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CHAPITRE III

DIAGRAMME E-pH DE POURBAIX

Certaines équilibres chimiques ou


électrochimiques font intervenir les ions
constitutifs du solvant (H+ et OH- pour le cas de
l’eau). Le potentiel d’électrode dépendra alors de
l’activité de ces ions.
Exemple :

Pt/ MnO4- / Mn2+ les réactions nécessitent les ions


H+ :

MnO4- + 8H+ + 5e- <=====> Mn2+ + 4H2O

E = Eo + (RT/5F) ln (aMnO4-.a8H+ / a Mn2+)

= (E0 - 0,06x8/5pH) + (RT/5F) Log (aMnO4- / a Mn2+)


= Eapp + (RT/5F) Log(aMnO4- / a Mn2+)

avec Eapp : potentiel apparent dépendant du pH

On peut donc en fixant les


concentrations des ions du manganèse
obtenir une relation Eapp = f (pH) dont le tracé
indique les zones de prédominance des
espèces MnO4- et Mn2+.
I- Détermination générale de diagramme E-pH

Soit une réaction électrochimique mettant en


jeu ne- et q protons on peut écrire alors :

A + qH+ + ne- <=====> B + pH2O

Le potentiel d’électrode est déterminé par la loi


de Nernst :
E = E° + (RT/nF) ln (aA.(aH+)q/aB)

Soit à 25 oC :

E = (E°- 0,06q/n) pH + 0,06/n Log (aA/a B)

= Eapp + 0,06/n Log (aA/aB)


Où l’on voit que Eapp est une fonction de pH si
aA et aB sont constantes. Cette relation est
une droite de pente (- 0,06 q/n) et qui partage
le plan E = pH en deux zones où chacun des
éléments A ou B est majoritaire.

Par ailleurs si l’on considère tous les composés


d’un même réactifs A ou B susceptible de se
produire soit par oxydation ou réduction dans le
solvant, ce qui se traduira par des réactions
chimiques (précipitation, complexation…)
On peut donc prévoir l’ensemble de
comportement électrochimique du A ou B dans
l’eau. Ce qui montre l’intérêt de tel diagramme
introduit par POURBAIX en 1946.
1) Étude et lecture du tracé E-pH

- Pour le point H (pH1, EH), situé sur la droite E(pH),


on a : aA= aB et EH = (E° - 0,06q/n) pH1
- Pour le point F(pH1,EF), situé au dessus de la droite
E(pH), on a :

EF = (E° - 0,06q/n) pH1 + (RT/nF) ln(aA/aB )

EF > EH c-à-d le terme (RT/nF) ln(aA/aB ) > 0

===> aA >> aB

Il est situé donc dans la zone de prédominance de A


- Pour le point G(pH1,EG), situé au dessous de la
droite E(pH), on a :
EG < EH et le terme (RT/nF) ln (aA/aB) < 0

===> aB >> aA

Il est situé donc dans la zone de prédominance


de B.
Remarque :

Si aucun proton n’est mis en jeu (q = 0), E est une


constante indépendante du pH et se caractérise
par une droite horizontale.
II- Exemples du tracé de diagramme E-pH :

1) Domaine de stabilité thermodynamique de l’eau :

Le solvant eau possède des propriétés oxydo-


réductrice. Il s’oxyde quand il perd des électrons
avec dégagement d’O2 et se réduit quand il en
capte avec cette fois dégagement d’H2. Le
diagramme E-pH rend compte de ces propriétés.
- L’eau est un oxydant :
(+e- et dégagement de H2 : l’eau donc est réduite)

En milieu acide :

2H+ + 2 e- <===> H2 ; E°H+/H2 = 0

E1= (E°1+ (RT/2F) ln(aH+2/PH2)


En milieu basique :

2H2O + 2 e- <===> H2 + 2HO- ; E°H2O/H2 = -0,83 V

E2= (E°2 + (RT/2F) ln(a H2O /PH2.aOH- 2)

