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ANNEE ACADEMIQUE 2021-2022

LE DROIT COMMUNAUTAIRE

Semestre III : Harmattan

KESSOUGBO Koffi
Maître Assistant FDD/UL
SYLLABUS DU COURS DE DROIT INSTITUTIONNEL
COMMUNAUTAIRE

Intitulé du parcours : Licence Option droit public


Semestre d’évolution : 3
Code d’identité de l’enseignement :
Nombre de crédits :
Enseignant responsable de l’UE : KESSOUGBO Koffi, Maître assistant de droit
public à la FDD de l’Université de Lomé, Tél : (228 90 05 76 45) ; Mail :
kkessougbo@univ-lome.tg
Public cible : Etudiants inscrits en Licence, option droit public
Prérequis : Droit constitutionnel (Théorie générale de l’Etat, Régimes
politiques), Droit administratif, Droit budgétaire
Objectif général : La présente UE développe la théorie générale du droit
institutionnel communautaire
Objectifs spécifiques :
- savoir définir avec certitude le droit institutionnel
communautaire : ses sources, sa primauté sur le droit interne des Etats
membres de la communauté
- acquérir des connaissances sur les différentes institutions
communautaires (leur création, leur composition et organisation, leurs
attributions)
- prendre comme référence communautaire la CEE devenue depuis
er
le 1 novembre 1993 l’Union Européenne
Langue d’enseignement : Français
Bref descriptif de l’enseignement : Le droit institutionnel communautaire est
une branche du droit communautaire général ou du droit international public.
Enseignée au semestre III de l’Harmattan cette discipline prépare les
apprenants à l’acquisition des connaissances fondamentales qui leur seront
indispensables dans leur parcours universitaire (Licence, Master ou Doctorat)
Modalités d’évaluation : Tous les types d’évaluation connus sont envisageables
(dissertation, trois (3) ou quatre (4) questions-réponses, QCM
Organisation de l’enseignement : cf Tableau ci-dessous

Objectifs Séance N° Activités d’enseignement ou Formules techniques Matériels/ Support


d’apprentissage pédagogiques pédagogiques
Présentiel :
-présentation du syllabus
-présentation de la bibliographie
-analyse de l’intitulé du cours ‘’Droits
Comprendre le 1 communautaire ‘’ en précisant que seul Présentation orale -Ordinateur
titre du cours l’aspect institutionnel de ce cours sera -Support de cours.
concerné par la formation.
-commencer l’Etude de l’introduction.

Présentiel : Présentiel
-analyser les traités constitutifs des -Lecture et explication en
Connaître les 2 communautés : le cas de la CEE devenue salle des traités constitutifs -Ordinateur
sources écrites UE des communautés -Support de cours
du droit -Le contenu des traités -Les rapports entre ces
communautaire -Leur rapports avec les engagements inter traités et les engagements
nations conclus par les Etats membres. souscrits antérieurement ou
postérieurement par les
Etats membres.
QUELQUES REFENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1- Pierre-Henri TEITGEN : droit institutionnel communautaire, Bruylant, 1ère
édition, Paris, 2019 ;
2- GAUTRON Jean-Claude : Droit européen, 11ème édition, Paris, 2004 ;
3- MAURY Jean-Pierre : La construction européenne, la sécurité et la
défense, Paris, 1996 ;
4- QUERMONE Jean-Louis : Le système politique de l’Union européenne,
Montchrestien, Coll. Clefs, 6ème 2dition, Paris, 2005 ;
5- BOULOUIS ET CHEVALLIER : Les grands arrêts de la jurisprudence
communautaire, Dalloz, 2 vol, Paris ;
6- MASCLET Jean-Claude : Les grands arrêts du droit communautaire, PUF,
Que sais-je ? n° 3014 ;
7- RIDEAU Joël : Droit institutionnel de l’Union européenne et des
communautés européennes, LGDJ, 6ème édition, Paris, 2006.
PLAN DU COURS

Ière Partie : Les sources et la primauté du droit communautaire


Chapitre 1 : Les sources du droit communautaire
Section 1 : Les sources écrites
Sous –section 1 : Les traités constitutifs des communautés européennes
I- Le contenu des traités communautaires
II- Les rapports des traités communautaires avec les engagements
internationaux souscrits pour les Etats membres
A- Les traités conclus entre eux par des Etats membres
B- Les traités conclus par des Etats tiers

1-Les traités conclus avec les Etats tiers antérieurement aux traités
communautaires
2-Les accords conclus par les Etats membres avec des pays tiers postérieurement
aux traités communautaires.
III- La révision du traité communautaire
A- La solution de principe
B- Des procédures de révision simplifiées prévues par les traités communautaires
C- Des procédures purement communautaires permettant de compléter les
traités.

Sous-section 2 : Les actes unilatéraux de l’autorité communautaire


I- Les règlements communautaires
A- Définition du règlement

1-Le règlement a une portée générale


2-Le règlement est obligatoire en tous ses éléments
3-Le règlement est directement applicable dans tout Etat membre
B- La classification des règlements

1-Les règlements du conseil


2-Les règlements de commission
C-La nature juridique des règlements
1
D-Les conditions de forme auxquelles doivent être soumis les
règlements.

II- Les directives communautaires


A- Définition des directives communautaires

1-Caractère spécifique de la directive


a) Elle n’est pas de portée
b) Elle ne doit fixer à ses destinataires que le résultat à atteindre en leur laissant
le choix de la forme et des moyens.
c) Troisième caractère spécifique de la directive.

