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Extrait 1

L’amour conventionnel imposé par la société du XVIIIème est au cœur de nombreux écrits et
notamment de pièces de théâtre.

A travers le marivaudage, l’auteur de cette pièce, auteur du mouvement des Lumières, dramaturge
et romancier, met en scène dans « Les fausses confidences » , le personnage de Dorante épris
d’Araminte, une riche veuve.

L’extrait à analyser est la scène 2 qui correspond à la scène d’exposition, dans laquelle Dorante et
Dubois échangent sur l’intrigue à venir, à savoir le plan érigé par l’ancien valet pour concrétiser
l’union de Dorante et de sa bien-aimée.

Le texte se découpe en trois parties, une première qui montre Dubois tentant de convaincre Dorante
et une deuxième partie qui est marquée par l’aveu des sentiments de ce dernier, puis une dernière
partie, qui correspond à la longue réplique de Dubois dans laquelle il s’impose comme stratège.

Le projet de lecture pourrait être :

En quoi cette scène montre t’elle Dubois comme le stratège et l’initiateur de l’intrigue ?

DUBOIS - Point de bien !Exclamation=détermination, enthousiasme, proximité qui lie les deux
personnages votre bonne mine est un Pérou métaphore hyperbolique=valoriser le physique de
Dorante, lui montrer que c’est une qualité non négligeable. Tournez-vous un peu, que je vous
considère encore l’usage de l’impératif= Dubois use d’autorité sur Dorante / accélération du rythme-
éloge verbal mais aussi scénarisé ; allons, Monsieur, vous vous moquez Il veut lui montrer que
Dorante n’a pas assez confiance en lui et se sous estime, il n'y a point de plus grand seigneur que
vous à Paris La négation totale et le superlatif= sens hyperbolique, éloge décuplé: voilà une taille qui
vaut toutes les dignités possibles, et notre affaire est infaillible, absolument infaillible voilà=
démonstratif/mise en scène ; il me semble que je vous vois déjà en déshabillé dans l'appartement de
Madame. L’incertitude est soulignée par un modalisateur, mais en opposition avec la précision
« déshabillé dans l’appartement », cela crée une ironie = la réplique se termine par une note légère.

DORANTE - Quelle chimère ! Exclamation/ phrase nominale = refus catégorique, Dorante ne croit pas
Dubois et son plan.

DUBOIS - Oui, je le soutiens Dubois ne se laisse pas aller, et confirme ses propos. Vous êtes
actuellement dans votre salle et vos équipages sont sous la remise. Métaphore illustrant que Dorante
va être le capitaine mais que des personnes vont œuvrer dans l’ombre pour sa réussite, pour le
guider.

DORANTE - Elle a plus de cinquante mille livres de rente Dubois. Il ramène Dubois sur le terrain de la
réalité et explique ce qui lui met le doute, à savoir la classe sociale de Araminte, opposée à la sienne.

DUBOIS - Ah ! vous en avez bien soixante pour le moins. Ironie de la réponse de Dubois qui veut
dédramatiser, amener de la légèreté afin de mettre en avant que ce n’est pas un problème selon lui.

DORANTE - Et tu me dis qu'elle est extrêmement raisonnable ? L’utilisation de l’adverbe d’intensité


qui appuie la question sur la raison de Dorante, au sens du « mariage de raison » chez Araminte.
DUBOIS - Tant mieux pour vous, et tant pis pour elle. Si vous lui plaisez, elle en sera si honteuse, elle
se débattra tant, elle deviendra si faible, qu'elle ne pourra se soutenir qu'en épousant ; vous m'en
direz des nouvelles. Vous l'avez vue et vous l'aimez ? Le parallélisme met en avant ce que la raison
peut provoquer de nuisible. La phrase commencée par « si » met en avant une condition, et s’ajoute
une gradation qui souligne les étapes projetées par Dubois. Cette condition s’oppose à « Vous m’en
direz des nouvelles » au futur simple, avec une valeur de certitude, qui renforce la position de Dubois
en tant que stratège. La dernière question montre la psychologie de Dubois puisqu’il connait la
réponse attendue mais cherche à amener Dorante à révéler ses sentiments amoureux.

DORANTE - Je l'aime avec passion, et c'est ce qui fait que je tremble !

La réplique fait office de révélation après que le dialogue ait tourné autour de l’argent. Dorante
avoue qu’il aime Araminte avec passion (opposition passion/raison). Cette passion le rend fébrile « je
tremble », fragile et en proie aux doutes.

DUBOIS - Oh ! vous m'impatientez avec vos terreurs : Oh que diantre ! (Interjection) un peu de
confiance ; vous réussirez, vous dis-je. Je m'en charge, je le veux, je l'ai mis là ; nous sommes
convenus de toutes nos actions ; toutes nos mesures sont prises ; je connais l'humeur de ma
maîtresse, je sais votre mérite, je sais mes talents, je vous conduis, et on vous aimera, toute
raisonnable qu'on est ; on vous épousera, toute fière qu'on est, et on vous enrichira, tout ruiné que
vous êtes, entendez-vous ? Fierté, raison et richesse, il faudra que tout se rende. Quand l'amour
parle, il est le maître, et il parlera : adieu ; je vous quitte ; j'entends quelqu'un, c'est peut-être
Monsieur Remy ; nous voilà embarqués, poursuivons. (Il fait quelques pas, et revient.) A propos,
tâchez que Marton prenne un peu de goût pour vous. L'Amour et moi, nous ferons le reste.

Dubois se montre de plus en plus impatient par le manque d’entrain de Dorante. La tirade de Dubois
est argumentative, il veut convaincre Dorante de son rôle principal et essentiel puisqu’il se
positionne comme celui qui a conçu le plan et qui va manœuvrer.

- La répétition du « je » = met en avant Dubois comme pilier


- L’utilisation du présent de l’indicatif avec la valeur du présent de vérité générale
- Les verbes expriment la certitude « Je sais » qui est répété, « je connais »
- Les liens entre les deux personnages sont mis en avant « nos »
- La répétition de « toute » souligne l’idée que Dubois a envisagé tout ce qu’il pouvait se
passer
- Le passage au futur simple a une valeur de certitude et il est marqué par une gradation « on
vous aimera, on vous épousera, on vous enrichira »
- Le triptyque met en avant une devise/maxime dans le but de convaincre Dorante de son
plan.
- La personnification de l’amour en tant que personnage à part entière (majuscule sur la
dernière phrase). Cela montre l’importance de l’amour, de façon pudique, mais qui demeure
l’élément essentiel de la réussite de l’union des deux personnages : Araminte doit éprouver
des sentiments amoureux pour Dorante pour que le projet réussisse.

Ouverture :

Le jeu de l’amour et du hasard, Marivaux.

L’école des femmes, Molière.


Marivaux - Les Fausses confidences - Acte I, scène 2 (extrait)

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