aussi impitoyable qu’un duel à l’arme blanche » 9 s’engage entre la
symbolique originelle arabe et celle de la ville moderne. La villa-nova de Dib
hésite entre l’utopie et l’âge d’or 10 qui évoque l’Arabie heureuse : des paysa-
ges vagues et lumineux, des lignes atténuées et colorées, transparaissent
dans une brume qui dispense sensations douces et parfums. Toute l’har-
monie du paysage urbain tient à une relation anthropocosmique équilibrée.
Cependant, ce paysage se pétrifie et l’on est mis en présence de « manières
d’idoles » :

Je crus déceler que là se trouvait enchaînée toute une — race de dieux ? —


qui ne renonçaient pas à survivre. Entretenu par la garde qu’ils montaient,
un puissant silence pesait sur ce monde pétrifié. Silence qu’une sorte de
murmure errant, grignotant, néanmoins avec entêtement — me guidant
sur ce bruit, je rôdais avant de comprendre qu’une source coulait dans les
parages. Ce gazouillis agreste naturel, paisible, qu’il me parut étrange ! 11

Les aubes premières et les lieux édéniques tentent de se reconstituer,


malgré la pétrification, en réinstaurant des valeurs et des rituels d’un passé
privilégié. Ce paradigme se transformera dans Simorgh.
Le Simorgh est l’incarnation même des mythes voyageurs entre la Perse,
l’Arabie, la Grèce, Rome et l’Algérie. Dans sa collecte des mythes et des
archétypes, Mohamed Dib s’était d’abord intéressé à la légende rapportée
par la tradition arabe selon laquelle l’oiseau de feu serait né en Arabie au-
dessus des eaux abondantes puis, attiré par le soleil, aurait volé vers l’occi-
dent ; c’est néanmoins l’origine persane qu’il a privilégiée dans son roman.

8. Cours sur la rive sauvage, Paris Éditions du Seuil, 1964, p. 119.


9. Ibid.
10. Voir à ce sujet Beïda Chikhi, Problématique de l’écriture dans l’œuvre romanesque de
Mohammed Dib, Alger, OPU, 1989.
11. Cours sur la rive sauvage, op. cit., p. 136.

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Beïda Chikhi

Le Simorgh a acquis dans les textes persans d’Avicenne, Sohrawardi, Attar


et Rumi une expansion métaphorique capable de guider l’écrivain algérien
dans une ontogenèse propice à ses désirs. De grande taille, pouvant trans-
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porter le poids le plus lourd, l’oiseau mythique n’aime pas les serpents,
autrement dit, les conquérants qui s’insinuent dans une « hospitalité non
offerte » ; il est immortel, puisqu’il renaît de ses propres cendres. Il est éga-
lement l’Arbre du Savoir qui sauve le monde du cataclysme qui le menace de
manière cyclique :

Nous étions la civilisation. Et j’y rôde à présent, portant mes pas de ci


de là. Ruinée, elle le sera ? Comme j’y porte ainsi mes pas, je ne puis le
concevoir. Vivante, elle est, et le sera encore longtemps. Je ne vais donc
pas pleurer sur elle avant que ce ne soit l’instant, si cet instant a jamais
lieu, mais je ne crois pas. J’ai confiance. 12

Le Simorgh réapparaît souvent au cœur du drame et de la tragédie ; il


nous rappelle ce qui en nous est le plus fort, et répond à nos questions :

Pas un Américain par contre, serait-ce l’homme le plus puissant, le plus


fortuné au monde, un Ford, un Bill Gates, ne pourrait s’offrir sur son pro-
pre terreau ce luxe que je m’offre sur le mien et, cela : ça fait la différence
entre nous, une sacrée différence ! 13

