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UNIVERSITE D’ETAT D’HAITI

Ecole Normale Supérieure

Département de Philosophie / 2ème année

Cours d’introduction à la phénoménologie de Husserl

Dispensé par le professeur : CLAUDE Calixte Ph. D

Lundi 12h-14h

Titre du travail : Présentation de la conscience dans les idées directrices pour une
phénoménologie de Husserl

Travail rédigé par : EMILE Shakespeare

Le 20 / 07 /2022
Sommaire

I- INTRODUCTION………………………………….…………….3-4
II- CONSCIENCE CHEZ DESCARTES……………….……………...5
III- CONSCIENCE DANS LES IDEENS…………………………….5-8
IV- BIBLIOGRAPHIE…………………………………………………..9
D’entrée de jeu, il faut souligner que les concepts philosophiques ne sont pas faciles à
saisir. Ils sont souvent très ambigus. Leur sens varie d’une époque à une autre, d’un philosophe
à un autre. Nous pouvons illustrer ce que nous venons de dire par la notion de conscience qui
constitue le fil d’Ariane de notre investigation dans le cadre de ce travail. En effet, la conscience
est un concept autour duquel gravite un ensemble de questionnements et ceci, pendant toutes les
époques de l’histoire de la philosophie, de l’antiquité jusqu’à l’époque contemporaine.
Néanmoins, on dit que les Grecs ne connaissaient pas la conscience dans une certaine mesure
parce qu’il n’y avait pas de mot dans leur vocabulaire qui correspondait à cette dernière, mais
une grande variété de termes et d’expressions sur lesquels la conscience est projeté et qui
renvoient à un rapport à soi, « tantôt un jugement moral, tantôt une perception opérant souvent
un croisement ou une déviation entre plusieurs de ces acceptions. 1 » Par ailleurs, il faut
distinguer la conscience morale de la conscience psychologique. Cependant, nous devons aussi et
surtout préciser que cette distinction ne signifie nullement que nous avons deux consciences,
mais une seule et unique conscience comme faculté naturelle qui aurait une double dimension :
une dimension morale et une dimension psychologique qui fait de l’homme à la fois un être un
être morale et un être épistémologique. Dans la mesure où, il pourrait à la fois distinguer le bien
du mal et le vrai du faux.

Revenons à notre raisonnement de départ. La conscience morale c’est cette faculté que nous
avons qui nous permet de distinguer le bien du mal. Elle pourrait être considérée comme un
véritable juge intérieur comme on le dit souvent dans l’histoire de la philosophie occidentale.
Elle nous permet d’évaluer nos actions. On parle très souvent dans ce cas de l’examen de
conscience qui doit être entendu comme un retour de la conscience sur elle-même. Kant, dans la
Critique de la Raison pratique, arrive même à la comparer à un tribunal.2 La conscience dans ce
cas serait synonyme de Raison, la raison pratique qui est la dimension morale dans la philosophie
de Kant.

Pour examiner le monde en disant de ce dernier qu’il est bien ou mal, bon ou mauvais, il
faudrait bien qu’on ait conscience de ce monde préalablement. Avoir conscience du monde serait
cette capacité qu’on a de se représenter le monde. Cette capacité nous renvoi directement à la
deuxième acceptation de la conscience qui est la dimension psychologique traduit en allemand
1
BARBARA Cassin (2004). Vocabulaire européen des philosophies, Paris, Seuil, pp.281
2
JEAN-PIERRE Zarader (2015). Les grandes notions de la Pilosophie, Paris, elipses poche, pp.143
comme « Bewsfstsein » et anglais comme « Consciousness 3». C’est la présence à soi et au
monde. Dans une certaine mesure, la conscience morale suppose la conscience psychologique. Il
y aurait un rapport dialectique entre les deux. Car, on ne peut évaluer ce qu’on ne voit pas ou ce
qu’on n’a pas conceptualisé d’abord. Et toute perception présupposerait, à mon sens, une certaine
évaluation. L’une des questions fondamentales que soulève la notion conscience est celle de
savoir si elle propre à l’espèce humaine ? Autrement dit, est-ce uniquement l’Homme en tant
qu’espèce qui est capable de jugement et de représentation ? La conscience, particulièrement la
conscience morale, prétend indiquer à l’homme le chemin de son salut en lui permettant de
distinguer le bien du mal, ne lui trace-t-il pas du même coup celui de sa chute ? En dernier lieu,
encore avec la conscience morale, Martin Heidegger en parle comme un appel en termes de
vocation. Cette vocation pourrait-elle avoir une portée universelle ? Pour dire autrement, peut-
on concevoir l’examen de conscience d’un point de vue universel ?

