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 40-880-F

Pancréatectomies céphaliques
et isthmiques avec préservation
duodénale en alternative
à la duodénopancréatectomie céphalique
S. Gaujoux, B. Acidi, C. de Ponthaud, A. Sauvanet

Résumé : La duodénopancréatectomie céphalique (DPC), autrefois principalement indiquée pour des


tumeurs périampullaires invasives, est actuellement considérée comme une intervention parfois excessive,
pour des maladies bénignes (pancréatite chronique) ou des tumeurs peu agressive (tumeurs solides et
pseudopapillaire et tumeurs neuroendocrines notamment) de la tête du pancréas. La DPC se caractérise
en effet par une dissection vasculaire importante, une modification du circuit digestif avec la réalisation
de trois anastomoses, une mortalité postopératoire élevée (jusqu’à 5 % dans les centres à haut volume),
et enfin une perte de parenchyme pancréatique fonctionnel important. De ce fait, la DPC est responsable
de troubles fonctionnels immédiats et à distance, dont une grande partie (insuffisance exocrine, diarrhée)
est liée à la suppression du duodénum et/ou de la continuité entre la tête du pancréas et le duodénum,
ainsi qu’à la modification de la continuité biliodigestive. Pour pallier à ces complications inhérentes à
la DPC, de nouvelles techniques de pancréatectomies préservant le duodénum ont été développées :
pancréatectomie totale ou subtotale avec préservation duodénale, pancréatectomie céphalique avec
préservation duodénale, pancréatectomie médiane (PM).
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Mots-clés : Pancréatectomie subtotale ; Préservation duodénale ; Pancréatectomie céphalique ;


Intervention de Beger ; Pancréatectomie médiane ; Anastomose pancréaticodigestive

Plan • des troubles de la vidange gastrique (gastroparésie, gastroplégie)


observés chez près de 35 % des malades [1] et prédominant pen-
■ Intérêts de la préservation du duodénum 1 dant les 3 1res semaines suivant l’intervention [2] . La suppression

de la sécrétion endogène de motiline par la paroi duodénale
Pancréatectomie totale ou subtotale avec préservation
semble être un des principaux facteurs expliquant ce trouble
duodénale 2
fonctionnel [3, 4] ;
Généralités 2
• une insuffisance pancréatique exocrine, constatée dans envi-
Cas de la pancréatectomie totale avec préservation duodénale 2
ron 25 % des cas de chirurgie pour maladie bénigne et jusqu’à
Cas de la pancréatectomie subtotale avec préservation duodénale 2
50 % des cas de chirurgie pour cancer [5, 6] , nécessitant la
■ Pancréatectomie céphalique avec préservation duodénale : prise d’extraits pancréatiques à vie. La suppression des fac-
intervention de Beger 3 teurs hormonaux duodénaux stimulant la sécrétion exocrine,
Généralités 3 la fréquente sténose des anastomoses pancréaticodigestives
Geste opératoire 4 entraînant une atrophie pancréatique d’amont, et la réduction
■ Pancréatectomie médiane (PM) 4 de la masse parenchymateuse pancréatique expliquent ces ano-
Généralités 4 malies [7, 8] ;
Geste opératoire 6 • une insuffisance pancréatique endocrine, dont le risque est
■ Conclusion 8 d’environ 20 % après DPC, et varie en fonction du type de
chirurgie, de l’indication, de la qualité et quantité de pan-
créas restant et des facteurs de risque d’insulinorésistance du
patient ;
• une diarrhée motrice présente chez 15 à 30 % des patients.

 Intérêts de la préservation
Elle peut avoir plusieurs mécanismes éventuellement intriqués :
traumatisme des plexus nerveux mésentériques (en cas de DPC
du duodénum pour cancer, surtout en cas de lymphadénectomie élargie),
insuffisance pancréatique exocrine non compensée, éventuel-
Le duodénum est un carrefour situé à l’union des circuits lement pullulation microbienne [9] ;
digestif, biliaire et pancréatique et responsable de la sécrétion • des angiocholites récidivantes et/ou une cholestase chronique
d’un certain nombre d’hormones et neuromédiateurs. Sa suppres- dans 5 % des cas environ, et dans 3 % des cas une sténose de
sion, au cours d’une duodénopancréatectomie céphalique (DPC), l’anastomose biliodigestive nécessitant un traitement chirurgi-
entraîne les troubles suivants : cal ou radiologique percutané [10, 11] ;

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Volume 39 > n◦ 1 > février 2022
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http://dx.doi.org/10.1016/S0246-0424(21)92108-3
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40-880-F  Pancréatectomies céphaliques et isthmiques avec préservation duodénale en alternative à la duodénopancréatectomie céphalique

• le syndrome du petit estomac caractérisé par la sensation de Cas de la pancréatectomie subtotale


plénitude gastrique postprandiale, plutôt précoce, nécessitant
le fractionnement des repas et probablement lié à l’étendue de
avec préservation duodénale
la résection gastrique ; L’exérèse subtotale du pancréas conserve une zone de paren-
• le dumping syndrome apparaissant au cours des repas, à chyme au contact du cadre duodénal mais aussi l’arcade artérielle
une incidence comprise entre 3 et 10 % après DPC avec et veineuse pancréaticoduodénale antérieure, en continuité avec
antrectomie. Il associe des signes digestifs et généraux, des l’artère gastroduodénale (en amont) et l’artère mésentérique supé-
manifestations vasomotrices et des hypoglycémies fonction- rieure (en aval), ce qui supprime quasiment tout risque d’ischémie
nelles, conséquence du passage brutal du bol alimentaire duodénale et/ou cholédocienne (Fig. 1A) [18] .
hyperosmolaire dans l’intestin grêle [12] ;
• l’ulcère sur l’anastomose gastrojéjunale et l’œsophagite par Installation et exposition
reflux dont l’incidence rapportée est comprise entre 4 et Installation du patient, la voie d’abord et l’exposition sont
20 % [13, 14] . Ce risque varie en fonction du type d’exérèse (pré- identiques à celle de la duodénopancréatectomie totale. Le décol-
servation pylorique ou non) et du type de reconstruction (sur lement coloépiploïque doit être complet et prolongé à gauche
la première anse ou sur anse en Y) ; par un abaissement de l’angle colique gauche. On poursuit par
• la stéatose hépatique se développe chez 25 à 40 % des patients le décollement du fascia prépancréatique abaissant la racine du
après DPC [15, 16] . Son apparition serait plus fréquente chez les mésocolon transverse droit afin de bien dégager le crochet pan-
patients avec un IMC élevé, un volume de pancréas restant créatique. Il faut en effet disposer d’une très bonne exposition
faible, et en l’absence de traitement enzymatique substitutif sur la région duodénopancréatique où la dissection doit être
postopératoire [17] . précise. L’estomac est récliné vers le haut et maintenu par des écar-
Pour l’ensemble de ces raisons, la préservation du duodé- teurs autostatiques. Un décollement duodénopancréatique selon
num apparaît licite chaque fois que possible, en particulier pour la manœuvre de Kocher n’est pas toujours nécessaire.
les lésions bénignes (pancréatite chronique) ou les tumeurs de
malignité réduite et de topographie céphalique ou isthmique Contrôle vasculaire
(médiopancréatique) qui ne nécessitent généralement pas de L’exérèse pancréatique est faite de la gauche vers la droite, en
curage poussé. commençant par la section des vaisseaux courts gastrospléniques
Les interventions développées comme alternative à la DPC, ou au plus près de la rate et des vaisseaux gastroépiploïques gauches,
même à la duodénopancréatectomie totale, sont : ainsi que le décollement du mésogastre postérieur. Ce dernier doit,
• la pancréatectomie totale ou subtotale avec préservation duo- si possible, être fait sous couvert d’une ligature de l’artère splé-
dénale, réservée à la pancréatite chronique hyperalgique ; nique pour limiter les phénomènes hémorragiques, en particulier
• la pancréatectomie céphalique avec préservation duodénale et en cas d’hypertension portale segmentaire. La veine mésentérique
ses variantes, proposée préférentiellement dans la pancréatite inférieure est repérée lors du décollement du mésogastre posté-
chronique hyperalgique mais aussi dans les tumeurs cépha- rieur. Elle sera liée uniquement si elle s’abouche dans la veine
liques bénignes ou de malignité réduite ; splénique, de même que d’éventuelles veines de dérivations por-
• la pancréatectomie médiane (PM), proposée dans les tumeurs tosystémiques dans le territoire splénorénal.
médiopancréatiques bénignes ou de malignité réduite. Vient le temps du contrôle des vaisseaux spléniques. L’artère
splénique sera isolée à son origine puis liée. Si les phénomènes
 Pancréatectomie totale inflammatoires locaux rendent sa libération difficile, il est possible
de la lier dans un premier temps là où elle est le plus facile d’accès,
ou subtotale avec préservation au bord supérieur du pancréas distal, et cette ligature sera « rem-
placée » ultérieurement par une deuxième, faite à son origine. À
duodénale la face postérieure du corps du pancréas, sur la ligne médiane,
Généralités on isole ensuite la veine splénique (ou le cordon fibreux qui peut
la remplacer en cas de thrombose splénique ancienne) au bord
Le principe de cette intervention généralement réservée à la gauche de l’axe veineux mésentéricoporte (Fig. 1B).
pancréatite chronique hyperalgique résistante aux traitements La veine gastrique gauche n’est souvent pas facilement identi-
antalgiques interventionnels ou non, est de procéder à l’exérèse fiable ni conservable dans ce contexte et peut être liée au bord
du maximum de tissu pancréatique – souvent pathologique et supérieur du corps du pancréas ; elle est éventuellement liée une
considéré comme la source des douleurs – tout en conservant le deuxième fois à sa terminaison si celle-ci est localisée au bord
cadre duodénal et la voie biliaire principale. Les suites sont essen- gauche du tronc porte.
tiellement marquées par la possibilité d’une fistule pancréatique
le plus souvent biologique et rare, une réalimentation précoce Mobilisation de l’isthme pancréatique
possible et un diabète insulinodépendant quasi constant qu’il L’isthme doit être complètement mobilisé des vaisseaux qui
convient d’équilibrer tout en corrigeant l’insuffisance exocrine. l’entourent. Pour cela, on doit sectionner entre ligatures l’artère
pancréatique dorsale et les vaisseaux pancréatiques inférieurs. Au
Cas de la pancréatectomie totale bord supérieur de l’isthme, il faut refouler, sans la traumatiser,
l’artère hépatique commune, souvent entourée d’adénopathies
avec préservation duodénale inflammatoires. Au bord inférieur de l’isthme, il faut ligaturer
Pour réaliser une pancréatectomie totale avec préservation et sectionner la veine gastroépiploïque droite à sa terminaison
duodénale, il faut déjanter le parenchyme céphalique du cadre afin d’obtenir une bonne exposition sur le trajet de l’artère gas-
duodénal tout en conservant la voie biliaire et surtout l’arcade troduodénale et l’origine de l’artère gastroépiploïque droite. Dans
vasculaire pancréaticoduodénale postérieure qui constituera alors la mesure du possible, la continuité de l’artère gastroduodénale
la seule vascularisation du cadre duodénal et de la voie biliaire. En doit être préservée afin de maintenir une bonne perfusion de
effet, l’arcade vasculaire duodénopancréatique antérieure est sys- l’arcade artérielle pancréaticoduodénale antérieure dans le sens
tématiquement réséquée car indisséquable de la face antérieure craniocaudal. Pour cela, l’artère gastroduodénale est progressive-
du pancréas. Cette intervention, techniquement difficile, expose ment mobilisée de la gauche vers la droite en liant ses collatérales
donc à la survenue d’une ischémie du duodénum et/ou du cho- à destinée pancréatique au fil monobrin serti 4/0 ou 5/0.
lédoque, mais aussi à des plaies de ces mêmes structures lors de
la dissection et dont la cicatrisation peut se révéler problématique Contrôle du cholédoque
en zone ischémique. Pour ces raisons, cette intervention est quasi- En tractant le pancréas vers la gauche et vers le bas, on attire
ment abandonnée. On lui préfère une exérèse subtotale de la tête dans le champ opératoire le cholédoque à son point d’entrée
du pancréas, plus sûre, ou d’autres procédés associant résection et intrapancréatique, qui se situe environ 1 cm à droite de l’artère
dérivation (interventions de Beger ou de Frey). gastroduodénale. La face antérieure du cholédoque constitue le

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Pancréatectomies céphaliques et isthmiques avec préservation duodénale en alternative à la duodénopancréatectomie céphalique  40-880-F

Figure 1. Pancréatectomie subtotale avec préservation du duodénum.


A. La section pancréatique débute en regard de la face antérieure du cholédoque après mobilisation
de l’artère gastroduodénale vers la droite, puis descend quelques millimètres en dedans de l’arcade
pancréaticoduodénale antérieure.
B. Décollement du mésogastre postérieur après ligature-section des vaisseaux courts gastrospléniques.
Une ligature-section de l’artère splénique à son origine a été faite. On peut ensuite ligaturer et sectionner
la terminaison de la veine mésentérique inférieure puis celle de la veine splénique.
C. La section pancréatique a débuté en regard de la face antérieure du cholédoque. Cette section,
faite avec un instrument froid, met à nu l’hémicirconférence antérieure et gauche du cholédoque
intrapancréatique. Le crochet a été mobilisé par rapport aux vaisseaux mésentériques supérieurs.
D. Aspect en fin d’exérèse.

repère supérieur du tracé de l’incision pancréatique. La mise (branches de l’artère mésentérique supérieure ou de la première
en place d’un drain par voie transcystique dans le cholédoque artère jéjunale) qu’il convient de préserver.
peut faciliter son repérage mais il n’est pas certain que cette L’hémostase de la tranche pancréatique, qui est grossièrement
manœuvre diminue le risque de plaie biliaire et nous ne l’utilisons convexe et à grand axe vertical, regardant en avant et à gauche, est
qu’exceptionnellement. minutieusement vérifiée, ainsi que la vascularisation duodénale
(Fig. 1D).
Un drainage par lame multitubulée ou drain aspiratif, placé en
Section pancréatique avant de la tête du pancréas est extériorisé dans le flanc droit.
Celle-ci est faite aux instruments froids (ciseaux ou bistouri),
de façon progressive, après avoir dégagé au fur et à mesure le plan Contrôle biliaire
séparant la face antérieure de la voie biliaire du parenchyme pan-
créatique (Fig. 1C). En dehors, la section pancréatique suit à 2 Une cholécystectomie avec test au bleu de méthylène et cholan-
à 3 mm vers l’intérieur l’arcade artérielle pancréaticoduodénale giographie permet de vérifier l’absence de fuite biliaire et l’absence
antérieure. Elle rejoint vers l’arrière le plan situé en avant du cho- de compression du cholédoque intrapancréatique.
lédoque intrapancréatique qui est exposé sur toute sa longueur En cas de plaie biliaire :
(à l’exception des derniers millimètres correspondant à sa jonc- • simple, celle-ci est suturée et un drainage externe est laissé en
tion avec le canal pancréatique principal) et sur 180◦ à sa face place ;
antérieure et gauche. L’hémicirconférence postérieure et droite du • complexe ou sténose biliaire résiduelle, une anastomose bilio-
cholédoque n’est pas disséquée pour limiter le risque de dévas- digestive (cholédocoduodénale terminolatérale sur D1, ou
cularisation. Au cours de la section pancréatique, les hémostases hépaticojéjunale sur anse en Y) est recommandée.
sont faites au fil monobrin serti 4/0, 5/0, voire 6/0 au contact du
cholédoque qu’il faut éviter de perforer ou sténoser avec ces liga-
tures. Le canal pancréatique principal (et éventuellement le canal  Pancréatectomie céphalique
de Santorini) est repéré, si nécessaire désobstrué sur ses derniers
millimètres, et suturé au fil monobrin résorbable. avec préservation duodénale :
Le temps le plus délicat concerne la résection du crochet pan- intervention de Beger
créatique, que l’on expose en tirant le pancréas vers le haut et la
droite. Cette résection se situe en arrière de la veine mésentérique Généralités
supérieure qui est mobilisée vers la gauche après ligature–section
de ses collatérales, mais aussi immédiatement au-dessus de Le principe de cette intervention est de réséquer le parenchyme
l’arcade artérielle pancréaticoduodénale antérieure et du troi- pancréatique céphalique et de drainer le système canalaire pan-
sième duodénum, et également en avant de la lame rétroportale créatique, en décomprimant si cela est nécessaire le système porte
qui contient les artères pancréaticoduodénales postéro-inférieures et la voie biliaire principale. Elle ne se contente donc pas d’un

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simple drainage canalaire comme avec une anastomose pancréati- au monobrin serti 4/0 ou 5/0, suit un trajet curviligne distant
cojéjunale (intervention de Partington-Rochelle) [19] mais résèque de 5 à 8 mm du bord interne du duodénum, jusqu’au genu
aussi du parenchyme céphalique, censé être le « pacemaker » inferius (Fig. 2C). Il est souhaitable mais non obligatoire de pré-
de la douleur. Cette intervention a été initialement décrite pour server l’arcade duodénopancréatique antérieure [20] . Cette section
la pancréatite chronique hyperalgique avec hypertrophie cépha- pancréatique dénude sur une hémicirconférence le cholédoque
lique [20–23] et éventuellement sténose de la voie biliaire [20, 24] et/ou intrapancréatique qui est ainsi décomprimé (Fig. 2C).
compression débutante du système porte [24, 25] . Elle a dans cette Une cholécystectomie avec test au bleu de méthylène et cho-
indication montré sa supériorité sur une approche endoscopique langiographie permet de vérifier l’absence de fuite biliaire et de
après l’échec d’un traitement médical optimal [26] et ne doit pas compression du cholédoque intrapancréatique [20] . S’il persiste
être réalisée trop tardivement dans l’histoire de la maladie sous une sténose du cholédoque, celui-ci peut être incisé longitudina-
peine de perdre en efficacité. Elle peut aussi être réalisée pour lement dans son trajet intrapancréatique et maintenu largement
des tumeurs bénignes ou de faible malignité siégeant au sein du ouvert par des points au fil monobrin résorbable 5/0 sur ses
parenchyme céphalique [27, 28] , mais cette indication est plus anec- berges (Fig. 2D, E). L’incision cholédocienne est alors incluse dans
dotique. l’anastomose pancréaticojéjunale céphalique.
Cette intervention nécessite deux sections pancréatiques :
• une au niveau de l’isthme, dont la difficulté consiste dans la Troisième temps : reconstruction digestive
pancréatite chronique à trouver le plan de clivage entre l’isthme La confection d’une anse jéjunale en Y se fait classique-
et l’axe veineux mésentéricoporte ; ment à partir de la première ou deuxième anse. Les arcades
• une autre au niveau céphalique, pratiquement identique à celle vasculaires sont sectionnées après ligatures, en s’aidant de la
faite au cours de la pancréatectomie subtotale avec préservation transillumination. L’anse jéjunale est sectionnée puis montée en
duodénale (cf. supra). transmésocolique. L’extrémité de cette anse est anastomosée à
Les suites opératoires sont essentiellement marquées par un la tranche pancréatique gauche. Cette anastomose est termino-
faible risque de fistule pancréatique quand l’intervention a été terminale à points séparés de fil monobrin 4/0 s’il existe une
indiquée pour pancréatite chronique. Ces fistules sont en fait congruence de diamètre entre l’anse jéjunale et la tranche pan-
des fistules pancréaticodigestives développées près du sommet créatique (Fig. 2F) mais elle peut aussi être terminolatérale à
de l’anse en Y et peuvent être traitées de façon conservatrice en quelques centimètres du cul-de-sac de l’anse montée par un agra-
maintenant le drainage et l’alimentation orale. fage enfoui par un surjet hémostatique.
Dans le cas de sténoses canalaires étagées et/ou d’empierrement
Geste opératoire [29] du pancréas distal, le canal de Wirsung est incisé longitudinale-
ment sur sa face antérieure. Après lavage du canal à l’eau et retrait
La voie d’abord est une incision sous-costale droite légèrement des calculs à la pince, on réalise alors, avec l’anse jéjunale mon-
prolongée à gauche qui doit permettre une bonne exposition sur tée, une anastomose pancréaticojéjunale latérolatérale sur toute la
la région duodénopancréatique. S’ensuit un décollement coloépi- longueur du pancréas distal, faite à quelques centimètres du cul-
ploïque et un abaissement de la racine du mésocôlon transverse de-sac de l’anse jéjunale positionné devant la queue du pancréas,
droit, afin de bien dégager le crochet. Un décollement duodé- après avoir bien veillé à l’hémostase de l’incision pancréatique
nopancréatique selon la manœuvre de Kocher est cette fois-ci (Fig. 2G). Des surjets courts par plusieurs segments de monobrin
nécessaire. 4/0 sont à conseiller, en partant de la gauche et en alternant berge
supérieure et inférieure.
Premier temps : section de l’isthme pancréatique Après avoir laissé, entre les deux tranches pancréatiques, une
(Fig. 2A) longueur d’anse jéjunale suffisamment longue pour éviter toute
Pour cela, la faux de l’artère hépatique commune est dissé- tension, la même anse est ensuite anastomosée en latérolaté-
quée et réclinée vers le haut, puis la face postérieure de l’isthme ral avec la tranche droite du pancréas restante afin de drainer
pancréatique est clivée de la face antérieure du confluent vei- d’éventuels canaux ouverts et en hyperpression (Fig. 2F). En
neux mésentéricoporte. Ce dernier geste est difficile en raison l’absence de sténose biliaire résiduelle, il faut veiller à ne pas bles-
des adhérences péripancréatiques ou de l’effet de masse qu’exerce ser le cholédoque, l’arcade pancréaticoduodénale postérieure ou
le pancréas sur le système porte et expose alors à un risque de même l’artère gastroduodénale lors de la confection du plan pos-
plaie veineuse de l’axe mésentéricoporte difficile à contrôler. Pour térieur ou de la partie crâniale de l’anastomose. En cas de sténose
limiter ce risque, il est licite de : biliaire traitée par incision longitudinale, l’anastomose inclura
• couper progressivement le pancréas en profitant de l’incision cholédocienne intrapancréatique (Fig. 2H).
l’amélioration progressive de l’exposition pour finir de À une distance de 70 cm en aval de cette double ana-
trouver le plan de clivage, après avoir préalablement dégagé stomose pancréaticojéjunale, on confectionne l’anastomose
les bords inférieur et supérieur de l’isthme et fait l’hémostase jéjuno-jéjunale terminolatérale « au pied de l’anse » de façon
des arcades sus- et sous-isthmiques par des ligatures appuyées classique par deux hémisurjets de fil monobrin 4/0.
de fil monobrin 3/0 ou 4/0 ; Le drainage se fait par une lame multitubulée ou un drain
• réaliser un contrôle de l’axe veineux mésentéricoporte d’amont aspiratif sortant par le flanc droit et placée en avant des deux
et d’aval au moins minimal afin d’anticiper toute plaie vascu- anastomoses pancréatiques.
laire durant la section de l’isthme. Cette intervention peut être considérée comme complexe et
Une fois l’isthme complètement sectionné, une hémostase soi- longue à réaliser du fait de ses 2 anastomoses pancréatiques et
gneuse du versant corporéal de la tranche pancréatique est faite de la dissection rendue difficile par de l’inflammation locale et
par des points sertis et cette tranche est mobilisée sur 2 cm pour des adhérences en lien avec l’indication de pancréatite chronique.
faciliter la réalisation de l’anastomose pancréaticojéjunale sur un De ce fait un certain nombre d’alternatives ont été étudiées, que
Wirsung généralement dilaté et un pancréas dur. ce soit la modification de Berne [30] , ou l’intervention de Frey,
qui semblent avoir des résultats équivalents [31] et sont souvent
Deuxième temps : résection pancréatique privilégiées.
céphalique subtotale
Pour ce faire, il faut préalablement avoir réalisé une dissection
de la face antérieure du crochet pancréatique et du troisième duo-
 Pancréatectomie médiane (PM)
dénum par rapport à la face postérieure de la veine mésentérique Généralités
supérieure (Fig. 2B).
La mobilisation de l’artère gastroduodénale vers la droite du La PM (également appelée pancréatectomie centrale ou
patient est souhaitable pour débuter la transsection pancréatique isthmectomie) est une chirurgie d’épargne parenchymateuse
à l’aplomb du cholédoque intrapancréatique (cf. supra). Cette (parenchyma sparing surgery), au même titre que l’énucléation ou
transsection, faite au bistouri froid avec hémostases pas à pas la crochectomie. Le terme de pancréatectomie médiane précise

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Figure 2. Pancréatectomie céphalique avec préservation du duodénum (intervention de Beger).