B- Classification des directives


1-Classification des directives selon l’autorité compétente
2-Classification des directives selon les communautés (CEE-CECA)
C- Les conditions de forme des directives (CEE-CECA)

III- Les décisions communautaires (CEE-CECA)

A-Définition des décisions communautaires


B-Classification des décisions communautaires
1- Classification des décisions selon l’autorité compétente pour les prendre
2- Classification des décisions suivant leurs destinataires
D- Conditions de forme des décisions

IV/ Les recommandations et avis communautaires (CEE)

Sous –section III : Les sources conventionnelles du droit


communautaire
I- Les traités qui, conclus par tous les Etats membres dans une organisation
internationale antérieurement au traité de fondation de la communauté,
lient cette communauté et ses institutions
II- Les accords que doivent conclure les Etats membres en application d’une
disposition expresse du traité et pour le compléter

2
III- Les accords dits ‘’décisions des représentants des gouvernements des Etats
membres réunis au sein du conseil’’
IV- Les conventions conclues par la communauté avec les Etats tiers

Section II : Les sources non écrites DU DROIT COMMUNAUTAIRE


Sous-section 1 : Les principes généraux de droit intégrés dans le droit
communautaire
I- Principes de droit international
II- Principes généraux de droit.
III- principes de droit dégages des droit internes des Etats membre

Sous-section2 : La jurisprudence de la cour des communautés


européennes
Chapitre 2 : La primauté de la règle communautaire sur la règle nationale
Section 1 : Conflit de la règle communautaire et de la règle
constitutionnelle interne
Sous-section1 : Le prétendu principes de la ‘’ congruence structurelle’’
I/ Les jurisprudences nationales allemande et italienne
A- Le cas de l’Italie
B- Le cas de l’Italie

II- La jurisprudence de la cour des communautés


Sous-section 2 : De l’atteinte portée par les actes communautaires aux
libertés et droit individuels garantis par constitutions nationales ou aux
principes généraux du droit
Section2 : Conflit entre la règle communautaire et la règle nationale légale
ou règlementaire
Sous-section 1 : Conflit entre une règle communautaire et une règle
nationale antérieure

Sous-section 2 : Conflit entre une règle communautaire et une règle


nationale postérieure

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I/ La solution affirmée par la jurisprudence de la cour des communautés
II/ Les jurisprudences nationales
IIe partie : Les institutions des communautés
Chapitre1 : L’autorité communautaire de direction et de décision : la
commission et le conseil
Section 1 : La commission
Sous-section 1 : La composition et l’organisation de la commission
I/ La composition de la commission
II/ L’organisation de la commission
Sous-section2 : Les attributions de la commission
I/ Les pouvoir propres de décision
II/ Les pouvoirs propres de contrôle et de sanction attribués à la commission
III/ Les pouvoirs d’initiative de la commission
IV/ Les pouvoirs de décision attribués à la commission par le conseil pour l’exécution
des délibérations du conseil
V/ Les pouvoirs d’administration et de gestion de la commission
VI/ Le rôle de la commission face au parlement européen

Section 2 : Le conseil
Sous-Section1 : La composition et l’organisation du conseil
I- La composition du conseil
II- L’organisation du conseil
Sous-section2 : Le conseil
Sous –Section2 : Les attributions du conseil
I- Le pouvoir de la décision
II- Le pouvoir de coordination des politiques économiques générales des états
membres
III- Les relations extérieures
IV- Le conseil : un cadre de concertation entre états membres
Sous-Section3 : La marginalisation progressive de la commission
CHAPITRE 2 : LE PARLEMENT EUROPEEN
Section1 : Composition actuelle et fonctionnement de parlement européen
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Sous-secton1 : La composition actuelle du parlement européen
I- Le système actuel : désignation des membres du parlement européen au
suffrage direct
II- Le système à l’avenir : élection des membres du parlement européen au
suffrage universel
Sous-section2 : Le fonctionnel actuel du parlement européen
Les procédures de contrôle
Section 2 : Les compétences du parlement européen
Sous- section1 : Le contrôle politique de la commission et du conseil
I- Les procédures de contrôle
II- La motion de censure

Sous-section2 : Les compétences consultatives du parlement européen.


I- Les consultations du parlement sur les projets de règlement, de décisions ou
de directives.
A- Les consultations obligatoires
B- Les consultations facultatives
II- Le contrôle du parlement européen sur les accords d’association conclus par la
CEE.
III- La participation du parlement européen à la prévision des traités
Sous-section3 : La compétence budgétaire du parlement européen.
Section3 : L’élection du parlement européen au suffrage universel.
CHAPITRE 3 : LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTES

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INTRODUCTION
Le droit communautaire est formé de l’ensemble des règles qui régissent la
structure, les compétences et l’activité des communautés Européennes.
Hiérarchisé et coordonnées dans un corps de droit systématisé, ces règles du
Droit communautaire constituent ce que l’on appelle l’ordre juridique
communautaire.
Le Droit communautaire se caractérise par trois traits essentiels :
- C’est un droit autonome,
- bien qu’autonome , le droit communautaire est largement
intégré dans l’ordre juridique interne des Etats membre de la
communauté ;
- intégrée dans l’ordre juridique interne des Etats membre , la
règle communautaire y prime la règle nationale contraire .

§ I - Le droit communautaire est un droit autonome.

L’ordre juridique communautaire est distinct de l’ordre juridique


international, d’une part, de l’ordre juridique interne des Etats membre,
d’autre part.