Soit en tenant compte de la dissociation de l’eau


Ke= a H+. aOH- = 10-14 on aura :

E = - 0,06 pH
- L’eau est un réducteur :
(-e- et dégagement de O2 : l’eau donc est oxydée)

En milieu acide :

2H2O <===> O2 + 4H+ + 4 e- E°O2/H2O = 1,23 V

E3= (E°3 + (RT/4F) ln(PO2 . a4H+ / aH2O)


En milieu basique :

4OH- <===> O2 + 2H2O + 4 e- E°O2-/H2O = 0,4 V

E4= (E°4 + (RT/4F) ln(a H2O .PO2./a4OH-)

A l’état standard on aura dans les deux milieux :

E = 1,23 - 0,06 pH
et le tracé E(pH) a la forme suivante :
2) Étude des propriétés oxydantes et réductrices de l’eau :

Ces propriétés sont valables à n’importe quel


pH, mais on les étudiera aux pH = 0 et pH = 14

* Pouvoir oxydant de l’eau (droite D1) :

A pH = 0, tous les éléments (métaux) dont E0 <


EoH+/H2 peuvent réduire l’eau avec dégagement de
l’hydrogène selon la réaction :

M + H+ <===> H2 + Mz
À pH = 14, seuls les éléments dont E0 < EoH2O/H2
réagiront avec l’eau. L’eau est donc plus
oxydante en milieu acide.

* Pouvoir réducteur de l’eau (droite D2) :

Il est clair qu’en milieu basique pH = 14 l’eau


est plus réductrice qu’en milieu acide pH = 0
car elle réagira dès les potentiels E0 ≥ E0OH-/O2
alors que seuls les éléments dont E0 ≥ E0H2O/O2
oxyderont l’eau.

Exemple : F2 / F- : E0 = 2,9 V
Remarques :

1- Si le potentiel d’un couple redox ne dépend


pas de pH (cas d’une électrode de première espèce
Mz/M), la droite E(pH) est une horizontale et le
pouvoir oxydoréducteur de l’eau vis à vis de ce
métal dépendra de la valeur de la constante E = cte
2- Les deux droites E(pH) D1 et D2 délimitant la
zone de stabilité thermodynamique de l’eau se
situent à environ ± 0,5V des frontières théoriques à
cause des vitesses très lentes de certains éléments
à réagir avec l’eau.

Exemple :

MnO4-/Mn2+ dont E° = 1,49 > 1,23 = E°H2O/O2 devrait


réagir avec l’eau mais la réaction étant lente ce
couple existe dans l’eau.
3) Tracé du diagramme E(pH) pour un métal dans
l’eau :

Domines de stabilité, immunité et corrosion


d’un métal :

Soit à tracer le diagramme E(pH) du Mg-H2O


à 25 oC pour les conditions suivantes :
C = 1M, ksMg(OH)2 = 10-11 et E°Mg(OH)2/Mg = - 2,38 V
Détermination des domaines de prédominance des
espèces

On a ksMgOH2 = 10-11 = a Mg+. a2OH- et Ke = a H+. aOH- = 10-14


===> a2H+ = 10-17 ===> aH+ = 10-8,5
===> pH = 8,5.
On représente sur l’axe des (pH) les espèces rencontrées :
Equations des droites et écriture des réactions
redox

