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Élie Théofilakis
MODERNES,
ET APRÈS ?
"Les I m m a t é r i a u x ”
Éditions
a u t r e m e n t
La loi d u 11 m a r s 1957 interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation col-
lective. Toute r e p r é s e n t a t i o n ou r e p r o d u c t i o n intégrale ou partielle faite p a r quelque pro-
cédé que ce soit, sans le c o n s e n t e m e n t de l ' a u t e u r ou de ses ayants cause, est illicite et
constitue une contrefaçon sanctionnée p a r les articles 425 du Code pénal.
© 1 9 8 5 b y é d i t i o n s A U T R E M E N T , 4, r u e d ' E n g h i e n , 7 5 0 1 0 P a r i s
I S B N : 2 - 8 6 2 6 0 - 1 3 6 - 5 I S S N : 07 type="BWD"
« Pour nous
Les choses renaissent
en leur matière... »
Poète crétois du 1 6 siècle. Amoureux.
(Adaptation libre)
ÉDITORIAL
CONDITION HUMAINE,
L'INTERFACE
OU
LA TRANSMODERNITÉ
ÉLIE THÉOFILAKIS
— Q u ' i l m e s o i t p e r m i s ici d e r e m e r c i e r d e l e u r a i d e
a m i c a l e les m e m b r e s de l ' é q u i p e d e s « I m m a t é r i a u x »
ainsi que Brigitte Dyan, Yan de Kerorguen, Philippe
M e r l a n t e t J.-F. P i n t o - R o u s s e a u d e s É d i t i o n s A u t r e -
ment.
— Titres et i n t e r t i t r e s sont de la responsabilité du
directeur de l'ouvrage.
PREMIÈRE PARTIE
La Modernité exposée :
Les Immatériaux
... où l'on va vite s'apercevoir que parler d'une cer-
taine manifestation nommée les Immatériaux, c'est par-
ler de la rupture moderne/postmoderne... où l'on
apprend que nous vivons dans l'entre deux et que ce
n'est pas une condition facile... où l'on saisit que tout
ce qui nous entoure ne nous est pas destiné et qu'il fau-
dra tout redéfinir, inventer... où l'on découvre enfin que
nous sommes la première humanité « condamnée » à
s'autoréguler et qu'il faudra vite se mettre à
l'« œuvre »... et qu'enfin, ce que la manifestation
dé-montre, ce sont des dispositifs technologiques en
passe de constituer notre environnement et une nouvelle
écologie de l'esprit... (E.T.)
CHAPITRE PREMIER
L'actuelle dissémination
d e la p e n s é e p h i l o s o p h i q u e
J.-F. L. — Il y a aussi la vie quotidienne : je dirai
qu'à ce niveau les problèmes très répandus, du genre
peine de mort, statut des condamnés, des internés,
statut de la folie, de la vie, du droit d'auteur, du droit
d'expérimenter (voir Commission d'Éthique) sont des
problèmes philosophiques. Donc la philosophie se
trouve à la fois face aux institutions issues du siècle
des lumières et stabilisées sous la forme de l'enseigne-
ment dans les établissements secondaires et supé-
rieurs qui sont en déclin, ne sont plus à leur place, et
face à un appel venant de partout, des activités artisti-
ques, de la vie quotidienne, des sciences, de la techno-
logie. Un philosophe comme je le suis a plutôt ten-
dance à penser qu'il a intérêt à s'occuper un peu de ce
qui se passe en dehors des institutions ; qu'il lui faut
sortir de l'université. C'est la raison de ma présence
dans l'équipe de préparation des Immatériaux.
E. T. — La pilule, la filiation...
J.-F. L. — Oui, les problèmes d'autorité parentale...
Donc, une philosophie instituée, sclérosée, et une phi-
losophie qui est à faire ou qui se fait, sous une forme
disséminée, qui correspond finalement à la suppres-
sion d'un certain nombre de barrières « disci-
plinaires » : le biologiste aujourd'hui ne peut plus tra-
vailler sans l'informaticien ou le mathématicien, le
physicien sans le chimiste. Je ne dis pas qu'il ne peut
pas travailler sans le philosophe, ce n'est pas vrai,
mais il ne pourra pas s'épargner le moment de
réflexion concernant la finalité de ce qu'il fait. C'est
dans cet esprit que je prends cette expo en route :
pouvoir y inscrire de la philosophie.
La t a c h e c u l t u r e l l e d u t e m p s p r é s e n t
E. T. — Comment un philosophe qui enseigne ou
écrit des ouvrages peut animer une expo ? Au prix de
quelles métamorphoses ?