Dans son roman, L’Invention du désert 14, Tahar Djaout ne sollicite la


médiation d’aucun oiseau mythique venu d’ailleurs ; les oiseaux qui ont peu-
plé son enfance insufflent à son imaginaire assez de force ascensionnelle ;
en revanche son parcours sur les traces de son ancêtre jusqu’à « Sanaa la
troglodyte » l’inspire dans le sens d’un rapprochement significatif entre des
lieux familiers, remémorés, imaginés, de sa cartographie familiale. Sanaa
a les faveurs de l’écrivain ; elle a quelque chose de similaire avec certaines
villes du Sud algérien, notamment les Balcons du Roufi, pas loin de Biskra,
l’antique cité qui, jadis, a tenté de repousser les conquérants arabes et a vu
tomber le plus prestigieux d’entre eux : Okba Ibn Nafaa 15.
Il est évident que Sanaa, en tant que vestige d’un bonheur disparu, ne
pouvait que raviver les parfums conservés dans le secret de la cassolette.
L’attrait de l’ancien guide les pas du poète, l’incitent à la déambulation parmi
les lieux où le culte du divin a succédé à la divination ancienne ; la croyance
a changé de sujet et les noms propres résonnent autrement. Des mosquées
imposantes ont renversé ces « manières d’idoles » qui ont impressionné le
narrateur de Cours sur la rive sauvage : Djemaa d’el-Abhar, Djemaa d’Aroua

12. Simorgh, op. cit., p. 28.


13. Ibid. p. 29.
14. Paris, Édition du Seuil, 1987.
15. Il meurt lors de la défaite de son armée, en 683, contre les soldats berbères du prince
Koceila. La ville et la mosquée qui abrite son tombeau portent son nom : Sidi Okba.

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Résurgences et palingénésies dans la littérature algérienne

bent Ahmed es-Salihi, du nom de la « fille de roi et reine, qui gouverna, à


partir de Djibla, le Yémen au XIIIe siècle », ou encore Djemaa el-Kabir, « qui
date, dit-on, du prophète Mohammed avec son trésor de vieux manuscrits ».
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L’Arabia felix a déposé ici et là, dans ses maisons, dans ses ruelles, sur ses
murailles entaillées de signes, une multitude de cassolettes que le visiteur
concerné peut ouvrir : les secrets conservés de la clandestinité-rempart l’y
attendent :

Sanaa se souvient de tout cela : elle porte — elle, la ville de terre dédiée à
l’innocence et à la paix des matériaux inoffensifs — tant d’entailles, d’em-
preintes, de signes tremblés ou récurrents dans ses murailles, ses rues,
le visage tanné de ses hommes. Dans ses racines telluriques qui la sou-
dent aux montagnes tout autour dont elle tire sa substance et sa couleur.
Terre érodée comme le Hoggar, debout en fantômes imposants. 16

Adossé à l’histoire, L’Invention du désert rappelle comment la contrée et


ses cités ont repoussé les conquérants étrangers pour permettre aux dynas-
ties locales de se relayer, attisant leurs rivalités internes jusqu’à leurs déclins
successifs : les Sabéens, les Hymiarites, dont les vestiges sont spectaculai-
res à Mareb et à Zofar, les Qatabanis, et les Hadramaouti, peuple d’origine
d’Ibn Khaldoun qui a émis l’hypothèse d’une origine yéménite des Berbères.
L’éloge de l’archaïque et de l’antique sous-tend la description de la vieille cité,
enchanteresse par ses parfums, ses épices et « ses costumes d’antiquité ».
Sanaa-l’ancienne a conservé son harmonie et sa disponibilité au bonheur :

Venelles merveilleuses d’un conte de fées acclimaté. Souk el-malh et


souk el-hadid, en pleines entrailles de l’ancienne cité, retiennent encore
tout ce qui fait le geste harmonieux et nonchalant, le goût délectable.
Raffinement asiatique dans le salut, le langage et l’agencement des
étals. 17

Sanaa donne envie au poète, « l’oiseau tôt levé pour assister à la Genèse
qui chaque aube refait le monde » 18, de faire confiance à « l’âge de naïveté
et d’étonnement » 19 des vieux récitants du Coran de Djemaa el-Kabir ; de se
laisser transpercer par le regard « d’une clarté où nagent la bienveillance et
une curiosité ingénue », encore incandescentes chez « L’Homme qui psal-
modie la Naissance » 20.
Amrouche, Dib et Djaout ont élargi leur perception imaginaire de l’Arabie
heureuse en étirant autant le territoire géographique que la temporalité. La
transmission historique, par le biais des chroniqueurs, et légendaire, par

16. Op. cit., p. 83.


17. Ibid., p. 87.
18. Ibid., p. 128.
19. Ibid., p. 97.
20. Ibid. p. 98.

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Beïda Chikhi

le canal de l’oralité avait déjà brouillé les frontières et déplacé les lignes.
Ces écrivains ont aisément profité de ces déplacements pour délimiter leurs
espaces et leur complexe de traces dans le processus mémoriel qui s’impose
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d’une manière ou d’une autre dans l’histoire des peuples. Assia Djebar, en
quête d’une religiosité perdue, ne s’y prend pas autrement pour faire retour
à l’Arabie des origines.

