Vous êtes sur la page 1sur 2

Explication linéaire

Jean-Baptiste Poquelin, surnommé Molière, naît à Paris en 1622 où il meurt en 1673. Fils de
commerçants, il commence le théâtre avec une troupe itinérante. Lorsqu’il revient à Paris, son jeu plaît à
Louis XIV et à la cour. Il conçoit alors de nombreuses pièces et apporte de la nouveauté sur le plan
scénique (décors, machinerie, effets spéicaux, etc.). À travers ses comédies, il dresse souvent un portrait
critique de certaines catégories de la société comme les médecins dans Le Malade imaginaire, les femmes
dans Les Précieuses ridicules, ou encore les séducteurs dans Dom Juan. Dans Tartuffe ou l’imposteur, qui
met en scène les stratagèmes d’un faux dévot du nom de Tartuffe, il s’attaque aux religieux qui se servent
de la religion avec hypocrisie. La pièce est censurée dans sa première version tant la caricature est
virulente. Après quelques modifications, elle devient un succès et déchaîne les passions autour de
questions liées au pouvoir de la religion face au civil. L’extrait que nous étudions se situe vers la fin de
l’avant-dernier acte. On y retrouve Elmire, qui cherche à montrer le vrai visage de Tartuffe en montant un
stratagème pour que son mari, Orgon, qui est sous l’emprise du religieux, constate l’imposture. Caché
sous une table, il écoute Tartuffe tenter de conquérir Elmire alors que cette dernière feint d’avoir des
scrupules à tromper son mari (Orgon).
- En quoi le stratagème d’Elmire permet-il de démasquer Tartuffe l’imposteur et d’alerter le spectateur
par la satire ?
Découpage :
v. 1 à 5 : Une proposition fondée sur une promesse manipulatrice
v. 6 à 9 : Une reddition faussement subie
v. 10 à 18 : Un réquisitoire et un plaidoyer à la fois (double énonciation)
v. 19 à 27 : Des aveux involontaires fruits du stratagème
v. 28-29 : le coup de théâtre du stratagème : l’imposteur est démasqué

Procédés Effets / Interprétations


V. 1-5 - Champ lexical de la - « scrupule, facile, assurée » : fin manipulateur, Tartuffe tente de rassurer Elmire
vertu /du bien pour l’attirer dans ses filets. Ces mots contrastent d’ailleurs avec ceux qui suivent.
- Champ lexical de la - « mal, scandale, offense, pécher » : indique les intentions du personnage et
dépravation marque le contraste avec son introduction mensongère. Signe de la manipulation,
Tartuffe promet qu’aucun mal ne sera subi.
- Anthitèse : - Cette opposition révèle le stratagème de Tartuffe qui ne sait pas qu’il est lui-
« éclat/silence » même manipulé. On pourrait établir un parallèle entre la double énonciation
théâtrale et le rôle du public qui est à la fois témoin et acteur du stratagème.
- Présent de vérité - La maxime, très en vogue chez les moralistes du XVII e siècle, présente une règle
générale = maxime de morale. Tout ce qu’implique le personnage en tant que caricature d’un
phénomène apparaît ici : le faux dévot délivre une règle religieuse qui lui permet
de pécher. Il montre d’ailleurs que le seul jugement qui l’inquiète est celui des
personnes.
v. 6-9 - Didascalie - La didascalie est essentielle dans l’extrait, c’est elle qui implique le lecteur en
faisant le témoin du stratagème. Le coup sur la table pourrait même être interprété
comme étant une référence aux coups du baton que l’on nomme brigadier qui
lancent traditionnellement une pièce : il s’agit ici de théâtre dans le théâtre, Elmire
est à la fois metteuse en scène et comédienne.
- Répétition « qu’il faut » - Faisant partie du jeu opéré par Elmire, cette répétition permet d’insister sur
l’aspect obligatoire et renvoie aux faux scrupules du personnage.
- Parallélisme + subjonctif - Le parallélisme et sa symétrie donne une dimension mécanique au propos et
rappelle l’obligation feinte d’Elmire. Le subjonctif, lui, appuie sur la fausse
volonté.
v. 10- - Sentence / maxime + - Ce constat d’Elmire, qui s’applique à la situation dans le dialogue entre les deux
18 triple énonciation personnages, est en réalité bien plus. C’est le début d’un réquisitoire contre
Tartuffe sans qu’il ne s’en aperçoive. Orgon est aussi destinataire du message, tout
comme le public complice du stratagème.
- Marqueur d’opposition - Dans sa triple énonciation, Elmire explique les raisons pour lesquelles elle se voit
« mais » obligée de mettre en place ce jeu. Si Tartuffe croit qu’elle tombe dans son piège,
Orgon et le public sont éclairés par sa démarche.
- Répétition de - La formulation employée par Elmire fait appel au registre polémique : elle
« puisque » + emploi attaque. En désignant « on », elle accuse toute la société d’avoir été contre elle en
répété du pronom « on » soutenant l’imposteur. ; ce qu’elle compte dénoncer à travers son jeu. Elle se
qui désigne « tout le disculpe même par anticipation de tout jugement moral que l’on pourrait porter sur
monde » + registre son stratagème : ce sont nous, les « bonnes gens » naives et crédules face aux
polémique religieux qui avons déclenché cela.
- « croire, dire, témoins, convaincants, les gens, consentement, offense, faute » : on
- Champ lexical de la a l’impression d’assister au procès de tous les faux dévots qui devaient pulluler du
justice / procès temps de Molière. Ce n’est d’ailleurs pas sans raison que le nom de Tartuffe, par
antonomase, est entré dans la langue française pour désigner les hypocrites qui
utilisent une image qui ne leur sied pas.
- registre comique / - Au fil de sa tirade, Elmire transforme l’obligation de céder à Tartuffe en
satirique obligation de le démasquer sans qu’il ne s’en rende compte. Le comique de cette
scène lui confère une dimension satirique dès lors que le message s’adresse
également au public : dénoncer la manipulation de certains religieux devrait être
obligatoire.
v. 19- - Impératif - L’emploi de l’impératif marque un changement dans l’interaction entre les deux
27 personnages. Elmire s’adresse uniquement à Tartuffe, contrairement à la triple
énonciation qui prévalait jusqu’ici. Son but est, cette fois, de le manipuler
directement en évoquant son mari pour le faire médire.
- Question rhétorique - Tartuffe rabaisse Orgon en insinuant qu’il ne mérite pas que l’on s’inquiète de sa
clairvoyance.
- Proverbe / métaphore - Tartuffe dénigre davantage Orgon en employant une expression familière qui
signifie « faire ce que l’on veut de quelqu’un ». C’est également une métaphore en
ce qu’elle compare Orgon à un animal que l’on ferait avancer en tirant sur la
boucle accrochée à son museau.
- Antithèses - L’aveu involontaire de Tartuffe, qui se croit malin alors qu’il est pris, apparaît
symboliquement dans deux oppositions : « tout » et « rien » et surtout, celle qui est
à la base de l’hypocrisie, c’est-à-dire la différence entre « voir » et « croire ».
- Impératif - Comme si elle manipulait un enfant, Elmire fait sortir Tartuffe afin de récolter les
fruits de ce qu’elle vient de semer.
v.28-29 - Didascalie - Symbole de la tension qui règne alors sur scène suite à l’aveu de Tartuffe, et
symbole de la vérité qui éclate, Orgon se dresse.
- Allitération en [v] - « voilà, vous, avoue, revenir » renvoient à la vérité que reconnaît enfin Orgon.

Vous aimerez peut-être aussi