A- Il est distinct de l’ordre juridique international tant en raison de sa en


raison de sa finalité propre que de sa source.
1) Certes, le droit communautaire procède de traités
internationaux mais ces traités communautaires ont une finalité
propre qui commande leur application et leur développement.
Ils n’instituent pas , comme le fond la généralité des traités
internationaux, un ordre juridique de simple coordination
conventionnelle de souverainetés étatiques ; ils fondent une
communautés autonome investie d’une autorité institutionnelle propre
6
en vue de l’ établissement progressif d’un ordre de subordination des
Etats membres et des intérêt communautaire.
2) L’autonomie du droit communautaire au regard du droit
international résulte également de sa source.
S’il comporte pour partie des règle établies par les traités
communautaire eux-mêmes et donc par accord conventionnel des Etats
membres, il est aussi constitué, pour une large part, par la législation au
sens matériel du terme que doit, en exécution des traités et selon leurs
règles « constitutionnelles », établir, dans son autonomie
communautaire.
L’autonomie de l’ordre juridique communautaire, au regard de
l’ordre juridique international, résulte encore du fait que l’interprétation,
la systématisation et la hiérarchisation des normes de cet ordre
communautaire relèvent principalement de la compétence et de
l’appréciation d’une juridiction autonome : la Cour de Justice des
Communautés.
B- L’ordre juridique communautaire est distinct de l’ordre juridique interne des
Etats membres.
Certes, les règles de l’ordre juridique communautaire ont pour objet,
pour domaine matériel des activités, des opérations, des affaires économique
(libre établissement, libre concurrence, agriculture, etc .) , qui se déroulent sur
le territoire des Etats membres et relevaient antérieurement de leur
souveraineté et des règle de leur droit interne établies dans le seul intérêt
national.
Mais, aujourd’hui, dans la mesure même où ces affaire ont été
transférées par les traités communautaire de la compétence des Etats à celle
de la communauté, elles sont devenues l’objet d’un droit autonome mis en
œuvre ou élaboré, dans l’intérêt commun, par une Autorité distincte de

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l’Autorité Communautaire, sous le contrôle d’une juridiction autonome : la
Cour de Justice des Communautés .
§ II – Bien qu’autonome, le droit communautaire est un droit largement
intégré dans l’ordre juridique interne des pays membres.
L’ordre juridique interne des Etats est un ordre juridique complexe, il
n’est pas simplement composé des normes établies par le législateur national.
Il est également composé , dans les pays « monistes », des règles du droit
international puisque dans ces pays ces règles sont, en tant que telles,
applicables dans l’ordre interne par les juges nationaux. Mais aussi il est
composé dans tous les pays de normes émanant d’autres source que le
législateur :
- De normes établies, dans les limites de leur compétence, par les
collectivités territoriales et personnes de droit public décentralisées de
ces pays ;
- De normes établies, dans les limites de leur compétence, par les
institutions de droit deprivé habilitées à élaborer des règles de droit
pour les besoins de leur fonctionnement et de leur activité( statuts,
délibérations, décisions des sociétés, des syndicats , des associations,
etc .) ;
- De normes établies par voie de conventions collectives ou de
contrats individuels ( les contrats légalement faits « font la loi » des
parties).
Toutes ces normes subsidiaires sont intégrées dans le droit interne des
Etats pour constituer avec la loi, à leur place dans la hiérarchie interne
des règles juridiques, l’ordre juridique interne de l’Etat.
De même, une grande partie des normes communautaires, bien qu’elles
émanent d’une source autonome, sont, en tant que telles, intégrées dans
l’ordre juridique interne des Etats membres et y sont immédiatement
applicables par les juges nationaux.
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§ III- Intégrée dans l’ordre juridique interne des Etats membres, la règle
communautaire y prime la règle nationale contraire.
C’est du moins ce qu’affirme, dans le silence des traités
communautaires mais dans une interprétation de leurs dispositions conforme à
leur esprit et à leur finalité, la Cour de Justice des Communautés, en dépit des
résistances ( en voie de régression) de certaines juridictions nationales.
C’est en tête de la hiérarchie des règle de droit qui composent l’ordre juridique
interne des Etats membre que doit être situé la norme communautaire
intégrée dans cet ordre juridique.
Il est des domaines dans lesquels les traités communautaire eux-mêmes ,
parlant de l’essentiel ( autonomie du droit communautaire-intégration du droit
communautaire dans l’ordre juridique interne des Etats membres-primauté de
la règle communautaire sur la règle nationale contraire), nous étudierons
successivement :
▪ les sources du Droit communautaire.
▪ la primauté du droit communautaire sur le Droit national.

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CHAPITRE I : LES SOURCES DU DROIT COMMUNAUTAIRE

Pour l’étude des sources du Droit communautaire, nous distinguerons , selon


une méthode devenue désormais traditionnelle :
▪ Les sources écrites, dans une Section I
▪ Et les sources non écrites dans une section II

SECTION I : LES SOURCES ECRITES DU DROIT


COMMUNAUTAIRE
Ce sont :
▪ Les traités constitutifs des communautés ( Sous-Section I )
▪ Les actes unilatéraux de l’Autorité communautaire (Sous- Section
II)
- Les actes conventionnels conclus dans l’ordre juridique
communautaire par les Etats membres au sein de la communautaire ou
par la communauté avec des pays tiers ( Sous-Section III).

Sous-Section I : LES TRAITES CONSTITUTIFS DES


COMMUNAUTES EUROPEENNES

Ce sont en la forme des traités internationaux de type classique : ils ont été
conclus et ratifiés par les États membres, selon les procédures traditionnelles.
Que faut-il entendre plus précisément par les traités consécutifs de la
communauté économique Européennes ?
Pour la communauté Européenne du charbon et de l'acier, cette expression
vise non seulement le traité C.E.C.A. lui-même, mais aussi ses protocoles, ses
annexes et la convention relative aux dispositions transitoires jointe au traité,
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cet ensemble de textes ayant été signé le 18 Avril 1951 à Paris et étant entré
en vigueur le 23 Juillet 1952.
Pour la communauté Économique Européenne, elle a été instituée par le 1 er
Traité de Rome complété par des protocoles et annexes également signé le 25
mars et le 17 avril 1957 et entré en vigueur le 14 janvier 1958.
À quoi s'ajoutent :
- la convention « relative à certaines institutions communes », signée et
ratifiée en même temps que le traité de Rome, et entrée en vigueur à la
même date;
- le traité « instituant un conseil et une commission des communautés
Européennes » et ses annexes, signé à Bruxelles le 8 Avril 1965 et entré en
vigueur le 1er juillet 1967;
- le traité « portant modification de certaines dispositions budgétaire des
traités instituant les communautés Européennes et du traité instituant un
conseil et une commission de la communauté Européenne », signé à
Luxembourg le 22 Avril 1970.
- Le traité de Bruxelles du 22 janvier 1972, relatif à l'adhésion à la
communauté Européenne de la Grande-Bretagne, de l'Irlande et du
Danemark.
Cet ensemble important de textes constitue ce que l'on a coutume d'appeler le
Droit communautaire originaire par opposition au Droit communautaire dérivé,
ce dernier étant constitué par les règles établies, en application des Traités,
soit, plus rarement, par accord des États membres.