Avatars

Dans Loin de Médine 21, Assia Djebar entame sa galerie de portraits des
grandes femmes de l’islam avec l’histoire de la reine yéménite : « Il y avait
une fois une reine à Sana’a ; une jeune reine. » Dans la dizaine de pages qui
lui sont consacrées, cette femme, dont « l’histoire ne nous a pas laissé le
prénom » n’est désignée que comme « la Yéménite », « la reine », ou « la
reine yéménite ». À l’arrière plan de cette évocation se profile la singulière et
multiple Bilqis, sublime reine de Saba, à la fois sage, magicienne, tentatrice.
Cette voyageuse, à la manière du Simorgh, dans les langues, dans les his-
toires et les mythologies, dans les textes sacrés, — du Nouveau Testament
au Coran —, dans les musées, les opéras, les cathédrales et les mosquées,
suscite discrètement chez Assia Djebar une nouvelle interprétation des des-
tins croisés de femmes à l’aube des religions monothéistes.
La romancière relègue à l’arrière plan les récits rapportés, y compris la
version coranique qui donne un surplus de sens à la rencontre de ces deux
êtres fascinants, Bilqis et Suleiman, dans un palais transparent en marbre
bleu, roche métamorphique et métaphorique sous laquelle courait un ruis-
seau détourné en stratagème par Suleiman. Ne sont retenus dans le roman
que les contenus symboliques et attributs féminins de Bilqis, qui se fixent
imperceptiblement sur l’avatar : « La reine yéménite ». Au-delà de l’intérêt
que l’on peut porter à la source coranique et aux chroniqueurs de l’instau-
ration islamique, c’est le motif comme élément stratégique de la diégèse
qui retient notre attention : la révocation en bonne et due forme de la reine
« enrobée d’ambiguïté » au profit des

Femmes en mouvement « loin de Médine », c’est-à-dire en dehors, géo-


graphiquement ou symboliquement, d’un lieu de pouvoir temporel qui
s’écarte irréversiblement de sa lumière temporelle. 22

L’intention téléologique 23 est nettement marquée : la finalité de cette


reconstitution par voie romanesque est de fausser le jeu des déviateurs

21. Paris, Éditions Albin Michel, 1991.


22. Ibid., p. 5.
23. À propos de cet aspect de l’œuvre, voir dans Beïda Chikhi, Assia Djebar, Histoires et
fantaisies, Paris, PUPS, 2008, le chapitre intitulé « Loin de Médine ou la quête d’une
religiosité perdue ».

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Résurgences et palingénésies dans la littérature algérienne

qui détournent les textes en instruments de coercition sociale. Comme à


son accoutumée, mais de façon plus impérative, elle atteste dans l’avant-
propos la validité de ses sources : les historiens Ibn Hicham, Ibn Saad et
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Tabari. Dans le même temps, elle suscite l’intérêt pour sa propre inter-
prétation, effectuée non sur des traductions mais sur les textes d’origine,
en arabe littéraire. Se défiant de toute traduction/trahison, la démarche
historienne, méthodique, ne néglige cependant ni les chroniques annexes,
nourries à la croyance, ni la tradition qui se transmet différemment en
fonction des lieux et des époques. « La reine yéménite », la descendante
de Bilqis par « naturelle filiation », est soumise à une comparaison avec un
autre personnage biblique :

Ce courage et cette rancune habitant le personnage, cette complexité


qui secoue cette femme dans cette chambre éclairée comme dans un La
Tour, bref cette richesse de pénombre a une limite : ce n’est pas la femme
qui a coupé la tête de Aswad. Elle ne sera pas une Judith arabe, ramenant
la tête d’un nouvel Holopherne. 24

Comparée à l’héroïne biblique de premier plan, ce personnage — « un


second rôle » en ces premiers temps de l’Islam — n’a ni les mêmes moti-
vations ni le même environnement. La Yéménite n’a pas à venger tout un
peuple ; elle n’a qu’à se sauver, elle et peut-être même pas, seulement
se réconcilier avec elle-même, petite aventurière perdue dans la fres-
que guerrière. Elle n’a pas l’intransigeance, la passion formidable d’une
Judith, héroïne nationale. 25

