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B.A.-BA
DU MANAGEMENT

Hélène JONCHERAY
Emmanuel SURUN
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[SOMMAIRE]

INTRODUCTION

[PARTIE I]
DEVENEZ UN MANAGER !

1- Où en êtes-vous ?
j Se gérer soi-même
j Se donner les moyens de réussir

2- Les objectifs
j Sortir de son isolement
j Devenir un stratège

[PARTIE II]
GÉREZ LES DIFFÉRENTES FONCTIONS DE
L’ENTREPRISE

1- La gestion des opérations


j La production
j La qualité
j Les achats
j La logistique

2- Le marketing et les ventes


j Le marketing
j L’organisation commerciale
j La gestion de l’information
La récupération d’informations
La communication

3- La gestion financière
j La comptabilité
j Le « process » client
j L’analyse financière
j Le business plan
j Le contrôle de gestion

[PARTIE III]
MENEZ LES HOMMES

1- L’entreprise
j La culture d’entreprise
j La Responsabilité sociale de l’entreprise
j L’innovation, la prise de risques

2- La gestion des ressources humaines


j La planification
j Le recrutement
j La gestion des compétences et des connaissances,
l’évaluation des performances
j La rémunération
j La formation
j Les conditions de travail
j La gestion des difficultés

3- De la gestion d’un individu à celle d’un groupe


j Comprendre les autres : gérer les individus/le(s) groupe(s)
Le travail en équipe
La communication interne
Motiver…
j Gérer les tensions, les conflits

4- Manager/coacher
j La conduite du changement
j Les styles de management
j Le leadership
j Le coaching

[CONCLUSION]

[BIBLIOGRAPHIE]
[INTRODUCTION]

Le management, ou gestion, est l'ensemble des techniques mises en


œuvre pour l'administration d'une entité – dont l'art de diriger des
hommes mais pas seulement – afin d'atteindre des objectifs fixés en
utilisant les ressources (humaines, financières, techniques et naturelles)
de manière efficiente et efficace.

L'origine des termes « management » et « manager », certes issus du


verbe anglais to manage, est ancienne et ne fait pas l'unanimité. L’une
d’entre elles est française : au XIIIe siècle, mesnager définissait l'art de
conduire son bien avec raison.
Pourtant, en France, les managers n’épargnent pas leur monture, le
pays faisant même figure de parent pauvre du management : « Les
managers français sont à la traîne », a conclu une enquête
internationale lancée par BPI, cabinet de conseils en management et
ressources humaines, et réalisée avec l'aide de BVA dans dix pays en
2007. « La France se singularise comme étant le pays de l'exigence
obsessionnelle, de la distance et d’une certaine dureté des relations. On
y a le culte du professionnel mais dans une insatisfaction permanente.
D'où un besoin de reconnaissance individuelle fort. »

Cela malgré l’apparition, à partir des années 1980, de nouveaux


modèles sollicitant toujours plus l’autonomie et la responsabilité des
travailleurs, visant à la création de valeur pour tous les acteurs de
l'entreprise – actionnaires, employés, clients, partenaires et collectivités.
Ces modèles ont été regroupés sous l’étiquette de « management
participatif ».
« Le management participatif débouche ainsi sur la démocratisation du
pouvoir au sein de l’entreprise, une telle conception aboutissant parfois
à un engouement pour la “lean production”, ou production maigre,
qui entraîne une diminution des niveaux hiérarchiques et alimente la
fiction d’une “organisation plate” », écrit Philippe Deubel, enseignant
en sciences économiques et sociales à l'université de Lille, sur le site
Melchior1.
« Si les organisations modernes sont moins hiérarchisées que par le
passé, le manager n’en demeure pas moins un rouage essentiel de
l’organisation en même temps qu’un point de repère pour les individus,
parce qu’en tout temps et en tout lieu, les petits groupes humains
s’organisent toujours autour d’un référent. Le rôle du manager est
cependant amené à évoluer en fonction des différents types
d’organisation du travail. Dans le management contemporain, la
domination du patronat et de l’encadrement sur les ouvriers et les
employés, entendue comme obéissance passive des subordonnés dans
le cadre d’une hiérarchie stricte des grades et des fonctions de chacun,
appartient au passé taylorien. La firme moderne, qui a pour impératif
de s’adapter au plus vite à un environnement mouvant et de répondre
instantanément aux signaux du marché, doit, pour atteindre cet
objectif, adopter un nouveau modèle de relations sociales. Dans ce
modèle, les “managers” ne doivent plus seulement faire respecter les
consignes mais animer des équipes et coordonner des salariés
relativement autonomes. »

Dans 10 points clés pour réussir : auto-entrepreneurs, indépendants,


patrons artisans, TPE…2, Jean-Philippe Tixier dresse le même constat :
« Entre hier et aujourd’hui, même si tout le monde ne s’en est pas
forcément aperçu, la patronne, le patron d’une entreprise ont vu leur
rôle changer radicalement », estime-t-il avant de parler des nombreux
articles et ouvrages sur le management destinés aux dirigeants de
moyennes et de grandes entreprises.
« N’a-t-on pas un peu trop oublié de donner ces mêmes outils aux
patronnes et patrons des très petites entreprises, celles qui
fonctionnent avec un tout petit nombre de collaborateurs ? Pourtant,
ces structures, comme la vôtre peut-être, sont soumises aux mêmes
contraintes, aux mêmes lois de concurrence, aux mêmes impératifs de
qualité que leurs grandes sœurs. Il leur faut donc des patrons (pardon,
des managers) formés aux méthodes – mais surtout aux mentalités des
gagnants d’aujourd’hui. »
C’est pour cela que les conseils prodigués dans ce livre, destiné aux
managers ou dirigeants de petites entreprises, s’inspirent d’exemples
de ce qui marche dans des petites structures mais aussi dans des
grosses structures comme Sodexo, exemplaire dans sa réussite mais
aussi dans ses « bonnes pratiques », afin de les aider à améliorer leurs
performances tout en relevant le niveau.

1. Philippe Deubel, « Quel rôle pour les managers intermédiaires dans l’entreprise ? »,
www.melchior.fr
2. Jean-Philippe Tixier, 10 points clés pour réussir : auto-entrepreneurs, indépendants, patrons,
artisans, TPE…, Paris, Maxima, 2010.
[PARTIE I]

DEVENEZ
UN MANAGER !
1- OÙ EN ÊTES-VOUS ?
« Pour ce qui intéresse les questions de personnalité ou de
comportements avec les autres, nous pensons qu’elles jouent un rôle
capital dans les entreprises et que, plus l’effectif est faible, en réalité
plus l’impact du dirigeant se manifeste intensément », écrit Gérard
Regnault dans son ouvrage La communication interne dans une PME1.

Dans ces conditions, il nous semble que l’efficacité du management


dans les petites entreprises dépend de façon importante de la manière
dont son dirigeant ou manager l’aborde.

Se gérer soi-même
« Les recherches ont clairement montré que si la plupart des grands
dirigeants savent écouter, ils possèdent également en commun deux
autres qualités : ils ont d’abord fait l’effort de mieux percevoir leurs
objectifs et leurs motivations, d’une part, leurs qualités et leurs limites,
d’autre part », constate Robert Papin, qui estime qu’il est primordial de
se connaître pour réussir, dans L’Art de diriger2. « Ils sont ensuite restés
toujours soucieux de mieux gérer leur bien le plus précieux : leur
temps. Pour cela, ils ont été amenés à élaborer une stratégie afin de
pouvoir consacrer leur énergie à la réalisation des objectifs les plus
importants. »

Dans L’Avenir du management3, Peter Druker explique par A + B


comment se gérer soi-même. Il conseille notamment de déterminer
quels sont ses points forts (rarement ceux que l’on croit) par « l’analyse
de feedback », comment l’on s’y prend et plus généralement comment
l’on fonctionne ou quelles sont ses valeurs (qui doivent être
compatibles avec celles de l’entreprise). « N’essayez pas de changer ce
que vous êtes – ça ne marchera probablement pas, écrit-il. Mais
travaillez, longuement, à vous améliorer dans le sens de vos qualités. Et
ne cherchez pas à vous lancer dans quoi que ce soit où vous n’êtes pas
bon, ou pas très bon. »

Robert Papin invite quant à lui ses lecteurs à pratiquer une analyse
prospective et à déterminer leurs qualités et leurs limites, mais aussi les
buts qu’ils poursuivent dans la vie grâce à des tests.
« L’épanouissement de votre vie professionnelle et personnelle pourrait
largement découler des efforts de réflexion que vous développerez
pour prendre conscience de ce que vous en attendez. » Il conseille de
mesurer la réussite par rapport à ses objectifs personnels et pas
seulement professionnels, de déterminer l’important et d’éviter d’être
totalement prisonnier de son métier. D’ailleurs, pour lui, le but « n’est
pas de beaucoup travailler, mais d’être efficace ».

Il faut apprendre à mieux s’organiser, à mieux gérer son temps pour


mieux réussir, car, comme le souligne Peter Drucker, « le temps est le
capital le plus rare, et si on ne sait pas le gérer, alors on ne peut gérer
rien d’autre ». Trop travailler peut entraîner des problèmes de santé,
des difficultés pour gérer vie familiale et vie professionnelle, un
manque de sérénité et de recul sur son entreprise.
« N’avez-vous pas tendance à faire d’abord ce qui vous plaît et n’êtes-
vous pas enclin à résoudre les problèmes dans l’ordre de vos
préférences plutôt que dans l’ordre d’importance ? » interroge Robert
Papin après avoir recommandé de prendre conscience du gaspillage de
son temps en observant passivement l’utilisation que l’on en fait.
« Luttez contre toutes les sources extérieures de gaspillage de votre
énergie (appels téléphoniques inutiles, réunions sans objet,
courrier…). »
Il donne de nombreux conseils très utiles, comme programmer la veille
les tâches du lendemain et s’attaquer d’abord aux objectifs les plus
importants. « Pour éviter de vous noyer dans le détail, gardez à l’esprit
que, dans la plupart des cas, 20 % de vos tâches vous permettront
d’atteindre 80 % de vos résultats. »

S’il faut prendre conscience de la loi des 20/80 de Pareto ou de celle de


Parkinson (plus on dispose de temps pour faire un travail, plus ce travail
prend du temps), il faut aussi s’ouvrir à des outils comme la matrice
d’Eisenhower, qui permet de trier les tâches en fonction de leur degré
de priorité et d’urgence et donc de gérer et réguler les activités ainsi
que la préparation de la délégation.
D’autres instruments peuvent aussi être utiles : 77 % des lecteurs qui
ont répondu à une enquête en ligne du Journal du
management considèrent que leur agenda (ou PDA, planificateur…) est
un allié indispensable pour bien gérer leur temps.
Mais il ne faut pas négliger l’impact des e-mails par exemple, qui sont
censés nous rendre la vie plus facile mais ne le font pas toujours.
« Parmi les phénomènes inédits qui jouent sur le stress, Internet et les
téléphones portables nous ont fait perdre la notion du temps. Nous
n'avons pas encore appris à dompter ces instruments », estime Pierre
Grafmeyer, vice-président du Conseil supérieur de l'Ordre des experts-
comptables et chef d’entreprise, dans Les Echos4. « Or les dirigeants de
PME sont d'autant plus exposés qu'ils font souvent des métiers de
services, où il faut sans cesse rester disponible pour ne pas perdre un
contrat. » S’imposer de ne relever et traiter ses e-mails qu’une ou deux
fois dans la journée peut par exemple avoir une incidence relativement
importante sur son efficacité.
[GMAIL VOUS FACILITE LA TÂCHE]
Des possibilités offertes aux utilisateurs de Gmail et de Google Apps Mail (notamment sur
iPhone) laissent entrevoir une amélioration dans le traitement des e-mails, qui peuvent
s’avérer trop nombreux.
La boîte de réception prioritaire Gmail, qui, comme son nom l’indique, ne peut être
utilisée que dans la messagerie Gmail, identifie et filtre automatiquement vos messages
importants en fonction de vos habitudes, les classant dans différentes rubriques que vous
pouvez personnaliser.
Un logiciel français simple et gratuit, Kwaga (kwaga.com), offre le même genre de
prestation dans Gmail et Google Apps Mail et s’intégrera, à terme, à d’autres
messageries (Hotmail, Outlook, Thunderbird, Lotus Notes…). Il filtre et priorise le flux
d’informations reçu par e-mails grâce à une analyse sémantique des messages entrants et
sortants. Tout e-mail qui répond aux critères de recherche est identifié visuellement en
fonction de sa catégorie et de l’urgence du traitement : demande de rendez-vous,
numéro de téléphone, date butoir pour action, etc. Kwaga propose une synthèse, ajoute
automatiquement les rendez-vous à l’agenda, les coordonnées au carnet d’adresses et
assure un suivi des e-mails sortants pour que les demandes d’action ne restent pas sans
réponse. Vous pouvez même mettre à jour votre iPhone ou votre calendrier Google
directement avec les informations mises en avant par Kwaga !

Se donner les moyens de réussir


Comme le constate Jacqueline Socquet-Clerc Lafont5 du Conseil
économique et social, « la pérennisation de l’entreprise, surtout des
plus petites d’entre elles, est d’autant mieux assurée que la formation
et/ou l’expérience professionnelle du dirigeant est importante ».

Or, « généralement, les TPE sont dirigées par une personne qui
concentre sur elle un seul métier et un grand nombre de fonctions :
c’est en quelque sorte l’entrepreneur chef d’orchestre », affirme Olivier
Ferrier6. Ce n’est pas un homme-orchestre, puisque, d’après les auteurs
de Management : stratégie et organisation7, « le chef d’entreprise
possède rarement une formation complète en management. En
général, il a acquis une compétence technique qui lui semble suffisante
pour réussir. Quant à la gestion, elle lui paraît secondaire. D’ailleurs, il
la limite au territoire de la comptabilité qu’il sous-traite à un expert-
comptable, afin de respecter les obligations de la loi. Le créateur
d’entreprise suit parfois un stage d’initiation à la gestion mais, une fois
l’affaire démarrée, il n’a plus le temps, ni l’envie, de poursuivre sa
formation générale du management ».
Il s’avère que les intéressés ne sont pas dupes : d’après l’enquête
portant sur les attentes des TPE (très petites entreprises) menée en
2007 par le groupe Rivalis, 86 % des dirigeants de TPE pensent que
leurs connaissances en management sont « incomplètes » ou
« inexistantes ».

Cela peut avoir des conséquences non négligeables, puisque d’après


Jean-Philippe Tixier8, « les faillites ont pour cause directe, dans 87 %
des cas, l’incompétence du dirigeant. Et l’expérience nous montre que
l’on sauve plus sûrement une entreprise quand on en change la tête
qu’en se débarrassant de 50 % de son effectif. D’ailleurs, c’est le
patron et lui seul que les tribunaux sanctionnent en cas de déconfiture.
Son rôle est donc primordial. »

Les compétences de l’entrepreneur, même si elles sont limitées à la


base, peuvent bien entendu être améliorées, notamment au sein de
pépinières d’entreprises ou à l’occasion de formations, parfois
gratuites, comme celles organisées dans le cadre du Passeport pour
l'économie numérique ou des Centres de gestion agréés.

Peter Drucker conseille de se concentrer sur ses points forts, de les


travailler, mais aussi d’acquérir les compétences et le savoir nécessaires
pour en tirer le meilleur tout en consacrant le moins d’efforts possible à
s’améliorer dans les domaines où notre compétence est faible.
« Au-delà de l’aptitude à gérer, à administrer et à contrôler, les
dirigeants d’entreprise doivent développer des capacités d’écoute, de
dialogue et de conviction. Leur valeur ajoutée requiert des qualités
humaines qui vont bien au-delà des matières habituellement
enseignées dans les meilleures écoles de management », estime Pierre
Coureil9. « Fort heureusement, le “leadership” n’est pas entièrement
inné. Comme d’autres compétences, cette qualité essentielle peut aussi
s’apprendre. »
Jean-Philippe Tixier indique que les connaissances en finance et
comptabilité ainsi qu’en production sont « mises en fin de liste ». « Il
faudra en déléguer la maîtrise aux autres compétents de l’entreprise. »
Chose qui ne se révèle cependant pas toujours facile…

Plus globalement, pour Philippe Lê et Philippe Le Rivet10, « il est


essentiel, dans toute logique entrepreneuriale, de conserver une forte
attitude critique à son propre égard ». Se poser des questions sur soi-
même, se remettre en question et faire preuve d’humilité peut s’avérer
utile, voire indispensable.
« Patron, c’est un métier, et un métier, ça s’apprend ! Certains croient
que l’on peut être “patron de père en fils”, tout simplement par
l’héritage du patrimoine commercial », ajoute Jean-Philippe Tixier. « On
voit bien pourtant que les “patrons-héritiers” qui réussissent ont
appris, soit sur le tas avec le prédécesseur – le père – soit à partir d’une
formation volontaire à ce métier. »
D’après lui, avoir une véritable « vision de l’avenir » est une
caractéristique essentielle, voire impérieuse, du « manager ». Pour
certains, comme l’expert Shoji Shiba, une compétence essentielle du
manager ou du chef d’entreprise est de devenir le « troisième œil » de
l'entreprise en portant un regard global sur elle, et ainsi en prévoyant
mieux le futur.

É
Éric Carreel : « Il y a une forte transformation à faire. »

Éric Carreel a surmonté des échecs chez Inventel, qu’il avait créée, puis Thomson, où
l’inertie a eu la peau de son inventivité, avant de créer trois nouvelles start-up
innovantes en autant d’années. Le succès est à nouveau au rendez-vous pour ce fils
d’agriculteur qui cultive l’humilité.

Vous auriez pu vous permettre d’arrêter de travailler après avoir revendu Inventel à
Thomson et après avoir claqué la porte de Thomson au bout de deux ans, ou encore
accepter les offres qui vous ont été faites pour diriger d’autres sociétés. Pourquoi
avoir décidé d’en créer de nouvelles ?
Dans mon parcours, je ne sais faire que de la technologie. Je ne suis pas un financier
de naissance ou un commercial. C’est pour cela que j’ai décidé de me réinvestir dans
la création de sociétés technologiques. Je suis convaincu que l’innovation
technologique est la source essentielle de croissance de notre société, pas une
croissance visant à plus consommer, mais à mieux organiser la société, et que nous,
Français, nous sommes timorés dans ce domaine et handicapés par un certain
nombre de grosses entreprises qui ont trop le sentiment qu’elles doivent diriger le
monde. Un sentiment assez franco-français, du reste.
J’ai été très étonné de voir que dans pas mal de grosses sociétés technologiques,
donc dans ce secteur que je connais, les conseils d’administration sont peuplés des
mêmes personnes, des bandes d’amis qui se connaissent, mais pas des bandes de
gens qui connaissent la technologie. C’est quand même un peu embêtant. Je ne
connais pas un PDG de société française qui montre lui-même comment fonctionnent
ses produits alors que c’est à peu près systématique aux États-Unis. Je pense qu’il y a
une forte transformation à faire.

Vous avez eu des déconvenues au cours de votre carrière…


J’ai effectivement eu un certain nombre d’échecs, notamment avec les opérateurs
dans des objets qu’on essayait de codévelopper, car l’utilisateur n’imagine pas son
univers avec un Gateway (comme la Livebox, qu’il a aidé à mettre au point) et plein
d’objets connectés autour, mais avec des objets qui vont pouvoir lui rendre des
services.

Que vous ont-elles appris ?


C’est par les erreurs qu’on apprend. Il ne suffit pas forcément de trouver le bon filon.
Je ne fais pas de surf mais j’aime bien l’image du surfeur qui attend la vague, c'est-à-
dire que si vous voulez prendre une vague, il faut non seulement être là avant la
vague mais il faut aussi savoir surfer. Si vous voulez entrer sur un nouveau domaine
technologique, il faut non seulement connaître ce domaine, avoir travaillé
longuement, durement pour développer des produits, mais il faut en plus être là
avant que le marché n’existe, le marché étant la vague. Et parfois, la vague arrive trop
tard, vous êtes parti, la société a fait faillite. Il y a une part de travail, de savoir-faire, il
faut être attentif aux marchés potentiel etc., et une part de chance : il faut que le
marché se mette à exister. Il faut aller au bon endroit pour trouver la vague, mais ce
n’est pas parce que vous allez au bon endroit que la vague sera là au moment qui
vous convient.
En général, la conséquence de cette image est que vous êtes sûr de passer par des
périodes de souffrance parce que le fait que la vague arrive pile au bon moment,
quand vous commencez à être prêt, cela n’arrive pas souvent. Soit elle arrive trop tôt
et vous n’êtes pas prêt, vous êtes noyé par la vague et vous ne répondez pas au
marché, soit elle arrive trop tard et vous n’avez pas eu de finances suffisantes pour
pouvoir l’attendre. Il faut accepter les déconvenues, encourager toutes les personnes
qui ont envie de faire ça sans les taxer d’échec parce qu’à un moment donné, ça ne
s’est pas passé comme ils l’auraient souhaité.

1. Gérard Regnault, La Communication interne dans une PME : outils et comportements pour
travailler ensemble, Paris, L'Harmattan, 1996.
2. Robert Papin, L'Art de diriger, Vol. 1, Management, stratégie, Paris, Dunod, 2006.
3. Peter Drucker, L’Avenir du management : réflexions pour l’action, Paris, Pearson, 2010.
4. Laurance N'kaoua, « Les patrons de PME et de TPE à l'épreuve du stress », Les Echos, 27 mai
2010.
5. Jacqueline Socquet-Clerc Lafont, Conseil économique et social, Création et pérennisation de
l'entreprise de petite taille, Rapport, La Documentation française, juillet 2001.
6. Olivier Ferrier, Les Très petites entreprises, Bruxelles, De Boeck, 2002.
7. Jean-Pierre Helfer, Michel Kalika, Jacques Orsoni, Management : stratégie et organisation,
Paris, Vuibert, 2010.
8. 10 points clés pour réussir, op. cit.
9. Pierre Coureil, Valeur ajoutée : construire et développer les compétences de
l'entreprise, Paris, Dunod, 1997.
10. Philippe Lê, Philippe Le Rivet, Piloter et réussir l'innovation en entreprise, Paris, Maxima,
2006.
2- LES OBJECTIFS

Sortir de son isolement


« Les difficultés de recrutement en TPE ont souvent pour conséquence
d’exposer le dirigeant à la surcharge de travail et donc à la fatigue et à
la solitude », expliquent Annabelle Jaouen et Olivier Torrès11. « Dans
l’étude de Chassard (2003), ils sont trois quarts à déclarer qu’en cas de
surcharge de travail, ils se débrouillent seuls. » Déléguer, ou apprendre
à le faire, paraît d’autant plus important que même un bon homme-
orchestre ne peut exceller dans tous les instruments.

Or, selon Henri Mahé de Boislandelle12, dans les TPE (jusqu’à neuf
salariés) « la délégation à un responsable (autre) d’un quelconque
domaine de décision est exceptionnelle ; le cas le plus fréquent est
plutôt celui d’une mise au courant, ou d’une consultation pour avis ». Il
nous semble pourtant également important de mettre à contribution
ses collaborateurs ou des gens extérieurs à l’entreprise en leur
demandant leur opinion, voire leur assentiment.

Olivier Torrès affirmait d’ailleurs au Salon des entrepreneurs de Paris


2010 que le problème de la PME n’est pas d’être petite, mais d’être
isolée. « Le patron vit très souvent le syndrome du nez dans le guidon.
Le meilleur antidote, c’est d’adhérer à des réseaux. Alors bien sûr, il y a
l’APM, le CJD, les réseaux patronaux, la CGPME ou autres, mais c’est
un élément extrêmement important parce que l’on peut toujours
entreprendre tout seul, mais au bout d’un moment, on va buter sur des
tas de contraintes et on n’a pas toujours le décodeur pour trouver des
solutions. L’intelligence collective, c’est la meilleure garantie d’en
trouver », estime le chercheur, par ailleurs créateur d’Amarok, premier
observatoire sur la santé des dirigeants de PME.
« Jamais mon entreprise ne serait devenue ce qu’elle est si je n’avais
pas été au CJD [Centre des jeunes dirigeants] », confirme Pierre Bellon,
le créateur de Sodexo dans son ouvrage, Je me suis bien amusé !13. Il
parle d’un formidable lieu de débats et d’échanges d’expériences. « J’y
ai appris énormément de choses. À commencer par une philosophie :
essayer de mettre l’économie au service de l’homme. » Le président et
ancien directeur général de Sodexo évoque notamment une formation
suivie dans ce cadre, celle du Cadippe (Comité d’action pour le
développement de l’intérêt des personnes aux progrès de leurs
entreprises et professions), qui réunit des dirigeants, des cadres et des
syndicalistes afin de favoriser l’émergence d’un réel débat social,
responsable et constructif. « J’ai été marqué à vie par cette expérience,
parce que j’étais issu d’un milieu plutôt bourgeois et que j’avais donc
des idées préconçues sur certaines catégories sociales. »

Pour Robert Papin14, cela permet aussi de recueillir une masse


d’informations sur l’évolution de son environnement. « Obligez-vous à
participer au moins une fois l’an à des séminaires qui vous permettront
de rencontrer d’autres dirigeants, de réfléchir et, accessoirement,
d’assimiler de nouvelles connaissances », conseille-t-il également en
citant l’exemple de séminaires inter-entreprises de créativité, stratégie,
formation économique, négociation sociale, etc.

Au-delà de ces vertus, l’intégration dans un club d’entrepreneurs ou


autre permet d’élargir ou d’entretenir un réseau relationnel digne de ce
nom, ce qui s’avère souvent utile dans le cadre du développement de
son activité, y compris à l’international. Alain Bosetti, créateur du Salon
des micro-entreprises, du Salon des services à la personne, de
placedesreseaux.com et de l’agence de conseils en communication En
Personne explique en effet, dans une interview publiée sur le site de
l’APCE15, qu'environ 25 % du chiffre d'affaires d'une petite entreprise
vient directement de son réseau, ce pourcentage pouvant même
atteindre jusqu'à 70 % pour un indépendant.
À ce titre, l’utilisation de réseaux sociaux professionnels en ligne
comme LinkedIn (www.linkedin.com) ou Viadeo (www.viadeo.com)
commence à devenir indispensable. En plus de disposer d’une forte
couverture nationale, ce dernier compte trente-cinq millions de
membres à travers le monde et se pose en leader en Europe et dans les
pays émergents. Le réseau social professionnel en ligne français
constitue la réponse idéale pour qui souhaite :
• augmenter ses opportunités « business » (rendre visible son offre, ses
produits ; trouver prospects et clients ; identifier les experts de son
secteur) ;
• gérer et développer son réseau de contacts professionnels (trouver de
nouveaux clients, partenaires ou fournisseurs ; échanger, annoncer,
communiquer) ;
• augmenter ses opportunités de carrière (être « chassé », accroître sa
« net réputation »).

L’entrepreneur peut aussi avoir recours aux conseillers, extérieurs,


consultants nécessaires, prenant ainsi ce que Jacqueline Socquet-Clerc
Lafont assimile à une assurance contre le risque : « Il y aurait tout lieu
de sensibiliser le créateur/chef d’entreprise à l’intérêt de ne pas rester
isolé, à la fois pour mutualiser des coûts qui pourraient s’avérer
excessifs en étant à la charge d’une seule entreprise (conseil,
communication…), mais aussi pour optimiser certaines actions (achats,
logistique, livraisons…) ou enfin, pour échanger et partager certaines
informations (conjoncture, marchés…). »
[LA VIE ASSOCIATIVE, VÉRITABLE ÉCOLE DE MANAGEMENT]
La société Latécoère a offert à la France trente et un records du monde et l'une des plus
belles aventures humaines du siècle avec la création des lignes Latécoère, où s'illustrèrent
de prestigieux pilotes comme Mermoz, Saint-Exupéry ou Guillaumet.
Riche de sa longue expérience d'avionneur, le groupe Latécoère affiche aujourd’hui sa
présence dans tous les segments de l'aéronautique en poursuivant une stratégie de
croissance fondée sur le partenariat avec les plus grands avionneurs. Cette expansion ne
serait pas possible sans un DRH de qualité, incarné par Pierre Burello depuis 2005. Celui-
ci loue les vertus du sport (il a longtemps pratiqué l’aviron de mer) ou du scoutisme, tous
deux bons pour l’esprit d’équipe notamment.
« Si mes études à Sup de co m’ont formé à la gestion d’entreprise, le management des
hommes, je l’ai appris grâce au scoutisme », explique-t-il dans un article de
Personnel (magazine publié par l’Association nationale des DRH)16. Pierre Burello prête
des propriétés encore plus importantes à l’association Germe (Groupes d'entraînement et
de réflexion au management des entreprises), qu’il a rejointe en 2001 et qu’il préside
depuis 2006. « Germe offre aux cadres de direction des lieux d’échange et de
confrontation d’expériences. Notre pédagogie originale s’appuie sur les besoins et les
préoccupations du terrain, avec des cycles qui s’inscrivent dans la durée pour une
formation durable. Un véritable “réseau apprenant”, au service du progrès humain des
managers et de la performance des entreprises, estime-t-il. Dans mes deux fonctions, je
dois prendre du recul pour identifier les enjeux, définir avec d’autres une stratégie,
penser à long terme, mobiliser des équipes. C’est une occasion unique de rencontrer des
cadres d’autres fonctions et d’univers différents pour confronter mes expériences et
convictions managériales sans enjeu de pouvoir, en toute confiance au sein d’un réseau
aux valeurs humanistes partagées. C’est très stimulant pour moi de progresser avec les
autres sur le terrain du management. »

Devenir un stratège
Avoir recours à des conseillers peut bien sûr avoir ses limites, en plus de
représenter un coût important : « Aujourd’hui, trop d’entreprises sous-
traitent à des cabinets de consultants externes la réflexion sur la
stratégie de l’entreprise », estiment en effet Gérard Roth et Michal
Kurtyka dans Profession dirigeant17. « Or l’essence même du dirigeant
est de donner le sens, de porter la stratégie, d’être responsable de
milliers de personnes. S’il est nécessaire de recourir aux services des
cabinets de consultants, nous pensons qu’il ne faut pas sous-traiter ce
qui est au cœur de la responsabilité du dirigeant et de son équipe. »
Malheureusement, de nombreux dirigeants pensent qu’une stratégie
digne de ce nom est inaccessible pour eux, ou qu’ils peuvent s’en
passer. Jean-Philippe Tixier18 détaille par exemple les trois idées fausses
que trop de patrons de petites entreprises se font : « Ils pensent que la
stratégie, c’est pour les “grands” ; mal informés, ils confondent
souvent stratégie et tactique ; ils croient qu’une stratégie coûte cher et
qu’on ne peut en mesurer concrètement les résultats. »

D’après Henri Mahé de Boislandelle19, « si l’on excepte le champ du


style général de commandement et de la communication, qui revêtent
une importance capitale en TPE, il faut admettre que sur les autres
plans de gestion, les pratiques sont discontinues et inégales ;
discontinues, car les problèmes sont traités quand ils se présentent,
souvent à chaud (donc à court terme) sans qu’il y ait une stratégie
toujours explicite qui s’inscrive dans la durée ; inégales, car tous les
domaines n’ont pas la même importance ».

Pour sa part, Michel Marchesnay estime dans Management


stratégique20 que le fautif, c’est le processus de décision qui est à
l’œuvre dans les petites entreprises. Celui-ci « se déroule en
information limitée, nous sommes dans l’univers simonien de la
rationalité limitée. L’objectif n’est pas de prendre la “meilleure”
décision, mais d’identifier le ou les problèmes cruciaux, de percevoir
une solution “raisonnable”, “satisfaisante”, de la justifier
(généralement à partir de ses propres schémas mentaux), puis de la
mettre en œuvre. Ce processus de recherche, autant du problème que
de sa solution, est de type heuristique : la démarche est progressive,
tâtonnante, faite d’essais et d’erreurs, reposant sur l’apprentissage du
décideur et sur sa capacité cognitive (capacité autant à analyser qu’à
synthétiser, à déduire logiquement qu’à induire intuitivement) ».