Tout comme la conscience morale, la conscience psychologique pose également des


problèmes fondamentaux. Avec Henri Bergson on trouve l’idée que la conscience est
coextensive à la vie, et qu’elle se rencontre de haut en bas de la vie animale dès que se manifeste
la faculté de choisir.4 De ce point de vue nous arriverons à une conception matérialiste de la
conscience qui rejoint celle de l’homme neuronale, avec Jean Pierre CHANGEUX, qui a
soutenu la thèse selon laquelle la conscience n’est qu’un épiphénomène. Selon ce point de vue
Jean Pierre Changeux qui n’est celle de La Mettrie, la conscience n’a aucune existence en
dehors de l’organisation du cerveau. Par rapport à cette conception matérialiste, il serait
important de savoir dans quelle mesure peut-on étudier la conscience en elle-même tout en
acceptant son irréductibilité à ce corps-chose ? Que présupposerait une tentative d’étudier la
conscience en elle-même ? En dernier, ne serait-il pas nécessaire de savoir si la conscience en
tant que faculté est innée ou acquise

L’aporie qu’il y a autour du rapport entre la conscience et le corps occupe une place importance
dans la philosophie fondamentale. Par philosophie fondamentale, on entend ici toutes les
philosophies métaphysiques et épistémologiques qui ont marqué l’histoire de la philosophie, de
l’antiquité jusqu’à la modernité. Chez le père de la philosophie moderne elle est articulée comme
l’union de l’âme et du corps. Il a une conception dualiste de l’homme selon laquelle il est
3
Ibid. pp 144
4
Ibid. pp. 150
composé de deux substances : l’âme et le corps. L’âme qui correspond à ce qu’on appelle
habituellement la conscience est la substance pensante, elle est le siège de nos pensées. Et le
corps est la substance étendue. Leur contenu sont entièrement distinctes l’une de l’autre. Toute
l’aporie tourne autour du fait que ces deux substances à savoir : l’âme et le corps qui sont
distinctes conceptuellement, sont du même coup substantiellement ou réellement unis. La
conscience est distincte tout en étant uni au corps. La conscience ou chose pensante est définit à
partir de l’entendement, l’imagination, la volonté, les sens. Dans cette perspective, la conscience
participe intimement à la vie du corps et ne forme une réalité totalement distincte de ce dernier.
Ce qui présuppose que la conscience serait un res c’est-à-dire une chose, un existant qui a une
réalité ontologique. D’ailleurs Descartes le dit, c’est une chose qui pense, qui doute, qui conçoit,
qui affirme, qui nie, qui veut, qui ne veut pas, qui imagine, aussi qui sent. La conscience chez
Descartes aurait un être.

Husserl cependant, se plaçant d’un autre point de vue envisage de distinguer


radicalement entre ce qui signifie être pour un objet visé par la conscience et ce qui signifie être
pour cette même conscience. Dès le commencement du deuxième chapitre des Idées directrices
pour une phénoménologie, l’auteur précise que son objectif ou sa volonté était d’atteindre une
nouvelle région d’être qui jusqu’à présent n’a pas été délimitée selon sa spécificité 5. Il poursuit
sa réflexion pour clarifier la nature de cet être qu’il veut atteindre en disant qu’il est amené à
caractériser cet être comme « purs vécus », comme « conscience pure ». Avant même d’aller plus
loin dans le cadre de ce travail, faudrait-il qu’on précise ce qu’est la conscience en générale au
sens Husserlien du terme. Homme en tant qu’objet naturel, comme tous les autres objets qui sont
dans le monde naturel, exécute des actes de consciences qui sont des évènements qui se situent
dans la réalité naturelle. C’est pourquoi Husserl définit la conscience au sens large comme :
L’expression qui englobe tous les vécus6. Lorsque Husserl parle de la conscience au sens large
dans la réalité naturelle, cela veut dire purement et simplement conscience dans l’attitude
naturelle. Il admet que le mot conscience ou vécu de conscience en général. Il ne faut pas
confondre les objets dont nous prenons conscience dans ces divers types de conscience avec les
vécus de conscience eux-mêmes qui sont consciences de ces objets. Dans le premier cas, nous dit
Husserl, le vécu est une conscience « explicite » de son objet, dans l’autre, il est une conscience

5
EDMUND Husserl (1950). Idées directrices pour une phénoménologie, Paris, Gallimard, pp. 106
6
Ibid, pp. 107
implicite, purement potentielle7. Par rapport à cette affirmation, une interrogation s’impose ; la
conscience dont nous parle Husserl est-elle une faculté innée ou une acquisition ? Avant de
répondre à cette interrogation l’important serait de savoir d’abord ce que Husserl entend par
attitude naturelle.

Elle est cette croyance spontanée et naïve qui consiste à croire, sans même réfléchir à cette
croyance, que la réalité est un tout passivement perçu, dont ma conscience et mon existence font
au même titre que les autres choses, un fait. Dans l’attitude naturelle, la réalité serait vécu
comme un en-soi transcendant, c’est-à-dire comme si la réalité était indépendante et étrangère à
la conscience. Dans l’attitude d’esprit naturelle, nous dit Husserl dans L’idée de la
phénoménologie, nous sommes tournés, par l’intuition et la pensée vers les choses qui dans
chaque cas nous sont donné. Elle est là au milieu des choses, animées et inanimées, autrement
dit, elle est au milieu du monde. Il faut être prudent afin de ne pas confondre l’attitude naturelle
dont nous parle Husserl avec le naturalisme. Ils sont différents nous dit Paul Ricœur8, nous ne
traiterons pas de leur différence dans ce travail.