En nouant le dialogue avec les chroniqueurs de l’époque, Assia Djebar


exploite tous les détails liés aux situations, à l’environnement, à l’esprit
du temps. La reine yéménite est examinée sous toutes ses coutures : son
« corps frêle », ses « bras fragiles », ses mains « non de guerrière mais de
poupée » ne la poussent pas « jusqu’au sang pour les autres ». L’épisode du
palais de Sana’a illustre une façon d’être et d’agir des femmes bédouines de
l’époque, mêlées aux hommes dans les combats, femmes rusées de l’amour
et de la séduction, femmes douces et insinuantes vouées à la maternité,
elles ne sont pas encore prêtes à enfanter une Judith à la « pureté défini-
tive », mue par une « pulsion de fatalité » et auréolée d’un « éclat de tragé-
die » : « Ce n’est pas encore le moment, dans l’imaginaire arabe, pour faire
lever de tels êtres, ou pour en inventer ! Pas encore, du moins en ces récits
des temps anciens. En cette origine. » 26
La Yéménite est donc « enrobée d’ambiguïté », comme Bilqis, mais
contrairement à elle, disparaît dans l’oubli. Aucune descendance ne la pro-
longe. Aucune trace de nom propre ne l’inscrit dans la longue histoire des
femmes arabes en mouvement. Il faudra attendre « des Musulmanes de la
plus rare espèce : soumises à Dieu et farouchement rebelles au pouvoir, à

24. Op. cit., p. 26.


25. Ibid.
26. Ibid.

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Beïda Chikhi

tout pouvoir » qui prolongeront le sillage de Fatima, fille du prophète, « en


Syrie, en Irak, plus tard en Occident musulman » 27.
Les choix romanesques d’Assia Djebar introduisent complexité et nuance
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dans la fabrication des portraits des femmes arabes et dans la description
des scènes de la vie quotidienne. Au fil du texte se détachent ces figures por-
tées par des voix anonymes mais aussi par celles des prestigieuses rawiya-
tes 28, dont Aïcha, l’épouse préférée du Prophète, « la préservée », « la Mère
de tous les Croyants ».
D’abord rassemblées par la similitude de leurs destinées, — les soumi-
ses, les insoumises, les voyageuses, celles qu’on épouse après la bataille,
etc. — puis individualisées par un rôle singulier ou une histoire singulière
— celle qui attend Gabriel, celle qui dit non à Médine, Aïcha et les diffa-
mateurs, Selma la rebelle, la chanteuse de satires, la combattante... —, les
femmes évoquées sont reines ou bédouines, poétesses inspirées ou guer-
rières, ou héroïnes au jugement politique fiable... Dans ce puzzle féminin,
Bilqis n’est plus qu’une ombre abandonnée au seuil du livre, à la mémoire
des autres. Son avatar a mis un terme à son sillage, l’a exclue du même coup
de la nouvelle filiation que la romancière algérienne questionne à partir de
la source fondatrice : Agar, l’expulsée, et son fils Ismaël.
Loin de Médine , qui explicite ces choix et oriente la distribution dans
le sens téléologique désigne au lecteur les points forts que sont le prolo-
gue, l’épilogue, et surtout le point d’orgue, l’agonie du calife du Messager
de Dieu, autrement dit la deuxième disparition à haut risque après celle de
Mohammed ; disparition qui ravive chez Othman, l’un des Compagnons du
Prophète, « l’épouvante devant l’histoire qui va se répéter, du drame — des
houles de successions — qui va réapparaître. » 29 En effet, la restitution des
destinées féminines n’acquiert sa pleine signification que dans son rapport
à la disparition des Sages, laissant les femmes et les hommes de l’Islam
dans un orphelinat total, dont les accents mélancoliques se font entendre,
aujourd’hui encore, avec autant d’intensité que dans le poème final intitulé
« FILLES D’AGAR, dit-elle » :

« Filles d’Agar », dit-elle


dit toute femme dans le désert d’Arabie
qu’elle soit rebelle, qu’elle soit soumise à Dieu,
« En quoi suis-je, en quoi sommes-nous toutes d’abord filles de l’expulsée,
de la servante la première accouchée, et pour cela, abandonnée ? » 30

27. Ibid., p. 300.


28. La délégation du récit de la mémoire et les relais de la voix sont, comme le veut la
tradition, dévolus aux rawis et aux rawiyates, dont la fonction originelle de transmission
attachée à la vie du prophète ouvre un champ d’informations précieuses et de com-
mentaires pertinents.
29. Ibid., p. 238.
30. Ibid. p. 302.

