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J.-M. Regimbeau
MOTS CLÉS Résumé Les indications d’un traitement interventionnel (endoscopique ou chirurgical) de
Pancréas ; la pancréatite chronique (PC) peuvent être schématiquement séparées en plusieurs grands
Traitement ; groupes lésionnels ou de symptômes : la douleur, les conséquences de la fibrose sur les organes
Pancréatite de voisinage (sténose biliaire ou duodénale, voire colique, thrombose de la veine splénique
chronique ; avec hypertension portale segmentaire), les conséquences de la rupture canalaire en amont
Chirurgie ; d’un obstacle (pseudokyste persistant symptomatique, ascite pancréatique réfractaire), et la
Endoscopie suspicion de cancer. Enfin, les patients chez qui les procédures endoscopiques sont impossibles
(papille non accessible) ou trop rapprochées représentent un dernier groupe d’indication chi-
rurgicale. Récemment, deux nouveaux critères d’évaluation ont été mis en avant : le nombre
de procédures nécessaires pour atteindre l’objectif fixé, et la durée d’hospitalisation.
© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
KEYWORDS Summary The indications for interventional treatment (endoscopic or surgical) of chronic
Pancreas; pancreatitis can be classified in several major groups of lesions or symptoms: pain, conse-
Chronic pancreatitis; quences of fibrosis on neighboring organs (biliary, duodenal or even colic stenosis, thrombosis
Surgery; of the splenic vein with segmental portal hypertension), consequences of duct rupture above
Endoscopy the obstacle (persistent symptomatic pseudocyst, refractory pancreatic ascites), and suspected
cancer. Finally, surgery is indicated for patients for whom endoscopic procedures are impossible
(papillae inaccessible) or too close together. Recently, two new criteria have been sugges-
ted: the number of procedures necessary for achieving the objective set, and the duration of
hospitalization.
© 2009 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
0021-7697/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.jchir.2009.05.022
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Résultats des séries endoscopiques dans 89 % des cas, sans récidive du PK après un suivi de 12
mois [15].
Les résultats du traitement endoscopique transmural ont été
rapportés par Barthet et al. qui ont colligé 191 PK traités Indication du traitement chirurgical
par drainage kystodigestif : le taux d’échec était de 5 % (0
à 16 %), et celui de récidive de 6 % (3 à 13 %). La morta- Les indications du traitement chirurgical ne peuvent cepen-
lité était de 0,5 % (un patient est décédé par hémorragie dant se résumer aux échecs du traitement endoscopique.
sur hypertension portale), la morbidité de 15 % (hémorra- Chez certains patients, la chirurgie (dérivation ou résection)
gie, perforation, infection). Quinze pour cent des patients doit être discutée d’emblée : lorsqu’il existe une associa-
ont nécessité un geste chirurgical ultérieur. Un traitement tion lésionnelle (PK, sténose symptomatique de la voie
transpapillaire a été réalisé pour 121 PK : le taux de récidive biliaire principale, grosse tête du pancréas), lorsque la
était de 9 %, la mortalité était nulle, la morbidité de 10 %. distance PK-lumière digestive fait plus de 1 cm (laissant pré-
Onze pour cent des patients ont nécessité un geste de chirur- sager de difficultés techniques lors du geste endoscopique),
gie ultérieure (12 à 30 %) [10]. Bartoli et al. ont rapporté les lorsqu’ils sont situés dans la région pancréatique corporéo-
résultats de la prise en charge de 14 patients présentant 14 caudale et associés à une thrombose de la veine splénique
PK d’une PC : chez 12 patients le traitement endoscopique [16], lorsqu’ils sont multiples ou compliqués (rupture d’un
(Fig. 1) permettait d’obtenir une disparition de la douleur pseudoanévrisme après échec du traitement radiologique
Figure 1. Traitement endoscopique d’un pseudokyste compliquant une pancréatite chronique (imagerie fournie par le Dr E. Bartoli (service
de gastroentérologie CHU - université de Picardie Amiens) : scanner injecté : pseudokyste (a) ; mise en place de deux prothèses queue de
cochon par voie transgastrique (b et c) ; contrôle endoscopique (d) ; scanner injecté : à trois mois disparition du pseudokyste (e).