§ 1.- Le contenu des traités


Ils contiennent :
- Des dispositions fondamentales qui déterminent les objectifs assignés à la
communauté qu'ils organisent.

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- Des principes très généraux qui commandent l'application du traité :
principes de « coopération », principe de « non-discrimination » ( art. 5 et
7du traité C.E.E.) .
- Des dispositions qu'on peut appeler de Droit institutionnel ou même
constitutionnel communautaire, la détermination de leurs compétences et de
leurs rapports.
- Des dispositions de droit financier communautaire : celle qui régissent les
ressources et les dépenses des communautés ainsi que les règles
d'établissement et exécution de leurs budgets.
- Des règles de droit administratif communautaire : ce sont celles qui
concernent, par exemple, les relations de la communauté Européenne avec
leur personnel, les contrats et la responsabilité administrative.
- Des dispositions constituant (pour une part, car une « législation » émanant
de l'autorité communautaire) le droit économique, commercial et social des
communautés : ce sont les celles qui règlent l'activité opérationnelle de ladite
communauté, les modalités de fonctionnement de l'Union économique.
Mais ici, une observation très important doit être faite.
Le traité C.E.C.A., et dans une certaine mesure le traité Euratom, peuvent être
considérés comme des traités-lois : en effet, le Traité C.E.C.A., tout
spécialement, détermine lui-même, pour l'essentiel, les règles selon laquelle
devra fonctionner le Marché commun du Charbon et de l’Acier. C'est le
« code » de ce Marché Commun.
Il en va tout autrement du Traité C.E.E. : il constitue ce que l'on a coutume un
traite-cadre, sinon dans sa partie consacrée à l'établissement de l'Union
douanière, du moins dans celle qui concerne l'établissement de l'Union
économique générale. Traité-cadre? Que faut-il entendre par cette expression
? Cela signifie que le Traité s'en tient, pour le domaine dont il s'agit, à fixer les
objectifs généraux que devra atteindre la communauté et, ces objectifs une

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fois fixés, à déterminer les compétences et les pouvoirs attribués aux
institutions communautaires pour les atteindre.

II - les rapports des Traités communautaire avec les


engagements internationaux souscrits par les Etats membres d'autre
part.
Le problème relève des règles du Droit international public général relatives au
conflit de Traités. Afin d'être précis, il faut distinguer deux cas particuliers.
- les traités conclus entre eux par des États membres.
- les traités conclus par des États membres avec les pays tiers.

A- Les traités conclus entre eux même par des États membres.
La règle est très simple : ces Traités demeurent valables dans la mesure où ils
sont compatibles avec les Traités communautaire. C'est ainsi que l'article 233
du Traité C.E.E. déclaré :
« Les dispositions du présent Traité ne font pas obstacle à l'existence et à
l'accomplissement des unions régionales entre la Belgique, le Luxembourg et
les Pays-Bas, dans la mesure où les objectifs de ces unions régionales ne sont
pas atteints en application du présent Traité ».
Par contre, les Conventions qui ont été conclues antérieurement aux Traités
instituant les Communautés Européennes par des États membres entre eux,
cessent d'être applicables s'ils sont contraires aux dispositions des Traités
communautaires. La ratification de ces derniers Traités par les États membres
en cause vaut abrogation implicite de leurs accords antérieurs contraires.
En application de ce principe, l'article 87 , 219 du Traité C.E.E. obligent les
États membres à ne pas se prévaloir de traités ou conventions existant entre
eux pour soumettre un différend relatif à l'interprétation ou à l'application des
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Traités communautaire à un mode de règlement autre que ceux prévus dans
ces Traités.
C'est la Cour de Justice qui est seule compétente pour juger des litiges
survenus entre les États membres en cette matière. Ainsi toute convention qui
aurait prévu des procédures particulières pour régler les différends entre
certains États membres serait ispo facto inapplicable dans les domaines
réservés à la compétence communautaire.