J.-F. L. — Cela me pose des problèmes considéra-
bles. J'agis dans le cadre de l'expo comme intellectuel
et non plus comme philosophe. C'est une tâche cultu-
relle parallèle à celle de l'enseignement : elle résulte
de l'hypothèse que les gens ont une capacité qui n'est
pas développée dans le cadre de l'enseignement et
qu'il faut la développer. Notre équipe ne cherche pas
à faire une expo pédagogique — expliquer par
exemple les nouvelles technologies..., mais une expo
qui soit une œuvre d'art. De viser donc non pas la
capacité d'acquisition d'un public mais plutôt sa sensi-
bilité, c'est-à-dire un sentiment esthétique. On postule,
pour ce qu'on a à dire, une espèce de répondant dans
le public, au niveau, non pas de l'entendement, mais
du « sentiment » qu'il faudra éveiller. Comme pour
l'enseignement, on ne peut éveiller cette sensibilité
que si on tape un peu au-dessus de la sensibilité com-
munément admise, contrairement aux médias qui
n ' u t i l i s e n t que celle-ci. Nous voulons éviter
l'identification : nous cherchons à faire sentir une
espèce de déstabilisation de l'identité aujourd'hui. Que
les gens disent : qu'est-ce qui se passe ? Qui sommes-
nous ? Qui nous parle ? De quoi nous parlons-nous ?...
quand nous utilisons tous les produits liés à la techno-
logie moderne.
La r u p t u r e p o s t m o d e r n e
Personne n'est encore capable de définir cette rup-
ture postmoderne dans un sens qui ne soit pas lamen-
table et éclectique (commentaires d'art, architec-
ture...). Nous sommes convaincus qu'elle va durer des
décennies. Elle est inévitable. La tâche devant nous est
d'essayer de fournir une légitimité pour la société à
venir. L'expo veut éveiller cette préoccupation aussi,
car elle est sensible dans l'inquiétude des gens, même
si parfois ils essaient de refermer la question en for-
mulant des réponses, alors qu'il n'y en a pas.
La condition des p o s t m o d e r n e s
E. T. — C'est une sorte de condition expérimentale
exaltante mais aussi à la limite du supportable : à
chaque instant nous aurons aussi envie de bloquer la
roue, de nous asseoir sur une identité, des situations
stables.
J.-F. L. — Il y aura des recherches d'identification,
des recherches de sens établi. Alors que ce qui est
exigé, c'est plutôt la recherche de la recherche. On a
vécu depuis le cartésianisme sur une philosphie du
sujet qui était la mesure et, aujourd'hui, il y a son
déclin et le passage à un type de pensée tout à fait dif-
férent où les structures, les matrices de sens ne sont
pas établies, ou doivent être sans cesse rétablies.
E. T. — Je me demande si l'on ne s'achemine pas
d'un côté vers une sorte d'humanité de laboratoire, où
toutes les propositions sont possibles en génétique,
dans les arts, dans les sciences, une sorte d'accès à
l'harmonie en passant par la technoscience, la
technoculture ; et de l'autre côté, vers un quotidien
grouillant de blocages où les gens vont se réfugier
petitement comme tu disais.
J.-F. L. — Une humanité de laboratoire, c'est-à-dire
expérimentatrice, ce serait l'issue de crise la meil-
leure.
la statistique, rend plus complexe l'analyse écono-
mique qui ne sait plus à quel référent se vouer.
P e u t - o n e s t i m e r les f a n t ô m e s ?
G a g n e r sa vie
Un constat s'impose aujourd'hui : un effacement
s'est prononcé entre le secteur de la production et
celui de la consommation, modifiant l'ordre du
marché. Et la crise économique a permis d ' a d m e t t r e
la fonction de soupape des emplois informels nés de
cette dilution des frontières. De telles modalités, dont
certains conjoncturistes soulignent l'aspect libertaire,
définissent des styles de vie qui traduisent un nouvel
état de la chose industrielle, induisant des productions
à usage personnel. L'expression « gagner sa vie » dit
assez bien l'esprit qui gouverne cette philosophie
« obligée » du travail. Le marché se transforme en
aventure. La réalité en terra incognita. La comptabilité
en livre de recettes.
Par rapport à l'organisation du marché, les tacti-
ques de l'invisible défient les lois du monde physique.
Elles composent une alchimie dont les acteurs évo-
luent à la façon des ombres et des malins génies. Ce
n'est plus la réalité qui fonde leurs actions, mais le
« croyable ».
L'imaginaire que suscite cette culture de l'invisible,
où les êtres tels des fluides pénètrent les obstacles les
plus denses sans avoir besoin de les détériorer, tire sa
force de l'idée de potentialités illimitées et d'une
invention quotidienne du m a r c h é économique. L'infor-
matisation de la société favorise cette mise en scène
de l'intelligence. Moins d'objets et plus d'images dans
cette nouvelle ingéniérie. Plus d'imagination dans les
actions informelles, plus d'ingéniosité ! L'ingénieur de
l'informel crée son propre p a r c o u r s à la carte. Toutes
ces combinaisons répondent de manière rhétorique à
une crise de crédibilité de la société moderne, laquelle
ne possède plus de vérité stable, n'apporte plus de cer-
titude ni de preuves, tant les flux d'énergie nouvelle
qui la traversent dérangent le statut des objets et des
fonctions. La « vérité » de l'objet ne compte plus. On
préfère la justesse d'une transaction ou la curiosité
d'une image. Les réseaux qui sillonnent le champ de
l'informel ne fomentent pas de géographie des valeurs
mais des moments de crédibilité.
