Vous êtes sur la page 1sur 35

Contentieux administratif

INTRODUCTION

Contentieux = ensemble de litiges non-résolus entre 2 ou plusieurs parties


Contentieux administratif = ensemble des litiges liés à l’activité administrative et dont le règlement
incombe à l’ordre juridictionnel administratif
è Etude des règles régissant l’ordre juridictionnel administratif et des différentes règles à
respecter et qui régissent le fonctionnement de cet ordre administratif
Toutes les règles gouvernant le procès administratif sont autonomes -> règles de procédure civiles
inapplicables -> règles du CA élaborées de manière indépendante
CE, 1862, Eaux thermales de Vichy : autonomie ne signifie pas pour autant une ignorance totale de la
procédure civile -> JA peut s’en inspirer (ex : possibilité de faire tierce opposition)

Section 1 : l’évolution du contentieux administratif

Mise en place d’un juge spécifique pour l’administration assez rapidement -> il aurait été possible
que les personnes publiques soit considérées comme des justiciables ordinaires (JJ)
Edit de Saint-Germain, 1641 : refus de laisser l’autorité judiciaire de contrôler l’administration
Lois des 16 et 24 août 1790 : séparation des fonctions judiciaires et administratives
Décret du 16 fructidor an III : tribunaux judiciaires ne peuvent connaître des actes d’administration
Constitution de l’an VIII (1799) et loi du 28 pluviôse an VIII qui crée les conseils de préfecture qui
préfigurent les TA
CE et conseils de préfecture limités car sa seule mission est d’aider les ministres à prendre des
décisions relatives aux réclamations ou aux plaintes formées par les particuliers -> pas de saisie
directe car le litige doit d’abord être soumis au ministre
è Théorie du ministre juge et justice retenue
Loi du 24 mai 1872 : passage à une justice déléguée -> compétences du CE se limitent exclusivement
aux cas prévus par la loi -> il reste un juge d’attribution
Arrêt Cadot, 1889 : fin de la théorie du ministre juge -> CE s’est estimé compétent sans que la loi ne
le prévoit -> tous les litiges relatifs à l’administration peuvent être portés devant lui
1953 : création des TA pour remplacer les conseils de préfecture + juge de droit commun du CA
Loi du 31 décembre 1987 : création des CAA

Section 2 : les sources du contentieux administratif

I- Les sources constitutionnelles

Aucun titre spécifique sur le JA dans la Constitution ; différents articles sur le rôle consultatif ou de
filtrage des QPC du CE (arts. 38,39 et 61-1)
CC, 1980, Validation d’actes administratifs : consécration d’un PFRLR relatif à l’indépendance de la
juridiction administrative -> consécration indirecte d’une dualité de juridiction + valeur
constitutionnelle

1
CC, 1987, Conseil de la concurrence : reconnaissance d’un PFRLR consacrant une réserve de
compétence au profit du JA (ex : contentieux de l’excès de pouvoir) -> reconnaissance concrète d la
fonction du JA -> suppression par le législateur impossible
CC, 1987, Assemblée territoriale de la Polynésie française : droit à un recours juridictionnel effectif

II- Les sources européennes

DUE à une influence limitée : impact direct de quelques textes (directive de 1989 : référé
précontractuel
Art. 267 TFUE = mécanisme de renvoi préjudiciel à la CJUE : CE a parfois l’obligation d’effectuer un tel
renvoi en tant que juridiction souveraine -> dialogue JA et CJUE
Charte des droits fondamentaux de 2000 : droit à un recours effectif
CJCE, 1990, Factortame : juge national à l’obligation d’écarter toute règle interne qui ferait obstacle
au prononcé de mesures provisoires propre à assurer le respect du droit communautaire
Possibilité pour tout justiciable de saisir la CEDH après épuisement des voies de recours interne -> CE
a tendance à se conformer aux interprétations de la CEDH
Protocole n°16 à la CEDH de 2018 : CE peut demander à la CEDH son avis sur des questions de
principe relatives à l’interprétation ou à l’application des droits et libertés définies par la convention
ou ses protocoles
Art. 13 CEDH : droit à un recours juridictionnel effectif / art. 6 CEDH : droit à un procès équitable
France déjà condamnée pour non-respect de l’art. 6 mais cela ne conduit pas à une réouverture de la
procédure juridictionnelle -> un litige ne peut être jugé qu’une fois (CE, 2004, Chevrol)

III- Les sources législatives et règlementaires du contentieux administratif

CJA entré en vigueur en 2001 et comprend de manière claire les différentes règles régissant la
procédure contentieuse + ne s’applique qu’aux juridictions administratives générales
Art. 34 de la Constitution // répartition de compétence entre législateur et le pouvoir règlementaire :
la loi fixe les règles concernant la création de nouveaux ordres de juridiction (TA, CAA et CE) ;
législateur compétent pour fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux
citoyens pour l’exercice des libertés publiques -> fixe limite des compétence entre JA et JJ ; pouvoir
règlementaire détermine la répartition des compétences entres les juridictions administratives et
élaborer les règles de procédure
CA essentiellement prétorien à l’origine :
- CE, 1950, Lamotte : PGD = REP ouvert même sans texte
- CE dégage des règles générales de procédure pouvant être impératives -> seul le législateur
peut y déroger + caractère supplétif (applicable qu’en l’absence de texte législatif ou
règlementaire contraire)

Section 3 : les modes alternatifs de règlement des litiges administratifs (prévus CRPA de 2016)

Limitation de la saisine du JA : éviter engorgement des juridictions, règlement direct de certains


litiges, souplesse des parties (X formalisme), règlement des litiges en équité

2
I- Les modes de règlement aux solutions non obligatoires

A- Les recours administratifs préalables (RAP)

Art. L. 410-1 CRPA : réclamation adressée à l’administration en vue de régler un différend né d’une
décision administrative =/ règle de la décision administrative préalable
è RAP porte toujours sur une décision administrative
Recours facultatifs (RAPF) = recours gracieux (adressé à l’auteur de l’acte) ou hiérarchique (adressé à
un supérieur hiérarchique de l’auteur de l’acte) : silence gardé pendant +2 mois = rejet ; permet
d’interrompre et de conserver le délai de recours contentieux
Art. L. 411-2 CRPA + arrêt Ouahrirou de 2009 : une seule prorogation de délai sauf lorsqu’un recours
gracieux et un recours hiérarchique sont formulés pendant le délai initial (2 mois) -> délai suspendu
jusqu’à ce que les deux recours aient fait l’objet d’une décision de rejet
Recours obligatoires (RAPO) = recours contentieux irrecevable si le RAPO n’a pas été exercé au
préalable ; notification de la décision prise par l’administration doit mentionner les voies et délais
dans lesquels le RAPO peut être formulé sinon le délai ne court pas
Juge -> souplesse : possible de saisir le JA avant d’avoir formé le RAPO -> juge vérifiera si le RAPO a
été formé dans les délais prévus
CE, 2000, Société Produits Roche : CE considère qu’il n’était pas nécessaire d’attendre le rejet du
RAPO pour que le référé-suspension soit recevable
RAPO très nombreux -> aucun intérêt de soulever un RAPF quand un RAPO existe sinon par de
prorogation du délai de recours contentieux
Loi du 17 mai 2011 : décisions rejetant un RAPO doivent être motivées -> auteur du recours peut
demander une communication des motifs s’il s’agit d’une décision implicite
Décision rendue dans le cadre d’un RAPO se substitue à la décision initiale (=/ RAPF) -> elle seule sera
susceptible de recours
Le requérant ne pourra demander au juge plus que ce qu’il a demandé dans son recours admin mais
il pourra par contre invoquer jusqu’à clôture de l’instruction tout moyen de droit nouveau

B- La conciliation et la médiation

2 modes de règlement de litige faisant appel à un tiers conciliateur ou médiateur désigné par une
partie ou une tierce personne -> chargé d’examiner les termes du litige et de rechercher un accord
Prévu par l’art. L. 421-1 CRPA -> loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice privilégie le
terme « médiation « à laquelle il consacre un chapitre spécifique
Médiation peut porter sur la totalité ou sur une partie du litige ; médiateur n’a qu’un pouvoir de
proposition -> il doit s’agir d’une personne physique avec la qualification, la formation ou
l’expérience requise au vue de la nature du litige
Libre choix des parties ou médiation obligatoire avant de saisir le juge (ex : clause dans un contrat)
Médiation voulue par les parties en dehors de toute procédure juridictionnelle : organisation par les
parties ou par le président de la CAA ; suspend le délai de recours contentieux depuis loi de 2016
Médiation alors qu’une procédure juridictionnelle est déjà engagée : initiative du juge si les parties
sont d’accord ; juge n’est pas dessaisi pendant la médiation -> peut prendre toutes les mesures
d’instruction qui lui paraissaient nécessaires
Médiation -> accord entre les parties -> demande d’homologation au juge -> force exécutoire

3
C- La saisine du défendeur du droit

Ne suspend par les délais de recours contentieux


Création dans une révision constitutionnelle de 2008
Fonction : saisie par toute personne s’estimant lésée par le fonctionnement d’un service public ou
d’un organisme investi d’une mission de service public
è Litiges usagers/ administration / statut d’AAI (autorité administrative indépendante)
Nomination : conseil des ministres pour 6 ans non révocables ; ne peut être poursuivi pour ses
opinions ; assistance de 3 adjoints et de 500 délégués sur le territoire national
Pouvoirs divers : information, conciliation, rédaction de rapport, pouvoir d’investigation et
d’injonction, etc.
è Pas de pouvoir de sanction -> saisi de l’autorité qui engagera des poursuites disciplinaires

II- Les modes de règlement aux solutions obligatoires

A- La transaction

Arts. L. 423-1 et s. CRPA : « il peut être recouru à une transaction pour terminer une contestation née
ou prévenir une contestation à naître avec l'administration » -> permet d’éviter perte de temps
Conditions de formes : formalisation par un contrat écrit ; objet licite -> prohibition de la transaction
dans certains domaines comme en matière de délimitation du DP (CE, 1975, Leverrier) ; concessions
réciproques et équilibrées des parties au contrat ; conditions de validité du contrat ; signature par
une autorité compétente ; intention des parties de mettre fin à un litige
Non-respect de la transaction -> parties engagent leur responsabilité contractuelle
Protocoles transactionnels de plein droit mais possible de demander une homologation pour donner
une force exécutoire : demande au JA ou au JJ (si transaction de droit privé)
Transaction en cours -> juge prononce un non-lieu et sursoit à statuer (CE, 1990, Office public d’HLM
de la Meuse)
CE, 2002, Syndicat intercommunal des établissements du Second degré de l’Hay-les-Roses :
homologation d’un jugement même si les parties n’avaient engagé auparavant aucune procédure
juridictionnelle pour régler le litige -> possible dans deux situations : exécution de la transaction se
heurte à des difficultés OU conclusion d’une transaction vise à remédier à une situation telle que
celle créée par une annulation ou la constatation d’une inégalité qui ne peut donner lieu à
régularisation

B- L’arbitrage

Mode de règlement juridictionnel qui s’apparente à une justice privée : PGD = recours à l’arbitrage
impossible pour les personnes publiques sauf dispositions législatives contraires (CE avis, 1986, Euro
Disneyland) -> englobe compromis d’arbitrage et clauses compromissoires
Interdiction dans l’art. 423-1 CRPA
Partie qui obtient une sentence arbitrale en sa faveur peut demander l’exequatur -> force exécutoire
Sentence rendue par une juridiction arbitrale en France -> recours possible contre le JA + contrôle
limité du CE