B- Traités conclus par des États membres avec des pays tiers.
Il faut distinguer suivant la date de conclusion de ces accords.
1- Traités conclus avec les États tiers antérieurement aux Traités
communautaire. En application du Droit international public les États membres
doivent exécuter les obligations que leur imposent ces Traités, même si
certaines de leurs clauses de leurs sont contraires à celles des traités
communautaires. Voyez en ce sens l'article 284 du Traité C.E.E.
Ainsi l'article 234 C.E.E. déclare :
<< Les droits et obligations résultant de conventions conclues antérieurement
à l'entrée en vigueur du présent Traité, entre ou plusieurs États membres
d'une part et un ou plusieurs États tiers d'autre part, ne sont pas affectés par
les dispositions du présent Traité>>.
C'est en application de ce principe qu'un important arrêt de la Cour des
Communautés du 12 décembre 1972(aff.21 à 24/72, Rec. 1972,p. 1219)
affirme que la Commission et le conseil des Communautés doivent dans leurs
décisions respecter les prescriptions des accords du GATT parce que, liant tous
les États membres, elles lient la communauté.
Toutefois, cela dit, et conformément encore au Droit international public, les
États membres ne peuvent pas opposer à la communauté, pour se soustraire à
la leurs obligations communautaires, des Droits qui leur ont été reconnus par
des États tiers dans des Traités antérieurs. En signant les traités
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communautaires, ils ont ipso facto renoncé à ces droits, contraires à leurs
nouveaux engagements. Ainsi, si les États membres ne peuvent se prévaloir à
l'encontre des Communautés de droits qu'ils tireraient de ces mêmes
conventions. (Voir en ce sens l'Arrêt de la Cour de Justice du 27 février 1962,
aff. 10/61, Rec. Vol. VIII, p.22).
Cependant, après avoir consacré la validité des traités antérieurs, les
traités communautaires ajoutent que les États membres doivent s’efforcer de
se délier de leurs engagements antérieurs contraires aux règles
communautaires par négociations appropriées et au besoin avec l’aide de la
communauté et des autres États membres.
Ainsi l’article 234, al. 2, du Traité C.E.E dispose :
« Dans la mesure où ces conventions ne sont pas compatibles avec le présent
Traité, le ou les États membres en cause recourent à tous les moyens
appropriés pour éliminer les incompatibilités constatées. En cas de besoin, les
États membres se prêtent une assistance mutuelle en vue d’arriver à cette fin,
et adoptent le cas échéant une attitude commune ».

2) Accords conclus par les Etats membres avec des pays tiers postérieurement
aux traités communautaires.
En application du Droit international public, les États membres ne peuvent
valablement souscrire, dans les pareils accords, des obligations contraires à
leurs obligations communautaires. Ces traités, s’ils étaient cependant signés,
seraient inopposables à la communauté.
Pour éviter de tels errements, les traités européens ont prévu un certain
nombre de dispositions.
La formule de l’article 103 du Traité C.E.E.A. est particulièrement nette à cet
égard. Aux termes de cet article :

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Les États membres sont tenus de communiquer à la commission leurs projets
d’accord ou de conventions intéressent le domaine d’application du présent
Traité.
Si la Communauté estime qu’il y a incompatibilité entre le contenu d’une
convention qu’un État membre s’apprête à signer avec un État tiers et les
obligations qui découlent pour cet État des Traités communautaires, elle fait
connaître à l'État en cause ses observations ; il ne peut dès lors signer cet
accord avoir levé les objections de la Communauté, ou avoir obtenu de la Cour
de Justice qu’elle reconnaisse sa comptabilité avec les dispositions
communautaires.
C’est en application de ces dispositions que le Conseil, sur proposition de la
Commission, a pris, au départ, des mesures pour réserver les chances de la
politique commerciale commune prévu à l’article 113 du Traité C.E.E.
Aux termes de cet article, les Etats membres de la communauté perdaient, à
l’expiration de la période transitoire (1er Janvier 1970), compétence pour
conclure avec des pays tiers des accords commerciaux bilatéraux.
Dès lors, il fallait craindre qu’avant l’expiration de la période transitoire nos
États se hâtent de signer des accords de longue durée qu’ils proposeraient
ensuite à la Communauté. Pour éviter cette manœuvre, le Conseil a pris deux
décisions, l’une du 20 juillet 1960, l’autre du 9 octobre 1961.

III.- LA REVISION DES TRAITES COMMUNAUTAIRES


A- La solution de principe
C’est celle qu’encore, l’article 203 du l’article 236 déclare ( les dispositions
des autres Traités étant analogues) :
« Le gouvernement de tout État membre ou la commission peut soumettre
au Conseil des projets tendant à la révision du présent Traité.
« Si le Conseil, après avoir consulté l’Assemblée et le cas échéant la
Commission, émet un avis favorable à la réunion d'une conférence des
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représentants des gouvernements des États membres, celle-ci est
convoquée par le Président du Conseil en vue d’arrêter d’un Commun
accord les modifications à apporter au présent Traité.
« Les amendements entreront en vigueur après avoir été ratifiés par tous
les États membres en conformité de de leurs règles constitutionnelles
respectives. »
Il ne s’agit pas ici de la procédure classique au Droit international public. Il
s’agit d’une procédure qui associe la Communauté à la révision des Traités à la
manière plutôt de la révision des Chartes fédérales.
Ces principes posés, il faut se demander si la procédure prévue par les Traités
est obligatoire ou si nos États restent en droit de réviser ces Traités selon la
méthode diplomatique traditionnelle, celle de l’acte contraire. La question doit
être envisagée sous un double aspect.
Elle se pose tout d’abord sur un plan théorique de philosophie du Droit.
Faut-il considérer les Communautés comme des « choses » dont les États
membres peuvent à l’unanimité disposer librement et dont ils peuvent modifier
le statut selon leur plaisir ? Ou bien nos communautés sont elles des «
personnes » de droit international dont il convient de respecter la «
personnalité » en les associant à la révision de leur statut ?
On incline à penser que la nature institutionnelle des communautés implique la
seconde solution. Toutefois force est de reconnaître qu’aucune règle du droit
positif ne l’impose en termes indiscutables.
Au niveau, en effet, de la technique des États membres peuvent Soutenir
qu’étant les auteurs du Traité, ils peuvent le réviser selon la règle de l’acte
contraire, et notamment réviser les articles visant les procédures de révision.
En pratique que s’est il passé ? Les États membres ont modifié, par le Traité
du 27 octobre 1956, le Traité C.E.C.A., non pas selon les dispositions prévues
à articles 96 du Traité, mais par la méthode de l'acte contraire. Il ne s’agissait

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pas en l’espèce d’une modification d’importance, et tous les États membres
étaient d’accord.
Tout le monde était d’accord sur le fond, mais la procédure utilisée, celle de
l’acte contraire, a soulevé de très vives protestations, non seulement dans la
doctrine, mais au sein du parlement européen.
Ces critiques ont peut être été entendues, car lorsqu’il s’est agi d'instituer un
Conseil et une Commission unique des communautés, les procédures prévues
aux Traités Communautaires ont été respectées : en effet, le Traité du 8 avril
1965 a été négocié avec une participation active des autorités
communautaires. Il a été de même pour le Traité de Luxembourg du 22 avril
1970.