Même si le changement peut paraître difficile à mener, voire


insurmontable, cela ne veut pas pour autant dire que les petites
entreprises doivent se passer d’adopter une démarche stratégique. Bien
au contraire : « Face à un environnement bousculé, difficile à étudier et
encore plus difficile à prévoir, bien des chefs d’entreprise renoncent à
bâtir des plans de développement », écrit encore Robert Papin21.
« Cédant à la facilité, certains se laissent alors guider par les
événements, s’en remettent à l’improvisation et renoncent ainsi à
maîtriser leur avenir. Plus nombreux sont ceux qui reconnaissent la
nécessité de la prévision mais nient la possibilité de construire des plans
de bataille efficaces pour se faire les apôtres du flair et de l’intuition. Or
on ne peut raisonnablement fonder une politique de développement
sur la seule intuition, pas plus qu’on ne peut la confier aux coups
heureux du hasard. […] Flair et intuition ont d’ailleurs une efficacité
limitée dans le temps et c’est en général lors de la création qu’ils
s’expriment de la manière la plus éclatante. »
Il détaille quelques moyens d’exploiter les opportunités qu’offre un
environnement bousculé. Car « la souplesse de manœuvre que procure
l’absence de stratégie ne saurait [cependant] compenser les
inconvénients d’une recherche hasardeuse de créneaux, les risques de
décisions hâtives et les conséquences d’une absence de contrôle
sérieux sur l’utilisation des ressources ».

Pour les auteurs de Management : stratégie et organisation22, « un


postulat erroné, selon lequel le management stratégique n’existe pas
ou pire encore est inutile dans les petites entreprises, doit être
dénoncé. Le chef d’entreprise, quel que soit le statut de la firme
(artisanal, TPE, petite entreprise), possède une vue préalable sur le
devenir de l’organisation dans un avenir relativement éloigné.
Toutefois, cette projection ou plutôt cette intention que porte le
manager n’est pas rédigée, formalisée comme elle l’est dans une
grande entreprise ». Pour eux, un travail d’analyse et de prise de
décision stratégique est nécessaire pour permettre à quelques rares
élues de devenir moyennes, puis grandes. « Un bon nombre de petites
firmes resteront dans cet état, tandis que disparaîtront les moins
robustes et les moins chanceuses. »

D’autant plus que d’après Gérard Roth et Michal Kurtyka, « la


démarche stratégique peut se mener dans tout type d'organisation.
Même au niveau d’un individu, on peut définir ses propres objectifs
personnels ainsi que ses critères de mesure, ses tableaux de bord
personnels ! La démarche stratégique peut donc s’appliquer à une
petite PME en en gardant l’esprit et sans tomber dans des lourdeurs
administratives. Cela pourrait par exemple consister à associer les
collaborateurs d’une PME à la réflexion sur l’avenir de leur entreprise,
alors que très souvent le PDG, parfois égocentrique, pense détenir
toute la vérité à lui seul. La démarche stratégique peut alors consister à
établir un diagnostic à partir d’une lecture de la réalité en fonction d’un
certain nombre de grilles et à faire valider la synthèse par les
collaborateurs ». Pour les auteurs de Profession dirigeant, la démarche
stratégique est parfaitement adaptée aux petites entreprises. « Bien
entendu, une PME ne doit pas se doter d’outils managériaux ou de
reporting lourds et à condition d’en garder l’esprit, sans tomber dans
des excès de formalisme. »
Et de détailler les différentes phases qui restent d’après eux les mêmes
quelles que soient la taille ou l’activité de l’entreprise :
• le diagnostic, qui s’appuie sur l’approche systémique et analytique
avec l’aide d’outils et de grilles de diagnostic ;
• la synthèse du diagnostic, qui permet de dégager les enjeux
stratégiques de l’entreprise ;
• la vision et le concept stratégique futur.

Une fois le concept stratégique défini, il faut essayer de mettre en


œuvre le changement ainsi voulu, de déterminer la tactique de
déploiement, d’adapter le système de management, etc.
Sans compter que, d’après Gilles Barouch23, « dans une petite
structure, la planification d’objectifs aide à s’affranchir de la pression
des urgences et à dynamiser ses affaires. Les outils utilisés par les
entreprises performantes pour définir et suivre leurs objectifs font appel
aux notions d’autodiagnostic, d’indicateur de résultat et de tableau de
bord équilibré. Pour élaborer ses objectifs annuels, on profitera, de
préférence, d’une période creuse. Par la suite, on consacrera d’une à
quelques demi-journées chaque trimestre pour faire le point de
l’avancement de ses objectifs ».

Cela paraît d’autant plus important que la stratégie à suivre n’est pas
toujours celle que l’on imagine, ou ne doit pas forcément être mise en
œuvre dans l’ordre que l’on croit : pour Michel Marchesnay par
exemple, la segmentation des marchés apparue ces vingt-cinq
dernières années favorise l’émergence de petites entreprises
spécialisées dans la satisfaction de besoins bien délimités, pour lesquels
elles possèdent une compétence distinctive (adaptabilité, proximité et
disponibilité). « L’exemple type est celui des sociétés de conseils en
informatique, et, plus généralement, du secteur des services. »
D’après lui, la spécialisation, qui s’oppose à la diversification, touche
également les fonctions dans l’entreprise. « Celle-ci se concentrera sur
les fonctions qui lui confèrent des compétences distinctives,
conformément à l’analyse en termes de chaîne de valeur, et en termes
de comptabilité d’activité. Les autres fonctions, qui n’apportent pas de
contribution nette à la valeur ajoutée par l’entreprise, seront
externalisées », poursuit-il. « Cette stratégie touche d’abord les petites
entreprises, dans la mesure où certaines fonctions sont sous-
dimensionnées (elles ne peuvent se “payer” un directeur du personnel
très compétent par exemple, et s’adresseront, pour le recrutement, à
un cabinet spécialisé). »
Pour Jean-Philippe Tixier, « la réussite, aujourd’hui, repose davantage
sur la spécialisation – sur des segments de marchés précis – que sur la
généralisation, quand on veut vendre de tout en “ratissant large”. »

Mais la spécialisation peut amener les entreprises à se développer à


l’international dans un deuxième temps, d’après Michel Marchesnay :
« Il est remarquable de constater que les petites entreprises axées sur
l’immatériel, ou sur des marchés mondiaux hyperspécialisés
("nanomarchés"), sont conduites à des stratégies de globalisation. »
[MOULIN ROTY CHANGE TOUT POUR GRANDIR SANS OUBLIER
L’HUMAIN]
Moulin Roty a fait appel à des conseils extérieurs pour prendre des décisions stratégiques
synonymes de survie puis de croissance, tout en conservant une importante dimension
sociale.
« Nous n’avions pas de gros besoins. L’entreprise tournait, c’était une époque
économique facile », se souvient Dominique Jalaber, un brin nostalgique, à propos des
débuts de Moulin Roty, nommée d’après le nom du lieu-dit où la vingtaine de babas cool
qui l’a créée s’est installée pour vivre en communauté en 1972. « Nous étions un peu
autodidactes, nous n’avions pas fait d’écoles mais nous avons vécu assez chichement
jusqu’à l’incendie. » Car après avoir petit à petit fait leur nid en concevant et fabricant
juste assez de jouets pour être autosuffisants, un terrible incendie a mis en péril leur
gagne-pain en 1988. Qu’à cela ne tienne, ils ont mis à profit ce terrible événement pour
repartir de plus belle : « Nous avons fait un projet d’entreprise avec un consultant envoyé
par l’Union régionale des Scop, poursuit le président élu de Moulin Roty. Nous avons
abandonné une structure égalitaire, que ce soit au niveau de la hiérarchie ou des salaires,
et nous sommes concentrés sur ce qu’on savait faire le mieux, c’est-à-dire la création et la
commercialisation. »

L’entreprise coopérative adopte le statut de Scop SARL (elle a maintenant celui de SA) et
externalise sa production en en délocalisant une partie en Roumanie dans un premier
temps. Elle fera plus tard appel à des fabricants chinois, mais toujours en privilégiant la
qualité. « Même en Chine, nous travaillons avec les mêmes usines depuis 1993. Nous
n’en avons jamais changé », précise le sémillant dirigeant. « On ne peut pas dire que l’on
ne discute pas les prix, mais nous mettons deux couturières là où eux en mettent une. »
Moulin Roty est même cité en exemple dans une publication de la Commission
européenne sur l’entrepreneuriat responsable : « Afin de garantir le respect, par leurs
sous-traitants étrangers, des principes éthiques en matière de conditions de travail et de
rémunération, la coopérative a recruté un intermédiaire de confiance sur place, plutôt
que de passer par une société d’importation. Même si cette procédure n’a sans doute pas
la rigueur d’un audit externe effectué par un tiers, elle n’en soumet pas moins la gestion
de la chaîne d’approvisionnement au contrôle démocratique interne des membres de la
coopérative. » Le grand fabricant de jouets a aussi recours à des travailleurs handicapés
au sein de Centres d’aide par le travail.
Cela ne l’a pas empêché de peiner à se développer, puisqu’il comptait quinze salariés en
1995. Deux ans plus tard, Moulin Roty décide de faire appel à un consultant choisi après
un appel d’offres consécutif à l’octroi d’une subvention. « Il m’a envoyé en stage
obligatoire de dirigeant de PME pendant dix-huit mois, poursuit-il en plaisantant. J’y suis
allé à contrecœur. Je me suis retrouvé avec des gens en costard-cravate qui avaient
comme préoccupation de mettre en place les 35 heures. Mais ça m’a plu dès la première
journée et cela m’a beaucoup servi. C’est toujours intéressant de rencontrer des gens
extérieurs. C’était très complet, avec des sessions de deux, trois jours de comptabilité,
marketing, management, ressources humaines, etc. » Fort de ses nouvelles
connaissances, il décide de développer la marque Moulin Roty, qui n’existait pas jusque-
là, les produits étant vendus sans étiquette. « Nous avons remis en cause toute notre
organisation, changé la grille salariale et adopté une approche marketing. Nous refusions
de communiquer, nous étions des anti Coca-Cola. » Il a aussi revu toute la distribution :
« Nous sommes passés de 2 400 à 1 200 clients mais en étant mieux représentés dans
chaque boutique », grâce à un système de corners.
En 2009, Moulin Roty a réalisé un chiffre d’affaires de 12 millions d’euros dont 80 % en
France, et employait trente-six personnes à son siège, trente-neuf en dehors… Et tout
cela, Moulin Roty l’a accompli sans renier ses valeurs puisque Dominique Jalaber, le
dernier de la bande de 1972 à encore y travailler, gagne seulement deux fois plus
d’argent que le plus bas salaire de l’entreprise, et que tous les bénéfices sont partagés
équitablement. Même s’il estime que « nous avons connu des périodes plus rigolotes, et
les gens viennent pour un boulot et pas pour travailler dans une coopérative », il constate
que « les salariés sont plus épanouis que dans d’autres structures. Il y a un investissement
de la personne supérieur. »

11. Annabelle Jaouen, Olivier Torrès, Les Très petites entreprises : un management de proximité,
Paris, Hermès science publications, 2008.
12. Henri Mahé de Boislandelle, Gestion des ressources humaines dans les PME, Paris,
Economica, 1998.
13. Pierre Bellon, Je me suis bien amusé ! Sodexho raconte…, Paris, Éditions d'Organisation,
2006.
14. L’Art de diriger, vol. 1, op. cit.
15. www.apce.com
16. Jacques Gautrand, « Un engouement pour la vie associative, école du management »,
Personnel n° 488, mars/avril 2008.
17. Gérard Roth, Michal Kurtyka, Profession dirigeant : De la conception du changement à
l'action, Paris, Dunod, 2007.
18. 10 points clés pour réussir, op. cit.
19. Gestion des ressources humaines dans les PME, op. cit.
20. Michel Marchesnay, Management stratégique, Éditions de l’ADREG, mai 2004.
21. L’Art de diriger, vol. 1, op. cit.
22. Op. cit.
23. Gilles Barouch, Élaborer des objectifs et un tableau de bord de suivi, Issy-les-Moulineaux,
Éditions Livres à vivre, 2010.
[PARTIE II]

GÉREZ
LES DIFFÉRENTES
FONCTIONS
DE L’ENTREPRISE
D’après Henri Fayol, un ingénieur français considéré comme l'un des
précurseurs du management, ce dernier a pour objectif de veiller aux
fonctions technique, commerciale, financière, de sécurité, comptable et
administrative. Bien sûr, cette subdivision a subi de nombreuses
évolutions.

Vers la fin du XXe siècle, le management se réduisait aux fonctions de


marketing, de finance, de stratégie, à la gestion des opérations (ou
gestion de la production), au management du système d'information et
à la gestion des ressources humaines. Et si cette classification devient
de plus en plus difficile à respecter parce que de plus en plus de
« process » peuvent être rangés dans plusieurs catégories différentes, il
nous semble important de le faire, dans un souci de clarté.

Nous aborderons donc ces points (en dehors de la stratégie) en laissant


la GRH de côté pour la traiter dans la partie consacrée à la gestion des
hommes, bien distincte car primordiale dans un ouvrage sur le
management.
1- LA GESTION DES OPÉRATIONS
Les principaux domaines couverts par la gestion des opérations, ou
management de la production, sont la conception des processus de
production, la gestion des stocks et des approvisionnements, la mise en
œuvre d’une politique de qualité, l’organisation et la planification de la
fabrication, et la définition d’une logistique efficiente.

« Fabriquer au moindre coût des produits de qualité, adaptés aux désirs


des consommateurs, et mis à leur disposition dans des délais
raisonnables, résume les impératifs actuels des entreprises », expliquent
Anne Gratacap et Pierre Médan dans Management de la production1.
« Dans un environnement où la réponse optimale au consommateur
(Efficient Consumer Response) est au cœur de la stratégie des firmes,
les responsables du management de la production doivent apporter
une réponse globale au vecteur coût-qualité-adaptabilité. »
D’après eux, l’intérêt actuel porté à la Supply Chain (en français
« chaîne d’approvisionnement », le management intégré de la
production et de la logistique, des fournisseurs aux clients finaux) n’est
pas un phénomène de mode mais l’aboutissement d’une nécessité
d’adopter un management de la production intégré et transversal,
fondé sur les processus plutôt que sur les fonctions, qui a vu le modèle
japonais, ou « toyotisme », prendre le pas sur la division du travail et la
spécialisation des tâches héritées d’Adam Smith et Frederik Winslow
Taylor. « Il traduit une préoccupation majeure des dirigeants : faire en
sorte que, par l’intégration des processus, l’entreprise soit la plus
performante et la plus compétitive possible. »

Même si cette conception de la production est en vogue, nous


présenterons la production, la qualité, les achats et la logistique de
façon séparée pour, là encore, plus de clarté.

La production
« On peut dater les premières réelles expériences en matière de gestion
de la production au moment de la réalisation des premières pyramides
égyptiennes », expliquent Alain Courtois, Maurice Pillet et Chantal
Martin-Bonnefous dans leur ouvrage, Gestion de production2. « Ces
grands chantiers ont suscité les premières réflexions dans le domaine
des approvisionnements, des ressources humaines mais aussi de la
standardisation des tâches. »

Or, comme le souligne Michel Badoc3, « certains managers outre-


Atlantique rappellent sous forme de boutade que les organisations
pyramidales émanent des pyramides et que celles-ci ne sont que des
tombaux, ceux de l’esprit d’entreprise ».
Robert Papin4 recommande ainsi des structures orientées clients et des
organigrammes aussi légers que possible : « Une amélioration des
processus est d’autant plus facile à mettre en œuvre que les structures
en place comportent peu d’échelons hiérarchiques et que des
collaborations se sont déjà instaurées entre les différents départements
et services. » Il faut donc œuvrer dans ce sens, même si la petite
entreprise est par nature moins hiérarchisée.

En ce qui concerne l’organisation de la production à proprement parler,


le besoin d’adaptabilité se manifeste par un fonctionnement favorisant
la polyvalence des employés, elle aussi l’apanage des petites structures.
Il existe cependant dans ce domaine une forte marge de progression
puisque le toyotisme (ou système de production de Toyota) n’a pas
encore pénétré toutes les unités de production.
La société GéoLean, par exemple, a été créée en 2004 par Daniel
Marco, ancien responsable des systèmes de production chez
l'équipementier automobile Faurecia, parce qu’il ne trouvait pas
d'installateur pour mettre en place le modèle Toyota dans les ateliers.

Les entreprises doivent aujourd’hui plus qu’en tout autre temps être
capables de s’adapter très vite et en permanence aux besoins de plus
en plus variés d’un marché mondial fortement concurrentiel. « Qu’on
soit intégré dans un projet de type Supply Chain ou non, l’objectif
“Produire ce qui est déjà vendu” reste l’objectif dominant »,
poursuivent Alain Courtois, Maurice Pillet et Chantal Martin-
Bonnefous. « Pour y parvenir, l’entreprise se doit d’être au moins
réactive, voire proactive. »
La réactivité est au centre des préoccupations de l’entreprise, de sa
stratégie, et par conséquent la fabrication à l’étranger, voire la
délocalisation de sa production ne sont pas toujours de mise. On
assiste même souvent (enfin, trop peu) à des relocalisations, comme
l’illustre l’exemple d’Envie de fraises (lire plus loin), ou à
l’externalisation de certaines parties de la production.
« Comparez toujours vos prix de revient avec les prix d’achat que vous
pourriez trouver, dans le monde, pour les mêmes produits, finis »,
conseille Alain Goetzmann, le président de Delta Inter Management
(cabinet de conseils aux dirigeants de PME), sur le site Portail-des-pme5.
« C’est le choix du “make or buy”. Si vous produisez, flexibilisez votre
production, raccourcissez le délai entre la prise de commande et
l’exécution, exigez que la production soit source d’innovation et
essayez de ne produire que ce qui est vendu, cela vous permettra de
multiplier l’offre, tout en réduisant vos stocks. »
Cette recherche de réactivité se traduit parfois par une planification de
la production « en juste-à-temps » qu’Anne Gratacap et Pierre
Médan6 opposent à une organisation « classique » qui peut bien
entendu prendre différentes formes plus ou moins adaptées à l’activité
de l’entreprise. Le juste-à-temps a le vent en poupe car il permet de
minimiser les coûts, mais ils préviennent qu’il « nécessite de longs
développements » et engendre donc des coûts.
Or, la rentabilité prime et l’objectif financier amène à minimiser les
stocks de produits, mais aussi de matières premières, tout en
amortissant les coûts engendrés par la recherche et le développement,
qui sont encore plus sollicités…

« L’environnement économique changeant, les frontières étant


ouvertes, le contexte international implique maintenant l’amélioration
de notre flexibilité, de notre rapidité d’adaptation aux besoins du
marché, de notre rapidité à répondre à un besoin qui est de plus en
plus éphémère », ajoute Jean-Yves Perez, consultant spécialisé dans
l’accompagnement opérationnel du dirigeant, sur le site Portail-des-
pme. Des cycles de vie plus courts, une pression accrue sur les délais, la
baisse du niveau de trésorerie, la réduction des marges… autant
d’éléments qui doivent nous inciter à réduire les structures, raccourcir
les durées des cycles de production, à diminuer les stocks et les en-
cours, à travailler à réduire le délai de mise en œuvre des améliorations
sur les produits ou sur les processus. »

[LES FRAISES NE POUSSENT PAS MIEUX EN CHINE]


Envie de fraises (www.enviedefraises.fr) est le premier concept store en ligne français
pour futures mamans. Lancé en 2006, il a connu un succès fulgurant puisqu’il a réalisé
3 millions d’euros de chiffre d'affaires et a été élu meilleur espoir du e-commerce l’an
passé. Sa fondatrice a profité du soutien du réseau d’aide aux créatrices, Paris Pionnières,
et d’Entreprendre Paris (elle a depuis créé les Mompreneurs France), ainsi que de sa
connaissance de la Chine.
« De 18 à 28 ans, passionnée par la Chine, j’ai travaillé là-bas, aidant des maisons de
couture à s’y implanter », explique Anne-Laure Constanza dans un article de Valérie
Talmon paru sur le site de Les Echos Entrepreneur7. « En 2003, je me suis mise à mon
compte en créant une société de conseils, Chinattitude. » Elle a aussi fait jouer son
réseau et usé de son savoir-faire dans le domaine de la mode, faisant naturellement
fabriquer ses produits en Chine dans un premier temps.
Aujourd’hui, 80 % des vêtements proposés sur le site sont fabriqués en Europe de façon
à pouvoir faire preuve d’une plus grande réactivité : « Nous sortons des nouveautés tous
les quinze jours, poursuit-elle. Fabriquer en Chine implique des délais de livraison
beaucoup trop longs ! »

La qualité
La qualité des produits et des services proposés par une entreprise est
devenue un enjeu majeur du management car le coût des
dysfonctionnements peut représenter plus de 30 % de son chiffre
d'affaires. Dans la mesure où la correction de ceux-ci permet de réaliser
des économies importantes et d'améliorer les prestations proposées, et
donc d'être plus compétitif, la qualité a le double avantage d’améliorer
le fonctionnement interne et surtout de satisfaire les clients.

Or l’insatisfaction des clients est particulièrement coûteuse (en argent


mais aussi en image et en temps), à tel point que « la qualité des
relations avec le client constitue pour l’entrepreneur un incontournable
moyen de survie », d’après Michel Badoc8. « Elle devient très vite un
élément fondateur des politiques de fidélisation et de conquête des
clients. Elle présente un atout maître lui permettant de se doter d’une
marque attractive auprès d’une niche de développement choisie. »
Cela devient même un atout utilisé dans la communication
d’entreprise, comme le fabricant automobile Kia qui propose une
garantie 7 ans ou 150 000 kilomètres sur tous les véhicules de sa
gamme. Mais pour pouvoir le faire, il faut disposer d'outils (études de
besoins ou études marketing, enquêtes de satisfaction et suivi des
réclamations) permettant d'identifier objectivement les besoins des
clients, d'évaluer leur satisfaction et de suivre les progrès réalisés dans
la relation client. Cela demande la mobilisation de l’entrepreneur, des
moyens et la sensibilisation du personnel.
[LA RELATION CLIENT PREND LE POUVOIR CHEZ POWEO]
Poussée à l’extrême, la qualité de la relation client peut constituer un avantage
concurrentiel, comme l’illustre l’exemple de Poweo, élu en 2010 et pour la troisième
année consécutive Service client de l’année dans la catégorie Fournisseurs d’électricité et
de gaz.
« Le souci, sur le marché de l’énergie, c’est que le produit est exactement le même d’un
concurrent à un autre. Il n’y a pas de différenciation par le produit en lui-même »,
explique Jean-Denis Mariani, directeur des opérations de Poweo mais également
président de l’Agora des directeurs de la relation client. « C’est un bien anxiogène, qui
n’est pas forcément très attirant, et le fait de sortir d’un monopole suffisamment
conséquent fait que nous, nouvel opérateur, avons un besoin de faire preuve de
pédagogie, d’évangélisation auprès des prospects et clients, et de les rassurer au niveau
de la relation client. La différenciation, le bénéfice pris, qui est l’un des critères qui va
conditionner la décision d’achat, n’est pas suffisamment important, puisqu’il se situe
autour de 8 % d’économie, pour être le seul critère qui va conditionner la décision de
fidélité. » Jean-Denis Mariani estime même que « la relation client est un pilier à part
entière dans la stratégie commerciale de Poweo ». Et même s’il affirme que les clients ont
un véritable pouvoir de nuisance dont ils ont conscience quand ça se passe mal, il
considère que les efforts déployés en termes de relation client payent plutôt bien parce
que les clients sont de plus en plus fidèles et réfèrent de leur expérience positive à
d’autres prospects. « C’est presque un nouveau canal de commercialisation, qui est
finalement le plus rentable et le moins coûteux, en termes de communication, puisque ce
sont les clients entre eux, dans une relation C to C, qui se transmettent les bonnes
pratiques et les bonnes entreprises quel que soit le secteur. »
Il ne minimise pas pour autant le coût que représente une bonne gestion de la relation
client, et notamment de mesurer, tracer, convertir et traiter de manière efficace
l’ensemble des informations récupérées aux différents points de contact de l’organisation
pour mieux servir les clients. « Il ne faut pas se leurrer, il y a toujours une gestion de
coûts très poussée dans les départements de relation client parce que pour beaucoup
d’entreprises c’est quand même un centre de coûts important, et vu comme tel, mais
c’est en train de changer. On considère de plus en plus la relation client comme un
vecteur de différenciation, tout simplement parce que ce sont les clients qui font tourner
les entreprises et qu’un client fidèle, rentable, satisfait, est un client sur lequel on peut
développer son panier moyen, son chiffre d’affaires, parce qu’il est content donc il prend
plus de services et ainsi de suite. Finalement, investir 1 euro dans la relation client, c’est
peut-être plus profitable que de l’investir ailleurs. »
Surtout qu’à l’image de Poweo, ces services peuvent être externalisés et même
délocalisés… « C’est un centre de coûts important et l’on doit donc instaurer de la
flexibilité, pouvoir dire que l’on a besoin de vingt personnes de plus ou de moins en
fonction de la demande, ce qui est possible avec des partenaires en “outsourcing”,
poursuit-il. Notre avantage, c’est que nous avons externalisé un processus que nous
connaissions parfaitement, et que nous avons beaucoup plus de temps en interne pour
piloter la qualité, optimiser ces processus, etc. » Ce que Poweo économise en offshore lui
permet d’investir à d’autres endroits de la relation client : sur les nouvelles technologies,
sur les nouveaux processus et ainsi de suite.
Jean-Denis Mariani considère globalement qu’en raison de son rôle, de plus en plus
important, le domaine de la relation client se développe beaucoup en France.
« Typiquement, la crise qu’on a connue et que l’on continue à connaître a fait que les
acquisitions deviennent de plus en plus difficiles, et qu’on redonne la priorité à la
fidélisation des clients, qui passe par la connaissance du client et de ses attentes, conclut-
il. En ce sens, le département relation client et son patron ont un rôle primordial parce
qu’ils sont à même de répondre et d’influencer les responsables du marketing et de la
communication en leur disant exactement ce qu’attendent les clients. »

« La fidélisation, justement, repose aussi sur la qualité de ce que vous


vendez », ajoute Jean-Philippe Tixier9, qui parle de « bases zéro » : zéro
défaut, zéro délai, zéro panne, zéro papier, zéro stock, zéro accident et
zéro mépris. « Et n’oubliez pas que c’est surtout une question de
mentalité d’entreprise fondée sur un impératif admis par tous : "Faire
bien du premier coup." »

Pour cela, il peut être utile de mettre à profit des techniques plus ou
moins simples et onéreuses d’optimisation des processus comme le
« reengineering » cher à Michael Hammer. « En fait le
“reengineering”, mais aussi le juste-à-temps, le “lean management”,
la gestion au plus juste, le Six Sigma, les cercles de qualité, le zéro
défaut ou la qualité totale ne sont que des procédés, parmi d’autres,
pour inciter les collaborateurs à repenser leurs activités quotidiennes
afin de mieux répondre aux désirs de leur clientèle », considère Robert
Papin10. Pour lui, il n’existe pas de recettes miracles mais il préconise
« l’obsession de la qualité, des coûts et de la vitesse de réaction aux
besoins de la clientèle ».
Il estime qu’il faut alléger les structures, ou au moins augmenter les
responsabilités des employés en contact direct avec la clientèle afin
d’améliorer la remontée d’informations et la gestion des réclamations.
« Contrairement à beaucoup d’idées reçues, la satisfaction des
réclamations ne coûte pas très cher et l’expérience montre que 90 %
des clients mécontents sont de bonne foi. »

Pour Robert Papin, une autre voie détournée pour aborder la qualité
totale est celle de la certification. À ce sujet, il conseille de mettre à
contribution des consultants expérimentés ayant de solides références
dans le domaine au sein d’équipes mixtes constituées avec le personnel
de l’entreprise. « Cela permettra surtout aux collaborateurs d’acquérir
plus vite des connaissances qui leur donneront la possibilité de
s’approprier la démarche de qualité. »
Malgré des freins réels (manque de ressources en personnel, manque
de temps, coûts d’accompagnement jugés prohibitifs ou accès à
l’information malaisé), « faire certifier son système de management de
la qualité ne doit pas rester l’apanage des grandes entreprises. Pour
garantir la confiance et la satisfaction de leurs clients, les PME et TPE
doivent aussi pouvoir faire reconnaître l’efficacité de leur
organisation », peut-on lire dans La Certification qualité à l’usage des
TPE-PME-PMI11. Publié par l’Afnor, cet ouvrage tente de les aider à
appréhender les différentes étapes d’une démarche de certification
qualité.

Pour Jean-Philippe Tixier12, la fidélisation repose notamment sur la


qualité du produit que vous vendez, elle-même « fonction de la qualité
de ce que vous achetez et qui va entrer dans la qualité finale ».

Les achats

« La qualité des achats joue sur tous les tableaux de votre activité »,
poursuit Jean-Philippe Tixier. « Notre époque attache une grande
importance à tout ce qui “montre” votre entreprise. Votre papier à
lettres, vos enveloppes, le message d’accueil de votre répondeur
téléphonique, la netteté de vos lieux d’accueil et de vos collaborateurs,
entre autres, points dits “de détail”, doivent impérativement faire
l’objet de soins attentifs. »

Au-delà de cet aspect extérieur et surtout de la qualité de vos produits,


les achats occupent une place très importante au sein de l’entreprise :
« Représentant près de 70 % du chiffre d'affaires dans l'industrie, la
fonction achats est plus que jamais au cœur de la stratégie
économique des PME/FMI pour la préservation de leur marge »,
explique Hélène Person dans son Guide pratique fonction achats et
approvisionnements en PME13, le fruit d'une étude réalisée auprès de
trois mille sociétés françaises.

Dans leur ouvrage Stratégies d'achat14, Jean-Michel Loubère et Roger


Perrotin estiment qu’en vingt ans, la fonction achats est « passée d’une
démarche administrative à une mission stratégique. En effet, le niveau
des relations “clients-fournisseurs” dans une économie de marché a
considérablement évolué ». Pour eux, cette économie impose une
course à l’innovation qui se traduit par une accélération du
développement de produits nouveaux afin de satisfaire la demande des
consommateurs en termes de variété et de flexibilité, mais aussi une
réduction drastique des délais de production (« time to market »), une
optimisation de la qualité des produits et une recherche permanente de
la rentabilité en termes financiers.
« Il est nécessaire aujourd’hui d’élaborer des stratégies différenciées
par lignes de produits achetés. Dans ce cadre, la fonction achats a un
rôle prépondérant à jouer au niveau de la stratégie d’entreprise »,
poursuivent-ils. « Toute décision, qu’elle soit de type stratégie
d’entreprise (alliance ou coopération), de type individuel (faire ou faire
faire), de type commercial (compensation ou transfert de savoir-faire),
impacte lourdement sur les achats de l’entreprise. »

L’ouvrage d’Hélène Person montre quant à lui comment mettre en


place des outils et une organisation de la fonction achats performants
et adaptés aux moyens financiers de l'entreprise, quels moyens
pratiques utiliser pour mieux gérer ses achats et ses
approvisionnements et quelles sont les solutions alternatives existantes
(groupement d'achats, acheteur en temps partagé, externalisation des
achats).

Les centrales d’achats comme PME Centrale (www.pmecentrale.fr),


créée à l'initiative d'entreprises indépendantes du bâtiment et des
travaux publics, et spécialisée dans les achats de produits et de services
non stratégiques, peuvent aider à compenser les difficultés éprouvées
par les petites entreprises, qui n'ont pas de gros volumes à acheter,
pour obtenir des prix intéressants.

Tout comme la ténacité : « Révisez régulièrement vos prix et conditions


d’achat », recommande Alain Goetzmann sur le site Portail-des-pme15.
« Remettez vos fournisseurs en concurrence chaque année. Ne traitez
pas que des prix ; c’est important, mais les quantités livrables, les
conditionnements, le niveau de stock que vous êtes obligé de porter le
sont aussi. Et recommencez les négociations. À chaque rencontre vous
obtiendrez quelque chose de plus. »

[PAS DE PETITES ÉCONOMIES POUR LES PETITS


FABRICANTS]
Après une première création d’entreprise avortée, Nicolas Gille a profité du régime de
l’auto-entrepreneur pour relancer Badges Invader (www.badgesinvader.com), un site de
vente de badges personnalisés, en août 2009.
Mais toujours pas question d’avoir les yeux plus gros que le ventre : « Pour ma machine à
badges (coût : 3 000 euros), j’ai profité de la baisse du dollar. En achetant aux États-Unis,
j’ai pu économiser environ 700 euros », confie-t-il sur le site Planète auto-entrepreneur
(www.planete-auto-entrepreneur.com). « Je fais la même chose pour mes fournitures.
D’ailleurs, pour réduire encore les coûts, je groupe mes commandes avec un autre auto-
entrepreneur. Lors de grosses commandes, nous parvenons à réduire le coût du badge
par deux ! »
Il lui arrive d’ailleurs de travailler avec celui-ci car il est basé à Nantes et lui à Paris.
« Quand je suis débordé et que je ne peux pas assurer une commande, je lui confie mon
client et inversement, poursuit-il. C’est vraiment confortable de pouvoir s’entraider au
quotidien. » Ils envisagent même de s’associer et de créer une société si leur activité
prend de l’ampleur…

La logistique
« La logistique est la fonction organisant les circuits de matières au
moindre coût, autrement dit l'art de livrer le bon produit au bon
endroit et au bon moment », affirme Joël Sohier dans La Logistique16.