Le polytechnicien p o s t m o d e r n e
L'homme postindustriel, qui joue d'un tel système
fondé sur l'invisible et l'anonymat, tire satisfaction
non du désir de vaincre les sommets ou de gravir les
échelons mais du v œ u de « profiter » de l'exercice
p o u r soi-même. Il gagne sa vie. Et pour jouir du libre
service, il utilise les masques, s'invertit, se dédouble.
Il y a dans sa démarche une manière de faire et d'être
qui fait penser à l'immémoriale tradition poly-
technique, laquelle connaissait l'existence d'un monde
à l'envers coexistant avec un monde à l'endroit. Dou-
blant la réalité officielle, la conduite polytechnique,
dont le carnaval est une des manifestations, s'édifie
p a r un jeu variable fait d'appréciations esthétiques, de
bricolage et de magie. Elle constitue la principale
modalité d'exploration savante du monde de l'époque
moyenâgeuse en même temps qu'elle ruse et subvertit
les fondements du dogme.
Le polytechnicien postmoderne, lui, fait cohabiter la
rentabilité et la décontraction, la performance et la
relaxation. Le marché devient une manière de fête qui
satisfait à l'improvisation, à l'initiative, à l'autonomie.
En cela, il est proche de cet ingénieux entrepreneur
qu'est Hermès dont la figure, à plus d'un titre, est
d'une étonnante modernité. Le visage barbouillé de
suie, Hermès combine et marchande, usant de tous les
artifices. Aux carrefours des lieux, il prend place là où
l'on rencontre le changement et chemine à côté des
citoyens dans le déséquilibre aléatoire du monde.
Hermès, maître d'un entre-monde dont il est le média-
teur, travaille « au noir », il aide l'homme à pivoter au
gré des situations et favorise la mise en circulation
des rôles et des langages. Mais il n'a pas de vérité, il
n'est qu'un messager !
L'IMMATÉRIEL DE GUERRE
PAUL VIRILIO
T r o i s p e r s p e c t i v e s s ' o f f r e n t à n o u s . E n p r e m i e r lieu,
celle de la d o m i n a t i o n v i s u e l l e : c o n t r ô l e d e s m o u v e -
m e n t s et a c q u i s i t i o n d ' o b j e c t i f s l o i n t a i n s s o n t d e s
d o m a i n e s i n t e r d é p e n d a n t s d e la m a î t r i s e d e l ' i n f o r m a -
t i o n si n é c e s s a i r e à la g u e r r e a f i n d ' é v i t e r la d é s a s -
t r e u s e « s u r p r i s e ». E n s u i t e , c e l l e d u c o m m a n d e m e n t :
la s t r u c t u r e h i é r a r c h i q u e , c a s c a d e d e r e s p o n s a b i l i t é s
p r a t i q u e s d a n s l ' e n g a g e m e n t d e s f o r c e s d é f e n s i v e s et
o f f e n s i v e s t o u t ce s y s t è m e d e d é l é g a t i o n d u p o u v o i r
d u c h e f d e g u e r r e a u c o m m a n d a n t s u r le t e r r a i n et à
l ' e x é c u t a n t . E n f i n , les a r m e m e n t s ou, p l u s e x a c t e m e n t ,
les s y s t è m e s d ' a r m e s : c o m b i n a i s o n l o g i s t i q u e d e s
m o y e n s d e t r a n s p o r t e t de d e s t r u c t i o n , c e s « v e c t e u r s
de d é l i v r a n c e », d e p u i s le c h e v a l o u l ' a r c , l ' a r t i l l e r i e
n é v r o - b a l i s t i q u e a n t i q u e , les c a n o n s a u t o t r a c t é s , les
b l i n d é s , j u s q u ' a u x m i s s i l e s d e c r o i s i è r e et a u l a s e r .