B- Des procédures de révision simplifiées ont été prévues par


les Traités.
Elle ne font plus appel qu’aux organes communautaires.
1 - Telle est la solution établie pour la C.E.C.A. dans l’article 95, $2 de son
Traité. C’est ce que l’on appelle la petite révision C.E.C.A..
Aux termes de cet article, si à l’expiration de la période transitoire, des
difficultés imprévues ou un changement profond de conditions économiques
ou techniques apparaissent dans le domaine du charbon et de l’Acier, la Haute
Autorité peut adapter le Traité à la situation nouvelle si elle obtient l’accord du
Conseil statuant à la majorité des 5/6 de ses membres, l’avis favorable de la
Cour de Justice et l’approbation de l’Assemblée statuant à la majorité des ¾
des voix exprimées et des 2/3 des membres qui la composent.
Cette petite révision ne peut pas toutefois porter sur les règles fondamentales
qui sont inscrites en tête du Traité ( les articles2,3,4 ), non plus que modifier
les rapports respectifs des Institutions de la communauté. Par deux fois la
Haute Autorité a utilisé cette procédure : D’abord pour élargir le domaine
d’application de l’article 56 du Traité C.E.C.A. ( Avis de la Cour n°1/60 du 4
18
février 1960, Rec. Vol. VI, p. 97. Voir cet avis). Et puis la Haute Autorité a
tenté d’user de cette procédure une seconde fois lorsqu’elle a voulu modifier
l’article 65 du Traité. Mais la Cour cette fois n’a pas donné un avis favorable. (
Avis de la Cour du 13 décembre 1961,n° 1/61, Rec. Vol. VII, p. 506, Voir cet
avis ).
2- Aux termes des trois traités, certains de leurs articles ou même de leurs
chapitres peuvent être révisés par les seuls organes de la communauté.
Voyez, par exemple, l’article 81 du Traité C.E.C.A., les articles 14 et 33 du
Traité C.E.E., les articles 76, 85 , 90, 197 et 215 du Traité C.E.E.A.

C- Des procédures purement communautaires permettent de


compléter les traités.
Ces procédures sont instituées par l’article du Traité C.E.E.(1)
Je vous rappelle les termes de l’article 235 du Traité C.E.E. :
« Si une action de la communauté apparaît nécessaire pour réaliser, dans le
fonctionnement du Marché commun l’un des objets de la communauté, sans
que le présent traité ait prévu les pouvoirs d’action requis à cet effet, le
Conseil, statuant à l’unanimité, sur proposition de la Commission et après
consultation de l’Assemblée, prend les dispositions appropriées ».
Mais compléter un Traité, n’est-ce pas d’une certaine manière le réviser ? Ces
dispositions appellent une observation préalable.
Ils excluent, semble-t-il, l’appel en droit communautaire à la théorie du Droit
international dite des pouvoirs implicites des organisations internationales.
Selon cette théorie, consacrée par la Jurisprudence de la Cour internationale
s’étendent de plein droit à tous les actes indispensables à l’exercice de leurs
fonctions. En raison des textes que nous examinons, il n’en est pas de même
de nos communautés ; elles ne peuvent prétendre posséder de plein droit
dans le silence des textes – en vertu de la théorie des pouvoirs implicites –
tous les pouvoirs indispensables à l’accomplissement de leur mission puisque
19
nos articles prévoient cette hypothèse et imposent pour elle la procédure qu’ils
instituent. En cas de besoin, c’est à cette procédure - et non à la théorie vers
pouvoirs implicites – que doit recouvrir l’Autorité communautaire.
Cette solution a été consacrée par la Cour de Justice des communautés
européennes, notamment dans deux arrêts du 15 juillet 1960 (affaires jointes,
20 et 25/59, Rec. Vol. p.690).
Ces précisions données, il convient encore de noter que le Conseil et les États
membres hésitent à faire usage des procédures instituées par l’article 235 du
Traité de Rome et par les textes analogues des deux autres Traités
Communautaires.
C’est qu’en effet, maniés sans prudence, ces textes permettraient en réalité
d’entendre très largement les compétences des communautés, puisqu’ils
permettent au Conseil de d’attribuer tous les pouvoirs d’action qui lui
paraissent nécessaires pour atteindre l’un des « objets » de la communauté et
que ce terme « objet » pourrait être interprété très largement sur la base de
l’article 2 du Traité C.E.E.. Il s’agirait donc, dans la réalité des choses, d’une
révision des Traités à laquelle les États membres ne participeraient que très
indirectement, puisque la décision doit être prise par le Conseil dans le cadre
d’une procédure Communautaires, et non par la Conférence
intergouvernementale qui réunirait les représentants des États membres.
Vous me direz que la différence entre ces deux procédures est purement
formelle et de peu d’intérêt pratique, puisque, dans les deux cas, l’unanimité
est requise pour la prise de décision. Cette opinion n’est pas exacte. En effet
dans la procédure de l’article 235 du Traité C.E.E., il s’agit d’une décision du
Conseil qui est un acte communautaire non soumis à la ratification des États
membres et insusceptible de réserves (cf. Arrêt de la Cour des Communautés,
18 fév. 1970. Aff. 36/69, Rec. Vol. XVI, p. 47). Par contre, lorsque la révision
s’opère par la voie d’une conférence intergouvernementale, la procédure
aboutit à un accord sujet à ratifications internationales.
20
On comprend dès lors les hésitations des États membre du Conseil à l’égard
de la procédure de l’article 235 du Traité C.E.E.
C’est, par exemple, sur la base de cet article que le Conseil a adopté, le 3 avril
1973, le règlement instituant le fonds européen de soutien monétaire, le 18
mars 1975 le fonds européen de développement régional, le 3 mars 1975 la
décision portant conclusion de la pour la pollution maritime (3).