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Au total 140 patients ont été inclus, mais seuls 72 patients ayant des douleurs chroniques invalidantes dues à une PC
ont réellement participé à l’étude avec randomisation. et une dilatation du canal pancréatique principal (diamètre
Parmi la population globale étudiée (140 patients), moyen 10 mm) sans masse inflammatoire céphalique (dia-
64 patients ont eu un traitement endoscopique : 100 % mètre de la tête du pancréas < 4 cm). Ces critères d’inclusion
de sphinctérotomie pancréatique, 52 % de prothèses pan- (en particulier un cadre lésionnel unique et bien défini)
créatiques (durée médiane 16 mois [12 à 27 mois], six répondent tous aux critiques faites à l’étude de Dite et
changements en moyenne [1 à 4]), 12 % de prothèses al. [22]. Les patients recevaient soit un traitement endo-
biliaires, 5 % d’extraction de calculs, 0 lithotritie. Un suc- scopique (lithotritie extracorporelle et pose de prothèses
cès technique était observé chez 98 % des patients. Il n’y endocanalaires) soit un traitement chirurgical par dérivation
avait aucun décès, et 8 % des patients ont développé une wirsungojéjunale (sans geste de résection pancréatique). Le
complication (pancréatite aiguë, abcès, hémorragie) ne critère principal de jugement était le score de douleur de
nécessitant, dans aucun des cas, un traitement chirurgical Izbicki [23] à deux ans (diminution du score de la douleur
secondaire. Par ailleurs, 76 patients ont eu un traitement de plus de 50 %). Il s’agit d’un score spécifique de la PC,
chirurgical : 80 % ont eu une résection pancréatique, 20 % intégrant la fréquence et l’intensité de la douleur l’usage
une dérivation wirsungojéjunale. Il n’y avait aucun décès lié des antalgiques, les conséquences de la douleur sur les acti-
à la chirurgie, et 8 % des patients ont développé une compli- vités. Les critères secondaires étaient le taux de succès,
cation (pancréatite aiguë, fistule pancréatique ou digestive, la morbidité, la mortalité et le nombre d’interventions.
occlusion), nécessitant chez deux patients (3 %) une réinter- L’étude a été interrompue de façon prématurée par un
vention. L’analyse du sous-groupe des 72 patients ayant reçu comité d’experts indépendants en raison d’une différence
un traitement endoscopique (n = 36) ou chirurgical (n = 36) significative en faveur de la chirurgie après inclusion de
après randomisation avec un suivi moyen de cinq ans a mon- 39 patients. Le suivi moyen était de 24 mois. Le score de
tré que : douleur était significativement plus faible après traitement
• une disparition de la douleur était observée chez 15 % des chirurgical (25 contre 51, p = 0,001). La réponse était immé-
patients du groupe traitement endoscopique contre 34 % diate après chirurgie (moins de six semaines). Le taux de
des patients du groupe chirurgie (p = 0,002) ; succès était respectivement de 75 et 33 % dans les groupes
• aucune amélioration de la douleur n’était observée chez chirurgie et endoscopie. Le nombre moyen d’interventions
40 % du groupe traitement endoscopique contre 14 % des était d’un contre cinq dans le groupe endoscopie (p < 0,001).
patients du groupe chirurgie (ns) ; Les patients du groupe endoscopie avaient en médiane
• 29 % des patients du groupe traitement endoscopique huit sessions thérapeutiques. Un patient est décédé dans
avaient une augmentation de leur poids contre 47 % des le groupe endoscopie (perforation d’ulcère). La morbidité
patients du groupe chirurgie (p = 0,003) ; était semblable dans les deux groupes.
• l’apparition d’un diabète était notée chez 34 % des Les résultats de cette étude, très en faveur de la chirur-
patients du groupe traitement endoscopique contre 39 % gie en termes de nombre de procédures, en disparition de
des patients du groupe chirurgie (ns). la douleur (score d’Izbicki) et/ou de délai de disparition de
la douleur, ont été à l’origine d’un grand nombre de lettres
À noter que ces résultats étaient observés dans la popu-
aux auteurs, dont certaines virulentes : les principales cri-
lation globale.
tiques concernaient le faible nombre (encore) de procédures
Cette étude est critiquable sur de nombreux aspects :
endoscopiques thérapeutiques (médiane 8 par patient) et le
• faiblesse de la description des lésions (nombre de patients
faible taux de succès à deux ans de celles-ci (32 %). Ce taux
avec lésions biliaires au total, présence d’une masse
de 32 % à deux ans ne traduirait-il pas en fait l’efficacité
céphalique inflammatoire) ;
réelle de la prise en charge endoscopique de ce type de
• multiplicité des tableaux lésionnels ;
lésions révélée (mais trop brutalement annoncée) dans le
• la randomisation portait sur une partie des patients seule-
cadre d’une analyse prospective des résultats ?
ment ;
Au total, après analyse de ces deux essais randomisés, la
• l’insuffisance de traitement dans le groupe traitement
chirurgie paraît être un facteur prédictif fort de disparition
endoscopique (faible nombre de procédures, absence de
rapide, au prix de peu de procédures et de façon durable, de
prothèse pancréatique chez près de 50 % des patients,
la douleur dans le cadre de la sténose du canal pancréatique
absence de lithotritie) ;
principal liée à la PC.