A. Section de l’isthme pancréatique. L’artère gastroduodénale (mise sur lacs) a été mobilisée vers la droite du patient. Les arcades artérielles sus- et sous-
isthmiques sont liées par des fils sertis facilitant l’exposition.
B. Dissection du pancréas céphalo-isthmique et du crochet par rapport à l’axe veineux mésentéricoporte.
C. Résection subtotale de la tête du pancréas permettant la décompression du cholédoque intrapancréatique.
D. En cas de sténose cholédocienne basse résiduelle, ouverture longitudinale du cholédoque intrapancréatique.
E. Cette cholédocotomie est maintenue ouverte par des points prenant ses berges et est incluse dans l’anastomose pancréaticojéjunale céphalique.
F. Anastomose pancréaticojéjunale corporéale de type terminoterminal et anastomose pancréaticojéjunale céphalique de type latérolatéral.
G. Variante de l’anastomose pancréaticojéjunale corporéale de type latérolatéral après ouverture longitudinale du canal de Wirsung pour traiter des sténoses
étagées ou un empierrement.
H. Variante de l’anastomose pancréaticojéjunale céphalique. En cas de sténose du cholédoque intrapancréatique traitée par cholédocotomie longitudinale,
cette cholédocotomie est incluse dans l’anastomose pancréaticojéjunale céphalique.

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seulement que l’exérèse concerne une lésion située à la par- sung, une énucléation peut être préférable. Il faut aussi préciser
tie médiane du pancréas sans préjuger de son étendue à droite l’extension « latérale » de la lésion pour déterminer la faisabilité
comme à gauche (Fig. 3A). Elle sera notamment proposée pour des technique de l’Intervention :
tumeurs non accessibles à une énucléation du fait de leur volume • à droite, il doit en règle persister une lame de parenchyme sain
ou de leur contact avec le canal de Wirsung [27, 32] . La PM préserve à gauche de l’artère gastroduodénale et de la voie biliaire prin-
de principe les vaisseaux spléniques pour des raisons de vascu- cipale afin de ne pas la dévasculariser et suturer le pancréas
larisation du pancréas gauche restant, limitant ainsi le curage céphalique dans de bonnes conditions ;
ganglionnaire par rapport à une exérèse « classique carcinolo- • à gauche, il faut conserver une longueur suffisante (au moins 6
gique ». Elle n’est donc pas adaptée à la prise en charge des tumeurs à 8 cm) de pancréas pour qu’il assure une fonction endocrine
malignes mais au contraire, elle sera privilégiée dans le traite- et exocrine significative (Fig. 3A).
ment des tumeurs bénignes (cystadénome, TIPMP) ou de faible
malignité avec un faible risque d’envahissement ganglionnaire Mobilisation de l’isthme pancréatique
(idéalement des tumeurs neuroendocrines non fonctionnelles
asymptomatiques de moins de 2 cm pour lesquelles une indica- Au bord supérieur : isolement et éventuelle mise sur lacs de
tion aurait été retenue en RCP) [27, 32–34] . la faux de l’artère hépatique commune. En cas de suspicion de
La PM est une alternative à la pancréatectomie gauche, notam- malignité, on peut envoyer en examen anatomopathologique
ment pour les tumeurs à la jonction tête-isthme, et dont le extemporané de l’exérèse d’une ou de plusieurs adénopathie(s)
principal intérêt est de préserver le parenchyme pancréatique pour satellite(s). L’artère splénique est identifiée près de son origine,
limiter le risque d’insuffisance pancréatique exocrine (5–10 %) et sauf en cas d’inflammation importante ou d’abouchement de la
endocrine (4–5 %) [35] . Si intellectuellement cette technique est veine gastrique gauche dans la veine splénique en arrière de la
très séduisante, elle présente cependant un taux de complications jonction isthme-corps qui gênerait alors son contrôle. Dans ce
important (taux de complications globales entre 45–72 % dont cas, l’artère splénique sera disséquée à son origine ultérieurement,
18–23 % de complications graves Clavien-Dindo supérieur ou après section de l’isthme.
égal à IIIa) principalement du fait de l’existence d’une tranche Au bord inférieur : abaissement de la racine du mésocôlon trans-
pancréatique ainsi que d’une anastomose pancréaticodigestive, verse ce qui permet la sus-mésocolisation du pancréas (Fig. 3B).
souvent sur un pancréas « mou », et d’une large exposition vas- La face postérieure du pancréas est alors détachée du confluent
culaire en particulier de l’artère splénique. De ce fait, le risque de mésentéricoporte sous contrôle de la vue en combinant un abord
fistule pancréatique est très élevé (30 à 50 %) [33, 36] , avec des fis- par en haut et par en bas. La libération peut être poursuivie vers la
tules plus souvent symptomatique (grade B ou C), et la mortalité droite de manière à pouvoir faire porter la section du pancréas du
postopératoire est loin d’être négligeable : de 0,6 à 3 % [36] ce qui côté céphalique entre le bord droit de la tumeur et l’artère gastro-
est difficilement acceptable pour des tumeurs peu invasives chez duodénale dont le trajet doit être clairement identifié. En général,
des patients souvent jeunes [37–39] . Dans cette perspective, la sélec- compte tenu de la nature de la tumeur, des marges importantes
tion des malades est particulièrement importante, privilégiant des ne sont pas nécessaires.
patients sans comorbidités majeures (capables de supporter la sur-
morbidité de ce geste), à faible risque de fistule pancréatique et Section à droite de la tumeur
ayant un vrai bénéfice à long terme de la préservation des fonc- Le pancréas est sectionné 5 à 10 mm à gauche de l’artère gastro-
tions pancréatiques endocrine et exocrine. duodénale, en assurant l’hémostase par ligatures appuyées de fil
L’indication d’une PM nécessite donc une bonne caractérisation monobrin. L’artère gastroduodénale et l’arcade pancréaticoduo-
de la tumeur par imagerie et endoscopie éventuellement associée dénale antérosupérieure peuvent être disséquées en liant leurs
à une biopsie au moindre doute afin d’éviter de sous-traiter une collatérales, ou même si besoin (dans le cas où l’on souhaite
tumeur invasive ou de traiter par excès une tumeur totalement absolument éviter une DPC) être sacrifiées afin que la section
bénigne asymptomatique. Une étude topographique précise pré- pancréatique puisse se porter plus à droite, à proximité du cho-
opératoire est nécessaire, détaillant la taille et la localisation de la lédoque. Le parenchyme pancréatique est coupé aux instruments
lésion, appréciant ses rapports vasculaires avec le cholédoque et froids (ciseaux, bistouri) (Fig. 3C) et le canal de Wirsung est isolé
le canal de Wirsung, ainsi que la taille du pancréas restant devant puis sectionné après ligature élective sur son versant céphalique.
être de volume et fonction suffisante avec une longueur empi- La tranche pancréatique droite est enfin suturée à points séparés
rique d’au moins 6 à 7 cm. Un examen histologique extemporané ou par surjet de fil monobrin résorbable ou non, 4/0 ou 5/0. À la
sur les limites de résection et la lésion elle-même est également partie haute de la tranche droite, il faut veiller à ne pas léser le cho-
souhaitable au moindre doute. lédoque qui est attiré vers la gauche par traction sur l’isthme. En
cas de doute sur le repérage du cholédoque, il est prudent de faire
Geste opératoire une cholangiographie ou d’introduire une sonde par voie trans-
cystique. Lorsque la section pancréatique a été réalisée en arrière
Le patient est installé en décubitus dorsal sans billot. Selon la ou à droite de l’artère gastroduodénale, il est souvent risqué de
corpulence et la morphologie du patient, une incision médiane ou fermer la partie haute de la tranche sous peine de sténoser le cho-
bi-sous-costale sera réalisée, cette dernière devant être privilégiée lédoque. Si la section pancréatique peut se faire bien à distance de
si l’exérèse est large et/ou s’il existe une probabilité importante de l’artère gastroduodénale et du cholédoque, une alternative pos-
« conversion » en hémipancréatectomie droite ou gauche. L’abord sible consistera à sectionner le pancréas côté céphalique au moyen
laparoscopique ou robotique a été expérimenté pour cette inter- d’un agrafage avec pince GIA.
vention mais n’est à ce jour pas considéré comme un standard
de soin [40, 41] . L’exploration peropératoire initiale recherche plus Section à gauche de la tumeur
particulièrement des arguments en faveur d’une dissémination
La pièce est basculée vers la gauche puis progressivement libé-
hépatique ou ganglionnaire de la lésion, qui remettrait en cause
rée du confluent mésentéricoporte qui est mis à nu. L’exposition
l’indication d’une chirurgie d’épargne parenchymateuse.
peut être facilitée par l’introduction d’un dissecteur dans le canal
de Wirsung. La jonction isthme-corps est mobilisée par section
Abord du pancréas des vaisseaux pancréatiques inférieurs (collatérales des vaisseaux
Le pancréas est abordé par décollement coloépiploïque, pré- mésentériques supérieurs) et de l’artère pancréatique dorsale (nais-
servant la vascularisation du grand épiploon en vue d’une sant du bord inférieur du tronc cœliaque ou de l’origine de l’artère
épiplooplastie en fin d’intervention. Un décollement duodéno- splénique) (Fig. 3D). Puis la pièce est séparée de la veine et de
pancréatique selon la manœuvre de Kocher est inutile. Une l’artère spléniques, en liant ou en clippant leurs collatérales pan-
échographie peropératoire apprécie les rapports de la tumeur avec créatiques, sur une longueur suffisante pour obtenir une marge
le carrefour portal, ainsi que sa situation au sein de la glande avant saine à gauche de la lésion et permettre ensuite la réalisation
de confirmer l’indication de la PM. En effet, si la lésion est bénigne de l’anastomose pancréaticodigestive (Fig. 3E). La section de la
et à distance, c’est-à-dire à plus de 2 mm [42] du canal de Wir- tranche gauche se fait aux instruments froids (ciseaux ou bistouris)

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Pancréatectomies céphaliques et isthmiques avec préservation duodénale en alternative à la duodénopancréatectomie céphalique  40-880-F

et avec identification du canal de Wirsung. Le corps du pancréas histologique extemporané afin de s’assurer que les marges sont
est triangulaire à la coupe et son hémostase nécessite des ligatures saines. En cas de doute sur une lésion invasive, un examen his-
appuyées. tologique extemporané de la tumeur elle-même est indiqué pour
L’un des côtés (caudal ou céphalique) de la pièce est repéré par décider d’une éventuelle conversion en « hémipancréatectomie »
un fil avant d’être adressé en anatomie pathologique pour examen dont le « côté » (DPC ou pancréatectomie gauche) tiendra compte

Figure 3. Pancréatectomie médiane.


A. Étendue de l’exérèse. À droite, l’exérèse est le plus souvent limitée par l’artère gastroduodénale. À gauche, l’étendue de l’exérèse est limitée par le souci
de préserver un pancréas caudal permettant une fonction pancréatique appréciable, et qui soit anastomosable au tube digestif.
B. Mobilisation de l’isthme. L’artère hépatique a été mise sur lacs. Le péritoine de la racine du mésocôlon transverse est incisé au bord inférieur de l’isthme
et du corps. Le tunnel rétro-isthmique est fait de bas en haut. L’isthme est mis sur lacs pour faciliter la mobilisation de la jonction isthme-corps.
C. Section pancréatique à la jonction tête-isthme au bistouri froid ; l’axe veineux est protégé par une lame.
D. Mobilisation de la jonction isthme-corps de droite à gauche. La tranche céphalique a été suturée par ligature élective du canal de Wirsung et points séparés
sur le parenchyme. La jonction isthmocorporéale est progressivement séparée des vaisseaux spléniques dont les collatérales sont liées et sectionnées.
E. Section du pancréas à gauche de la tumeur. Elle est faite à environ 2 cm du point où s’est arrêtée la dissection des vaisseaux spléniques afin de favoriser la
réalisation ultérieure de l’anastomose.
F. Rétablissement de la continuité sur le pancréas corporéocaudal : anastomose pancréaticogastrique. Ce procédé est exclusivement sus-mésocolique.
G. Rétablissement de la continuité sur le pancréas corporéocaudal : anastomose pancréaticojéjunale sur anse en Y.

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40-880-F  Pancréatectomies céphaliques et isthmiques avec préservation duodénale en alternative à la duodénopancréatectomie céphalique

Figure 3. (suite) Pancréatectomie médiane.


H. Épiplooplastie recouvrant les vaisseaux cœliomésentériques et séparant les deux tranches pancréa-
tiques (la tranche corporéale est ici anastomosée à l’estomac).

de la latéralisation de la lésion et de l’examen extemporané des sont traitées comme celles compliquant les DPC, si besoin en
tranches de résection pancréatiques. suspendant l’alimentation per os.

Anastomose pancréaticodigestive
Le rétablissement de la continuité pancréaticodigestive peut
 Conclusion
être fait par anastomose pancréaticogastrique (Fig. 3F) ou moins En alternative à la DPC, les pancréatectomies céphaliques
fréquemment une anastomose pancréaticojéjunale sur anse en et isthmiques avec préservation duodénale sont des tech-
Y montée en transmésocolique terminoterminale ou terminola- niques chirurgicales intéressantes qui doivent faire partie de
térale (Fig. 3G). Le choix entre les deux techniques reste à la l’armamentarium du chirurgien pancréatique. Ces interventions,
discrétion du chirurgien : l’anastomose pancréaticogastrique réa-
lisée à la face postérieure de l’estomac a pour intérêt de limiter
l’intervention exclusivement à l’étage sus-mésocolique. Il n’existe
pas de différence évidente dans la littérature entre l’anastomose
pancréaticogastrique et pancréaticojéjunale sur le taux de fistule
anastomotique ou pancréatique ni sur le risque de saignement [33] ,
“ Points essentiels
à l’exception d’une récente méta-analyse sur 963 patients qui a
objectivé un taux de fistule pancréatique modérément plus faible
• Les pancréatectomies céphaliques ou isthmiques avec
après anastomose pancréaticojéjunale mais sans différence statis- préservation duodénale ont pour but commun de limi-
tiquement significative [37] . ter les séquelles fonctionnelles liées à la modification des
Cette anastomose peut se faire à points séparés ou par surjet circuits digestifs et biliodigestifs.
de fil monobrin 4/0 ou 5/0 selon l’épaisseur et la consis- • Le principal risque de la pancréatectomie subtotale est
tance du parenchyme. Plusieurs techniques ont été décrites pour la dévascularisation et/ou la blessure du cholédoque intra-
confectionner au mieux cette anastomose [43, 44] avec possibi- pancréatique et du duodénum.
lité d’intussusception du pancréas dans l’estomac. Les vaisseaux • La pancréatectomie subtotale avec préservation duo-
sous-muqueux gastriques sont liés électivement pour limiter le
dénale et l’intervention de Beger (ou pancréatectomie
risque d’hémorragie postopératoire. Afin de ne pas compromettre
l’exposition, les points sont noués en dehors en commençant par
céphalique avec préservation duodénale) sont toutes les
la partie crâniale de l’anastomose et une gastrotomie antérieure deux principalement indiquées dans la pancréatite chro-
peut être réalisée pour des raisons d’exposition si cela est néces- nique.
saire. En fonction du calibre du canal de Wirsung et de la texture • L’intervention de Beger (ou pancréatectomie cépha-
du parenchyme pancréatique, l’anastomose peut être intubée par lique avec préservation duodénale) est techniquement
un drain perdu ou externalisé (drain de type transcystique exté- difficile car nécessite d’exposer le l’axe veineux mésentéri-
riorisé par la face antérieure de l’estomac qui est elle-même fixée coporte, éventuellement la voie biliaire principale si elle est
au péritoine pariétal antérieur). sténosée, et de réaliser deux anastomoses pancréaticodi-
La réalisation d’une épiplooplastie recouvrant les vaisseaux gestives dans une région le plus souvent très inflammatoire
nous semble capitale, compte tenu de la mise à nue des vais-
et avec beaucoup d’adhérences.
seaux spléniques [45] . Le grand épiploon et/ou le ligament rond [46]
• La pancréatectomie médiane est principalement indi-
sont positionnés en avant du confluent portal, entre le moignon
pancréatique céphalique et l’anastomose pancréaticodigestive, de quée pour des tumeurs bénignes médiopancréatiques
manière à protéger les vaisseaux cœliomésentériques et surtout chez des patients très sélectionnés.
spléniques et à séparer les deux sutures pancréatiques (Fig. 3H). • La pancréatectomie médiane nécessite une seule ana-
Un système de drainage sera mis en place en fin d’intervention, stomose pancréaticodigestive mais crée deux sources
en drainant individuellement les deux sutures pancréatiques, par potentielles de fistule pancréatique.
exemple avec des lames multitubulées. Le drainage de la tranche • Le principal avantage de la pancréatectomie médiane
pancréatique céphalique sera extériorisé dans le flanc droit après par rapport à la pancréatectomie gauche est de supprimer
avoir abaissé l’angle colique droit, et celui de l’anastomose pan- le risque de diabète à distance.
créaticodigestive sera extériorisé à gauche, après avoir abaissé • Les « limites » techniques de la pancréatectomie
l’angle colique gauche. Il est souhaitable d’identifier la tranche
pancréatique à l’origine de la fistule car les fistules développées
médiane sont, à droite, la localisation de la lésion à droite
de façon certaine à partir de la tranche céphalique peuvent être de l’artère gastroduodénale et, à gauche, l’impossibilité de
traitées comme celles compliquant les pancréatectomies gauches préserver un segment pancréatique caudal de 6 à 8 cm de
(en particulier avec maintien de l’alimentation per os). Les fis- longueur.
tules développées à partir de l’anastomose pancréaticodigestive

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souvent rarement pratiquées, peuvent être techniquement diffi- [20] Beger HG, Schlosser W, Friess HM, Büchler MW. Duodenum-preserving
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Randomized trial of duodenum-preserving pancreatic head resection
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40-880-F  Pancréatectomies céphaliques et isthmiques avec préservation duodénale en alternative à la duodénopancréatectomie céphalique

[44] Bonds M, Rekman J, Rocha FG. Central pancreatectomy with pancreati- [46] Hassenpflug M, Hinz U, Strobel O, Volpert J, Knebel P, Diener MK,
cogastrostomy reconstruction: A brief report and video technique. Am J et al. Teres ligament patch reduces relevant morbidity after distal pan-
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tomy rates after pancreaticoduodenectomy with pancreaticogastrostomy. pic duodenum-preserving pancreatic head resection safely and efficiently
World J Surg 2012;36(7):1672–8. with innovative techniques. Ann Surg Oncol 2021;28(6):3209–16.

S. Gaujoux, Professeur des Universités, praticien hospitalier.


B. Acidi, CCA, Docteur.
C. de Ponthaud, CCA, Docteur.
Chirurgie pancréatique, hépatobiliaire, oncologique et endocrinienne, Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, AP–HP, Paris, France.
A. Sauvanet, Professeur des Universités, praticien hospitalier (alain.sauvanet@aphp.fr).
Service de chirurgie hépatobiliaire et pancréatique, Hôpital Beaujon, 100, boulevard Général-Leclerc, 92110, Clichy, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Gaujoux S, Acidi B, de Ponthaud C, Sauvanet A. Pancréatectomies céphaliques et isthmiques avec
préservation duodénale en alternative à la duodénopancréatectomie céphalique. EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif 2022;39(1):1-10 [Article
40-880-F].

10 EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif

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 40-880-G

Énucléation pancréatique
S. Gaujoux, B. Acidi, S. Dokmak, A. Sauvanet

Résumé : L’énucléation pancréatique est une technique qui est habituellement réservée aux seules
tumeurs pancréatiques bénignes situées suffisamment à distance du canal pancréatique principal. Un
bilan préopératoire précis, visant à caractériser la lésion et ses rapports avec le canal pancréatique
principal, est donc nécessaire, et est complété par une échographie peropératoire. L’énucléation est une
intervention permettant un taux de guérison élevé et la préservation de la fonction pancréatique exocrine
et endocrine, au prix cependant d’une morbidité immédiate significative essentiellement représentée par
la fistule pancréatique.
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Mots-clés : Énucléation pancréatique ; Canal pancréatique principal ; Échographie peropératoire ;


Tumeur neuroendocrine ; Insulinome

Plan rang desquelles les tumeurs neuroendocrines et certaines tumeurs


kystiques [1, 2, 4, 5] (Tableau 1).
■ Introduction 1 Afin d’être énucléable, la lésion doit être bien limitée,

et ne comporter aucune composante invasive susceptible de
Indications 2
compromettre le caractère complet d’une simple tumorectomie
Tumeurs neuroendocrines 2
(envahissement de la marge de résection, envahissement endo-
Tumeurs kystiques 2
vasculaire ou périnerveux, a fortiori métastase ganglionnaire ou
Autres indications 2
viscérale) (Tableau 1). Un diagnostic aussi précis que possible doit
Extension des indications 3
être disponible en préopératoire, éventuellement complété par un
■ Technique 3 examen extemporané.
Principes généraux 3 Afin de minimiser le risque de complications, l’énucléation ne
Voie d’abord, exploration abdominale et exposition 3 doit pas traumatiser (plaie directe, dévascularisation, lésion ther-
Exploration pancréatique 4 mique) le canal pancréatique principal afin d’éviter la formation
Énucléation 5 d’une fistule pancréatique compliquée (par exemple d’hémorragie
Traitement de « cavité » d’énucléation 6 ou d’un pseudokyste) ou prolongée, ou d’une sténose postopéra-
En cas de problème 6 toire qui pourrait être responsable de pancréatite [4, 6, 7] ou d’une
■ Suites opératoires 7 atrophie pancréatique d’amont. En général, une distance de sécu-
rité d’au moins 2 mm est recommandée [7] .
Il n’est pas indispensable que la lésion affleure la capsule pan-
créatique ou qu’elle soit exophytique, même si cela rend plus facile
et moins morbide l’énucléation. En effet, si la lésion est profonde,
 Introduction elle peut être repérée par échoendoscopie [8] et échographie per-
opératoire et abordée électivement par incision du parenchyme
Du fait de leur morbidité postopératoire significative et de leurs pancréatique à l’endroit où elle est la plus superficielle. La locali-
conséquences fonctionnelles à distance (insuffisance pancréa- sation de la tumeur par rapport au canal pancréatique principal
tique exocrine, endocrine, confort digestif), les pancréatectomies repose sur la scannographie, mais surtout l’imagerie par réso-
« réglées » (duodénopancréatectomie céphalique [DPC] et pan- nance magnétique (IRM) avec séquences de pancréato-IRM 2D
créatectomie gauche) sont considérées comme discutables ou et 3D de qualité et/ou l’échoendoscopie, qui reste un examen
excessives pour des lésions bénignes. L’énucléation pancréatique, opérateur dépendant. En peropératoire, l’absence de plan de cli-
qui consiste en une résection tumorale sans résection parenchy- vage individualisable, une plaie du canal pancréatique principal,
mateuse adjacente et donc de principe R1, a vu ses indications la constatation d’une métastase ganglionnaire, et la mise en évi-
se développer du fait du diagnostic souvent précoce des tumeurs dence par l’examen extemporanée d’une lésion « plus agressive »
bénignes, solides ou kystiques, grâce à la large diffusion de que prévu constituent une indication à convertir l’intervention en
l’imagerie en coupe [1–3] . pancréatectomie « réglée » (DPC, pancréatectomie gauche ou plus
L’énucléation pancréatique comporte un risque significatif de rarement pancréatectomie médiane). Le résultat de l’histologie
fistule pancréatique mais est justifiée par un très faible taux de réci- définitive peut également faire décider d’une réintervention pré-
dive et d’excellents résultats fonctionnels à distance, sous réserve coce ou différée, dont le patient doit être prévenu, sauf en cas
d’une indication bien posée et d’un geste correctement réalisé. Ses de contre-indication technique ou générale à une exérèse plus
indications sont représentées par des lésions bénignes au premier large.