Sous – Section II : LES ACTES UNILATÉRAUX DE L’AUTORITÉ


COMMUNAUTAIRE
L’article 189 du Traité C.E.E. déclare :
« Pour accomplissement de leur mission et dans les conditions prévues au
présent Traité, le Conseil et la Commission arrêtent des règlements et des
directives, prennent des décisions et formulent des recommandations ou des
avis.
Le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments
et il est directement applicable dans tout État membre.
La directive liée tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre,
tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et
aux moyens.
La décision est obligatoire en tous ses éléments pour les destinataires qu’elle
désigne.
Les recommandations et les avis ne lié pas ».
Il nous faudra d’abord étudier les actes prévus par ces dispositions (1 à 4)
Cependant, les actes unilatéraux de l’Autorité communautaire ( Commission-
Conseil ) que définissent ces articles ne sont pas les seuls qu’elle puisse
utiliser. D’autres formes d’actes sont aussi en usage dans les Communautés,
comme les règlements intérieurs des institutions communautaires par
exemple.

21
Les actes de l’Autorité communautaire (Commission-Conseil) constituent du
Droit communautaire dit « dérivé » parce que, pris dans l’exercice des
compétences instituées par les Traités et pour assurer l’application de leurs
dispositions, ils dérivent des Traités, source « originaire » du Droit
communautaire.
L’une des questions capitales que pose la distinction faite par nos Traités :
- Du règlement,
- De la directive,
- De la décision,
est celle de savoir quelle est la période portée juridique respective, dans le
droit interne des pays membres, de ces actes.
C’est pratiquement la question de savoir quels sont ceux d’entre eux qui
engendrent directement, dans l’ordre juridique interne des États membres,
des droits individuels au bénéfice des personnes privées, droits individuels
que les tribunaux nationaux de ces États membres sont tenus de
sauvegarder et de sanctionner.
Selon les termes mêmes de l’article189 du Traité C.E.E., on affirmait que le
règlement dont cet article nous dit qu’il est « directement applicable dans
tout État membre » est, de ce fait, susceptible d’engendrer par lui même,
directement, dans l’ordre national interne des droits individuels au bénéfice
des personnes privées.
S’agissant des directives et des décisions adressées aux Etats membres par
l’Autorité Communautaire, on affirmait au contraire que ces actes, dont
l’objet est de prescrire aux Etats destinataires d’établir telles ou telles
règles dans leur droit national, sont insusceptibles d’engendrer par eux-
mêmes, directement, dans l’ordre juridique interne des droits individuels au
bénéfice des ressortissants des États en cause.
L’article 189, disait-on, se garde d’attacher pareille portée juridique aux
directives et décisions adressées aux États.
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Ce ne sont pas les directives ou décisions communautaires adressées aux
États qui peuvent, par elles-mêmes, puisqu’elles ne « sautent » pas
l’échelon étatique, modifier les situations juridiques dans l’ordre interne.
Les situations juridiques individuelles ne seront modifiées dans l’ordre
interne que par la règle qu’en exécution de la directive ou de la décision
d’État ou les États destinataires introduiront dans leur Droit.
Dès lors, concluait on, ce n’est qu’après l’intervention de la règle nationale
prise par l’État pour rassurer l’exécution, dans son ordre interne, de la
directive ou de la décision qui lui a été adressée que ses ressortissants
peuvent se prévaloir devant leurs juges nationaux d’un droit personnel,
qu’ils tiennent alors, non pas directement de la directive ou de la décision
communautaire en cause, mais de la règle nationale établie dans leur Droit
en exécution de cette directive ou de cette décision.
L’arrêt rendu par la Cour des Communautés le 6 octobre 1970 ( aff. 9/70,
Rec. Vol. XVI, p.825) paraît avoir modifié profondément cette doctrine. Il me
faudra donc, après avoir exposé les dispositions expresses de l’article 189 du
Traité C.E.E., vous présenter l’interprétation audacieuse qu’en fournit
aujourd’hui la Cour des Communautés.

I. - LES RÈGLEMENTS COMMUNAUTAIRES


Nous examinerons successivement :
- Définition du règlement.
- Classification des règlements.
- Nature juridique du règlement.
- Conditions de forme auxquelles sont soumis les règlements
communautaires.

A- Définition du règlement
Vous vous reporterez à l’article 189 du Traité C.E.E. et vous lisez :
23
« Le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses
éléments et il est directement applicable dans tout État membre ».
Les trois caractères principaux du règlement apparaissent à la lecture de cette
disposition :
1- Le règlement a une portée générale.
C’est, en effet, l'acte qui, comme la loi du Droit interne, fixe une règle,
impose une obligation ou accorde des droits à tous ceux qui sont
actuellement situés où se situeront dans l’avenir dans la catégorie qu’il
définit abstraitement selon des critères objectifs. On dirait, en langue
vulgaire, que le règlement, sans viser qui que ce soit individuellement,
oblige « à la cantonade » tous ceux qui se livreront aux activités ou aux
opérations qu’il définit.
Ainsi le règlement du Conseil n° 177/66 C.E.E. du 28 juillet 1968
établissant des règles communes pour les transports internationaux de
voyageurs par autocars formule des règles auxquelles sont ou seront
soumis tous ceux qui effectueront des transports des voyageurs par
autocars d’un pays membre à des destinations situées dans d’autres pays
membres.
C’est par ce premier caractère que le règlement se distingue de la décision
qui, elle, n’oblige que des destinataires limités et désignés.
C’est ce que confirme une importante jurisprudence de la Cour des
Communautés qui caractérise en les opposants le règlement et la décision.
Les arrêts du 14 décembre 1962 (affaires jointes 16 et 17/62, et affaires
jointes 29 à 22/62. Rec. VIII, p. 918) affirment :
« Les traits essentiels de la décision résultent de la limitation des
destinataires auxquels elle s’adresse, alors que le règlement de caractère
essentiellement normatif est applicable non à des destinataires limités,
désignés ou identifiables, mais à des catégories envisagées abstraitement
et dans l’ensemble, que portant dans les cas douteux pour déterminer si
24
on ne trouve en présence d’une décision ou d’un règlement, il faut
chercher si l’acte en question concerne individuellement des sujets
déterminés ».