• gestes de résection principalement (80 %) dans le groupe
traitement chirurgical (qui aurait dû essentiellement
comprendre des procédures de drainage). Lésions biliaires : chirurgie ou
Cependant, il s’agit de la première étude randomisée endoscopie ?
effectuée chez des patients ayant une PC, ce qui souligne
la difficulté de la réalisation de telles études dans cette Une sténose biliaire est observée chez 5 à 20 % des patients
population, en raison principalement de la multiplicité des [15,24—29]. Ce taux atteint 56 % à 60 % en cas de masse
tableaux lésionnels. Le résultat principal est que, chez des inflammatoire de la tête du pancréas [30,31]. Le traite-
patients pouvant a priori avoir un traitement endoscopique ment endoscopique des sténoses biliaires, jusqu’alors un
ou chirurgical, une disparition de la douleur est observée à peu décevant à long terme (par opposition à celui des PK
cinq ans chez 60 % des patients du groupe endoscopique et par exemple), est en pleine évolution depuis l’utilisation de
chez 85 % des patients du groupe chirurgical à morbimorta- prothèses plastiques multiples et l’apparition des prothèses
lité égale (précoce et tardive). métalliques expansibles extractibles. Il n’existe pas d’étude
randomisée comparant les traitements endoscopique et chi-
Essai de Cahen et al. [21] rurgical des sténoses biliaires symptomatiques. Cette étude
est en fait de conception très difficile (rareté des patients
Cahen et al., ont rapporté en 2007 [21] les résultats de avec lésion biliaire isolée) et est en cours d’élaboration
la deuxième étude randomisée réalisée chez des patients (PHRC national Amiens 2009).
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Séries endoscopiques utilisant plusieurs prothèses plastiques ou une prothèse métallique extractible.
Auteur/année Malades (n) Type de prothèse Succès long terme (%) Morbidité (%) Suivi (mois) Traitements ultérieurs
Draganov et al. [42] 29 Multiple Plastique + dilatation 62 13 48 9/39
Catalano et al. [41] 12 Multiple plastique 92 9,3 47 1/12
Pozsar et al. [43] 29 Multiple plastique 60 NP 21 3/29
Cahen et al. [51] 6 Métallique extractible 66 NP 24 1/6
Séries chirurgicales.
Auteur/année Type de chirurgie n Mortalité (%) Morbidité (%) Sténose (%) Angiocholite (%) Suivi (mois)
Par cet al. [52] CD 177 3 17 0 6 63
Yadegar [24] CD/HJ/CJ 21 0 19 NP NP NP
Stabile et al. [26] CD/HJ/CJ 38 2,5 18 5 NP 58
Huizinga et al. [27] CD/HJ/CJ 37 9 14 NP 5 25
Rothlin et al. [53] HJ 51 2 25 6 8 91
NP : non précisé ; CD : anastomose cholédocoduodénale ; HJ : anastomose hépaticojéjunale ; CJ : anastomose cholécystojéjunale.
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Figure 2. Traitement endoscopique d’une sténose biliaire compliquant une pancréatite chronique par prothèse métallique extractible
couverte (Walflex® ) (imagerie fournie par le Dr E. Bartoli (service de gastroentérologie CHU—université de Picardie Amiens).
Figure 3. Intervention de Frey : scanner injecté en recoupes frontale : grosse tête inflammatoire du pancréas, sténose biliaire avec
dilatation des voies biliaires d’amont, et dilatation du canal pancréatique principal (a) ; schémas expliquant la nature et l’étendue de
l’évidement céphalique et de la wirsungotomie (b et c) ; vue opératoire : évidement céphalique (d) ; vue opératoire : hémostase par sutures
appuyées des berges de la wirsungotomie (e).