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Résurgences et palingénésies dans la littérature algérienne

La filiation double, marquée autant par Ismaël que par sa mère Agar,
joue sur une ambivalence forte en signification. Agar est bien la blessure ini-
tiale, l’épreuve avant le commencement, avant le jaillissement de la source
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Zem-Zem. Agar est l’exil à dépasser. Ismaël est sa promesse de sens, réa-
lisée avec la réapparition de l’Ange Gabriel et sa dictée à Mohammed, des-
cendant d’Ismaël.

Alchimies

Loin de Médine cerne l’impact d’une telle division symbolique : la « pro-


messe de sens » a été détournée en faveur des fils d’Ismaël, reléguant ses
filles aux marges de l’oubli et les condamnant à revivre indéfiniment le des-
tin d’expulsée de leur mère. Et l’on se souvient que, dans le récit corani-
que, c’est une promesse et une source détournées en stratagème qui sont
à l’origine de la liaison de Bilqis et de Suleiman ; de ce stratagème naîtra
Ibn Al Hakim, leur fils, qui s’est rendu à Jérusalem pour se faire reconnaître
de son père et transformer sa « filiation naturelle » en « filiation légitime ».
Bilqis, dont le nom propre n’est pas mentionné dans le Coran mais dans
les hadiths 31 passe alors dans les coulisses de la fondation de la dynastie
salomonide. L’histoire et l’archéologie n’ont pu, semble-t-il, assurer à cette
légende un fondement ni attester véritablement l’existence du personnage,
ce qui a sans doute incité Assia Djebar, l’historienne, à la prudence. Les
modèles féminins initiés ont tenté de résister à la misogynie ambiante, qui
s’est appliquée à les renverser et à refouler le rôle fondamental qu’elles ont
joué dans les palingénésies sociales.
Pour retrouver l’esprit premier et la grâce initiale, Assia Djebar réin-
tègre les femmes dans une histoire au plus près du quotidien, les fait revi-
vre dans ce qui les rapproche de sa propre réalité de femme-créatrice et de
« guerrière » :

Sadjah crée des images, elle invente des rythmes, elle débite sans qu’elle
fasse effort, des grappes de stances obscures mais étincelantes ; sa
prose coule haletante ou limpide. Dans de telles transes, elle est vrai-
ment possédée : elle a décidé d’appeler elle aussi, « Dieu », ce feu de
poésie dévoratrice qui la brûle. 32

Dans son désir de poésie, de danse et de musique, la femme se souvient de


ses origines et d’une certaine gesticulation artistique, libératrice, qui revient

31. Il s’agit de traditions qui relatent des actes, des paroles et des réflexions accomplis
ou émis par le Prophète, telles que ses Compagnons les ont rapportées. Les sources
attestées se multiplient au fur et à mesure que le roman avance : les hadiths consti-
tuent l’essentiel de l’arrière-texte documentaire. Certes, est-il précisé dans l’avant-
propos, « un hadith n’est jamais tout à fait sûr. Mais il trace, dans l’espace de notre foi
interrogative, la courbe parfaite d’un météore entrevu dans le noir. »
32. Op. cit., p. 46.

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Beïda Chikhi

périodiquement telle une pulsion « presque irraisonnée, déclenchant un


déplacement d’équilibre » dans un contexte où seul l’homme se donne le droit
de parler à Dieu. Hawa, Ève musulmane, n’échappe pas à cette misogynie qui
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désigne le désordre comme un attribut féminin. Les Mille et une nuits prolon-
geront cette fantasmatique de la femme-désordre qui fait vaciller la scène
royale et l’ordre patriarcal. Les femmes, et surtout celles dont la mémoire res-
tera vivace dans les imaginaires populaires — comme Fatima la contestataire,
fille du prophète, ou Aïcha, la rawiya, l’épouse préférée du prophète, qui jouira
d’un destin privilégié — vont exercer leurs voix, affûter leur parole et imposer
leur rythme dans les coulisses des pouvoirs et dans les réseaux clandestins.
Elles y croient : seul le verbe féminin peut combler la place de l’absent,
ce Père qui transmit son souffle à un corps féminin : la fille, Fatima, a été
dépositaire, comme l’épouse Aïcha, d’une parole illuminante. Le moment
ultime de l’agonie les a rapprochés encore un peu plus. Aïcha fut témoin de
ce moment où le Prophète murmura à Fatima « de mystérieuses paroles »
qui la secouèrent d’un « flot inextinguible de larmes ». Puis, d’une parole
murmurée à l’autre, les sanglots s’apaisent ; père et fille partagent un secret
et « la joie arrive en éclaircie, transforme ces deux êtres aimants ». Aïcha,
en témoin, reste fascinée devant cette « douceur séraphique ». Dans ce scé-
nario filial, qui se clôt dans l’allégresse et dans lequel le bonheur et la mort
se touchent de si près, la romancière trouve matière à fantaisie. La relation
filiale entre le Messager et sa fille n’est pas ordinaire : Fatima est une pré-
sence complète et une forte personnalité. Elle cristallise ainsi une certaine
idée de la continuité en l’absence d’un descendant mâle :