4
Section 4 : la structure du contentieux administratif

I- La classification formelle

A- Le contentieux de pleine juridiction (CPJ)

Pouvoirs étendus du JA : réforme totale ou partielle d’une décision -> il peut substituer sa propre
décision à celle de l’administration et peut prononcer des condamnations pécuniaires
2 formes de contentieux :
- CPJ subjectif : reconnaissance de droits subjectifs (ex : indemnisation) ; englobe contentieux
de la responsabilité et contentieux contractuel
- CPJ objectif : contentieux de la légalité ; JA peut annuler, modifier ou remplacer un acte
individuel ; possible que pour certains contentieux (électoral, matière fiscale, édifices
menaçant ruine, etc.) -> pas de régime juridique unique
Moyens invocables : moyens de légalité externes pas forcément opérants notamment lorsque leur
censure n’a pas d’effet sur le jugement à venir et donc sur le requérant parce que le juge va
substituer sa propre décision à celle de l’administration
Pas d’unité concernant l’autorité des jugements : autorité de relative de chose jugée ou autorité
absolue parfois (ex : contentieux électoral)

B- Le contentieux de l’excès de pouvoir

Permet la contestation de la légalité de tout acte administratif


Contentieux dit de l’annulation : pouvoirs réduits du JA (// CPJ) -> demande d’annuler un acte donc
juge considère soit qu’il est légal soit qu’il est illégal -> pas de modification
JA vérifie que l’administration a bien respecté le principe de légalité lors de l’édiction d’un acte ->
examine l’acte au jour de son édiction
CE, 1950, Dame Lamotte : recours ouvert même sans texte contre toute décision administrative
è Requérant doit juste démontre un intérêt à agir
Décisions ont une valeur erga omnes : annulation est rétroactive et à une autorité absolue de la
chose jugée -> requérant ne peut renoncer au bénéfice de l’annulation mais aucun effet s’il renonce

C- Les autres contentieux

Contentieux de la répression // CVG : répression des atteintes à l’intégrité du DP -> amende et


remise en état
Contentieux de l’interprétation : Laferrière englobait le recours en interprétation et le recours en
appréciation de légalité -> recours déclaratifs incidents
Questions pouvant être soulevées lors d’un litige civil -> JJ pas compétent : question préjudicielle au
JA qui est tenu de répondre à toute la question (CE, 2009, Laborgne) et à elle seule (CE, 2018, Sté
MJA)

5
II- La classification matérielle

Apparition au début du 20ème siècle (Duguit, Jèze) puis systématisation par M. Waline : intérêt à la
question posée par le requérant
Question de droit subjectif : recours vise uniquement à défendre son intérêt personnel en faisant
reconnaître un droit
Question de droit objectif : conformité d’un acte à la légalité -> contentieux objectif de la légalité
avec surtout une autorité absolue de chose jugée
Tentatives de synthèses : distinction contentieux des poursuites et des recours (Chapus)

III- Les liens entre REP et CPJ

Requérant peut présenter dans un même recours les conclusions d’un REP et d’un CPJ
CE, 2011, Marcou : requête comprenant des conclusions indemnitaires et pas seulement une
demande d’annulation -> pas de caractère de plein contentieux à l’ensemble de la requête
REP subsidiaire au CPJ s’agissant d’actes qui précèdent, accompagnent ou prolongent une opération
qui relève par nature d’un autre contentieux
è Exception de recours parallèle : CPJ interdit tout REP
Notion d’acte détachable : juge met fin à l’ERP dans certaines hypothèses (ex : opérations ou
contentieux fiscal)
CE, 1912, Lafage : possibilité que le REP se substitue au CPJ pour des décisions à objet pécuniaire ->
permet de ne pas avoir recours à un avocat ; oblige cependant le requérant à agir rapidement (délai
de 2 mois pour former le recours pour tous les contentieux sinon la décision devient définitive)
Choix du recours pour les requérants : CPJ où le juge peut réformer la décision ou REP -> que pour les
décisions à caractère pécuniaire

PARTIE 1 : LA FORMATION DU PROCES ADMINISTRATIF

Chapitre 1 : quel juge administratif saisir ?

Section 1 : les juridictions administratives générales

I- Le Conseil d’Etat

A- L’organisation du Conseil d’Etat

Corps hiérarchisé de 300 membres dont le statut est déterminé aux arts. R. 131-1 et s. CJA ;
indépendance ; présidence du vice-président (Bruno Lasserre actuellement)
Corps distinct des CAA et TA : membres sont des fonctionnaires de droit commun ; garanties
d’indépendance + avantages en matière disciplinaire ; obligation déontologiques ; déclaration
d’intérêt si conflit d’intérêt qui pourrait influencer leur impartialité
Sections administratives et donc consultatives chargées de rendre des avis au gouvernement et
d’effectuer des études et rapports
Section du rapport et des études : rédaction du rapport annuel du Conseil d’Etat

6
Section du contentieux : compétentes pour toutes les affaires juridictionnelle devant le CE ; président
de section + 3 présidents adjoints ; 10 chambre avec 2 présidents et 10 accesseurs
Assemblée du contentieux : vice-président du CE + 6 présidents de section + 3 présidents adjoints +
président de la chambre d’instruction + rapporteur
Possibilité d’un juge unique en référé ou pour prononcer un non-lieu à statuer

B- Les fonctions juridictionnelles du CE

1) La compétence du CE en premier et dernier ressort

Juge de première instance = JA en général -> mais CE peut être juge en premier et dernier ressort
Art. L. 311-1 CJA = CE en premier et dernier ressort : recours en annulation contre les ordonnances et
les décrets, litiges concernant le recrutement et la discipline des agents publics nommés par décret
du Président de la République, contentieux des élections régionales et européennes, etc.

2) Le CE en tant que juge d’appel

Compétence partagée avec les CAA -> compétence résiduelle (que pour le référé liberté ou pour les
jugements des TA sur les élections municipales et cantonales)

3) Le CE, une juridiction administrative suprême (art. L. 111-1 CJA)

Pouvoir de régulation = rôle de juge de cassation sur les arrêts des CAA et les jugements de
juridictions spécialisées -> unité dans l’interprétation et l’application du droit
Recours dans l’intérêt de la loi : recours n’ayant qu’une portée doctrinale portés par des ministres
pour corriger des erreurs juridiques
Avis sur des questions de droit nouvelles -> difficulté sérieuse dans des litiges : avis à la demande du
TA ou CAA qui ne peuvent être contestés ou faire l’objet de voies de recours

4) Les filtrages des QPC

Mécanisme de contrôle de constitutionnalité a posteriori introduit par la révision constitutionnelle


de 2008 (art. 61-1 Constitution) : intervient au cours d’une procédure juridictionnelle
Objectif = renforcer la place de la Constitution
Juge doit se prononcer en priorité sur la QPC et sur son éventuel renvoi
C. Cass., 2010, Melki et Abdeli : question préjudicielle à la CJUE pour s’assurer que le mécanisme de
la QPC est compatible avec une loi organique
CJUE, 2010, Melki et Abdeli : mécanisme de la QPC n’est pas incompatible avec le TFUE dès lors que
les juges peuvent à tout moment poser une QP à la CJUE, qu’ils peuvent prendre toute mesure
nécessaire et provisoire pour assurer la protection des droits conférés par l’UE et qu’ils ont la
possibilité de ne pas appliquer une disposition législative contraire au droit de l’UE
3 conditions aux JA du fond pour soulever une QPC : disposition législative doit être applicable à la
procédure ou au litige en cours + elle ne doit pas avoir été déjà déclarée conforme à la Constitution
+ elle ne doit pas être dépourvue de caractère sérieux
è Forme = mémoire distinct et motivé

7
è Décision de transmettre une QPC au CE est insusceptible de recours ; refus ne peut être
immédiatement contesté sauf à l’occasion d’un recours contre la décision ayant réglé le litige
CE : 3 moi pour se prononcer sinon transmission au Conseil constitutionnel ; mêmes conditions que
pour le TA et la CAA + question doit être nouvelle et présenter un caractère sérieux
CEDH, 2015, Renard c. France : mécanisme de filtrage de QPC n’est pas contraire à la CEDH sauf si le
refus du juge de poser une QP au juge constitutionnel était arbitraire
Refus de transmettre une QPC pas contesté dans les délais -> impossible d’en soulever une identique

II- Les juridictions administratives territoriales

A- Les tribunaux administratifs

1) L’organisation des TA

Conseillers de TA forment un corps commun avec les CAA (distinct du CE)


Recrutement des conseillers : sortie de l’ENA + nomination en tour extérieur ou suite à une demande
de détachement
Statut : garantie d’inamovibilité et sur la gestion de la carrière ; obligations déontologiques
Composition : plusieurs chambres de jugements avec 2 à 3 magistrats par chambre ; jugements
rendus par une formation de 2 chambres réunies, en audience plénière ou par un juge unique
Art. R. 222-13 CJA = cas dans lesquels un juge unique peut statuer (ex : litige en matière de
communication de documents administratifs ou relatifs aux impôts locaux)
Audience publique + rapporteur public doit intervenir (rédige des conclusions où il propose au juge
de faire droit ou de rejeter ce que demande le requérant)
CE précise que les parties doivent être en mesure de connaître dans un délai raisonnable si le
rapporteur public dispensera des conclusions

2) La compétence juridictionnelle des TA

Fonctions non-juridictionnelles : rendre des avis au préfet, participer à des instances administratives
et rendre des décisions administratives
Juges de droit commun du contentieux administratif -> compétents pour toutes les affaires qui ne
sont pas attribuées expressément à la compétence d’un autre juge
Compétence territoriale : TA compétent est celui dans le ressort duquel a légalement son siège
l’autorité qui, en vertu de son pouvoir propre ou par délégation, a pris la décision attaquée (art. R.
312-1 CJA) -> prise en compte du domicile du défendeur
è Critères alternatifs : regarder si l’acte attaqué est règlementaire (litige sur des législations
régissant les activités professionnelles) ; lieu du fait générateur du dommage (dommage
provoqué par un fait matériel) ; TA de Nantes (litiges concernant les visas d’entrée sur le
territoire)
Jugements rendus sont susceptibles d’appel devant les CAA -> appel impossible dans certains cas
(ex : litiges de faible importance -> compétence d’un juge unique en premier ressort)

B- Les CAA

8
1) L’organisation des CAA

Présidence par un conseiller d’Etat


Composition : 2 à 3 chambres composées d’environ 3 membres chacune ; possibilité de juger en
chambre réunie et/ou en formation plénière
è Juge unique qui statue par ordonnance dans certains cas : donner acte d’un désistement,
non-lieu à statuer, requête manifestement irrecevable, etc.
CE, 2012, Union syndicale des magistrats administratifs : jugement par un juge unique n’est pas
incompatible avec l’art. 6 CEDH

2) Compétence juridictionnelle

Compétence de droit commun


Compétence territoriale : CAA compétentes à l’égard des jugements rendus par les TA qui relèvent
de son ressort -> précisé dans le CJA
2012 : juge de premier et dernier ressort -> uniquement au profit de la CAA de Paris puis
élargissement par la suite (recours contre les arrêtés du ministre du travail, relatifs à la
représentativité des organisations syndicales, etc.)

