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L’art de la Renaissance trouvait son inspiration dans l’Antiquité gréco-romaine. Cet art
ne se proposait pas de représenter la réalité du monde de l’époque mais de
rechercher une beauté idéale. L’idéalisation concernait les formes, la couleur, la
lumière, mais aussi les sujets, souvent puisés dans la mythologie religieuse antique ou
chrétienne et dans l’histoire.
Chef-d'œuvre de la grande décoration murale, peinte en face de la Dispute du saint sacrement (consacrée à la vérité révélée), elle
exalte la philosophie et la recherche rationnelle du vrai, thèmes conformes à l'humanisme de Jules II ; elle réunit, dans une architecture
inspirée de Bramante, Platon (sous les traits de Léonard de Vinci), Aristote, Pythagore, Héraclite (sous les traits de Michel-Ange), etc.,
penseurs grecs dont la Renaissance associe l'idéal à celui du christianisme.
La fin du 16e siècle et le 17e vont rompre avec cette recherche de l’harmonie idéale et
prôner un réalisme parfois dramatisé à l’excès : c’est l’apparition du baroque. Mais une
autre tendance verra le jour au 17e siècle concomitamment à la naissance des Etats-
nations. Ces structures politiques cherchent à asseoir leur puissance en utilisant l’art
comme un instrument de promotion : définition du beau par des académies liées au
pouvoir, glorification des élites par le portrait. Ainsi la constitution des nations
néerlandaise et française impriment aux productions artistiques des caractéristiques
propres. Le classicisme français, prolongement mais aussi réaction au baroque, trouve
son origine dans une volonté politique : celle de Louis XIV.
Depuis cette époque, cette dualité de la production artistique n'a jamais cessé.
Renouveler au risque de choquer est le propre de la créativité artistique ; mais les
puissances, et en premier lieu les Etats, sont une source de financement et il faut
leur plaire pour être accepté.
La peinture baroque
1571-1610
Le réalisme
Avec Caravage, nous quittons les représentations idéalisées des personnages bibliques.
Il choisit des modèles humains de type populaire, souvent même des marginaux :
prostituées, mendiants, enfants des rues. Les corps humains sont naturalistes avec
une mise en évidence de la musculature comme dans Le Martyre de Saint-Matthieu, La
Mise au tombeau ou David avec la tête de Goliath. L’Eglise catholique, qui cherche à
frapper les esprits face au puritanisme protestant, adoptera une politique sélective :
des toiles seront refusées comme choquantes, beaucoup d’autres seront acceptées.
David avec la tête de Goliath (1610). Huile sur bois, 91 × 116 cm, Kunsthistorisches
Museum, Vienne. Selon le récit biblique, Goliath était un géant « de six coudées et un
empan » soit environ 2,90 m. Goliath sortit du camp philistin et mit l’armée d’Israël au
défi de trouver un homme suffisamment fort pour gagner un duel déterminant l’issue du
conflit entre les deux nations. David, jeune berger agréé par Dieu, releva le défi lancé
par Goliath. Après avoir déclaré qu’il venait contre lui avec l'appui de Dieu, David lui jeta
une pierre avec sa fronde. Celle-ci s'enfonça dans le front de Goliath qui tomba à terre.
David lui prit son épée et acheva le géant en lui coupant la tête.
Le clair-obscur
Autoportrait. Huile sur toile, 57 × 68 Avec son frère Agostino et son cousin Lodovico, Annibal
cm, Galerie des Offices, Florence
Carrache fonde à Bologne en 1585 l’Académie des
Incamminati (Accademia degli Incamminati). En réaction au
maniérisme du 16e siècle, l’Académie propose un style
nouveau qui puise son inspiration dans l’art de l’Antiquité et
les maîtres de la Haute Renaissance italienne. L’Académie
des Carrache est à la fois une école, dans laquelle les
étudiants apprennent le dessin et copient les grands
maîtres, et une institution culturelle visant à diffuser une
conception stylistique nouvelle.
Domine, quo vadis ? (1601-02).