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40-880-G  Énucléation pancréatique

Tableau 1.
Principales tumeurs pancréatiques énucléables.
Principales tumeurs pancréatiques énucléables
Insulinome
Tumeur neuroendocrine non fonctionnelle asymptomatique de moins
de 2 cm
Tumeurs intrapapillaires et mucineuses du pancréas des canaux
secondaires
Cystadénome séreux symptomatique
Cystadénome mucineux non dégénéré
Tumeur solide et pseudopapillaire

Figure 1. Cystadénome mucineux du corps du pancréas : imagerie par


 Indications résonance magnétique en séquence T1 après injection de gadolinium. La
formation kystique (flèche) est légèrement à distance du canal pancréa-
tique principal (têtes de flèches) qui est refoulé, non sténosé. Ces rapports
Tumeurs neuroendocrines anatomiques autorisent une énucléation.
Insulinome
Une énucléation n’est logique qu’en cas de tumeur bien dif-
férenciée et bénigne. Les insulinomes qui sont des tumeurs le Tumeurs intrapapillaires et mucineuses
plus souvent uniques, de petite taille, et bénignes dans 90 à 95 % du pancréas des canaux secondaires
des cas [6, 9] sont donc une des meilleures indications. Un repé- Les tumeurs intrapapillaires et mucineuses du pancréas (TIPMP)
rage anatomique précis, le plus souvent obtenu en préopératoire sont des tumeurs kystiques dont le diagnostic est de plus en plus
par l’association échoendoscopie éventuellement avec produit de fréquent. Si la plupart de ces lésions, et en particulier celles des
contraste et scanner pancréatique injecté [10] , est nécessaire. La canaux secondaires, peuvent être surveillées, certaines nécessitent
survie globale et la survie sans récidive à 5 ans des insulinomes une résection prophylactique, avec des indications maintenant
sont d’environ 90 % [6, 9, 11] . de mieux en mieux codifiées [1, 2] . C’est en particulier le cas pour
Les autres tumeurs neuroendocrines sécrétantes, que ce soient les lésions augmentant de taille et associées à la présence d’un
les gastrinomes, ou plus rarement les glucagonomes ou les pep- nodule mural ou de symptômes. La taille de la lésion ne consti-
tides vasoactifs intestinaux (VIPome), sont associées à un risque tue pas en soi une indication chirurgicale et différents seuils ont
métastatique en particulier ganglionnaire élevé, ce qui en fait des pu être proposés (3 ou 4 cm). Une TIPMP non infiltrante et limi-
contre-indications à une énucléation [6, 9] . tée à un canal secondaire peut donc être énucléée, en particulier
si l’on souhaite éviter une résection céphalique si cette lésion
Tumeurs neuroendocrines non fonctionnelles est symptomatique ou considérée comme à risque important de
Le risque métastatique ganglionnaire associé aux tumeurs neu- dégénérescence. Tout doit bien sûr avoir été mis en œuvre en pré-
roendocrines non fonctionnelles est lié à la taille de la lésion, son opératoire pour éliminer une TIPMP infiltrante (échoendoscopie
grade histologique [12] , son caractère symptomatique et son reten- et ponction si nécessaire), et au moindre doute en peropératoire
tissement canalaire [13, 14] . Il est logique de réserver l’énucléation un examen extemporané doit être demandé pour pouvoir, dans
aux tumeurs de découverte fortuite, de taille inférieure à 2 cm, le cas échéant, convertir une énucléation en résection oncolo-
sans retentissement canalaire après un bilan d’imagerie exhaustif gique. Les indications doivent être sélectives en particulier pour
(incluant une échoendoscopie et éventuelle ponction et imagerie des lésions symptomatiques responsables de pancréatite aiguë à
des récepteurs de la somatostatine) afin d’éliminer la présence de répétition. L’énucléation se fait en prenant contact avec les parois
métastases en particulier ganglionnaires ou à distance. À distance, du kyste, avec une dissection prudente. Un soin tout particu-
le pronostic des tumeurs neuroendocrines pancréatiques traitées lier est porté à l’hémostase et à la pancréatostase. À la fin, le
par énucléation est excellent sous réserve d’une indication bien canal communicant sur lequel est pédiculée la lésion est électi-
posée et d’une bonne sélection des patients. vement lié ou clippé [22–24] . Un examen extemporané confirme
l’absence de caractère invasif de la lésion et l’absence de dysplasie
de haut grade sur le canal communicant. Si ce canal secondaire est
Tumeurs kystiques limité au crochet, l’énucléation est une alternative à la DPC. Cette
chirurgie canalaire de lésion kystique doit être particulièrement
Cystadénomes séreux minutieuse et est associée à un risque de fistule en général plus
Les cystadénomes séreux ne sont habituellement opérés qu’en important.
cas de doute diagnostique ou de symptômes [15, 16] sous réserve que
ceux-ci soient spécifiquement liés à la lésion [17] . Leur dégénéres-
cence est très exceptionnelle. Ils peuvent donc être énucléés s’ils
sont situés à distance du canal pancréatique principal [15] . Autres indications
Une énucléation est également possible en cas de kyste congéni-
Cystadénomes mucineux tal, de lymphangiome, de kyste hydatique, de tumeurs endocrines
Le risque de dégénérescence des cystadénomes mucineux est multiples voire de métastases multiples de cancer du rein (dans
corrélé à leur taille et la présence de nodule murales. Pour des ces deux dernières indications, l’énucléation sert à préserver du
lésions de moins de 4 cm en l’absence de nodule muraux ce risque parenchyme pancréatique du côté le moins atteint pour éviter
peut être considéré comme nul [1, 5, 18] . Si les dernières recomman- une pancréatectomie totale).
dations européennes [17] proposent, sous certaines conditions, la Les tumeurs solides et pseudopapillaires ne constituent habi-
surveillance de ces lésions, la règle reste leur résection, ce d’autant tuellement pas une indication à une énucléation, compte tenu
qu’elles se présentent le plus souvent dans le pancréas distal chez d’un possible caractère infiltrant de ces lésions [23, 25–27] . Il existe
des femmes jeunes [5, 19–21] . En pratique, une énucléation est pos- cependant une littérature de plus en plus abondante sur les pos-
sible en l’absence d’arguments en faveur de la dégénérescence sibilités d’énucléations de tumeurs solides et pseudopapillaires.
et sous couvert au moindre doute d’un examen histologique Une attention toute particulière doit être portée à ne pas rompre
extemporané (Fig. 1). Pour les lésions situées le plus à gauche ces tumeurs au cours de leur dissection, sous peine de récidive
l’alternative reste une pancréatectomie caudale. locorégionale et péritonéale.

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Énucléation pancréatique  40-880-G

Extension des indications


Afin de pousser les indications d’énucléation aux lésions situées
à moins de 2 mm du canal pancréatique principal, il a été proposé
de mettre en place en préopératoire par voie endoscopique un
stent dans le canal pancréatique principale. Celui-ci permettrait
une meilleure identification du canal de Wirsung en peropéra-
toire, sa protection et sa « tuteurisation » en cas de lésion [28] .
De même, pour de petites lésions, infracentimétriques, et diffi-
cilement repérables, un fiduciaire peut être posé en préopératoire
sous contrôle endoscopique, afin de mieux repérer la lésion en
peropératoire [8] .

 Technique
Principes généraux
2
L’intervention ne doit réséquer que la seule lésion tumorale,
en la séparant progressivement du parenchyme adjacent. Il s’agit 4
donc d’une résection R1 de principe. Toute résection parenchy- 3
1
mateuse contiguë, surtout en profondeur, peut entraîner une plaie
vasculaire ou canalaire.
Le repérage précis du canal pancréatique principal nécessite
une échographie peropératoire. Elle doit être faite au début de
l’intervention car elle est ensuite « artefactée » lorsque l’exérèse
commence, du fait de l’air présent dans la « tranche ».
L’hémostase des petits vaisseaux situés dans la cavité
Figure 2. Voies d’abord pour énucléation. Pour une localisation
d’énucléation et la « pancréatostase » doit être une préoccupation
médiane ou profonde, la voie d’abord est une incision médiane sus-
constante afin de garder une bonne visibilité et de limiter le risque
ombilicale (1) ou une incision bi-sous-costale (2). En cas de lésion
d’hémorragie secondaire en cas de fistule pancréatique. Celle-ci
latéralisée chez un sujet mince, on peut préférer une incision latérale hori-
peut être faite par des ligatures électives, un courant bipolaire, ou
zontale droite (3) en cas de localisation céphalique, ou gauche (4) en cas
la thermofusion.
de localisation corporéocaudale.
La possibilité d’une pancréatectomie « réglée » doit être gardée
à l’esprit en cas de difficulté ou de découverte peropératoire d’une
contre-indication à l’énucléation. besoin la rate, de la loge rénale gauche. Il est à noter que la taille
Compte tenu de la finesse nécessaire à ces dissections, de la lésion n’est pas en soi une contre-indication à l’énucléation
l’utilisation de loupe binoculaire (grossissement × 2,5) peut (Fig. 3).
s’avérer utile.

Laparoscopie
Voie d’abord, exploration abdominale Il est d’abord important de rappeler que la voie d’abord utilisée
et exposition ne doit pas influencer les indications opératoires. La laparosco-
pie associée à une échographie laparoscopique peropératoire est
Laparotomie fréquemment préférée à la laparotomie pour réaliser une énucléa-
Du fait des performances actuelles de l’imagerie, une explora- tion sous réserve de l’expertise de l’opérateur. Elle est d’autant
tion complète du pancréas est devenue inutile (sauf cas particulier plus facile à réaliser que la lésion est antérieure, superficielle,
de la néoplasie endocrinienne multiple de type 1). L’incision peut voire exophytique et bien sûr à distance du canal pancréatique
donc être adaptée à la localisation (droite, gauche, ou médiane) principal et de la voie biliaire intrapancréatique. En plus de son
de la lésion, à son accessibilité (lésion antérieure et superficielle, intérêt esthétique et pariétal, la laparoscopie permet une dimi-
ou lésion plus profonde ou postérieure), et au morphotype du nution des douleurs postopératoires et de raccourcir la durée
patient. En règle, une incision médiane peut être préférée chez d’hospitalisation [29–33] . Elle ne permet, en revanche, pas de réduire
un patient longiligne ayant une lésion peu latéralisée et plutôt le taux de fistule pancréatique postopératoire responsable de la
superficielle (Fig. 2). Dans les autres cas, une incision sous-costale, majeure partie de la morbidité.
parfois très courte et horizontalisée, est utilisée (Fig. 2). L’installation se fait en règle jambes écartées, l’opérateur étant
L’exploration de la cavité abdominale doit idéalement placé entre les jambes du patient [29] . Compte tenu de la difficulté
comprendre l’inspection du péritoine et l’exploration hépatique potentielle du geste, il peut être utile d’être aidé par un cer-
mais la petite taille de la voie d’abord peut l’empêcher. tain nombre d’innovations techniques : insufflation par AirSeals®
En fonction de la localisation tumorale, le pancréas est abordé pour éviter les problèmes de fumées, caméra 3D ou articulée.
par abaissement de la racine du mésocôlon transverse droit, décol- Une position proclive permet d’améliorer l’exposition en abais-
lement coloépiploïque, section du ligament gastrocolique, et/ou sant le mésocôlon. Une inclinaison latérale droite ou gauche
abaissement de l’angle colique gauche. Exceptionnellement, en améliore l’exposition des deux extrémités du pancréas [30, 34] . On
cas de lésion médiane (isthmocorporéale) antérieure et superfi- utilise habituellement quatre à cinq trocarts, dont au minimum
cielle, l’ouverture de la pars flacida de l’épiploon gastrohépatique deux de 10 mm et deux de 5 mm. L’optique est introduite par
(petit épiploon) peut suffire. Pour énucléer une lésion antérieure le trocart ombilical ou sus-ombilical, selon la distance xypho-
du crochet, une mobilisation de la veine mésentérique supérieure ombilicale. Latéralement, dans le flanc gauche, un trocart de
(en liant et sectionnant ses collatérales) et de la jonction duodéno- 10 mm permet l’introduction de l’écholaparoscope et, si néces-
jéjunale (en sectionnant entre ligatures le ligament de Treitz) doit saire, d’instruments de thermofusion. Les autres orifices latéraux
parfois être associée au décollement duodénopancréatique afin de permettent l’introduction de pinces fenêtrées pour l’exposition,
dégager le crochet des vaisseaux mésentériques. Pour énucléer une ou d’une coagulation bipolaire (Fig. 4).
lésion postérieure de la tête, une large manœuvre de Kocher est Le pancréas isthmocorporéal est exposé par section du ligament
nécessaire. Enfin, l’abord de la face postérieure du corps et de la gastrocolique en veillant à ne pas léser l’arcade de la grande cour-
queue du pancréas nécessite la mobilisation du mésogastre posté- bure, le mésocôlon ou l’arcade colique. L’estomac est récliné vers
rieur en décollant le pancréas, avec les vaisseaux spléniques et si le haut par l’aide, un bras de Martin ou exposé à l’aide de lacs

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40-880-G  Énucléation pancréatique

A B C
Figure 3. Énucléation d’une volumineuse tumeur solide et pseudopapillaire céphalique.
A. Vue scanographique de la lésion.
B. Vue opératoire.
C. Vue après énucléation.
D. Vue de la pièce opératoire.

introduits par un dispositif de type Endo CloseTM [35] . Pour exposer


la queue du pancréas, il faut associer à la précédente manœuvre un
abaissement de l’angle colique gauche et, si nécessaire, un décol-
lement du mésogastre postérieur. Enfin, la face antérieure de la
tête est exposée par décollement coloépiploïque puis abaissement
du mésocôlon transverse droit et de l’angle colique droit.
Une fois la lésion exposée, la dissection se fait de la même façon
que par laparotomie, c’est-à-dire au contact de la lésion, en uti-
lisant pince bipolaire ou ciseaux et thermofusion. Un fil passé
par la lésion et tracté par l’aide peut être utile à son exposition.
Il convient là encore de porter une attention toute particulière à
l’hémostase, et une instrumentation spécifique (bipolaire triangu-
laire, à bout fin) peut être utile.
L’abord laparoscopique pour énucléation est surtout indi- 3
qué pour des lésions relativement superficielles et facilement
accessibles (les deux bords et face antérieure) ou ayant un dévelop-
pement plutôt exopancréatique du pancréas gauche. En revanche,
les lésions plus profondes, moins accessibles (bord supéroposté-
4
rieur) ou profondes dans la tête du pancréas relèvent plutôt d’un 2
abord par laparotomie car l’exposition, le repérage et les gestes de 1
dissection et d’hémostase sont plus difficiles dans ces localisations
tumorales.
Enfin, les énucléations des lésions de TIPMP se prêtent peu à
l’abord laparoscopique car il faut disséquer et ligaturer élective-
ment le canal communicant parfois au ras du canal principal sans
rentrer dans la lésion [22, 23] .
Figure 4. Énucléation par laparoscopie : position des trocarts permet-
tant l’énucléation d’une tumeur corporéocaudale. 1. Trocart de 10 mm
Assistance robotique pour l’introduction de l’optique ; 2. trocart de 10 mm : écholaparosco-
pie + trocart opérateur + extériorisation de la pièce ; 3. trocart de 5 mm
L’assistance robotique chirurgicale présente une avancée tech- épigastrique pour rétraction de l’estomac et du grand épiploon ; 4. trocart
nique et technologique majeure des 10 dernières années. Elle de 5 mm du flanc droit : exposition et préhension de la tumeur.
permet au chirurgien de proportionner l’amplitude de ses gestes,
d’améliorer leur finesse et leur précision. La vision du champ opé-
ratoire est elle aussi magnifiée et tridimensionnelle. Les systèmes Dans le cas des énucléations pancréatiques, des recommanda-
actuels souffrent encore cependant de leur accessibilité réduite, tions internationales affirment la faisabilité du geste robotique
d’un coût important et de l’absence de retour de force. avec cependant un faible niveau de preuve (grade 2C), applicable
Les indications de chirurgie pancréatique par assistance robo- pour les tumeurs bénignes, de taille inférieure à 2 cm, ayant une
tique sont aujourd’hui discutées ; il a cependant été montré une distance supérieur à 2 mm avec le canal pancréatique principal [37] .
non-infériorité en comparaison à la laparotomie pour ce qui est
des résultats oncologiques [36] . Comparée à la laparoscopie plu-
sieurs études ont montré, si ce n’est la supériorité en tout cas Exploration pancréatique
l’égale faisabilité de l’assistance robotique [31] , une supériorité
en termes de perte sanguine, de temps opératoire, de préserva- La palpation de la lésion pancréatique aide à sa localisation mais
tion splénique et de nombre de ganglions réséqués [31] . Il faut n’est habituellement d’aucune aide pour apprécier les rapports de
cependant souligner l’absence d’étude prospective randomisée de la lésion. L’échographie peropératoire est pour cela indispensable.
qualité validant l’intérêt de la chirurgie robotique. La formation de l’image peut être améliorée par immersion dans

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Énucléation pancréatique  40-880-G

C
Figure 5. Technique de l’échographie peropératoire.
A. Sonde posée sur le parenchyme pancréatique, sans effet compressif, et irrigation du champ opératoire au sérum physiologique facilitant la propagation
des ultrasons.
B. En cas de tumeur superficielle, interposition d’un doigt de gant rempli de sérum physiologique pour faciliter la propagation des ultrasons.
C. Vue opératoire : échographie peropératoire.

Figure 6. Aspect échographique peropératoire.


A. Échographie peropératoire d’une tumeur endo-
crine : une lame de parenchyme pancréatique
(flèche) est présente entre la lésion (astérisque) et
le canal pancréatique principal (têtes de flèches) ;
une énucléation est techniquement possible.
B. Échographie peropératoire d’une tumeur endo-
crine : la tumeur vient au contact du canal
* pancréatique principal (flèches) : il s’agit d’une
contre-indication à l’énucléation. Aspect d’une
prothèse pancréatique (astérisque) à distance
d’une lésion kystique.

A B

du sérum physiologique ou en éloignant la sonde du pancréas par lique et plus particulièrement du crochet est parfois plus facile
l’intermédiaire d’un gant ou d’un doigt de gant en latex rempli de en plaçant la sonde à la face postérieure du pancréas. Un contact
sérum physiologique et fermé par une ligature (Fig. 5). Il faut faire intime de la lésion et du canal pancréatique, en général moins de
attention de ne pas trop appuyer sur le pancréas avec la sonde 2 mm, contre-indique l’énucléation (Fig. 7).
au risque de collaber le canal pancréatique principal et les élé- L’écholaparoscopie est très importante du fait du caractère peu
ments veineux intra- ou péripancréatiques. Certains patients ont informatif de la palpation instrumentale [38] et doit être menée
un pancréas graisseux et/ou fibreux, se traduisant par un aspect selon les mêmes principes. L’étude échographique n’est cepen-
hétérogène gênant la visualisation du Wirsung. Le canal pancréa- dant pas faisable dans tous les plans de l’espace du fait du point
tique principal est plus facile à repérer au niveau de l’isthme avec « fixe » constitué par l’orifice d’introduction du trocart. Ceci peut
des contours très légèrement échogènes (Fig. 6) et son contenu expliquer que les énucléations par laparoscopie pour insulinome
transsonore est d’autant plus facile à visualiser que la sonde ne sont associées à un taux de conversion en laparotomie pour défaut
comprime pas le pancréas. La présence d’un stent pancréatique de localisation compris entre 5 et 10 % [29, 31, 32] .
facilite bien entendu le repérage du canal pancréatique principal.
Le canal est ensuite suivi vers la gauche où son trajet est gros-
sièrement rectiligne mais son calibre plus fin. À ce niveau, une
Énucléation
boucle de l’artère splénique, pouvant barrer l’accès au bord supé- Si la lésion est superficielle, l’exérèse débute en identifiant le
rieur ou à la face antérieure, peut être repérée par ses battements plan de clivage entre la tumeur et le parenchyme avoisinant. Si
et l’aide du Doppler. Dans la tête, le canal est plus large mais le la lésion est profonde, n’affleurant pas la capsule, elle est repérée
trajet est souvent sinueux ; toutefois, en suivant la voie biliaire par la palpation et l’échographie peropératoire. Le parenchyme est
intrapancréatique, il est possible de repérer également le canal incisé à l’endroit où la lésion est la plus superficielle, en veillant
pancréatique principal à sa terminaison. L’échographie cépha- à éviter de blesser le canal pancréatique principal. Par exemple,

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40-880-G  Énucléation pancréatique

A B
Figure 7.
A. Énucléation d’une tumeur n’affleurant pas la capsule pancréatique : le plan de clivage est trouvé après incision du parenchyme pancréatique.
B. Aspect postopératoire après énucléation d’une lésion profonde au contact de l’artère gastroduodénale.

clips, coagulation bipolaire ou thermofusion ; le spécimen est


tracté de façon atraumatique par une pince ou un fil monobrin
serti puis extériorisé dans un sac via un des orifices de trocarts.
La confirmation du diagnostic par une histologie extempora-
née est utile. En cas de petit insulinome qu’il est parfois difficile
de différencier macroscopiquement d’un lobule pancréatique, cet
examen affirme la nature neuroendocrine de la lésion. Dans les
autres cas, il vérifie la bénignité de la lésion.
Une cholécystectomie de principe peut être réalisée pour préve-
nir le risque de réintervention pour lithiase vésiculaire néoformée,
dont la survenue est favorisée en cas de fistule pancréatique par
les effets conjugués du jeûne et des analogues de la somatostatine.
Elle peut aussi permettre l’introduction d’un drain transcystique,
Figure 8. Énucléation pancréatique. Vue opératoire d’une énucléation qui permettra de repérer plus facilement dans la tête du pancréas
pancréatique de la face postérieure de la tête, après manœuvre de Kocher ; la voie biliaire principale, si la lésion est à proximité ou à son
une bonne exposition est assurée par une traction, utilisant les points en contact.
X.