Section 2 : les juridictions spécialisées

I- Les différentes juridictions administratives spécialisées

Double degré de juridiction pour certains (Conseils régional et national de l’ordre des médecins)
Irrégularité : naissance et disparition
Compétences diverses : statuent sur des recours contre des décisions administratives, en matière
disciplinaire, etc.
Respect des règles générales de procédure dégagées par le CE + exigences de l’art. 6 CEDH
Pas soumises aux règles du CJA mais à des textes spéciaux -> évolutions pour respecter le principe
d’impartialité avec l’auto-saisine qui a pu poser problème
CE, 2000, Sté Labor Métal : affaire saisie par la Cour des comptes pour des faits qu’elle avait déjà
dénoncés comme irréguliers -> partiale
CE si pourvoi en cassation

II- La qualification de juridictions administratives spécialisées

Qualité juridictionnelle -> seul le législateur peut les créer : garanties d’indépendance + règles à
respecter
Qualification directe : loi indique qu’une organisation est une juridiction / indirecte : loi indique que
les décisions prises par une organisation sont susceptible de recours pour excès de pouvoir
è Juge doit parfois trancher sur la compétence juridictionnelle quand elle est ambiguë
Conditions pour la qualification de juridiction : pouvoir de décision ; distinction si le juge retient un
critère formel ou matériel
CE, 1953, De Bayo : critère matériel qui prévaut -> permet de savoir quand un organisme agit en tant
que juridiction

9
CE, 1969, L’Etang : critère matériel -> organisme est une juridiction administrative spécialisée compte
tenu de la nature des litiges qu’il connait

Section 3 : le règlement des problèmes de compétences

Règles d’ordre public auxquelles on ne peut déroger sauf exceptions :


- Récusation d’un juge (spontanée ou demande par une partie) : si un requérant à un doute
sur l’impartialité d’un juge, l’une des parties va pouvoir demander sa récusation
è CE, 2009, Petit : moyen relatif à l’irrégularité de la composition d’une formation de jugement
peut être invoqué à toute étape de la procédure
- Renvoi pour cause de suspicion légitime : ensemble des membres de la juridiction ne sont
pas impartiaux (CE, 1957, Nemegyei) ; procédure exceptionnelle à caractère préventif et
préalable ; justiciable doit demander à la juridiction immédiatement supérieure qu’une
affaire soit renvoyée devant une autre juridiction du même ordre

I- La connexité

Regroupement devant un même juge d’instances connexes : but = empêcher difficultés qui
découleraient de la dispersion devant plusieurs juges d’affaires ayant un lien étroit
Connexité quand 2 juridictions ont à connaître d’une demande principale différente qui rentre dans
leurs compétences mais que la solution d’un des litiges dépend de la solution de l’autre
Absence de définition textuelle -> jurisprudence : les affaires doivent poser les mêmes questions et
les deux jugements doivent se conditionner
CJA prévoit différents exemples de connexité : 2 demandes devant 2 TA ; demande devant le CE
compétent en premier et dernier ressort et une autre devant un TA ou une CAA ; 2 demandes à 2
CAA ; demande à une CAA et une autre qui relève de la compétence d’appel du CE ; demande relève
de la compétence du TA et une autre de la compétence de la CAA en premier et dernier ressort

II- Le règlement de juge

Permet d’éviter au CE un déni de justice qui découlerait de contradictions entre 2 jugements


è Possibilité découlant de la loi du 24 mai 1872 et de l’arrêt Veuve Reynes de 1932
Intérêt = remise en cause de décisions de justice normalement définitives
Possibilité pour toute juridiction immédiatement supérieure à celle dont émanent les jugements
inconciliables (CE ou CAA) qui va déclarer nul et non avenu l’un des 2 jugements
Exemple de contradiction entre 2 jugements -> CE, 1960, Tisserand : une juridiction s’est déclarée à
tort incompétente et une autre, pour un litige connexe, s’est déclarée compétente -> contradiction -
> CAA ou CE déclare nul et non avenu le premier jugement

III- Le jugement préventif des questions de compétence

Arts. R. 351-1 à R. 351-9 CJA : renvoi au CE en cas de doute sur la compétence -> élimination des fins
de non-recevoir si la demande relève bien de la juridiction administrative
Hypothèses dans lesquelles on peut recourir à un jugement préventif de compétence :

10
- JA générales peuvent rejeter les requêtes entachées d’une irrecevabilité manifeste sans avoir
à tenir compte des règles de répartition des compétences
- CE saisi en premier et dernier ressort alors qu’il fallait saisir une juridiction inférieure :
président de la section du contentieux transmet directement l’affaire à la juridiction qu’il
estime compétente
- TA ou CAA saisie à tort à la place du CE : ordonnance de renvoi au CE qui estime s’il est
compétent ou non
Règles de compétences sont d’ordre public -> plénitude de juridiction : juge principal également juge
de l’incident (compétent pour connaître de demandes additionnelles et reconventionnelles) ; juge de
l’action également juge de l’exception (peut se prononcer sur tous les moyens invoqués)
Exceptions d’illégalité = demande d’annulation d’une décision individuelle sur le moyen selon lequel
elle aurait été prise sur le fondement d’un décret illégal -> juge ne peut annuler le décret mais
apprécie sa légalité pour annuler ou non la décision individuelle
Modification de la composition du TC en 2015 (4 conseillers d’Etat / 4 de la C. Cass. ; président élu en
son sein) : procédure par le vote ; chargé de résoudre des conflits de compétence (positif ou
négatif) ; décisions ont autorité de chose jugée

Chapitre 2 : la saisine du juge administratif

Recours juridictionnel = acte de procédure par lequel une personne saisi au principal une juridiction
de premier ou de dernier ressort de conclusions dont elle veut faire reconnaître le bien fondé
CC, 1996, Autonomie de la Polynésie française : valeur constitutionnelle RJ + droit facultatif
Art. L. 4 CJA : RJ formées devant le JA n’ont pas d’effet suspensif sauf hypothèse contraire
Après s’être estimé compétent et avant de s’intéresser au bien-fondé de la requête, le JA examine sa
recevabilité : règle d’ordre public ; possibilité pour les parties de régulariser certaines irrecevabilités
sauf si elles ne sont pas régularisables (ex : expiration du délai de recours)
Art. R. 612-1 CJA : si le JA veut soulever d’office l’irrecevabilité, il doit d’abord inviter la partie à
régulariser sa requête en lui fixant un délai

Section 1 : les conditions de recevabilité relatives au requérant

I- La capacité à agir

Personne physique : majeurs incapables et mineurs non émancipés ne peuvent agir seuls
Personne morale de droit privée : doit avoir la personnalité juridique au moment de l’introduction de
la requête
Personne morale de droit public : doit être dotée d’une personnalité morale sauf exception (AAI)

II- La représentation du requérant

A- La représentation du requérant qui est une personne morale

PM de droit public : Etat représenté par le ministre dans les attributions duquel entre l’acte litigieux ;
les CT par leur exécutif (président de la région ou du département) ; pareil pour les EP ; les AAI par
leur président

11
PM de droit privé : représentation par des personnes habilitées au vue de leur statut ou de la loi

B- Le ministère d’avocat

Avocat = mandataire naturel du requérant


Obligation de recourir à un avocat : dérogations (REP depuis 1864 ; Etat quel que soit le recours)
Art. R. 431-2 CJA : obligation d’un ministre d’avocat devant le TA s’agissant des conclusions tendant
au paiement d’une somme d’argent / obligation du ministère d’avocat devant les TA peut toucher
une partie du recours de plein contentieux (ex : contentieux des contrats de l’Etat)
è Dispenses devant le TA : litiges de CGV, demandes d’exécution d’un jugement définitif, etc.
CAA -> obligation du ministère d’avocat sauf exception
CE en premier et dernier ressort -> obligation du ministère d’avocat sous peine d’irrecevabilité du
recours + dispenses possible (ex : REP)
CE dans le cadre d’un recours en cassation -> obligatoire depuis 1854 sauf exceptions
Aide juridictionnelle : conditions de ressources ; recours recevable et fondé ; demande devant le
bureau d’aide juridictionnelle ; aide totale ou partielle ; demande interrompt le délai du recours
contentieux si elle a été formée dans le délai imparti à l’introduction du recours contentieux
Art. R. 635-1 CJA // action en désaveu d’avocat : partie au procès reproche à son avocat des actes
ayant pu influencer le procs -> requérant doit prouver que l’avocat a agi dans un sens contraire à ses
intérêts ou qu’il ne s’est pas conformé au mandat confié

C- Les cas particuliers de représentation

Autorisations de plaider : permettent au contribuable d’exercer des actions appartenant


normalement aux collectivités locales
Conditions : autorisation à agir du tribunal ; CT doit avoir été invitée à agir elle-même et elle a refusé
explicitement ou implicitement ; TA va vérifier qu’il s’agit bien d’un refus, si l’action présente un
intérêt suffisant pour la collectivité et si elle a des chances d’aboutir
CE, 2006, Cassinari : contribuable ne peut obtenir cette autorisation s’il peut agir en son nom propre
CE, 2012, Commune de Menton : refus d’autorisation peut être contesté devant le CE pendant 1 mois
Autorisation ne vaut que pour une étape du procès -> nouvelle autorisation en cas d’appel

III- L’intérêt à agir du requérant

A- Les modalités d’appréciation de l’intérêt à agir

IA s’apprécie à la date d’introduction de la requête -> recours ne devient pas irrecevable s’il disparait
en cours d’instance
Juge lié par l’IA invoqué par le requérant et ne pourra pas lui substituer un autre / requérant peut en
invoquer un autre qui diffère de l’IA initial en cours d’instance
CE, 2003, Commune de Saillagouse : IA peut apparaître en cours d’instance
Forme : IA s’apprécier au regard de la demande du requérant qui peut se prévaloir de n’importe quel
moyen -> diversité = intérêt moral (CE, 1949, Bourgoin), IA invoqué par des personnes morales, etc.
Caractères de l’IA = l’IA doit être personnel, légitime, direct et certain

12
Personnel = motif propre du requérant pour agir : ne nécessite pas que le requérant soit le seul
destinataire de l’acte ; qualité de citoyen ou d’administré n’est pas suffisante ; juge apprécie au cas
par cas
Légitime = personne doit être directement lésée par la décision contestée
Direct = refus qu’un tiers agisse contre des dispositions d’un contrat
Certain = requérant doit être lésé avec certitude

B- Le cas particulier de l’intérêt collectif à agir

1) Les spécificités entourant l’admission d’un intérêt collectif

CE, 1906, Syndicat des patrons coiffeurs de Limoges : existence d’un IC qui permet d’admettre l’IA
d’une association ou d’un syndicat -> juge examine l’objet social + son adéquation avec l’acte attaqué
Une association ou un syndicat ne peut pas prétendre à un IA trop large ; IC peut être l’intérêt des
adhérents (matériel ou moral)
Avantage = permet à des particulier de se rassembler en association pour défendre des buts
particuliers + pas forcément d’IA s’ils avaient agi individuellement
Association ayant un champ d’action national n’est pas recevable à demande l’annulation d’un acte
qui aurait des effets exclusivement locaux -> juge vérifie ce champ d’action
è CE, 2015, Ligue des droits de l’Homme : « lorsqu’une décision administrative, en raison de
ses implications, notamment dans le domaine des libertés publiques, soulève des questions
qui, par leur nature et leur objet, excède les seules circonstances locales »
Urbanisme : une association ne peut contester un permis de construire que si ses statuts ont été
déposés en préfecture au moins un an avant l’affichage en mairie de la demande de permis
Nature de l’acte attaqué : IC si l’acte a des conséquences sur le domaine dans lequel intervient
l’association ; difficulté s’il s’agit d’une décision individuelle -> distinction 2 mesures :
- Mesure positive (confère des droits) : susceptible d’avoir une influence sur le groupe -> IC
admis
- Mesure négative (défavorable au destinataire) : IC du groupe n’est pas lésé (CE, 1991,
Syndicat CGT des employés de la mairie de Nîmes) ; exceptions (ex : autorisation de
licenciement de salariés protégés)