Si n o u s s u r v o l o n s r a p i d e m e n t l ' h i s t o i r e d u c o n t r ô l e
et d e la s u r v e i l l a n c e m i l i t a i r e , n o u s c o n s t a t o n s q u e
c e t t e « d o m i n a t i o n » s ' e f f e c t u e t o u t d ' a b o r d p a r l'occu-
p a t i o n de vive f o r c e d e s o m m e t s n a t u r e l s , s i t e s d o m i -
n a n t s , p o i n t s é l e v é s d u t e r r i t o i r e , p o i n t s d e v u e d ' o ù le
r e g a r d s c r u t a t e u r s ' é t e n d a u loin, f o r m e s p r e m i è r e s de
la p r é v i s i o n et de l ' a n t i c i p a t i o n d e s m o u v e m e n t s
e n n e m i s , n é c e s s a i r e s à la m o b i l i s a t i o n p r é v e n t i v e d e s
f o r c e s . Ces o c c u p a t i o n s m i l i t a i r e s p r o v i s o i r e s , c o m p l é -
t é e s p a r c e l l e s d e s l i e u x de p a s s a g e obligé, cols,
défilés, gués, i s t h m e s m a r i t i m e s , s e r o n t p a r la s u i t e
p e u p l é e s p a r u n p a y s a n n a t q u i y t r o u v e r a s o n avan-
t a g e a v e c la p r o t e c t i o n c o n t r e les e x a c t i o n s . Ces s i t e s
n a t u r e l s d o m i n a n t s s e r o n t p a r la s u i t e f o r t i f i é s ,
p o u r v u s d e t o u r s de guet, de d o n j o n s o u e n c o r e
d ' a b b a t i a l e s d o n t les c l o c h e r s s e r v i r o n t à la fois
d ' o b s e r v a t o i r e et d e s i g n a l d ' a l a r m e . . .
B e a u c o u p p l u s t a r d , a u x XVII et XVIII siècles, avec
l ' e s s o r de l ' a r t i l l e r i e et les p r o g r è s de l ' o p t i q u e , la
lunette de visée remplacera cet « office de
p r é v e n t i o n » ; n o n s e u l e m e n t le p o i n t h a u t , n a t u r e l o u
b â t i , m a i s e n c o r e la « l o n g u e - v u e », le t é l e s c o p e , q u i
a p p r o c h e s a n s e f f o r t ce q u i se t i e n t a u loin, p r e m i e r
m o y e n de c o m m u n i c a t i o n i m m a t é r i e l a p r è s les
s i g n a u x d e f u m é e , b i e n a v a n t le t é l é g r a p h e C h a p p e , le
r a d i o - t é l é p h o n e et la t é l é v i s i o n . Au X I X siècle, l o r s de
la g u e r r e d e S é c e s s i o n n o t a m m e n t , c e t t e f o n c t i o n de
d o m i n a t i o n préventive sera assurée p a r des ballons
d ' o b s e r v a t i o n s u r l e s q u e l s p r e n d r o n t p l a c e d e s aéro-
s t a t i e r s m u n i s d ' a p p a r e i l s p h o t o g r a p h i q u e s et en utili-
s e r a m ê m e d e s « c e r f s - v o l a n t s m i l i t a i r e s », é q u i p é s de
b o î t i e r s p h o t o g r a p h i q u e s d é c l e n c h é s p a r fil. Avec la
P r e m i è r e e t s u r t o u t la S e c o n d e G u e r r e m o n d i a l e , le
X X siècle n a i s s a n t v e r r a l'avion de reconnaissance,
a r m é d ' u n e c a m é r a c i n é m a t o g r a p h i q u e à h a u t e résolu-
tion, p r e n d r e le r e l a i s d e s t o u r s et d e s b a l l o n s d ' o b s e r -
vation.
M a i s s u r t o u t , o n a s s i s t e r a , a v e c le r a d a r et le s o n a r ,
à l'invention de l'imagerie électronique, p r e m i è r e
dématérialisation significative d'une surveillance
a u d i o v i s u e l l e d é s o r m a i s a s s u r é e p a r les o n d e s , le
r a y o n n e m e n t é l e c t r o m a g n é t i q u e , les v i b r a t i o n s d ' u n
é t h e r é l e c t r o n i q u e . E n f i n , a u c o u r s d e s a n n é e s 60,
a v e c la c o n q u ê t e d e l ' e s p a c e e x t r a - a t m o s p h é r i q u e , les
s a t e l l i t e s d ' o b s e r v a t i o n et d e t é l é c o m m u n i c a t i o n per-
f e c t i o n n e r o n t le t é l e s c o p e d e G a l i l é e en d o n n a n t à con-
t e m p l e r , n o n p l u s les a s t r e s , m a i s la T e r r e , u n e T e r r e
o ù a u c u n m o u v e m e n t i m p o r t a n t ne p o u r r a p l u s ê t r e
e f f e c t u é s a n s q u e s ' a l l u m e q u e l q u e p a r t un é c r a n , u n
c l i g n o t a n t s u r u n e c o n s o l e é l e c t r o n i q u e , en a t t e n d a n t
le p r o c h a i n p e u p l e m e n t d e p l a t e s - f o r m e s o r b i t a l e s per-
manentes, s a t e l l i t e s d ' a l e r t e a v a n c é e , m i r a d o r s sidé-
r a u x p o u r la « g u e r r e d e s é t o i l e s » a n n o n c é e p o u r la
fin d u siècle.