2- Le règlement est « obligatoire dans tous ses éléments ».


C’est par ce second caractère que le règlement se distingue de la directive qui
ne peut imposer qu’un résultat à atteindre et non pas les moyens de
l’atteindre. Le règlement, lui, peut imposer toutes les modalités d’application
et d’exécution jugées nécessaires ou utiles.
Le règlement est obligatoire en tous ses éléments en ce sens que dès son
entrée en vigueur la totalité de ses dispositions s’imposent aux États
membres, à leurs juridictions et à leurs ressortissants.
Précisons :
a- Le caractère obligatoire du règlement ne saurait être modifié par des
réserves ou objections que des États membres auraient formulées lors de
son élaboration ; elles seraient insusceptibles de limiter sa portée
objective.
b- Si le règlement est complet en ce sens qu’il prévoit lui-même toutes les
modalités nécessaires à son application, les autorités nationales ne
peuvent rien y ajouter et moins encore dispenser de son application au
nom prétendu cde l’équité.
c- Si le règlement est incomplet ceci qu’il omet de préciser certaines des
modalités de son application, les Etats membres peuvent édicter dans leur
droit les dispositions complémentaires nécessaires (arrêt du 17 décembre
1970, aff. 30/70, Rec. 1970, p. 1197). Et même, ils le doivent en
application de l’article 5 du Traité C.E.E. (arrêt du 4 avril 1974, aff. 167,
Commission c/ République française, Rec. 1974, p. 359). Mais en toute
hypothèse ces mesures complémentaires ne peuvent ni déroger au

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règlement, nu soumettre les droits qu’il confère à des exigences
supplémentaires.
d- Il en est ainsi, que les mesures nationales à édicter pour rassurer la bonne
exécution d’un règlement communautaire relèvent, selon n le droit public
interne, du pouvoir central, des autorités fédérées d’un pays membre d’un
État fédéral ( Landiers de la R.F.A. ), d’autres entités territoriales ou bien
d’autorités que le droit national leur assimile.
e- Si certaines des dispositions du règlement leur paraissent obscures, les
États membres peuvent en fournir, elles ne peuvent le faire que dans le
respect des dispositions communautaires et sans pouvoir édicter des règles
d’interprétation ayant des effets obligatoires.

3- Le règlement est directement applicable dans tout État membre.


Ce caractère est d’une importance primordiale.
Publié au journal officiel des Communautés, le règlement entre en vigueur
à la date qu’il fixe, s’insère directement dans l’ordonnancement juridique
interne des États membres et y rend inapplicables les dispositions
nationales qui lui sont contraires.
Il bénéficie de ce que l’on appelle « l’immédiateté fédérale ».
Dès lors, le règlement communautaire, non seulement n'a pas besoin
d’être repris, pour « réception » dans l’ordre interne, par un texte national,
mais il ne doit pas l’être. La Cour condamné pareille pratique comme
manquement aux obligations du Traité (arrêt du 7 février 1973, aff. 39/72.
Commission c/ Italie, Rec. 2973, p. 201, arrêt du 10 octobre 1973, aff.
34/83 Rec. 1973, p. 981). Elle aboutirait en effet à « nationaliser » le
règlement communautaire, à le dénaturer avec cette conséquence que ce
serait les juridictions nationales qui au lieu de la Cour des Communautés,
deviendraient compétentes pour apprécier sa validité et interpréter
souverainement.
26
Ce principe est d’une importance capitale.
Jamais, jusqu’à l’institution de nos communautés, une organisation
internationale n’avait disposé d'un instrument normatif pourvu de cette
immédiateté dans l’ordre interne des États.
Mais aussi, en raison de son applicabilité directe dans l’ordre juridique
interne des États membres, le règlement communautaire engendre par lui-
même des droits des personnels dans cet ordre interne au bénéfice des
ressortissants de ces États droits que ces ressortissants peuvent invoquer
devant leur juge national et que celui-ci est tenu de sanctionner. (Voir
arrêt de la Cour des Communautés du 10 octobre 1973, aff. 34/73, Rec.
1973, p. 981).

B- Classification des règlements.


- Les règlements du Conseil.
- Les règlements de la Commission.

1- Les règlements du Conseil.


Dans la C.E.E., c’est en principe le Conseil qui possède le pouvoir
réglementaire, mais très généralement « sur proposition de la Commission » à
laquelle appartient le pouvoir d'initiative, pouvoir dont nous exposerons par la
suite l'importance. Cependant, il est exceptionnellement des règlements que le
Conseil peut prendre de sa seule initiative (ex.: le règlement fixant le régime
linguistique de la Communauté ; art. 217 du Traité).
Deux catégories de règlements du Conseil doivent être distinguées :
a- Ses règlements généralement dits « de base ».
Ce sont ceux qu'il prend en application directe d'une disposition du Traité pour
en assurer l'application.
b- les règlements qu'il prend en vertu de ses règlements « de base » pour
fixer certaines de leurs modalités d'exécution lorsqu'il n'a pas à juger opportun

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de les introduire dans le règlement « base » lui-même ou de déléguer à la
Commission (comme nous allons le voir ) le pouvoir d'établir ces règlements
dits « d'exécution ». Selon la jurisprudence de la Cour, cette distinction
conduit à deux règles importantes :

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