2) La mise en place d’une action de groupe et d’une action en reconnaissance de droit

Loi de 2016 : introduction dans le CJA de chapitres spécifiques à ces actions


Action de groupe : réservée aux associations agrées et régulièrement déclarées depuis 5 ans et dont
l’objet statutaire comporte la défense d’intérêts auxquels il a été porté atteinte
è Action recevable dans un délai de 4 mois après mise en demeure de la personne de respecter
ses obligations -> permet la cessation du manquement ou la réparation du préjudice (juge
détermine les préjudices susceptibles d’être réparés)
Action en reconnaissance droit : but = obtention ou décharge d’une somme d’argent légalement due

13
Section 2 : les conditions de recevabilité relatives au recours

I- L’existence d’une décision administrative préalable

A- La règle de la décision administrative préalable

Art. R. 421-1 CJA : le requérant doit disposer d’une décision administrative pour saisir le juge
è Décision spontanée de l’administration ou sollicitation pour qu’elle en prenne une
Acte doit avoir un caractère décisoire -> peu importe que la décision soit implicite ou explicite
Requérant doit avoir demandé à l’administration de l’indemniser -> saisine du juge seulement en cas
de refus de l’administration : inconvénient = retarde accès au juge / avantages = éviter le procès,
délimitation du litige, simplification du travail du juge

B- L’application de la règle de la règle de la décision préalable

1) Les exceptions à cette règle de décision préalable

Il était possible de saisir directement le juge sans décision préalable -> suppression par le décret Jade
de 2006
Exceptions : référé-liberté ; recours formé par une personne publique contre une personne privée ;
recours concernant un contrat administratif

2) La mise en œuvre de la règle de la décision préalable

Diverses formes : décision implicites ou explicites


Décisions implicites : délai de contestation = 2 mois ; point de départ du délai = date de réception de
la demande par l’administration ; requérant doit avoir adressé une demande à une administration
compétente ; silence valait rejet -> depuis 2013, le silence vaut décision d’acceptation
è Dérogations = art. L. 231-4 CRPA : silence vaut rejet lorsque la demande ne tend pas à
l’adoption d’une décision individuelle, ne s’analyse pas comme un recours administratif, à un
caractère financier ou concerne les relations entre une autorité administratives et ses agents

II- Le délai

Délai de droit commun = délai franc de 2 mois (2 mois + jour)


Délais spéciaux prévue par la voie législative ou règlementaire
Délai de recours opposable au requérant seulement s’il a été mentionné dans la décision notifiée
Administration doit délivrer un avis de réception pour toute demande lui étant adressée -> exception
= relation entre l’administration et ses agents ou quand « la décision est acquise au profit du
demandeur au terme d’un délai égal ou inférieur à 15jours »
Exemples de dispense de délai : quand la réclamation tend à obtenir l’exécution d’une décision du JA,
quand il s’agit d’une contestation d’une décision juridictionnelle considérée comme inexistante par le
juge, etc.
Délai de distance = délai supplémentaire qui joue pour un requérant d’outre-mer ou étranger qui
souhaite saisir une juridiction nationale

14
A- La naissance du délai

Délai commence à courir le lendemain du jour où la décision est réputée avoir été portée à la
connaissance des intéressés -> publicité de l’acte essentielle
Acte règlementaire : publicité = publication pouvant être doublée d’un affichage (ex : permis de
construire) ; simple notification ne déclenche pas le délai de recours (CE, 1993, Nainfa)
Décision individuelle : déclenchement du délai doit être notifié ; obligation d’un accusé de réception
dans certains cas ; charge de la preuve appartient à l’administration (CE, 1907, Desplanches)
Information d’une décision implicite d’acceptation par les tiers = demande doit faire l’objet d’une
publicité
LRAR :
- Si le destinataire la reçoit en main propre et la signe = jour de la notification ; si refus de
signer = notification jour du refus
- Si le requérant est absent : notification le jour où il va chercher la lettre à la poste ou le jour
où le facteur s’est présenté au domicile et a laissé un avis de passage s’il ne la récupère pas
Décision notifiée doit comporter l’indication des voies et délais de recours -> art. R. 421-5 CJA :
absence de notification des voies et délais de recours rend inopposable la décision au destinataire
è Indication doit être claire et sans ambiguïté
CE, 2000, Gluck : toute erreur joue en faveur du destinataire -> délai légal pas opposable en cas
d’erreur s’il est moins long que le délai indiqué
Art. R. 421-5 CJA : délais ne sont pas opposables s’ils n’ont pas été indiqués
è CE, 2016, Czabaj : principe de sécurité juridique pour limiter la possibilité de contester
indéfiniment une décision individuelle au motif qu’il n’y a pas eu d’indications des voies et
délais de recours -> CE va à l’encontre du CJA
è Jurisprudence s’étend ensuite à d’autres actes (décisions implicites, titres exécutoires, etc.)
et même à des tiers (CE, 2018, LCI Valmore)
Publicité doit être suffisante : intéressés doivent avoir été mis en mesure de connaître le portée de la
décision ; publicité insuffisante = délai ne peut courir excepter s’agissant des vices décevables
è Absence de publicité ne fait pas obstacle au déclenchement des délais de recours si le juge
estime que le requérant a bien eu connaissance de l’acte
CE, 1953, Sté Intercopie : si un recours juridictionnel est introduit, le requérant est réputé avoir eu
connaissance de la décision au plus tard au jour où il a saisi le juge

B- La prorogation du délai

Prorogation = interruption du délai à l’issue de laquelle un nouveau délai recommence à courir dans
son intégralité
Différents cas de figure : recours administratif préalable, déféré préfectoral, saisine d’une juridiction
incompétence intervenant dans le délai de recours contentieux, etc.

C- L’expiration du délai

Expiration entraîne la forclusion du requérant : requérant est forclos s’il n’a pas agis dans le délai de
recours contentieux -> acte administratif pas contesté devient définitif même s’il est illégal

15
Forclusion (// requête irrecevable -> éteint la faculté de revendiquer un droit) =/ prescription qui
éteint un droit -> défendeur peut opposer la prescription au requérant
Dispenses en matière de plein contentieux : action en justice se trouve prescrite dans le délai de droit
commun sous réserve de la règle de la prescription quadriennale (créances pas payées dans un délai
de 4 ans à compter du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été
acquis sont prescrites)
Expiration en cours d’instance permet de cristalliser le débat contentieux : requérant ne peut plus
modifier la nature du recours ni faire valoir de nouvelles prétentions, etc.
CE, 1953, Sté Intercopie : le requérant ne peut plus invoquer de nouveaux moyens se rattachant à
une cause juridique distincte de celle précédemment invoquée après expiration du délai
è Confirmation de la jurisprudence en matière d’excès de pouvoir (CE, 1964, Sté des aciéries et
forges de St-François) mais refus pour les moyens d’ordre public qui peuvent être soulevés à
tout moment
Juge admet l’exception d’illégalité d’un acte pour obtenir l’annulation d’une décision en lien avec
l’acte en question -> possible dans plusieurs cas :
- Exception d’illégalité d’un acte règlementaire : condition = acte doit être en mesure
d’application du règlement illégal + légalité subordonnée à celle de ce règlement
- Exception d’illégalité d’un acte non-règlementaire : condition = acte ne doit pas encore être
devenu définitif à la date à laquelle est invoquée cette exception

III- Les conditions de forme

A- La présentation du recours

Doit être rédigé en français ; doit permettre l’identification de son auteur (nom et domicile) ; doit
comporter la signature du requérant et celle de son mandataire

B- Le contenu du recours

Doit contenir l’énoncé des conclusions et moyens du requérant (juge admet une requête sommaire
résumant les faits et les moyens à condition qu’elle soit ensuite complétée par un mémoire
complémentaire) ; décision attaquée doit être identifiable

C- Le dépôt du recours

Différentes manières : directement au greffe ; par voie postale


Obligation parfois de déposer la requête sur une application informatique particulière (Télérecours) :
obligatoire si la requête est présentée par un avocat, une PM de droit public ou par un organisme de
droit privé chargé de la gestion permanente de service public
Art. R. 600-1 code de l’urbanisme : obligation de notification du recours en matière de contentieux
de l’urbanisme (notification à l’auteur de l’acte et au titulaire de l’autorisation d’urbanisme) ;
notification avec recommandé d’AR dans un délai de 15 jours à compter de l’introduction du recours
è Absence de notification = irrecevabilité du recours qui n’est pas régularisable

16
PARTIE 2 : LE DEROULEMENT DU PROCES ADMINISTRATIF

Chapitre 1 : la détermination de l’instance

Section 1 : le rôle des parties dans la détermination de l’instance

I- Le rôle majeur du requérant dans la détermination de l’instance

Rôle essentiel du requérant : détermine le défendeur, les éléments objectifs de l’instance et la cause
et les moyens de l’instance
Immutabilité de l’instance : but = fixer de manière définitive le débat contentieux

II- Le rôle secondaire des autres parties dans la détermination de l’instance

A- Les demandes reconventionnelles du défendeur

Demande par laquelle le défendeur prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la
demande de son adversaire
Impossible dans le cadre du REP -> idée que l’administration ne peut former de recours contre elle
Règles jurisprudentielles pour encadrer -> souplesse : pas de condition de délai ; autorisée jusqu’à la
fin de l’instruction ; pas d’obligation de décision préalable ; demande doit relever de la compétence
du juge saisi de la demande initiale

B- Les interventions des tiers

1) L’intervention volontaire (en demande ou en défense)

Art. R. 632-1 CJA : acte par lequel une personne qui n’est ni partie ni mise en cause ni représentée
s’introduit dans l’instance -> tiers va intervenir soit pour soutenir la requête soit pour s’y opposer (il
ne peut pas présenter de conclusions distinctes de celles des parties)
Possible pour tous les types de recours en principe -> seule condition = tiers doit formuler ses
conclusions comme une requête principale + doit être étranger à l’instance + doit justifier d’un
intérêt suffisant eu égard à la nature et à l’objet du litige (ex : bénéficiaire d’une décision attaquée
(CE, 1948, Fraguier))
Instance prend fin -> intervention du tiers prend fin immédiatement

2) L’intervention forcée

Incident de procédure permettant de provoquer la participation au procès d’un tiers alors même
qu’il ne le veut pas et que cela peut porter atteinte à ses droits -> possibilité uniquement pour le
plein contentieux
Différents cas : mise en cause d’un tiers par le demandeur ; appel en garantie (par le défendeur
quand il considère qu’un tiers est soumis à une obligation de garantie en vertu d’un acte) ; appel en
déclaration de jugement commun (but = rendre la décision opposable à un tiers lorsque le jugement
en question pourrait lui préjudicier dans des conditions qui ouvriraient droit à une tierce opposition)

17
Section 2 : la fin prématurée de l’instance

I- Le désistement

A- Le désistement à l’initiative du requérant

Art. R. 636-1 CJA : procédure de désistement = requérant renonce à la poursuite de l’instance


Désistement d’instance (que pour l’instance en cours) =/ désistement d’action (met fin à l’instance
en cours et à l’objet de la prétention du requérant)
Juge considérait à l’origine qu’un désistement était un désistement d’action sauf si le requérant avait
clairement délimité son désistement -> revirement de jurisprudence (CE, 2010, Rigat) : un
désistement est en principe un désistement d’instance sauf si le requérant a indiqué qu’il se désistait
de son action
Désistement à tout moment -> juge donnera acte même si le défendeur n’est pas d’accord
Désistement total ou partiel mais jamais conditionnel

B- Le désistement d’office décidé par le juge

Situation où le requérant a annoncé la production d’un mémoire complémentaire à l’occasion d’une


requête sommaire et qu’il ne l’a pas produit -> requérant peut retirer sa promesse ou déposer un
mémoire identique à la requête initiale
Désistement d’office devant le CE : requérant a 3 mois pour produire le mémoire complémentaire ->
réputé s’être désisté s’il ne respecte pas le délai
Devant les juridictions territoriales : juge a l’obligation de mettre en demeure le requérant de
produire un mémoire complémentaire en lui indiquant les conséquences de l’absence de mémoire
Autres hypothèses de désistement d’office : requérant se voit demandé par le juge la production
d’un mémoire récapitulatif et il n’en a pas tenu compte, requêtes ayant perdu un intérêt pour le
requérant, etc.