Rêver à Fatima personnellement, en dehors de son père, de son époux, de


ses fils, et se dire que peut-être — (qui l’a perçu, l’a écrit ou l’a transmis,
osant par là même un pêché de lèse majesté...), — oui, peut-être que
Fatima, dès sa nubilité ou en cours d’adolescence, s’est voulue garçon.
Inconsciemment. À la fois Fille (pour la tendresse) et Fils (pour la conti-
nuité de son père). Épousant certes le cousin du père, surtout parce qu’il
est le fils adoptif du père : s’épousant presque elle-même à vrai dire, pour
s’approcher au plus près de cette hérédité désirée et impossible, de ce
modèle du mâle successeur par lequel Mohammed aurait perpétué sa
descendance. 33

Ce scénario, à la limite du fantasme correcteur par lequel le renverse-


ment d’un ordre devient envisageable, se nourrit d’un désir transsexuel.
Associé à l’esprit poétique, il peut devenir un mode efficace d’émancipation.
Loin de Médine est en cela une méditation sur la place réelle qui revient à la
femme dans une hiérarchie imposée, dès l’origine de l’humanité, selon un
mode de différenciation sexuelle. La méditation mesure l’ampleur du désas-
tre qui s’ensuit lorsque cette hiérarchie n’est pas respectée. Lorsque l’occu-
pation d’une place n’est pas autorisée, elle se solde par un sacrifice :

33. Ibid., p. 60.

92
Résurgences et palingénésies dans la littérature algérienne

Oui, Mohammed est abtar ; du coup Fatima assure, par ses fils, le désir
trop humain de son père. Malgré sa mort prématurée, elle pressentira
que, des décennies après, se préparait le sacrifice terrible que la famille
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du prophète aurait à subir. Tentative de la fille aimée croyant parer à la

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déshérence et annonçant au contraire la dissension fatale ! 34

La méditation se prolonge dans la suite du récit. Se faisant rawiya, Aïcha


indique la voie : instaurer le récit et veiller à la transmission de témoin.
Diffamation, jalousie, enjeux de pouvoir, tout se mêle autour de la figure
d’Aïcha, « la préférée », « la préservée », celle qui bénéficie de privilèges
divins et occupe une place qui ne peut, par tradition, lui revenir. Aïcha détient
de surcroît un sens caché, mystique, des dits prophétiques ; elle le trans-
met dans la cassolette secrète de ses récits. « Mère de tous les Croyants »,
elle initie l’enfance à la Lumière, qui en son temps l’a lavée de tout soup-
çon. Aïcha, « la vie », pour laquelle le verset de la Lumière est descendu, se
révèle aujourd’hui véritable manifeste contre l’intégrisme.
Si le roman se termine sur l’évocation des filles d’Agar, c’est que ces des-
tinées féminines ravivent une mémoire lointaine liée à un fait fondateur de
civilisation ; une séparation d’avec l’ancien temps abrahamique, une épreuve
douloureuse sans laquelle le passage ne serait point sensible. La civilisation
se charge en principe de transformer cette douleur en parole vive, en source,
en musique des commencements. Le roman se fait alchimie et formalise un
cheminement corporel, charnel, sensuel, pour retrouver la salive, le souffle,
l’esprit de la promesse, cette Lumière descendue du ciel pour Aïcha.

Beïda CHIKHI
Université Paris-Sorbonne (Paris IV)

34. Ibid. Abtar (mot arabe) : qui n’a pas d’héritier mâle.

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