La conscience au sens général, celle qui est l’expression qui englobe tous les vécus n’est pas
celle visée par Husserl. Celle qui l’intéresse particulièrement, c’est une évidence universelle
appliquée à l’essence de la conscience en général. Celle qu’il a comme visée c’est nous dit-il :
« ce que la conscience a en elle-même comme son être propre qui, dans son absolue spécificité
eidétique n’est pas affecté par l’exclusion phénoménologique 9». Autrement dit, c’est ce qui est
subsisté comme le résidu phénoménologique. L’objectif c’est d’avoir accès à la conscience pure
ou du moins le phénomène originel de la conscience. Il a mis en œuvre une réduction
phénoménologique ou la réduction transcendantale qui peut être entendue comme épokè, terme
emprunté aux sceptiques grecs, que Husserl, d’après Jacques English, définit comme l’attitude
par laquelle le sujet suspend son jugement, en ne continuant plus à prendre position, pour libérer
son regard, non seulement pour les intentions, mais également pour ce que les intentions posent
en elles-mêmes de valide10. Cette réduction consiste à abandonner notre attitude naturelle et à
mettre entre parenthèse ou hors circuit, l’existence du monde objectif ce qu’il ne faut pas
confondre à la négation du monde. Jacques English nous parle au moins de trois types de
7
Ibid, pp. 114
8
Il a apporté cette précision dans une notre infrapaginale qui se trouve à la page 108 des Idéens.
9
Opcit, Les idées directrices pour une phénoménologie, pp. 108
10
JACQUES English (2009). Le vocabulaire de Husserl, Paris, Ellipses, pp. 115
réduction dans la pensée Husserlienne, à savoir : la réduction phénoménologique, la réduction
eidétique et finalement la réduction monadique. Pour Husserl, le passage de l’attitude naturelle à
l’attitude transcendantale ne signifie pas pour autant l’abolition du rapport de la conscience au
monde. C’est, au contraire, le dévoilement d’un tout nouveau Cogito, d’une tout autre
conscience. C’est une possibilité de nous hisser au phénomène originaire de la conscience qui ne
serait plus une conscience psychologique, mais une conscience transcendantale.

La conscience psychologique ou psyché est l’objet de la psychologie. Elle est susceptible d’être
assimilée au cerveau et du même coup inscrit dans le corps, conception qui ferait logiquement de
la conscience une faculté qui occupe une place définie dans le temps et l’espace. Cette
conscience psychologique n’est pas le phénomène originaire de la conscience, elle est au
contraire une réalisation de la conscience transcendantale. Cette dernière requiert un changement
d’attitude. Elle ne serait pas un objet appartenant totalement au monde. Elle y est de manière
potentielle, elle est la subjectivité transcendantale. D’où le sens de l’énoncé toute conscience est
conscience de quelque chose. C’est l’idée même de l’intentionnalité de la conscience qui
signifie qu’une conscience est toujours dirigée sur quelque chose, un objet qui n’est pas
forcément empirique, elle peut relever de l’imagination.

Tout vécu de conscience de conscience est un intentionnel qui possède un horizon, c’est-
à-dire la visée d’un fond relativement indéterminé. La conscience, dans la perspective
Husserlienne, a un rapport bien spécifique avec le temps. Elle est à la fois entre la rétention et
protention. La conscience du présent n’est pas une pure conscience d’un présent absolu qui serait
détaché totalement du passé, mais qui est également conscience du passé, d’où l’aspect
rétentionnel de la conscience. Elle est également protentionnelle. Alors, la conscience est
toujours conscience rétentionnelle et conscience protentionnelle.

L’intentionnalité de la conscience n’est autre que la transcendance d’un être qui existe et dont
l’être-au-monde constitue la structure fondamentale de son existence. Il s’ensuit qu’on ne peut
pas parler de la conscience comme ontologie, c’est-à-dire comme être capable de subsister de
part lui-même sans l’aide d’autrui, car la conscience n’est pas son passé, elle ne l’est pas tout en
l’étant, il apparait qu’elle n’est pas purement et simplement un être, mais plutôt un néant d’être.
Pour Husserl, la source suprême de toutes les affirmations rationnelles est la vision, ou la
conscience donatrice originaire. La conscience dans cette perspective aurait une portée
épistémologique. On doit aller à la chose même, c’est-à-dire le donné que nous voyons devant
notre conscience.

Bibliographie

BARBARA Cassin (2004). Vocabulaire européen des philosophies, Paris, Seuil

EDMUND Husserl (1950). Idées directrices pour une phénoménologie, Paris, Gallimard,

JACQUES English (2009). Le vocabulaire de Husserl, Paris, Ellipses


JEAN-PIERRE Zarader (2015). Les grandes notions de la Philosophie, Paris, elipses poche

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