II- Le non-lieu à statuer

Intervient en cas de disparition de l’objet de la demande due à différents évènements : retrait de


l’acte attaqué ; obtention d’une satisfaction par le requérant dans le plein contentieux ; validation
législative d’un acte administratif
Evolution jurisprudentielle : juge devait initialement prononcer un non-lieu si une validation
législative intervenait en cours d’instance
CC et CEDH : CC exige aujourd’hui un motif d’intérêt général pour justifier une ingérence du pouvoir
législatif -> CEDH exige un motif impérieux d’intérêt général (1999, Zielinski et Pradal c. France) -> CC
adopte la même position (2014, SEL ARL PJA)
CE, 2000, Tête : juge a accepté un contrôle de conventionalité d’une loi de validation sans prononcer
de non-lieu à statuer à la fin -> pas d’intérêt général suffisant du législateur
è Juge apprécie au cas par cas le motif invoqué par le requérant

18
Chapitre 2 : l’instruction

Art. R. 611-8 CJA = dispense de l’instruction dans le cas où « au vue de la requête, la solution est
d’ores et déjà certaine » -> atteinte au principe du contradictoire et au droit au procès équitable
è CE, 1996, Syndicat des avocats de France : dispense d’instruction uniquement dans le cas où
le jugement à intervenir n’est pas susceptible de préjudicier au défendeur
Dispense d’instruction = mesure administrative de la justice -> insusceptible de recours

Section 1 : les règles générales gouvernant les procédures d’instruction

I- Une procédure écrite

Ensemble de la procédure à l’écrit -> juge et parties informés pleinement de la procédure


Contestations : interrogation de sa légitimité dans certains contentieux spécifiques (ex : aide au
logement -> écrit présenterait une « barrière » pour certains justiciables)
Eléments d’oralités : procédure de référés, audition d’un témoin
Instruction faite par les mémoires rendus par les parties + rapport écrit par le rapporteur

II- Une procédure inquisitoriale

Juge dirige le déroulement de la procédure d’instruction -> dès le début de l’instance (demandeur
doit saisir le juge par requête et non par assignation à son adversaire) + mène l’instruction en
désignant un rapporteur

III- Une procédure contradictoire

A- La notion de principe du contradictoire et ses exigences

Permet aux parties de participer pleinement à la procédure et d’être informées de tous les éléments
relatifs au débat -> PGD applicable à toute juridiction administrative (CE, 1961, Sté La Huta)
Principe qui tend à assurer l’égalité des parties devant le juge (CE, 1998, Esclatine), c’est un corollaire
du principe du droit de la défense (CC, 1989, CSA)
Art. L. 5 CJA : instruction est contradictoire
Sens des conclusions du rapporteur public soumises à ce principe (parties doivent pouvoir les
connaître avant l’audience)
Circulaire du Vice-président du CE, 2009 : sens des conclusions = dispositif de la solution que le
rapporteur public propose à la formation de jugement + indication des moyens qui lui paraissent
avoir fondé cette solution
Principe du contradictoire implique un droit à l’information des parties : affaire ne peut être jugée si
une des parties n’a pas pu prendre connaissance des mémoires et documents produits par
l’adversaire ; juge ne peut statuer à partir de pièces dont lui seul à connaissance ; transmission à
l’autre partie de tout document produit par la partie adverse
Principe impose au JA d’indiquer aux parties qu’il entend soulever un moyen d’ordre public et fixer
un délai dans lequel elles pourront présenter des observations -> jugement irrégulier qui encourt
l’annulation en cas de non-respect

19
B- Les aménagements au principe du contradictoire

Aménagements pour des raisons de rapidité de la décision : procédures d’urgence ; juge statut seul
par ordonnance en cas de non-lieu à statuer ou d’irrecevabilité manifeste ; pièces des parties ne
contiennent pas d’éléments nouveaux

Section 2 : le déroulement normal de l’instruction

I- La direction de l’instruction

Juridiction saisie d’une requête -> affaire enregistrée et affectée à une chambre spécialisées ou à une
formation de jugement -> affaire confiée à un rapporteur qui suivra le dossier jusqu’à la préparation
d’un projet de décision (fixe les délais aux parties + dirige l’instruction)
Juge peut se former une opinion au cours de l’instruction à partir des mémoires et des pièces
fournies par les parties (requête introductive, mémoire complémentaire, mémoire en réplique, etc.)
Télérecours (courrier si une partie n’est pas sur Télérecours) permet au greffe d’adresser aux parties
toutes les notifications faites et prévues par le Code
è Parties réputées avoir reçu la notification à la date de la première consultation du document
ou dans un délai de deux jours à compter de la mise à disposition du document
Délais dans la production de pièces : fixés par le rapporteur et définis en fonction des circonstances
dans lesquelles l’affaire s’inscrit -> délai raisonnable dans tous les cas
Possibilité pour le juge d’engager une procédure de clôture à effet immédiat si les parties ont été
informées de la date à laquelle le juge envisage d’appeler leur affaire à l’audience et si l’instruction
peut être clôturée sans préavis
Art. R. 611-7-1 CJA : quand l’affaire est en l’état d’être jugée, le Président de la formation de
jugement ou de la chambre peut fixer par ordonnance la date à partir de laquelle les parties ne
pourront plus invoquer de nouveaux moyens
è CE, avis contentieux, 2019, Sté Active Immobilier : pouvoir limité à l’instance pendante
devant la juridiction à laquelle il appartient -> pas d’incidence sur l’appel

II- Les mesures d’instruction à la disposition du juge

A- Remarques générales

Développement de prétentions par les parties par tout moyen -> charge de la preuve = requérant
Aménagements : charge de la preuve n’incombe pas au requérant s’il n’a pas les moyens d’apporter
cette preuve (moyens à l’administration)
Charge de la preuve // caractère inquisitorial : juge peut prononcer des mesures d’instructions
pouvant lui permettre de se forger une conviction
Mesures d’instructions = ordonnées par des décisions d’avant dire droit -> ne peuvent porter que sur
des questions de fait (X droit)
Juge peut solliciter l’avis d’un spécialiste extérieur : intervention en qualité d’amicus curiae (prise de
parole au cours d’une audience d’instruction ou de jugement + observations écrites)
Juges n’est pas lié par le résultat des mesures d’instruction même s’il s’agit de mesures d’expertise
Mesures d’instruction soumises au principe du contradictoire -> résultat soumis aux parties

20
Mesures d’instructions impossibles s’il s’agit de faits tranchés par le juge pénal

B- Les différentes mesures d’instruction

Juge peut demander des documents à l’administration = pouvoir inquisitorial du JA


è Administration refuse -> allégations du requérant sont fondées
Juge peut vérifier les documents administratifs
Visite des lieux
Art. R. 623-1 à -8 CJA = enquête
Expertise = mesure d’instruction la plus importante (et la plus couteuse) : un seul expert en principe
qui devra rendre son rapport dans un délai préalablement fixé

Section 3 : la clôture de l’instruction

I- Les modalités de clôture

Aucune règlementation par les textes ou la jurisprudence (seulement arts. R. 613-1 à 5)


TA et CAA : date peut être fixée par une ordonnance du président de la formation de jugement qui
doit être notifiée minimum 15 jours avant la clôture ; sans ordonnance, l’instruction est close 3 jours
francs avant la date de l’audience
CE : pas d’ordonnance ; instruction close après que les avocats au Conseil aient formulé leurs
observations orales
CE, 2018, Comité de défense du quartier centre-ville Logis-Lautin : précisions sur les possibilités de
clôture à effet immédiat -> instruction peut être clôturée dans 2 cas :
- Parties ont été informées -> clôture à la période à laquelle il est envisagé de faire appel
- Malgré une mise en demeure, la partie n’a pas respecté le délai pour produire un mémoire
Date peut être modifiée : modification doit être explicite ; respect du principe du contradictoire
CE, 2014, Lassus : hypothèses dans lesquelles il est possible de décider d’une réouverture de
l’instruction = si le juge est saisi d’une production postérieure à la clôture -> juge décide s’il y a lieu
d’en tenir compte -> décide de la réouverture
è Réouverture obligatoire si la production contient l’exposé d’une circonstance de fait ou d’un
élément de droit dont la partie qui l’invoque n’était pas en mesure de le faire avant et qui est
susceptible d’exercer une influence sur le jugement
Jamais de réouverture automatique -> exception : présentation d’un moyen d’ordre public par ex
Règle particulière : clôture devant le CE intervient toujours au cours de l’audience
Durée de l’instruction doit satisfaire aux exigences européennes // droit au jugement dans un délai
raisonnable (art. 6 CEDH) -> confirmation par le CE (CE, 2002, Magiera)
Appréciation globale et concrète du juge pour qualifier le caractère raisonnable du délai de jugement
= critères pour apprécier une durée excessive (CE, 2016, Société Stud’Arts)
è Préjudice peut être matériel ou moral : art. R. 311-1 prévoit que le juge compétent est le CE
en premier et dernier ressort pour statuer sur une question d’indemnisation ; action peut
être intentée alors que la procédure n’est pas achevée
Durée imputable aux deux ordres de juridiction : depuis 2015 = TC (soit la juridiction compétente sur
le fond soit la dernière à avoir statué auparavant)

21
II- Les conséquences de la clôture de l’instruction

Tiers ne peuvent plus intervenir au sein de l’instance ; parties ne peuvent produire de nouveaux
mémoire

Chapitre 3 : le jugement

Section 1 : la formation de jugement

Principe = formation collégiale qui va se prononcer

I- La qualité et le nombre de juges

Effectif légal de la formation de jugement : principe d’imparité pour les juridictions administratives
générales -> juges délibèrent en nombre impair (il peut tout de même y avoir un nombre pair de
juges -> silence des textes)
Quorum qui doit être atteint sinon la décision sera entachée d’irrégularité = nombre de participants
fixés par les textes
è Textes silencieux : quorum = majorité de l’effectif légal de la formation
CAA et CE : possibilité de compléter la formation de jugement en faisant appel à d’autres membres
de la juridiction ; TA peuvent compléter en faisant appel à d’autres membres du même TA ou à des
conseillers d’un autre TA