Si elle concerne plus les PMI, elle peut aussi constituer un facteur
d’efficacité et de performance pour les entreprises de services : « La
logistique concerne, bien entendu, en priorité, les entreprises qui ont
une activité industrielle (fabrication) et/ou commerciales (achat/vente),
car ce sont ces activités qui génèrent des flux de matières et/ou de
produits », explique Piotr Michejda, directeur de missions transport et
logistique d’Esalys, une société spécialisée dans l'audit et la réduction
des coûts des entreprises, sur le site Portail-des-pme17.
« Mais les entreprises de services ont, elles aussi, des problématiques
de flux avec la gestion d’éventuels engins (de chantier par exemple), de
pièces de rechange (entretien de machines de bureau par exemple) et
de consommables (cartouches d’encre, papiers…). »
D’autant plus que la logistique n’est que très peu mise à contribution
ou du moins optimisée dans les petites entreprises : « Dans un contexte
de mondialisation des échanges, d’accélération des flux, d’hyper
concurrence et de renouvellement rapide des produits, la logistique
constitue un puissant levier de compétitivité.Or cette fonction
stratégique n’a pas encore livré tout son potentiel dans les PME
contrairement aux grands groupes qui ont accompli leur révolution
logistique », peut-on par exemple lire dans l’enquête menée par la
chaire de Logistique et transport du Cnam (Conservatoire national des
arts et métiers) et par l’Ania (Association nationale des industries
alimentaires) sur la logistique dans les PME-PMI de l’agroalimentaire.

« Cependant, les petites et moyennes entreprises sont en pleine


mutation. Les enjeux sont importants. Il en va de la survie et du
développement des petites et moyennes industries en proie à l’asphyxie
face aux exigences des marchés et à l’envolée des cours des matières
premières et de l’énergie. Faisant le lien entre l’offre et la demande, la
logistique offre plusieurs leviers de croissance, de réduction des coûts
et de mutualisation des ressources. Jusqu’alors méconnus par les PME,
les leviers logistiques sont néanmoins promis à un bel avenir si tant est
que les entreprises apprennent à les utiliser dans le cadre de stratégies
globales Supply Chain. »

La fameuse Supply Chain que Pascal Pouderoux, directeur général de


l’institut Renault, met sur un piédestal en préface de La Supply Chain :
optimiser la chaîne logistique et le réseau interentreprises. « Partir du
client, pour remonter jusqu’aux partenaires fournisseurs en créant de la
valeur et du cash-flow pour l’entreprise, c’est tout le processus de la
Supply Chain ».
Si celle-ci englobe d’autres fonctions de l’entreprise, elle fait la part
belle à la logistique et commence à devenir incontournable, même
pour les petites structures. « La fonction Supply Chain est désormais
une évidence pour la majorité des grandes entreprises. Elle reste
cependant peu exploitée, voire inconnue, dans nombre de sociétés de
moins de cinq cents salariés », regrettent Erwan Giraud et Mike Haziza,
associés chez Traker, cabinet de conseils spécialisé dans l'optimisation
durable des performances18.
Et de citer le Conseil d’analyse économique qui, en 2006, concluait que
les entreprises françaises peinent à croître au-delà de tailles critiques et
restent en moyenne moins rentables que leurs concurrentes
allemandes, américaines et anglaises. « Avec des résultats tels que
l’amélioration du taux de service, la réduction des délais, l’absorption
de volumes supplémentaires, la réduction des coûts ou encore la
rationalisation des stocks, la fonction Supply Chain constitue pourtant
un levier évident pour y remédier. »

Car comme le déplore Piotr Michejda, dans la plupart des entreprises


de cette catégorie, les opérations et tâches logistiques sont plutôt sous-
traitées. « En conséquence de quoi, les PME/PMI considèrent les
transports et la logistique presque exclusivement comme des coûts
externes qu’elles ne peuvent ou ne veulent maîtriser, n’ayant bien
souvent qu’une idée approximative, probablement erronée, des
montants et des proportions que ces coûts représentent dans leurs
comptes d’exploitation. »
Ces coûts peuvent et devraient, idéalement, être optimisés, mais pour
cela ils doivent être identifiés et affectés. De plus, « leur bonne
connaissance permet d’évaluer, le cas échéant, d’adapter,
l’organisation des opérations – industrielles et commerciales – que ces
activités logistiques se doivent de “servir” au mieux. »
[COMPANEO PEUT VOUS AIDER]
La première plateforme de recherche de fournisseurs (et notamment de prestataires
logistiques) en ligne européenne est destinée aux TPE/PME.
Présent sur quatre pays (France, Belgique, Grande-Bretagne et Pays-Bas), Companeo vous
permet de trouver gratuitement et sans engagement les meilleurs fournisseurs de services
ou produits pour gérer et développer votre activité. « Quand nous avons lancé le site
Companeo.com en 2000, notre objectif était de devenir le compagnon des TPE et des
PME pour leurs achats », raconte Laurent Horwitz, cofondateur du site et président-
directeur général de Companeo sur le site de La Tribune19. « Nous voulions les aider à
identifier rapidement les fournisseurs qui répondent à leurs besoins quotidiens, car elles
ont souvent du mal à trouver quelqu'un qui veuille bien les aider, par exemple pour
établir la paie de quelques employés. »
Pour cela, Companeo a rigoureusement sélectionné cinq mille « fournisseurs agréés
Companeo » qui proposent cent cinquante catégories de prestations, de produits et de
services couvrant les six préoccupations majeures des dirigeants (installation et
équipement, informatique et télécoms, ressources humaines, gestion et assurances,
marketing et ventes, véhicules de société).
Companeo propose son service de recherche de fournisseurs sur Internet
(www.companeo.com), par catalogue papier et par son centre téléphonique « expert »
gratuit (0826 622 622). Vous déposez une demande de devis par Internet, téléphone ou
fax, celle-ci est vérifiée et après validation, vous recevez immédiatement par e-mail les
coordonnées des fournisseurs agréés qui vont répondre à votre attente dans les
48 heures.
Les sociétés qui souhaitent devenir fournisseurs peuvent se préinscrire sur le site. Un
conseiller commercial les contacte et étudie avec elles les possibilités et modalités de
référencement.
Companeo, qui emploie cent soixante personnes, a généré plus de 650 millions d’euros
de ventes pour ses fournisseurs et a dégagé pour l’année 2009 un chiffre d’affaires de
plus de 14 millions, en forte progression. « Les périodes économiques difficiles sont
bonnes pour les comparateurs, car ces outils aident les entreprises à trouver la meilleure
offre et contribuent au développement commercial des fournisseurs », conclut Laurent
Horwitz. « De plus, la crise accélère les changements d'usages et amène les PME vers des
services nouveaux comme le nôtre. »

1. Anne Gratacap, Pierre Médan, Management de la production : concepts, méthodes, cas,


Paris, Dunod, 2009.
2. Alain Courtois, Maurice Pillet, Chantal Martin-Bonnefous, Gestion de production, Paris,
Éditions d'Organisation, 2006.
3. Michel Badoc, Guide pratique du marketing pour les créateurs d'entreprises, Paris, Éditions
d'Organisation, 2004.
4. L’Art de diriger, vol. 1 ; op. cit.
5. www.portail-des-pme.fr
6. Management de la production, op. cit.
7. Valérie Talmon, « Envie de fraises : un beau bébé devenu grand », entrepreneur.lesechos.fr
8. Guide pratique du marketing pour les créateurs d’entreprises, op. cit.
9. 10 points clés pour réussir, op. cit.
10. L’Art de diriger, vol. 1, op. cit.
11. Association française pour l’assurance de la qualité, La Certification qualité à l’usage des TPE-
PME-PMI : guide de lecture de la norme ISO 9001 : 2000, Saint-Denis-la-Plaine, Afnor, 2003.
12. 10 points clés pour réussir, op. cit.
13. Hélène Person, Guide pratique fonction achats et approvisionnements en PME, Paris,
Maxima, 2008.
14. Jean-Michel Loubère, Roger Perrotin, Stratégies d'achat : sous-traitance, partenariat,
délocalisation, Paris, Éditions d'Organisation, 2005.
15. Op. cit.
16. Joël Sohier, La Logistique, Paris, Vuibert, 2010.
17. Op. cit.
18. Erwan Giraud, Mike Haziza, « PME, créez votre fonction Supply Chain », Supply Chain
Magazine, n° 32, mars 2009.
19. Sophy Caulier¸ « Companeo veut être le guide d'achat des PME », www.latribune.fr
2- LE MARKETING ET LES VENTES
« L’existence de la petite entreprise, sa capacité de survie dépendent
avant tout des choix de marketing judicieux », estiment les auteurs de
Management : stratégie et organisation20. « Tout d’abord il s’agit de
résoudre le problème de segmentation, à savoir la sélection d’une cible
de clientèle tout à la fois suffisamment large pour nourrir une activité
rentable mais aussi quelque peu ignorée jusqu’à présent par la
concurrence, autrement dit une niche. Ensuite il convient, s’il existe
néanmoins des rivaux réels ou possibles, de choisir le créneau qui
permettra de se différencier de ses concurrents. C’est le
positionnement. »

Le marketing étendu, qui comprend la communication, la distribution


et les services ainsi que l’organisation commerciale, sont devenus
vitaux, surtout dans des petites entreprises encore plus soumises à un
environnement changeant.

Le marketing
L’utilisation régulière du marketing est indispensable et elle n’est pas
réservée aux grosses cylindrées. « Les dirigeants de petites et moyennes
entreprises, comme les investisseurs, s’aperçoivent que des éléments
liés à l’évaluation du marché potentiel, à l’analyse préalable des
attentes des clients et des distributeurs, à l’appréhension du pouvoir
compétitif de la concurrence, au choix d’un positionnement
différenciateur, à une harmonisation du “marketing mix”… constituent
pour beaucoup de “success stories” d’incontestables atouts de la
réussite », affirme Michel Badoc21 qui propose une méthodologie
illustrée de cas réels pour aider les PME à mettre en œuvre un
marketing stratégique adapté à leurs besoins particuliers et à leurs
moyens limités.
« Dans sa vie active, l’entrepreneur doit changer plusieurs fois
l’ensemble de son dispositif s’il ne veut pas disparaître, poursuit-il.
L’entrepreneur ne doit pas attendre les difficultés pour réagir. Après
avoir lancé son entreprise, il lui faut dresser chaque année un bilan
réaliste de sa position face au marché, à l’environnement, à la
concurrence et en tirer un pronostic pour la société. Cette démarche
matérialisée par un plan marketing apparaît comme indispensable pour
permettre d’assurer l’avenir de son entreprise. »

Comme quand on envisage de créer une société, quand vous désirez


développer votre activité il faut vérifier la faisabilité commerciale de
votre projet en étudiant le marché potentiel. Cela peut se faire de
manière ponctuelle et se concrétiser par une étude de marché digne de
ce nom, ou par l’intermédiaire de ce que Michel Badoc22 appelle une
« politique d’informations », qui conduit d’après lui à prendre des
décisions plus rationnelles. « Comme les jumelles, l’étude préalable
permet de voir plus loin et mieux. Cette technique doit, bien entendu,
être adaptée aux capacités et moyens dont l’entreprise dispose. »

Il indique par exemple comment utiliser les sources internes


d’information ou les sources secondaires comme Internet (avec leurs
limites), comment mener des études ou enquêtes auprès des
distributeurs ou de la clientèle. Un tel travail peut être intimidant, mais
cela demande surtout du bon sens. Vous pouvez même le réaliser vous-
même, notamment en utilisant des ouvrages dédiés, des outils comme
Odil (voir partie II, chapitre 2, La récupération d’informations) ou la
méthode de travail de base présentée sur le site de l’APCE
(www.apce.com). Vous pouvez par ailleurs entreprendre une formation
pour vous y aider.

Vous pouvez aussi faire appel à des étudiants stagiaires bien encadrés,
à une junior-entreprise (associations d'étudiants implantées au sein
d'écoles ou d'universités), directement à une association d’étudiants
(parfois gratuitement), à un cabinet d'études spécialisé (3 000 euros en
moyenne) ou à un organisme d'accompagnement.
S’appuyant sur les systèmes d’information de l’entreprise (lire la partie
consacrée à la récupération de l’information), l’étude de marché est
indispensable dans la mesure où même si elle ne représente pas un
gage de succès absolu, sa vocation est de réduire au maximum les
risques en vous permettant de mieux connaître l'environnement de
votre entreprise et ainsi de prendre des décisions adéquates et
adaptées.
Comme l’explique Claude Triquère dans Le Grand Livre de la création
d’entreprise23, « la finalité d’une étude de marché est de se persuader
qu’une clientèle existe pour son activité et, lorsqu’on sait qui est cette
clientèle, de pouvoir lui offrir exactement ce qu’elle demande et de le
lui faire savoir ».
En outre, elle est essentielle dans la mesure où elle s’inscrit dans un
plan marketing qui, d’après Michel Badoc, devient de plus en plus
indispensable pour obtenir la confiance des financiers, des investisseurs
et des partenaires.

Votre étude du marché va en effet vous permettre de définir une


stratégie commerciale en connaissance de cause pour ensuite mettre
en place des actions commerciales qui ne seront pas sans
conséquences sur votre organisation commerciale.
« L’analyse concurrentielle est indispensable pour concevoir une
stratégie de développement », affirment Georges Lavalette et Maria
Niculescu24. C’est la réflexion que vous aurez eue après avoir étudié le
marché qui va vous permettre de choisir un « business model », un
positionnement qui reviendra à vous différencier de la concurrence en
mettant en valeur vos avantages spécifiques. Car comme l’écrivent
Philippe Lê et Philippe Le Rivet25 : « Le succès résulte de ce que l’on fait
mieux que les autres ou différemment des autres, alors soyez
différents. » Vous allez aussi pouvoir choisir des segments de marché
cibles et déterminer des objectifs opérationnels.

La mise en place des actions commerciales découlera tout


naturellement : établissement d’un « business plan », d’un échéancier
et détermination du « marketing mix », à savoir la coordination dosée
et cohérente des actions relatives aux politiques de produit, prix,
distribution, vente, service (qualité, après-vente) et communication.
Or comme le souligne Jean-Philippe Tixier26 : « Bien des entreprises
rencontrent de grandes difficultés à conquérir certains marchés, par
défaut de niveau culturel des dirigeants et du personnel, dans la
communication avec ces marchés. »
[LACOSTE A TOUJOURS LES CROCS]
La marque au crocodile a amorcé un tournant stylistique et commercial, ces dernières
années, renouant avec le succès grâce à un positionnement à mi-chemin entre le sport et
la mode.
Dans les années 1990 déjà, la marque a été adoptée par les rappeurs français et a
commencé à cartonner dans les banlieues. Pas forcément bien vu chez Lacoste, mais
efficace. En 1998, Lacoste a atterri dans le giron de Didier Maus par le truchement de
l’entreprise troyenne Devanlay, car malgré des résultats en progression pour la marque, y
compris à l’international, le groupe Lévy, qui la possédait, avait été affaibli par la crise du
textile des années 1970.
Depuis l’an 2000, celle-ci gère la licence mondiale pour la création, la fabrication et la
distribution des vêtements Lacoste. Guy Latourrette, président du directoire de Devanlay,
a amorcé un tournant en cédant les autres activités de la société pour concentrer les
forces du groupe sur Lacoste, et en décidant d’embaucher un directeur artistique.
Christophe Lemaire, ancien bras droit de Christian Lacroix, a surtout mis l’accent sur la
mode : couleurs pétantes, formes plus féminines, matériaux modernes, tout y passe…
« Christophe s’est attaché à retravailler sur les basiques et à capter une clientèle plus
jeune », explique Guy Latourrette qui ne craint en aucun cas de perdre sa clientèle
traditionnelle. « La marque a toujours été très transversale, touchant toutes les tranches
d’âges et toutes les classes sociales, car elle est issue du sport. »
Devanlay a aussi effectué un travail d’uniformisation au niveau mondial, remettant la
main sur la distribution par des rachats ou joint ventures, notamment en Asie, et
développant dans le monde entier des boutiques de conception innovante en propre.
Une innovation technique mise au point à Troyes (et dont René Lacoste aurait été fier) a
par ailleurs permis de mélanger coton et Lycra en maille, et de produire un polo stretch
qui a séduit de nombreuses jeunes Américaines. Les ventes de Lacoste ont même
augmenté de 800 % depuis 2002 aux États-Unis, où le polo du même nom a été jugé
comme le plus résistant dans une étude comparative, devant son concurrent historique,
Ralph Lauren. Certaines choses n’ont pas changé cependant. Lacoste continue d’être
attaché au sport. « Ce sont nos racines, nous avons donc une vraie légende et nullement
besoin d’inventer une histoire marketing, comme l’ont très bien fait certains de nos
concurrents », poursuit Guy Latourrette. « Le golf constitue le point d’ancrage le plus
fort, car habillement et sportswear ne sont pas très éloignés. C’est pour cela que nous
investissons beaucoup dans les joueurs. »
La qualité reste elle aussi primordiale. Même si Devanlay a ouvert des usines dans des
pays pauvres pour y confectionner les pièces les plus simples, elle a gardé des usines
localement dans chacune des activités pour garder le savoir-faire en France, où sont
fabriqués tous les tissus. « Nous sommes à peu près les seuls à fonctionner comme cela,
alors que c’est le seul moyen d’avoir un niveau de qualité constant dans le temps. La
plupart de nos concurrents achètent des produits tout faits. » En Asie notamment, une
région qui présente d’ailleurs un potentiel de développement important pour Devanlay,
dont la branche textile est tout de même passée de 265 millions d’euros en 1998, à plus
de 700 en 2005 en chiffre d’affaires : « La Chine et le Japon constituent actuellement
notre cinquième marché, ils devraient être le troisième », conclut Guy Latourrette. Vous
l’aurez compris, les crocs du croco sont loin d’être usés…

L’organisation commerciale

Après avoir déterminé votre stratégie commerciale en fonction de


l’étude du marché, vous allez pouvoir mettre en œuvre votre politique
commerciale.

Il peut s’agir de modifier son positionnement sur certains marchés, ce


qui demande beaucoup de temps et d’efforts car ce positionnement
s’inscrit dans la durée alors que les plans marketing, eux, peuvent être
modifiés régulièrement. C’est un levier d’action puissant, dans la
mesure où il permet de clarifier l’offre que l’on veut développer et
communiquer aux clients. Cela n’est pas sans conséquences sur l’image
ou la politique de la société ou de la marque, dont la cohérence est
assurée par la continuité de son positionnement.
Vous pouvez y apporter des modifications plus ou moins importantes
en agissant sur le « marketing mix », les caractéristiques de vos
produits ou services, leur qualité, conditionnement et prix, ainsi que sur
votre politique de distribution et de communication.
Cependant, un certain positionnement peut aussi limiter le champ de
développement d’une marque ou d’un produit.

Outre le repositionnement au niveau national, qui peut être effectué en


changeant la distribution et/ou la nature de ses produits ou services, les
autres pays ou les appels d’offres sont souvent susceptibles de procurer
des opportunités de croissance insoupçonnées. Il ne faut négliger
aucune piste, les marchés publics générant par exemple plus de
110 milliards d'euros de commandes chaque année et touchant tous
les secteurs d'activité.
Ceux-ci sont toutefois souvent négligés par les PME « d’abord, voire
essentiellement, par manque d’information, beaucoup plus que par des
difficultés techniques à répondre à un appel d’offres », constatait
Jacqueline Socquet-Clerc Lafont en 2001 dans le rapport du Conseil
économique et social sur la création et la pérennisation de l'entreprise
de petite taille. Elle remarquait que si « rien ne permet, en droit, de
privilégier telle ou telle “taille” d’entreprise […], de nombreuses
circulaires ministérielles incitent à favoriser l’accès des PME aux
marchés publics ». Depuis, les règles régissant cet accès ont été
simplifiées, car les marchés publics représentent pour les PME un enjeu
économique important et qu’elles étaient parfois victimes de
discrimination.

Vous pouvez consulter les appels d’offres sur le site Internet d’Oséo
(www.oseo.fr), acteur incontournable de l’aide apportée aux PME dans
la passation des marchés publics, dans le Journal officiel de L’Union
européenne (eur-lex.europa.eu) ou dans les journaux habilités à
recevoir des annonces légales (par exemple Le Moniteur des travaux
publics). Vous pouvez également vous abonner aux alertes du Bulletin
officiel des annonces des marchés publics (boamp.fr), ou, mieux encore
mais payant, avoir recours aux services de sociétés spécialisées dans
l’assistance en marchés publics comme MPFrance (www.mpfrance.fr).

L’importance de la distribution de ses produits ne doit pas non plus


être négligée, et toutes les pistes sont à envisager. Il existe en effet de
nombreux réseaux de distribution ayant chacun ses avantages et
inconvénients que l’entrepreneur doit bien connaître afin de pouvoir
faire un choix informé. « La réussite avec un canal [de distribution] est
largement conditionnée par la nécessité que doit avoir l’entrepreneur
de bien connaître le fonctionnement interne. C’est en particulier le cas
lorsqu’il désire s’adresser à une grande surface ou à un réseau de
franchises », écrit Michel Badoc27 pour qui Internet constitue « un outil
privilégié pour améliorer l’action commerciale de l’entrepreneur en
relation avec les clients particuliers ou entreprises, les prescripteurs, les
canaux de distribution ».

Si certains, comme Whithings (voir partie III, chapitre 1, L’innovation, la


prise de risques), s’affranchissent des réseaux classiques en vendant
exclusivement sur Internet, tout le monde ne peut pas se le permettre.
A contrario, l’entreprise Sineo a bénéficié d’une amélioration de la
distribution de ses produits de nettoyage de voiture 100 %
biodégradables à double titre : « Cela a vraiment pris une dimension
importante en 2009, et cela devrait être encore plus le cas en 2010
avec leur distribution dans les magasins Auchan, les enseignes Norauto
et certaines stations-service comme BP, etc. Cela a vraiment été un
élément accélérateur de notre développement », explique Olivier
Desurmont, son créateur et directeur général. D’autant plus qu’en
grignotant des parts de marché, la marque a pu profiter de volumes
plus importants pour devenir plus compétitive. « Nous avons fait un
gros effort sur le prix et nous avons une gamme de produits vraiment
compétitifs aujourd’hui. Au début, nous étions embêtés parce que les
matières premières avaient des coûts astronomiques, mais c’est
beaucoup plus facile quand on achète cent mille lingettes que quand
on les achète par paquets de cent, comme c’était le cas il y a trois
ans. »

Il peut aussi être utile de se pencher sur la prospection ou de chercher


à optimiser l’efficacité de sa force de vente. « Analysez la rentabilité de
votre équipe de vente, son coût par rapport au chiffre d’affaires
généré ; optimisez les visites en fonction du potentiel de chaque client ;
redéfinissez, si nécessaire, les territoires de vente et n’hésitez pas à
modifier les rémunérations pour les rendre plus motivantes », conseille
Alain Goetzmann, le président de Delta Inter Management (cabinet de
conseils aux dirigeants de PME), sur son blog28.
Bertrand Dietz : « Une force de vente, c’est une troupe exposée au feu. »

Ancien cadre dirigeant, responsable de centres de profit dans l'univers des médias,
Bertrand Dietz est consultant et enseigne à Euromed-Management la communication
professionnelle et le management commercial.

Quelle est l’importance de l’organisation commerciale dans une petite entreprise ?


De toutes les fonctions de l’entreprise, c’est celle qui demande à être gérée le plus
étroitement. Dans les autres domaines, comptabilité ou finances par exemple, la
technicité du métier et des tâches à réaliser permet au manager de suivre ses
collaborateurs de façon relativement souple tant que les procédures sont respectées.
C’est complètement différent pour les commerciaux, qui doivent être encadrés de
façon beaucoup plus étroite. D’abord parce que c’est une fonction où les
collaborateurs sont souvent confrontés à l’échec. Ils sont exposés quotidiennement à
la concurrence et aux refus des clients. S’ils ne sont pas encadrés et soutenus par leur
supérieur, ils perdent très vite en motivation. Une force de vente, c’est une troupe
exposée au feu : si elle ne voit pas son chef à ses côtés, elle risque d’être saisie par le
découragement quand les conditions sont trop dures. C’est également pour cette
raison que les forces de vente sont très hiérarchisées, chaque responsable de secteur,
région, zone reportant régulièrement à son n + 1.

Comment les commerciaux doivent-ils être managés ?


Dans une grande entreprise, le manager commercial doit être très présent et partager
son temps entre les réunions avec les autres managers commerciaux et sa propre
hiérarchie, les moments où il réunit l’ensemble de son équipe et ceux où il tourne sur
le terrain avec chacun d’eux, pendant une demi-journée ou une journée entière. C’est
ce qu’on appelle la « journée duo » ou la visite « double commande », moment
privilégié d’échange où le manager peut apporter beaucoup à son collaborateur. Le
n + 1 doit être à l’écoute et intervenir le moins possible lors de la visite car les clients
n’apprécient pas toujours sa présence s’il est trop interventionniste. Intelligemment
pratiquée, la visite duo est un levier puissant d’amélioration de la performance. Elle
doit être conclue par un bilan et l’identification de points d’amélioration précis,
portant par exemple sur la qualité de la relation commerciale ou l’utilisation du
matériel de visite (argumentaires, échantillons, documentation…) ainsi que sur les
chiffres de vente, qui font par ailleurs l’objet d’objectifs précis.

Quels sont ces objectifs de vente ?


Ce sont des objectifs chiffrés extrêmement précis, détaillés par produits et
éventuellement par segments de marchés. Ils sont exprimés en chiffre d’affaires ou en
volume et peuvent également être qualitatifs, sachant que même un objectif
qualitatif doit être précisément chiffré pour éviter toute appréciation arbitraire. Ainsi,
l’augmentation de la satisfaction du client peut parfaitement entrer dans la
constitution d’un objectif commercial, mais elle doit être formulée précisément. Par
exemple : on peut passer d’un taux de 65 % de clients satisfaits et très satisfaits par
la qualité de la relation commerciale à un taux de 75 %, ce qui suppose évidemment
de mesurer régulièrement l’évolution de ce taux à l’occasion d’enquêtes de
satisfaction.
Comme tout objectif, un objectif commercial doit toujours être SMART, c'est-à-dire
spécifique, mesurable, atteignable, réaliste et « timé » ou temporisé. La période de
calcul idéale est sans doute le semestre, avec remise à zéro des compteurs à la fin de
la période : cela permet de lisser les variations mensuelles tout en évitant que les
résultats de l’année entière ne soient pénalisés par un début d’année difficile par
exemple. Les primes versées doivent au minimum représenter un treizième mois, deux
éventuellement, soit un par semestre en cas d’atteinte ou de dépassement des
objectifs. Il faut également distinguer ce qui est primes sur objectifs d’une part, et ce
qui est commissions sur les ventes d’autre part.

Faut-il établir un plan d’action commerciale ?


Oui, même dans les petites structures il est nécessaire d’établir une fois par an un
plan d’action commerciale précis qui va servir de boussole tout au long de l’année.
C’est sur la base de celui-ci que seront fixés les objectifs. Pour qu’il soit validé au mois
de décembre, il faut commencer à travailler sur sa préparation dès le retour des
vacances d’été et non pas à la fin de l’année, ce qui est le risque dans une petite
entreprise qui n’a pas des « process » clairement établis. Dans la grande majorité des
petites entreprises, il n’y a pas de plan marketing, à trois ans en général. Dans les
grandes entreprises, le plan d’action commerciale (ou PAC) s’inscrit en cohérence
avec le plan marketing et se situe à son aval. Dans les petites structures, le PAC fait
souvent office de plan marketing.
Le plan d’action commerciale part toujours de l’analyse de l’existant, d’un diagnostic
de situation. On analyse les chiffres de vente de l’exercice en cours et on détermine
les résultats de l’année par extrapolation sur les deux derniers mois, puisque ce travail
de préparation se fait en général courant octobre. Il existe différentes méthodes
(douze mois glissants, règles de trois…), mais ce qui est important est d’en retenir
une et de s’y tenir. Il faut tout le temps utiliser la même pour obtenir des évaluations
sinon fiables, du moins cohérentes. Il faut analyser ce qui a marché ou pas, ce qu’on
appelle l’analyse des facteurs clés de succès, en anglais KSF (Key Success Factors).
Ensuite, il faut valider les grands axes stratégiques de la politique, par exemple
fidéliser les clients ou en attirer de nouveaux. Et puis on fixe les objectifs et les cibles
précises, et enfin on élabore le plan d’action commerciale dans lequel on indique les
clients qu’on va aller chercher : combien de nouveaux clients, quelles actions de
fidélisation on va mettre en œuvre, etc. On fixe des objectifs de vente mois par mois,
produit par produit, pour toute l’année. Ces chiffres serviront à construire les
objectifs de chaque commercial.

Comment choisit-on plutôt de fidéliser ou d’attirer de nouveaux clients ?


Les logiques de conquête et de fidélisation sont les deux axes qui organisent tout
l’action commerciale. C’est un arbitrage qu’un manager doit effectuer en
permanence : définir si les commerciaux doivent se consacrer plus à la conquête ou
plus à la fidélisation. Pour réaliser cet arbitrage, il faut analyser le potentiel du client,
ce qu’il peut rapporter, sa surface d’investissement, le chiffre d’affaires qu’il réalise
avec la concurrence, et le confronter à la pénétration actuelle. On peut distinguer
quatre types de clients :
• fort potentiel et forte pénétration, il faut les maintenir et développer, les fidéliser
donc investir un petit peu ;
• fort potentiel et faible pénétration, c’est sur eux que doivent porter tous les efforts
de conquête : invitation à des salons ou expos, éventuellement remise d’échantillons
gratuits ;
• faible potentiel et forte pénétration, il ne faut pas gaspiller et juste faire en sorte de
ne pas les perdre ;
• faible potentiel et faible pénétration, ce n’est pas la peine de perdre son temps et il
n’est pas question de faire des visites commerciales. Cette typologie de client peut
être traitée, par exemple, par des téléopérateurs ou des assistants commerciaux.

La fonction commerciale demande-t-elle des compétences particulières ?


On peut être plus ou moins doué pour la vente, mais l’essentiel c’est l’efficacité des
procédures, des moyens de développer ses collaborateurs. Les gens hyper bons, c’est
très rare. Il y a peut-être 15 % des vendeurs qui sont très bons, 20 % qui ne sont pas
bons, dont il faut se séparer, mais la grande majorité, 65 %, ce sont des gens pleins
de bonne volonté qui peuvent très bien faire pour autant qu’on leur donne les
méthodes et le système de management qui leur permettent de donner le maximum
d’eux-mêmes. Par ailleurs, c’est une erreur de croire que les bons vendeurs sont ceux
qui ont la tchatche. Les bonimenteurs, ce sont des bons vendeurs pour vendre des
épluche-légumes sur des marchés, mais un vrai vendeur fait parler son client,
l’écoute, analyse ses besoins pour pouvoir lui proposer une offre adaptée.

Comment remotiver les vendeurs qui n’arrivent pas à vendre ?


Un des moyens de remotiver un vendeur, d’éviter qu’il ne se décourage, c’est de lui
expliquer comment fonctionne le marché en lui montrant ce qu’on appelle
l’entonnoir de la vente : qu’il y a un pourcentage de perte parfois important pour
transformer un prospect en nouveau client, puis pour provoquer un réachat et
transformer le nouveau client en client actif, puis enfin en client fidèle. Le travail du
vendeur consiste précisément à faire en sorte que le pourcentage de transformation
vers le niveau suivant soit le plus élevé possible. Cela dépend bien sûr des secteurs
d’activité et des typologies de clientèle, mais c’est un bon moyen de montrer de
façon objective que les difficultés du vendeur sont inhérentes à la fonction
commerciale et que c’est un métier dur, mais pour tout le monde.