- pour pH ≤ 8,5 on a le couple : Mg2+ / Mg


La réaction est : Mg2+ + 2 e- <===> Mg
La loi de Nernst donne le potentiel :
E1= E1° + (0,06/2) Log (aMg2+ ) = - 2,38V ==> E1 = Cte
- pour 8,5 ≤ pH ≤14 on a le couple : Mg(OH)2 / Mg
La réaction est : Mg(OH)2 + 2e- <===> Mg2+ + 2OH-
La loi de Nernst donne le potentiel :
E2 = E2° + (0,06/2) Log (1/aMg2+. a2OH-).
Soit en tenant compte de Ke et Ks = 10-11 = a Mg+. a2OH-,
on obtient :
E2 = E2° + (0,06) log(ks / Ke) - 0,06 pH
= E2°’ - 0,06 pH avec (E2°’ = E2° + (0,06) log (ks / Ke)
= - 1,87 V

valeur que l’on peut obtenir aussi en considérant la


continuité de la fonction E (pH) et pour pH = 14 on a
E = - 3,22 V.
Le tracé de diagramme est donc :
Lecture de diagramme :
Sur ce diagramme on a repris celui de l’eau :

On remarque bien que le métal magnésium


n’est stable que s’il est maintenu à des potentiels
très négatifs.

Ce diagramme met en évidence l’existence de


trois domaines distincts de comportement de ce
métal :
- Domaine situé au dessous des droites E(pH)
tracées, appelé domaine d’immunité du métal.

Dans ce domaine le métal ne subit aucune


modification, il y a équilibre : métal - cation :

Mg2+ + 2e- <===> Mg

On dit que le métal est sous protection cathodique


- Le domaine situé au dessus des droites et allant
du pH = 0 jusqu’à 8,5 est appelé zone de corrosion
acide du métal selon la réaction :

2H+ + Mg <===> Mg2+ + H2

- Enfin, le domaine de passivation qui s’étend du


pH = 8,5 jusqu’à pH = 14 où le métal est recouvert
par une couche d’oxyde ou d’hydroxyde qui le
passive.
Souvent pour d’autres métaux la passivation
disparaît en milieu très basique, on parle de
corrosion basique.

Remarque :
La passivation est un phénomène
thermodynamique. il ne permet pas de prévoir si
le métal est attaqué ou non. On réserve le nom de
passivité au cas où le métal n’est effectivement
pas attaqué.
III - Diagramme de Frost :

Proposé par Frost en 1951, ce diagramme permet


de comparer rapidement la réactivité (stabilité ou
dismutation) d’un composé dans une solution où
coexistent plusieurs éléments.

Le diagramme permet en outre de déterminer le


potentiel standard de couple mis en jeu .
1) Tracé du diagramme :

Le tracé correspond à une représentation du


nE° = (-∆G/F) = f(N) où n est le nombre d’électron
mis en jeu, E° le potentiel standard et N le degré
d’oxydation.

Pour une concentration et un pH donné on


porte en ordonnée le terme nE° et en abscisse le
degré N.
Si l’on considère la série d’un même
composé X à différents degrés d’oxydation : X1,
X2, X3 aux degrés N1, N2, N3 avec N1 < N2 < N3.

On peut donc sur un axe ON représenter les


différents éléments de la manière suivante :

X X1 X2 X3
N
0 N1 N2 N3
nE

N
Pour la figure 1, l’ X2 est situé au dessus de
la droite joignant X1 et X3 l’élément X2 réagit sur
lui-même pour donner X1 et X3.

On dit qu’il se dismute selon la réaction


de dismutation :

X2 <===> X1 + X3
Pour la figure 2; X2 est situé en dessous de
la droite joignant X1 et X3 où les éléments X1 et
X3 réagissent entre eux pour donner X2 ; selon la
réaction de média mutation :

X1 + X3 <==> X2
Pour la figure 3; X2 est située sur la droite
joignant X1 et X3.
Les trois éléments X2, X3 et X1 sont en
équilibre.

X1 <===> X2 <==> X3 <==> X1


2) Relation de Luther :

La majorité des éléments du tableau périodique


possèdent plusieurs degrés d’oxydation. Ils
peuvent donc participer à plusieurs réactions
d’oxydation et de réduction.