Traitement de « cavité » d’énucléation


une lésion céphalique profonde située à proximité de la papille
doit être abordée par en avant car, à ce niveau, le canal principal La cavité est inspectée pour éventuel complément d’hémostase
et la voie biliaire sont proches de la face postérieure du pan- et recherche d’un écoulement de type pancréatique. Une nouvelle
créas (Fig. 8). La section entre ligatures d’un vaisseau pancréatique échographie peut vérifier l’intégrité du canal principal. Un drai-
superficiel peut permettre d’agrandir l’incision pancréatique et de nage de la cavité d’énucléation est habituellement laissé en place.
faciliter l’exposition sur la loge d’énucléation, celle-ci pouvant Ce drainage peut être ouvert (lame souple) ou fermé (drain aspira-
ensuite être menée comme habituellement. tif ou non). La mise en place d’un lambeau épiploïque en regard
Les tumeurs solides sont tractées de façon atraumatique par les de la cavité d’énucléation a été proposée pour diminuer le risque
tissus fibreux la recouvrant ou par un point en U de fil monobrin. de fistule mais l’efficacité de ces mesures n’est pas démontrée [39]
Les tumeurs kystiques doivent être tractées par leur superficie, en de même que l’utilisation de topique hémostatique.
veillant à ne pas les traumatiser, ou par un point en U passé de
façon superficielle sur la paroi. Si nécessaire, les gros vaisseaux En cas de problème
situés à proximité (veine mésentérique supérieure, artère et veine
splénique) peuvent être mobilisés après ligature-section de leurs Une tumeur mal limitée, ou entourée de phénomènes inflam-
collatérales ou tractés par des lacs. matoires marqués, peut obliger à préférer une pancréatectomie
En laparotomie, le plan de clivage entre la lésion et le paren- « réglée » et ce dès le début du geste. La principale complication
chyme avoisinant est amorcé aux ciseaux froids, utilisés si besoin de l’énucléation est la plaie du canal principal [20] diagnostiquée
comme spatule. On peut aussi utiliser le dissecteur à ultrasons par l’inspection et/ou l’échographie peropératoire. Le traitement
sans que la supériorité de cette technique ne soit démontrée. Les dépend de la localisation. À gauche, il faut convertir l’intervention
hémostases sont faites au fil serti, à la pince bipolaire, par clips en pancréatectomie gauche ou caudale, si possible sans splénec-
ou par thermofusion. Une exposition atraumatique sur le fond tomie (avec ou sans conservation des vaisseaux spléniques). Au
de la cavité d’énucléation peut être obtenue en utilisant les liga- niveau isthmique ou isthmocorporéal, il faut préférer une pan-
tures hémostatiques comme des fils tracteurs légèrement tendus créatectomie médiane plutôt qu’une pancréatectomie gauche afin
en « couronne ». de permettre le meilleur résultat fonctionnel à distance, en parti-
Il est important, en particulier en profondeur, de ne pas perdre culier pour limiter le risque de diabète.
le plan de l’énucléation en rentrant dans le parenchyme pancréa- En cas de plaie du canal pancréatique principal céphalique, il
tique, ce qui risque d’entraîner une plaie du canal pancréatique faut dans un premier temps vérifier la topographie de la lésion
principal. Si cela se produit en un secteur, il faut reprendre la canalaire (par échographie peropératoire, voire opacification au
dissection dans le bon plan dans un secteur proche pour mieux travers de la plaie canalaire) pour éliminer une plaie du canal de
délimiter l’éperon de parenchyme mobilisé avec la lésion. Cet Santorini ou d’un canal du crochet dont le traitement serait une
éperon peut ensuite être lié ou clippé, en particulier en cas de simple ligature et un drainage au contact. Si l’atteinte du canal
tumeur endocrine dont le caractère hypervasculaire se traduit par principal est confirmée et comporte une perte de substance, on a
la présence d’artérioles ou veinules dilatées en périphérie, puis le choix entre une conversion immédiate en DPC, ou un drainage
sectionné à proximité immédiate de la lésion. au contact (en s’aidant éventuellement d’une intubation du canal
Par laparoscopie, le plan de l’énucléation est trouvé avec les de Wirsung par endoprothèse pour faciliter la cicatrisation). Cette
ciseaux, et peut ensuite être suivi en utilisant les ciseaux ou une plaie canalaire peut alors aboutir à la constitution d’un pseudo-
pince bipolaire comme spatule. Les hémostases sont faites par kyste qui peut être drainé secondairement par voie chirurgicale

6 EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif

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Énucléation pancréatique  40-880-G

ou endoscopique, ou plus rarement à une sténose responsable de  Références


pancréatites à répétition ou d’une atrophie du pancréas d’amont.
La réalisation immédiate d’une anastomose pancréaticojéjunale [1] Crippa S, Bassi C, Salvia R, Falconi M, Butturini G, Pederzoli P. Enu-
sur anse en Y patchant la cavité d’énucléation n’a pas d’intérêt cleation of pancreatic neoplasms. Br J Surg 2007;94(10):1254–9.
démontré dans cette indication et risque de transformer une fis- [2] Huttner FJ, Koessler-Ebs J, Hackert T, Ulrich A, Buchler MW, Diener
tule externe en fistule pancréaticodigestive de prise en charge plus MK. Meta-analysis of surgical outcome after enucleation versus standard
difficile. resection for pancreatic neoplasms. Br J Surg 2015;102(9):1026–36.
[3] Gaujoux S, Brennan MF, Gonen M, D’Angelica MI, DeMatteo R, Fong
Y, et al. Cystic lesions of the pancreas: changes in the presentation and
 Suites opératoires management of 1,424 patients at a single institution over a 15-year time
period. J Am Coll Surg 2011;212(4):590–600, discussion -3.
La mortalité des énucléations est très basse, inférieure à [4] Strobel O, Cherrez A, Hinz U, Mayer P, Kaiser J, Fritz S, et al. Risk
1 % [1, 6, 7] . Toutefois, la mortalité opératoire doit idéalement être of pancreatic fistula after enucleation of pancreatic tumours. Br J Surg
nulle car ces interventions s’adressent à des lésions bénignes et 2015;102(10):1258–66.
sont souvent indiquées dans le but de prévenir la dégénérescence. [5] Faitot F, Gaujoux S, Barbier L, Novaes M, Dokmak S, Aussilhou B, et al.
Reappraisal of pancreatic enucleations: a single-center experience of 126
La principale complication précoce des énucléations est la fis-
procedures. Surgery 2015;158(1):201–10.
tule pancréatique, dont la prévalence est d’environ 30 % [1, 6, 7] et
[6] Nikfarjam M, Warshaw AL, Axelrod L, Deshpande V, Thayer SP, Ferrone
qui peut se compliquer d’hémorragie mettant en jeu le pronostic CR, et al. Improved contemporary surgical management of insulinomas:
vital. a 25-year experience at the Massachusetts General Hospital. Ann Surg
Les énucléations pour TIPMP des canaux secondaires, qui néces- 2008;247(1):165–72.
sitent un geste canalaire (suture du canal communiquant avec le [7] Brient C, Regenet N, Sulpice L, Brunaud L, Mucci-Hennekine S, Carrere
canal principal), semblent associées à un risque de fistule pancréa- N, et al. Risk factors for postoperative pancreatic fistulization subsequent
tique plus élevé [22, 23] . to enucleation. J Gastrointest Surg 2012;16(10):1883–7.
Le traitement des fistules pancréatiques après énucléation [8] Gaujoux S, Genc S, Leblanc S, Dousset B, Prat F. Insulinoma enu-
repose sur la diminution du débit des sécrétions pancréatiques cleation after echoendoscopic fiducial placement. Gastrointest Endosc
(par nutrition entérale continue ou nutrition parentérale totale, 2018;87(2):615–6.
éventuellement associée à la somatostatine et ses analogues), et [9] Sauvanet A. Gastroenteropancreatic neuroendocrine tumors: role of sur-
un drainage au contact efficace évitant la formation de collections gery. Ann Endocrinol 2019;80(3):175–81.
ou d’abcès. Ce drainage peut être celui laissé en fin d’intervention [10] Gouya H, Vignaux O, Augui J, Dousset B, Palazzo L, Louvel A,
et al. CT, endoscopic sonography, and a combined protocol for preo-
ou un drainage posé secondairement sous contrôle radiologique.
perative evaluation of pancreatic insulinomas. AJR Am J Roentgenol
Une fistule après énucléation est en règle de débit inférieur à 2003;181(4):987–92.
100 ml/j. Les fistules à faible débit (< 50 ml/j) peuvent être [11] Cherif R, Gaujoux S, Couvelard A, Dokmak S, Vuillerme MP,
traitées en ambulatoire par maintien de l’alimentation per os, Ruszniewski P, et al. Parenchyma-sparing resections for pancreatic neu-
analogues de la somatostatine retard et retrait progressif du drain roendocrine tumors. J Gastrointest Surg 2012;16(11):2045–55.
lorsque le débit tend à diminuer. Certaines fistules se compliquent [12] Altimari M, Abad J, Chawla A. The role of oncologic resection and
d’hémorragie et nécessitent alors une embolisation et/ou une réin- enucleation for small pancreatic neuroendocrine tumors. HPB (Oxford)
tervention pour hémostase. Enfin, un traitement endoscopique à 2021.
distance peut s’avérer utile (sphinctérotomie pancréatique pour [13] Sallinen VJ, Le Large TYS, Tieftrunk E, Galeev S, Kovalenko Z, Haugvik
fistule d’évolution prolongée, drainage endoscopique transpapil- SP, et al. Prognosis of sporadic resected small (</ = 2 cm) nonfunctio-
laire ou transmural d’un pseudokyste). À distance, les énucléations nal pancreatic neuroendocrine tumors - a multi-institutional study. HPB
sont associées à un risque d’insuffisance pancréatique endocrine (Oxford) 2018;20(3):251–9.
[14] Sallinen V, Le Large TY, Galeev S, Kovalenko Z, Tieftrunk E, Araujo R,
et exocrine quasi nul, et n’entraînent aucun trouble fonctionnel
et al. Surveillance strategy for small asymptomatic non-functional pan-
digestif.
creatic neuroendocrine tumors - a systematic review and meta-analysis.
HPB (Oxford) 2017;19(4):310–20.
[15] Scoazec JY, Vullierme MP, Barthet M, Gonzalez JM, Sauvanet A. Cystic

“ Points essentiels [16]


and ductal tumors of the pancreas: diagnosis and management. J Visc
Surg 2013;150(2):69–84.
European Study Group on Cystic Tumours of the P. European
evidence-based guidelines on pancreatic cystic neoplasms. Gut
• Les énucléations s’adressent essentiellement à des 2018;67(5):789–804.
tumeurs bénignes pancréatiques, principalement repré- [17] Jais B, Rebours V, Malleo G, Salvia R, Fontana M, Maggino L, et al.
sentées par les cystadénomes et les tumeurs endocrines Serous cystic neoplasm of the pancreas: a multinational study of 2622
de moins de 2 cm de diamètre. patients under the auspices of the International Association of Pancrea-
• Le bilan préopératoire doit s’efforcer de caractériser la tology and European Pancreatic Club (European Study Group on Cystic
Tumors of the Pancreas). Gut 2016;65(2):305–12.
lésion, d’affirmer son caractère bénin, et d’apprécier si elle [18] Le Baleur Y, Couvelard A, Vullierme MP, Sauvanet A, Hammel P,
est à distance du canal pancréatique principal. Rebours V, et al. Mucinous cystic neoplasms of the pancreas: defini-
• L’échographie peropératoire, faite en début tion of preoperative imaging criteria for high-risk lesions. Pancreatology
d’intervention, permet d’apprécier également les rapports 2011;11(5):495–9.
de la lésion avec le canal pancréatique principal. [19] Tanaka M, Fernandez-Del Castillo C, Kamisawa T, Jang JY, Levy P,
Ohtsuka T, et al. Revisions of international consensus Fukuoka gui-
• Un examen histologique extemporané est utile en cas
delines for the management of IPMN of the pancreas. Pancreatology
d’insulinome afin d’affirmer le caractère endocrine de la 2017;17(5):738–53.
lésion énucléée, ou la bénignité dans les autres cas. [20] Talamini MA, Moesinger R, Yeo CJ, Poulose B, Hruban RH, Cameron JL,
• Le risque de fistule pancréatique est d’environ 30 %. et al. Cystadenomas of the pancreas: is enucleation an adequate operation?
À ce jour, il n’y a pas de technique ou de médicament Ann Surg 1998;227(6):896–903.
[21] Crippa S, Salvia R, Warshaw AL, Dominguez I, Bassi C, Falconi M,
susceptible de limiter efficacement ce risque.
et al. Mucinous cystic neoplasm of the pancreas is not an aggressive
• À distance, l’énucléation n’altère pas la fonction pan- entity: lessons from 163 resected patients. Ann Surg 2008;247(4):571–9.
créatique. [22] Blanc B, Sauvanet A, Couvelard A, Pessaux P, Dokmak S, Vullierme MP,
et al. Limited pancreatic resections for intraductal papillary mucinous
neoplasm. J Chir (Paris) 2008;145(6):568–78.
[23] Sauvanet A, Gaujoux S, Blanc B, Couvelard A, Dokmak S, Vullierme
MP, et al. Parenchyma-sparing pancreatectomy for presumed noninva-
Déclaration de liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens sive intraductal papillary mucinous neoplasms of the pancreas. Ann Surg
d’intérêts en relation avec cet article. 2014;260(2):364–71.

EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif 7


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40-880-G  Énucléation pancréatique

[24] Kaiser J, Fritz S, Klauss M, Bergmann F, Hinz U, Strobel O, et al. [32] Haugvik SP, Gaujoux S, Rosok B, Gladhaug IP, Dousset B, Edwin
Enucleation: a treatment alternative for branch duct intraductal papillary B. Laparoscopic versus open pancreas resection for neuroendocrine
mucinous neoplasms. Surgery 2017;161(3):602–10. tumours: need for evaluation of oncological outcomes. HPB (Oxford)
[25] Tipton SG, Smyrk TC, Sarr MG, Thompson GB. Malignant poten- 2014;16(9):871.
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pancreatectomy. Dig Surg 2019;36(6):449–54.
nardoni L, et al. Endoscopic placement of pancreatic stent for “deep”
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invasive and robotic surgery for neuroendocrine tumors of the pancreas. pancreatectomy with and without routine intraperitoneal drainage. Ann
Best Pract Res Clin Endocrinol Metab 2019;33(5):101294. Surg 2017;266(3):421–31.

S. Gaujoux, Professeur des Universités, practicien hospitalier.


B. Acidi, Docteur, chef de clinique-assistant.
Chirurgie pancréatique, hépatobiliaire, oncologique et endocrinienne, Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, AP–HP, Paris, France.
S. Dokmak, Docteur, practicien hospitalier.
A. Sauvanet, Professeur des Universités, practicien hospitalier (alain.sauvanet@bjn.aphp.fr).
Service de chirurgie hépatobiliaire et pancréatique, Hôpital Beaujon, AP–HP, Clichy, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Gaujoux S, Acidi B, Dokmak S, Sauvanet A. Énucléation pancréatique. EMC - Techniques chirurgicales -
Appareil digestif 2020;0(0):1-8 [Article 40-880-G].

8 EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif

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 40-189

Traitement chirurgical des hernies


hiatales et leur complication
D. Collet, C. Gronnier

Résumé : Les auteurs rapportent leur technique chirurgicale pour la réparation des volumineuses her-
nies hiatales. Seuls les patients symptomatiques doivent être opérés. Les symptômes associent de façon
variable des signes de reflux gastro-œsophagien, des signes de dyspepsie, des manifestations respiratoires
et une anémie assez fréquente. Le bilan morphologique comprend une opacification œsogastrique, ou
une tomodensitométrie (TDM) thoraco-abdominale avec ingestion de produit de contraste. Une fibrosco-
pie préopératoire est indispensable. La voie laparoscopique est utilisée de façon standard. Les principes
de l’intervention sont la réduction de l’estomac en situation abdominale, la résection du sac herniaire,
la fermeture de l’orifice hiatal éventuellement renforcé par une prothèse synthétique ou biologique, et la
réalisation d’une fundoplicature partielle postérieure. Celle-ci a l’avantage d’entraîner moins de dyspha-
gie et de comporter une fixation de la valve postérieure aux piliers du diaphragme. La prise en charge en
urgence pour volvulus gastrique commence par la mise en place d’une sonde gastrique pour aspiration
digestive. En cas d’efficacité, l’intervention peut être réalisée en urgence différée. Sinon, elle doit être réa-
lisée en urgence, la vitalité de la paroi gastrique guide alors la conduite à tenir : résection ou correction
de la hernie hiatale.
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Mots-clés : Hernie hiatale ; Chirurgie ; Laparoscopie ; Fundoplicature ; Diaphragme ; Urgence

Plan  Introduction
■ Introduction 1
Les volumineuses hernies hiatales affectent la plupart du temps
■ Rappels 2 des personnes âgées, de plus de 70 ans, voire de plus de 80 ans.
Anatomie 2 Avec le vieillissement de la population, cette pathologie devient
Anatomopathologie 2 de plus en plus fréquente, et les chirurgiens sont régulièrement
Manifestations symptomatiques 2 confrontés aux questions concernant l’indication chirurgicale et
Indications 2 la technique à utiliser, éventuellement dans le cadre de l’urgence,
■ Technique chirurgicale 3 ou à l’occasion d’une hernie hiatale « de rencontre » au cours
Voie d’abord 3 d’une intervention abdominale. Ces hernies peuvent être respon-
Matériel 3 sables de manifestations fonctionnelles très gênantes, entraînant
Place de la chirurgie robotique 3 une altération significative de la qualité de vie. Elles entraînent
Installation 3 également un risque de complication aiguë par étranglement,
Réduction du contenu de la hernie 3 pouvant mettre en jeu le pronostic vital. Les indications doivent
Dissection et résection du sac herniaire 3 être soigneusement posées selon le rapport bénéfice/risque. La
Dissection de l’œsophage abdominal 4 voie laparoscopique s’est imposée depuis les années 1990, par ses
Mobilisation du fundus 4 avantages en termes de douleur et de rapidité de récupération. La
Fermeture du hiatus 5 mise en place d’un renfort prothétique pour consolider la répa-
Gastroplastie d’allongement 6 ration de l’orifice hiatale a été proposée, il n’existe pas à ce jour
Fundoplicature 6 de preuve formelle de son utilité. L’évaluation des résultats à dis-
Gastropexie à la paroi antérieure de l’estomac 6 tance doit être fondée plutôt sur les résultats fonctionnels que les
Drainage 7 résultats anatomiques qui peuvent être décevants avec un taux
Suites postopératoires 7 de récidive anatomique supérieur à 50 % [1, 2] . Ces récidives, la
Incidents et accidents peropératoires 7 plupart du temps mineures, restent compatibles avec des résultats
Complications postopératoires 7 fonctionnels tout à fait satisfaisants [1, 3, 4] .
■ Prise en charge des formes compliquées 7 Il s’agit quoi qu’il en soit d’une intervention considérée comme
souvent difficile qui requiert une bonne expérience en chirurgie
■ Indications 8
laparoscopique [5] .

EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif 1


Volume 39 > n◦ 1 > février 2022
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40-189  Traitement chirurgical des hernies hiatales et leur complication

 Rappels
Anatomie
Le diaphragme est un muscle aplati interposé entre le thorax
et l’abdomen. Il est constitué d’une série de muscles digastriques
dont les tendons intermédiaires s’entrecroisent et constituent
le centre phrénique qui a classiquement la forme d’un trèfle à
trois folioles. En arrière, le diaphragme s’insère sur le rachis par
l’intermédiaire des deux piliers : le droit, plus long que le gauche,
s’insère sur les corps vertébraux de L2 L3 L4 et les disques inter-
médiaires, le gauche sur L2 L3 et sur le disque L2–L3. Les piliers se
croisent sur la ligne médiane de façon à ménager l’orifice aortique
en arrière et l’orifice hiatal en avant.
L’orifice hiatal se projette sur T10, il est fortement oblique et
regarde en bas et en avant. Il est de forme ovalaire et contient
l’œsophage et les nerfs pneumogastriques droit et gauche. En
arrière, il est séparé de l’orifice aortique par le ligament arqué qui
est situé en regard de l’origine du tronc cœliaque.
Les moyens de fixité de la région assurent la stabilité de
l’estomac et d’une courte portion d’œsophage en situation intra- Figure 1. Transit œso-gastro-duodénal préopératoire. La totalité de
abdominale malgré un régime de pressions défavorable du fait l’estomac est contenue dans le thorax, il existe un volvulus mésentérico-
de la juxtaposition de pressions négatives intrathoracique et de axial.
pression positive intra-abdominale. En outre, les moyens de fixité
sont relatifs, et autorisent des mouvements de la région de grande
amplitude pouvant atteindre une dizaine de centimètre lors des le péricarde en avant, les plèvres latéralement et l’aorte tho-
efforts de toux, par exemple. racique ; sa résection est par conséquent indispensable pour
La membrane phréno-œsophagienne dite de Laimer-Bertelli assurer la stabilité de la réparation [9] . En outre, on observe très
relie l’œsophage au hiatus. Il s’agit d’une membrane conjonc- souvent un épaississement pseudolipomateux du péritoine rétro-
tive lâche, qui a la forme de deux troncs de cône opposés par la œsophagien, intriqué avec le nerf vague postérieur, qui peut gêner
base correspondant à son insertion œsophagienne. Elle permet les considérablement la dissection. L’épaississement lipomateux du
mouvements de glissement de l’œsophage à l’intérieur du hiatus péritoine et l’abondance des feuillets péritonéaux qui sont étirés
et son rôle dans les moyens de fixité est donc relatif. Elle constitue constituent d’ailleurs l’une des principales difficultés chirurgicales
la véritable frontière anatomique entre l’abdomen et le médiastin. par la confusion et le suintement hémorragique qu’elles peuvent
Le méso-œsophage est une densification du tissu cellulaire induire.
interposé entre l’œsophage en avant et le rachis et l’aorte abdomi-
nale en arrière. Il contient à sa partie inférieure la faux de l’artère
gastrique gauche qui participe ainsi aux moyens de fixité de la Manifestations symptomatiques
région. Il se poursuit vers la gauche par le ligament phrénico-
Les symptômes sont nombreux, variables et peu spécifiques [10] .
gastrique qui unit la grosse tubérosité gastrique au diaphragme.
La principale difficulté est en fait de faire le lien entre les
Celui-ci contribue ainsi au maintien de l’angle de His. Il contient
symptômes fonctionnels et la hernie hiatale et de ne pas por-
les vaisseaux œso-cardio-tubérositaires postérieurs nés des vais-
ter d’indication chirurgicale à tort uniquement sur des images
seaux spléniques.
aussi impressionnantes soient-elles. Les symptômes associent des
Les autres formations péritonéales de la région : péritoine pré-
troubles de la vidange gastrique, des signes de reflux gastro-
œsophagien, petit épiploon et l’épiploon gastro-splénique n’ont
œsophagien (RGO), des manifestations respiratoires et parfois une
pas de rôle important dans les moyens de fixité du fait de la grande
anémie [11–13] . Il est indispensable d’éliminer par le bilan préopé-
élasticité du péritoine.
ratoire exhaustif toute autre cause d’anémie ou de dyspnée, ce
qui peut justifier la réalisation d’un bilan endoscopique complet
et d’une exploration du grêle par vidéo-capsule ainsi que des
Anatomopathologie épreuves fonctionnelles respiratoires.
Un bilan morphologique est indispensable, la description endo-
On décrit classiquement trois types de hernies hiatales : les her-
scopique de la hernie hiatale est insuffisante pour porter une
nies par glissement (type I), les hernies par roulement (type II)
indication chirurgicale, un transit œso-gastro-duodénal (TOGD)
avec cardia en place, et les hernies mixtes (type III) avec ascen-
(Fig. 1) ou une tomodensitométrie (TDM) avec opacification diges-
sion du cardia et de l’estomac. Ce chapitre ne concerne que les
tive est obligatoire. Cette dernière permet d’évaluer le volume de
volumineuses hernies hiatales qui appartiennent au type II ou
la hernie et son contenu, et d’apprécier la dimension de l’orifice
III. En pratique, la distinction des hernies de type II ou III a
hiatal et la qualité des piliers du diaphragme.
peu d’importance, car elles entraînent les même symptômes, les
Les hernies hiatales par roulement et mixtes sont associées à un
mêmes risques de complication, et requièrent le même traitement.
risque d’accident aigu par étranglement. Le tableau clinique est
Elles contiennent généralement la partie proximale de l’estomac,
celui d’une occlusion à ventre plat, avec intolérance alimentaire
et fréquemment la totalité de l’estomac, parfois une anse de côlon
totale et vomissements abondants. Le risque est la nécrose isché-
transverse attirée par le ligament gastro-colique, et parfois même
mique de l’estomac. En réalité, le tableau est plus souvent celui
une ou plusieurs anses grêles également. Elles sont la conséquence
d’un engouement herniaire de résolution spontanée, responsable
d’un déficit des moyens de fixation de l’estomac favorisé par l’âge,
de blocage alimentaire complet et souvent douloureux, dont la
d’un élargissement de l’orifice hiatal et parfois d’un raccourcisse-
récidive est pratiquement constante en l’absence de traitement.
ment de l’œsophage ou brachyœsophage dont le rôle reste encore
très discuté et inégalement apprécié [1, 6] , et peut être d’un déséqui-
libre du rapport collagène I / III [7, 8] . Indications
L’estomac peut être le siège d’un volvulus qui aggrave les
troubles de la vidange gastrique. Celui-ci peut être organo-axial, Seuls les patients symptomatiques doivent être opérés [10, 14] , la
autour d’un axe vertical passant par le grand axe de l’estomac, difficulté étant d’établir le lien de cause à effet entre les symp-
ou mésentérico-axial, autour d’un axe horizontal passant par le tômes décrits par le patient et la hernie, ce qui nécessite une
cardia. La hernie est tapissée d’un sac péritonéal dont l’élasticité analyse détaillée des symptômes et de leurs conséquences. L’âge
exerce une force de rappel vers le haut, il est en contact avec n’est pas en soi une contre-indication, d’autant que ces hernies se

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rencontrent surtout chez des patients âgés de plus de 70 ans [15] .


Il n’est pas rare d’avoir à envisager une intervention chez des
personnes de plus de 80 ans [8] dans un but uniquement fonc-
tionnel. Une évaluation de l’état physiologique et de la balance
bénéfice/risque en coopération avec l’équipe anesthésiste est alors
essentielle [16] .
Le risque d’accident aigu et de ses complications peut justifier
une intervention prophylactique chez des patients asymptoma-
tiques de moins de 65 ans. On estime en effet que le risque cumulé
de complication aiguë chez une personne ayant une espérance de 3
vie de plus de 20 ans justifie une intervention prophylactique [17] .
Plusieurs études montrent en outre la tendance à l’aggravation 1
5
spontanée de ces hernies au cours du temps [18, 19] . Les résultats 2 4
des interventions électives étant constamment meilleurs que ceux
d’une intervention en urgence, il faut privilégier la chirurgie élec-
tive chez les patients symptomatiques sans attendre la survenue
de complication aiguë [20] .