De m ê m e , si m a i n t e n a n t n o u s c o n t e m p l o n s l'évolu-
t i o n h i s t o r i q u e d e s a r m e m e n t s et d e s d i f f é r e n t s sys-
t è m e s d ' a r m e s , d e p u i s les vieilles « a r m e s de p o i n g »
Les chiffres d'abord, les h o m m e s a p r è s : l ' I m m a t é r i e l d e la
Guerre.
Représentation d'une p a r t i e de l'État du Maine, USA. Les chiffres représen-
tent l'altitude p a r r a p p o r t au niveau de la m e r : unité de mesure, le pied, soit
30,48 cm. Cartographie digitale automatique, obtenue à p a r t i r d'un satellite de
reconnaissance, emmagasinée dans la m é m o i r e de l'ordinateur de bord d'un
« Cruise Missil ». Durant le vol de ce dernier, l'altimètre vérifie constamment
l 'exactitude de la trajectoire... C'est ce qu'on appelle un «recommandé ».
( Bulletin of Atomic Scientists, avril 1975.)
(couteau, glaive, épée, pique, etc.), les « armes de jet »
(pierre, flèche, javelot, etc.), j u s q u ' à l'armement
nucléaire contemporain, nous constatons une même
tendance. De même que les armes de poing ne cessent
de s'allonger au cours des siècles pour atteindre plus
facilement un ennemi qui se tient à distance et sou-
vent à cheval, les armes de jet ne cessent, elles, de
propulser plus loin un projectile dont l'effet destruc-
teur est c o n s t a m m e n t renforcé, jusqu'aux armes neu-
troniques « à rayonnement renforcé »... Depuis le
pilum romain, l'artillerie névro-balistique grecque ou
latine, utilisant l'élasticité naturelle de câbles tendus
capables de projeter à quelque cent mètres des blocs
de pierre, les arcs courts des primates jusqu'à l'arba-
lète en passant p a r les grands arcs anglais de la
bataille d'Azincourt, l'arquebuse, le mousquet, la cara-
bine et le fusil automatique actuel, nous observons un
déplacement constant, de l'énergie musculaire néces-
saire au maniement des armes à l'énergie nucléaire en
passant p a r l'utilisation de l'explosif moléculaire, cette
fameuse « poudre à canon » qui p e r m e t t r a un accrois-
sement considérable des portées et des cadences de
tir, et occasionnera finalement la disparition progres-
sive des r e m p a r t s et des boucliers massifs, la désinté-
gration des formations de combat en unités res-
treintes moins vulnérables.
Cette dématérialisation atteindra donc à la fois
l'arme et sa parade, le fort et la ville fortifiée, la
troupe et le troupier, d'où cette nécessité de la dissi-
mulation, du camouflage et, aujourd'hui, des leurres,
contre-mesures électroniques seules capables de pro-
téger contre l'impact de projectiles disposant de
« têtes chercheuses », ces armes nouvelles capables
d ' a c q u é r i r elles-mêmes leurs objectifs, dispositifs
« autodirecteurs » de missile, qui prendront le nom, ô
combien révélateur, de système Fire and Forget.
C ' e s t le s y s t è m e e x p e r t
mon décideur suprême
A travers les vicissitudes de l'histoire occidentale et
des monarchies européennes, cette exigence de l'éco-
nomie politique de la guerre ne cessera de se déve-
lopper, avec la montée des États-nations et les grands
affrontements a r m é s qui s'ensuivront. La naissance de
l'état-major général sera à m e t t r e à l'actif des énormes
problèmes de maintenance et des difficultés considéra-
bles rencontrés p a r les ministres et les officiers supé-
rieurs, avec l'accroissement constant du nombre des
c o m b a t t a n t s : de quelque dizaines de milliers jadis à
quelque centaines de milliers et, enfin, à quelque mil-
lions d'individus formant les gros bataillons néces-
saires à la victoire dans la guerre de masse. Situation
qui débouchera, au X I X mais s u r t o u t au XX siècle,
sur la p r i m a u t é de la logistique, l'installation de véri-
tables complexes militaro-industriels et scientifiques,
l'engagement d'une p a r t de plus en plus importante
des ressources nationales dans la recherche et le déve-
loppement de nouveaux armements, même en temps
de paix.
État-major d'armées en 1914, état-major de groupes
d'armées, en 1939-1945, avec MacArthur dans le Paci-
fique et Eisenhower, c o m m a n d a n t en chef interallié
du front européen, ce gigantisme préfigure le déclin
de la vieille hiérarchie militaire, déclin que l'arme
nucléaire imposera bientôt p a r sa puissance mais sur-
tout p a r la rapidité de sa délivrance : quelques heures
pour la bombe aérotransportée d'Hiroshima, moins
d'une heure pour les missiles intercontinentaux, quel-
ques minutes pour les fusées de portée intermédiaire
(SS 20, Pershing 2 ...) et enfin, quelques secondes pour
les missiles de courte portée actuellement installés en
Europe centrale...