Les potentiels redox des couples réagissant se


déterminent à partir de la formule du Luther. Ici
aussi les ions du solvant H2O peuvent participer
aux réactions d’échange d’électrons.
Considérons les espèces Xi : X1, X2, X3 à
différents degrés d’oxydation Ni : N1, N2, N3 tels
que : N1 < N2 < N3.

Des réactions d’échange d’électrons


suivantes peuvent se dérouler :

(1) X2 + (N2 - N1) e- <=== > X1 E2,1

(2) X3 + ( N3 - N2) e- <=== > X2 E3,2

(3) X3 + ( N3 - N1) e- <=== > X1 E3,1 ?


On remarque que la réaction 3 est la somme
des réactions 1 et 2 ; si bien que l’on peut écrire :

∆G°3 = ∆G°1 + ∆G°2 ===>


(N3 - N1)F E3,1 = (N2 - N1)F E2,1 + (N3 - N2)F E3,2

Le potentiel E3,1 est alors :

E3,1 = (N2 - N1) E2,1 + (N3 - N2) E3,2 / (N3 - N1).

C’est la relation de Luther donnant


l’expression du potentiel de la réaction (3)
Dans le cas le plus général où plusieurs
réactions d’oxydo-réduction peuvent se dérouler,
le potentiel ou le potentiel standard E° j/i est donné
par la relation généralisée du Luther :

E°j/i = (1/ Nj - Ni) ∑(∆N)j, iE°j/i


avec
∑(∆N)j,i E°j/i = (Nn- Nn-1)E°n/n-1 + (Nn-1 - Nn-2)E°n-1/n-2 +
………
Exemple :
Soit à calculer E°MnO4-/Mn2+ dans une suite
d’éléments du manganèse suivante :

N 0 II III IV VI VII
X Mn Mn2+ Mn3+ MnO2 MnO42- MnO4-
E° 1,18 1,51 0,95 2,26 0,58

Le potentiel du couple : E°MnO4- / Mn2+ par exemple


se calcule de la manière suivante :
1(1,51) +1( 0,95 ) +2 ( 2,26 ) +1( 0,58 )
E°MnO - = =1,51V
4
( 7-2 )
3) Exemple de tracé du diagramme du Frost :
a) Cas des différents degrés d’un même élément :

En milieu acide à pH = 0, on considère les


différents degré de Cl2 suivants :

Cl-, Cl2, HClO (ClO-), HClO2 (ClO2-), ClO2, ClO3-,ClO4-

Les potentiels standard sont donnés dans des


tables de potentiel standard
X Cl- Cl2 HClO HClO2 ClO2 ClO3- ClO4-
E° 1,36 1,63 1,64 1,27 1,15 1,19

Le tracé du diagramme nE° = f (N) nécessite la


détermination des coordonnées des éléments X.

On complète alors le tableau précédent en


calculant les ordonnées nE° par la relation de
Luther.

On prendra le couple (Cl2, Cl2) comme origine :


N -I 0 I III IV V VII
nE° -1,36 0 1,63 4,91 6,18 7,33 9,71

B
0
nE
10

-2

-2 0 2 4 6 8
N
Conclusion sur ce graphique :

En milieu acide on remarque que les points


représentatifs des éléments du chlore
considérés sont quasi alignés.

On peut conclure donc que tous ces éléments


sont en équilibre (les E° presque identiques)
b) Prévision des réactions d’oxydo-réduction

Soit une réaction redox avec échange de ne- qui


se produit dans un sens ou un autre :

n2 ox1 + n1 red2 <====> n2 red1 + n1 ox2

En faisant coïncider dans le diagramme de


Frost les points représentatifs de ox1 et du red2
on peut obtenir par exemple
ox1. red2

red1 ox2

Ici on a le point commun (ox1. red2) est situé au


dessus de la droite joignant red1 et ox2; la réaction
se déroulera dans le sens gauche ===> droite :

n2 ox1 + n1 red2 <====> n2 red1 + n1 ox2


MERCI DE VOTRE ATTENTION

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