 Technique chirurgicale
Voie d’abord
Ce type de hernie peut être abordé par voie abdominale ou tho-
racique [21] . En pratique, l’abord thoracique n’est que très rarement
nécessaire, et doit être réservé aux réinterventions, encore que
celles-ci puissent être régulièrement réalisées par voie abdominale.
Une voie combinée thoracoscopie + laparoscopie a été récemment Figure 2. Position des trocarts.
rapportée, avec des résultats préliminaires intéressants [22] .
L’abord abdominal peut être réalisé par laparotomie ou laparo-
scopie. Cette dernière permet des suites opératoires plus brèves,
moins douloureuses et plus confortables, et est devenue le stan-
dard pour ce type d’intervention [21, 23–25] ; c’est donc cette voie
qui servira de type de description de la technique. En outre,
l’abord laparoscopique offre une meilleure vision que la laparoto-
mie sur une région très profonde, masquée par le lobe hépatique
gauche. Toutefois, les difficultés rencontrées peuvent amener à
une conversion en laparotomie dont le patient doit être prévenu.
Les difficultés techniques fréquemment rencontrées nécessitent
une bonne expérience en chirurgie laparoscopique [5] .
Quelle que soit la voie d’abord, les principes de la technique
restent identiques, et comprennent la réduction du contenu de
la hernie, la résection du sac herniaire, la fermeture de l’orifice
hiatal, la réalisation d’une fundoplicature et d’une gastropexie.
Figure 3. Aspect initial : un segment de côlon transverse est attiré vers
Matériel le médiastin.

Le matériel nécessaire est celui de toute intervention par laparo-


scopie. Une optique oblique de 30◦ donne une meilleure vue sur d’une sonde urinaire n’est pas indispensable. La présence d’une
la région hiatale. Un écarteur à foie est nécessaire pour soulever le volumineuse hernie hiatale peut gêner le bon positionnement de
lobe hépatique gauche sans qu’il ne soit nécessaire de sectionner la sonde gastrique qu’il faut alors repositionner après réduction
le ligament triangulaire gauche. Cinq trocarts sont généralement de l’estomac en situation intra-abdominale.
suffisants : trois de 10 mm et deux de 5 mm. Le pneumopéritoine est généralement fait à l’aiguille de Veress
par ponction de l’hypochondre gauche, après réalisation des tests
de sécurité. Les trocarts sont positionnés comme indiqué sur la
Place de la chirurgie robotique Figure 2, l’alignement de trois trocarts sur la ligne médiane sim-
plifie la réparation pariétale en cas de conversion en laparotomie.
La réparation des hernies hiatales assistée par robot a été réali-
sée et évaluée. La faisabilité est prouvée, on retrouve les mêmes
avantages mis en évidence pour d’autres interventions, essen- Réduction du contenu de la hernie (Fig. 3 à 5)
tiellement de nature ergonomique : le robot est une aide pour
le chirurgien dans l’accomplissement de gestes difficiles et com- Le contenu herniaire est attiré par traction douce dans
plexes, en particulier au cours des réinterventions. Malgré des l’estomac. L’utilisation de pinces de Johann à mors longs,
résultats individuels encourageants [26] , il n’a pas été mis en évi- moins traumatiques, est préférable afin d’éviter les plaies séro-
dence d’amélioration significative des résultats anatomiques et musculaires de la paroi gastrique. La réduction doit être complète
fonctionnels [27, 28] . et douce (Fig. 3) avant de commencer la dissection du sac her-
niaire. La hernie peut contenir tout ou partie de l’estomac, et
parfois le grand épiploon et une anse de côlon transverse attirée
Installation par le ligament gastro-colique. Elle doit être maintenue par une
pince insérée par le trocart ombilical.
Le patient est installé en décubitus dorsal jambes écartées. Il doit
être callé sur la table de façon à pouvoir donner une inclinaison
proclive qui facilitera l’exposition de la région hiatale. L’opérateur Dissection et résection du sac herniaire
est entre les jambes du patient, le premier aide à sa droite et le
deuxième (facultatif) à sa gauche. L’intervention est réalisée sous La dissection commence par l’ouverture de la pars flaccida
anesthésie générale, une sonde gastrique est mise en place, la pose puis condensa du petit épiploon (Fig. 6). Elle se prolonge

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Figure 4. Début de la réduction de l’estomac. Figure 7. L’ouverture du petit épiploon se poursuit par celle du péri-
toine du hiatus, et amorce la dissection du sac herniaire.

Figure 5. Réduction complète de l’estomac.


Figure 8. Dissection du sac herniaire.

fier que l’estomac reste en place dans l’abdomen sans qu’il ne soit
plus nécessaire de le maintenir par la pince de l’orifice ombilical,
ce qui est un critère de stabilité de la réparation. Le sac peut être
réséqué ou laissé pédiculisé sur ses insertions cardiales. En cas de
résection du sac, il faut être prudent de ne pas blesser les vaisseaux
gastriques gauches qui sont étirés par la hernie hiatale, et peuvent
être endommagés lors de la section de la partie droite du sac.

Dissection de l’œsophage abdominal


Il s’agit en fait de la dissection des berges du hiatus œsopha-
gien : il faut longer le pilier droit jusqu’à atteindre la convergence
avec le pilier gauche, puis remonter sur sa face antérieure jusqu’à
atteindre l’espace sous-phrénique gauche, pendant qu’un aide
attire l’estomac vers le bas par une pince introduite par le tro-
cart ombilical, ce qui aligne et verticalise l’œsophage. Le plan au
contact des piliers est avasculaire, il peut être nécessaire de faire
l’hémostase d’une branche artérielle diaphragmatique inférieure
gauche. Ce plan est facile à trouver, une difficulté à ce niveau
Figure 6. Ouverture du petit épiploon.
est la conséquence d’une erreur de plan avec son risque de plaie
de la face postérieure de l’œsophage (Fig. 9). Il est alors prudent
de faire un test au colorant par la sonde gastrique au terme des
naturellement par l’ouverture du péritoine en avant de l’ogive
manœuvres de dissection pour s’assurer de l’absence de lésion
hiatale qui permet d’exposer le haut des piliers et d’amorcer la
œsophagienne ou gastrique. L’œsophage est alors chargé sur lac
dissection du sac herniaire (Fig. 7). Celui-ci est alors progres-
en laissant au contact les nerfs vagues antérieur et postérieur. Il est
sivement clivé, il existe un plan avasculaire entre le sac et la
préférable de serrer le lac sur la partie terminale de l’œsophage afin
membrane phréno-œsophagienne étirée, facile à trouver, qu’il suf-
qu’il ne glisse pas sur la jonction œsogastrique, ce qui la déforme-
fit de suivre progressivement (Fig. 8). Tout élément vertical pré-
rait et rendrait difficile la fundoplicature. L’œsophage est disséqué
ou rétro-œsophagien peut être un nerf pneumogastrique, et doit
prudemment, au-dessus du hiatus, afin d’allonger la longueur du
dont être prudemment disséqué et respecté. La section acciden-
segment intra-abdominal et de faciliter la réparation.
telle d’un pneumogastrique peut entraîner un spasme pylorique
dont les conséquences postopératoires peuvent être graves du fait
de la réalisation d’une valve anti-reflux qui bloque la vidange gas- Mobilisation du fundus
trique vers le haut. Le cas échéant, un spasme pylorique peut être
traité par une dilatation ou pyloroplastie sous-muqueuse postopé- L’étirement considérable des épiploons périgastriques, et en
ratoire par voie endoscopique. Au terme de la dissection du sac, on particulier de l’épiploon gastro-splénique, ne justifie pas de le sec-
a exposé l’œsophage médiastinal et l’orifice hiatal. On doit véri- tionner pour donner de la mobilité au fundus. Toutefois, cette

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Figure 9. Exposition de l’orifice hiatal.

Figure 11. Fermeture rétro-œsophagienne du hiatus : les derniers


points postérieurs commencent à dissocier les fibres des piliers.

Figure 10. Section de l’épiploon gastro-splénique.

manœuvre nous semble nécessaire, afin de ne pas amener lors de


la fundoplicature un abondant feuillet péritonéal au bord droit
de l’œsophage, ce qui peut entraîner une certaine confusion. Une
Figure 12. Plicature du pilier gauche.
pince tenue par l’aide attire le fundus vers le bas et la droite, ceci
expose l’épiploon gastro-splénique qui peut être ouvert sur 4 ou
5 cm jusqu’à atteindre la jonction œsogastrique en sectionnant ché la traction sur l’œsophage, car celle-ci entraîne toujours une
deux ou trois vaisseaux courts (Fig. 10). réduction artificielle du diamètre œsophagien.
Le renfort de la réparation du hiatus au moyen d’une prothèse
a été proposé et semble donner de meilleurs résultats [1, 33–43] , que
Fermeture du hiatus la prothèse soit synthétique ou d’origine biologique. Toutefois, il
C’est le temps crucial de l’intervention. Malgré une littérature n’existe à ce jour aucune preuve de niveau A en faveur de l’emploi
abondante à ce sujet, il n’existe à ce jour aucune preuve formelle d’une prothèse, dont l’indication reste avant tout fondée sur une
en faveur de l’utilisation d’un renfort prothétique [10, 29, 30] dont appréciation personnelle du chirurgien [44, 45] . Les prothèses biolo-
l’indication reste uniquement fondée sur l’appréciation person- giques, d’origine animale ou humaine, s’intègrent dans le tissu de
nelle du chirurgien. cicatrisation [46] et évitent les risques d’érosion viscérale induite
La fermeture du hiatus est de toute façon indispensable. par les prothèses synthétiques. Leur devenir à long terme est
Elle commence par des points séparés non résorbables rétro- incertain, elles peuvent soit s’intégrer dans le tissu conjonctif de
œsophagiens (Fig. 11). Il faut s’arrêter dès que la traction sur cicatrisation, soit au contraire « s’encapsuler » du fait d’une intolé-
les points commence à dissocier les fibres musculaires du pilier, rance au matériau. Si on opte pour une prothèse synthétique, il est
généralement le droit. Il a été proposé de faire des incisions de recommandé d’utiliser une prothèse biface comportant une face
relaxations verticales des piliers pour prévenir leur déchirure [31] . non adhérente, ou une prothèse synthétique résorbable [47, 48] . De
Si la fermeture postérieure est insuffisante, il faut alors pour- nombreuses formes de prothèse ont été décrites : en O, en U, en Y,
suivre par une plicature du pilier gauche qui consiste à charger etc. [49] . Quel que soit le type de prothèse, la forme en « U » nous
l’extrémité supérieure du pilier gauche et l’ogive hiatale par un semble préférable pour éviter de sténoser l’œsophage (Fig. 13, 14).
ou plusieurs ponts non résorbables (Fig. 12). On peut ainsi, avec La prothèse est positionnée en avant de l’orifice hiatal, auquel
deux ou trois points, restituer un orifice hiatal adapté au diamètre elle peut être suturée par des fils non résorbables ou fixée par des
de l’œsophage, sans traction excessive sur les piliers. La calibra- tackers métalliques. Ceux-ci doivent être évités sur la face infé-
tion de la fermeture du hiatus a été proposée pour prévenir une rieure du diaphragme, à cause du risque de plaie cardiaque et de
sténose œsophagienne. Cette manœuvre, qui n’est pas dénuée de tamponnade qui a été rapporté à plusieurs reprises [50–52] .
risque, n’est en fait pas indispensable [32] . Le critère est de pouvoir La fermeture du hiatus au moyen d’une prothèse placée en
insérer sans difficulté un instrument de 10 mm entre le hiatus « patch », suturée aux berges de l’orifice hiatal, est déconseillée,
refermé et l’œsophage. Ce test doit être réalisé après avoir relâ- car associée à un taux prohibitif de récidives.

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Figure 13. Positionnement de la prothèse taillée en « U ».

Figure 15. Positionnement de la valve postérieure : l’ensemble du mon-


tage reste en place sans aucune traction.

Figure 14. Fixation de la prothèse.

Gastroplastie d’allongement
L’existence d’un œsophage court a été souvent incriminé
Figure 16. Valve postérieure.
comme facteur favorisant la récidive, d’où la proposition
d’effectuer une gastroplastie d’allongement selon la technique de
Collis [53] . Ceci peut être réalisé par voie laparoscopique au moyen
d’une résection triangulaire du fundus par application de deux est positionnée derrière l’œsophage (Fig. 15) puis amarrée par trois
chargeurs de pince à suture linéaire, permettant d’allonger la lon- rangées de trois points : à la face antérieure des piliers, au bord
gueur d’œsophage aux dépens de la partie supérieure de l’estomac. droit et au bord gauche de l’œsophage (Fig. 16). Le point supé-
Le diagnostic d’œsophage court est en fait très difficile [6] et diver- rieur gauche charge également le sommet du pilier gauche, afin
sement apprécié, ce qui explique la très grande variabilité des d’éviter une traction excessive à ce niveau sur la paroi œsopha-
gastroplasties d’allongement dans les séries publiées, qui va de gienne. La présence d’une prothèse ne modifie pas les principes
0 à 100 % [1, 23, 25, 31, 54–56] . de la fundoplicature qui peut être fixée par des points chargeant
Dans notre pratique, la résection complète du sac herniaire et la prothèse et le diaphragme sous-jacent (Fig. 17). Si on opte pour
la mobilisation de l’œsophage médiastinal [57] permettent de don- une valve circonférentielle type Nissen, celle-ci doit être fixée par
ner une bonne stabilité à l’estomac dont le critère est qu’il reste des points non résorbables, sa hauteur doit être inférieure à 3 cm
spontanément en place sans qu’il ne soit nécessaire d’exercer une selon les recommandations de De Meester [59] . Une valve anté-
traction. En outre, l’obliquité de l’orifice hiatale est telle que la fer- rieure type Dor est une alternative simple. La technique est facile
meture des piliers en arrière allonge le segment intra-abdominal et consiste à amarrer la grosse tubérosité gastrique au pilier droit
de l’œsophage. Si bien qu’il ne nous a jamais paru nécessaire par trois ou quatre points non résorbables. Le contrôle du RGO
d’effectuer un allongement de l’œsophage. est moins efficace que celui obtenu par une valve postérieure [60] ,
avec cependant une qualité de vie équivalente à terme [61] .

Fundoplicature
Un geste antireflux est un complément indispensable du fait Gastropexie à la paroi antérieure
de la destruction des mécanismes antireflux physiologiques. Une de l’estomac
valve partielle postérieure type Toupet nous semble préférable,
car elle entraîne moins d’effets secondaires qu’une valve circon- Une gastropexie à la paroi antérieure de l’abdomen peut être
férentielle et produit un effet équivalent sur le reflux [58] . En réalisée et serait pour certains un facteur permettant d’abaisser
outre, la rangée de points postérieurs et le point supérieur gauche le risque de récidive [62, 63] . Elle est constituée de trois ou quatre
amarré au diaphragme constituent une gastropexie qui contribue points non résorbables entre la face antérieure de l’estomac et la
au maintien de l’estomac en situation intra-abdominale. La valve paroi abdominale antérieure.

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brèche œsophagienne impose une conversion en laparotomie,


tandis qu’une plaie gastrique peut être plus facilement réparée
par laparoscopie.

Complications postopératoires
Toute fièvre doit faire suspecter une plaie méconnue de
l’œsophage ou de l’estomac dont le diagnostic doit être confirmé
par un scanner avec injection de produit de contraste et opa-
cification digestive. Une réintervention en urgence s’impose
alors. Le pronostic des plaies œsophagiennes ou gastriques est
significativement aggravé lorsque le diagnostic en est fait après
l’intervention [64] .
Une dysphagie aiguë peut être l’expression d’une migration
intrathoracique du montage qui peut être favorisée par des efforts
de toux. Le diagnostic doit être confirmé par une TDM avec
opacification digestive ou par un TOGD aboutissant à une réin-
tervention obligatoire.
Figure 17. Fundoplicature après renfort prothétique. Une dilatation gastrique peut être la conséquence d’une lésion
d’un ou des nerfs pneumogastriques. Ceci nécessite la remise en
place d’une aspiration gastrique et d’un traitement prokinétique
et la réalisation d’une dilatation pylorique ou d’une myotomie
sous-muqueuse par voie endoscopique.

 Prise en charge des formes


compliquées
La complication la plus classique et potentiellement la plus
grave est l’étranglement herniaire avec son risque de nécrose gas-
trique ischémique.
Les manifestations cliniques sont celles d’une occlusion à
ventre plat, et associent des douleurs épigastriques et basi-
thoraciques, des efforts de vomissement et une intolérance
alimentaire complète. Le diagnostic est confirmé par un scanner
injecté en urgence qui montre une dilatation gastrique intratho-
racique tandis que le tube digestif d’aval est plat. Il n’y a pas de
passage du produit de contraste vers le duodénum. Il faut recher-
cher des signes de nécrose ou de complication se traduisant par
une absence de prise de contraste de la paroi gastrique, une pneu-
Figure 18. Drainage. matose pariétale ou la présence de bulles d’air extragastriques
traduisant une perforation. Les autres signes d’ischémie de la paroi
gastrique sont une hyperleucocytose, une élévation des lactates et
Drainage de la protéine C-réactive (CRP). Une fibroscopie en urgence peut
être réalisée pour évaluer la vitalité de la paroi gastrique [65] .
Le drainage du médiastin inferieur par drain aspiratif semble
En l’absence d’ischémie gastrique, il faut dans une première
indispensable pour éviter la constitution d’une collection dans
étape mettre en place une sonde d’aspiration digestive. Ce geste
la loge herniaire qui pourrait favoriser une récidive ultérieure
lorsqu’il est efficace entraîne un soulagement immédiat, qui
(Fig. 18). Ce drain est retiré après trois ou quatre jours.
donne le temps d’organiser l’intervention en urgence différée,
éventuellement après transfert vers un centre spécialisé [66] . La
Suites postopératoires technique est identique à celle décrite précédemment. En cas de
doute sur une nécrose gastrique, d’inefficacité ou d’impossibilité
La sonde gastrique est retirée le soir de l’intervention, de mise en place de l’aspiration digestive, l’intervention doit être
l’alimentation est reprise dès le lendemain, d’abord de texture faite en urgence. Il faut alors se mettre en situation d’effectuer
liquide puis progressivement normale. La dysphagie est fréquente éventuellement une résection œsogastrique, et prévoir un abord
durant la phase initiale, et cède spontanément en quelques thoracique droit si nécessaire.
semaines. Le drain est retiré le troisième ou le quatrième jour. L’intervention commence par un abord abdominal par laparo-
Un contrôle radiographique par TOGD avant la sortie peut être tomie, ou par laparoscopie [67] . La désincarcération de l’estomac
utile pour confirmer le bon repositionnement intra-abdominal de peut être difficile du faut de l’œdème de l’estomac et des adhé-
l’estomac, et surtout servir de référence en cas de récidive ulté- rences au hiatus et peut justifier d’élargir l’orifice hiatal par une
rieure. courte phrénotomie antérieure.
L’appréciation de la vitalité de la paroi gastrique guide la suite de
Incidents et accidents peropératoires l’intervention. Si l’estomac récupère rapidement une coloration
et un aspect normaux, l’intervention se limite au traitement de la
La complication la plus redoutée est la perforation de hernie hiatale décrite précédemment ou à une simple gastropexie
l’œsophage ou de l’estomac. Elle doit être recherchée par un test au à la paroi antérieure chez des patients en mauvais état général
colorant peropératoire, surtout si la dissection a été laborieuse et comme cela a été proposé [68] .
hémorragique. En principe, la dissection passant dans des plans En revanche, en cas d’ischémie ou de perforation gastrique, il
anatomiques avasculaires, n’entraîne pas de saignement. Toute faut envisager une gastrectomie totale ou polaire supérieure avec
hémorragie survenant au contact de l’œsophage ou de l’estomac anastomose œsogastrique intrathoracique. Celle-ci peut être réali-
peut être due à une erreur de plan et révéler une plaie viscérale et sée en restant au ras de la paroi digestive puisqu’il s’agit de lésion
justifie au moindre doute un test au colorant par la sonde gastrique bénigne. Un abord thoracique, droit plutôt que gauche, est alors
afin d’identifier et de localiser une éventuelle perforation. Une nécessaire.

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Hernie hiatale

Engouement Dyspepsie Anémie isolée Asymptomatique


RGO
Blocages

TDM Fibroscopie < 70 ans > 70 ans


Sonde nasogastrique Coloscopie Intervention
Vidéo capsule prophylactique pour
prévention d’un
accident aigu Abstention

Nécrose gastrique Pas de nécrose Pas d’autre Autre origine


ou suspicion gastrique anomalie que la
hernie hiatale

Traitement de
la cause
Intervention en Intervention Réduction de la hernie
urgence élective après Résection du sac herniaire
Gastrectomie en aspiration Fermeture du hiatus ± prothèse
fonction de la nécrose nasogastrique Fundoplicature

Figure 19. Arbre décisionnel. Résumé des indications chirurgicales. RGO : reflux gastro-œsophagien ; TDM : tomodensitométrie.

 Indications [7] Brown SR, Melman L, Jenkins E, Deeken C, Frisella MM, Brunt
LM, et al. Collagen type I:III ratio of the gastroesophageal junction in
patients with paraesophageal hernias. Surg Endosc 2011;25:1390–4.
L’ensemble des indications est résumé sur la Figure 19.
[8] Spaniolas K, Laycock WS, Adrales GL, Trus TL. Laparoscopic parae-
sophageal hernia repair: advanced age is associated with minor but not
major morbidity or mortality. J Am Coll Surg 2014;218:1187–92.
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Traitement chirurgical des hernies hiatales et leur complication  40-189

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EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif 9


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40-189  Traitement chirurgical des hernies hiatales et leur complication

D. Collet (denis.collet@chu-bordeaux.fr).
C. Gronnier.
Service de chirurgie digestive, Maison du Haut-Lévèque, avenue de Magellan, 33606 Pessac cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Collet D, Gronnier C. Traitement chirurgical des hernies hiatales et leur complication. EMC - Techniques
chirurgicales - Appareil digestif 2022;39(1):1-10 [Article 40-189].