Pancréatite chronique symptomatique : endoscopie ou chirurgie 123
de la voie biliaire principale. La voie biliaire principale est la dérivation wirsungojéjunale [7,17,57,70] et des interven-
ourlée dans la cavité d’évidement ; le pancréas gauche et le tions de type DPC, Beger, et Frey [61,62,71—73].
pancréas céphalique résiduel sont drainés par une anse en Globalement, la mortalité postopératoire la plus impor-
Y [30]. Les principaux reproches faits à cette intervention tante est observée après DPC (5 à 10 %) ; après dérivation
sont : wirsungojéjunale et interventions de Frey et Beger, elle
• elle ne prend pas en compte la pathologie canalaire du est inférieure à 5 %. La morbidité postopératoire est plus
corps et de la queue du pancréas ; importante après DPC (25 %), qu’après intervention de Beger
• la résection partielle de la tête du pancréas est dange- (15 %), intervention de Frey et dérivation wirsungojéju-
reuse car nécessite en arrière la libération de la face nale (10 %). Elle est principalement représentée par les
antérieure de la veine porte ; complications respiratoires (5 à 10 %) (justifiant d’une kiné-
• le rétablissement de la continuité biliaire et pancréatique sithérapie respiratoire active pré- et postopératoire) et
est complexe. hémorragiques (5 à 10 %). Une hémostase préventive très
soigneuse doit donc être faite lors de ces interventions qui
Faut-il associer systématiquement une mettent en communication une tranche pancréatique et la
lumière digestive (en particulier sur les berges de la wirsun-
dérivation wirsungojéjunale ?
gotomie et de la cavité d’évidement céphalique) (Fig. 3). La
Beger et al. n’ont associé cette anastomose que dans 9 % des fibrose du parenchyme pancréatique explique le taux très
504 patients, avec des résultats semblables à ceux rapportés faible de fistules pancréatiques (inférieur à 5 %). Le taux
pour l’intervention de Frey [61]. Frey et al. ont proposé de de réintervention pour complication précoce est de 10 %
ne pas la réaliser si le canal pancréatique principal était après DPC, de 5 % après intervention de Beger, et proche
indemne de dilatation [59]. de 0 après intervention de Frey et dérivation wirsungojéju-
nale. La durée moyenne d’hospitalisation est de 15 jours
après DPC, de dix jours après intervention de Beger, et
Interventions de Frey et Beger et organes de proche d’une semaine après intervention de Frey et dériva-
voisinage tion wirsungojéjunale. La mise en place préopératoire d’une
prothèse pancréatique augmente la morbidité après inter-
Les interventions de Frey et de Beger pourraient permettre, vention de Frey, principalement en augmentant le risque de
par l’obtention d’une décompression de la tête du pancréas, complications infectieuses [74]. Les résultats de la DPC et de
de régler sans autre geste les compressions biliaire et duo- l’intervention de Beger sont donc assez proches, ainsi que
dénale associées : ainsi 95 % des patients ayant une lésion ceux de l’intervention de Frey et de la dérivation wirsungo-
associée à une hypertrophie céphalique (sténose distale de jéjunale.
la voie biliaire principale [n = 37], sténose duodénale [n = 7], L’analyse des résultats à long terme s’est affinée, de la
hypertension portale segmentaire [HTPS] [n = 10]) ont été description simple de la disparition de la douleur (pour-
traités définitivement par décompression simple de la tête centage), à l’utilisation de scores de qualité de vie (GIQLI,
du pancréas avec un suivi moyen de 4,2 ans [31]. Cepen- EORTC-QLQ-30) et à l’appréciation des fonctions exocrines
dant, toutes les séries rapportent des réinterventions pour et endocrines après chirurgie. Le suivi moyen des patients
sténose biliaire symptomatique, ce qui correspond égale- dans ces séries chirurgicales est de cinq ans. On observe
ment à notre expérience : la persistance ou la récidive de la une disparition durable de la douleur chez 70 à 80 % des
cholestase après interventions de Frey ou de Beger peuvent patients après dérivation wirsungojéjunale, chez 80 à 90 %
être liées à une majoration de la sténose due à la PC ou à une des patients après intervention de Frey et de Beger, et de
ischémie postopératoire de la voie biliaire distale lésée dans 90 à 100 % après DPC. La reprise de poids est plus impor-
la cavité céphalique. Ainsi, Beger et al. ont réalisé une déri- tante après intervention de Frey ou de Beger (5 à 6 kg), puis
vation biliaire dans un second temps dans 23 % des cas alors après dérivation wirsungojéjunale (3 à 4 kg) et après DPC (1
qu’une cholangiographie peropératoire était systématique à 2 kg). Le contrôle de la compression des organes de voi-
lors de l’intervention initiale [61]. Dans une autre série, sinage (voie biliaire, duodénum) est observé chez tous les
deux réinterventions chirurgicales (15 %) après intervention patients après DPC, chez 90 % des patients après interven-