Dématérialisation de l'armement, dépersonnalisation
du commandement, déréalisation des buts de guerre,
la question que nous pose actuellement l'« immatériel
de guerre » est centrale : après avoir accepté au cours
des siècles passés l'infinie délégation des pouvoirs
politique et militaire, leur tyrannique concentration,
allons-nous accepter de déléguer l'ultima ratio, la déci-
sion de déclarer la guerre, à des systèmes experts,
seuls capables de réagir en « temps réel » à d'autres
appareils du même type ? Couplage insensé de sys-
tèmes de détection et de tir a p p a r t e n a n t à des camps
opposés et susceptibles d'enclencher l'Apocalypse... De
fait, tout bien considéré, l'Apocalypse, ce n'est plus la
guerre nucléaire, mais la réponse positive ou négative
que nous apporterons à la question de l'automation.
CHAPITRE V
Fixe et mobile :
la Mort, la Vie
Tout est présent pour une grande mutation anthropo-
logique, un changement de société, de nouveaux dis-
cours, de nouvelles formes d'art.
Mais nous n'en connaissons que peu d'éléments, et
nous ne voyons pas clairement leur combinatoire. Par-
fois, portés par des flux que nous ne maîtrisons pas,
confrontés à des situations que nous ne savons pas réfé-
rencer, nous pressentons d'être pris dans une nouvelle
règle de jeu, qu'il nous faut décoder. Alors, notre iden-
tité de sujet humain, conçu comme porteur de volonté,
capable d'autonomie et donc de maîtrise à l'égard de
son environnement, nous échappe, en est déstabilisée.
C'est que les immatériaux ne nous laissent pas la place
du maître sur leurs structures opératoires: nous n'en
sommes qu'un des éléments possibles d'une vaste confi-
guration. Bien entendu, la figure de la modernité était
une figure de maîtrise à notre avantage. Celle des im-
matériaux est une figure postmoderne pour autant
qu'elle accentue cette maîtrise et la rend en même temps
conditionnelle : elle nous force à une position de déléga-
tion, dans la mesure où, pour la première fois de son
existence, l'humanité se partage des caractéristiques
essentielles et des activités spécifiquement humaines,
avec des dispositifs non humains. Du coup, toutes les
balises de l'existence, même physiques, les catégories
fondamentales qui permettaient de saisir la régulation
biologique, civique, juridique de l'être se trouvent dépla-
cées, « approfondies », remplacées même.
L'humain, pure « fiction », cherche son statut d'être
(redéfinition d'une naturalité humaine) et son droit
d'être (redéfinition de la personne morale). Désormais,
nous monnayons nos vies sur la margelle de l'éternité :
nous ouvrons nos existences sur des possibilités inouies
et parfaitement immanentes, nos existences transhumai-
nes qui jettent déjà des mobiles interfaces entre la Mort
la Vie. (E. T.)
LE NOUVEAU S P H I N X :
I. TRACAS E T D É F I
D E LA B I O - G É N É T I Q U E
MARIE-ODILE MONCHICOURT
avec la collaboration de
MARIE-LOUISE BAUD
Le c h e r c h e u r d a n s la m o d e r n i t é ,
cet a t t r a c t e u r é t r a n g e
Il débute comme ingénieur électronicien. Par le tru-
chement de la physique et des mathématiques, il
s'occupait alors de régulation non linéaire, jusqu'au
jour où il fait la connaissance d'un endocrinologue qui
l'incite à la régulation non linéaire en biologie égale-
ment. Il s'aperçoit alors que si la régulation dans le
domaine de la physique réclame une étude appro-
fondie, nécessitant des calculs extrêmement com-
plexes, par contre, dans tout organisme vivant, elle
s'effectue spontanément. Passionné par cet aspect de
la science, il décide alors de passer de la régulation
des fusées à celles des corps vivants. Par la suite, c'est
l'étude de la biologie moléculaire qui le séduit, en ce
sens que les molécules sont plus proches de l'informa-
tique que ne le sont les tissus.
L'efficacité : un m a x i m u m d'interfaces
Une étude approfondie des systèmes de régulation
dans les corps vivants le conduit à faire une distinc-
tion très nette entre les biologistes et les médecins.
Les premiers étant essentiellement pharmacologues et
thérapeutes, tandis que les seconds se cantonnent au
rôle de cliniciens et de diagnosticiens. Il déplore alors
le hiatus existant entre la chimie et la biologie :
« Ainsi, dit-il, il existe des chaires de chimie
thérapeutique; il n'existe par contre pas de chaire de
biologie thérapeutique dans les universités françaises
et c'est grand dommage ! Il faudrait pouvoir effectuer
une synthèse des deux disciplines ou, pour le moins,
arriver à trouver un terrain de coopération entre elles
deux ! » Remarquons d'ailleurs que ce phénomène est
plus particulier à la France puisque cette coopération
existe dans les pays anglo-saxons...
C'est à travers sa propre « condition expé-
rimentale » de scientifique qu'il saisit les diverses
facettes qui taillent un visage à la modernité.