II- L’impartialité des juges

Principe essentiel (CE, 2001, Entreprise Razel Frères) : juges ne doivent pas avoir ou être suspectés de
parti pris ou de préjugés
Respect du principe d’impartialité = moyen d’ordre public // art. 6 CEDH
Hypothèses où le juge ne retient pas l’atteinte au principe
è CE, 2016, Mme C : demande d’annulation d’une décision d’université ; magistrat
administratif était un rapporteur public qui avait exercé des fonctions dans l’université mais
dans un master différent de celui de la requérante -> pas de remise en cause de l’impartialité
Rapporteur public ou commissaire du gouvernement = membre de la juridiction : assiste aux
délibérés sans prendre part aux votes -> dispense de conclusions dans certaines hypothèses (ex :
litiges relatifs à la taxe d’habitation) -> intervention du rapporteur n’est pas systématique
CEDH, 2001, Kress c. France : association du commissaire du gouvernement en délibéré viole l’art. 6 -
> CEDH ne condamne pas l’existence du commissaire ; association aux délibérés = situation où le
rapporteur propose au juge de rejeter les demandes d’une partie et il délibère ensuite avec les juges
è CEDH reconnaît l’indépendance et l’impartialité du commissaire mais il a pris explicitement
parti au débat contentieux au cours de l’instance

22
Section 2 : l’élaboration et le prononcé du jugement

I- L’audience

Juge a l’obligation de convoquer les parties sinon irrégularité -> il lui incombe de prouver qu’il a bien
notifié l’avis d’audience et qu’il a indiqué que l’audience était publique

A- Le principe de publicité de l’audience

Audience secrète à l’origine -> ordonnance de 1831 met en place la publicité des débats ; publicité
devient un PGD en 1948 (CE, Billaud)
CC, 1988 : pas de PGD qui impose la publicité des débats en toute matière et devant toute juridiction
è Position paradoxale : il a déjà consacré comme PGD la publicité des débats devant les
juridictions judiciaires + art. 6 CEDH prévoit cette publicité
Influence CEDH -> décrets du pouvoir règlementaire (publicité de l’audience pour des juridictions
spécialisées) + CE, 1996, Maubleu : extension du champ de l’art. 6 aux juridictions disciplinaires
Art. L.6 CJA : « les débats ont lieu en audience publique »
Possibilité de déroger à ce principe (ex : sauvegarde de l’ordre public, secrets protégés par la loi)

B- Le déroulement de l’audience

« Police de l’audience » = contrôle du président de la formation de jugement

1) La 1ère étape : l’audition du rapporteur public

Rapporteur présente son rapport ; il peut préparer un projet de jugement qui représentera un
document de travail sur lequel se basera la formation de jugement (CEDH, 2013 : Marc-Antoine :
document interne non communiqué aux parties)

2) La 2nde étape : les conclusions du rapporteur public

Conclusions obligatoire -> formation de jugement n’est pas obligée de suivre son avis
En dernier traditionnellement -> impossible de contester oralement -> admission de la pratique des
notes en délibéré qui doivent être communiquées aux parties et déposées dans les délais
Art. R. 732-1 : possibilité pour les parties de présenter des observations orales
Devant les juridictions territoriales : rapporteur lit son rapport puis les parties prononcent leurs
observations orales / devant le CE : observations orales avant et après
Formation de jugement peut entendre d’autres personnes (ex : agent de l’administration)

II- Le prononcé du jugement

Jugement rendu après le délibéré des juges = dernière étape de l’instance


Délibéré secret et seuls les juges présents au jour de l’audience y participent
Jugement prononcé en séance publique : date de lecture donne la date de jugement ->
dessaisissement du juge de l’affaire -> jugement a autorité de chose jugée -> délais de recours

23
Affichage du jugement ; tiers peuvent en demander une copie

III- Le contenu du jugement

A- La présentation et la motivation du jugement

Règles de présentation formelle prévues par le CJA : jugements rendus au nom du peuple français,
visas précisent les textes applicables et les conclusions des parties, mentions obligatoires attestent
de la régularité du jugement, mention des motifs, dispositifs comportent autant d’articles que le juge
prend de décisions, jugement sont motivés de manière circonstanciée et précise

B- Les pouvoirs du juge

Juge a l’obligation de statuer dans les limites des conclusions dont il a été saisi -> il ne peut statuer
ultra petita (en deçà des conclusions) ou infra petita (au-delà des conclusions)
Aménagements :
- Acte indivisible : requérant a demandé l’annulation de certaines dispositions d’un acte ->
juge rejette ses conclusions et ne pourra y faire droit
- Recours pour excès de pouvoir : juge ne tire pas forcément toutes les conséquences de
l’illégalité d’un acte ; substitution de base légale
- Substitution de motif si l’administration en fait la demande
- CE, 2011, Danthony : irrégularité de la procédure préalable à l’édiction d’un acte n’entraîne
pas automatiquement l’irrégularité de l’acte
- CE, 2018, Fédération des finances et affaires économiques de la CFDT : on ne peut utilement
invoquer un vice de forme et un vice de procédure contre un acte règlementaire que dans le
cadre d’un REP
- Principe de l’économie de moyen : juge n’a pas l’obligation de statuer sur tous les moyens
Pouvoirs du juge dans le REP : JA peut enjoindre à l’administration de faire une chose en lui indiquant
qu’elle « doit tirer telle ou telle conséquence de la décision juridictionnelle » ; il peut aussi l’enjoindre
de prendre un acte ou d’en abroger ; annulation partielle plutôt que totale possible ; juge peut
parfois réécrire un acte ; possibilité de moduler dans le temps les effets d’une annulation

C- Les condamnations pécuniaires liées à l’instance

Dépens : partie perdante qui supporte leur charge en principe -> gratuité des actes de justice =
montant réduit qui ne concerne que les frais d’enquête et d’expertise
Frais non compris dans les dépens = préjudice causé à l’une des parties qui a dû se défendre alors
qu’elle était injustement attaquée ou coût supporté par une partie pour faire connaître son bon droit
è Remboursement s’il y a une demande chiffrée au juge : seule la partie perdante ou
condamnée aux dépens peut y être condamnée
è CE, 2012, Ministre de la défense et des anciens combattants : personne publiques peuvent
demande un tel remboursement sauf les demande au titre de surcroît de travail
Amende pour recours abusif : requérant peut être condamné au paiement d’une amende d’un
montant de 10 000 euros maximum ; octroyée que si le requérant perd au procès

24
Chapitre 4 : les référés

Section 1 : les référés d’urgence

Loi du 30 juin 2000 : modernisation de ces procédures d’urgence et en prévoit trois : le référé
suspension, le référé liberté et le référé mesure utile

I- Les règles d’ordre procédural

Dérogation au principe de collégialité : référé normalement jugé par un juge unique qui a la faculté
de renvoyer l’affaire devant la formation collégiale de sa juridiction
Juge des référés enjoint à statuer dans un délai bref -> doit être expérimenté dans son domaine
(souvent un président de TA ou un premier conseiller avec 2 ans d’ancienneté, etc.)
Affaire complexe -> possibilité d’une formation de 3 juges référés

A- Les règles relatives à la saisine du juge

Possible de déposer 2 demandes de référé dans une même requête


Conditions de la requête : écrite et signée ; permet d’identifier l’auteur ; comporte de vraies
conclusions et un exposé des faits et moyens ; dispense de ministère d’avocat seulement pour
certains litiges (exception = référé liberté) ; justification de l’urgence
Assouplissement des règles de compétence : juge n’a pas à s’interroger de manière approfondie sur
sa compétence

B- Des conditions de recevabilité assouplies

Urbanisme : recours contre une autorisation d’urbanisme doit être notifié dans les 15 jours au
bénéficiaire et à l’auteur de l’acte ; pareil s’il s’agit d’un référé suspension
Tous les domaines : nécessairement une décision préalable pour le référé suspension car la
suspension d’un acte est demandée ; possible de saisir le juge sans avoir formulé de demande
préalable à l’administration
Requérant représente une personne morale : dispenser d’autorisation à agir ; juge vérifie
l’adéquation entre le demandeur et la personne qu’il entend représenter
Existence d’un RAPO : pas d’exigence que le requérant en forme un avant de saisir le juge ->
requérant peut prouver qu’il a produit simplement un RAPO (pas besoin de réponse de l’admin)
Souplesse s’agissant du défaut de capacité -> CE, 2014, Kaibo : mineur non émancipé peut introduire
un référé liberté si des circonstances particulières le justifie
Procédure de tri des requêtes : permet d’évacuer de désengorger les TA ; procédure sans instruction
contradictoire préalable pour les demandes sans urgence lorsqu’elles ne relèvent pas du JA, sont
irrecevables ou mal fondées

C- Les règles relatives à l’instruction et au jugement des affaires

Juge des référés suspension et liberté doivent informer sans délai les parties de la date et de l’heure
de l’audience publique

25
Principe = doit juger dans un délai de 48h ; pas de délai fixer pour le référé suspension
Parties convoquées par tout moyen à l’audience -> affaire en état d’être jugée dès la notification
Délai de jugement : juge peut refuser de traiter une affaire par manque de temps ou bien de décider
de la traiter ultérieurement (ex : affaire Lambert)
CJA : « les exigences de la contradiction sont adaptée à l’urgence » -> juge peut se satisfaire d’un
simple échange verbal au cours de l’audience
Requête transmise au défendeur -> juge n’a pas l’obligation de communiquer les observations en
défense ou les interventions des tiers mais aucune mesure ne pourra être prononcée dans que le
défendeur ait été avisé et dans la capacité de présenter des observations
Pas de conclusions du rapporteur public
Juge qui s’estime suffisamment éclairé clôt l’audience ce qui clôt l’instruction (intervient toujours
après)
Référé liberté, le juge indique la date ou l’heure à laquelle il rendra sa décision

II- Les conditions d’octroi d’un référé

A- L’existence générale d’une situation d’urgence

1) L’appréciation de l’urgence dans le référé-suspension

Législateur ne donne pas de critères d’identification -> rôle du JA : avant la loi du 30 juin 2000
(introduction référé suspension), le juge exigeait la présence d’un préjudice difficilement réparable
è CE, 2001n Confédération nationale des radios libres : décision doit préjudicier de manière
suffisamment grave et immédiate à un intérêt public ou à la situation du requérant ou aux
intérêts qu’il entend défendre
Gravité du préjudice sans influence si la situation d’urgence est due au comportement du requérant
ou quand ce dernier a pu tarder
Demandeur doit dans tous les cas établir la situation d’urgence en fournissant des arguments
Urgence invoquée par le requérant peut se heurter à celle invoquée par l’administration à exécuter
la décision contestée (CE, 2017, Association SOS éducation : question de sécurité publique pour
l’administration -> pas d’urgence à suspendre l’acte)
Présomption d’urgence -> rare : par ex en cas de référé suspension contre un permis de construire

2) L’appréciation de l’urgence dans le cadre d’un référé liberté

Pas de précision du législateur -> points communs avec le référé suspension mais conception + stricte
è Atteinte grave et manifestement illégale à une liberté ne présume pas automatiquement
l’urgence d’une situation
Requérant doit démontrer l’urgence et ne doit pas en être à l’origine
Urgence appréciée concrètement et globalement par le juge en prenant compte le délai de 48h
CE, 2003, Hug-KalinKowa : situation d’urgence remplie selon les critères du référé suspension
n’induit pas qu’elle est constituée au regard des critères du référé liberté
CE, 2004, Kofi : situations où il peut ne pas y avoir d’urgence mais des circonstances particulières
Présomptions d’urgence (ex : assignations à résidence prononcée pendant l’état d’urgence)