de Frey ont été nécessaires pour persistance de l’ictère tion de Frey ou de Beger, et seulement chez 75 % des patients
[62]. Notre attitude serait de proposer largement une déri- après dérivation wirsungojéjunale. Une réintervention liée
vation biliaire, par analogie avec la pathologie lithiasique, au pancréas est nécessaire chez 10 à 15 % des patients après
de type anastomose choledocoduodénale (plus facile de dérivation wirsungojéjunale, ou après intervention de Frey
réalisation, accessible endoscopiquement) [55] dès que la ou de Beger (le plus souvent dérivation biliaire). Vingt à 40 %
voie biliaire est dilatée, surtout s’il existe une cholestase des patients développent un diabète après DPC, contre 10
biologique. à 15 % après intervention de Frey ou de Beger ou dériva-
tion wirsungojéjunale. L’insuffisance pancréatique exocrine
Résultats a été moins bien analysée mais est plus fréquente après
DPC qu’après intervention de drainage. La qualité de vie
Six essais randomisés ont été publiés au cours de ces der- globale est dans toutes les séries meilleures après interven-
nières années comparant opération de Beger et DPC avec tion de Frey ou de Beger, qu’après DPC. Une intégration
conservation pylorique [63—65], opération de Beger et opé- professionnelle durable est observée chez 70 à 80 % des
ration de Frey [66,67], et opération de Frey et DPC [68]. patients.
Deux études concernent spécifiquement la qualité de vie Au total, l’intervention de Frey est une modification effi-
après DPC ou intervention de Frey et de Beger [23,65]. Une cace de la dérivation wirsungojéjunale, et une technique
étude récente randomisée a rapporté les résultats à long moins morbide et complexe que l’intervention de Beger ou
terme de l’intervention Frey et de la DPC [59]. Une méta- la DPC. Les bons résultats fonctionnels de cette interven-
analyse a comparé l’opération de Beger et la DPC [69]. tion sont très probablement dus à l’absence de résection
Plusieurs études rétrospectives ont rapporté les résultats de digestive et à la faible quantité de parenchyme réséqué.
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[74]. La mise en place d’une prothèse pancréatique mul- des causes classiques de mortalité postopératoire [32]. Une
tipliait par trois la morbidité postopératoire après DPC, dénutrition sévère doit être recherchée et les complications
splénopancréatectomie gauche et dérivation wirsungojéju- pulmonaires, qui compliquent tous types de chirurgie sur ce
nale dans la série de Schnelldorfer et al. [87]. Le problème terrain, doivent également être prévenues.
est plus complexe lorsque le traitement endoscopique (ou
interventionnel) est biliaire. Dans une série rétrospective,
Povoski et al. ont montré que le drainage biliaire pré- Chirurgie prophylactique
opératoire et non les gestes endobiliaires sans drainage
(cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique, cho- Faut-il traiter chirurgicalement une lésion paucisympto-
langiographie transhépatique, exploration chirurgicale de la matique lorsqu’il existe une autre indication formelle
voie biliaire principale) augmentait de façon significative la chirurgicale ? En fait ce problème pratique peut se décom-
morbidité globale, notamment infectieuse (générale, abcès poser de la façon suivante :
intra abdominaux) et la mortalité [85]. Ce travail, qui n’a • il y a une lésion pancréatique (canal pancréatique prin-
concerné que des DPC, montre que la contamination de la cipal dilaté, grosse tête inflammatoire du pancréas)
bile par une prothèse endoscopique est réelle et doit être symptomatique pour laquelle il existe une indication chi-
prise en compte (prélèvement bactériologique systématique rurgicale ; il y a par ailleurs une dilatation de la voie
de bile et antibioprophylaxie adaptée). biliaire principale sans cholestase. Il est recommandé
Au total, toute stratégie endoscopique doit intégrer la alors de ne pas effectuer de dérivation biliaire : cepen-
part éventuelle de ce geste endoscopique préalable dans dant, on retrouve de 4 à 23 % de réinterventions pour
une potentielle surmorbidité postopératoire ultérieure. Il sténose biliaire symptomatique [10,31,69,76]. Notre atti-
s’agit là encore d’une justification à une discussion multi- tude serait de discuter plus largement une dérivation
disciplinaire. biliaire, car ce geste est associé à une morbimortalité
faible dès que la voie biliaire est dilatée même sans
traduction biologique pour éviter une réintervention fré-
Cas particulier : dystrophie kystique sur quente dans des conditions opératoires plus difficiles ;
• il y a une lésion biliaire symptomatique pour laquelle il
pancréas aberrant de la paroi duodénale existe une indication chirurgicale ; il existe par ailleurs
(DKPD) une dilatation du canal pancréatique principal, ou une
grosse tête inflammatoire du pancréas asymptomatique.