Écoute et cybernétique,
un nouvel art du vivant
De cette modernité, il existe, pour Jean-Pierre Ray-
naud, deux définitions. La première pourrait
s'exprimer par l'écoute de tout ce qui bouge, c'est-à-
dire l'écoute de la vie ; la curiosité, l'échange, la com-
munication et donc l'ouverture en font partie. Bien
entendu, cet aspect de la modernité n'est pas nouveau,
puisque, de tous temps, ce sont des hommes animés
par de telles idées qui ont permis l'évolution des
sociétés. Par contre, et c'est là l'important, il faut
signaler le changement considérable, non pas dans la
forme de la pensée, mais dans l'élargissement specta-
culaire de l'univers que celle-ci peut désormais
embrasser. Cependant, la modernité consiste encore,
et c'est la deuxième définition de Jean-Pierre Raynaud,
à rendre vivant ce qui est inerte. Elle consiste à inté-
grer des parcelles de notre entourage à la vie, afin de
l'améliorer. C'est ainsi que nous assistons à une inter-
pénétration de la cybernétique et du vivant !
L'impératif éthique :
une morale artiste négociée
Jean-Pierre Raynaud ajoute que l'éthique jaillit
d'une confrontation avec l'environnement et naît d'un
consensus basé sur le bon sens obtenu par la consulta-
tion de l'ensemble des domaines de la connaissance :
sciences, technologie, politique, tradition. Cette der-
nière demeurant le point de repère essentiel d'un code
déontologique éventuel en dépit ou à cause de sa lente
évolution. Les disciplines prédominantes ont donc
toutes leur mot à dire dans la recherche commune
d'une évolution morale dans les expériences scienti-
fiques.
Mondialiser la morale
des expériences scientifiques
A partir de ces considérations Jean-Pierre Raynaud
déduit qu'il serait souhaitable de créer un Comité
d'éthique international présidé par des personnalités
représentatives des disciplines ci-dessus mentionnées.
Elles cautionneraient, à l'échelle mondiale, des expé-
riences menées dans divers domaines. Bien que ce
type d'organisme existe déjà à l'échelle nationale dans
plusieurs pays comme la France, les États-Unis, la
Grande-Bretagne... sa création à l'échelle internatio-
nale susciterait d'énormes difficultés pour des raisons
d'ordre structurel et protocolaire et, bien évidemment,
au niveau de son application.
Développement scientifique
et c h a n g e m e n t s o c i a l
Pour le chercheur en général, le social souffre
d'hystérésis par rapport au développement de la
science. Cette lenteur du rythme du développement
social se r e t r o u v e d ' a i l l e u r s aussi dans la
« récapitulation » qu'en font les philosophes. Il existe
en effet un hiatus irréconciliable entre la pensée
« moderne » et la science, la science gouvernée par la
technologie. Il est bien évident que l'une est incapable
de se développer à la vitesse de l'autre. D'une façon
générale, toute évolution s'effectue par résolution des
problèmes et redéfinition des priorités. C'est le devoir
du chercheur de stimuler cette évolution non seule-
ment en résolvant les problèmes, mais, également, en
effectuant une synthèse au niveau social et ceci d'une
façon globale. Cette évolution s'obtient donc en
embrassant l'extérieur et le général afin d'assurer le
bon fonctionnement de l'intérieur et du particulier.
C'est en restant vigilant face aux problèmes sociaux
d'ordre général que le chercheur peut améliorer son
environnement immédiat.
Sciences — Techniques
S o c i é t é s et P h y n a n c e s :
u n t o u t et d e s f i s s u r e s
L'amélioration de la condition humaine doit être
comprise tant au niveau économique qu'au niveau
1. De retard ; bref, le social serait en manque
médical. Le chercheur possède dont un certain pou-
voir sur l'état socio-politique de la société. La popula-
tion étant plus sensibilisée à son avenir concret immé-
diat, le chercheur doit agir directement dans cette
direction et favoriser l'amélioration de celui-ci. On
obtient ainsi une politique de la science qui, pour son
propre avancement, doit simultanément assurer l'élé-
vation du bien-être général. Mais cette extrapolation
de la science vers la politique n'est qu'apparente. En
effet, on ne peut dissocier, au fond, les divers secteurs
de la société. La science s'appuyant, pour son progrès,
sur la technologie, elle-même contrôlée par le secteur
politique, qui dépend lui-même de la conjoncture
financière internationale.
