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REVUE PEDAGOGIQUE Attaalim N°29

Que peut-on faire aujourd'hui dans les classes à gros effectifs ?

par Lahbab Ould Dah - Conseiller pédagogique Section Français de l'IPN

Il est vrai qu'un enseignement-apprentissage efficace du français langue seconde suppose des
interactions régulières surtout d'élève à élève, une pédagogie active favorisant de manière
spontanée la communication orale et écrite plutôt que l'apprentissage des phrases toutes
faites, autant d'exigences qui semblent difficiles voire impossibles avec des effectifs élevés.

Comment faire pour enseigner dans une classe à large effectif ?

I - Définition de la notion de "grand groupe".

Ce vocable a suscité bien des polémiques. A partir de quel nombre peut-on parler de "grand
groupe" ? Il semble aujourd'hui qu'on peut parler de "grand groupe" à partir d'un effectif
supérieur ou égal à cinquante élèves. Ce consensus est important dans la recherche des
solutions. Jusque là, seul le critère quantitatif permet de définir le "grand groupe". Mais l'on
oublie d'autres variables comme l'âge, le niveau des élèves, ... et les conditions
d'enseignement.

De nos jours, on parle de "grand groupe" lorsqu'à partir d'une situation-apprentissage donnée
le nombre d'élèves est si élevé qu'il devient un obstacle à la communication orale et écrite.

II - Quelques principes intangibles.

(1) La loi de la variété requise ou loi d'Ashby :

Cette loi permet de lutter contre la monotonie des apprentissages et de répondre à la pluralité
des besoins. L'enseignant se doit de varier ses techniques, ses activités et durées de travail
pour intéresser les élèves.

Il importe d'attirer l'attention de l'enseignant sur le danger de pratiques de classes répétitives.


Il en résulte au pire des cas une destruction du goût d'apprendre qui se traduit chez les élèves
par un abandon des cours de français. Ce comportement irréfléchi favorise la déperdition
scolaire tant redoutée et redoutable.

(2) La référence constante à la culture de l'élève :

Pour être efficace, un enseignement doit tenir compte des réalités socio-culturelles et
psychologiques de l'élève. Ces réalités se fondent sur un esprit de groupe, de solidarité. En
Afrique, la vie est communautaire. A l'école coranique, les élèves les plus avancés aident les
débutants, les nouveaux venus, et sont eux-mêmes formés par le maître. Ce seul exemple
suffit pour montrer que l'enseignement traditionnel tout en développant la mémoire, l'autorité
de l'enseignant, contribue à la situation réelle de notre système éducatif.

(3) L'organisation et le perfectionnement des grands groupes :


En présence d'un grand groupe, l'idée première de l'enseignant doit être de l'organiser, de le
structurer. L'organisation du groupe facilite qualitativement et quantitativement l'expression
orale et écrite recherchée. Il faut envisager des rôles pour l'ensemble de la classe ou des
responsabilités à confier à des groupes.

Pour cela, il convient de mettre à la disposition des enseignants un matériel didactique


approprié, par exemple des fiches techniques donnant des indications sur les différentes
formes de travail et d'organisation, des consignes précises sur le rôle de chacun pour que le
groupe soit suffisamment structuré et préparé à une meilleure utilisation de ses richesses.

Le problème majeur est celui de l'organisation de la classe.

* Comment passer d'un groupe-classe compact à un ensemble organisé de sous-


groupes ?

* Comment animer des groupes aussi nombreux ?

* Peut-on créer des occasions de communication dans une classe à effectifs


élevés ?

III - Quelques propositions pour gérer de grands groupes.

On peut travailler en sous-groupes :

1. La formation de sous-groupes :

A partir des affinités ou à partir des niveaux sans tenir compte des sexes. Le nombre de sous-
groupes dépend du nombre d'élèves, de l'espace disponible, des problèmes de discipline posés
par la multiplicité des sous-groupes.

2. Le travail en sous-groupes :

Les sous-groupes peuvent par exemple travailler sur un même thème. De ce fait, il faut
d'abord appliquer la démarche attendue; ensuite en cas d'erreur constatée au niveau d'un
sous-groupe, arrêter et corriger pour l'ensemble des sous-groupes. D'autre part, la durée de
l'activité doit être précisée d'avance. C'est dire l'importance du rôle de l'enseignant qui doit
être formé aux différentes techniques de gestion et d'animation des grands groupes.

3. La classe peut être divisée en deux groupes :

L'un participerait oralement à l'activité proposée tandis que l'autre groupe se chargerait de la
prise de notes. Cela supposerait un entraînement systématique des élèves à la prise de parole
et à la prise de notes. On peut aussi concevoir que pendant qu'un groupe se livre à une telle
activité, l'autre s'exerce à une autre activité et inversement.

4. L'évaluation :
L'enseignant doit donner les critères d'évaluation pour d'une part initier l'élève à l'auto-
évaluation, et d'autre part le motiver en sachant ce qu'il peut gagner ou perdre dans telle ou
telle activité. D'où la nécessité d'organiser au profit des enseignants des sessions de formation
aux méthodes de l'évaluation.
Pour conclure, disons que les effectifs pléthoriques loin de constituer un obstacle sont plutôt
sources de richesses à condition que l'enseignant soit capable de les gérer. Comme le note
Newcomb "lorsque la taille du groupe augmente, les ressources du groupe tendent à
augmenter aussi". Il est clair que plus le nombre d'élève augmente, les possibilités de
communication, d'échanges et de résolution des problèmes se développent. L'obstacle et le
peu de nombre deviennent alors un mythe à dépasser.
Si aujourd'hui les enseignants se plaignent de la lourdeur des effectifs, c'est parce qu'ils
restent tributaires de pratiques répétitives et improvisées. Il faut absolument former les
enseignants aux différentes techniques d'animation de groupes et par là même les amener à
changer ou à adapter leur mode d'évaluation traditionnel. L'institution doit les aider à lancer
leur profession dans les conditions d'aujourd'hui. C'est là une véritable réforme de l'acte
pédagogique nécessaire à la mise en place d'une pédagogie adaptée aux grands groupes.

ELEMENTS de BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages :
- CONFEMEN, Répertoire méthodologique d'organisation et d'enseignement dans les grands
groupes, Dakar, Presses universitaires de Dakar, Mai 1991, 119 pages.
- A. DIOUM, Enseigner dans une classe à large effectif, ACCT.

Revues :
- Diagonales n° 3,5,7,19,22.
- Cahiers pédagogiques n° 207, 208 - oct. 1982.
- Dialogues et cultures n° 30 - 1987.

http://www.mr.refer.org/ipn/AT_29_E1.HTM

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