Quels réseaux de distribution privilégier ? Internet ?


En général, les petites entreprises vont très souvent faire du B to B, elles ne vont pas
vendre directement à l’utilisateur final et elles s’appuient sur un réseau de
distribution. Autrefois, on avait beaucoup recours à des VRP multicartes. L’idée était
de travailler avec des commerciaux indépendants qui avaient leur carnet d’adresses,
leur réseau de distribution […]. Cela permettait de se doter sans aucun coût fixe
d’une force de vente qui pouvait couvrir l’intégralité du territoire moyennant en gros
6 % du chiffre d’affaires. Le désavantage : cela coûte assez cher et si les produits se
vendent bien, c’est parfois plus intéressant d’avoir une force de vente salariée
intégrée. En général, on estime que le coût complet de la force de vente, y compris
les frais de déplacement, les voitures de fonction, etc., ne doit pas dépasser 5 % du
chiffre d’affaires total de l’entreprise. C’est évidemment une moyenne, qui peut être
différente selon le secteur de l’activité.
Une solution, pour démarrer, consiste à s’adresser à des réseaux spécialisés. Un bon
moyen de les identifier est de se rendre sur des salons professionnels. Internet est
devenu incontournable si on travaille avec un prestataire technique extérieur, car un
site marchand demande des éléments de sécurité assez importants. Mieux vaut
s’adresser à un hébergeur qui va l’amortir sur un grand nombre de clients. Ce qui est
compliqué, c’est la logistique de traitement des envois. Il faut là aussi se poser la
question de ce que l’on sous-traite. C’est le nerf de la guerre. La rapidité avec laquelle
le client est servi, la souplesse et la qualité de la livraison, c’est évidemment très
important. Dès lors que l’on a mis en place une distribution sur Internet, il ne faut pas
hésiter à faire référencer ou interfacer son site avec des portails ou sites comme eBay,
Amazon ou Pixmania, qui vont générer du trafic avec une sécurisation des paiements.
Là aussi, aucun mode de distribution n’est exclusif des autres : une boutique de
matériel de cuisine est ainsi en mesure de vendre en magasin, sur son propre site
Web et dans l’espace marchand d’amazon.com.

La gestion de l’information

La façon dont vous vous informez sur la concurrence, sur votre


environnement, les informations que vous êtes capable de récupérer
sont importantes pour déterminer votre approche commerciale,
notamment la manière dont vous allez communiquer et donc vos
performances.

L’image véhiculée par la société a en effet un impact non négligeable


sur son attractivité auprès de ses clients mais aussi de ses salariés,
actuels ou potentiels.

j La récupération d’informations

« Si peu de chefs d’entreprise passent du rêve à la réalité, c’est


probablement parce que certains sont persuadés d’être correctement
informés », estime Robert Papin29. « Les autres hésitent à mettre en
œuvre des dispositifs de veille coûteux dont ils pourraient difficilement
mesurer l’efficacité par des critères quantitatifs et objectifs. »
Or les dirigeants de petites entreprises souffrent d’un manque
chronique d’informations, d’après les auteurs de Management :
stratégie et organisation30 : « Parce qu’il ne possède pas connaissance
des sources de données, parce qu’il n’a pas les moyens d’acquérir
systématiquement une vaste information, parce que ses connaissances
en informatique sont trop mineures, le patron d’une petite entreprise
se trouve en état permanent de myopie face à l’environnement,
particulièrement en ce qui concerne les dimensions du marketing, qu’il
s’agisse du choix des nouveaux débouchés ou de la sélection d’un
nouveau segment de clientèle par exemple. » Selon eux, il résulte de
cette pauvreté informationnelle des choix incertains et parfois peu
cohérents.

Il paraît donc important de faire des efforts en la matière afin de


pouvoir ensuite déterminer une stratégie commerciale qui tienne la
route.
Robert Papin31 invite ses lecteurs à développer leur capacité à
s’informer, notamment auprès de leurs collaborateurs qui peuvent
constituer une « source de renseignements inexploitée ». Cela ne
l’empêche pas, bien sûr, de les inciter à exploiter la documentation qui
est à leur disposition. Mais avec discernement, au risque de se
retrouver noyé par les milliers de revues techniques et les banques de
données accessibles par Internet : « Servez-vous en priorité des sources
d’information qui vous permettront de mieux anticiper l’évolution des
besoins dans notre société », conseille-t-il. « Intéressez-vous à
l’évolution des nouvelles technologies susceptibles de vous concerner.
Lisez les études consacrées aux secteurs porteurs d’avenir et consultez
si possible les spécialistes qui les ont rédigées. » Et pour des recherches
longues, il préconise d’avoir recours à un spécialiste ou à un expert-
conseil.

La veille ne doit pas forcément se résumer à Internet, qui constitue une


première piste mais peut s’avérer long et peu efficace d’après Angela
Portella32 : « Nous vous conseillons de bien cibler vos requêtes en
définissant des mots clés, de vous abonner à des alertes Google et à
des newsletters de sites de journaux comme ceux du Figaro, de La
Tribune, des Echos, qui offrent souvent d’intéressantes pistes sur
l’entrepreneuriat. »

Les foires et salons professionnels peuvent également procurer de


précieuses informations. Nous ne saurions trop vous encourager à
visiter le Salon des entrepreneurs (www.salondesentrepreneurs.com)
ou le Salon des micro-entreprises (www.salonmicroentreprises.com). Le
site de la fédération des foires et salons de France
(www.foiresalon.com) peut également vous être utile.
Là aussi, Robert Papin conseille de se plonger dans des milieux
différents : « Choisissez de préférence des salons de transfert de
technologies, de franchise ou encore de manifestations organisées
dans des domaines considérés comme porteurs d’avenir, préconise-t-il.
Consultez régulièrement les spécialistes qui travaillent au sein des
chambres de commerce ou bien ceux qui, dans les organismes
professionnels, animent les centres techniques de recherche
collective. » D’autres sources sont susceptibles d’informer les dirigeants
comme l’Insee, Oseo, l’Inpi, le CNRS ou les Brevets d’invention. À cela,
il convient d’ajouter des sources « informelles » comme les missions
d’études à l’étranger, les concurrents, les colloques et congrès. Robert
Papin en appelle même à la construction d’un système d’intelligence
économique permettant de bien connaître les ressources et projets
concurrents actuels et potentiels, de ses fournisseurs et clients.

Il peut également être intéressant de s’informer directement sur le


secteur d’activité (interlocuteurs ou clientèle différents), le type de
services, etc., par téléphone ou en se rendant dans des magasins.
[MERCI ODIL !]
Cet outil d’implantation locale en ligne fournit gratuitement les premiers éléments d'une
étude de marché.
Proposé par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) aux
créateurs d'entreprises pour les aider dans la préparation de leur projet, Odil (Outil d'aide
au diagnostic d'implantation locale) peut également servir aux entrepreneurs dans le
cadre d’une étude de marché. Simple d’utilisation, opérationnel et aisément accessible
(creation-entreprise.insee.fr), il permet effectivement :
• de sélectionner une ou plusieurs activités et les produits associés dans les secteurs du
commerce, de l'artisanat et des services aux particuliers ;
• de visualiser la zone géographique d'implantation et ses principales caractéristiques
sociodémographiques grâce à une cartographie interactive ;
• de lire et imprimer un dossier de résultats relatifs à la clientèle potentielle et aux
établissements de même activité de la zone d'implantation.
Cela donne la possibilité de déterminer la concurrence existante, la clientèle probable, et
d’estimer le potentiel de consommation selon l’offre de produits et/ou de services
envisagée.
Depuis le 19 octobre 2009, Odil intègre les résultats du recensement de la population de
2006. Odil couvre également les départements d'outre-mer et le créateur peut désormais
accéder aux données au niveau de l'arrondissement municipal pour Paris, Lyon et
Marseille.
Sources : Insee, Développement 25, APCE.

j La communication

« Communiquer est aujourd'hui une obligation, c'est aussi un


investissement stratégique qui n'est pas là pour vous faire plaisir, alors
autant le faire avec sens, intelligence et efficacité », affirme Robert
Haehnel dans son ouvrage Je Communique33. Il y relève un étrange
paradoxe, comme sur son blog (haehnel.blogs.com) : toutes les
entreprises quelle que soit leur taille investissent de plus en plus dans la
communication, domaine complexe. Et pourtant, « dans une écrasante
majorité des cas, contrairement à ce qui se passe pour les autres
fonctions de l’entreprise, le décideur se juge compétent en
communication, alors que lorsqu’il s’agit de finance, de production, du
commercial, d’informatique… il consulte, prend des avis, s’entoure
d’experts, chiffre, compare, évalue, contrôle ». Et même si le dirigeant
seul prend les décisions, conçoit messages et actions, il n’est pas pour
autant satisfait du résultat obtenu…
C’est dommage, car la communication joue un rôle fondamental :
grâce à une campagne percutante, le public se souvient plus facilement
du nom d’une entreprise, d’un produit ou d’un service.
Indéniablement, c’est un levier de fidélisation et de création de valeur.
Publicité, relations publiques, mailings, parrainage(s), communiqués et
dossiers de presse, opérations de promotion, site(s) Internet, salons ou
événements, réseaux… Il n’est tout de même pas simple de définir le
dispositif média optimal ou de s’assurer de la pertinence de son
message, surtout avec un budget limité qui explique sans doute que la
plupart des entreprises n’ont pas de chargé de communication interne.
« Pour des raisons de moyens le plus souvent, il est difficile de recruter
un employé uniquement pour s’occuper de la communication. Cela
reste quand même un choix stratégique important dont les sociétés
devraient se préoccuper. L’un des compromis, souvent judicieux, est de
donner cette tâche aux personnes occupant des fonctions marketing
dans l’entreprise », explique David Bouvier dans La Communication des
PME-PMI34. Pour lui, « l’apprentissage et la connaissance des outils de
communication sont le meilleur chemin pour devenir capable de mettre
en place une communication qui touchera la cible désirée, en
respectant les budgets et les délais, et en répondant aux objectifs
assignés ».

Il apparaît non seulement logique, mais indispensable de s’attacher les


services de spécialistes. « Le processus d’élaboration d’une stratégie de
communication est avant tout l’œuvre de professionnels disposant
d’une méthode adéquate », confirme Michel Badoc35 qui estime que
malgré des moyens réduits, la petite entreprise a la possibilité de
mettre en place une communication efficace. « La réussite d’une
campagne de communication repose largement sur la confiance entre
l’entreprise et son agence. »

Mais cela ne veut pas dire que l’on ne puisse pas faire des choses par
soi-même. Pour Jean-Philippe Tixier36, il faut commencer par agir au
niveau local. « On croit trop souvent que, parce que l’on a pignon sur
rue, on est systématiquement remarqué par tout le monde. » Selon lui,
il ne faut pas négliger la publicité de proximité, les emplacements, les
messages et leur cohérence, leur forme. Il conseille aussi de surveiller
l’impact de toute campagne publicitaire, et de rectifier le tir le cas
échéant. Ses conseils ont beau être frappés au coin du bon sens, il ne
faut pas oublier de se faire référencer dans les Pages jaunes et sur
Internet. Il est aussi très sensible à l’accueil réservé aux clients – l’accueil
téléphonique ; l’accueil sur un stand d’exposition ; l’accueil statistique
extérieur à l’atelier, au magasin ; l’accueil statistique intérieur ; l’accueil
par les collaborateurs – car il peut constituer un levier de fidélisation (il
préconise de créer des visites d’ateliers ou de magasins) ou se révéler
nuisible. « Vous devez soigner votre image en permanence car cette
image est fragile », explique-t-il avant d’inviter à changer souvent ses
messages. « Affichez-vous avec originalité », conseille-t-il encore. Cela
permet en effet de sortir du lot, comme l’illustre l’exemple d’Invicta ci-
après.

[INVICTA S’OFFRE UNE NOTORIÉTÉ]


Le petit fabricant de poêles à bois ardennais a augmenté son tirage grâce à une
campagne de publicité nationale à base d’autodérision.
Que ce soit sur des affiches, dans le métro parisien et la presse, ou à la télévision, vous
avez sans doute vu des publicités pour Invicta, petite entreprise des Ardennes qui
fabrique des poêles à bois, et vous n’y êtes sans doute pas resté insensible. Vous savez,
les slogans « Toujours de bons poêles », « Des poêles plein la tête » ou « Mes poêles les
séduisent », associés à la bobine souriante de son PDG, Jean-Pierre Dupire, ses
importantes dreadlocks grisonnantes, sa barbe abondante et ses grosses lunettes
teintées…
« C’est une campagne avec un objectif en termes de notoriété et pas de produit, le but
étant de travailler sur l’image de la marque afin de la faire connaître », explique Audrey
Thuillier, chargée de projet à l’agence de communication Scripto, qui en est responsable.
« C’est décalé, avec un ton un peu provocateur parfois, pour que cette campagne
émerge parmi la multitude de publicités diffusées. »
Mais il n’en reste pas moins que l’idée de mettre en scène le PDG d’Invicta provient de sa
personnalité. Héritier d’une entreprise familiale d’origine ch’ti, élevé à la « bistouille » et
au football, c’est un personnage authentique, proche de ses deux cent quatre-vingts
collaborateurs et qui s’érige en champion de la préservation de l’emploi en Ardennes.
« M. Dupire est réellement comme ça, c’est lui qui représente le mieux la marque,
poursuit Audrey Thuillier. C’est à la fois un homme de convictions et un homme
d’affaires au look atypique, qui change de l’image classique du PDG. »
Cette campagne, qui vient en complément d’autres plus classiques, puisque Invicta
sponsorise de nombreuses équipes sportives par exemple, a en tout cas fait mouche. La
société a reçu de très nombreux appels et la notoriété de la marque a fait un bond.
« Depuis trois ans que nous travaillons avec Invicta, il y a des retombées importantes,
confirme Audrey Thuillier. La marque émerge auprès d’un public duquel elle n’était pas
connue. Cela se ressent dans la demande des consommateurs mais aussi sur Internet,
avec un vrai “buzz” autour de la campagne, notamment dans le métro. »
Même si, d’après Jérémy Bouchon, responsable Marketing d’Invicta, l’augmentation des
ventes due à ces campagnes de publicité est difficile à mesurer car « depuis plusieurs
années, l’activité chauffage Invicta connaît une forte croissance liée à un contexte
favorable à l’énergie bois et à un fort investissement en recherche et développement, la
création de nouveaux designs et une communication grand public », il n’en reste pas
moins que la société a « effectivement reçu plus d’appels téléphoniques de particuliers
mais aussi de journalistes ou de régies publicitaires pendant les périodes de campagne. La
fréquentation du site Internet est un bon indicateur également, celle-ci doublant pendant
les périodes de campagne, jusqu’à plus de cent mille visiteurs uniques par mois. »

20. Op. cit.


21. Guide pratique du marketing pour les créateurs d'entreprises, op. cit.
22. Ibid.
23. Claude Triquère, Le Grand Livre de la création d'entreprise, Levallois-Perret, Studyrama,
2009.
24. Georges Lavalette, Maria Niculescu, Les Stratégies de croissance, Paris, Éditions
d'Organisation, 1999.
25. Piloter et réussir l’innovation en entreprise, op. cit.
26. 10 points clés pour réussir, op. cit.
27. Guide pratique du marketing pour les créateurs d'entreprises, op. cit.
28. www.deltaintermanagement.com/blog/
29. L’Art de diriger, vol. 1, op. cit.
30. Op. cit.
31. L’Art de diriger, vol. 1, op. cit.
32. Angela Portella, Trouver une idée de création d’entreprise, Levallois-Perret, Studyrama,
2009.
33. Robert Haehnel, Je communique : prenez les décisions qui changeront la valeur de la
communication de votre entreprise, Paris, Gualino, 2006.
34. David Bouvier, La Communication des PME-PMI : conseils pratiques pour l’efficacité au
quotidien, Chambéry, Génie des glaciers, 2004.
35. Guide pratique du marketing pour les créateurs d’entreprises, op. cit.
36. 10 points clés pour réussir, op. cit.
3- LA GESTION FINANCIÈRE
Comme le soulignent les auteurs de Management : stratégie et
organisation37, les chefs d’entreprise considèrent la gestion comme
secondaire et la limitent à la comptabilité, qu’ils sous-traitent à un
expert-comptable afin de respecter les obligations légales.

Or celle-ci est primordiale pour la bonne marche de l’entreprise ainsi


que pour un développement harmonieux, rendu possible par le
financement assuré grâce à un pilotage digne de ce nom et parfois à
un business plan.

La comptabilité
Toute entreprise immatriculée au registre du commerce et des sociétés
et soumise à un régime réel d'imposition doit en effet tenir une
comptabilité normale ou simplifiée. En cas de manquement, ou lorsque
la comptabilité n'a pas été établie correctement, l'entreprise s'expose,
entre autres, à des sanctions de la part du fisc.

Et même si elle demande beaucoup de rigueur, quelques prérequis et


du temps, la comptabilité permet cependant à un dirigeant d'entreprise
de connaître chaque entrée et sortie d'argent et donc de prendre de
bonnes décisions.

Pour gérer ce poste, il existe plusieurs solutions. La première est de


tenir vous-même la comptabilité. Cela permet de faire des économies
mais demande du temps et un minimum de compétences. Le cas
échéant, des logiciels adaptés, dont certains sont gratuits et d’autres
disponibles en ligne, peuvent s’avérer utiles, tout comme des
formations en la matière.
Vous pouvez aussi confier votre comptabilité, ou du moins la saisie
comptable, à un salarié, qu’il soit comptable ou non.
Vous avez également la possibilité d’externaliser tout ou partie de votre
comptabilité, ce qui permet à l'entreprise, notamment aux plus petites
d’entre elles, de se concentrer pleinement sur leur cœur de métier. Les
serveurs reliant les entreprises à leurs cabinets d'experts-comptables
par Internet facilitent la saisie des documents courants et permettent
de faire des économies. « On n’a jamais intérêt à complètement
externaliser sa comptabilité, sauf quand l’on est une très grosse
entreprise », estime cependant Henry Dorbes, créateur d’Acting
Finances (www.acting-finances.com), spécialiste de la direction
financière pour les PME et les filiales de groupes. « On peut se faire
aider progressivement, par son conjoint dans un premier temps, puis
éventuellement par un comptable à mi-temps ou à plein-temps en plus
de l’expert-comptable, mais il est indispensable pour un entrepreneur
digne de ce nom de s’intéresser de près à la comptabilité. Ce n’est pas
quelque chose que l’on peut confier à quelqu’un d’autre. »

Quelle que soit la solution retenue, il est fortement conseillé de faire


valider vos comptes par un expert-comptable afin d'éviter les erreurs. Il
sera en outre habilité à analyser vos comptes et à vous conseiller sur la
bonne gestion de l'entreprise. « La tenue ou la vérification des
comptes, ce n'est pas tout. Ce qui est important, c'est l'analyse que
l'on peut en faire et les enseignements que l'on peut en tirer. C'est là
que le rôle de l'expert-comptable, en tant que conseil, prend toute son
importance, car chacun sait que les jeunes entreprises sont
particulièrement exposées au risque de défaillance », insiste William
Nahum, ancien président du Conseil supérieur de l'ordre des experts-
comptables, dans un entretien réalisé par Laurence Piganeau pour
l’APCE38, qui permet en outre de lancer un appel d’offres en ligne
gratuitement.
Pour lui, la formation éclectique des experts-comptables leur permet
d'être des conseillers privilégiés des chefs d'entreprise. « L'expert-
comptable leur apporte la sécurité dont elles ont besoin sur les plans
administratif, comptable, financier, fiscal, juridique et social. À titre
d'exemple, l'expert-comptable peut mettre en place les tableaux de
bord adaptés à l'activité, qui permettront de déceler les risques de
dérapage éventuel avant qu'il ne soit trop tard. Il peut également
conseiller l'entrepreneur sur la gestion de sa trésorerie ou sur des choix
de gestion, comme le régime fiscal le mieux adapté à sa situation. »

Le recours à un expert-comptable est d’ailleurs obligatoire en cas


d'adhésion à une association agréée ou à un centre de gestion agréé
(CGA), possible pour toute entreprise relevant de l'impôt sur le revenu
ou de l'impôt sur les sociétés. Ces associations ne tiennent pas la
comptabilité de leurs adhérents, mais elles ont auprès des petites
entreprises une mission d'assistance en matière de gestion (fourniture
chaque année d'un dossier de gestion caractérisant la situation
économique et financière de l'entreprise) et de fiscalité (établissement
de déclarations fiscales).
Elles jouent également un rôle de surveillance et de prévention des
difficultés de l'entreprise en analysant des informations économiques,
comptables et financières. En contrepartie de l'adhésion à un CGA ou à
une association agréée, l'entreprise bénéficie d'un certain nombre
d'avantages fiscaux : non-majoration du bénéfice imposable ;
déduction d'une part plus importante du salaire versé au conjoint ;
réduction d'impôt pour frais de comptabilité et d'adhésion.
[CER FRANCE]
Le premier réseau associatif de conseils et d'expertise comptable en France a pour
vocation d’accompagner les entrepreneurs.
CER France est au service de trois cent vingt mille clients, principalement des TPE de tous
secteurs d'activité : agriculture, artisanat, commerce, services, professions libérales, PME.
En phase de création, de développement ou de transmission d'entreprise, les onze mille
conseillers et experts CER France aux compétences pluridisciplinaires (juristes, consultants,
experts-comptables, etc.) appuient et guident le chef d'entreprise dans toutes ses
fonctions managériales, administratives, commerciales, juridiques, stratégiques… en
intégrant constamment la dimension humaine et le projet personnel de l'entrepreneur.

Avec ses sept cents agences implantées sur l'ensemble du territoire, CER France offre une
forte proximité géographique et culturelle aux acteurs économiques locaux. Soixante-dix-
sept entités départementales ou régionales constituent un réseau de type associatif,
administré par des clients élus et fédéré au plan national par le Conseil national du
réseau CER France. Ce fonctionnement de type mutualiste se différencie du mode libéral
notamment par une affectation prioritaire des résultats à la recherche et au
développement, du fait de l'absence de rémunérations de dividendes ou d'achats de
clientèle. Cette forme juridique garantit aussi la pérennité de l'entreprise associative CER
France, qui ne peut être rachetable ou « opéable ».
Source : CER France.

Le « process » client
Le recouvrement joue un rôle important dans la vie de l’entreprise : les
impayés ou simplement les retards de paiement des factures peuvent
perturber la gestion de l’entreprise, freiner sa croissance en étant à
l'origine de difficultés de trésorerie, voire de défaillances. Une faillite
sur quatre est en effet due à des retards de paiement. C'est pourquoi,
comme l’explique Jacqueline Socquet-Clerc Lafont39, le chef
d'entreprise doit « s’assurer de la fluidité du compte client. Celui-ci
devrait être "épluché" tous les matins. En effet, une créance de plus de
six mois est quasiment irrécouvrable ».

L’entrepreneur doit toujours garder à l’esprit qu’en cas d’impayé, il


devra vendre l'équivalent de dix fois cet impayé pour le compenser si
son résultat net (ou taux de marge bénéficiaire) représente 10 % de
son chiffre d'affaires, vingt fois s’il est de 5 %…

À
À la perte de chiffre d’affaires générée par une créance impayée,
s’ajoutent les frais et le temps liés à son recouvrement, et peut-être la
perte d’un client, synonyme de manque à gagner futur. Afin de
garantir la poursuite de bonnes relations commerciales avec les clients
retardataires, il faut donc prendre en compte l'importance et la
fréquence des relations commerciales que vous entretenez avec eux
ainsi que le montant des sommes dues, pour mieux adapter les actions
à mettre en œuvre.

Mais une démarche préventive s’impose aussi pour réduire les risques
d’impayés. Développer sa clientèle est indispensable, mais bien
connaître ses futurs clients en se renseignant sur leur situation
financière permet d'éviter nombre de désagréments.
Il existe en effet des sources d'information pour repérer les mauvais
payeurs. « Vous pouvez commander au greffe du tribunal de
commerce les états privilégiés qui sont renseignés tous les un à trois
mois par les entreprises », conseille Thierry Gingembre, président de la
société Saint-Louis recouvrement et vice-président du Syndicat national
des cabinets de recouvrement de créances et de renseignements
commerciaux, dans un article du Journal du Net40 signé Agnès le
Gonidec. « Vous y apprendrez si les salaires, l'Urssaf ou encore les
caisses de retraite ont été payés ou non. » Vous pouvez aussi consulter
le bilan des entreprises, publié chaque année, votre banquier, le bureau
des hypothèques, ou encore faire appel aux services d’agences de
renseignements commerciaux.

Connaissant l'état de solvabilité de vos clients ou « prospects », vous


pourrez adopter la stratégie adaptée, par exemple leur consentir un
délai de paiement supplémentaire, fixer un encours client à ne pas
dépasser, demander un acompte ou refuser de travailler avec un client
potentiel.
Quoi qu’il advienne, mettez en place un système de « relance-client ».
Relancez prioritairement ceux dont vous aurez déterminé que ce sont
de mauvais payeurs et essayez de le faire avant l'échéance de la
créance afin que les délais de paiement soient respectés. Plus vous
tardez à le faire, moins vous aurez de chance de récupérer votre dû.
C'est pourquoi vous devrez confier rapidement le dossier soit au service
ou à la personne dédiée au contentieux au sein de votre entreprise (s’il
y en a), soit à un avocat, un huissier ou une société de recouvrement le
cas échéant.

Il existe d’autres manières de minimiser l’impact des retards de


paiement et des impayés :
• les cabinets de conseils spécialisés en crédit management, qui aident
à évaluer et maîtriser le risque client ;
• l’assurance-crédit, qui garantit les entreprises contre les défauts de
paiement ;
• l'escompte bancaire, qui consiste à céder à une banque un effet de
commerce sur un de ses clients en échange d'une avance de
trésorerie ;
• l’affacturage, qui permet aux entreprises de financer leur poste
clients en le transférant à un tiers dénommé « factor » qui se charge
d’en opérer le recouvrement.

Un autre moyen de réduire les risques d’impayés consiste à mettre en


place une gestion rigoureuse de tout le processus client, depuis le
premier contact jusqu’au recouvrement de la facture, en passant par le
traitement de la commande.
Il faut notamment bien maîtriser son cycle de facturation : ne remettez
pas à plus tard cette démarche administrative souvent négligée par les
petites entreprises, créant ainsi des « crédits invisibles », et émettez les
factures au fur et à mesure que les dépenses sont engagées. Veillez
également à ce qu’elles soient correctement rédigées, une facture non-
conforme entraînant parfois un retard de paiement. De même, il faut
toujours prévoir des conditions générales de vente claires afin de
pouvoir éviter un litige, synonyme de blocage du règlement par le
client.

L’analyse financière
« Une entreprise a tendance à croître. L’augmentation du chiffre
d’affaires implique une augmentation des moyens de production, de la
surface des locaux, des aménagements. Bref, il faut investir. Et pour
investir, il faut du financement », estime Claude Triquère41. Ceci étant
dit, on ne peut pas avoir recours au financement sans analyse
financière, seule à même de déterminer la nature et le montant des
fonds à rechercher, mais aussi indispensable pour optimiser la
trésorerie afin de minimiser son utilisation. On peut aussi se poser la
question de savoir si un business plan est nécessaire pour trouver un
financement optimal.

Pour Robert Papin42, il faut réaliser un bilan comptable de son


entreprise avant de choisir une stratégie de développement. « Un tel
bilan est indispensable car c’est lui qui vous permettra de savoir quelles
sont les ressources humaines et financières que vous pourrez mobiliser
afin de mettre en œuvre la stratégie que vous aurez adoptée. »
Or s’il estime que la réalisation d’un bilan comptable ne présente
« guère de difficultés », il constate que « dans les PME notamment, on
retrouve souvent les mêmes facteurs de blocage, des facteurs dont les
dirigeants finissent par s’accommoder sans prendre réellement
conscience qu’ils pourraient aisément les éliminer ou tout au moins en
limiter la portée ». Parmi ceux-ci, un besoin en fonds de roulement
(BFR) excessif ou une méfiance à l’égard de toute dépendance envers
les banquiers et surtout de la gestion. Il conseille particulièrement de ne
pas être prisonnier des mots et des chiffres, de percevoir le vécu de son
entreprise, de toujours vérifier ce que l’on vous dit et de faire découvrir
les améliorations possibles de la gestion par ceux qui devront les mettre
en application.

Les auteurs de Management : stratégie et organisation43 affirment par


ailleurs que les petites entreprises sont caractérisées par une déficience
financière structurelle : « Les bilans des petites entreprises s’opposent à
ceux des grandes firmes par le poids plus élevé qu’occupe le court
terme. Le “bas de bilan” pèse plus lourd que dans les grandes
entreprises. Les actifs circulants sont relativement copieux, à l’image
des dettes à court terme du passif. Pareille situation est due tout à la
fois aux réticences des banquiers à accorder aux petites entreprises des
prêts à long terme, mais aussi au comportement des petits patrons qui,
par souci d’indépendance, refusent l’endettement à long terme. Cette
particularité financière des petites entreprises, où les liquidités sont
relativement plus faibles que dans les grands groupes, entraîne des
difficultés de trésorerie fréquentes. »

« Il est indispensable de mettre sous contrôle sa trésorerie, de la gérer,


même sans outil spécifique », considère Henry Dorbes. « Cela
demande un travail quotidien qui peut être délégué à un comptable
avec de bonnes procédures. On ne peut pas piloter son entreprise si
l’on ne maîtrise pas sa trésorerie. Pour bien sentir ses coûts, le
dirigeant, financier ou non, doit s’astreindre à contrôler toutes les
entrées et sorties, au jour le jour. Il doit également surveiller la variation
du BFR tous les mois et suivre l’évolution des stocks et des comptes
clients. Il doit aussi mettre à jour, chaque quinzaine, un plan de
trésorerie glissant permettant de prendre certaines décisions. Mettre en
place ce genre d’outils de suivi ne nécessite pas de construire une usine
à gaz, ni de se ruiner en logiciels de gestion. »

L’analyse financière va donc permettre d’optimiser le besoin en fonds


de roulement, décalage entre les paiements aux créanciers et les
encaissements clients qui entraîne justement une trésorerie négative.
« C’est le plan de trésorerie qui fait apparaître le besoin en fonds de
roulement », explique Claude Triquère. « Ce décalage, à l’instar de
deux trains partant à des moments différents du même lieu, se
perpétue dans le temps. » Or l’élément financier qu’est le BFR doit être
financé, et il est très représentatif de la gestion de l'entreprise pour les
analystes financiers ou les banquiers.
Par ailleurs, dans le rapport d’Ernst & Young intitulé Les Enjeux pour les
entreprises et exemples gagnants d’optimisation du BFR44 François
Monsellier estime que dans le contexte actuel de crise de liquidité, le
BFR est le moyen de financement le plus disponible et le moyen le
moins onéreux pour avoir accès à de la trésorerie rapidement.
« Un dirigeant doit avoir un état synthétique de son BFR et de sa
trésorerie tous les matins, ou au moins toutes les semaines, sur son
bureau », affirme Didier Voyenne, directeur financier et comptable
d'informatique à la Caisse des dépôts et consignations, coauteur de Le
Besoin en fonds de roulement45 et coresponsable du groupe de travail
BFR au sein de l’Association française des trésoriers d'entreprise et de
l’Association des crédit managers, dans un article du Journal du
Net46 signé par Aurélie Fardeau.

C’est d’autant plus vrai quand l’entreprise se développe : « La maîtrise


du BFR est l'un des principaux problèmes des sociétés en phase de
croissance », précise Alexandra Barth, consultante spécialisée en
gestion à l'APCE, dans un article de Chef d’entreprise magazine47.
D’après elle, l'entreprise est amenée à réaliser d'importants
investissements en voyant augmenter les commandes. « Son besoin en
liquidités, non encore couvert par ses recettes, augmente donc à un
rythme rapide. C'est une phase critique qui requiert la plus grande
vigilance. »
Didier Voyenne considère que les phases de conquête, par exemple
d'un nouveau marché à l'international, sont également des périodes à
risque pour le BFR et la gestion de la trésorerie.
« L’entreprise en croissance, rentable, peut se retrouver rapidement en
situation de crise de trésorerie dès lors que le BFR n’est pas piloté »,
écrit encore Francois Monsellier. « Il est urgent de sensibiliser les
équipes de management, les directeurs financiers à la nécessité de
suivre et piloter le BFR. Se doter d’outils de suivi est évidemment un
plus et peut permettre de valoriser la participation. » Il présente par
ailleurs des moyens rapides et simples de dégager de la trésorerie en
optimisant le BFR : négocier les termes de paiements ; optimiser les
processus (client, fournisseur, suivi de stocks) ; faire des prévisions
pertinentes.