Huile sur bois, 77,4 × 56,3 cm,
National Gallery, Londres.
Mythologie chrétienne. Au
moment de la crucifixion, l’apôtre
Pierre avait renié le Christ (« Je
ne connais pas cet homme »).
Après la mort du Christ, Pierre
part pour Rome. Le Christ lui
apparaît sur la via Appia près de
la ville. Pierre lui demande « Où
vas-tu, Seigneur ? » (en latin «
Domine, quo vadis ? »). Le Christ
répond : « Je vais à Rome me
faire crucifier une seconde fois ».
Pierre décide alors de ne plus
fuir. Il retourne à Rome et il est
crucifié à sa demande.
A Bologne Annibal Carrache peint des portraits, des paysages ou des scènes de genre. Il est remarqué par le
cardinal Odoardo Farnèse (1573-1626) pour les décors des palais Fava et Magnani réalisés avec son frère Agostino
(1557-1602) et son cousin Lodovico. En 1595, le cardinal l’appelle à Rome pour décorer son palais. Pendant huit
ans, il travaillera dans le palais Farnèse, décorant seul la voûte de la grande galerie (20 m de long sur 5 m de
large). Nicolas Poussin (1594-1665) déclarera qu’il s’agit d’une des merveilles de l’art. Les parois ont été réalisées
en famille et avec l’aide des élèves d’Annibal Carrache. Mais cette œuvre colossale est mal accueillie par le
cardinal Farnèse qui ne donne que 500 écus à Carrache pour prix de son travail. L’artiste est profondément meurtri
par tant d’injustice et il ne parviendra pas à sortir d’une grave mélancolie (que nous appellerions sans doute
dépression aujourd’hui).
Annibal Carrache meurt à Rome en 1609 et, selon son vœu, il est inhumé auprès de Raphaël (1483-1520).
Le Triomphe de Bacchus et d’Ariane (voûte du palais Farnèse, 1597-1602).
Fresque. Annibal Carrache a représenté le Triomphe de Bacchus et d'Ariane,
tous deux montés sur des chars marchant de front et traînés par des tigres et
des boucs blancs. Autour sont des faunes, des satyres, des bacchantes qui
leur font cortège.
Triomphe de Bacchus et d’Ariane (voûte
palais Farnèse détail, 1597-1602)Triomphe
de Bacchus et d’Ariane (voûte palais Farnèse
détail, 1597-1602). Fresque.
Il est courant d’associer les deux frères (Annibal et Agostino), et le cousin (Lodovico ou
Ludovico) sous l’appellation Les Carrache. Si la plus forte personnalité artistique est
Annibal, ils ont souvent constitué une équipe, en particulier pour fonder et animer leur
académie ou pour décorer le palais Farnèse. Les Carrache ont joué un rôle de premier
plan car leur académie est à la racine du dépassement du maniérisme et de
l’implantation du classicisme du 17e siècle, en particulier en France. Doivent-ils être
rattachés au baroque ou au classicisme ? Bien entendu, une telle question n’a pas de
réponse. Toute classification se heurte à des problèmes de limites et dans le domaine
artistique, ces limites sont assez floues. Du baroque, les Carrache possèdent le
réalisme, la volonté de revenir à la nature, qui se manifeste en particulier dans la
valorisation du paysage, genre considéré comme secondaire auparavant. Leur nature est
cependant assez nettement idéalisée, car l’inspiration provient de Raphaël et le culte du
beau est un élément central. C’est plutôt le vrai que le réel qui est recherché : respect du
modèle, minutie dans l’exécution s’opposent à l’exagération, à la volonté manifeste de
briller par une fantaisie débridée propre au maniérisme. Mais la peinture des Carrache
correspond également à certaines caractéristiques du classicisme : rigueur de la
composition, importance du dessin (ils cherchent à concilier dessin et couleur). Leur
œuvre majeure, les fresques du palais Farnèse à Rome, illustre bien cette double
inspiration : réalisme et mouvement, mais composition parfaitement équilibrée et
contours nettement apparents qui indiquent l’importance accordée au dessin.
Palais Farnèse