10 EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif

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 40-165-C

Hernies incisionnelles
(éventrations) - complexes
B. Borraccino, Y. Renard, P. Ortega-Deballon

Résumé : Une éventration peut être complexe en raison de sa taille ou du risque infectieux lors de
la réparation (en raison de la contamination du champ opératoire, ou en raison des comorbidités du
patient). En effet, les complications infectieuses sont à craindre particulièrement dans ces gestes de répa-
ration qui font appel à un renfort prothétique pariétal. La prise en charge de ces éventrations nécessite
souvent une préparation en amont de la chirurgie (préhabilitation) mais aussi une adaptation de la
technique opératoire. Le problème de la taille prend une ampleur particulière en cas de perte du droit de
cité. Pour prendre en charge une éventration géante différentes stratégies préopératoires existent (injec-
tion de toxine botulinique, pneumopéritoine thérapeutique de Goñi-Moreno), ainsi que des techniques
opératoires permettant d’atteindre l’objectif de fermer la ligne médiane complètement (techniques de
séparation de composantes et fermetures étagées). Le risque d’infection inhérent à la prothèse synthé-
tique en milieu contaminé ou chez le patient à risque a justifié l’arrivée dans la panoplie du chirurgien
des prothèses biologiques et biosynthétiques.
© 2021 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Éventration géante ; Perte du droit de cité (domicile) ; Séparation de composantes ;


Transversus abdominis release (TAR) ; Toxine botulinique ; Prothèse biologique ; Prothèse biosynthétique ;
Prothèse lentement résorbable

Plan  Préhabilitation
■ Introduction 1 La préhabilitation est le programme thérapeutique préopéra-
■ Préhabilitation 1
toire qui est mis en place dans le but de contrôler l’ensemble
des facteurs de risque d’un patient candidat à une réparation
■ Le problème de la taille : éventration géante et perte du droit complexe de la paroi abdominale. Les effets bénéfiques d’un pro-
de cité 2 gramme de préhabilitation ne se limitent pas à la diminution des
Évaluation 2 complications postopératoires mais aussi à la diminution des réci-
Stratégies préopératoires en cas d’éventration géante 2 dives [2] . Ils font aussi prendre conscience au patient qu’il peut
Techniques opératoires 2 maîtriser des aspects de sa santé qu’il pensait seulement subir.
■ Le problème du risque infectieux 5 L’inconvénient d’un tel programme est la nécessité de repousser
Classifications 5 l’intervention chirurgicale pour réaliser l’intervention thérapeu-
Prothèses disponibles 6 tique.
Cas particuliers 7 Les programmes de préhabilitation prennent particulièrement
en compte cinq aspects :
• évaluation de l’état nutritionnel. La dénutrition majore le
risque d’infection postopératoire. En cas de dénutrition, il
 Introduction est nécessaire d’instaurer le support nutritionnel adéquat et
d’attendre l’amélioration avant d’intervenir. À l’opposé, quand
Bien qu’il n’y ait pas une définition validée de ce qu’est une il existe une obésité sévère, on propose au patient un parcours
éventration complexe, dans la littérature il y a quelques critères bariatrique. Cela implique la prise en charge nutritionnelle ini-
qui font consensus pour considérer comme telle une éventration : tiale et l’accompagnement diététique, en arrivant, quand cela
la taille et la localisation (en dehors de la ligne médiane), le mode est indiqué, à la chirurgie bariatrique. Dans ces cas, la répara-
de présentation (en urgence), la contamination bactérienne du tion pariétale est reportée de 18 mois, le temps de compléter
champ opératoire et les comorbidités du patient [1] . À l’exception le parcours bariatrique et d’en cueillir les effets bénéfiques. En
de la taille et de la localisation, les autres facteurs se traduisent cas de non-indication de chirurgie bariatrique, on demande au
essentiellement par une augmentation des complications infec- patient d’amorcer une perte pondérale significative avant de
tieuses qui sont à craindre particulièrement lors d’un geste qui programmer la cure d’éventration [2] ;
fait appel de principe à une prothèse pariétale. Différentes straté- • le sevrage tabagique. En effet, le tabagisme est associé à un retard
gies pré- et peropératoires sont apparues dans les dernières années de cicatrisation et à une augmentation du risque d’infection
pour faire face à ces différents aspects qui font la complexité d’une postopératoire. Il y a, par ailleurs, les problèmes respiratoires qui
éventration. sont particulièrement importants après une cure d’éventration

EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif 1


Volume 39 > n◦ 1 > février 2022
Téléchargé pour Anonymous User (n/a) à Research Centre for Scientific and Technical Information à partir de ClinicalKey.fr par Elsevier sur mars
http://dx.doi.org/10.1016/S0246-0424(21)41405-6
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40-165-C  Hernies incisionnelles (éventrations) - complexes

(a fortiori volumineuse) et son impact sur la mécanique respi- pas entièrement couverte par un plan musculo-aponévrotique).
ratoire. Pour ces raisons, le sevrage tabagique doit être obtenu L’autre objectif est de prévenir le risque du syndrome du
au moins un mois avant l’intervention chirurgicale [3] . Toute compartiment abdominal, complication postopératoire immé-
aide est bienvenue pour accompagner le patient dans ce but. En diate pouvant mettre en jeu le pronostic vital.
revanche, il faut être intransigeant sur l’exigence d’un sevrage
tabagique complet avant la chirurgie [4] ;
• la préparation respiratoire. La réduction d’une éventration Pneumopéritoine thérapeutique de Goñi-Moreno
implique une augmentation de la pression intra-abdominale Cette technique de préconditionnement consiste à positionner
et, de fait, un syndrome restrictif pulmonaire. Cela est parti- un cathéter dans la cavité péritonéale afin de pouvoir insuffler pro-
culièrement important dans le cas des grandes éventrations ou gressivement un pneumopéritoine. Cela va augmenter le volume
en présence d’une fragilité respiratoire ou cardiaque. On pro- de la cavité abdominale et faciliter la réduction viscérale lors de
pose au patient des séances de kinésithérapie respiratoire et l’intervention. Par ailleurs, on limite le risque de syndrome du
entraînement à l’effort pendant un mois avant l’intervention compartiment abdominal et on réalise une préparation respira-
chirurgicale ; toire, puisque l’augmentation de la pression intra-abdominale
• le contrôle strict du diabète doit être obtenu avant la chirurgie. induit une diminution des volumes pulmonaires semblable à celle
En effet, c’est un facteur de risque d’infection du site opératoire que le patient aura en postopératoire.
(ISO) qu’il faut maîtriser en amont de la chirurgie en faisant Pour le cathéter d’insufflation, on utilisait auparavant une
appel aux compétences nécessaires ; petite voie chirurgicale (mini-laparotomie) pour installer une
• en cas de lésions cutanées trophiques, un avis dermatologique chambre implantable. En raison de complications infectieuses sur
se révèle utile pour améliorer dans la mesure du possible la pré- la chambre, on a changé de stratégie : la pose du cathéter par un
paration cutanée en vue de la réparation, à la fois pour diminuer radiologue sous contrôle échographie ou scannographique, ce qui
le risque infectieux et pour faciliter la cicatrisation. est moins risqué et plus confortable pour le patient [12] . Le volume
d’air insufflé est habituellement de 1 à 2 litres (en fonction de la
tolérance) tous les 2 à 3 jours durant 2 à 3 semaines, en prenant
 Le problème de la taille : la précaution de positionner un filtre à air entre la seringue et
le cathéter. Afin de concentrer le pneumopéritoine dans la cavité
éventration géante et perte péritonéale et non pas dans l’éventration, le patient porte une
ceinture de contention abdominale adaptée à sa morphologie.
du droit de cité La kinésithérapie respiratoire est systématique. On obtient une
augmentation en largeur et longueur des muscles abdominaux
La taille de l’éventration est un facteur de risque de récidive
et une augmentation de plus de 50 % du volume de la cavité
reconnu, de même que la localisation en dehors de la ligne
abdominale [11, 13, 14] .
médiane. Quand l’éventration est volumineuse, la fermeture de
la ligne médiane aponévrotique, qui constitue un pilier de la cure
d’éventration au même titre que l’utilisation d’un renfort prothé- Injection de toxine botulique
tique, peut être difficile. Par ailleurs, une fermeture sous tension
L’injection de toxine botulique dans les muscles latéraux de
comporte le risque de voir apparaître un syndrome du compar-
l’abdomen est une technique développée récemment. Le principe
timent abdominal qui engage le pronostic vital du patient. Une
est d’injecter de la toxine botulique dans les muscles transverses,
éventration est dite « géante » lorsque la largeur du collet atteint
obliques internes et obliques externes afin d’obtenir une para-
10 cm [5, 6] . Ce concept ne doit pas être confondu avec celui de la
lysie musculaire puis un allongement des muscles permettant
perte du droit de cité (ou de domicile). La perte de droit de cité se
une fermeture théoriquement plus simple [15] . En pratique, il faut
définit par l’impossibilité de réduire l’éventration au repos en rai-
injecter sous contrôle échographique la toxine botulique dans les
son d’un volume du contenu herniaire trop important qui n’a plus
trois muscles latéraux de l’abdomen (transverse, oblique interne
la place dans la cavité abdominale. C’est donc différent des situa-
et oblique externe), à droite et à gauche, et à trois hauteurs
tions où le contenu herniaire n’est pas réductible à cause d’un
différentes de chaque côté (hypocondre, flanc et fosse iliaque)
collet trop étroit pour permettre le retour du contenu herniaire
(Fig. 2) [16] . Ces injections doivent être réalisées 4 à 6 semaines
dans l’abdomen.
avant la cure d’éventration (la toxine botulique commence à être
efficace à partir de 8 jours, est pleinement efficace à partir de
Évaluation 3 semaines et l’effet dure environ 6 mois). Cette technique n’a
pas de morbidité spécifique. L’efficacité est variable, l’allongement
L’évaluation clinique se fait comme pour toute éventration en des muscles est parfois important et facilite la cure d’éventration,
mesurant la largeur du défect pariétal [7] . L’évaluation de la perte mais parfois moins évident (Fig. 3). On l’utilise en pratique dès
du droit de cité doit être complétée par une volumétrie réalisée sur qu’une éventration atteint 10 cm de largeur. On la combine avec
un scanner abdomino-pelvien (Fig. 1) [8–10] . En pratique, on uti- un pneumopéritoine thérapeutique de Goñi-Moreno quand il
lise la formule de Sabbagh pour le calcul du volume herniaire : existe une perte du droit de cité et un critère volumétrique qui
VEV /(VEV + VCA ), où VEV est le volume du sac d’éventration et l’indique [17] .
VCA est le volume de la cavité abdominale [10] . Quand ce rap-
port entre le volume de l’éventration et celui de l’ensemble du
contenu qui va devoir se retrouver en position intra-abdominale Techniques opératoires
est supérieur à 20 %, on peut affirmer la perte du droit de cité. Une
préparation spécifique est alors indispensable avant la réparation Les principes généraux de la cure d’éventration restent en
chirurgicale pour éviter l’hyperpression abdominale postopéra- vigueur pour les éventrations complexes [7] . L’objectif idéal est
toire et le syndrome compartimental (Fig. 1) [11] . Dans ce but, on donc de reconstituer un plan postérieur en arrière des grands
utilise le pneumopéritoine de Goñi-Moreno qui est décrit plus droits, poser une prothèse en position rétromusculaire ou prépé-
loin. ritonéale, et fermer la ligne médiane antérieure en la recouvrant
totalement. Le recours à un patch de Vicryl® ou d’épiploon quand
on ne peut pas fermer le plan péritonéal, malgré les astuces qui
Stratégies préopératoires sont présentées par la suite, doit rester exceptionnel. De même, le
en cas d’éventration géante positionnement intrapéritonéal de la prothèse ou son utilisation
en pont (bridging, c’est-à-dire comme comblement d’un espace où
Le but premier de ces stratégies préopératoires est de il n’y a pas de plan aponévrotico-musculaire) doivent être évités
permettre de refermer l’aponévrose lors de la réparation chi- dans la mesure du possible.
rurgicale. La prothèse doit venir renforcer les plans pariétaux Dans le cas des éventrations géantes, pour atteindre l’objectif
mais pas les remplacer (éviter donc le bridging où la prothèse n’est de la fermeture aponévrotique et la couverture totale de la

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B
Figure 1. Patient porteur d’une éventration géante (A). Volumétrie sur scanner abdominal pour estimer la perte du droit de cité (B). Le volume de
l’éventration est de 8,06 l et le volume de la cavité abdominale est de 11,31 l. Selon la formule de Sabbagh 8,06/(8,06 + 11,31) = 41,61 %. Comme on
dépasse 20 %, un pneumopéritoine thérapeutique de Goñi-Moreno est nécessaire en préparation chez ce patient.

prothèse par un plan musculo-aponévrotique, différentes tech- cas de petite tension sur la paroi musculaire car elles entraînent
niques peuvent être utiles. un gain très limité.

Autoplastie avec le sac péritonéal Techniques de séparation de composants


Cette technique, dite aussi du « lambeau péritonéal » utilise un Les techniques de séparation des composants consistent à
côté du sac (en continuité avec l’aponévrose antérieure des droits) sectionner une des aponévroses des muscles latéraux sur leur
pour la fermeture du plan antérieur et l’autre côté (en continuité insertion médiane. Il est clair qu’elles induisent une certaine fra-
avec l’aponévrose postérieure des droits) pour le plan postérieur. gilisation de la paroi abdominale et qu’elles doivent toujours
Il faut donc prendre les dispositions nécessaires dès le début de s’associer à la pose d’une prothèse qui doit, idéalement, s’étendre
l’intervention pour préserver le sac péritonéal [18] . jusqu’à couvrir la paroi à hauteur de l’incision de décharge prati-
quée [19] .
La technique antérieure (dite « de Ramirez ») sectionne
Incisions de décharge de Clotteau-Prémont l’aponévrose de l’oblique externe en dehors de la gaine des
Après libération du feuillet antérieur de la gaine des droits, on droits et permet d’augmenter de plus de 10 cm la circonférence
réalise sur celle-ci des incisions de 1,5 cm de long, verticales, sépa- musculaire abdominale de chaque côté par translation du bord
rées entre elles de 1,5 cm également (Fig. 4). Elles sont utiles en médian des muscles droits [20] . Cela peut être réalisé par voie

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ouverte (impliquant une large dissection pré-aponévrotique des tion de la paroi abdominale à long terme restent encore peu
grands droits) ou par voie endoscopique. Le gain obtenu par voie connus mais le décollement sous-cutané large implique un taux
endoscopique est moindre. Les résultats en termes de fragilisa- de séromes et d’hématomes non négligeable [21] .
En pratique, on effectue une longue incision verticale 1 cm en
dehors du bord latéral des grands droits (donc sur l’aponévrose de
l’oblique externe) (Fig. 5). On est dans un plan avasculaire et sans
exposition de fibres musculaires. Cette incision s’étend sur toute
la hauteur de la laparotomie, pouvant aller du rebord costal à la
crête iliaque.
On utilise cette technique de recours quand on est contraint
de mettre la prothèse en position intrapéritonéale en raison de

a b

c d
Figure 5. Technique de séparation de composantes antérieure (dite
Figure 2. Technique de l’injection préopératoire de toxine botuli- « de Ramirez ») (a à d). Elle consiste à inciser verticalement l’aponévrose
nique sous contrôle échographique, en externe, 4 à 6 semaines avant de l’oblique externe 2 cm en dehors du bord latéral des grands droits.
l’intervention chirurgicale. Cette incision peut aller des côtés jusqu’à la crête iliaque.

Figure 3. Coupes axiales de scanner à la même


hauteur chez un patient porteur d’une éventra-
tion volumineuse, avant (A) et 5 semaines après
(B) l’injection de toxine botulique. On constate
une élongation du bloc des muscles latéraux et
une diminution du diamètre de l’éventration.

A B

Figure 4. Incisions de décharge de Clotteau-


Prémont (A, B).

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l’impossibilité de la mettre en position rétromusculaire et que, thèse rétromusculaire ou prépéritonéale par voie mini-invasive
malgré l’adhésiolyse large, la fermeture de la ligne médiane n’est (idéalement, robot-assistée).
pas possible sans une grande tension. Dans ces cas, la séparation Quand il existe une certaine tension lors de la fermeture de la
antérieure de composantes permet d’avoir l’étoffe pour fermer sur ligne médiane, on réalise volontiers un surjet avec des points en
la prothèse sans tension. On prend bien soin d’étendre et de fixer U qui déchirent moins que le surjet classique.
la prothèse au-delà de la projection intrapéritonéale de la ligne de
section pratiquée.
La technique de séparation postérieure des composants (dont
le transversus abdominis release [TAR] est la variante pratiquée par  Le problème du risque
les auteurs) consiste à profiter de la dissection de la gaine rétro- infectieux
musculaire des droits (plan de Rives-Stoppa), en incisant la gaine
immédiatement en dedans des pédicules vasculo-nerveux perfo- La plupart des facteurs de risque de retard de cicatrisation
rants, soit environ 1 cm en dedans de la ligne blanche externe (obésité, tabagisme, âge, corticothérapie, dénutrition) augmente
(Fig. 6). On trouve alors les fibres médiales du muscle transverse également le risque d’ISO. Mais le principal facteur de risque d’ISO
qu’on crochète par petits fascicules au dissecteur en les séparant reste la contamination du champ opératoire. L’ISO est particuliè-
du fascia transversalis, puis on les sectionne (Fig. 7). rement problématique dans le cadre de la cure d’éventration dans
On augmente déjà ainsi la mobilité de la gaine postérieure du la mesure où l’utilisation d’un renfort prothétique est incontour-
muscle droit. Puis, le décollement postérieur ouvre le plan pré- nable pour obtenir une réparation durable. Le renfort de référence
péritonéal au sein duquel on peut atteindre au tampon monté la à l’heure actuelle est une prothèse synthétique non résorbable
ligne axillaire antérieure. (en polypropylène [PP], polyester [PE] ou polyfluorure de vinyli-
Une fois la manœuvre réalisée des deux côtés, on pose une pro- dène [PVDF]). Si une infection atteint cette prothèse, le risque de
thèse rétromusculaire pré-aponévrotique très large qui déborde de survenue d’une suppuration chronique est important et aboutit
la ligne de section et s’étend en prépéritonéal. Il n’est pas toujours souvent à son retrait.
aisé de trouver ce plan à mi-hauteur, mais il est plus simple de le En raison de ce risque, le chirurgien doit veiller à la prise
faire en haut (en dessous du rebord costal) ou en bas (au niveau de de toutes les mesures préventives validées pour la prévention
l’arcade de Douglas). En revanche, il faut éviter d’inciser la gaine de l’ISO. Cela comprend les mesures préopératoires citées aux-
latérale des droits en allant trop loin (la ligne blanche latérale) car quelles on peut ajouter les protocoles de préparation cutanée en
le muscle qu’on sectionne alors par mégarde est l’oblique interne vigueur, l’antibioprophylaxie périopératoire, la technique chirur-
et non pas le transverse ; dans ce cas, même si le plan est aisé et gicale adaptée et soigneuse, le choix du bon matériel prothétique
semble naturel, il implique la dénervation complète des muscles en fonction du patient et de la contamination du champ opéra-
de la paroi et un « bulging » ultérieur. toire, et l’utilisation sensée des pansements à pression négative à
La séparation postérieure des composants de type TAR est, parmi visée prophylactique [22] .
les différentes techniques de séparation de composants, celle qui
semble obtenir le plus bas taux de récidives [21] . Elle est particu-
lièrement adaptée à la réparation avec prothèse rétromusculaire, Classifications
qui est la technique de référence actuellement. Cette technique
est également réalisable lors d’une cure d’éventration avec pro- Pour décider de la stratégie chez ces patients, en particulier du
choix de la prothèse, trois classifications sont utilisées actuelle-
ment dans la littérature pour évaluer le risque infectieux (Fig. 8).
La classification historique d’Altemeier a été reprise par les
classes de contamination (CDC). Elle ne tient compte que de
la contamination du champ opératoire et elle est applicable à
toute intervention chirurgicale. Plus le degré de contamination
du champ opératoire est élevé, plus le risque d’ISO l’est égale-
ment. La classification du Ventral Hernia Working Group (VHWG)
a été établie spécifiquement pour la chirurgie de la paroi et tient
compte des facteurs de risque du patient (qui suffisent à le classer
en grade 2) et du degré de contamination du champ opératoire
(grades 3 et 4 dans la version originale et grade 3 dans la version
Figure 6. Repérage de l’endroit où doit se pratiquer l’incision de la modifiée [mVHWG]) [23, 24] . Si on considère la mVHWG, le risque
gaine postérieure des droits, 5 mm en dedans des pédicules perforants. Il de complications du site opératoire est de 14 % pour le grade 1,
faut absolument éviter d’aller jusqu’au bord latéral de la gaine. 27 % pour le grade 2, et 46 % pour le grade 3.

A B
Figure 7. Technique de séparation postérieure de composants (dite transversus abdominis release [TAR]). Avant d’inciser la gaine postérieure, il est important
de déployer un champ tissé recouvrant tout le paquet viscéral jusqu’à la ligne axillaire antérieure pour protéger les viscères en cas d’effraction du plan péritonéal
lors de la TAR. On observe après ouverture verticale de l’aponévrose postérieure des droits les fibres du transverse (A) qu’on va sectionner par petits faisceaux
au dissecteur en les séparant du fascia transversalis sous-jacent (B).

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B C

ou CDC class
A II III D
Altemeier

Contaminée
contaminée
I IV

Propre-
Propre Sale

Grade 1 Grade 2 Grade 3 Grade 4


Faible risque Comorbidités Potentiellement Infectée
contaminée
VHWG

• Pas de • Tabagisme • ISO préalable • Prothèse infectée


comorbidité à • Obésité • Présence de stomie • Déhiscence
risque d’ISO • Diabète • Ouverture digestive d’origine
• Immunosuppression infectieuse
• BPCO

Grade 1 Grade 2 Grade 3


Faible risque Comorbidités contaminée
modifiée
VHWG

• Pas de • Tabagisme • A. Propre-


comorbidité à • Obésité contaminée
risque d’ISO • Diabète • B. Contaminée
• Immunosuppression • C. Sale
• BPCO
• ISO préalable

Figure 8. Schéma synoptique des trois classifications utilisées dans la littérature pour l’estimation du risque infectieux. En fonction de ces éléments, on peut
choisir le type de renfort prothétique à utiliser bien que certaines situations ne font pas l’objet d’un consensus. Il faut noter que la classification d’Altemeier
(aussi dite des classes de contamination [CDC]) est générale pour tout acte chirurgical et tient compte exclusivement du degré de contamination du champ
opératoire (pas du tout des caractéristiques du patient). VHWG : Ventral Hernia Working Group (2010) ; mVHWG : Ventral Hernia Working Group version
modifiée (2012) ; BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive ; ISO : infection du site opératoire.

Prothèses disponibles de la paroi abdominale et une intégration progressive avec


néo-angionenèse. En pratique, ce comportement observé chez
Les prothèses pariétales actuelles peuvent se diviser en trois l’animal ne s’est pas vérifié chez l’humain [26] . D’un point de
groupes. vue technique, il faut les fixer avec un monofilament non résor-
bable en raison de leur intégration lente (parfois erratique) dans
Prothèses synthétiques la paroi abdominale. Il n’y a pas eu de comparaisons entre les
différentes prothèses biologiques disponibles. Les séries publiées
Ce sont des treillis en PP, PE ou PVDF, matériaux non résor- montrent que la réparation d’une éventration en milieu conta-
bables, avec un grammage variable en fonction des marques. Elles miné en un temps avec une prothèse biologique est possible bien
restent la référence actuelle en matière de renfort pariétal et sont qu’elle soit coûteuse et grevée d’une morbidité et d’un taux de réci-
les mieux connues et évaluées. Quand elles sont destinées à être dive importants qui sont pour partie imputables à la complexité de
posées en position intrapéritonéale, elles sont induites d’un trai- l’éventration plus qu’à la prothèse [27, 28] . Cependant, l’utilisation
tement anti-adhérent dont l’effet n’est que partiel. Ces prothèses d’une prothèse synthétique dans ces conditions est grevée d’une
tolèrent globalement mal l’infection, mais il est vrai qu’il y a morbidité et d’un taux de récidive encore plus importants [29, 30] .
des différences en fonction de leur grammage et de la taille des
pores. L’attitude des auteurs est d’éviter leur utilisation dès qu’il Prothèses lentement résorbables
y a la moindre contamination du champ opératoire (CDC ≥ II ou
mVHWG = 3) et cette attitude reste la plus consensuelle dans la Dites « biosynthétiques » parce qu’elles réuniraient des carac-
littérature à l’heure actuelle [25] . téristiques des unes et des autres, elles sont constituées de divers
matériaux (poly-4-hydroxybutyrate [P4HB], acide polyglycolique
et/ou carbonate de triméthylène [TMC]) qui conditionnent leur
Prothèses biologiques vitesse de résorption. Les séries publiées jusqu’à présent (aucune
D’origine animale (bovin ou porcin), elles sont constituées de étude comparative) montrent des résultats très favorables avec
collagène décellularisé ayant subi différents traitements (réticu- ces prothèses qui donnent en milieu contaminé des résultats
lées ou non réticulées). Elles ont trouvé leur place dans le marché proches de ceux obtenus par les prothèses synthétiques en
européen à partir de 2010 en raison du risque infectieux associé milieu propre [31–33] . Elles sont moins coûteuses que les prothèses
à l’utilisation des prothèses synthétiques en milieu contaminé. biologiques mais plus que les synthétiques. Ayant abandonné
Elles étaient supposées avoir un comportement plus physiolo- l’utilisation des prothèses biologiques, on utilise volontiers une
gique, moins de réaction inflammatoire, induire un remodelage prothèse en P4HB (Phasix® , temps de résorption entre 12 et