En plus d’améliorer la gestion de son processus client, notamment en


optimisant la facturation et le recouvrement comme on l’a vu
précédemment, il vous faut donc négocier des délais de paiement
auprès de vos fournisseurs et faire un travail en amont sur vos besoins
en matières premières ou en fournitures. « Il faut anticiper son activité
et la traduire en termes de production afin d'éviter les stocks. C'est le
principe du juste-à-temps », explique Didier Voyenne. Une bonne
gestion des stocks s’impose, mais il peut aussi être utile de négocier
des délais de livraison plus courts avec ses fournisseurs.

Le business plan

Contrairement à ce que beaucoup de gens croient, un business plan


n’est pas utile uniquement au moment de créer une société.
Malheureusement, il est peu utilisé dans les PME, surtout après la
création. « Une fois défini le “business plan”, celui-ci n’est plus
examiné ni mis à jour en raison de circonstances, de nouveaux projets
ou de nouveaux marchés conquis, qui pourraient pourtant modifier ce
plan initial. Aucune mise à jour de ce dossier initial n’existe », déplore
Jacqueline Socquet-Clerc Lafont48. « Cela peut paraître surprenant, car
le créateur d’entreprise part d’un projet, qu’il a finalisé, ce qui lui a
permis d’obtenir prêts ou aides. De surcroît, le rôle du “business plan”
est bien de définir une stratégie pour l’entreprise. »

Pourtant, le plan d’affaire peut se muer en plan de développement, ce


que Stéphanie Missonier, chercheur au CNRS/Association doctorale
marchés et organisations, considère dans un article publié sur
NetPME49 comme le « passage obligé du lancement d’un projet
nouveau important dans une entreprise existante ».
« Un business plan, ce n’est pas que financier, cela a d’autres intérêts :
pour l’entreprise, les employés, soi-même… », estime Henry Dorbes.
Pour lui, il peut aussi s’avérer utile pour l’ouverture d’une filiale, d’une
agence ou le lancement d’un nouveau produit : « Si ce projet
correspond à une réalité économique autonome, le business plan
pourra constituer “le contrat” entre le management intermédiaire et la
direction du groupe. »

Celui-ci a d’autres utilités, dont la première est bien entendu de trouver


de nouveaux partenaires : « C’est un moyen de communication qui
vous permet d’affirmer, d’étayer vos convictions et donc de trouver des
appuis auprès d’associés ou de financeurs », estime Claude Triquère50.
À
« À l’instar du plan d’une maison, pensé par un architecte, le projet
peut se défendre, s’expliquer, s’imaginer. Il prend corps et d’autres
peuvent se l’approprier et avoir envie d’y participer. Car c’est aussi
l’objectif d’un business plan que d’aider à trouver des partenaires qui, à
la seule lecture du document, auront envie de rencontrer et d’écouter
son rédacteur. »

Dans la mesure où il vous force à vous poser des questions sur tous les
aspects du développement de votre projet et à y apporter des éléments
de réponse, le business plan vous permet également de clarifier vos
idées et de vous assurer que tous les éléments ont été pris en compte
dans sa construction.
« Un bon business plan permet surtout de vérifier que le projet est
viable et d’élaborer des hypothèses pour l’avenir », poursuit Stéphanie
Missonier. « Le business plan devient un outil de management
indispensable de la PME moderne. En effet, il est le seul moyen
rigoureux de se fixer des objectifs cohérents à atteindre, dont on
pourra ensuite mesurer le niveau de réalisation. »
Pour cela, elle conseille de ne pas être trop optimiste dans l’évaluation
du chiffre d’affaires et du point mort (le moment à partir duquel le
chiffre d’affaires sera supérieur aux charges fixes), et même de prendre
en compte les hypothèses les plus défavorables afin d’éviter les
mauvaises surprises. Elle recommande également de présenter une ou
plusieurs études de marché crédibles et de mentionner vos points
faibles ou « risques » afin de crédibiliser votre business plan.

Reste que ce document de vingt à cinquante pages peut paraître


rébarbatif à rédiger. Vous pouvez vous contenter d’envoyer un résumé
opérationnel (« executive summary ») accompagné d'un accord de
confidentialité à des investisseurs potentiels. Si certaines sociétés de
capital-risque se montrent intéressées par le projet, vous leur ferez
ensuite parvenir un plan de développement.
« Le business plan, c’est dépassé… »

Directeur académique de la spécialisation en Entrepreneurship et Business


Development du MBA de HEC Genève, Raphaël Cohen est l’auteur de Concevoir et
lancer un projet51, ouvrage dans lequel il présente une alternative au business plan et
propose un modèle de « business case », ou « dossier d’opportunité », qui s’appuie
sur un « arbre de décisions » générique modélisant l’analyse des décideurs. Le modèle
IpOp, qui y est présenté, propose une démarche beaucoup plus conviviale et efficace
pour stimuler la réflexion au niveau du préprojet.

Quelles sont pour vous les limites d’un business plan, particulièrement dans une
perspective de développement ?
Le plan d’affaires ne répond pas directement aux questions que les décideurs se
posent vraiment et intervient trop tôt dans le processus. Il a l’ambition d’expliquer,
fonction par fonction, comment un projet sera réalisé. Cette démarche par fonction
est contre nature dans la mesure où elle ne correspond pas à la manière de penser,
beaucoup plus holistique, d’un porteur de projet.
Les décideurs s’intéressent d’abord au « pourquoi » d’un projet et à la crédibilité de
l’équipe qui va le mener. Ce n’est que si ces deux composantes sont convaincantes à
leurs yeux qu’ils s’intéresseront au « comment » du projet. Il est donc excessif et
prématuré de les bombarder avec un plan d’affaires qui a l’ambition de répondre
d’emblée à toutes les questions, et plus particulièrement à celle du « comment ».

Pouvez-vous définir le « business case » en quelques mots ?


L’objectif du dossier d’opportunité est d’abord de convaincre les décideurs de l’intérêt
du projet – de quoi il s’agit et pourquoi il faut le faire – avant de leur parler de la mise
en œuvre. Celle-ci suivra plus tard, dans un plan d’implémentation : le comment avec
les ressources nécessaires.
Plus court, cinq à dix pages, le dossier d’opportunité demande autant de recherche et
de réflexion que le plan d’affaires au niveau du préprojet tel que défini dans le cadre
du modèle IpOp, sauf qu’il répond à des questions différentes, celles que se posent
réellement les décideurs.

Quels sont, selon vous, ses avantages dans une perspective de développement ?
En procédant ainsi en deux temps, le porteur de projet peut savoir beaucoup plus tôt
si son projet suscite un intérêt auprès des investisseurs. Si ce n’est pas le cas, il aura
économisé la rédaction d’un plan d’affaires, complet mais… condamné !
Si, au contraire, les décideurs manifestent un intérêt et demandent des détails sur les
modalités de mise en œuvre, le porteur de projet, débarrassé d’une partie de ses
doutes existentiels, se verra pousser des ailes et sera « énergisé » pour expliquer sans
peine, dans un plan d’implémentation, comment il entend saisir cette opportunité.

Le contrôle de gestion
Même s’il est parfois rattaché à la direction générale (surtout dans les
petites entreprises dépourvues de directeur financier et parfois même
de comptable) car il ne traite pas que de rentabilité financière, il est
plus fréquent que le contrôle de gestion dépende de la fonction
financière. C’est pour cela que nous l’abordons ici.

Le contrôle de gestion est un ensemble de méthodes et d’outils


(comme les tableaux de bord) qui doit permettre aux dirigeants et aux
managers de s’assurer que les ressources sont obtenues et utilisées de
manière optimale, ainsi que d’atteindre les objectifs, et qui doit les
aider dans leurs prises de décision. « Le contrôle de gestion évoque un
processus de pilotage de la gestion de l’entreprise », résument Farouk
Hémici et Christophe Hénot dans Contrôle de gestion52.

Dans la plupart des PME, il n’y a pas de service spécifique de contrôle


de gestion, les tâches de contrôleur de gestion étant souvent
effectuées par le service comptable ou par la direction financière quand
ils existent. Le contrôle de gestion est moins formalisé et il est réalisé
quand des difficultés surviennent.
Et pour cause : « Qu’appelle-t-on contrôle de gestion ? Le mécanisme
qui fait que l’entreprise s’assure en permanence que sa tête et ses
jambes vont dans la même direction », affirme Christophe Faurie,
consultant spécialisé dans la gestion de la transition et auteur de
plusieurs ouvrages sur la conduite du changement. « En conséquence,
la PME a un système de contrôle de gestion remarquablement
performant, puisque c’est “la tête” qui contrôle directement “les
jambes” : l’action du dirigeant rend inutile la plupart des postes
d’encadrement qui alourdissent les coûts fixes des grandes sociétés, il
est en contact direct avec ses équipes : non seulement il s’assure
qu’elles sont pénétrées de ses idées (ce qui se fait souvent de manière
implicite), mais que, surtout, elles partagent sa motivation. En outre, la
PME a généralement une connaissance intime de son marché, fait d’un
tout petit nombre de clients fidèles ; il n’y a quasiment pas de barrière
entre client et fournisseur. Bref, le dirigeant “sent” les évolutions du
marché et les transmet immédiatement à son entreprise. Il y a de quoi
faire rêver un patron de multinationale… »
Si pour lui, la PME dispose d’un contrôle de gestion (implicite) efficace,
elle commet l’erreur fatale de ne pas le remettre en cause
régulièrement. Il préconise une « méthodologie ambulatoire », une
technique de résolution de problème qui structure et guide la réflexion
mais ne donne pas de solution toute faite, « loin des schémas
directeurs génériques chers aux entreprises modernes ».

Pour Olivier Avril, gérant associé d’Acting Finances, « l’idée très


répandue dans les TPE et PME est que la fonction “contrôle de
gestion” n’est utile qu’aux moyennes et grandes entreprises. C’est une
erreur et, heureusement, beaucoup de PME font du contrôle de
gestion, sans le savoir ou sans le nommer. Mais choisissent-elles
toujours celui qui leur convient ? Le contrôle de gestion a été créé, et
enseigné, dans un contexte de très grandes organisations. Il est donc
normal que les PME n’y retrouvent pas ce qui leur est nécessaire par
simple “copier-coller” ».
Pour lui, le contrôle de gestion doit les aider à améliorer la rentabilité
immédiate et à assurer leur développement à moyen terme. « Le
contrôle de gestion constitue une “assurance” pour la bonne conduite
des affaires. Elle n’évitera pas forcément “l’accident” mais elle en
limitera les conséquences. Assurer une voiture ou des bâtiments est
considéré comme normal. "Assurer" sa conduite des affaires l’est
moins. C’est pourtant important… et c’est le sens de l’investissement
dans la fonction “contrôle de gestion”, aussi bien pour les PME que
pour les grands groupes. »

Même si les objectifs et caractéristiques généraux de cette fonction


dans une PME ressemblent à celles de toutes les entreprises, il insiste
sur le fait que les modalités pratiques doivent être ajustées aux enjeux
et moyens de la PME (cahier des charges précis et spécifique,
répartition de la fonction entre plusieurs collaborateurs, recours au
temps partiel, au temps partagé, etc.). « Et puis, pour le dirigeant de la
PME, il est difficile d’être à la fois l’inspirateur du long terme, le moteur
du quotidien et celui qui mesure “froidement” les résultats de
l’organisation. Une aide au pilotage pour les chiffres et la gestion est
indispensable. »
[RIVALIS OFFRE UNE SOLUTION DE PILOTAGE UNIQUE]
Fondé en 1993 par Henri Valdan, un entrepreneur alsacien passionné, en réaction à
l’absence de soutien apporté par les organismes officiels aux petites structures, Rivalis a
pour vocation de conseiller, d’accompagner et de guider les dirigeants de TPE dans le
pilotage de leur entreprise au travers d’une méthode unique entièrement fondée sur les
spécificités des petites entreprises : elle propose en effet aux sociétés un progiciel
totalement inédit, développé par des patrons pour des patrons, qui établit une situation
en temps réel de l’entreprise pour une meilleure réactivité, combiné à la mise à
disposition de conseillers indépendants qualifiés (anciens chefs d’entreprise, cadres
dirigeants). Ces derniers accompagnent les responsables dans leurs prises de décision,
leurs choix de développement et les situations à risque.
L’alliance d’un conseiller, copilote de l’entreprise, et d’un progiciel dédié, véritable GPS,
fait de Rivalis une méthode totalement singulière au service des artisans, commerçants et
professions libérales.
Développé en réseau depuis 1996, Rivalis est aujourd’hui présent sur toute la France.
Implanté à Colmar, le groupe puise son énergie dans des valeurs fortes, basées sur un
état d’esprit familial attaché à sa région.
Source : Rivalis (www.rivalis.fr)

37. Op. cit.


38. www.apce.com
39. Création et pérennisation de l'entreprise de petite taille, op. cit.
40. www.journaldunet.com
41. Le Grand Livre de la création d’entreprise, op. cit.
42. L’Art de diriger, op. cit.
43. Op. cit.
44. Ernst & Young. Les Enjeux pour les entreprises et exemples gagnants d’optimisation du
BFR, 8 juin 2009.
45. Lionel Bobot, Didier Voyenne, Le Besoin en fonds de roulement, Paris, Economica, 2007.
46. www.journaldunet.com
47. Stéphanie Fontana-Bérard, « Calculer son besoin en fonds de roulement », Chef
d’entreprise magazine, n° 22, 1er octobre 2007.
48. Création et pérennisation de l'entreprise de petite taille, op. cit.
49. netpme.fr
50. Le Grand Livre de la création d’entreprise, op. cit.
51. Raphaël Cohen, Concevoir et lancer un projet : de l’idée au succès, Paris, Éditions
d'Organisation, 2006.
52. Farouk Hémici, Christophe Hénot, Contrôle de gestion, Paris, Bréal, 2007.
[PARTIE III]

MENEZ
LES HOMMES
« La ressource humaine pertinente, ce n’est pas une collection
d’individus mais une organisation, ou plutôt un ensemble de relations
organisées avec une culture. » Si cette citation de Michel Crozier,
principal concepteur de l'analyse stratégique en sociologie des
organisations, montre l’importance d’une bonne gestion des ressources
humaines en entreprise, elle ne dit pas si elle est compatible avec la
taille réduite de certaines.

La gestion des ressources humaines a-t-elle sa place dans les PME ? La


question est posée dans Capital RH1, qui y répond : « "Un seul être
vous manque et tout est dépeuplé." En entreprise, cela vaut d’autant
plus que l’établissement est modeste. En PME, les hommes sont moins
interchangeables, et les compétences détenues ou développées par les
collaborateurs constituent sa principale richesse. »

D’après Michel Marchesnay2, plus l’organisation est de petite


dimension, plus on retrouve certaines caractéristiques, notamment :
« La décision est largement le fait du chef d’entreprise. Même s’il
s’entoure de conseils (famille, comptable, banquier, etc.), lui seul est
responsable de la prise de décision et de son exécution » ; « La
structure est peu formalisée, peu hiérarchisée. Les systèmes
d’information et de contrôle sont très liés à la personnalité du
dirigeant ».
Selon Henri Mahé de Boislandelle3, dans les TPE « on observe une prise
en charge quasi exclusive du dirigeant avec une attention et un intérêt
très forts portés à la gestion des effectifs (en particulier au
recrutement) ».
Cela a pour conséquence d’imposer une organisation du travail simple,
d’après les auteurs de Management : stratégie et organisation4 :
« Dans une structure personnalisée – on l’a constaté – le travail
s’effectue par contact direct et ajustement mutuel. La structure est
centralisée. Toutes les décisions sont prises par le patron. La
spécialisation est faible, qu’il s’agisse de celle des employés ou de celle
des équipements. » Cela se manifeste par des particularités dans le
management des relations humaines, rendant par exemple le
recrutement plus délicat.

« Les TPE sont généralement caractérisées dans la littérature par un


certain nombre de spécificités de gestion, pouvant être synthétisées
sous le concept de “management de proximité” », expliquent
Annabelle Jaouen et Nathalie Tessier5. Et de citer la proximité
géographique des clients et des fournisseurs, mais aussi et surtout la
proximité relationnelle, la proximité hiérarchique et la proximité
fonctionnelle (frontières entre les fonctions floues). En raison de
l’omniprésence du dirigeant, les relations tant internes qu’externes sont
d’après elles fortement personnalisées et informelles.

La proximité, qu’Olivier Torrès et Annabelle Jaouen considèrent comme


le noyau dur du paradigme de la spécificité de gestion des entreprises
de toute petite taille, n’implique pas une organisation complexe pour
contrôler ou orienter des équipes très diverses ou lointaines : « La loi
proxémique […] est un principe de hiérarchisation des choix du
dirigeant dans l’entreprise. Toute chose égale par ailleurs, le dirigeant
de petite entreprise privilégie ce qui lui est proche à la fois dans le
temps et dans l’espace, ce qui lui permet de préserver, voire de
renforcer son contrôle et son pouvoir », expliquent-ils dans leur
ouvrage6. « Cette préférence pour la proximité et la gestion qui en
découlent sont un construit stratégique et organisationnel qui permet
au dirigeant de la petite entreprise de maintenir une meilleure emprise
sur l’entreprise et son évolution. »

Cela constitue même pour eux un avantage sur les grandes


entreprises : « La très petite entreprise a plus qu’une simple vocation
économique, elle a une vocation sociale, ou tout au moins sociétale,
poursuivent-ils. De par sa taille, l’entreprise est créatrice de proximité,
de liens : liens entre les employés, entre les cultures, entre les
générations. »
C’est d’autant plus vrai quand l’entreprise emploie des proches du
dirigeant : d’après Simon Bridge, Ken O’Neill et Stan Cromie7,
« l’entreprise familiale peut produire de manière permanente une
solide atmosphère familiale et un “esprit de corps”, lesquels peuvent
souvent encourager à la fois une proximité avec les membres du
personnel et des relations durables avec les clients, les fournisseurs et
autres contacts ».

La petite entreprise peut d’ailleurs capitaliser sur ses spécificités. « Les


PME n’ont pas la puissance financière et les capacités d’investissement
des grands groupes. Elles sont néanmoins “agiles” et réactives,
s’appuyant sur la proximité dans les rapports hiérarchiques », ajoute
Thomas Chardin, directeur marketing chez le prestataire de services RH
ADP, sur le site de RH Info8, avant de comparer les grandes entreprises,
où la GRH est organisée et structurée, et les PME, où c’est le plus
souvent le dirigeant de l’entreprise qui assure cette mission. « De sa
conception de la fonction RH, d’une certaine croyance dans la
contribution des RH à sa stratégie d’entreprise, dépend le dynamisme
des pratiques RH. Le dirigeant peut et doit compter sur le relais des
managers opérationnels. Même s’ils ne maîtrisent que faiblement les
techniques RH, ces derniers sont les acteurs de fait de la fonction RH. »

Cette proximité peut selon lui constituer un avantage, la proximité


entre le décideur ou les managers et le terrain et les équipes rendant
les pratiques de GRH plus opérationnelles et efficaces. « La GRH se
partageant avec tout acte de management, les PME sont plus aptes à
adapter les comportements pour qu’ils concourent directement à la
réalisation des objectifs de l’entreprise, dans une démarche
pragmatique de productivité et d'amélioration du climat de travail,
poursuit-il. L’investissement des PME dans des pratiques de GRH ad
hoc conditionne leur rentabilité et leur capacité concurrentielle. »

Il constitue en effet d’après lui un levier stratégique, et non une


variable d’ajustement des coûts que les dirigeants de PME doivent
actionner pour améliorer la productivité de leur entreprise.
« L’augmentation induite de cette performance de l’entreprise permet
en retour de développer les meilleures pratiques RH en PME et
d’enclencher le cercle vertueux d’une GRH adaptée. »
1. Capital RH, « Les ressources humaines en pratique », web lettre n° 13, mars 2004, Chambre
de commerce et d’industrie de Paris.
2. Management stratégique op. cit.
3. Gestion des ressources humaines dans les PME, op. cit.
4. Op. cit.
5. Les Très petites entreprises, op. cit.
6. Ibid.
7. Simon Bridge, Ken O’Neill, Stan Cromie, Understanding Enterprise, Entrepreneurship and
Small Business, Macmillan Business Publishing, 1998.
8. www.rhinfo.com
1- L’ENTREPRISE
Après avoir vu quelle pouvait être l’importance des dirigeants dans les
petites entreprises, voyons comment la nature de ces dernières peut
influencer le management qu’elles pratiquent.

La culture d’entreprise, les valeurs qu’elle véhicule et qu’elle essaye


d’inculquer à ses salariés, la façon dont elle favorise (ou non) le
développement durable ou l’innovation par exemple, peut en effet
avoir une influence non négligeable sur sa politique de RH, le
management qu’elle pratique et les résultats qu’elle obtient.

La culture d’entreprise
La culture d'entreprise, parfois appelée « culture organisationnelle »,
est l’ensemble de la psychologie, des attitudes, des expériences, des
croyances et des valeurs, personnelles et culturelles, d’une
organisation.

« Ensemble des façons de penser et d’agir, ensemble des règles


explicites ou implicites, système de cohésion et de cohérence, la culture
est la partie immatérielle du capital de l’entreprise. C’est elle qui
valorise l’entreprise au-delà des actifs et des technologies », précise
Olivier Devillard9.
Dans La Culture d'entreprise pour manager autrement10, Éric
Delavallée explique que la culture, c'est ce qui rend chaque entreprise
est unique : « Deux entreprises peuvent suivre la même stratégie, avoir
les mêmes structures, recourir aux mêmes techniques de gestion, elles
ont néanmoins leur propre culture. Le manager doit prendre en
considération dans ses décisions ce qui apparaît plus comme une réalité
organisationnelle qu'un objet de management à part entière. »
Source bien connue de cohésion, elle peut devenir un facteur de
performance. En posant des valeurs et des représentations communes,
elle facilite d’après Olivier Devillard la compréhension à demi-mots,
donc les ajustements mutuels. « Bien qu’invisible, la culture est
déterminante, poursuit-il. De nombreuses entreprises ont compris
qu’elle peut être utilisée comme facteur d’engagement, levier de
performance et outil de différenciation. Bien maîtrisée, elle participe
alors activement à la conduite du changement, sert la stratégie et la
réussite de l’entreprise. »

Ce n’est certainement pas un hasard, d’ailleurs, si les deux premiers des


dix points de la théorie Z de William Ouchi sont la définition d’une
culture d’entreprise impliquant fortement la direction de l’entreprise et
la mise en place de structures et de stimulants en adéquation avec la
culture d’entreprise.
Selon Thomas Peters et Robert Waterman, auteurs du best-seller
mondial Le Prix de l’excellence11, « la prédominance et la cohérence de
la culture se sont révélées, sans exception, les qualités essentielles des
meilleures entreprises ». Pour eux, l’excellence repose notamment sur
la mobilisation autour de valeurs clés.
« Respect des personnes par chacun, franchise, honnêteté, esprit
d’équipe, confiance, voilà le système de valeurs sur lequel doit se
fonder aujourd’hui le management de toute société convenablement
dirigée », estime pour sa part Gérard Regnault12. « L’entreprise n’a pas
le droit de se dispenser d’intégrer une dimension éthique dans son
management. »

Il peut être utile, voire indispensable d’avoir recours à un conseil


externe pour structurer et officialiser la culture de l’entreprise compte
tenu du recul nécessaire et du travail de longue haleine que cela
représente.
Mais l’adhésion à celle-ci peut être facilitée par de petites actions
comme le fait de prendre les repas en commun avec les employés, de
se tutoyer, le contact favorisant la diffusion des valeurs dans
l’entreprise. « Dans une entreprise conviviale, les contacts sont
dynamiques, chaleureux, positifs… Les gens ne se rencontrent pas
uniquement sur le plan professionnel, en fonction de rapports
hiérarchiques, mais aussi en tant qu’êtres humains », explique Philippe
Détrie sur le site de Vocatis13. « C’est aussi une entreprise qui déploie
la convivialité au sein d’espaces de travail qui incitent à la relation et au
dialogue, et qui véhiculent en même temps les valeurs de l’entreprise.
Cela peut passer par la création de salles de réunion, d’espaces de
détente, de cafétérias… Chez Google et chez e-bay, les collaborateurs
peuvent, par exemple, jouer au baby-foot. »

La Responsabilité sociale de l’entreprise

La Responsabilité sociale de l’entreprise (RSE), c’est la recherche d’un


meilleur équilibre entre les impératifs économiques et les obligations
sociales et sociétales : du dialogue social à une maîtrise de la
consommation en passant par une valorisation de l’environnement.

Philippe Détrie, auteur de L’Entreprise durable14, estime par exemple


que « le capital confiance d’une entreprise se construit dorénavant par
la poursuite simultanée de quatre finalités : l’utilité à la société ; la
satisfaction de ses clients et usagers ; la performance pour ses
propriétaires : actionnaires, État, adhérents… ; l’accomplissement de
ses salariés/agents dans leur travail ».

Des spécialistes de plus en plus nombreux n’hésitent pas à placer la RSE


au cœur de la réflexion sur le management. D’après Fabrice Mauléon,
coauteur de l’ouvrage Le Management durable15, le développement
durable se décline dans un management traduisant une « volonté de se
concentrer, dans la mesure du possible, sur un développement durable
appliqué à la gestion de l’entreprise, qui recouvre et le développement
durable et la responsabilité sociale des entreprises ».
Dans L’Entreprise verte16, Élisabeth Laville estime qu’il est « essentiel
que le développement durable soit inclus dans le système de
management, dès que possible, afin de piloter la démarche et d’assurer
le respect des engagements aussi bien dans l’entreprise que chez les
sous-traitants et fournisseurs ».
Les auteurs de RH et développement durable17 montrent comment
accroître la performance sociale de l'entreprise en privilégiant, au sein
de l'organisation, les personnes, le partage des valeurs, les
engagements en faveur de l'environnement. L’ouvrage propose des
pistes pour mettre en œuvre ce concept dans les politiques de
recrutement et d'intégration, de formation et de gestion des ressources
humaines en général. Pour Bernard Calisti et Francis Karolewicz, « des
performances durables passent nécessairement par le développement
durable des ressources humaines ».
Le développement durable est même présenté par Dominique Wolff
dans Le Développement durable : théorie et applications au
management18 comme « une opportunité stratégique pour
l’entreprise ; un outil de cohérence organisationnelle susceptible d’être
créateur de valeur. […] Un concept mobilisateur en termes de
management d’entreprise ».

Il peut même constituer une source de financement par l’entremise de


la finance dite « socialement responsable », qui est souvent considérée
comme l’un des vecteurs les plus efficaces pour l’intégration de
préoccupations sociales et sociétales dans le management des firmes.
Les auteurs de Développement durable et gouvernement d’entreprise :
un dialogue prometteur19 expliquent par exemple que « les
actionnaires peuvent faire évoluer les entreprises vers une meilleure
prise en compte de leur responsabilité sociétale. En effet, un
gouvernement d’entreprise bien compris permet de créer de la valeur
dans le long terme ».
C’est aussi ce qu’a constaté le PDG de Danone, Frank Riboud. « Nous
avons montré à nos actionnaires comment le fait de s’impliquer dans
l’entrepreneuriat social pouvait avoir un return [retour sur
investissement] », a-t-il expliqué lors de la conférence plénière
d'ouverture du Salon des entrepreneurs de Paris 2010. « Quand on
parle de return, il est sous-entendu qu’il est financier, mais quand vous
gérez une entreprise de quatre-vingt mille personnes, cela ne va pas de
soi, surtout si vous êtes convaincu que vous faites vos résultats car les
gens sont mobilisés. Le retour peut donc être en termes de
management. »
Attention cependant à ne pas avoir les yeux plus gros que le ventre :
« Les petites entreprises ne peuvent pas être traitées comme de
grandes entreprises. Les concepts et les démarches de RSE doivent être
adaptés voire personnalisés pour chaque cas d’entreprise »,
préviennent en effet Pierre Louart et Marc-André Vilette dans La GRH
dans les PME20.
« La petite entreprise est différente, à travers les caractéristiques
connues de centralisation, gestion informelle et faiblesse des
ressources. Dans le contexte étudié, son mode de gouvernance, dans
lequel l’actionnaire est souvent absent, ainsi que ses relations, souvent
locales et résiliaires, sont autant de caractéristiques qui comptent. De
plus, la plupart des petites entreprises, en matière de RSE, recèlent des
avantages certains : les liens personnels nombreux au sein de
l’entreprise et à l’extérieur, l’implication dans son milieu qui engage à
la pérennisation, à la manière d’un chef de famille, et par cet objectif
de pérennisation la nécessité de cultiver le respect des autres et la
confiance. » Et de citer l’ouvrage de Bernard Calisti et Francis
Karolewicz (RH et développement durable : une autre vision de la
performance), qui montre que les valeurs cultivées seraient alors plutôt
de l’ordre de l’affection, de la solidarité et de l’engagement réciproque.

L’affectif semble être encore plus important dans les petites


entreprises. Annabelle Jaouen et Olivier Torrès21 soulignent le « rôle
très fort des valeurs personnelles des dirigeants comme déterminants
de leur responsabilité sociale. […] Ce qui peut fondamentalement
différencier la PME de la grande entreprise, c’est précisément la place
et le rôle qu’occupent les sens […] dans le mode de management.
Cette approche sensorielle offre une première interprétation des
préoccupations des dirigeants et de l’exercice de la responsabilité
sociale. »
[SODEXO À TOUTES LES SAUCES]
Leader mondial des « solutions de qualité de vie au quotidien », le groupe Sodexo a été
créé par Pierre Bellon en intégrant des valeurs humanistes et le fait qu’une entreprise doit
aussi essayer de répondre aux besoins du personnel.
« Dès le début, j’ai fait le choix de la croissance interne », explique-t-il dans Je me suis
bien amusé ! Sodexho raconte22. Depuis plus de quarante ans, la philosophie de
l’entreprise se base sur les valeurs que sont l’esprit de service, l’esprit de progrès et
l’esprit d’équipe, celui-ci devant « exister dans nos sites, nos unités opérationnelles et
fonctionnelles, comme dans nos comités de direction. Les compétences des uns s’allient
au savoir-faire des autres et contribuent ainsi à assurer le succès de Sodexo.
L’organisation de l’équipe est fondée sur le respect des règles suivantes : l’écoute, la
transparence, le respect des autres, la diversité, la solidarité dans la mise en œuvre des
décisions majeures, le respect des règles et le soutien mutuel, particulièrement dans la
difficulté ».
Afin de réaliser le potentiel de développement de Sodexo, qui est cinquante fois
supérieur à son chiffre d’affaires actuel, le groupe continue de se fixer des objectifs
ambitieux dans le domaine des RH (lire l’interview d’Élisabeth Carpentier) mais aussi celui
du développement durable. Le groupe se pose comme « l'inventeur d'un nouveau métier
qu'il exerce en favorisant l'épanouissement de ses équipes et le développement
économique, social et environnemental des villes, régions et pays dans lesquels il exerce
ses activités ».
En 2009, Sodexo a précisé son programme d’action relatif au développement durable en
se fixant des engagements précis et mesurables dans le cadre de son « Better Tomorrow
Plan ». Pour fédérer toutes les actions et les énergies déployées de par le monde, la
société a défini trois priorités : agir pour une meilleure nutrition, pour la santé et le bien-
être de ses clients ; préserver l’environnement ; s’engager auprès des communautés
locales.
Tout cela est bien joli sur le papier, mais qu’en est-il dans les faits ? Dans une étude de
cas publiée sur le site Melchior, « Sodexo au Pérou, un exemple de contribution au
développement de l’économie locale23 », Emmanuel Betry examine la façon dont le
groupe a satisfait la demande de services nécessaires à la vie des ouvriers de la mine
d'Antamina, qui est située à plusieurs milliers de mètres d'altitude et à douze heures de
route de Lima, et dont les effectifs varient selon la phase du chantier.
D’après lui, « ce projet illustre aussi bien les difficultés d'installation d'une firme
multinationale dans un contexte national particulier que les conséquences positives qui
peuvent résulter de l'engagement de Sodexo en faveur du développement durable ». Il
précise que Sodexo s'est engagé dans cette voie avec un partenaire local (C&C) et que la
population locale a donc été intégrée dans le projet. À la fois comme main-d'œuvre et
comme fournisseur de produits locaux, le groupe cherchant par ailleurs à anticiper son
départ en développant des réseaux de distribution pour les petites entreprises ainsi
créées. « Le succès de l'implantation de Sodexo au Pérou est en grande partie lié à la
priorité qui a été donnée au développement de l'économie locale, écrit Emmanuel Betry.
Ainsi, les populations vivant à proximité du chantier ont bénéficié des retombées du
projet en termes d'emploi, de formation et de sous-traitance. Cette approche, originale
au Pérou, a permis à Sodexo de se différencier de ses concurrents en proposant un
partenariat non seulement avec son client, mais aussi avec les autorités locales, et ainsi de
consolider sa présence dans le pays. »
Il souligne que cette expérience a également servi d'exemple pour d'autres projets de
Sodexo, en Tanzanie, au Nigéria, ou avec les communautés indiennes au Canada et en
Alaska, la démarche s'inscrivant dans une stratégie générale socialement responsable qui,
il est vrai, a été validée par de nombreux labels et autres prix.