Ê t r e fille et m è r e :
la c o n d i t i o n t e c h n o l o g i q u e
d e la s c i e n c e
On voit donc mieux l'interdépendance existant entre
les secteurs et l'impossibilité pour la science de se dis-
socier de l'ensemble de la société. La science est à la
fois fille et mère de la technologie. Elle lui doit ses
progrès et règle les siens. Or, cette technologie
requiert des investissements considérables, dépassant
ce que la science elle-même peut financer de façon
indépendante. Cette dernière est donc tributaire
jusqu'à un certain point d'un marché technologique et
scientifique. La rentabilité est l'outil d'évaluation de la
découverte. On voit que tout est lié. On ne saurait pro-
poser un produit pharmaceutique rentable s'il ne pré-
sente pas un progrès évident sur un autre produit
équivalent, déjà mis sur le marché. La science rejoint
ici l'économie dont elle profite et qu'elle stimule aussi.
« S c i e n c e s d u r e s » et « s c i e n c e s m o l l e s » :
e n F r a n c e , o n se b o u d e . . .
La science ainsi liée à la technologie l'est également
à la finance, à l'emploi, à la politique. D'aucuns diront
que le dénominateur commun à ces secteurs est la
technologie elle-même, érigée en système, qui perméa-
bilise et embrasse tous les domaines de l'activité
sociale Mais si le chercheur, conditionné par son
statut d'académique des « sciences humaines », porte
sur la technologie un jugement impitoyable, le scienti-
fique, également conditionné par la science, voit, lui,
en la technologie la fée moderne. Les systèmes de
pensée doivent être révisés et se réadapter au fur et à
mesure de l'évolution. D'ailleurs, cette réadaptation
constante est indispensable à l'obtention nécessaire
d'un taux de croissance élevé. Le bon fonctionnement
de tels rouages requiert nécessairement le développe-
ment d'une stratégie de vie.
Le l i b é r a l i s m e , u n e s t r a t é g i e p o u r la vie ?
Les situations nouvelles, les potentialités, les
demandes et les exigences de notre modernité récla-
ment disponibilité, adaptation rapide, intégration, créa-
tivité. Il semblerait que le libéralisme soit le système
politique le mieux adapté à notre modernité et, par
conséquent, la meilleure stratégie de vie pour notre
époque. Jean-Pierre Raynaud voit le libéralisme du
troc r e m p l a c e r g r a d u e l l e m e n t le libéralisme
commercial ; l'échange des services remplaçant la
rétribution de ces services ; et, dans ce contexte, une
sélection naturelle de ce qui sera le plus adapté ou le
plus rentable. On assiste donc à une nouvelle poussée
du darwinisme social et biologique : la concurrence
est le milieu dans lequel s'affrontent tendances et indi-
vidus qui les soutiennent, la victoire et donc la
« survie » symbolique des idées institution et struc-
tures revenant à la couche performante.
La m o d e r n i t é , d e r n i è r e l i m i t e de l ' h u m a i n
Déjà le chimiste effectue en laboratoire une sélec-
tion qui ne constitue qu'une accélération du phéno-
mène naturel. Déjà on organise et dirige des
mutations : par l'implantation d'une sonde de déchif-
N o f u t u r e ? Si, b i o - f u t u r !
Q u e l d o i t ê t r e le b u t d u s c i e n t i f i q u e ? S o n g u i d e
d é o n t o l o g i q u e ? Il e s t i n d i s p e n s a b l e q u e s o n a c t i o n
s o i t e n t r e p r i s e p o u r le b i e n - ê t r e o u le m i e u x - ê t r e d u
s o c i a l . Il f a u t q u e l ' a m é l i o r a t i o n s o i t é v i d e n t e à t e r m e
p u i s q u ' i l est i m p o s s i b l e de p r é v o i r très loin. Le déve-
loppement non linéaire des sciences réclame donc,
c o m m e n o u s l ' a v o n s v u p l u s h a u t , la f o n d a t i o n d ' u n
comité d'éthique basé sur le consensus. Mais,
l ' h o m m e , l ' i n d i v i d u , f a c e à c e t t e é n o r m e m a c h i n e te-
c h n o l o g i q u e q u i , t o u t à l a f o i s , l u i f a c i l i t e l a v i e e t le
d é p l a c e , q u e devient-il ? Le fossé i n f r a n c h i s s a b l e q u i
va s'élargissant entre la conscience de l'individu non
initié et la puissance du système technologique, qui le
comblera ?
De la t e c h n o c u l t u r e
La solution à toutes ces questions, se trouverait-elle
dans l'acceptation de la « postmodernité » comme
étant le seuil d'un monde nouveau plein d'univers et
se dire que la clé, c'est l'émerveillement, la poésis et
la curiosité ? Si la technologie nous isole de la nature,
c'est elle aussi qui nous permet de l'appréhender, de
la corriger et de donner à notre existence des horizons
cosmiques. La technologie nous permet de ne faire
qu'un avec l'immensité des univers qui s'ouvrent à
nous et en nous, l'infiniment petit comme l'infiniment
grand ; peut-être étend-elle nos sens comme aucune
culture jusqu'à présent.
Question (angoissante) :
— E t si l'humain se terminait en queue de poisson ?
Réponse (naïve) :
— F a u d r a voir ça de près...
D'après un collage de Michel B r e t : La condition caudale.