La DKPD est à l’origine de douleurs (60 % des patients), Faut-il faire un geste de type dérivation wirsungojéjunale
de vomissements (30 % des patients), d’un ictère (8 % des ou intervention de Frey ? Le patient étant non doulou-
patients), ou d’une hémorragie digestive par ulcère (5 % reux, on se situe alors dans le cadre d’un geste pouvant
des patients) [75]. La DKPD illustre la complexité des situa- interférer avec le développement d’un diabète lorsque
tions anatomiques rencontrées dans la PC. Le traitement l’intervention chirurgicale est proposée plus précocement
est d’abord médical, et peut comporter l’administration comme rapporté dans les deux séries de Nealon et al. et
d’octréotide ; il peut être endoscopique par fenestration Sidhu et al. [88,89]. Ces données n’ont pas été confir-
des kystes dans le duodénum. Ces deux modalités thé- mées par l’étude de Malka et al. [86]. Enfin, il s’agit
rapeutiques ont une efficacité à long terme incertaine, d’interventions dont la morbimortalité est plus élevée que
mais doivent être proposées en première intention [73]. La celle rapportée après dérivation biliaire. Sur ces données,
chirurgie est réservée aux formes symptomatiques (doulou- nous ne recommandons pas de geste pancréatique associé
reuses et obstructives) résistants aux traitements médicaux. si les lésions pancréatiques sont asymptomatiques.
Il s’agit d’une dérivation digestive par gastroentéro-
anastomose lorsque le tableau occlusif est isolé : cette
intervention simple est associée à une morbimortalité Conclusions : la notion de décision
faible, mais il s’agit d’une intervention incomplète laissant
en place les lésions qui peuvent évoluer et être théorique-
pluridisciplinaire
ment source de douleurs secondaires, dont l’incidence est Trois grandes options thérapeutiques sont disponibles pour
cependant mal chiffrée. La DPC représente l’intervention traiter un patient atteint de PC : le traitement médi-
la plus logique mais également celle qui est associée à la cal, l’endoscopie interventionnelle associée à la lithotritie
morbimortalité la plus importante [73]. Pessaux et al. ont extracorporelle, la chirurgie. Loin de s’opposer, ces diffé-
rapporté les résultats de la DPC effectuée chez 12 patients rentes options sont complémentaires, et leurs indications
ayant une DKPD : la mortalité était de 8 %, la morbidité de respectives en permanente redéfinition.
25 % ; après un suivi moyen de 64 mois (six à 158 mois), Quelle que soit sa nature (endoscopique ou chirurgical),
un seul patient a présenté une récidive douloureuse par un traitement interventionnel doit être décidé de façon mul-
sténose de l’anastomose pancréatogastrique [83]. Le choix tidisciplinaire. Cette notion est fondamentale, du fait des
entre dérivation et DPC est donc à poser au cas par cas, progrès récents et importants de l’endoscopie intervention-
en analysant la symptomatologie et en tenant compte du nelle, des résultats comparatifs désormais disponibles des
terrain. différents gestes chirurgicaux, et des possibles interférences
entre les deux types de traitement.
Toutefois, à la lumière des études publiées, certaines
Quelles sont les contre indications à la indications préférentielles peuvent être dégagées.
chirurgie ? Pour le traitement endoscopique : le PK, un risque opé-
ratoire prévisible élevé, une sténose biliaire symptomatique
La ponction biopsie hépatique est à discuter chez tous associée à un cavernome portal.
les patients devant être opérés pour une PC avec cho- Pour la chirurgie : la sténose isolée du canal pancréa-
lestase car l’hépatite alcoolique aiguë ou la cirrhose sont tique principal, une sténose biliaire symptomatique sans
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