L’innovation, la prise de risques

« Pour réussir en tant que leader du changement, une entreprise doit


avoir une politique d’innovation systématique », affirme Peter Drucker
dans L’Avenir du management24.

L’innovation et la créativité qui la sous-tend doivent effectivement être


encouragées pour que l’entreprise puisse être performante. Mais cela
ne va pas sans risques.
Dans Management de l'innovation25, Sandrine Fernez-Walch et
François Romon partent du constat que « pour l'entreprise, l'innovation
constitue un enjeu réel et devient, par la force des choses, une activité
récurrente et stratégique. Mais bien qu'omniprésente, l'innovation
garde son caractère d'incertitude. Son management nécessite vision et
créativité et pas seulement rigueur et contrôle. Ce double caractère de
récurrence et d'incertitude des activités d'innovation constitue
aujourd'hui un véritable défi de management ».
Comme l’écrivent Alain Bloch et Delphine Manceau dans De l'idée au
marché26 : « concevoir et lancer de nouveaux produits est
indispensable aux entreprises. Mais cette démarche est coûteuse et
souvent risquée. » Une manière de réduire les coûts et les risques est
d’obtenir des aides, financières ou non, d’organismes comme Oséo, qui
a intégré l’Anvar en 2005. Et pour cela, innover est indispensable…

L’innovation doit être favorisée et il existe plusieurs façons de le faire.


En préface de L’Entreprise créative27, Antoine Héron explique que
« l’esprit humain peut être plus ou moins ouvert aux processus créatifs
dans les entreprises ». Pour lui, cela dépend surtout du management
qui y est à l’œuvre, dans la mesure où c’est à lui de préparer les esprits
et de les ouvrir à la créativité.
Les auteurs de cet ouvrage expliquent que la performance créative
dépend notamment du degré d’adhésion des salariés aux objectifs clés
de l’entreprise, du rôle que celle-ci laisse (ou non) à l’initiative
individuelle, de l’existence de « stimulations créatives » et de sa
communication interne. En découle un certain nombre d’attitudes
managériales à promouvoir pour libérer le potentiel innovant dans
l’entreprise.

Dans Fabriquer le futur 228, Pierre Musso, Laurent Ponthou et Éric


Seulliet donnent quant à eux des exemples et des façons de développer
l’imaginaire, « devenu pour l’entreprise une de ses ressources les plus
précieuses (et les plus rares) ; c’est un de ses actifs immatériels
contribuant à sa valeur. Et comme tout actif, l’imaginaire doit se
cultiver et peut, d’une certaine manière, s’optimiser ».
La diversification des profils est l’une d’entre elles, tout comme la
stimulation de l’imagination de leurs employés ou la favorisation de
« l’innovation participative et collaborative » et le fonctionnement en
mode projet. Des choses plus terre à terre comme la pause-café ou plus
généralement une ambiance détendue sont également susceptibles de
favoriser la créativité.

Pour Jean-Louis Swiners et Jean-Michel Briet29, « la clé de l’innovation


n’est pas dans la maîtrise de la technologie mais dans celle des
hommes et des femmes d’imagination », qu’ils trouvent sous-
représentés par rapport aux hommes « d’organisation ».
« L’organisation les rejette. Ils sont difficiles à manier, ils adaptent
constamment leurs plans aux circonstances et remettent constamment
tout en cause. L’organisation ne sait pas comment faire avec eux et
c’est un problème de management. »
La créativité, cela ne s’invente pas mais ça peut être favorisé, ne serait-
ce qu’en mettant en valeur les bonnes idées au sein de son entreprise.
« Les entreprises performantes ont compris que leurs personnels ont
beaucoup d’idées d’amélioration et que celles-ci, si elles sont valorisées
de façon appropriée, peuvent permettre de faire progresser de façon
importante la qualité des prestations ou de l'organisation du travail »,
explique Gilles Barouch, auteur de « Améliorer votre efficacité : mise en
valeur de vos bonnes idées, correction des erreurs, prévention des
problèmes potentiels », sur NetPME30.

Dans L'Art de diriger31, Robert Papin conseille de confronter ses idées à


celles d’autrui. Pour lui, la créativité de ses collaborateurs est
susceptible de compenser le manque de moyens humains et financiers.
« Luttez contre les ennemis de votre créativité : la crainte du ridicule, le
manque de persévérance, la déception que vous éprouvez fugace
s’évanouit, le stress. »
Il préconise également d’avoir recours à des techniques individuelles de
créativité, comme la matrice des découvertes de Môles et la technique
de catalogue, ou à des techniques collectives comme l’analyse
synectique ou méthode de Gordon, le brainstorming et d’autres
exercices. Robert Papin recommande aussi d’exploiter la créativité de
ceux qui vous entourent, de s’entourer d’imaginatifs, de favoriser leur
épanouissement, de valoriser la réussite ou encore de constituer une
sorte de conseil d’administration constitué de personnes curieuses de
tout.
Mais il ne faut pas stigmatiser les échecs pour autant : « Un
collaborateur peut faire une erreur en essayant quelque chose de
nouveau. Il faut le soutenir », précise Brad Sugars.
[L’APPEL DE L’INNOVATION]
Considéré comme l’un des pionniers de l’Internet sans fil en Europe, Éric Carreel a réussi
à créer trois start-up innovantes qui facilitent la vie des utilisateurs de leurs produits en
autant d’années.
Il aurait pu tout arrêter en 2005, quand Thomson a racheté Inventel pour un montant
estimé à environ 135 millions d'euros, une société qu’il avait créée avec Jacques Lewiner,
l'un de ses anciens professeurs à l'Ecole supérieure de physique et de chimie industrielles
(ESPCI), retourné depuis à ses études et à ses chers brevets (c’est lui qui en dépose le plus
en France à titre privé).
Éric Carreel s’est accroché pendant deux années avant de jeter l’éponge, dépité par
l’inertie propre aux grands groupes. « Je pense que les petites structures sont plus à
même de générer de la créativité », estime-t-il. Il aurait aussi pu accepter de diriger
d’autres sociétés. Mais il y a en lui ce feu sacré qui l’a poussé à relancer la machine à
inventer des produits et à créer des emplois, ce qui est essentiel pour lui. En effet, il
estime que « l’innovation technologique est la source essentielle de croissance de notre
société, pas une croissance visant à plus consommer, mais à mieux organiser la société ».
Et aussi à faciliter la vie de ses clients, ce qu’il avoue avoir appris à faire au gré des échecs
qui ont émaillé sa carrière sans pour autant entamer son appétit de création C’est
d’ailleurs pour lui ce qui justifie celle de Withings, le pionnier des objets communicants
devenu leader mondial dans ce domaine grâce à des produits simples d’installation et
d’utilisation, qui rendent en outre des services grâce à leur capacité à se connecter à
Internet. À commencer par le pèse-personne Wifi, premier du genre, qui se vend comme
des petits pains de par son rôle de partenaire santé entre autres. Dépourvu de boutons, il
permet notamment de suivre l’évolution de son poids ainsi que de celui de ses proches
sur Internet ou sur Smartphone, de la publier sur Twitter ou dans votre carnet de santé
en ligne (type Google Health ou Microsoft HealthVault), ou encore de la communiquer à
votre coach sportif ou à votre nutritionniste.
Depuis, Withings a sorti un tensiomètre, et avant même d’être lancé, son « Smart Baby
monitor » a déjà été couronné de deux prix de design en France et de deux prix de
l’innovation au Salon de l’électronique mondial de Las Vegas. Les premiers exemplaires
ont d’ailleurs pu voir le jour grâce à Sculpteo.com, qui permet aux professionnels comme
aux particuliers d’imprimer en 3D les objets qu’ils conçoivent rapidement et à moindre
coût, en envoyant simplement leurs modèles sur le site Internet de la start-up. Quant à la
dernière société en date, Invoxia, elle devrait lancer courant 2011 des téléphones plus
faciles à utiliser et caractérisés par un son de bien meilleure qualité.
Les chevilles d’Éric Carreel n’ont pas gonflé pour autant, habituées qu’elles sont à aller de
son domicile de Meudon à ses bureaux d’Issy ou de Clamart, en attendant les
randonnées estivales dans les Pyrénées, où il a installé un atelier de fabrication Sculpteo.
À l’entendre, ses succès seraient dus à la chance ou à ses collaborateurs. « Je ne fais pas
grand-chose. Je suis président, c’est-à-dire celui qui ne fait rien », essaie de nous faire
croire cet ingénieur titulaire d’un doctorat. « À chaque fois, il y a un directeur général
(DG) qui est aux commandes opérationnelles, je l’accompagne, j’essaie de participer aux
orientations stratégiques qui concernent les produits donc je ne fais rien des tâches
quotidiennes. »
C’est justement l’un de ces DG, Cédric Hutchings, qui se charge de rétablir la vérité dans
un article de Charles Foucault d’Industrie et Technologie n° 926, octobre 2010 : « Il met
les mains dans le cambouis. C’est un amoureux du produit, de l’aspect technologique et
des défis intellectuels que cela représente. » Rien d’étonnant pour ce fils d’agriculteur qui
n’aimait rien tant que de démonter la moissonneuse-batteuse… D’ailleurs, quand on
essaie de le pousser dans les tours, la machine s’emballe : « Il n’y a pas de secret, une
société technologique ne fonctionne que si l’ensemble des personnes qui y participent
sont dans une disposition où elles essaient de s’exprimer au maximum, affirme-t-il. Un
ingénieur, c’est quelqu’un qui doit systématiquement participer au côté innovant de
l’entreprise, ce n’est pas quelqu’un qui exécute un plan défini par un chef comme on a
un peu trop tendance à le faire en France. Tant qu’on n’arrive pas à créer cet esprit qui
fait que l’innovation vient de tous, on fait des sociétés technologiques qui sont en
général un feu de paille. »

« De plus en plus, en sciences de gestion, le processus habituel


s’inverse, et la petite entreprise se met à servir de modèle à la plus
grande », remarquent Pierre Louart et Marc-André Vilette dans La GRH
dans les PME32. « En matière de RSE, cela pourrait également être le
cas. La petite entreprise crée des emplois, elle cultive les relations plus
humaines (par goût ou par contrainte), sa configuration de proximité
peut être favorable à l’enrichissement de chacun, et les regroupements
souples et réseaux lui permettent de s’assurer davantage de sécurité. À
titre d’exemple, la DARES [Direction de l'animation de la recherche, des
études et des statistiques] observait en 2003 que les inégalités entre
hommes et femmes étaient moins marquées en petite entreprise. »

Encore faut-il cultiver ou continuer de cultiver ces différences…

9. Olivier Devillard, « Piloter la stratégie par la culture d'entreprise », Les Echos, février 2007.
10. Éric Delavallée, La Culture d'entreprise pour manager autrement : surmonter les résistances
culturelles, Paris, Éditions d'Organisation, 2002.
11. Thomas Peters, Robert Waterman, Le Prix de l’excellence : les huit leviers de la performance,
Paris, Dunod, 2004.
12. Gérard Regnault, Animer une équipe dans les PME aujourd'hui : qualité et management
des hommes, Paris, L’Harmattan, 1994.
13. www.vocatis.fr
14. Philippe Détrie, L’Entreprise durable, Paris, Dunod, 2005.
15. Fabrice Mauléon, Dominique Wolff, Le Management durable : l’essentiel du développement
durable appliqué aux entreprises, Paris, Hermès science publications, 2005.

É
16. Élisabeth Laville, L’Entreprise verte : le développement durable change l’entreprise pour
changer le monde, Paris, Village mondial, 2004.
17. Bernard Calisti, Francis Karolewicz, RH et développement durable : une autre vision de la
performance, Paris, Éditions d'Organisation, 2005.
18. Michel Dion, Dominique Wolff, Le Développement durable : théorie et applications au
management, Paris, Dunod, 2007.
19. Thierry Wiedemann-Goiran, Frédéric Perier, François Lépineux, Développement durable et
gouvernement d’entreprise : un dialogue prometteur, Paris, Éditions d’Organisation, 2003.
20. Pierre Louart, Marc-André Vilette, La GRH dans les PME, Paris, Vuibert, 2010.
21. Les Très petites entreprises, op. cit.
22. Op. cit.
23. Emmanuel Betry, « Sodexo au Pérou, un exemple de contribution au développement de
l’économie locale », www.melchior.fr
24. Op. cit.
25. Sandrine Fernez-Walch, François Romon, Management de l'innovation : de la stratégie aux
projets, Paris, Vuibert, 2006.
26. Alain Bloch et Delphine Manceau, De l'idée au marché : innovation et lancement de
produits, Paris, Vuibert, 2000.
27. Alan Robinson, Sam Stern, L’Entreprise créative : comment les innovations surgissent
vraiment, Paris, Éditions d'Organisation, 2000.
28. Pierre Musso, Laurent Ponthou, Éric Seulliet, Fabriquer le futur 2 : l'imaginaire au service de
l'innovation, Paris, Pearson Education, 2007.
29. Jean-Louis Swiners, Jean-Michel Briet, L'Intelligence créative au-delà du brainstorming :
innover en équipe, Paris, Maxima, 2004.
30. www.netpme.fr
31. Op. cit.
32. Op. cit.
2- LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES
La gestion des ressources humaines (GRH) fait depuis longtemps partie
des domaines clés de l’entreprise, gagnant ses lettres de noblesse avec
l’expérience d’Elton Mayo dans l’usine de la Western Electric à
Hawthorne.
Même si la portée des résultats de ses travaux a été relativisée depuis
quelques années, il n’en reste pas moins que l’on ne peut pas nier
l’importance du facteur humain dans la productivité d’une entreprise,
quelle que soit sa taille.

« La performance d’une entreprise passe par la performance


individuelle et collective de ses salariés. La gestion des ressources
humaines a comme objectif de mobiliser et de développer les
compétences du personnel pour une plus grande efficacité de
l’organisation », poursuit Thomas Chardin. Et de citer l’étude Cegos de
2003, selon laquelle les grandes entreprises consacrent 3,5 % de leur
masse salariale au financement de la fonction ressources humaines.
« C’est dans les PME, qui représentent la majorité du tissu économique
français, que les relations sociales sont les plus intenses et les plus
riches. Cependant, les pratiques de gestion nécessaires à leur
implication et à leur valorisation stratégique sont très peu déployées. »
Et de se demander pourquoi les PME se privent, au travers d’une GRH
adéquate, d’augmenter leur productivité et leur rentabilité. « Edictées
par les grands cabinets de conseils, les “best practices” RH ne sont
généralement applicables que dans les grands groupes. Les solutions
de GRH recommandées et les plans d’action conseillés sont pour la
plupart surdimensionnés et inadaptés à la majorité des TPE/PME.
D’autant plus que la mise en œuvre de ces pratiques RH haut de
gamme nécessite des moyens humains et financiers démesurés pour les
petites et moyennes entreprises. »
Car comme Henri Mahé de Boislandelle33 le souligne, 63 % des PME
n’ont pas de directeur des ressources humaines, le pourcentage de
DRH chutant avec la baisse de l’effectif. « Pour les 37 % des PME qui
disposent d’une personne en charge de la fonction RH, cette mission
ne représente qu’une activité à temps partiel, ajoute-t-il. Dans ce cas, la
part moyenne consacrée à la gestion du personnel ne représente que
40 à 60 % du temps de travail. »

Si, comme le rappellent Annabelle Jaouen et Olivier Torrès, « la taille


des entreprises a un impact sur la sophistication des pratiques et outils
de GRH », elle n’est pas le seul facteur à entrer en compte dans la
politique des petites entreprises en matière de RH.
D’après Thomas Chardin, « la plupart des PME ne se préoccupent de la
gestion des hommes que ponctuellement, lors d’un recrutement,
d’augmentations salariales, de contentieux individuels ou collectifs. Les
PME concentrent leurs moyens humains et financiers sur leur cœur de
métier et sur leurs problématiques opérationnelles. »

D’après le baromètre 2010 de l’Agefos sur l’emploi et la formation


dans les TPE et PME, enquête réalisée en collaboration avec Ipsos, les
entreprises rencontrent des difficultés dans la gestion des compétences
de leurs collaborateurs avant tout par manque de temps.
Les problématiques de recrutement (35 % des PME) et la complexité
des dispositifs de formation (22 %) ne favorisent pas non plus
l’efficacité des compétences. Quant au budget alloué aux besoins de
formation, 73 % des entreprises l’ont limité à l’obligation légale (contre
70 % l’année précédente). Une majorité de PME prévoyait d’ailleurs de
conserver un budget similaire pour 2011.

Pour Annabelle Jaouen et Olivier Torrès, les pratiques RH sont variées


entre la PME et la micro-entreprise (« dans les micro-entreprises les
individus sont davantage habitués à une individualisation des pratiques
dépendant de la situation et des besoins individuels »), et différenciées
en raison de facteurs de contingence, aussi bien externes qu’internes :
personnalité du dirigeant, style de « leardership », niveau de formation
des employés, caractéristiques des entreprises et structure
organisationnelle. « En définitive, la GHR dans les TPE semble
circonscrite à certaines pratiques visibles et formalisées qui
correspondent à la gestion administrative courante : la rémunération
ou les cotisations aux fonds de formation. »
La gestion des RH et surtout leur apport ne se limitent pourtant pas à
ces pratiques les plus courantes. Comme cela est expliqué dans Tous
DRH34, les missions des managers responsables RH sont vastes :
« développer les ressources (compétences, talents, habiletés, savoir
agir…) de tous ceux qui travaillent avec lui ; mobiliser dans le cadre des
objectifs de son unité et de l’entreprise, l’ensemble des ressources
actuelles et potentielles de ses collaborateurs ».

Que ce soit le dirigeant d’une entreprise, un manager dédié (ou non), à


temps plein (ou non), en interne (ou non), mieux vaut donc ne pas
sous-estimer l’intérêt et l’efficacité de la planification des RH, du
recrutement, des entretiens ou de la formation.

La planification

Les pratiques RH les plus courantes se traduisent par les missions du


responsable de l’administration du personnel. D’après les auteurs de
Fonctions RH35, ces missions consistent à « établir les déclarations
sociales : l’ensemble des documents administratifs que l’entreprise doit
fournir aux organismes collecteurs (DUE, DADS…) ; assurer le suivi des
congés payés, heures supplémentaires, maladies, primes ; tenir à jour
les dossiers des personnes ; respecter la confidentialité des données
personnelles (Cnil) ; établir les contrats de travail ; enregistrer les
mouvements du personnel ; gérer les liens avec la Sécurité sociale ;
organiser les visites médicales avec le médecin du travail ; rédiger les
avenants aux contrats (mutations, promotions, augmentations de
salaire…). »

Devant l’ampleur de la tâche, surtout quand l’on ajoute les autres


volets de la GRH, les petites entreprises se retrouvent confrontées à un
problème principal : le manque de temps à accorder aux actions RH.
Se pose donc la question d’externaliser (consultants externes, coaching
RH) ou de continuer à gérer en interne les RH dans les PME. Si le
responsable RH est une personne de la société (dirigeant, comptable,
secrétaire de direction ou encore salarié) qui cumule les missions RH ou
une partie seulement avec d’autres fonctions, il ne peut souvent
s’occuper que de la gestion administrative courante précisée ci-dessus.
Le recours aux cabinets de recrutement ou aux consultants RH
représente un coût mais a certains avantages : le prestataire est un
professionnel des stratégies de recrutement (suivi des compétences ou
recherche de compétences externes), de sélection, de formation (mise
en place d’un plan de formation). En contrepartie, le dirigeant peut se
consacrer à 100 % à son métier et établir avec le professionnel
extérieur des stratégies.
Un consultant RH peut par exemple venir une journée par semaine
dans une PME tout au long de l’année. Cela permet d’allier les
avantages d’une expertise externe pointue avec une bonne
connaissance de l’entreprise.

Pas étonnant, dans ces conditions, que l’externalisation de tout ou


partie des RH soit en pleine croissance. D’après une étude menée en
2008 par Markess International36, 45 % des entreprises interrogées y
avaient recours, soit une augmentation de 12 % par rapport à 2007.
Les motivations de cet engouement ? Le caractère qualitatif des
prestations offertes et « la possibilité de focaliser les ressources sur des
missions RH à plus forte valeur ajoutée, moins administratives, ou sur
des activités plus stratégiques pour l’entreprise ; la maîtrise et le
contrôle des coûts de gestion des RH, notamment grâce aux
engagements contractuels définis avec les prestataires », d’après la
société d’étude et de conseils.
La paie arrive en tête de liste des activités RH externalisées, suivie par la
gestion administrative de la formation et le recrutement.
« L'externalisation de ces deux derniers domaines en est encore à ses
balbutiements, mais c'est une tendance de fond dans les PME »,
affirme Thomas Chardin sur www.chefdentreprise.com.
EDF a choisi d’externaliser son processus de recrutement des cadres dès
2001, recrutant deux mille cinq cents à trois mille personnes par ce
biais chaque année. L’entreprise a enregistré un taux de satisfaction de
93 % sur les processus de recrutement en 2009. « Cela permet de
s’investir beaucoup plus dans le pilotage de différents outils, dans le
conseil managérial, la communication RH, etc. », explique Eve Mathieu,
directrice marque employeur chez EDF, dans un article de Focus
RH37 signé par Brice Ancelin.

Il existe des alternatives, y compris les logiciels RH comme ceux


proposés par Aragon-eRH, une société spécialisée dans les solutions de
développement des ressources humaines en mode SaaS (Software as a
Service), ou Adequasys, dont la solution pour les petites structures
coûte 5 euros HT par utilisateur et par mois.

[LES CCI PEUVENT VOUS ACCOMPAGNER]


Vous pouvez aussi compter sur l’aide des chambres de commerce et d’industrie : dans le
cadre de ses missions d’accompagnement du développement de l’emploi et des
compétences dans les entreprises, le réseau CCI Compétences (88 CCI adhérentes)
propose des diagnostics RH aux TPE et aux PME pour dresser un état des lieux des points
forts et des axes d’amélioration des entreprises dans leur gestion des ressources
humaines, ainsi qu’un accompagnement adapté, personnalisé et progressif.
Plus globalement, les plateformes « Ressources humaines » mises en place par la
chambre de commerce et d’industrie, véritables centres de ressources et d’expertise, ont
pour mission :
• d’informer et orienter les dirigeants de PME en matière d’emploi et de gestion des
ressources humaines au moyen de prestations en ligne ou en entreprise ;
• de diagnostiquer et d’accompagner ;
• de former les dirigeants à la gestion des ressources humaines.
Source : CCI (www.cci.fr).

Le recrutement
Le recrutement n’est pas toujours urgent dans une PME car il nécessite
le budget correspondant, du matériel ainsi qu’un aménagement du lieu
de travail. Il faut néanmoins anticiper les besoins en compétences pour
mettre en place un futur recrutement si nécessaire.
Le recrutement représente un coût réel, notamment en termes de
charges sociales et de coûts individuels, non seulement sur le plan
financier, mais également en temps passé à former le salarié, en temps
d’adaptation, en moyens matériels supplémentaires et en démarches
administratives (réglementation du travail)…
Avant de songer à un recrutement externe, il convient donc de
favoriser le recrutement en interne, d’autant plus qu’une promotion est
souvent source de motivation. Voilà une pratique managériale à
diffuser au sein des PME.

Malgré les coûts, 75 % des trois cents PME franciliennes interrogées en


mars 2010 dans le cadre d’une enquête du centre régional
d’observation du commerce de l’industrie et des services (CROCIS) de la
chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP) avaient cherché à
recruter sur les douze derniers mois. Et même en période de crise, plus
d’une de ces PME sur deux a connu des difficultés de recrutement.
« Les chefs d’entreprise évoquent ainsi une pénurie de candidats, ou
encore l’inadéquation des formations aux besoins de l’entreprise
(difficulté accentuée pour les TPE, dont les exigences et spécialités
requièrent des profils précis) », analyse Gaëlle Jouanne sur le site
www.chefdentreprise.com. « Si les entreprises choisissent
prioritairement les candidats diplômés et expérimentés, elles
privilégient ensuite l’expérience aux diplômes. »

Annabelle Jaouen et Olivier Torrès38 soulignent que certains types de


compétences (ingénieurs, cadres qualifiés…) sont inaccessibles pour les
entreprises de très petite taille, contribuant à rendre le recrutement
plus difficile lorsque la taille diminue. « Parmi les raisons de ces
difficultés, les chercheurs en GRH invoquent de nombreux facteurs qui
ont un lien direct avec la proximité : prédilection pour le court terme
(proximité temporelle), prédominance de l’informel et de l’oralité
(système d’information de proximité), localisme excessif de la recherche
(proximité spatiale), le caractère hypercentralisé de la décision
d’embauche (proximité hiérarchique). Ces multiples formes de
proximité expliquent les fortes difficultés des TPE à recruter. » Autant
de carcans dont il faudrait essayer de se débarrasser le moment venu…
La proximité intervient d’une autre façon dans le processus de
recrutement. Les auteurs de l’étude « Gestion des hommes et
formation dans les très petites entreprises39 » montrent en effet que de
manière générale, plus l’entreprise est de petite taille, plus elle a
tendance à privilégier les liens de proximité dans sa gestion du
personnel et notamment son recrutement. « Ce sont les relations de
proximité qui sont les plus caractéristiques des dispositifs de
recrutement mis en œuvre par les TPE. Elles sont notamment illustrées
par le rôle intensif du “bouche à oreille” ».
D’après Annabelle Jaouen et Olivier Torrès40, la proximité joue
d’ailleurs un rôle de garantie, mais aussi de réducteur d’incertitude.
« Chassard et Bouruet (2003)41 montrent que les relations et le
“bouche à oreille” arrivent en tête des réponses, bien devant les
agences d’intérim et les cabinets de recrutement. Le dirigeant de la
petite entreprise n’aime pas les intermédiaires et préfère mobiliser son
propre carnet d’adresses pour recruter quelqu’un. »
Cela relève du paradoxe, puisque l’enquête menée par Bertrand
Duchéneaut42 révèle que « les dirigeants de PME ressentent fortement
une difficulté à recruter les bons profils, tout en confirmant un manque
de confiance dans les organismes spécialisés ».
Si vous manquez de temps ou si vous rencontrez des difficultés, vous
pouvez confier tout ou partie de vos RH à une personne extérieure à
l’entreprise, à un cabinet de recrutement ou à une société d’intérim
(70 % de la clientèle des sociétés d’intérim sont des PME), ne serait-ce
en l’occurrence que la présélection des candidats, voire les premiers
entretiens.
Jean-Marie Peretti, professeur en ressources humaines à l’Essec et à
l’IAE de Corte, explique par exemple dans un article de Focus RH43 qu’il
faut commencer à externaliser son recrutement « lorsque l’entreprise
présente un pic d’activité et qu’elle n’a pas les ressources en interne
pour suivre le rythme. […] Surtout, il faut identifier la part des
processus que l’on souhaite externaliser et la quantité. »
Passer par un cabinet de recrutement n’est pas forcément plus cher,
compte tenu de la qualité des résultats par rapport à ceux de Pole
Emploi ou de l’Apec. Un mauvais recrutement peut en effet s’avérer
coûteux, puisqu’il faut tout recommencer après avoir payé une
personne inefficace pendant au moins la période d’essai. Comptez 15 à
25 % du salaire annuel brut du collaborateur recruté plus les frais
d’annonce, qui dépendent du support et du format retenus. Les
services d’un chasseur de têtes, utiles pour des postes de haut niveau,
vous coûteront quant à eux 25 à 35 % du salaire annuel brut du futur
salarié.

Il existe d’autres solutions, puisque certains favorisent des politiques de


recrutement auprès des établissements d’enseignement supérieur ou la
mutualisation : en effet, on trouve des groupements d’employeurs qui
s'associent dans le but exclusif de recruter ensemble du personnel
qu'ils se partagent.

Quel que soit le moyen choisi, prenez le temps de la réflexion avant de


lancer votre campagne de recrutement. « Une bonne préparation en
amont vous fera gagner du temps dans la mise en œuvre du processus
et vous évitera les erreurs de casting génératrices de coûts et de
frustration », expliquent les auteurs de l’ouvrage Gestion RH des PME-
PMI44.
Il faut tout d’abord prendre soin de définir les besoins de l’entreprise et
les objectifs à atteindre : pourquoi recruter ? Pour augmenter la
capacité de production de l’entreprise ? Pour acquérir des compétences
nouvelles ?
« Les profils de collaborateurs doivent être complémentaires »,
souligne Guilhem Bertholet, responsable de l'incubateur d'HEC, dans
un article du Journal du Net45. « Chacun doit apporter des
compétences que les autres n'ont pas. » Dans le cas contraire, les
responsabilités risquent de se recouper, les domaines de chacun
d’empiéter sur ceux des autres et le management de devenir plus
complexe.

Cette étape vous aidera ensuite à définir le profil recherché du candidat


et vos critères de recrutement : ses qualités personnelles ou relevant de
sa personnalité (adaptabilité, autonomie), ses compétences techniques
(le savoir et le savoir-faire : savoir bien écrire, répondre au téléphone en
anglais par exemple), sa formation, son niveau de d’expérience, etc.
Que vous décidiez ou non de rédiger une fiche ou grille de poste où
sont rédigées les missions principales et secondaires que le nouvel
employé aura à prendre en charge, il est de toute façon utile de
préciser sa fonction avec le degré de responsabilité, les conditions de
travail (statut, rémunération du poste), les moyens techniques,
financiers et humains alloués ainsi que ses interlocuteurs.

À ce stade, renseignez-vous sur les différentes aides à l’embauche dont


vous pouvez bénéficier, notamment auprès de Pole Emploi ou sur le
site de l’APCE : conseils à l’embauche, aides régionales, aide à
l’embauche du premier salarié, contrats d’adaptation, d’apprentissage,
d’orientation, de qualification, initiative emploi, de qualification adulte,
convention de conversion, travailleurs handicapés, etc.
« La société a recours à ce système depuis trois ans maintenant. Nous
avons mobilisé des subventions recrutements pour 80 % de nos
effectifs », explique François Deltour, président de la société Effiliation
(PME de 25 salariés), dans un article de Focus RH46 signé par
Emmanuelle Kalfon. « Finalement, ces aides nous permettent d’élargir
nos possibilités de recrutement à un coût moins élevé et donc de nous
concentrer sur la personne et sa formation. Nous sommes plus sereins
à l’embauche aujourd’hui. »
L’étude « Gestion des hommes et formation dans les très petites
entreprises47 » en révèle une autre utilité : « Autre caractéristique
typique des TPE : la mise en situation ou l’utilisation des contrats
d’emplois aidés comme méthode de détection, de filtrage et de
sélection avant l’embauche définitive. »

S’il peut paraître laborieux, ce travail va ensuite vous permettre de


rédiger l’annonce qui doit présenter le poste avec exactitude. Il vaut
mieux ne pas « survendre » le poste, sinon vous recevrez un grand
nombre de candidatures (synonyme de perte de temps donc de coûts)
et l’embauché risque de perdre en motivation.
Il faut préciser au minimum le secteur d’activité, le libellé du poste, le
type de contrat et sa durée, le lieu et les horaires de travail, la date
d’émission de l’offre, le salaire (brut annuel ou mensuel). Il est souvent
utile de préciser le profil recherché.
Il vous faudra ensuite choisir les supports sur lesquels vous allez diffuser
l’annonce. Une annonce sur Internet est dix fois moins chère que dans
la presse écrite, mais la qualité n’est pas toujours au rendez-vous.
Vous pouvez aussi faire appel à votre réseau, aux réseaux sociaux
professionnels (Viadeo et LinkedIn) ou déposer votre annonce auprès
d’écoles ou d’associations d'anciens élèves, comme le font de
nombreuses grandes entreprises.
Vous pouvez encore consulter les CV sur des sites d’emploi, si possible
spécialisés dans votre secteur, ou encore vous rendre dans des salons
de recrutement comme le Salon de L'étudiant. La cooptation, parfois
encouragée par un système de prime, peut également se révéler
efficace.