26
3) L’appréciation de l’urgence dans le cadre d’un référé conservatoire

Permet de maintenir en l’état une situation -> aucune définition de l’urgence par la loi

B- Les exigences propres à chaque référé

1) Le référé suspension

Condition de recevabilité essentielle = subordination d’une requête en annulation au fond


Art. L. 521-1 CJA introduit 2 modifications : possibilité de demander la suspension d’une décision de
rejet (met fin à la jurisprudence Amoros de 1970) ; exigence d’un moyen propre à créer en l’état de
l’instruction un doute sérieux quant à la légalité de la décision
Moyen tiré de l’inconventionalité d’un texte : CE considère d’abord que c’est impossible (2002,
Carminati) puis estime qu’il est possible de retenir un moyen tiré de l’incompatibilité d’une loi avec le
DUE en cas de méconnaissance manifeste de ses exigences (2010, Diakité)
è Renversement de cette jurisprudence avec l’ordonnance GISTI de 2012

2) Le référé liberté

Il faut une atteinte à une liberté fondamentale subie personnellement par le requérant : notion de
liberté fondamentale ne se cantonne pas aux libertés traditionnelles (CE, 2001, Commune de
Venelles : libre administration) ; développement d’une notion pragmatique par le JA avec souvent un
rattachement à la Constitution ou à la CEDH
Il faut une atteinte à cette liberté fondamentale imputable soit à une personne morale de droit
public soit à un organisme de droit privé chargé de la gestion d’une service public
L’atteinte doit être grave et manifestement illégale : illégalité perceptible -> caractère certain ;
appréciation au cas par cas même pour la gravité

3) Le référé conservatoire

CJA : mesures doivent être utiles (// référé mesure utile) ; mesures ne doit pas faire obstacle à
l’exécution d’aucune décision administrative sauf s’il s’agit de prévenir un péril grave ; mesure ne
doit se heurter à aucune contestation sérieuse

III- Les mesures prononcées et les voies de recours

A- Les règles applicables à tous les référés d’urgence

Juge des référés prend des mesures ayant un caractère provisoire -> ne peut prononcer d’annulation
ou ordonner des mesures qui auraient des effets identiques
Certaines mesures prononcées par le juge n’ont pas un caractère provisoire : quand il n’est pas
possible autrement de sauvegarder l’exercice effectif d’une liberté fondamentale
è CE, 2017, Ville de Lyon : atteinte à la liberté de réunion -> juge ordonne à la ville d’autoriser à
une association de louer à une certaine date une salle municipale -> pas de retour en arrière
une fois que la réunion a eu lieu -> décision a pleinement joué ses effets

27
Mesures provisoires -> JA du principal n’est pas tenu de suivre le raisonnement du JA du référé ->
peut y mettre fin s’il y a une demande justifiée par un élément nouveau
CE, 2003, Association Convention Vie et nature pour une écologie radicale : mesures n’ont pas
l’autorité de la chose jugée mais sont exécutoires et obligatoires
CE, 2010, Diakité : recours au référé n’empêche pas l’introduction d’une QPC
è Juge rejette la requête : si irrecevable ou défaut d’urgence = n’examine pas la QPC / si mal
fondée = examine la QPC
Notification de l’ordonnance : sans délai ; par tous moyen
Délai de recours contre l’ordonnance = délai franc de 15 jours

B- Les règles spécifiques à chaque type d’ordonnance

Ordonnances de tri des requêtes : seulement recours en cassation qui est possible
Ordonnance dans le cadre du référé suspension : suspension totale ou partielle qui prend fin au plus
tard quand le juge se prononce qui peut assortir la suspension avec une jonction ou une astreinte
Suspension d’une décision de rejet : juge indique conséquence pour l’administration
è CE, 2016, Commune de Bordeaux : décision de l’administration après la suspension d’un acte
a un caractère provisoire
Ordonnance dans le cadre du référé liberté : juge peut prononcer des mesures diverses et variées ;
préfet peut introduire un référé liberté (alors qu’il existe le déféré liberté) ; contestation qu’en
interjetant un appel
è CE, 2009 : mise en œuvre d’une mesure par le préfet n’empêche ni d’introduire un référé ni
le déroulement de la procédure en référé
Mesures dans le cadre d’un référé conservatoire : juge exerce un pouvoir d’injonction accompagné
d’une astreinte ; caractère subsidiaire de ce référé ; pourvoi en cassation dans un délai de 15 jours
è CE, 2015, Section française de l’observatoire international des prisons : référé conservatoire
ne peut pas être utilisé pour demander au juge d’enjoindre à l’administration d’adopter un
acte règlementaire
Actes de référé-conservatoire : CE élargit d’abord son champ d’application aux mesures utiles /
position plus nuancée ensuite quand il s’agit de décisions de rejet
è CE, 2016, M. V. : juge ne peut faire obstacle à l’exécution d’une décision administrative

Section 2 : les autres référés

I- Les référés ordinaires

Référés de droit commun rattaché à aucun contentieux particulier ; pas de condition d’urgence
Référé constat : but = faire constater des faits matériels par le juge ; intérêt = préconstituer et
sauvegarder la preuve de faits religieux
è Conditions = demande doit se rapporter à des faits susceptibles de donner lieu à un litige +
mesure doit être utile
Référé instruction : juge peut prescrire toute mesure utile d’expertise ou d’instruction ; juge se
prononce sur des questions de faits mais aussi sur la nature ou la cause d’un dommage, etc.
è Conditions = mesure doit être utile pour régler le litige au principal

28
Référé provision : demande au juge du versement d’une provision ; pas de demande préalable au
fond nécessaire ; pas règles prévue par les textes sur le montant des provisions
è Condition = prouver l’existence d’une obligation non sérieusement contestable

II- Les référés spéciaux

Propres à des contentieux particuliers (ex : référé fiscal, référé audiovisuel, etc.)
Référé précontractuel (avant signature d’un contrat) et référé contractuel (après signature) : champ
d’application réduit = possible qu’en cas de manquement de la personne publique à l’exigence de
publicité et de mise en concurrence s’agissant de la procédure de passation du contrat
Régimes spéciaux de suspension : ex = déféré préfectoral où le préfet peut assortir son déféré d’une
demande en suspension

PARTIE 3 : LA CHOSE JUGEE

Fait obstacle à ce que soit méconnu ce qu’a décidé le juge


Violation de la chose jugée = caractère d’ordre public

Chapitre 1 : les effets et l’exécution de la chose jugée

Section 1 : les effets de la chose jugée

Jugement d’annulation : acte annulé disparait de façon rétroactive sauf si le juge a utilisé sa
possibilité de moduler dans le temps les effets de l’annulation ; renaissance du droit antérieur (CE,
1925, Rodière// reconstitution du passé) -> pas lieu à un remplacement quand un acte administratif
est annulé
Remplacement automatique : retour de dispositions modifiées/ abrogées par l’acte annulé
Juge peut enjoindre à l’administration de se prononcer à nouveau -> administration saisie de plein
droit de cette demande (requérant n’a pas à faire une nouvelle demande)
Administration est parfois obligée d’adopter un nouvel acte (ex : juge annule un décret d’application
d’une loi -> nouveau décret indispensable)
Décision dont l’annulation rend illégales d’autres décisions (ex : règlement annulé sur la base duquel
étaient prises des décisions individuelles qui deviennent aussi illégales)
Théorie des fonctionnaires de fait : annulation de la nomination de certaines personnes ne rend pas
illégale les mesures qu’elle a prises antérieurement

Section 2 : l’exécution de la chose jugée

I- L’obligation d’exécuter la chose jugée

Administration ne peut se décharger de ses obligations -> doit prendre les mesures imposées
Obligation d’exécuter : notification du jugement -> administration doit s’acquitter de l’obligation
dans un délai raisonnable ; pas de suspension de l’obligation possible mais peut disparaitre s’il y a eu
une validation législative

29
CE, 1970, Fabrègues : administration ne respecte pas son obligation et adopte des actes contraires à
la chose jugée

II- Les garanties visant à assurer l’exécution de la chose jugée

A- Les garanties mises en place en amont

Loi de 1980 = reconnaissance du pouvoir de prononcer des astreintes / loi de 1995 = reconnaissance
du pouvoir d’injonction
Astreinte concernait seulement les personnes publiques + organismes de droit privé chargé de la
gestion d’un service public et juridictions territoriales ensuite
Pouvoir d’injonction dans deux cas de figure : décision implique qu’une personne morale de droit
public ou un organisme chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans
un sens déterminé une nouvelle décision après une nouvelle instruction
Juge ne peut s’affranchir des règles relatives à la répartition de compétences entre les deux ordres
de juridiction ; mesure d’exécution ordonnée par le juge ne peut être remise en cause par le juge de
l’exécution + juge ne peut utiliser ce pouvoir d’office -> demande préalable du requérant (CE, 2011,
Société La Lauzière)
Juge peut décider de ne pas prononcer une astreinte immédiate pour laisser à l’administration un
temps pour exécuter la décision OU parce qu’il y renonce
Loi du 23 mars 2019 : juge peut utiliser son pouvoir d’injonction et d’astreinte

B- Les garanties mises en place en aval

Administration peut demander au juge des éclaircissements sur les modalités d’exécution -> avis
sous forme de lettre (possible devant les CAA et TA depuis 2015 qui peuvent transmettre au CE)

1) L’exécution automatique

// Loi de 1980 : concerne condamnations pécuniaires d’une personne publique par une décision
juridictionnelle passée en force de chose jugée
è Etat : doit ordonnancer la somme dans un délai de 2 mois à compter de la notification du
jugement sinon le comptable assignataire de la dépense doit procéder au paiement //
compétence de la Cour de discipline budgétaire et financière
è CT : délai de 2 mois sinon créancier pourra saisir le préfet qui pourra procéder à un
mandatement d’office -> préfet n’agit pas : responsabilité de l’Etat pour faute lourde

2) Le recours au juge de l’exécution

Rejet d’une réclamation à l’autorité administrative tendant à obtenir l’exécution d’un jugement ->
décision expresse fait courir les délais de recours
Demande d’exécution : pas de ministère d’avocat nécessaire
Jugement n’a pas défini les mesures d’exécution : juridiction saisie pour l’exécution procède à la
définition -> peut fixer un délai d’exécution et prononcer une astreinte

30
Inexécution d’une décision d’une juridiction administrative (autre que TA ou CAA) : CE peut procéder
à la définition de l’exécution si elle n’a pas été faite, fixer un délai et prononcer une astreinte
Pouvoir de prononcer une astreinte appartient aux juridictions territoriales et au CE
Condition de délai : 3 mois en principe + délai fixé à l’administration par la juridiction
Demande dont est saisie le juge donne lieu à 2 phases :
- Phase administrative : président de la CAA, du TA ou rapporteur accomplissent toutes
diligences qu'ils jugent utiles pour assurer l'exécution de la décision: exécution de la décision
ou demande pas fondée -> classement administratif de la demande
- Phase juridictionnelle : lorsque le président estime que les diligences accomplies sont
susceptibles de permettre, à court terme, l'exécution de la décision, il informe le demandeur
que la procédure juridictionnelle ne sera ouverte, le cas échéant, qu'à l'expiration d'un délai
supplémentaire de quatre mois
è Similaire pour le CE
Inexécution totale, partielle ou exécution tardive malgré astreinte : juge prononce liquidation de
l’astreinte ; astreinte en principe provisoire -> pourra être diminuée ou supprimée au moment de sa
liquidation