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ging. On pose sous la paroi abdominale une interface en plastique


pour éviter l’adhérence des anses digestives [35] . Actuellement, le
plus simple est d’utiliser un dispositif de thérapie par pression
1
négative avec son film plastique sous la prothèse et la mousse
2 conventionnelle sur la prothèse (Fig. 9). Lors de 3 à 5 reprises
au bloc opératoire, on excise progressivement la prothèse de la
ligne médiane vers la périphérie avec des résections fusiformes. À
chaque résection, on referme la partie centrale de la prothèse par
3 un surjet.
Cette technique permet aussi de vérifier la bonne évolution du
problème intrapéritonéal. Ainsi, à chaque reprise, il reste moins
Figure 9. Technique de fermeture étagée de la paroi abdominale. Un de prothèse et les berges viennent progressivement vers la ligne
film plastique (3) est posé sur les viscères et une prothèse en polypropylène médiane qu’on peut finalement fermer sans tension [36] .
(2) est suturée aux berges aponévrotiques des grands droits. Par-dessus,
on met la mousse du dispositif de thérapie à pression négative (1) et on
rapproche la peau dans la mesure du possible. À chaque reprise successive,
on excise de façon fusiforme le centre de la prothèse et on la suture sur
la ligne médiane. Cela va progressivement tracter les grands droits à la
“ Points essentiels
ligne médiane et permettre leur fermeture directe (avec ou sans un renfort
prothétique supplémentaire). • Les éléments qui permettent de qualifier une éven-
tration de complexe sont morphologiques (taille et
localisation) mais surtout liés au risque infectieux (conta-
18 mois) dès qu’il y a la moindre possibilité de contamination
du champ opératoire (mVHWG grade 3), par exemple chez les mination du champ opératoire et fragilités du patient).
patients qui cumulent des facteurs de risque (mVHWG grade 2) • Le contrôle préopératoire des facteurs de risque de
et une éventration de grande taille qui a imposé une séparation complications (obésité, tabagisme, diabète) doit être une
de composants. En effet, en cas d’infection d’une grande prothèse priorité lors de la prise en charge d’une éventration
synthétique chez un patient où l’on a déjà utilisé des techniques complexe.
de séparations de composants, le retrait de la prothèse infectée • Pour les éventrations géantes (> 10 cm de largeur),
aboutirait à une situation dramatique. une injection de toxine botulinique 4 à 6 semaines avant
l’intervention pourrait faciliter la fermeture du plan apo-
Cas particuliers névrotique.
• En cas de perte du droit de cité, un pneumopéritoine
Deux situations méritent une attention particulière : la présence progressif de Goñi-Moreno permet de créer l’espace intra-
d’une prothèse infectée et l’urgence chirurgicale digestive associée abdominal nécessaire à la réparation mais aussi prépare le
à une éventration. patient d’un point de vue respiratoire. Il fait donc partie
Dans le cas de la prothèse infectée avec une suppuration chro-
de la préhabilitation.
nique, il ne faut pas espérer que le traitement antibiotique puisse
• Les techniques de séparation des composants (anté-
régler la situation. En fonction du mécanisme de l’infection (pri-
maire lors de la pose ou secondaire à un geste chirurgical ultérieur) rieure et postérieure ou TAR) permettent la fermeture de
et du type de prothèse, il faut adapter la stratégie intervention- la ligne médiane dans la majorité des éventrations.
nelle. • La séparation postérieure de composants est plus labo-
Un traitement énergique, comprenant la reprise chirurgicale rieuse que celle antérieure de composants mais présente
pour lavage et débridement sous couvert d’antibiothérapie sys- moins de récidives et de morbidité associée.
témique adaptée, éventuelle exérèse d’une partie exposée et • La fermeture étagée de l’abdomen par traction pro-
mise en place d’une thérapie par pression négative, peut abou- gressive sur la ligne médiane semble plus adaptée à une
tir parfois au sauvetage de la prothèse, en particulier si elle est situation d’urgence qu’à une cure d’éventration program-
légère et macroporeuse. En revanche, le retrait complet de la
mée.
prothèse est indispensable pour les prothèses en polytétrafluo-
• En cas de contamination du champ opératoire (mVHWG
roéthylène (PTFE) et pour la plupart des prothèses synthétiques
à fort grammage. Il est possible, dans un premier temps, d’en res- grade 3), on utilise des prothèses biosynthétiques lente-
ter à l’ablation partielle de la partie infectée (généralement non ment résorbables.
intégrée, en particulier en cas d’infection primaire) [34] . Malheu- • De plus en plus, on utilise ces mêmes prothèses
reusement, la persistance de l’infection est fréquente et l’ablation en l’absence de contamination du champ opératoire
radicale devient alors nécessaire. Dans tous les cas, on cherche lorsqu’un patient a des facteurs de risque d’infection du
à l’imagerie préopératoire l’existence d’une collection pariétale site opératoire (mVHWG grade 2).
qu’on pourrait drainer avant le geste dans le but de diminuer
l’inoculum bactérien. L’imagerie permet aussi de faire un état des
lieux par rapport à une récidive de l’éventration qui n’est pas forcé-
ment cliniquement détectable. Pour la réparation pariétale après
le retrait de la prothèse synthétique infectée, on utilise systémati-
quement une prothèse en P4HB rétromusculaire et un pansement Déclaration de liens d’intérêts : B. Borraccino a reçu le soutien de Covi-
aspiratif prophylactique. dien/Metronic pour des activités de formation.
L’urgence chirurgicale digestive associée à une éventration est Y. Renard a réalisé des activités rémunérées d’expertise et conseil pour Covi-
une situation difficile. De façon générale, il faut prioriser l’urgence dien/Medtronic, Bard France SAS et Paul Hartmann.
digestive et décaler la fermeture pariétale à un deuxième temps. P. Ortega Deballon a réalisé des activités rémunérées d’expertise et conseil
Cela permet de réparer la paroi dans de meilleures conditions. pour Bard France SAS, LifeCell/Acelity et Covidien/Medtronic.
Puis, en cas de réalisation d’une réparation pariétale simultanée,
la nécessité d’une reprise en raison d’une complication du geste
digestif imposerait de démonter la réparation. Si la fermeture  Références
directe n’est pas possible, la technique de fermeture étagée est une
option. Elle consiste en la traction progressive des berges aponé- [1] Slater NJ, Montgomery A, Berrevoet F, Carbonell AM, Chang A, Franklin
vrotiques vers la ligne médiane avec l’utilisation d’une prothèse M, et al. Criteria for definition of a complex abdominal wall hernia. Hernia
synthétique cousue aux berges comme s’il s’agissait d’un brid- 2014;18:7–17.

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B. Borraccino, Praticien hospitalier.


Service de chirurgie générale et digestive, CH d’Auxerre, 2, boulevard de Verdun, 89011 Auxerre, France.
Y. Renard, Maître de conférences des Universités, praticien hospitalier.
Service de chirurgie digestive et cancérologique, CHU de Reims, rue Cognacq-Jay, 51150 Reims, France.
P. Ortega-Deballon, Professeur des Universités, chirurgien des Hôpitaux (pablo.ortega-deballon@chu-dijon.fr).
Service de chirurgie générale, digestive et cancérologique, CHU du Bocage, 14, rue Paul-Gaffarel, 21079 Dijon cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Borraccino B, Renard Y, Ortega-Deballon P. Hernies incisionnelles (éventrations) - complexes.
EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif 2022;39(1):1-8 [Article 40-165-C].

8 EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif

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 40-880-E

Duodénopancréatectomie totale
et totalisation de pancréatectomie
A. Sauvanet

Résumé : La duodénopancréatectomie totale (DPT) est une intervention rare, parfois techniquement
difficile, et altérant significativement la qualité de vie du fait des troubles digestifs et du diabète pancréa-
toprive qu’elle induit. Sur le plan chirurgical, elle supprime le risque de fistule pancréatique postopératoire
mais elle pose des problèmes spécifiques, intéressant en particulier la vascularisation gastrique et splé-
nique, et augmente également le risque de complications ulcéreuses. Il faut distinguer la DPT « d’emblée »
ou en un temps, et la totalisation d’une pancréatectomie partielle faite préalablement. Cette totalisation
peut être indiquée en urgence pour une complication grave liée au moignon pancréatique après duodé-
nopancréatectomie céphalique, ou de façon programmée pour récidive tumorale sur le pancréas restant
quelle que soit l’intervention initiale.
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Mots-clés : Duodénopancréatectomie totale ; Totalisation de pancréatectomie ; Préservation pylorique ;


Ischémie gastrique ; Ulcère anastomotique

Plan • et la réalisation d’une DPC en présence d’un moignon pan-


créatique corporéo-caudal à très haut risque de FPPO (patient
■ Introduction 1 obèse, âgé, avec canal pancréatique fin, involution adipeuse
du pancréas restant) pour lequel certains chirurgiens évaluent
■ Technique 2 actuellement la totalisation de principe de la pancréatectomie
Duodénopancréatectomie céphalique immédiatement étendue avec isolement puis autotransplantation des îlots de Lange-
au pancréas distal 2 rhans du pancréas gauche dans le foie [2] .
Duodénopancréatectomie totale indiquée d’emblée sur les Actuellement, une DPT est principalement indiquée pour adé-
données de l’imagerie préopératoire 3 nocarcinome canalaire [1, 3] ou tumeur intracanalaire papillaire et
Totalisation en urgence après duodénopancréatectomie mucineuse du pancréas (TIPMP) [4–6] . En cas d’adénocarcinome,
céphalique 4 il existe dans 10 à 15 % des cas des lésions néoplasiques intraé-
Totalisation programmée 5 pithéliales de topographie diffuse, voire des formes invasives
■ Suites opératoires 5 multifocales [1] . Ces lésions épithéliales, reconnues par l’examen
histologique extemporané systématique de la tranche isthmique,
nécessitent une recoupe du pancréas corporéo-caudal, voire une
totalisation, afin d’obtenir une résection tumorale complète [3] .
 Introduction Les TIPMP posent les mêmes problèmes [4–6] . L’examen histolo-
gique extemporané de la tranche pancréatique doit être fait quel
Pendant longtemps, le but de la duodénopancréatectomie que soit le diamètre des canaux car, dans cette indication, la pré-
totale (DPT) a été double : d’une part, supprimer le risque vital sence ou l’absence d’une dilatation canalaire ne présage pas d’une
et/ou les symptômes invalidants liés à la maladie pancréatique atteinte tumorale et une atteinte histologique est un fort argu-
et, d’autre part, éviter le risque de fistule pancréatique postopé- ment pour « recouper » le pancréas restant afin d’obtenir une
ratoire (FPPO) après duodénopancréatectomie céphalique (DPC) tranche saine, en particulier sur le canal principal [4–6] .
lorsque ce risque apparaissait important (pancréas « mou », canal Les néoplasies endocriniennes multiples de type I constituent
de Wirsung fin), en particulier lors d’exérèse pour ampullome, une indication exceptionnelle à une DPT [7, 8] . L’indication est
cholangiocarcinome du cholédoque distal, adénocarcinome du habituellement posée pour des tumeurs multiples de plus de 2 cm,
duodénum, ou tumeur endocrine [1] . diamètre à partir duquel le risque de malignité devient significatif,
Les progrès des techniques chirurgicales et de la prise en charge ou en cas de sécrétion mal contrôlée par le traitement médi-
périopératoire et les importantes conséquences fonctionnelles de cal [7, 8] . Dans la pancréatite chronique calcifiante, une DPT est
l’intervention ont fait renoncer aux indications de DPT destinées parfois proposée, éventuellement associée à une autotransplanta-
à prévenir la fistule pancréatique. Les seules exceptions restantes tion d’îlots de Langherans, dans les formes hyperalgiques rebelles
à cette attitude sont : à tout autre traitement mais cette indication n’apparaît licite que
• la DPC avec résection + reconstruction artérielle pour lesquelles dans les formes génétiques car il existe de plus un risque de dégé-
certains auteurs préfèrent ne pas exposer l’anastomose artérielle nérescence [9] . Les métastases de cancer du rein sont devenues
à un risque d’érosion par la FPPO en totalisant de principe la une indication très rare, en particulier depuis l’avènement des
pancréatectomie [1] ; anti-angiogéniques.

EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif 1


Volume 39 > n◦ 1 > février 2022
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40-880-E  Duodénopancréatectomie totale et totalisation de pancréatectomie

A
Figure 1.
A. Vue peropératoire d’une duodénopancréatectomie totale avec conservation du pylore avant rétablissement des continuités biliaire et digestive : la veine
gastrique gauche (1) et la veine gastrique droite (2) ont été disséquées et conservées.
B. Duodénopancréatectomie totale avec antrectomie, splénectomie et résection des vaisseaux spléniques. L’estomac n’est plus vascularisé que par l’artère
et la veine gastriques gauches (cette dernière se terminant au bord gauche de la confluence splénomésaraïque et parfois comme ici au bord supérieur de la
veine splénique).

Enfin, exceptionnellement, une totalisation de pancréatecto- neuse pouvant nécessiter de recouper l’estomac pour effectuer
mie peut être indiquée en urgence pour une complication septique la gastro-jéjunostomie en zone bien vascularisée.
ou hémorragique liée au moignon pancréatique après DPC [1] , ou Chronologiquement, une DPC étendue au pancréas distal est
pour récidive tumorale, habituellement tardive, dans le pancréas donc faite de la droite vers la gauche. La totalisation de la pan-
restant après DPC ou pancréatectomie gauche [10–12] . créatectomie résulte de la positivité de l’histologie extemporanée
des tranches pancréatiques successives faites tous les 3 cm envi-
ron [5, 10] . Il faut en effet essayer de préserver, par des sections
répétées, la queue du pancréas car elle est susceptible d’assurer
 Technique à elle seule une part importante, sinon totale, de l’équilibre gly-
cémique. Les vaisseaux pancréatiques inférieurs (collatérales du
Duodénopancréatectomie céphalique pédicule mésentérique supérieur) et l’artère pancréatique dorsale
immédiatement étendue au pancréas distal (naissant du bord inférieur du tronc cœliaque ou de la portion
proximale de l’artère splénique) doivent être liés et sectionnés
Il s’agit le plus souvent d’une DPC faite pour adénocarcinome puis les vaisseaux spléniques sont disséqués de la droite vers la
multifocal ou pour TIPMP, immédiatement étendue au pancréas gauche avec hémostase par ligatures au monobrin serti 5/0 ou 6/0
distal en raison de la présence de maladie résiduelle sur la tranche ou clips de leurs collatérales destinées au corps puis à la queue du
pancréatique. pancréas (Fig. 2).
L’intervention commence comme une DPC. Si celle-ci était En cas d’aspect de tumeur invasive dans le pancréas distal ou
indiquée pour TIPMP, la préservation de principe du pylore et d’adhérence très serrée avec les vaisseaux, il faut lier et sectionner
surtout des vaisseaux gastriques droits (pyloriques) permet de pré- l’artère splénique à son origine, puis la veine splénique à sa ter-
venir un risque de dévascularisation gastrique en cas d’extension minaison, et compléter l’exérèse souvent avec une splénectomie.
de l’exérèse au pancréas distal [10, 13] du fait de l’histologie extem- En l’absence de tout contexte de cancer invasif dans le pancréas
poranée de la tranche de section si, pour une raison liée à la distal ou d’inflammation majeure à son contact, notre habitude
maladie ou à un problème technique, les vaisseaux spléniques et est d’essayer de conserver la rate. Pour cela, il faut reconnaître
la rate devaient être sacrifiés. Notre habitude est donc de préser- avec précision le trajet sinueux de l’artère splénique, exposant à
ver le pylore, la continuité des vaisseaux pyloriques et le cercle la survenue d’une plaie ou d’une ligature accidentelle. Dans ce
vasculaire de la petite courbure au cours des DPC pour TIPMP but, il faut mobiliser le mésogastre postérieur en incisant le péri-
(Fig. 1A), sauf dans les formes infiltrantes s’il existe un risque toine pariétal au-dessus et en dessous du corps du pancréas et de
de résection R1 au contact du premier duodénum et du pédicule repérer le trajet de l’artère par sa face postéro-supérieure. Cette
hépatique. En effet, la DPT peut aboutir à une dévascularisation manœuvre facilite également une lymphadénectomie au contact
ou à une congestion gastrique [10, 13] si l’intervention comporte des vaisseaux spléniques. En cas de désinsertion d’une collatérale
successivement (Fig. 1B) : artérielle, un clampage temporaire de l’artère splénique à son ori-
• une antrectomie avec sacrifice des vaisseaux gastro-épiploïques gine facilite la suture du moignon artériel au fil monobrin 6/0.
droits et des vaisseaux gastriques droits (pyloriques) ; La dissection est plus difficile dans le hile de la rate et nécessite
• un sacrifice des vaisseaux spléniques rendu nécessaire par alors, après abaissement de l’angle colique gauche, la mobilisa-
l’existence d’un foyer tumoral invasif et/ou un problème de tion complète de la queue du pancréas qui doit être « extirpée »
dissection peropératoire ; du hile de la rate par sections de ses attaches péritonéales en avant
• un traumatisme de la veine gastrique gauche qui s’abouche et surtout en arrière, voire l’extériorisation du mésogastre posté-
habituellement au bord gauche de la confluence spléno- rieur afin de mieux visualiser les branches des vaisseaux spléniques
mésaraïque. En effet, la conservation de cette veine peut se et le pédicule gastro-épiploïque gauche. En cas d’interruption
révéler difficile en cas de trajet aberrant et/ou de phénomènes accidentelle isolée de l’artère splénique, l’estomac et la rate res-
inflammatoires marqués [10, 13] . Si la veine gastrique gauche tent habituellement bien vascularisés – surtout si les vaisseaux
est interrompue, l’estomac n’est plus vascularisé par voie arté- gastriques droits ont été conservés – et la rate peut alors sou-
rielle que par l’artère gastrique gauche (coronaire stomachique) vent être conservée. Si seule la veine est sténosée ou occluse, il
et son retour veineux est assuré par les seules veines péri- est préférable de lier l’artère splénique pour éviter une hyper-
œsophagiennes et le ligament gastrophrénique au contact du tension portale segmentaire et la viabilité de la rate doit être
pilier gauche du diaphragme. Il se développe alors une stase vei- appréciée par sa coloration et éventuellement un échodoppler

2 EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif

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Duodénopancréatectomie totale et totalisation de pancréatectomie  40-880-E

3 4 5

Figure 2. Duodénopancréatectomie totale ayant débuté par une duo-


dénopancréatectomie céphalique, suivie d’une résection du pancréas Figure 3. Reconstruction après duodénopancréatectomie totale (avec
corporéo-caudal par segments successifs. L’estomac, représenté ici sec- conservation du pylore) : anastomoses hépatico-jéjunale et duodéno-
tionné, est habituellement entièrement préservé ou le siège d’une courte jéjunale, effectuées sur la première anse ascensionnée en transmésoco-
antrectomie. Au cours de la totalisation de la pancréatectomie, les étapes lique.
vasculaires successives sont : 1. Ligature des vaisseaux pancréatiques infé-
rieurs ; 2. ligature de l’artère pancréatique dorsale ; 3. dissection et, si
possible, préservation de la veine gastrique gauche ; 4. dissection de Pour les TIPMP, il faut toujours examiner l’imagerie de façon
l’artère splénique, au trajet souvent sinueux, et de la veine splénique dont critique, penser à la possibilité d’une infiltration purement inflam-
le trajet dessine un sillon à la face postérieure du pancréas ; 5. dissection matoire des vaisseaux (chez un patient ayant fait des poussées
des branches des vaisseaux spléniques dans le hile de la rate. de pancréatite) et à celle d’une dilatation canalaire « passive »
d’amont (par obstruction) ou d’aval (par migration de mucus
vers la papille) dans une partie du pancréas qui pourrait donc
recherchant un flux persistant dans son parenchyme. Si la rate ou être conservée, et sectionner le pancréas à cet endroit pour effec-
surtout l’estomac deviennent ischémiques ou congestifs, un geste tuer une histologie extemporanée de la tranche de section, seule
de reconstruction vasculaire (résection-anastomose sur l’artère capable d’affirmer l’étendue de la maladie et le bien-fondé d’une
splénique, anastomose veineuse spléno-rénale temino-latérale, pancréatectomie totale [5] .
anastomose spléno-mésentérique inférieure termino-terminale Une pancréatectomie totale d’emblée doit être faite en mono-
ou anastomose spléno-gonadique) peut éviter une splénectomie bloc, de la gauche vers la droite, ou de la droite vers la gauche.
ou surtout une extension de la gastrectomie [10, 13] . En cas de cancer invasif céphalique ou médio-pancréatique, la
La DPT peut aussi être la conséquence d’une extension vers la première variante permet de découvrir une contre-indication vas-
droite d’une spléno-pancréatectomie gauche, par exemple pour culaire à la résection en début d’exérèse et la deuxième permet
une TIPMP dont l’histologie extemporanée de la tranche de sec- de rechercher d’emblée une extension vasculaire pouvant contre-
tion, faite en arrière de l’artère gastroduodénale ou à l’aplomb de indiquer (extension au tronc cœliaque ou à l’artère mésentérique
la voie biliaire principale, ne permettrait pas d’obtenir une marge supérieure) ou modifier sensiblement (extension à l’axe veineux
saine. Dans ce cas, on termine l’exérèse pancréatique par une DPC mésentérico-porte) l’exérèse. Quelle que soit la variante retenue,
devant préserver le pédicule gastrique droit donc sans dissection il faut d’abord commencer par exposer largement la région par
extensive du pédicule hépatique. un décollement duodénopancréatique complet, puis disséquer au
Une fois l’exérèse pancréatique terminée, la reconstruction bord supérieur du pancréas la veine gastrique gauche, puis les
s’effectue par une anastomose hépatico-jéjunale termino-latérale branches de division du tronc cœliaque (Fig. 4).
à proximité du cul-de-sac de la première anse jéjunale ascension- La DPT « de la gauche vers la droite » est adaptée à l’exérèse des
née en transmésocolique, puis 40–50 cm en aval de la précédente tumeurs prédominant dans le pancréas distal qui, avec la rate, est
par une anastomose gastrojéjunale ou, en cas de conservation mobilisé en premier par décollement du mésogastre postérieur,
du pylore, duodéno-jéjunale termino-latérale (Fig. 3). La première éventuellement sous couvert d’une ligature-section proximale de
anastomose est faite par deux hémisurjets ou à points séparés de l’artère splénique et des vaisseaux courts gastrospléniques pour
monobrin résorbable 5/0 ou 6/0 en fonction du diamètre et de diminuer les pertes sanguines. La veine mésentérique inférieure
l’épaisseur de la paroi biliaire. La deuxième anastomose est faite est liée et sectionnée à sa terminaison sur la veine splénique, puis
en transmésocolique ou en précolique. on fait de même avec la veine splénique à sa terminaison sur l’axe
Certains auteurs avaient recommandé une vagotomie tron- veineux mésentérico-porte (Fig. 5). On peut ensuite cliver l’isthme
culaire systématique afin de diminuer le risque d’ulcère de la face antérieure du confluent mésentérico-porte, puis liga-
anastomotique, mais ce geste semble inutile depuis l’avènement turer et sectionner l’artère gastroduodénale (après manœuvre de
des inhibiteurs de la pompe à protons qui doivent être prescrits clampage pour dépister une sténose du tronc cœliaque) et ter-
systématiquement et de façon définitive en postopératoire [10, 12] . miner l’exérèse par le temps céphalique avec section de la voie
Un drainage est habituellement placé au contact de l’anastomose biliaire principale et de la première anse jéjunale avec manœuvre
hépatico-jéjunale. du décroisement puis, selon que l’on souhaite réaliser ou non une
préservation antro-pylorique, soit la section du premier duodé-
num et des seuls vaisseaux gastro-épiploïques droits à leur origine,
Duodénopancréatectomie totale indiquée soit – seulement si nécessaire pour obtenir une marge saine – une
d’emblée sur les données de l’imagerie section de l’antre, des vaisseaux gastriques droits dans le pédicule
préopératoire hépatique et des arcades de la grande et de la petite courbure (avec
alors un risque sur la vascularisation gastrique).
Cela peut être le cas pour certaines formes manifestement dif- La DPT « de la droite vers la gauche » est adaptée à l’exérèse
fuses de TIPMP [6] ou des néoplasies endocriniennes multiples [7] . des tumeurs prédominant dans le pancréas céphalique car elle

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40-880-E  Duodénopancréatectomie totale et totalisation de pancréatectomie

5
6

Figure 6. Duodénopancréatectomie totale monobloc « de la droite vers


la gauche » : représentation schématique des différents temps opéra-
toires sur une coupe grossièrement transversale. 1. Section de la voie
biliaire principale ; 2. section de la première anse jéjunale et décroise-
ment ; 3. section du premier duodénum (peut être remplacée par une
Figure 4. Duodénopancréatectomie totale monobloc : exposition de la section antrale) ; 4. section de la lame rétro-portale au contact de l’artère
totalité de la glande pancréatique par décollement duodénopancréatique mésentérique supérieure ; 5. dissection de la face antérieure du confluent
complet, puis dissection des vaisseaux situés au bord supérieur du pan- splénomésaraïque ; 6. section des collatérales des vaisseaux spléniques.
créas (veine gastrique gauche et branches de division du tronc cœliaque).

vérifié, on peut ensuite réséquer le bloc duodénopancréatique en


sectionnant successivement la voie biliaire principale et l’artère
gastroduodénale, la première anse jéjunale avec manœuvre du
décroisement, la lame rétro-portale, le tube digestif proximal (au
niveau de l’antre ou du premier duodénum), puis en disséquant
complètement l’axe veineux mésentérico-porte en liant toutes
ses collatérales, puis en mobilisant le pancréas en disséquant de
la droite vers la gauche la face antérieure du confluent spléno-
mésaraïque, puis la faux de l’artère hépatique commune ; après
section des vaisseaux pancréatiques inférieurs et de l’artère pan-
créatique dorsale, l’artère et la veine spléniques peuvent être
conservées avec la rate (Fig. 6).