Vous pourrez ensuite rechercher et effectuer une présélection ou un tri


des candidatures en fonction des critères choisis. Car comme l’écrit
Brad Sugars48 dans Coaching pour faire décoller votre entreprise, « le
recrutement ne consiste pas seulement à sélectionner mais aussi à
éliminer des candidats ».

Les auteurs de Gestion RH des PME-PMI49 rappellent les fondamentaux


de la conduite d’entretien : « Préparer, laisser parler, faire parler,
écouter, observer, hiérarchiser, évaluer, synthétiser. » Vous pouvez
aussi avoir recours à des mises en situation ou encore à des tests.
Les entretiens peuvent tout à fait être réalisés avec un ou plusieurs
collaborateurs. Cela permet d’avoir plusieurs points de vue,
d’échanger, et il est important d’associer l’ensemble des collaborateurs
dans le processus. Cela aura une incidence directe sur la qualité des
relations futures (ils auront compris l’intérêt du recrutement et auront
donc a priori une idée favorable de cette nouvelle arrivée) et une
influence positive sur le changement en interne.

Au moment de choisir l’heureux élu, répondez rapidement à tous les


candidats que vous ne souhaitez pas retenir pour donner une image
dynamique de votre entreprise. Il vous faudra ensuite rédiger son
contrat de travail et remplir la déclaration d’embauche. La déclaration
unique d’embauche (DUE) sur net-entreprises.fr, site officiel des
déclarations sociales, permet d’effectuer en une seule fois plusieurs
démarches :
• la déclaration préalable à l'embauche (DPAE) ;
• la demande d'immatriculation du salarié au régime général de la
Sécurité sociale ;
• la demande d'affiliation au régime d'assurance chômage ;
• la demande d'adhésion auprès du service de santé au travail en vue
de la visite médicale obligatoire ;
• la liste des salariés embauchés pour le pré-établissement de la
déclaration annuelle des données sociales (DADS).

L’accueil réservé au nouveau salarié est souvent l’étape la plus


négligée. Pourtant, tout comme son intégration, il est indispensable
pour que le recrutement rime avec succès. Il peut être judicieux de
préparer un livret d’accueil comprenant le rôle et les noms des
différents salariés, des renseignements au sujet de la formation
continue, du déroulement des entretiens individuels, etc. Celui-ci devra
être mis à jour au gré des changements et transmis régulièrement à
l’ensemble des salariés.

Le recrutement d’une nouvelle personne peut aussi être l’occasion de


redéfinir les tâches des membres de l’équipe, ce qui se fait également
lors des entretiens d’évaluation.

La gestion des compétences et des connaissances,


l’évaluation des performances

« Tout employé tend à s'élever à son niveau d'incompétence. » Tel est


le fameux principe de Peter, immortalisé dans le livre du même nom50,
qui a été réédité à vingt-trois reprises depuis sa première parution en
1969. Il est suivi du corollaire de Peter : « Avec le temps, tout poste
sera occupé par un incompétent incapable d'en assumer la
responsabilité. »
Le principe de Peter est un principe satirique relatif à l'organisation
hiérarchique. Néanmoins, il se vérifie parfois et illustre la nécessité
d’une bonne gestion des compétences, surtout dans les petites
entreprises qui, d’après l’enquête de Bertrand Duchéneaut51,
« ressentent plus que les moyennes des manques de compétences,
essentiellement techniques, commerciales et de gestion ».

On peut aussi parler de gestion des connaissances, devenue


primordiale d’après certains auteurs. Peter Drucker parle même de
l’« avènement du travailleur du savoir ».
Or, comme l’explique Robert Papin dans L'Art de diriger52, le savoir est
rapidement périmé dans un environnement bousculé. Il paraît d’autant
plus important de mettre en place des procédures permettant de gérer
intelligemment (identifier, stocker et faire partager) le capital
intellectuel de l’entreprise (savoir, savoir-faire) et d’être correctement
informé sur l’environnement.
D’où l’importance du « knowledge management » : « Les dirigeants
performants n’ont pas attendu qu’on leur propose des recettes
miracles pour gérer les connaissances au sein de leur entreprise, estime
Robert Papin. Ils savent en effet que le meilleur procédé pour inciter un
collaborateur à transmettre son savoir consiste à lui offrir la possibilité
d’exercer demain des responsabilités plus importantes. L’allégement
des structures et la diffusion d’une culture valorisant le travail en
équipe et le goût du défi peuvent en définitive constituer des
ingrédients plus puissants que n’importe quelle directive imposée aux
intéressés. »

Or la gestion des compétences et des connaissances ne peut avoir lieu


sans évaluation. « Pour soutenir et encourager ou au contraire critiquer
et recadrer, il faut pouvoir évaluer la performance réalisée », estiment
Philippe Gabilliet et Yves de Montbron dans Les Secrets du manager
motivant. « Évaluer, c'est tout d'abord fournir à chacun un tableau de
bord précis qui va lui permettre de suivre sa progression. »
Des tableaux de bord ou indicateurs qui vont aussi aider le manager à
avoir une plus large visibilité sur ses collaborateurs et lui permettre de
prendre les décisions adéquates afin de faire face aux problèmes
auxquels il est confronté.

D’après Martine Emeriaud sur NetPME53, l’évaluation constitue un acte


managérial : « La connaissance, par le manager, de l’état des
compétences au sein de son entreprise est un outil déterminant pour
lui permettre de conduire sa politique de gestion des ressources
humaines et prévoir son budget en termes d’actions de formation »
mais aussi de rémunération.

« C’est très important parce que dans les petites structures, les
collaborateurs risquent de se sentir livrés à eux-mêmes ou d’avoir le
sentiment de ne pas être managés », affirme pour sa part Bertrand
Dietz, consultant et enseignant à Euromed-Management. « D’autre
part, des lignes de conduite précises n’ont jamais empêché la créativité
de s’épanouir. Dans une TPE. il faut cadrer encore plus par rapport aux
grosses entreprises qui ont des habitudes et des “process” existants. En
outre, pour un collaborateur, il n’y a rien de plus démotivant que
d’avoir l’impression que l’on n’apprend pas grand-chose, et les gens
apprécient toujours la mise en place de méthodes rigoureuses, car elles
leur donnent l’impression de progresser. Enfin, les petites entreprises
sont en général moins résilientes que les grandes et beaucoup plus
sujettes à des fluctuations d'activité, difficultés économiques, etc. En
cas de difficulté, il peut être très rassurant de s'appuyer sur des
procédures éprouvées qui permettent d'éviter la “gamberge”. »

Les différentes étapes de l’évaluation doivent s’inscrire dans un cycle


annuel permanent et dynamique, destiné à apprécier la performance
globale, au premier rang desquelles on trouve les entretiens
périodiques et le suivi de la performance.
Exemple de cycle annuel de gestion de la performance d'une force
de vente d'un grand groupe international

Il n’en reste pas moins que, comme l’explique Martine Emeriaud, « la


majeure partie du temps, cette évaluation se fait au travers d’un
entretien réservé à cet effet ».

L’entretien individuel d’évaluation est le plus souvent facultatif (sauf


dans certaines conventions collectives). Il est en général annuel et
permet de faire le point avec le ou les salarié(s). Le bilan d’étape
professionnel peut être octroyé à tout salarié à partir de deux années
d’ancienneté.
L’entretien professionnel est aussi une pratique managériale instaurée
par l'Accord national interprofessionnel applicable à toutes les
entreprises dont les fédérations de branche adhèrent aux
confédérations patronales Medef, CGPME ou UPA, comme le souligne
Thomas Chardin54, pour qui « les pratiques de GRH dans les PME sont
peu ou pas déployées, quels que soient les impacts financiers et les
obligations légales ».
D’après l’étude SoftComputing de 2004, dans trois PME sur dix il n’y a
aucun bilan annuel (entretien de progrès, d’objectifs ou d’évaluation)
entre le collaborateur et son responsable. « Dans les sept PME sur dix
qui ont mis en œuvre des entretiens annuels, quatre ne les formalisent
pas du tout : il n’y a aucune trace de l’avis du collaborateur, de son
responsable, des souhaits d’évolution ou besoins de formation, de la
définition des objectifs annuels ou de l’atteinte de ceux-ci. »
Or les entretiens sont nécessaires à la fois dans le domaine des
ressources humaines proprement dites, mais également au niveau du
management. Du point de vue des ressources humaines, ils permettent
de discuter mutation, formation, salaire, promotion. D’un point de vue
plus général, ils permettent de renforcer la motivation et l’adhésion, la
responsabilité des salariés, de répondre à leurs besoins, de développer
un état d’esprit de transparence entre employés et employeur.

Comme pour le recrutement, nous ne saurions trop vous recommander


de préparer les entretiens pour qu’ils soient le plus utile possible. Et
aussi de les conduire sur la base d’un support. « D’expérience, s’inscrire
dans un “process” calé est très important, autant que l’intégration de
nouveaux salariés, insiste Bertrand Dietz. Il faut que ce soit formalisé,
écrit, et que des outils extrêmement précis soient utilisés », comme des
grilles d’évaluation.
Sans être trop difficiles ou longs à élaborer, ces outils ont en outre
l’avantage d’aider à garantir l’objectivité qui est, avec la cohérence, le
suivi de la mise en œuvre des actions de développement, de
compétences et de niveau d’atteinte des résultats, ainsi que la
formalisation, essentiels dans la démarche d’évaluation, d’après
Martine Emeriaud.
« La formalisation implique la traçabilité de l’échange autour de
laquelle les deux parties vont s’entendre en signant au besoin le
document », écrit-elle. Elle est encore plus importante dans les petites
entreprises, où « la relation entre le salarié et son hiérarchique se fait
plus naturellement, voire quotidiennement. Certes, des liens non
formalisés existent mais avec en contrepartie la difficulté à rester
objectif dans l’appréciation du collaborateur faute d’un minimum de
formalisation des échanges ».
Exemple de grille d’évaluation utilisée pour les entretiens
avec les commerciaux dans un grand groupe internationa

OBJECTIFS
Catégorie Description Poids ou Objectif Commentaires Commentaires Résultat
SMART priorité haut du du manager final
Objectif collaborateur (manager)
bas
1 Individuel
2 Individuel

Pour Jean-Pascal Lapra, auteur de L’Evaluation du personnel : pour une


nouvelle approche55, les supports sont l’une des pièces maîtresses d’un
dispositif d’évaluation et leur élaboration devrait formaliser une
démarche d’évaluation qui respecte les valeurs suivantes : l’équité et
l’efficience.
« Une enquête, réalisée par nos soins il y a une dizaine d’années,
portant sur un échantillon d’entreprises de plus de cinq cents
personnes, concluait que cinq années après la mise en place des
entretiens, ces derniers n’étaient plus pratiqués dans 22 % des
entreprises concernées. De fait, dans notre pratique quotidienne, nous
sommes souvent consultés pour relancer des démarches d’évaluation
en voie d’extinction, explique-t-il. Pourquoi ces échecs ? Beaucoup de
responsables les imputent à l’inertie des cadres évaluateurs et à leurs
réticences à réaliser ces entretiens. Les dirigeants se focalisent sur
l’entretien et sur la façon de le conduire, négligeant l’autre pièce du
dispositif que sont les supports. Et pourtant, que reste-t-il à l’issue d’un
entretien si ce ne sont les données reportées sur les supports ?
Comment les résultats de cet entretien transcrits sur les supports vont-
ils être exploités par l’entreprise ? Les supports étant le parent pauvre
de l’évaluation, ces questions restent souvent sans réponse. Cette
carence renforce tant le scepticisme des évalués quant à l’utilité d’un
tel entretien que les réticences de l’encadrement évaluateur. »
Et de souligner le coût pour les entreprises : dans une entreprise de
plus de cinq cents personnes, il faut compter en moyenne 1 000 euros
par individu pour lancer une démarche d’évaluation, auxquels s’ajoute
un coût de fonctionnement de 300 euros. « Faut-il, à ce prix, continuer
à mettre en place des démarches d’évaluation d’une efficacité
limitée ? »

Parmi les thèmes à aborder à l’occasion des entretiens d’évaluation,


certains paraissent incontournables comme les missions accomplies,
l’évolution des activités depuis le dernier entretien. Ils procurent aussi
une occasion de délimiter les fonctions, de comparer les résultats
obtenus aux objectifs fixés, d’aborder les difficultés rencontrées (les
conflits, par exemple) sans faire l’impasse sur les réussites enregistrées.
Ils permettent encore de discuter des objectifs individuels et collectifs à
atteindre, des moyens à mettre en œuvre, et de faire le point sur les
compétences professionnelles actuelles et requises (formation
professionnelle).

D’autres points peuvent être abordés, comme les problèmes d’ordre


personnel et l’impact qu’ils sont susceptibles d’avoir sur le travail.
D’après le baromètre 2010 de la conciliation entre vie professionnelle
et vie familiale, réalisé par l’Observatoire de la parentalité en entreprise,
« 57 % des entreprises de 10 à 100 salariés intègrent, lors de
l'entretien annuel d'évaluation, un temps d’échange sur “l’équilibre
entre vie professionnelle et vie familiale”. Seuls 32 % des sociétés de
plus de 1 000 collaborateurs font de même ».
De toute évidence, les relations entre manager et collaborateur sont
plus personnelles dans les PME : « Les trois quarts des structures de
moins de 100 salariés affirment proposer à leurs collaborateurs un
entretien spécifique avec leur responsable hiérarchique en cas
d’événement familial majeur (naissance, décès, maladie grave d’un
proche, etc.), contre seulement la moitié des entreprises de plus de
100 salariés. »

Suite à l’entretien, il peut être utile de rédiger un document à


l’attention de l’employeur, de l’employé et du DRH s’il y en a un, dans
lequel seront précisés les éléments abordés.
La rémunération fait également partie des thèmes abordés lors des
entretiens périodiques, qui constituent d’après Martine Emeriaud « le
support indispensable pour justifier les augmentations ».
Jean-Pascal Lapra : « Le management de l’initiative est plus que jamais l’enjeu des
entreprises. »

Auteur de L’Evaluation du personnel : pour une nouvelle approche56, Jean-Pascal


Lapra est juriste et psychologue de formation, spécialisé dans le domaine du
management et de la gestion des ressources humaines. Il a occupé des
responsabilités de direction à la Cegos et cherche actuellement à promouvoir une
démarche dans les entreprises qui permet de créer un dispositif de management apte
à manager l’initiative.

Quel est selon vous l’intérêt de l’évaluation du personnel ?


L'évaluation est un élément déterminant dans la direction et la gestion des
organisations et des équipes. Les entreprises, pour être compétitives, ont besoin
d'avoir des salariés motivés prenant des initiatives, des structures décloisonnées leur
permettant de réagir face aux événements et des méthodes de gestion plus
rigoureuses.

Dans votre livre, vous remettez en cause les démarches d’évaluation traditionnelles…
Ce qui n’est pas évalué n’est pas managé ! Les méthodes d’évaluation les plus
usuelles jugent la prestation par rapport à ce qui était programmé par la fonction et
les objectifs, et ne sont pas en mesure de prendre en compte les initiatives et les
innovations. Elles n’incitent donc pas les personnes à fournir une prestation d’une
qualité optimale. En appréciant les prestations par rapport à des références
spécifiques à chacun comme sa fonction et ses objectifs, ces démarches d’évaluation
incitent chaque collaborateur à jouer « perso » et nuisent au travail d’équipe et à la
coordination des actions.
Enfin, il manque dans les supports existants des rubriques qui obligeraient les
utilisateurs à introduire des données essentielles qui permettraient de formaliser et
d’encadrer suffisamment l’évaluation pour garantir l’objectivité des données
reportées sur les supports pour permettre leur supervision.

Que proposez-vous ?
Nous avons élaboré des supports qui formalisent une méthode d’évaluation équitable
et efficiente qui remplit les conditions de fond et de forme suivantes :
Par le choix de la démarche d’évaluation et des critères, les supports doivent
formaliser une méthode d’évaluation qui incite l’ensemble des collaborateurs à
fournir une prestation d’une qualité optimale en n’évaluant pas seulement les
réalisations par rapport à ce qui était prévu, mais aussi les initiatives prises et les
valeurs apportées non prévues.
Cette même démarche doit inciter l’ensemble des salariés à coordonner leurs actions
et à unir leurs compétences et leurs talents pour assurer la réussite globale de
l’entreprise.

Enfin, pour permettre la supervision des évaluations et l’exploitation de leurs


résultats, les supports doivent formaliser suffisamment la méthode d’évaluation pour
garantir la lisibilité de ces résultats et permettre une évaluation objective de la
prestation sous tous ses aspects, aussi bien qualitatifs que quantitatifs.
Mais décrire cette démarche en quelques lignes lui ferait courir le risque d’être mal
comprise et détournée et j’invite donc vos lecteurs à prendre connaissance dans mon
livre d’un exemple de support répondant à ces conditions que les supports le plus
souvent utilisés sont loin de satisfaire. Les informations et données qu'ils délivrent ne
sont pas suffisamment objectives et sûres. Elles apprécient l'exécution des tâches, la
réalisation des objectifs prévus et non les initiatives prises par le salarié.

Même dans les petites entreprises ?


Oui, cela contractualise la relation hiérarchique et peut, si la démarche respecte les
conditions évoquées, limiter les abus de pouvoir et permettre à l’entreprise de
disposer pleinement des compétences et des talents de ses salariés, quels que soient
leur rang et leur grade.

Pourquoi et comment favoriser les initiatives ?


Parce que l’idéologie industrielle domine. Celle-ci est fondée sur la prévision et la
planification mais l’imprévu n’est pas intégré. La logique d’action qui prédomine est
la logique de conformité de l’action, par opposition à une logique d’action fondée sur
l’opportunité. L’idée la plus répandue est sans doute que si tous les collaborateurs
d’une entreprise réalisent correctement ce qui est prévu, tout ira pour le mieux dans
le meilleur des mondes. C’est faux ! L’autorité, même la plus éclairée, ne saurait tout
prévoir. La preuve ? Quand les salariés d’un système limitent leur action à ce qui est
explicitement prévu et cessent de prendre les initiatives qu’ils prenaient
habituellement, le système se trouve bien souvent bloqué. Ce phénomène porte un
nom : c’est la grève du zèle.
La seule application de ce qui est prévu n’est pas une condition suffisante d’efficience
pour la plupart des organisations, même dans des conjonctures stables. Sans les
initiatives de l’ensemble de ses acteurs, aucune organisation ne peut fonctionner.
L’absence d’initiative peut être le signe d’une conscience professionnelle pour le
moins « émoussée », pour ne pas parler de conscience morale. L’attachement rigide
à ce qui était prévu ou ordonné peut être à l’origine de dysfonctionnements majeurs,
aux conséquences parfois fatales. Quand on ne sait pas de quoi demain sera fait, les
entreprises et leurs dirigeants ont besoin de compter sur les initiatives de leurs
acteurs, que la dominante organisationnelle des cultures d’entreprises censure et
parfois inhibe. Le management de l’initiative est plus que jamais l’enjeu des
entreprises.

La rémunération
Dans les grandes entreprises, il existe des outils collectifs pour motiver
les salariés par la rémunération : l’épargne salariale, l’intéressement et
la participation. Les petites entreprises y ont très peu recours, mais elles
peuvent également faire valoir des composantes salariales indirectes,
comme les avantages en nature ou une couverture prévoyance santé.
Elles peuvent en outre utiliser quelques outils, individuels, pour motiver
les salariés par la rémunération, comme les primes variables en fonction
d’objectifs quantitatifs ou qualitatifs.

« En liant la rémunération à la performance, l’entreprise encourage ses


salariés à s’impliquer et à prendre en compte ses objectifs », explique
Martine Emeriaud, consultante DRH, sur NetPME.com57. Elle insiste sur
le fait que ceux-ci doivent être clairement exprimés au travers d’une
communication appropriée afin que le salarié puisse faire le lien entre
sa contribution à la performance de l’entreprise et la partie variable de
sa rémunération. « Faute de quoi c’est l’effet inverse qui peut être
obtenu, poursuit-elle. La reconnaissance de la contribution de chacun
se doit d’être objective afin de ne pas susciter de contestations. La
transparence est donc impérative autour des critères utilisés et des
modes d’évaluation retenus. »

Les petites entreprises peuvent aussi utiliser les commissions, système


qui s’appuie sur un salaire fixe très faible et une prime variable non
plafonnée. À la différence de la prime variable, le commissionnement
n’est pas seulement l’atteinte d’objectifs précis, c’est la rémunération
d’un travail habituel calculée sur le chiffre d’affaires ou la marge brute.
« Dès lors, le commissionnement doit être inscrit au contrat de travail
et ne peut être plafonné », poursuit Martine Emeriaud, qui souligne
que contrairement à la vente monoproduit, il rencontre très vite ses
limites sur des actes de vente diversifiés.

Les petites structures peuvent encore faire appel aux commissions


paritaires locales professionnelles ou interprofessionnelles : « La loi
Aubry II permet la mise en place de ces commissions adaptées aux PE
et TPE qui sont dépourvues de représentation collective et syndicale »,
écrivent Stéphanie Jallut et Dominique Bourdiau dans un article intitulé
« La gestion des ressources humaines au sein des petites
entreprises58 ». « Elles peuvent assurer une régulation sociale de
proximité, une sorte de guichet unique, un intermédiaire entre les
branches professionnelles, nationales et les millions de PE et TPE. Par ce
biais, les dirigeants de micro-entreprises peuvent se regrouper pour
mettre en place des avantages sociaux susceptibles de fidéliser les
salariés. »

Il existe d’autres éléments, non pécuniaires, susceptibles d’aider à


fidéliser les salariés. Les tâches doivent être bien réparties pour éviter la
surcharge de travail, la politique d’évolution des salariés poursuivie, la
rémunération du salarié juste, surtout dans les entreprises familiales.
« Les dirigeants familiaux ont le souci de traiter de façon égalitaire leurs
proches investis dans l’entreprise, afin de ne pas faire naître de
jalousies, sources de dysfonctionnement », expliquent Jérôme Caby et
Gérard Hirigoyen dans La Gestion des entreprises familiales59.
D’après eux, cette préoccupation trouve une traduction concrète dans
le domaine des rémunérations, l’éventail des salaires apparaissant plus
serré dans les firmes familiales. « La question des rémunérations dans
ce type de structure pose la question du bénévolat dont font preuve
certains collaborateurs familiaux. » Et aussi, accessoirement, celle du
statut du conjoint.

Dans les PME, les niveaux d’autonomie et de responsabilité peuvent


aussi séduire.
D’après l'enquête du centre régional d’observation du commerce de
l’industrie et des services (CROCIS) de la chambre de commerce et
d'industrie de Paris (CCIP), 80 % des dirigeants de PME désirent
conserver leurs salariés, quelles que soient leurs fonctions, la durée de
formation et d’adaptation d’un nouveau collaborateur étant jugée
longue pour 41 % d’entre eux.
« Pour les PME, les principaux ressorts de fidélisation demeurent les
conditions de travail, la rémunération, la qualité des relations entre
salariés et direction, et la politique de formation », analyse Gaëlle
Jouanne sur www.chefdentreprise.com. « Cependant, 84 % des chefs
d’entreprise expriment leur difficulté à fidéliser les équipes. Près d’un
dirigeant sur deux souhaiterait, sans toujours le pouvoir, proposer des
rémunérations supérieures à ses salariés et insiste, surtout dans les
entreprises de taille moyenne, sur l’importance de pouvoir offrir des
évolutions de carrière au sein de l’entreprise. Ainsi, 70 % des
moyennes entreprises ont mis en place un système de rémunération
attractif. »

Pour remédier au problème de fidélisation des salariés, il faut donner


plus d’importance aux relations humaines, aux actions de formation
professionnelle, à la politique salariale, etc. Vincent Riss, DRH France de
GE Energy dont l’objectif premier affiché est d’attirer et de retenir les
salariés, estime même sur le site Journal du Net60 que « les managers
doivent être évalués sur leur aptitude à développer les gens ».

Quand ces leviers d’action ne suffisent pas à retenir les salariés ou à en


attirer de nouveaux, d’autres pistes devraient peut-être être exploitées.
« Beaucoup de TPE, implantées dans des zones géographiques en
déclin, déjà “surconsommatrices” de toute la gamme des contrats
aidés, des CDD et des contrats à temps partiel, ont de plus en plus de
mal à stabiliser leur main-d’œuvre et à trouver des personnels de
qualité », constate Patrick Burnel dans Formation professionnelle
continue61. « Dès lors, l’investissement formation devrait, pour elles,
s’avérer un élément de plus en plus important, voire prépondérant de
leur stratégie globale. Or paradoxalement, c’est plutôt le phénomène
inverse que l’on constate. »

La formation

« Les petites entreprises rencontrent toujours de véritables difficultés


de mise en application en matière de formation professionnelle »,
constate Agnès Paradas, enseignant-chercheur à l’université d’Avignon,
dans Management & Avenir62.

D’après l’étude Agefos PME de décembre 2009, le plan de formation


est corrélé à la taille de l’entreprise : 35 % des TPE en disposent contre
60 % des PME, 95 % pour celles de plus de cinquante salariés. L’étude
menée par Elyes Bentabet, Stéphane Michun et Philippe
Trouvé63 évoque quant à elle un « usage réduit des figures les plus
officielles de la formation continue. […] Toutes les études macro-
statistiques confirment régulièrement le déficit des TPE par rapport aux
autres catégories d’entreprises ».

Il existe malheureusement un certain nombre de freins à la formation


professionnelle dans les petites structures, ne serait-ce que pour
respecter les obligations légales en la matière. À commencer par la
difficulté éprouvée pour remplacer un salarié envoyé en formation :
« Le coût de remplacement du salarié envoyé en formation peut avoir
un effet dissuasif, notamment pour certaines entreprises de petite
taille », poursuit Patrick Burnel64. C’est pour cela qu’avait été instaurée
une prise en charge d’une partie du salaire du remplaçant sur la base
d’un forfait horaire de 50 % du Smic qui concernait les entreprises de
moins de cinquante salariés.
Cette aide avait connu peu de succès et la loi de finances pour 2008
l’avait supprimée. La loi du 24 décembre 2009 a réintroduit un tel
dispositif, mais l’a réservé aux entreprises de moins de dix salariés, à
titre expérimental jusqu’au 31 décembre 2011 et dans la limite de cent
cinquante heures par formation. « Il est prévu que le gouvernement
remette au Parlement, au plus tard le 30 septembre 2011, un rapport
sur cette expérimentation afin d’évaluer son impact sur l’accès à la
formation des salariés des TPE et d’envisager la pérennisation de ce
dispositif, en le modifiant, le cas échéant. »

Si d’après les auteurs de l’étude « Gestion des hommes et formation


dans les très petites entreprises », « la perturbation engendrée par
l’absence du dirigeant ou du salarié et le sentiment de perdre son
temps sont le plus souvent cités pour expliquer l’usage limité de la
formation continue », ils soulignent qu’« en général, ces formations ne
transforment pas radicalement le fonctionnement de l’entreprise. Mais
elles peuvent éventuellement faciliter la promotion sociale dans les
rares situations d’entreprises qui connaissent une croissance
significative ».
Et pour ceux qui seraient encore réticents à se séparer de leurs
employés, la formation à distance, à travers le Web comme le « e-
learning » ou encore des cours par correspondance peuvent constituer
une solution. En effet, quelques heures prises sur le temps de travail,
mais sur place, peuvent être plus avantageuses. Il existe des organismes
spécialisés comme Onlineformapro (www.onlineformapro.com) et une
plateforme Open Source de formation à distance et de travail
collaboratif : www.claroline.net.
Ce n’est pas non plus un hasard si certaines sociétés ont depuis
longtemps placé leur personnel au centre de leur politique de
développement, en dépit parfois des difficultés rencontrées. Et pas des
moindres : Danone, dont le chiffre d’affaires a cessé d’augmenter en
2009, n’a pas pour autant diminué ses budgets formation. Car comme
l’explique Muriel Pénicaud, directrice générale des ressources humaines
du groupe, « c’est justement en période de crise qu’investir sur les
hommes et les femmes est un choix stratégique très fort. Il devrait nous
distinguer clairement de nos concurrents et nous permettre de sortir en
position favorable de cette période “challengée”. Nous sommes
convaincus que la croissance du business et le développement des
hommes vont de pair. Quand vous investissez sur les collaborateurs,
leur implication et leur prise d’initiatives s’en trouvent décuplées, ils
sont partie prenante des transformations de l’entreprise ».
Cet engagement du géant français de l’agroalimentaire date de
quarante ans et repose sur la conviction que l’épanouissement des
hommes est à la fois la condition et la finalité de la croissance.
Selon le baromètre interne mené tous les deux ans avec l’institut Tower
Perrins, les résultats sont au rendez-vous puisque Danone enregistre un
taux d’engagement de ses salariés exceptionnel : 85 %, contre 78 %
en moyenne pour les autres grandes entreprises du secteur. Ce taux
indique la fierté d’appartenance, l’adhésion à la stratégie et au
management, la capacité à se mobiliser pour l’entreprise.

Il existe même des contextes, certes rares, favorables à la formation :


« Si la taille des entreprises peut être un frein à la mise en œuvre
d’actions de formation ambitieuses, en revanche, leur statut familial
agit comme un élément moteur », peut-on en effet lire dans La
À
Gestion des entreprises familiales65. « À ce titre, les PME familiales sont
un terrain propice au développement d’une logique d’investissement.
Le lien qui attache les collaborateurs à leur entreprise rend nécessaire
un entretien de leurs compétences. »

Or quelle que soit la taille de l’entreprise, utiliser des compétences


spécifiques ou en développer d’autres peut s’avérer utile, au même
titre que les produits et/ou services qu’elle propose ou les activités
qu’elle exerce. « La valeur économique d’une entreprise provient
autant des “compétences” qu’elle maîtrise que des “positions” qu’elle
occupe », écrit en effet Pierre Coureil dans Valeur ajoutée : construire
et développer les compétences de l'entreprise66.

Quelles que soient les raisons pour lesquelles les entreprises n’ont pas
recours à la formation, il existe des alternatives.
Le DIF (Droit individuel à la formation) est une modalité d’accès des
salariés à la formation existante, à côté des formations retenues par
l’employeur dans le plan de formation et du projet individuel du salarié
formalisé dans le cadre du congé individuel de formation (CIF, plus
long par définition).
Destiné à des formations relativement courtes, le DIF leur permet de
bénéficier d’actions de formation professionnelle continue, rémunérées
ou indemnisées, durant le temps de travail ou en dehors de celui-ci. Les
frais pédagogiques, qui correspondent au nombre d’heures auxquelles
les employés ont droit, ainsi que l’allocation de formation sont à la
charge de l’employeur, ce dernier pouvant les imputer sur sa
participation au développement de la formation continue. Rien
n’empêche l’employé d’entreprendre une formation à distance, bien au
contraire. Comme pour le reste, elle est soumise à un accord avec son
employeur.

É
Élisabeth Carpentier : « Faire de nos ressources humaines et de leur diversité un
avantage compétitif. »

Directeur des ressources humaines et de la communication interne chez Sodexo,


Élisabeth Carpentier détaille la politique et les actions menées par le groupe en la
matière, dont l’efficacité est soulignée par de nombreuses reconnaissances externes,
comme le classement au Dow Jones Sustainibility Index pour la sixième année
consécutive, ou encore l’entrée en 2010 dans le palmarès des Most Admired
Companies du magazine Fortune.

Quelles sont vos ambitions et votre stratégie en matière de ressources humaines ?