Section 3 : la contestation de la chose jugée

Contestation par le biais de voies de recours -> pas d’effet suspensif en principe : administration
devra exécuter le jugement même si elle fait appel (sauf si sursis à exécution du jugement)
Administration demande le sursis à exécution -> examen par les CAA ou par le CE : requête distincte
de la requête en appel
Régime général prévu par le CJA utilisé devant le juge d’appel et devant le juge de cassation -> 2
conditions : jugement doit risquer d’entraîner des conséquences difficilement réparables + moyens
invoqués par le requérant doivent paraître sérieux en l’état de l’instruction
è Condition supplémentaire devant le juge de cassation : moyens doivent être de nature à
justifier l’annulation du jugement et l’infirmation de la solution du juge du fond
Régimes spéciaux : demande au juge d’appel faite par une autre personne que le demandeur en
première instance au motif que l’exécution du jugement risque de provoquer chez le nouveau
demandeur la perte définitive d’une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où ses
conclusions d'appel seraient accueillies

I- Le recours en appel

Souvent exercés par les CAA


Juridiction peut annuler un jugement irrégulièrement rendu ou le réformer suite à un nouvel examen
Appel doit avoir été prévu par un texte -> appel sera alors possible contre les jugements au fond et
contre les jugements d’avant dire droit

31
A- Les conditions d’exercice du recours en appel

1) L’appel principal

Appel de droit commun -> 2 conditions : requérant doit être partie à l’instance de premier ressort +
doit avoir un intérêt à interjeter appel (pas possible si le jugement lui a donné raison au fond)
è Intérêt doit être relatif aux dispositifs (X motifs)
Délai de droit commun de 2 mois pour faire appel -> forclusion appliquée rigoureusement : appel
doit être communiqué au greffe avant l’expiration du délai (2 mois francs)
Requête soumise aux mêmes exigences de présentation qu’une requête en première instance :
moyens présentés doivent permettre à la juridiction de se prononcer sur les erreurs qu’aurait pu
commettre le tribunal en écartant tel ou tel moyen
Conclusions ne peuvent avoir pour objet que l’annulation ou la réformation du dispositif du jugement

2) Les appels complémentaires

Prolongent ou ripostent aux appels principaux : pas de condition de délai ; permettent d’élargir
l’instance d’appel
2 types :
- Appel incident = conclusions reconventionnelles du défendeur en première instance :
réponde du défendeur en appel ; intimé demande le réformation du jugement en tant qu’il
donne partiellement satisfaction à l’adversaire ; mêmes règles que l’appel principal ; peut
être exclu de certains contentieux (électoraux, disciplinaires, etc.)
- Appel provoqué = intimé peut diriger des conclusions contre un autre intimé ou une partie
étrangère à l’instance d’appel -> but = protéger les intérêts ou la situation d’une personne
qui risque de voir sa situation ou ses intérêts détériorés par le jugement d’appel : appel
provoqué principalement dans le cadre des relations plurales (ex : en matière de
responsabilité) ; même conditions de recevabilité que l’appel incident

B- Les pouvoirs du juge d’appel

En présence d’un jugement régulier : effet dévolutif de l’appel -> juge réexamine le fond et juge à
nouveau le litige ; rejuge dans la limite de ce qui a été soumis au premier juge et des conclusions et
moyens d’appel ; requérant ne peut faire valoir de nouvelles conclusions ou nouveaux moyens sauf
d’ordre public ; juge peut réformer toute ou partie du jugement, annuler la condamnation ou rejeter
l’appel
Jugement irrégulièrement prononcé ou qui n’a pas tranché le fond : juge d’appel doit examiner la
régularité du jugement -> savoir s’il renvoie l’affaire ou statue sur le fond ; pouvoir d’évocation du
juge d’appel = faculté de pouvoir statuer sur le fond alors qu’il n’en est pas saisi ; un seul et même
arrêt annule le jugement et statue au fond

II- Le recours en cassation

Exercice que par le CE : concerne jugements rendus en dernier ressort ou en premier et dernier
But = assurer la conformité des jugements à la règle de droit -> contrôle de la légalité des jugements

32
A- L’exercice du recours en cassation

CJA : recours en cassation peut être exercé contre toute décision juridictionnelle de dernier ressort
è Même solution pour la jurisprudence (CE, 1947, D’aillères)
Recours en cassation = garantie fondamentale des justiciables -> seul le législateur fixe les règles
Peut être exercé que contre les décisions qui ne peuvent l’objet d’autres voies de recours
Conditions de recevabilité : auteur doit avoir été partie à l’instance de premier ressort et qu’il ait un
intérêt à se pourvoir en cassation (intérêt toujours examiné par rapport au dispositif)
Délai franc de 2 mois en principe
Possibilité de recours complémentaires ; ministère d’avocat obligatoire en principe depuis 1953
Particularité = existence d’une procédure préalable d’admission : mise en place par une loi de 1987 ;
concerne tous les pourvois en cassation ; régie par décret ; filtrage des recours réparti entre les
différentes chambres de la section du contentieux

B- Le contrôle du juge de cassation

Pas de nouveaux moyens sauf ceux d’ordre public qui peuvent être relevé d’office par le juge
è Moyens invoqués en première instance mais pas repris en appel : irrecevables en cassation
Juge peut contrôler la régularité externe du jugement et son bien-fondé (régularité interne)
2 types de contrôle en France

1) Le contrôle des motifs de droit

Juge du fond doit avoir fait une application exacte de la règle de droit -> contrôle de l’erreur de droit
-> cassation pour violation de la loi = cassation pour erreur de droit

2) Le contrôle des motifs de fait

Juge vérifie que le jugement rendu n’a pas commis d’erreur par rapport aux faits de l’espèce
Contrôle de 2 éléments distincts :
- L’erreur de fait : concerne la matérialité, l’exactitude des faits
- L’erreur de qualification juridique des faits (ex : en matière de dommages de travaux publics -
> contrôle de la qualification donnée à la victime=
Limites : juge de cassation va par exemple refuser de contrôler la reconnaissance ou la négation
d’une erreur manifeste d’appréciation
CE, 1952, Simon : juge ne peut contrôler l’appréciation des faits -> sauf dénaturation
è Confirmation par CE, 2015, La Poste
è Juge de cassation n’est pas un 3ème degré de juridiction

C- La décision du juge de cassation et ses conséquences

Juge rejette le recours (irrégularité du recours ou bien fondé du jugement) ou annule totalement ou
partiellement
Existence d’un vice entachant le jugement n’interdit pas forcément le rejet du recours
è CE, 1954, Société entreprise Quillery : motif erroné juge surabondant -> rejet

33
è Substitution de motif par le juge possible à 2 conditions : motif en question doit
correspondre à un moyen invoqué devant le juges du fond ou d’ordre public + bien fondé du
motif ne doit pas comporter l’appréciation de circonstances de fait
Annulation : juge de cassation peut décider de renvoyer le litige aux juges du fond ou de régler lui-
même l’affaire au fond
2 conséquences du prononcé de renvoi : juridiction désignée saisie de plein droit -> parties n’ont pas
à intervenir + renaissance de l’instance qui était ouverte devant les juges du fond
Juridiction de renvoi doit respecter la décision du CE -> liée par la chose jugée en cassation
Autorité relative ou absolue de la chose jugée
CE décide de régler lui-même l’affaire au fond : se comporte comme un juge du fond -> pouvoirs
identiques à ceux d’un juge d’appel (procède à des mesures d’instruction, etc.)
è CE choisit de régler lui-même l’affaire au fond dans 80% des cas : permet de mettre fin à une
procédure parfois trop longue + fixe une politique jurisprudentielle

III- Les autres voies de recours

A- Les recours largement ouverts

1) Le recours en interprétation

Ouvert aux parties à l’instance dans laquelle le jugement à interpréter a été prononcé
Jugement doit être obscur ou ambigu ; pas de condition de délai
Juridiction rend un nouveau jugement dont le dispositif indique comment comprendre ce qui avait
été précédemment jugé -> recours porté devant la juridiction auteur du jugement
Recours possible concernant un jugement rendu sur renvoi de l’autorité judiciaire

2) L’opposition

Voie de rétractation contre un jugement rendu par défaut -> ouverte à la partie défaillante (=
absente à l’instance initiale)
Non suspensive ; délai de 2 mois ; motivée
Opposition fondée : juridiction statue de nouveau + jugement par défaut déclaré non avenu
Ouverte sans texte en vertu des principes généraux de la procédure -> décret de 1959 : interdiction
contre les jugements par défaut des TA
è CE, 2018, Métropole Aix-Marseille-Provence : solution retenue
Décret de 2019 : interdiction devant les CAA -> opposition possible que contre les arrêts du CE et les
décisions des juridictions administratives spécialisées

3) La tierce opposition

CE, 1972, Dame Talleyrand-Périgord : règle générale de procédure pour le CE qui ne peut être
écartée que par une disposition législative expresse
è Permet à des personnes qui n’ont pas été partie de contester le jugement s’il préjudicie à
leurs droits
Ouverte quelle que soit la nature du contentieux et contre toute décision juridictionnelle

34
Voie de rétractation -> portée devant la juridiction qui a pris le jugement contesté
Pas de délai en principe si le tiers opposant n’a pas reçu notification du jugement (sinon 2 mois)
Conditions de recevabilité : personne doit avoir la qualité de tiers (pas présente ou représentée à
l’instance) ; jugement doit préjudicier à un droit du tiers
Tierce opposition contre un jugement de rejet impossible
Demande fondée : précédent jugement nul et non avenu + rejet du recours à l’origine du jugement

B- Les recours dont l’ouverture est plus restrictive

1) Le recours en révision

Avant : possible que si prévue par un texte -> ouvert devant le CE ou des juridictions spéciales contre
leurs propres arrêts
Régime strict pour les arrêts contradictoires du CE : obligation d’un ministère d’avocat ; conclusions
complémentaires impossibles
CE, 2012, Serval : recours ouvert même sans texte pour les JA spéciales seulement
Exercé dans 3 hypothèses :
- Décision du CE rendue en pièces fausses
- Non production d’une pièce décisive retenue par l’adversaire qui aurait permis au CE de
statuer autrement
- Inobservation des dispositions relatives à la composition de la formation de jugement, à la
tenue des audiences, à la forme et au prononcé de la décision
Révision obtenue : précédent arrêt déclaré nul et non avenu ; CE statue à nouveau

2) Le recours en rectification d’erreur matérielle

Ouvert même sans texte devant toute juridiction statuant en dernier ou premier et dernier ressort
è Décisions CE et CAA
Décret de 2010 : président d’une CAA ou de la section contentieux peut dans un délai d’un mois à
compter de la notification du jugement procéder par ordonnance à des corrections
è Recours est alors exceptionnel
Conditions de recevabilité : erreur matérielle (X juridique) ; délai de 2 mois ; erreur ne doit pas être
imputable au requérant et doit avoir une influence sur la solution donnée au litige

3) Le recours dans l’intérêt de la loi

Portée seulement doctrinale -> aucun effet sur les parties même en cas d’annulation
Objet = rétablissement de principes juridiques violés
Ouvert sans texte ; même devant les juridictions souveraines (CE, 1997, Ministre de la guerre c.
Martin) ; devant le CE mais pas contre ses décisions
Recours réservé aux ministres ; possible que contre un jugement définitif ; pas de condition de délai

35

Vous aimerez peut-être aussi