Totalisation en urgence après


duodénopancréatectomie céphalique
L’intervention est décidée devant une complication grave (le
plus souvent, hémorragie incontrôlée par embolisation radiolo-
gique ou sepsis grave liée à une désunion anastomotique) liée au
moignon pancréatique et survenant dans les premiers jours ou les
premières semaines suivant une DPC. Il s’agit d’une réinterven-
tion techniquement très difficile, dont l’indication est souvent
retenue quand les autres procédés (suppression de l’anastomose
avec drainage externe du canal de Wirsung, éventuelle recoupe
partielle du moignon pancréatique, et exceptionnellement réfec-
tion de l’anastomose) ne sont pas techniquement envisageables.
Figure 5. Duodénopancréatectomie totale monobloc « de la gauche La mortalité après totalisation dans ce contexte est élevée, com-
vers la droite » : décollement du mésogastre postérieur après ligature- prise entre 25 et 70 % [15] .
section des vaisseaux courts gastrospléniques et de l’artère splénique à Le premier temps consiste à supprimer l’anastomose
son origine. On peut alors ligaturer et sectionner la terminaison de la pancréatico-digestive en la réséquant avec la partie la plus
veine mésentérique inférieure puis celle de la veine splénique. proximale de l’anse jéjunale en cas d’anastomose pancréatico-
jéjunale (un nouveau cul-de-sac est confectionné par agrafage
mécanique en amont de l’anastomose hépatico-jéjunale), ou en
permet plus facilement de conserver les vaisseaux spléniques, la la « démontant » en cas d’anastomose pancréatico-gastrique (en
rate et donc de minimiser le risque d’ischémie gastrique en cas de fermant alors l’estomac par des points séparés de monobrin 3/0
tumeur invasive à prédominance céphalique ou médiopancréa- ou 4/0). Le danger de la suppression de l’anastomose pancréatico-
tique pour laquelle une conservation du pylore et des vaisseaux digestive est de faire une plaie de l’axe veineux mésentérico-porte
gastriques droits apparaît hypothétique. Le plus logique est alors dont l’hémostase pourrait se révéler extrêmement difficile.
de commencer par la dissection vasculaire avec isolement de la Si le moignon pancréatique n’est nécrosé que sur quelques
faux de l’artère hépatique commune et surtout section première centimètres, qu’il est clivable des vaisseaux spléniques et que
de la lame rétro-porte au bord droit de l’artère mésentérique ceux-ci sont intègres (absence d’érosion vasculaire et de pseudoa-
supérieure ; cet abord « premier » de l’artère mésentérique supé- névrisme), on peut envisager un autre procédé que la totalisation
rieur permet, comme au cours des DPC, de s’assurer du caractère (cf. supra). Sinon, il faut identifier l’origine de l’artère splénique, la
complet de l’exérèse en s’aidant au besoin d’un examen histo- clamper en vérifiant la persistance d’un pouls dans l’artère hépa-
logique extemporané des gaines artérielles [14] . Une fois ce point tique et l’artère gastrique gauche (sinon, le clamp doit être déplacé

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Duodénopancréatectomie totale et totalisation de pancréatectomie  40-880-E

vers la gauche), lier l’artère splénique puis les vaisseaux courts gas- étant imprévisible, ils justifient une prévention systématique et
trospléniques et terminer l’exérèse du pancréas par une dissection définitive par inhibiteurs de la pompe à protons ;
prudente et une ligature sur clamps par surjet de monobrin 5/0 • une gastroplégie (environ 15 %), pouvant nécessiter le main-
ou 6/0 de la terminaison de la veine splénique en veillant à ne tien ou la réinsertion de la sonde gastrique, et qui nécessite
pas sténoser l’axe veineux mésentérico-porte. La conservation de alors une nutrition parentérale immédiate avec adaptation de
la rate est en règle impossible. l’insulinothérapie [10, 18] ;
• une lymphorrhée ou d’ascite chyleuse du fait de l’importance
de la dissection cœliomésentérique [18] ;
Totalisation programmée • très rarement, une fistule de l’anastomose hépatico-jéjunale ou
Les indications les plus fréquentes de ces réinterventions sont duodéno-jéjunale.
l’adénocarcinome canalaire [16] et les TIPMP [17] . Ces interven-
tions sont rares, voire exceptionnelles après adénocarcinome, et
ne doivent être envisagées qui si elles peuvent aboutir à une exé-
rèse de type R0, si possible après traitement « néoadjuvant » ou “ Points essentiels
« d’induction » [16] .
Il peut s’agir d’une réintervention pour récidive tumorale sur • La DPT est principalement indiquée pour des formes
le pancréas corporéo-caudal après DPC. Dans cette indication, la diffuses d’adénocarcinome pancréatique ou des tumeurs
dissection est parfois difficile autour de l’anastomose pancréatico-
intracanalaires papillaires et mucineuses de topographie
digestive, en particulier à sa face postérieure qui est proche du
confluent spléno-mésaraïque et de la terminaison de la veine diffuse.
gastrique gauche. Les possibilités de préservation de la vascu- • Il n’est actuellement plus justifié de réaliser une DPT dans
larisation gastrique sont difficiles à prévoir en préopératoire et le seul but de prévenir une fistule pancréatique après DPC.
dépendent de la réalisation préalable ou non d’une antrectomie, • En cas de DPT avec antrectomie et splénectomie, la
de la perméabilité de la veine gastrique gauche, et des possibilités vascularisation gastrique ne repose plus que sur le seul
de conservation des vaisseaux spléniques lors de la totalisation. La pédicule gastrique gauche dont la veine peut facilement
suppression de l’anastomose pancréatico-jéjunale est aisée : elle être blessée au cours de l’intervention.
peut être réséquée en bloc avec les premiers centimètres de l’anse • La conservation du pylore et des vaisseaux gastriques
jéjunale, fermée en amont de l’anastomose hépatico-jéjunale par droits permet de mieux préserver la vascularisation gas-
agrafage mécanique, puisque l’anastomose pancréatico-jéjunale
trique.
est en règle générale l’anastomose la plus proche du cul-de-sac
• La totalisation d’une pancréatectomie pose les mêmes
de l’anse. La suppression d’une anastomose pancréatico-gastrique
est plus difficile car l’estomac est fixé au pancréas, ce qui gêne le problèmes de préservation de la vascularisation gastrique.
repérage précis des vaisseaux ; une fois l’anastomose supprimée • La préservation splénique et des vaisseaux spléniques
en laissant éventuellement une étroite collerette de paroi gas- n’est théoriquement envisageable qu’en cas de tumeur
trique sur le pancréas, l’estomac doit être suturé, habituellement non invasive dans le pancréas corporéo-caudal, ce qui rend
par une suture manuelle, en veillant à l’hémostase des vaisseaux un curage splénique non nécessaire.
sous-muqueux gastriques. Le reste du montage ne doit pas être • Les principales complications immédiates de la DPT
modifié. sont : les ulcères anastomotiques gastro-jéjunaux ou
Si la DPC initiale a comporté une conservation des vaisseaux duodéno-jéjunaux, la gastroparésie et les épanchements
gastriques droits, il est fréquent dans l’expérience de l’auteur que
lymphatiques (chyleux ou non).
la rate reste bien vascularisée et puisse être conservée lors d’une
• La DPT se complique d’un diabète difficile à équilibrer,
totalisation, à la condition que la queue du pancréas soit exempte
de lésion invasive et que le hile de la rate soit disséquable. avec un risque accru d’hypoglycémies, du fait de la dispa-
Certaines TIPMP traitées par pancréatectomie gauche ou rition de sécrétions endogènes de glucagon.
spléno-pancréatectomie gauche récidivent sur le pancréas cépha-
lique. Idéalement, cette récidive est découverte par la surveillance
avant le développement d’un cancer invasif. Il est donc sou-
haitable et possible de traiter ces récidives par une DPC avec
conservation du pylore et des vaisseaux gastriques droits. Le réta-
Déclaration de liens d’intérêts : l’auteur déclare : Baxter (interventions ponc-
blissement de la continuité est fait selon la technique précisée plus
tuelles) ; Amgen (interventions ponctuelles).
haut.

 Suites opératoires  Références


La mortalité de la DPT est, dans les centres spécialisés en chi- [1] Hartwig W, Gluth A, Hinz U, Bergmann F, Spronk PE, Hackert T, et al.
rurgie pancréatique, d’environ 5 %, soit un taux peu différent Total pancreatectomy for primary pancreatic neoplasms: renaissance
de celui de la DPC [1, 10, 18] . Jusqu’à la reprise de l’alimentation of an unpopular operation. Ann Surg 2015;261:537–46.
per os, l’équilibration de la glycémie repose sur l’administration [2] Balzano G, Maffi P, Nano R, Mercalli A, Melzi R, Aleotti F, et al. Auto-
d’insuline rapide de façon discontinue (toutes les trois à quatre logous Islet Transplantation in Patients Requiring Pancreatectomy: A
heures), ou au pousse-seringue électrique, ou utilisant un proto- Broader Spectrum of Indications Beyond Chronic Pancreatitis. Am J
cole d’une injection lente + rapide, tout en veillant à la régularité Transplant 2016;16:1812–26.
des apports parentéraux puis oraux pour éviter les hypogly- [3] Zhang B, Lee GC, Qadan M, Fong ZV, Mino-Kenudson M, Desphande
V, et al. Revision of Pancreatic Neck Margins Based on Intraopera-
cémies [18] . L’insuffisance exocrine doit être compensée dès la
tive Frozen Section Analysis Is Associated With Improved Survival
réalimentation, avec des doses d’extraits pancréatiques souvent
in Patients Undergoing Pancreatectomy for Ductal Adenocarcinoma.
plus importantes qu’après DPC et l’ajout de ralentisseurs du transit Ann Surg 2019 Dec 5 [Epub ahead of print].
peut être nécessaire en cas de diarrhée persistante [10, 18] . [4] Kang MJ, Jang JY, Lee KB, Chang YR, Kwon W, Kim SW. Long-term
Les complications possibles sont : prospective cohort study of patients undergoing pancreatectomy for
• un ulcère gastro-jéjunal ou duodéno-jéjunal, y compris dans intraductal papillary mucinous neoplasm of the pancreas: implications
la période postopératoire précoce [10, 12] . Ces ulcères, dont la for postoperative surveillance. Ann Surg 2014;260:356–63.
prévalence est de 20 à 25 %, pourraient résulter d’un défaut [5] Couvelard A, Sauvanet A, Kianmanesh R, Hammel P, Colnot N, Levy
de tamponnement des sécrétions acides gastriques par le suc P, et al. Frozen sectioning of the pancreatic cut surface during resection
pancréatique, et s’expriment parfois précocement par une of intraductal papillary mucinous neoplasms of the pancreas is useful
complication (perforation, hémorragie). Leur délai de survenue and reliable: a prospective evaluation. Ann Surg 2005;242:774–8.

EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif 5


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40-880-E  Duodénopancréatectomie totale et totalisation de pancréatectomie

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A. Sauvanet, PU-PH (alain.sauvanet@aphp.fr).


Service de chirurgie hépatobiliaire et pancréatique, DMU Digest, Hôpital Beaujon, 100, boulevard du Général-Leclerc, 92110 Clichy, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Sauvanet A. Duodénopancréatectomie totale et totalisation de pancréatectomie. EMC - Techniques
chirurgicales - Appareil digestif 2022;39(1):1-6 [Article 40-880-E].

6 EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif

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 40-880-A

Pancréatectomies
A. Sauvanet

Résumé : Les pancréatectomies, ou résections partielles ou totales du pancréas, sont indiquées par
des tumeurs malignes et des lésions bénignes, tumorales ou inflammatoires. Ces interventions sont
représentées par des techniques variées de résection parenchymateuse, auxquelles on peut associer les
énucléations (ablation d’une tumeur sans résection parenchymateuse adjacente) et les ampullectomies
(résection limitée à l’appareil ampullaire). Le type de pancréatectomie est guidé par la localisation de la
lésion, son caractère tumoral invasif ou non invasif, et la coexistence éventuelle de phénomènes inflam-
matoires. La plupart des pancréatectomies exposent à une morbimortalité significative à court et long
termes, qui doit toujours être mise en balance avec le pronostic de la maladie sous-jacente et qui a justifié
le développement de variantes techniques destinées à en diminuer l’importance.
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Mots-clés : Pancréatectomies ; Indications ; Complications ; Énucléations pancréatiques ; Ampullectomies

Plan centrale [6] , énucléation [7] ), a très nettement augmenté afin de


limiter le risque d’insuffisance pancréatique endocrine et/ou exo-
■ Introduction 1 crine, ainsi que celui de troubles fonctionnels digestifs à distance.

La part de la laparoscopie s’est accrue, en particulier pour les
Indications 1
exérèses qui ne nécessitent pas de reconstruction (pancréatecto-
Adénocarcinome 1
mie gauche, énucléation), car la laparoscopie diminue la durée
Pancréatite chronique 2
d’hospitalisation et les séquelles pariétales à distance par rapport
Duodénopancréatectomie totale 2
à la laparotomie [8, 9] .
Interventions d’épargne parenchymateuse : énucléation et
Le choix de la technique chirurgicale à utiliser, principalement
pancréatectomie centrale 2
guidé par le diagnostic supposé de la lésion pancréatique, néces-
Ampullectomie 2
site une connaissance approfondie par le chirurgien des maladies
■ Mortalité et morbidité de la chirurgie pancréatique 2 pancréatiques et une très bonne collaboration multidiscipli-
naire (chirurgien, radiologue, gastroentérologue, endoscopiste
interventionnel, et pathologiste) afin d’obtenir le diagnostic pré-
opératoire le plus précis possible. En peropératoire, un examen
 Introduction histologique extemporané est souvent nécessaire. Par ailleurs, la
morbidité importante de la chirurgie pancréatique nécessite un
Les indications et les techniques de pancréatectomies se recours fréquent à ces spécialistes, mais aussi aux radiologues
sont diversifiées. Autrefois principalement représentées par interventionnels et aux anesthésistes réanimateurs.
l’adénocarcinome canalaire et la pancréatite chronique, les indi-
cations actuelles des pancréatectomies sont fréquemment des
maladies bénignes (tumeurs endocrines non sécrétantes de moins  Indications
de 2 cm, insulinome, tumeurs intracanalaires en dysplasie de
bas grade, cystadénome mucineux, ampullome bénin) ou des Adénocarcinome
lésions de malignité « atténuée » (tumeurs endocrines non sécré-
tantes de plus de 2 cm, tumeurs endocrines sécrétantes autres que Les principes de la chirurgie curative de l’adénocarcinome
l’insulinome, tumeurs intracanalaires en dysplasie de haut grade, canalaire sont désormais bien connus. L’obtention de limites de
tumeur solide et pseudopapillaire, etc.) [1] . résections saines (R0, avec une marge supérieure à 1 mm) [10]
La gamme des indications s’étant élargie, les techniques chirur- en s’aidant au besoin d’une résection de l’axe veineux mésen-
gicales se sont diversifiées, principalement dans le but d’adapter téricoporte [11, 12] et/ou en faisant précéder l’intervention d’un
le risque immédiat et le résultat fonctionnel de l’intervention traitement « néoadjuvant » ou « d’induction » [11–13] et le peu
au pronostic de la maladie initiale. Ainsi, deux interven- d’utilité des résections artérielles associées [12] sont les points
tions résumaient l’essentiel des pancréatectomies il y a 30 ans essentiels guidant la chirurgie dans cette indication.
(duodénopancréatectomie céphalique et splénopancréatectomie En raison de la fréquence de gestes vasculaires – surtout vei-
gauche). Actuellement, la part des interventions, visant à limiter neux – dans cette indication, la chirurgie pancréatique nécessite
l’exérèse des organes péripancréatiques (duodénopancréatecto- une bonne connaissance des techniques de chirurgie vasculaire
mie céphalique avec conservation du pylore, pancréatectomie (résection veineuse latérale fermée par un patch péritonéal ou
céphalique avec conservation duodénale [2] , pancréatectomie veineux homologue, résection–anastomose directe ou avec un
gauche sans splénectomie [3] ) ou l’étendue du sacrifice paren- pontage, section du ligament arqué du diaphragme pour décom-
chymateux pancréatique (ampullectomie [4, 5] , pancréatectomie primer le tronc cœliaque) [12, 14, 15] .

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40-880-A  Pancréatectomies

Pancréatite chronique 2 % dans les centres spécialisés [21] . La mortalité de la pancréa-


tectomie gauche est de 1–2 % (hors exérèse multiviscérale) [8, 22] .
La part des pancréatectomies dans la chirurgie de la pancréatite Les autres interventions ont aussi une mortalité basse, inférieure
chronique a considérablement diminué. Dans les formes pure- à 1 % [4, 7, 9] , à l’exception peut-être de la pancréatectomie cen-
ment douloureuses ou en cas de complications compressives, trale [6, 23] . Chez un patient donné, la mortalité attendue peut être
les interventions de dérivation ont supplanté les interventions estimée par des calculateurs en ligne, tenant compte du terrain et
d’exérèse. Ces dernières ont vu leur étendue diminuer, avec de l’intervention proposée [24] .
l’émergence des pancréatectomies céphaliques sans exérèse duo- Cette baisse de la mortalité n’a pas été associée à une diminution
dénale (intervention de Beger) [2] ou de l’évidement céphalique de la morbidité, qui reste dominée par la survenue d’une fistule
avec dérivation wirsungojéjunale (intervention de Frey) [16] . La pancréatique postopératoire (FPPO) cliniquement significative
duodénopancréatectomie céphalique n’est plus indiquée que (c’est-à-dire prolongeant la durée du drainage péripancréatique
dans des formes anatomiquement particulières de pancréatite au-delà de 3 semaines, ou modifiant la prise en charge du malade,
chronique (présence d’une dystrophie kystique de la paroi duodé- voire mettant sa vie en danger) dont la prévalence varie entre 10
nale) ou en cas de doute avec un cancer [17] . La pancréatectomie et 25 % en fonction de l’intervention réalisée [25] .
gauche est réservée à certaines formes compliquées de cette Les facteurs de risque de survenue de FPPO sont actuellement
maladie (syndrome de déconnection pancréatique, pseudokyste mieux connus. Après duodénopancréatectomie céphalique, le
avec complications vasculaires et spléniques). Ces interventions caractère « sain » ou « mou » du parenchyme pancréatique restant,
peuvent être techniquement difficiles en raison de l’importance un canal de Wirsung non dilaté, un surpoids et/ou l’involution
des remaniements inflammatoires liés à la maladie. adipeuse du parenchyme pancréatique (plus fréquemment pré-
sente chez les patients obèses et âgés) augmentent le risque
de fistule pancréatique [21, 26] . Le rôle potentiellement délétère
Duodénopancréatectomie totale du drainage abdominal reste discuté [27] . Plusieurs scores sont
Ses indications autrefois exceptionnelles (adénocarcinome disponibles pour prédire le risque de FPPO après duodénopan-
étendu à la totalité de la glande pancréatique) se sont élar- créatectomie céphalique [21] . Après pancréatectomie gauche, ce
gies et sont actuellement principalement représentées par les sont surtout le surpoids, la dénutrition, et certaines modalités
tumeurs intracanalaires, bénignes ou malignes, lorsqu’elles ont de drainage abdominal qui prédisposent à la FPPO [22, 28, 29] . Des
une topographie diffuse, panglandulaire, affirmée par une ima- médicaments ou des procédés techniques, développés dans les
gerie précise et, chaque fois que possible, l’histologie [18] . Une chapitres suivants, permettent de limiter le risque de FPPO après
meilleure connaissance de l’histoire naturelle de cette maladie, duodénopancréatectomie céphalique et pancréatectomie gauche.
mais aussi les progrès de l’autosurveillance de la glycémie et Quelle que soit la méticulosité de la technique chirurgicale, les
de l’insulinothérapie, ont diminué les réticences à réaliser cette pancréatectomies peuvent être suivies de complications parfois
intervention dont les conséquences fonctionnelles restent impor- sévères, voire dramatiques (hémorragies artérielles, notamment),
tantes et doivent être réservées à des malades capables de gérer les y compris dans des équipes expérimentées. La chirurgie pan-
troubles digestifs et nutritionnels et le diabète parfois difficile à créatique ne peut donc être envisagée que dans des structures
équilibrer qu’elle entraîne [19] . suffisamment importantes pour que toutes les compétences néces-
saires soient réunies. À côté de ces compétences, il existe de plus en
plus d’arguments pour penser qu’un volume d’activité important
Interventions d’épargne parenchymateuse : permet de limiter la mortalité des pancréatectomies, en particulier
énucléation et pancréatectomie centrale pour la duodénopancréatectomie céphalique [23] .

Ces interventions ont été développées car le risque immédiat


et à distance des exérèses « classiques » (duodénopancréatectomie Déclaration de liens d’intérêts : Baxter (interventions ponctuelles) ; Amgen
céphalique et splénopancréatectomie gauche) est apparu excessif (interventions ponctuelles).
pour le traitement de certaines tumeurs bénignes, en particulier
chez des patients jeunes chez lesquels on souhaite limiter le risque
de diabète. Ces interventions, qui n’ont pas de vocation carcino-
logique, nécessitent une caractérisation parfaite des lésions, en
 Références
particulier de leur caractère non invasif et de leur topographie [1] Birnbaum DJ, Gaujoux S, Berbis J, Dokmak S, Hammel P, Vullierme MP,
(siège isthmocorporéal pour celles à traiter par pancréatectomie et al. Surgery for pancreatic neoplasms: how accurate are our surgical
centrale [6] , ou à distance du canal pancréatique principal pour les indications? Surgery 2017;162:112–9.
lésions énucléables [7] ). Leur morbidité immédiate (risque élevé [2] Beger HG, Kunz R, Poch B. The Beger procedure: duodenum-preserving
de fistule pancréatique) est compensée par une préservation quasi pancreatic head resection. J Gastrointest Surg 2004;8:1090–7.
totale des fonctions endocrine et exocrine à distance [6, 7, 9] . [3] Ferrone CR, Konstantinidis IT, Sahani DV, Wargo JA, Fernandez-del
Castillo C, Warshaw AL. Twenty-three years of the Warshaw opera-
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Ampullectomie 2011;253:1136–9.
[4] Ceppa EP, Burbridge RA, Rialon KL, Omotosho PA, Emick D, Jowell
Cette intervention ne s’adresse qu’à des tumeurs ampullaires PS, et al. Endoscopic versus surgical ampullectomy: an algorithm to treat
non invasives [4, 5] , pour lesquelles la duodénopancréatecto- disease of the ampulla of Vater. Ann Surg 2013;257(2):315–22.
mie céphalique est un geste excessif. Également dépourvue de [5] Sauvanet A, Dokmak S, Cros J, Cazals-Hatem D, Ponsot P, Palazzo M.
vocation carcinologique, l’ampullectomie nécessite de réunir le Surgical ampullectomy with complete resection of the common bile duct:
maximum d’arguments en faveur du caractère non invasif de a new procedure for radical resection of non-invasive ampulloma with
la tumeur, et donc une très bonne collaboration avec les endo- biliary extension. J Gastrointest Surg 2017;21:1533–9.
scopistes d’autant plus justifiée que ceux-ci peuvent également [6] Goudard Y, Gaujoux S, Dokmak S, Cros J, Couvelard A, Palazzo M,
procéder à une ampullectomie endoscopique. et al. Reappraisal of central pancreatectomy: a 12-year single-center
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duodénopancréatectomie céphalique, qui était supérieure à 10 % [9] Song KB, Kim SC, Hwang DW, Lee JH, Lee DJ, Lee JW, et al. Enucleation
au cours des années 1980, est passée sous le seuil des 5 % dans for benign or low-grade malignant lesions of the pancreas: single-center
les années 1990 [20] et peut désormais descendre jusqu’à environ experience with 65 consecutive patients. Surgery 2015;158:1203–10.

2 EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif

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A. Sauvanet, Professeur des Universités, praticien hospitalier (alain.sauvanet@aphp.fr).


Service de chirurgie hépatobiliaire et pancréatique, DMU Digest, Hôpital Beaujon, 100, boulevard du Général-Leclerc, 92110 Clichy, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Sauvanet A. Pancréatectomies. EMC - Techniques chirurgicales - Appareil digestif 2020;0(0):1-3 [Article
40-880-A].

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