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ARAMINTE. – Oui, tout à fait résolue. Le Comte croira que vous y avez contribué ; je le lui
dirai même, et je vous garantis que vous resterez ici ; je vous le promets. (À part.) Il
change de couleur.
ARAMINTE, d'un air délibéré. – Il n'y en aura aucune. Ne vous embarrassez pas, et écrivez
le billet que je vais vous dicter ; il y a tout ce qu'il faut sur cette table.
ARAMINTE. – Pour le Comte, qui est sorti d'ici extrêmement inquiet, et que je vais
surprendre bien agréablement par le petit mot que vous allez lui écrire en mon
nom. (Dorante reste rêveur, et, par distraction, ne va point à la table.) Eh ! vous n'allez pas
à la table ! À quoi rêvez-vous ?
ARAMINTE, à part, pendant qu'il se place. – Il ne sait ce qu'il fait ; voyons si cela
continuera.
ARAMINTE, allant elle-même. – Vous n'en trouvez point ! En voilà devant vous.
DORANTE. – Il est vrai.
ARAMINTE. – Écrivez. « Hâtez-vous de venir, monsieur ; votre mariage est sûr… » Avez-
vous écrit ?
ARAMINTE. – Vous ne m'écoutez donc pas ? « Votre mariage est sûr ; madame veut que je
vous l'écrive, et vous attend pour vous le dire. » (À part.) Il souffre, mais il ne dit mot ; est-
ce qu'il ne parlera pas ? « N'attribuez point cette résolution à la crainte que madame
pourrait avoir des suites d'un procès douteux. »
DORANTE. – Je vous ai assuré que vous le gagneriez, madame. Douteux ! il ne l'est point.
DORANTE, à part. – Ciel ! Je suis perdu. (Haut.) Mais, madame, vous n'aviez aucune
inclination pour lui.
ARAMINTE. – Achevez, vous dis-je. « …qu'elle rend à votre mérite la détermine. » Je crois
que la main vous tremble ; vous paraissez changé. Qu'est-ce que cela signifie ? Vous
trouvez-vous mal ?
DORANTE, à part. – Ne serait-ce point aussi pour m'éprouver ? Dubois ne m'a averti de
rien.
CONSEILS
1. Le texte
■ Faites entendre les apartés, ils sont essentiels dans cette scène.
■ Notez que Dorante est ici à son tour victime d'une « fausse confidence ».
2. La question de grammaire
■ Identifiez les 4 verbes conjugués. : ils vous permettent de délimiter les 4 propositions qui
composent la phrase.
1. L'explication de texte
Introduction
[Situer le texte] Dans Les Fausses Confidences, Dorante, amoureux d'Araminte, a mis en place,
à l'initiative de son ancien valet Dubois, un plan pour la conquérir. À la scène 13 de l'acte II, il est
lui-même victime d'une « fausse confidence » : Araminte, résolue à lui faire avouer des
sentiments dont Dubois lui a fait part, prétend vouloir épouser un autre homme. La jeune femme
cherche ainsi à vérifier l'intensité de ce qu'éprouve Dorante pour elle.
[En dégager l'enjeu] Dans l'extrait, le dialogue, d'un comique très subtil que le spectateur est le
seul à pouvoir goûter, montre comment les personnages sont pris au piège de leurs propres
stratagèmes.
Explication au fil du texte
MOT CLÉ
Un aparté est une réplique prononcée par un personnage pour lui-même : elle est donc
destinée aux seuls spectateurs. Cet artifice théâtral permet de commenter l'action ou
d'exprimer des émotions.
■ La didascalie « d'un air délibéré » marque la détermination d'Araminte à faire aboutir son plan.
Elle use d'un second stratagème : faire écrire à Dorante une lettre destinée au comte. La phrase
« il y a tout ce qu'il faut sur cette table » montre la mise en scène qu'a préparée la jeune femme :
elle se révèle aussi bonne manipulatrice que Dorante et Dubois.
■ Dans un nouvel aparté, Araminte commente pour les spectateurs ce qui se passe : « Il ne sait
ce qu'il fait ». Les apartés qui rythment la scène rappellent régulièrement l'objectif de ce jeu de
dupes, et soulignent l'évolution du comportement de Dorante, que le spectateur est invité à
observer attentivement. Dorante, en aparté lui aussi, affirme « Dubois m'a trompé » : il se croit
dupe de son ancien valet, alors qu'il est d'abord dupe d'Araminte elle-même.
■ Les répliques suivantes jouent sur le comique de gestes. Dorante, bouleversé, ne « trouve
point de papier » alors qu'il en a « devant » lui, puis n'écrit pas alors qu'Araminte a commencé à
dicter sa lettre. La jeune femme souligne à chaque fois impitoyablement sa distraction. Un
nouvel aparté marque son impatience et son agacement : « est-ce qu'il ne parlera pas ? ».
■ Alors qu'il est question du « procès », dont Dorante devait examiner les chances pour
Araminte, le jeune homme tente d'argumenter en défaveur du mariage. Araminte balaie cette
tentative par « n'importe, achevez. ».
■ Le désarroi du jeune homme est à son paroxysme, on le voit dans l'exclamation « ciel, je suis
perdu ». Il tente une dernière objection, en utilisant cette fois-ci l'argument des sentiments, en
rappelant à Araminte son absence « d'inclination » pour le comte. Araminte répète l'impératif
« achevez », sans même répondre à cette objection, ce qui marque son impatience croissante
face à l'absence d'aveu de Dorante. Afin de le faire céder, elle lui fait remarquer les
manifestations physiques de son trouble : « la main vous tremble », « vous paraissez changé ».
■ Malgré ses questions, elle échoue encore puisque Dorante se contente d'admettre qu'il ne « se
trouve pas bien ». La réponse d'Araminte et les deux exclamations trahissent son propre
trouble. Le dernier aparté « Le cœur me bat. Il n'y a point encore de quoi le convaincre » montre
l'échec de son stratagème , mais surtout l'effet qu'il a eu sur ses propres sentiments. Tenter de
pousser Dorante à avouer ses sentiments a un effet de révélateur de son amour naissant pour le
jeune homme. Araminte est prise à son propre piège : celle qui avoue, c'est finalement elle,
puisque le public ne peut se tromper sur l'émoi qu'elle éprouve.
DES POINTS EN +
Vous pouvez expliquer que, dans la comédie traditionnelle, le stratagème sert souvent à
démasquer les véritables intentions ou sentiments d'un personnage.
[Faire le bilan de l'explication] Dans cette fausse scène d'aveu, le spectateur s'amuse de voir
Araminte manipuler Dorante. Mais il rit aussi de voir qu'Araminte est prise à son propre piège : le
stratagème qu'elle a mis en place ne fait qu'accélérer le progrès de ses propres sentiments.
2. La question de grammaire
« [Votre mariage est sûr] ; [madame veut] [que je vous l'écrive], [et vous attend pour vous le
dire]. »
■ Elle est suivie par une proposition principale complétée par une subordonnée conjonctive
COD du verbe « veut » : « madame veut que je vous l'écrive ».
Lors de l'entretien, vous devrez présenter une autre œuvre que vous avez lue au cours de
l'année. L'examinateur introduira l'échange et peut vous poser des questions sous forme de
relances. Les questions ci-dessous ont été conçues à titre d'exemples.
1 Sur votre dossier est mentionnée la lecture cursive d'une autre pièce de théâtre : On
ne badine pas avec l'amour d'Alfred de Musset. En quoi cette pièce se rattache-t-elle au genre
de la comédie ?