Il y a cinq ans, lorsque nous avons défini notre ambition pour les dix années à venir,
nous nous sommes fixés comme objectif stratégique de faire de nos ressources
humaines et de leur diversité un avantage compétitif. Pour y parvenir, nous nous
sommes fixés deux priorités qui guident nos actions : avoir des collaborateurs de
grande qualité, riches de leur diversité, en nombre et en compétences suffisants pour
répondre aux besoins de nos clients et à leurs attentes afin de réaliser notre
croissance et d’offrir une offre de services globale à nos clients ; être l’un des
employeurs mondiaux les plus appréciés de ses collaborateurs en développant
l’engagement de nos salariés.

Quel rôle les ressources humaines occupent-elles dans le groupe ?


Aujourd’hui, Sodexo emploie trois cent quatre-vingt mille personnes sur les cinq
continents, ce qui fait de nous le vingt et unième employeur dans le monde et le
deuxième employeur français dans le monde. Dans notre activité de services, les
hommes et les femmes sont au cœur de notre modèle économique, ce qui en fait
notre principal actif.
En effet, pour nos clients, au-delà des solutions et des « process », l’essentiel de
notre valeur réside dans notre capacité à manager des femmes et des hommes, à les
identifier et les recruter ; à les former et accompagner leur progression ; à les
mobiliser au service des consommateurs.
La qualité de nos services tient essentiellement au contact quotidien et direct que
97 % de nos collaborateurs ont avec nos clients et consommateurs, ils sont donc les
premiers ambassadeurs de la marque et les garants de la confiance de nos clients.
Près de 95 % de nos clients nous renouvellent leur confiance chaque année, ce qui
traduit la qualité de l’engagement de nos équipes.

Quelles actions et initiatives mettez-vous en œuvre ?


Pour atteindre notre ambition, nous nous appuyons sur quatre piliers majeurs : nous
sommes un ascenseur social depuis la création de Sodexo et nous voulons le rester ;
la formation et la promotion interne sont des facteurs clés de notre réussite, nous
continuons à investir ; nous sommes convaincus que la diversité et l’inclusion de nos
collaborateurs contribuent à la performance de l’entreprise, c’est un axe important ;
enfin, les valeurs de l’entreprise définies dès sa création font partie des fondamentaux
qu’il faut transmettre à tous nos nouveaux collaborateurs.
Quels efforts faites-vous en matière formation ?
Dans nos métiers de services, c’est un élément clé de notre réussite. En effet, nos
clients ont des attentes à la fois de plus en plus fortes et de plus en plus larges
comme le Facility Management, ce qui nous oblige à développer notre expertise sur
des techniques et des technologies plus pointues. Sur les deux dernières années, nous
avons dispensé 7,9 millions d’heures de formation, soit près de trois jours par
personne et par an, ce qui représente un investissement de 83 millions d’euros, soit
10 % de notre résultat opérationnel. Au cours de l’exercice dernier, près de neuf
salariés sur dix dans le monde ont bénéficié d’une formation.
Nous investissons à tous les niveaux : pour nos collaborateurs sur site jusqu’aux
membres du Comex qui consacrent tous cinq jours par an à des sessions de
formation. À titre d’exemple, nous avons cette année développé, dans le cadre de
notre université d’entreprise « Sodexo Management Institute », un programme
appelé CLIMB (Change Leadership Implementation Behaviours) à destination des mille
principaux dirigeants du groupe. Par ailleurs, nous investissons de manière importante
dans la formation à distance ou « e-learning », qui nous permet de toucher
rapidement et de manière homogène l’ensemble de nos collaborateurs. Aujourd’hui,
50 % des formations sur site aux États-Unis sont dispensées en e-learning.

Et qu’en est-il de l’intégration ?


Un grand nombre de nos employés qui travaillent sur site, lorsqu’ils nous rejoignent,
sont faiblement qualifiés. Au-delà d’un emploi stable et de conditions de travail
compétitives, nous mettons tout en œuvre pour faciliter leur insertion.
Ainsi, dans la plupart des pays où nous opérons, nous avons des programmes qui
permettent à nos employés d’apprendre la langue de leur pays d’accueil lorsqu’ils
sont immigrés, de progresser dans l’apprentissage de l’écriture et de la lecture
lorsqu’ils sont analphabètes. Nous avons aussi à cœur de leur permettre d’acquérir
des qualifications reconnues par le monde extérieur, pour diminuer leur vulnérabilité
sur le marché du travail. Ainsi en France, depuis cinq ans, chaque année deux cent
cinquante collaborateurs obtiennent un diplôme reconnu par l’État et à partir de
l’année prochaine, ce chiffre sera plus que doublé.

Quelle place les valeurs de Sodexo occupent-elles dans votre dispositif ?


C’est un véritable ADN du groupe, que nous devons partager avec ceux qui nous
rejoignent. Nos valeurs – esprit de service, esprit d’équipe et esprit de progrès – sont
simples et accessibles pour qu’elles soient partagées avec l’ensemble de nos
collaborateurs. Elles font partie des critères de recrutement et d’évolution. C’est de la
responsabilité des dirigeants de les diffuser largement, et cela fait partie de leur
évaluation.

Comment mesurez-vous vos progrès en matière de ressources humaines ?


Nous sommes dans une démarche de progrès continu et nous mesurons l’efficacité
de nos actions en suivant quatre grands indicateurs : le premier, c’est le taux de
fidélisation de nos collaborateurs. Pour 2009-2010, il est de 64 % pour l’ensemble du
personnel et de 83 % pour nos managers.
Le deuxième, c’est la promotion interne : 80 % de nos managers sont issus de la
promotion interne, ce qui démontre l’efficacité des formations et des
accompagnements déployés.
Vient ensuite la représentation des femmes : 20 % de nos dirigeants et 45 % de nos
managers sont des femmes. Nous nous sommes fixés comme objectif d’avoir 25 %
de femmes dirigeants en 2015.
Dernier indicateur que nous suivons, et l’un des plus importants pour nous :
l’engagement de nos collaborateurs. Au cours de l’exercice 2009-2010, nous avons
mené notre troisième enquête d’engagement auprès de cent treize mille de nos
collaborateurs. Le taux d’engagement a progressé de sept points par rapport à 2008.
Enfin, chiffre significatif, 85 % de nos collaborateurs déclarent Sodexo comme un
meilleur employeur que ses concurrents.
Pour continuer à progresser, nous menons de manière régulière des travaux de
recherche, des diagnostics et des benchmarks, tant internes qu’externes. Par ailleurs,
l’audit interne du groupe procède à des contrôles réguliers dans les pays et ces
contrôles font l’objet d’un rapport remis chaque année au conseil d’administration du
groupe.

Les conditions de travail


Les conditions de travail sont depuis très longtemps au cœur de la
performance de l’entreprise, puisque l’Organisation scientifique du
travail (OST) chère à Frederick Winslow Taylor tenait déjà compte, entre
autres, des conditions matérielles du travail.

La qualité de l’équipement, de l’aménagement est importante, « pour


que les salariés soient plus performants » d’après Odile Duchenne,
directrice générale de l’Actineo (l’observatoire de la qualité de vie au
bureau) sur Décideurs TV67. « Avant de se préoccuper des conditions
de travail, il faut pérenniser les emplois créés », lui rétorque Didier
Riahi, qui est pourtant bien placé puisqu’il est directeur général de
Welcome Office, une PME leader sur la vente de matériel de bureau
discount sur Internet. Ce genre de considérations explique que de
nombreuses études montrent que les PME soient les moins bien
équipées en la matière.

L’aménagement des locaux, leur personnalisation même, joue pourtant


un rôle non négligeable, l’open space étant souvent associé à l’« open
stress ». « Depuis 2001, nous étions organisés en open spaces. Nous
en avons tiré des conséquences. Pour améliorer les conditions de travail
et le bien-être des collaborateurs, apporter plus de qualité et de
convivialité, nous avons réfléchi avec des experts et des groupes de
travail de salariés. Ils ont repensé le mobilier, l'organisation des
bureaux, les salles de réunion », explique Vincent Riss, DRH France de
GE Energy, sur le site du Journal du Net68.
« Dans le cadre de notre démarche en faveur du bien-être des salariés,
nous proposons également des services à la personne de livraison de
fruits et légumes frais. Mais nous voudrions passer à la vitesse
supérieure et réfléchissons par conséquent à d'autres services de type
conciergerie d'entreprise. »

Car se sentir bien sur son lieu de travail augmente la productivité. C’est
ce qui explique que de plus en plus de petites entreprises prennent des
mesures organisationnelles pour faciliter le quotidien de leurs
collaborateurs.

D’après le baromètre 2010 de la conciliation entre vie professionnelle


et vie familiale, 90 % des sociétés de moins de cent salariés mettent en
place des règles plus ou moins simples de vie quotidienne comme
« éviter les réunions tôt le matin ou tard le soir ».
Celles de plus de mille salariés ne sont que 54 % à prendre ce critère
en compte (75 % entre 100 et 1 000 salariés). On peut aussi y lire que
les PME sont « plus actives que les grandes entreprises en matière
d’organisation du travail et de dialogue manager-collaborateur ».
Rien n’est anodin, pas même la pause-café qui a ses bienfaits pour le
climat dans l’entreprise : « Le café fait partie du menu d’un
management moderne », estime en effet Odile Duchenne.

Certaines avancées technologiques peuvent apporter un vrai plus en


termes d’efficacité. La mise en place d’un logiciel constitué de
plateformes collaboratives avec agendas, réseaux, espaces de stockage
partagés, ou l’intégration de différents outils collaboratifs peuvent être
bénéfiques, à condition toutefois qu’ils ne soient pas trop intrusifs et
ne puissent pas être assimilés à un « flicage ».
« Nos documents de travail sont mis en commun. Tout le monde
travaille sur le même document, ce qui évite l'envoi d'un nouveau mail
pour chaque modification », explique par exemple Cyril Masson, le
fondateur de la société de taxi motos Citybird, sur le site Journal du
Net69, avant de parler des projets présentés élaborés avec un autre
outil collaboratif et de la liste de tâches à accomplir (et leur
avancement), visible et modifiable par tous sur iPhone. « Tous ces
outils, souvent gratuits, nous font gagner beaucoup de temps. Comme
on suit l'avancement des projets, la réunion hebdomadaire est efficace.
Et dans une petite entreprise où tout le monde a tendance à être
polyvalent, cela évite qu'une tâche soit réalisée par plusieurs
personnes. »

La technophilie peut prendre des proportions plus importantes encore,


et même aller jusqu’à la dématérialisation, puisqu’il existe des
applications de centre de contacts en mode SaaS, permettant aux
salariés de prendre des appels depuis chez eux. C’est ce genre de
solutions logicielles qui, avec la généralisation de l’Internet à haut-débit
et la baisse des prix des ordinateurs, explique que le télétravail ait le
vent en poupe dans les petites entreprises.
Le baromètre 2010 de la conciliation entre vie professionnelle et vie
familiale montre en effet que 72 % des TPE et 46 % des sociétés
employant entre dix et cent salariés ont mis en place une solution de
télétravail, un quart seulement des entreprises de plus de mille salariés
proposant à leurs collaborateurs de travailler à distance. Les avantages
sont nombreux : le salarié perd moins de temps (et d’argent) dans les
transports, il subit moins de stress, d’où une amélioration de sa qualité
de vie. Sans parler du bonus écologique…
S’il perd en contrôle, l’employeur gagne en flexibilité, avec notamment
la possibilité d’embaucher des télétravailleurs indépendants (payés par
prestation), par exemple par teletravail.fr. Toutefois, la mise en œuvre
de cette solution demande de suivre des règles spécifiques expliquant
l’existence de consultants spécialisés comme Cap Teletravail
(capteletravail.fr), cabinet spécialisé dans l'accompagnement des
employeurs, des entreprises et des collectivités pour la mise en place du
télétravail : il faut bien la préparer et réfléchir aux besoins de
l’entreprise, aux outils de communication et outils collaboratifs, aux
coûts que cela représente et aux avantages potentiels. Il faut aussi
s’informer sur les risques juridiques, notamment en cas d’accident du
travail.

Cela demande aussi qu’il existe une réelle relation de confiance entre le
manager et son subordonné, et cela s’accompagne pour ce dernier
d’un risque non négligeable d’isolement.
Serge Le Roux : « Le télétravail permet une gestion plus fine et performante des
ressources de l'entreprise. »

Serge Le Roux est vice-président de l’Association française du télétravail et des


téléactivités, vice-président du Réseau de recherche sur l'innovation et senior
consultant pour CAP Télétravail.

Le télétravail peine à s’imposer en France. Pourquoi, selon vous ?


Quand on pose la question, c'est un peu la patate chaude : les employeurs pensent
que les salariés n'en veulent pas, particulièrement le management intermédiaire ; les
salariés soupçonnent un mauvais coup de la direction, en termes de contrôle
accentué sur leur travail, d'isolement. On ressent ici les conséquences de la faiblesse
du débat public sur la question, elle-même référée au peu de recherches scientifiques
sur le sujet et au manque d’expression de la demande sociale. Alors même qu'un
accord national (et aussi européen) interprofessionnel existe sur le sujet, signé par la
totalité des organisations syndicales d'employeurs et de salariés !

Pourquoi les petites entreprises ont-elles intérêt à avoir recours au télétravail ?


C’est d’abord une question de concurrence et de compétitivité : si on ne le fait pas,
d’autres le feront (ils le font déjà dans de nombreux pays) et nous nous en mordrons
les doigts. La dématérialisation des activités progresse chaque jour et donc, de plus
en plus de choses que l’on était obligé de faire dans un lieu central deviennent
désormais réalisables à distance.
Le télétravail peut présenter des effets réellement bénéfiques pour l'ensemble des
intervenants dans la vie économique. Pour les salariés, les gains sont à trouver dans la
réduction des déplacements domicile-lieu de travail, dans la meilleure maîtrise du
temps et du travail : ils en ont assez de devoir se déplacer pour aller travailler, souvent
sur un ordinateur, alors qu’ils ont le même chez eux ; ils passent du temps dans les
transports, dans les bouchons, dépensent beaucoup d’argent, sont fatigués, stressés,
alors que… alors qu’ils savent que l’on pourrait faire autrement : travailler à la
maison, ou dans un centre de proximité, économiser du temps et de l’argent, être
plus disponible pour leur famille et pour leur… entreprise ! De fait, des proportions
élevées de salariés se déclarent intéressés par des solutions économisant les
déplacements pendulaires quotidiens, mais malheureusement, jusqu’à présent, peu
s’expriment ouvertement sur le sujet.

Qu’est-ce que les entreprises ont à y gagner ?


D’abord des salariés plus en forme, plus attentifs à leur travail, moins dérangés par la
promiscuité du lieu de travail et les déperditions inévitables qui s’y déroulent :
calculez vous-même le ratio temps d’activité/temps de présence : celui qui est au-
dessus de 80 % peut arrêter de lire cet article ! Selon une étude américaine, on est
dérangé en moyenne cent vingt-cinq fois par jour.
Pour les chefs d'entreprise, le télétravail permet généralement une gestion plus fine
des ressources de l'entreprise, en particulier par l'incitation renforcée à l'introduction
de l'obligation de résultat dans les actes de travail, ainsi que des réductions des
coûts : les surfaces, les solutions à trouver en cas d’absentéisme ou de perturbation
extérieure, la fidélisation des collaborateurs, un recrutement plus large…
Cela peut aussi permettre d’instaurer un nouveau style de vie dans l’entreprise, plus
mobile, plus jeune, plus écolo, plus dynamique, plus vivant, plus attrayant.

Est-ce cher ? Compliqué ?


Oui et non. Si on fait bien les choses, le retour sur investissement est quasi immédiat.

Quelles sont les implications managériales de l'introduction du télétravail dans une


entreprise ?
Elles sont relativement nombreuses, mais il faut signaler que ces changements,
attribués à l’introduction du travail à distance, visent en fait des déterminations plus
larges, qui ont à voir avec les transformations contemporaines du contenu du travail
et des formes de sa réalisation, comme le comprennent bien les jeunes de la
génération Y, et moins bien les hiérarchies en place.
On peut signaler : la mesure de la distanciabilité des opérations de travail ; la
sélection des candidats au télétravail ; l’organisation de la dualité des modes
d’organisation du collectif de travail ; la mise en pratique de l’obligation de résultats
(travail sur objectifs) : objectivation des opérations de travail, mesure des charges
individuelles, implications informatiques, logistiques, etc. ; la gestion (positive) des
tendances divergentes des logiques individualisantes avec les nécessités holistiques,
des constructions fondées sur la confiance combinées avec le besoin de contrôle, de
la valorisation des pratiques autonomes (versus les risques d’isolement) des
dialectiques distanciel/présentiel, oral/écrit, des potentialités dynamiques émergentes
(versus les résistances statiques) etc. ; la détection des risques et des signaux faibles
de dysfonctionnement ; la gestion des retours participatifs du personnel.

La gestion des difficultés

La gestion du personnel, c’est aussi, bien sûr, celle des fins de contrat
(démissions, licenciements et autres ruptures conventionnelles). Plus
encore que pour d’autres aspects de la GRH, un nouveau champ
d’action s’ouvre : celui du droit du travail qui, d’après Jacqueline
Socquet-Clerc Lafont70, s’avère « peu adapté, voire totalement
inadapté, aux plus petites structures ».

Le recours à un conseil peut être précieux. D’autant plus que, d’après


Annabelle Jaouen et Olivier Torrès71, l’autre face de la pièce
« proximité » peut se révéler traumatisante pour le chef d’entreprise :
« La proximité crée des obligations réciproques et rend la décision de
licenciement plus difficile à vivre sur le plan émotionnel. »

Et que dire des démissions qu’il n’aurait pas prévues ? Il devient difficile
pour lui de rester objectif au moment de négocier un départ. D’après le
baromètre des PME et TPE du Conseil supérieur de l'ordre des experts-
comptables, réalisé par la TNS Sofres en avril 2010, la gestion du
personnel est une source de stress pour 67 % des patrons.
La moitié des dirigeants de PME et TPE se déclarent dépassés par tout
ce qu'ils ont dû faire depuis un an. « Dans une PME, les difficultés de
trésorerie sont des problèmes récurrents. Les patrons vivent avec »,
analyse Olivier Torrès dans Les Echos72. « Mais lorsqu'ils doivent
licencier une personne avec laquelle ils travaillent depuis dix ans, cela
crée un traumatisme. […] Quand un salarié quitte l'entreprise, il n'est
pas rare que cela génère un profond sentiment de trahison chez son
dirigeant. »
C’est encore plus manifeste dans une structure familiale, où le
dirigeant n’est pas toujours juste, ce qui peut inciter les « outsiders » à
se diriger vers la sortie. « La famille peut aussi devenir un cercle très
fermé, instaurant une gestion clanique, notamment en matière de
gestion des ressources humaines (distribution exclusive des postes à
responsabilité au sein de la famille) ou de fixation des objectifs (refus
de la croissance pour préserver un contrôle familial) », écrivent
Annabelle Jaouen et Olivier Torrès73, tandis que pour Jérôme Caby et
Gérard Hirigoyen74, « l’interaction famille-entreprise est une source de
contrainte supplémentaire en matière de relations humaines. En
position d’acteurs et d’observateurs, les collaborateurs étrangers au
cercle occupent une position inconfortable. Ils subissent les conflits qui
traversent la famille et qui viennent se déverser dans l’entreprise ».

Cela peut prendre une dimension encore plus dramatique dans le cadre
d’une cessation de paiement, d’un dépôt de bilan ou d’un
redressement, domaines où le dirigeant navigue à vue.
Là encore, le recours au conseil peut s’avérer utile, voire indispensable,
puisque seulement 2,5 % des sociétés placées en dépôt bilan voient le
bout du tunnel.
[BIEN CONSEILLÉ, SOLIC A SURVÉCU À LA CRISE]
Premier groupe français indépendant de conseils en ressources humaines et recrutement
spécialisé, Solic affichait 10 millions d’euros de chiffre d’affaires et 2 millions
600 000 euros d’actif net en 2006… « L’entreprise réalisait un peu plus de 40 % de
croissance par an, depuis cinq ans nous étions dans une dynamique de croissance
extrêmement forte avec beaucoup de création d’emplois, raconte Nicolas Doucerain. À
tel point que quelques mois avant la crise, le gouvernement de Dominique de Villepin
nous avait remis le diplôme de Gazelle, décerné aux deux mille PME les plus
performantes, les plus rentables et créatrices d’emploi. »
Mais voilà, la crise « s’est abattue sur Solic comme une vague, balayant des années
d’efforts, de réussite et de confiance en l’avenir », comme l’écrit le président de Solic
Groupe dans Ma petite entreprise a connu la crise75. Le flot d’annulations ou de reports
de missions de recrutement est inarrêtable.
« Quand nous nous sommes aperçus de l’effondrement de l’économie et de l’impact sur
nos contrats, il a fallu prendre des mesures draconiennes qui ont été, avant les
licenciements, de baisser ma rémunération de 40 % et de demander à l’ensemble des
actionnaires et membres du comité exécutif de faire de même, de supprimer toutes les
voitures de fonction, les notes de frais. Nous avons réduit tous les frais généraux, et
malheureusement, comme je me suis vite aperçu que ça n’allait pas être suffisant, c’est
seulement après que nous avons initialisé le premier des quatre plans de licenciements.
C’est dû à la législation, car elle aurait voulu que l’on fasse plutôt un PSE [plan de
sauvegarde de l’emploi], qui mécaniquement n’était pas possible, était de toute façon
trop long et risquait de tous nous mettre en péril puisqu’il s’accompagne de contraintes
trop fortes, notamment sur le plan juridique. […] Notre inspection du travail était
injoignable pendant trois semaines. J’ai dû aller physiquement dans leurs locaux et faire
le pied de grue devant un bureau pendant deux heures pour avoir un rendez-vous et
repartir avec des données précises. »
Nicolas Doucerain est entré bien malgré lui dans un domaine où ses compétences ont
atteint leurs limites. « J’ai vécu avec Solic une situation à laquelle je n’étais vraiment pas
préparé », explique-t-il sur le site de New CFO76. « Premiers licenciements, fermeture de
bureaux, nouveaux licenciements, tout s’enchaîne sur un rythme effréné, en devant
composer avec des réglementations complexes, des banquiers soupçonneux, des
inspections du travail débordées, et des conseils juridiques parfois dépassés. Jusqu’à ce
moment de juin 2009 où le dépôt de bilan s’est imposé comme la seule solution pour
espérer continuer. Et là, nous sommes rentrés dans une nouvelle aventure en termes de
gestion – car il s’agit bien d’un acte de gestion – à laquelle aucune école n’a jamais
formé aucun dirigeant, du moins sur le plan pratique. »
Heureusement, il explique avoir été bien conseillé par son directeur administratif et
financier, essentiel dans le cadre d’un redressement selon lui pour optimiser la trésorerie,
qui d’après lui « se révèle une fois de plus le véritable nerf de la guerre pour la PME », et
aussi par un avocat. « L’administrateur nommé par le tribunal de commerce a été
particulièrement efficace, nous nous sommes bien entendus avec lui et il a joué son rôle
parce que j’ai été bien épaulé par un conseil externe qui a surtout su m’expliquer, avant
même que je dépose le bilan, les différentes phases, les différentes modalités, comment
ça allait se passer, quel allait être le coût, la relation ou autre. Mine de rien, ça permet de
voir les choses avec un peu plus de sérénité. C’est vrai qu’on perd son pouvoir, on perd
sa signature, et pourtant c’est une période importante pour bien orchestrer, bien déposer
son bilan entre guillemets, pour laisser un maximum de chances à l’entreprise de
rebondir après. »
Après avoir compté seulement vingt-huit collaborateurs au pire de la crise, Solic en a
embauché seize nouveaux.

Tous ces éléments – formation, entretiens individuels, politique de


rémunération, etc. – et le dialogue, sincère, entre les différents acteurs
définissant notamment les objectifs de l’entreprise, s’ils sont menés à
bien vont leur permettre d’être performants et de les remplir.

D’après Émile-Michel Hernandez77, « la gestion des ressources


humaines nécessite sa formalisation en une véritable fonction. Il
devient essentiel pour la survie et le développement de l’entreprise
d’intégrer la GHR aux préoccupations stratégiques, et d’aborder les
problèmes humains de l’entreprise en termes de ressources et non plus
uniquement en termes de coût. D’autre part, à ce stade (de la
moyenne entreprise), le dirigeant doit se détacher de plus en plus des
tâches quotidiennes d’exécution pour se consacrer à ce qui est alors
son véritable rôle : la direction générale. Le créateur doit laisser la place
au manager, au gestionnaire, ce qui, pour lui, n’est pas toujours
évident. Son rôle d’exécutant doit céder la place à un rôle de
coordinateur, d’animateur ».

33. Gestion des ressources humaines dans les PME, op. cit.
34. Jean-Marie Peretti, Tous DRH : les responsabilités ressources humaines des cadres et
dirigeants, Paris, Éditions d'Organisation, 2006.
35. Maurice Thévenet, Cécile Dejoux, Éléonore Marbot, Étienne Normand, Anne-Françoise Bender,
Fonctions RH : politiques, métiers et outils des ressources humaines, Paris, Pearson Education,
2009.
36. « Motivations et clés de succès de l’externalisation RH », juin 2008, www.markess.fr
37. www.focusrh.com
38. Les Très petites entreprises, op. cit.
39. Elyes Bentabet, Stéphane Michun, Philippe Trouvé, « Gestion des hommes et formation dans
les très petites entreprises », Centre d’études et de recherches sur les qualifications, 1999,
Étude numéro 72.
40. Les Très petites entreprises, op. cit.
41. Yves Chassard, Christophe Bouruet, « Gestion du personnel et de l’emploi dans les petites
entreprises », Regards sur les PME, n° 3, 2003.
42. Bertrand Duchéneaut, Enquête sur les PME françaises : identités, contextes, chiffres, Paris,
Maxima, 1995.
43. www.focusrh.com
44. Anne Chevallier, Monique Coiffard, Willy Guillaume, Gestion RH des PME-PMI : guide
pratique du dirigeant, Paris, Liaisons, 2004.
45. www.journaldunet.com
46. www.focusrh.com
47. Op. cit.
48. Brad Sugars, Coaching pour faire décoller votre entreprise, Paris, Maxima, 2007.
49. Op. cit.
50. Laurence J. Peter, Raymond Hull, Le principe de Peter ou Pourquoi tout va toujours mal,
Paris, LGF, 2009.
51. Enquête sur les PME françaises, op. cit.
52. Op. cit.
53. Op. cit.
54. Op. cit.
55. Jean-Pascal Lapra, L’Evaluation du personnel : pour une nouvelle approche, Paris, Liaisons,
2006.
56. Op. cit.
57. Op. cit.
58. Stéphanie Jallut, Dominique Bourdiau, « La Gestion des ressources humaines au sein des
petites entreprises », www.oeconomia.net, 2005.
59. Jérôme Caby, Gérard Hirigoyen, La Gestion des entreprises familiales, Paris, Economica,
2002.
60. Op. cit.
61. Patrick Burnel, Formation professionnelle continue, vol. 2, Obligations financières et
juridiques de l’entreprise, Paris, Lamy, 2010.
62. Agnès Paradas, « Identifier les compétences à renforcer, difficultés d’application et
réponses possibles en matière de formation professionnelle dans les petites entreprises »,
Management & Avenir, n° 21, 2009/1.
63. « Gestion des hommes et formation dans les très petites entreprises », op. cit.
64. Formation professionnelle continue, vol. 2, Obligations financières et juridiques de
l’entreprise, op. cit.
65. Op. cit.
66. Op. cit.
67. www.decideurstv.com
68. Op. cit.
69. Op. cit.
70. Création et pérennisation de l'entreprise de petite taille, op. cit.
71. Les Très petites entreprises, op. cit.
72. Laurance N'kaoua, « Les patrons de PME et de TPE à l'épreuve du stress », op. cit.
73. Les Très petites entreprises, op. cit.
74. La Gestion des entreprises familiales, op. cit.
75. Nicolas Doucerain, Ma petite entreprise a connu la crise, Paris, Bourin éditeur, 2011.
76. www.new-cfo.fr
77. Émile-Michel Hernandez, L'Entrepreneuriat : approche théorique, Paris, L’Harmattan, 2001.
3- DE LA GESTION D’UN INDIVIDU À CELLE D’UN
GROUPE

« On ne gère pas les gens. Il s’agit de les guider », affirme Peter


Drucker dans L’Avenir du management78. « L’objectif est de rendre
productifs les points forts et le savoir de chaque individu. » C’est là que
la GRH atteint ses limites et que le management prend son sens,
d’autant plus dans les petites entreprises, leur taille pouvant jouer en
faveur du dirigeant s’il manage un minimum son équipe.

« Les formules fortes pour illustrer la convivialité liée à la petite taille ne


manquent pas », peut-on lire dans Enquête sur les PME françaises :
identités, contextes, chiffres79. D’après les auteurs de Gestion RH des
PME-PMI : guide pratique du dirigeant80, « le sentiment
d’appartenance à la collectivité de l’entreprise, la valorisation de
l’initiative et la proximité avec le dirigeant de l’entreprise sont des
atouts largement reconnus aux PME ».

Pour Annabelle Jaouen et Olivier Torrès, il existe « deux aspects


fondamentaux du management des TPE : les effets de proxémie, dont
de nombreux travaux en PME sont déjà illustratifs ; les effets de paroi,
moins connus mais néanmoins nécessaires à la compréhension des
TPE », écrivent-ils dans Les Très petites entreprises81. « La petitesse crée
donc les conditions d’un renforcement des liens entre les acteurs. Le
dirigeant connaît personnellement ses salariés mais aussi ses clients, ses
fournisseurs, son banquier… Plus la taille est petite, plus il est probable
que les liens entre les différentes parties prenantes de l’entreprise
soient fréquents, intenses, voire intimes. » Mais pour eux, la petitesse
augmente aussi le risque d’enfermement.
Là encore, la responsabilité du patron peut être lourde, bien plus qu’il
ne l’imagine : « Les règles internes, les normes de comportement sont
fortement déterminées par le dirigeant : au travers de ses déclarations,
de sa “conception des choses”, de son comportement au travail et
hors travail, des habitudes et des “usages maison” ou hérités d’une
profession. L’ensemble induit le contexte général de travail », explique
Henri Mahé de Boislandelle82.

Heureusement, comme d’autres, vous pouvez en prendre conscience et


agir en conséquence.

En préface de Quand les RH construisent la croissance83, Gabrielle


Rolland explique que « les responsables, conscients du désengagement
des salariés, sont à la recherche de pistes, d’axes de travail qui
permettent de déboucher sur une autre manière de se développer ».
Pour elle, les collaborateurs « ne seront prêts à relever le pari d’une
entreprise capable de grandir avec eux qu’à condition d’avoir des
patrons, des leaders, des dirigeants qui montrent l’exemple, qui font du
courage une vertu première, qui ont compris que diriger, c’est
communiquer, que manager, c’est créer des liens, et qu’être patron,
c’est donner envie d’avoir envie de grandir ».
L’auteur de l’ouvrage, Serge Blanchard, y présente un modèle
d'organisation d'entreprise liant la croissance générale à l'appétit de
développement de l'individu. Pour lui, la prospérité de l'entreprise
devient mécaniquement la somme du capital de performance propre à
chaque individu la composant.

Cette vision implique une nouvelle manière de concevoir et d’évaluer


l'entreprise, où les RH sont un actif unique et flexible (ou adaptif) de
l’entreprise. « Entreprise et collaborateur sont partenaires dans le
développement du collaborateur et la croissance de l’entreprise suit
directement ce développement. »

Dans L’entreprise durable84, Philippe Détrie appelle de ses vœux un


fonctionnement complètement différent. « L’objectif, tandis que se
profilent de nouvelles mutations technologiques favorisant de nouvelles
formes d’entreprises, rendant les marchés encore plus volatils et les
individus plus libres de leurs choix, est de cultiver la flexibilité
permettant à l’entreprise de rester adaptable. Si cette adaptabilité
repose sur une organisation modulaire et réticulaire, pouvant se
reconfigurer rapidement en fonction des événements, elle repose avant
tout sur la capacité de l’entreprise à mobiliser les énergies individuelles
autour d’un but commun. »
Cela rend un bon management d’autant plus nécessaire dans les
petites entreprises, où l’adaptabilité est indispensable…

Comprendre les autres : gérer les individus/le(s)


groupe(s)

Pour comprendre les autres, le dirigeant doit avant tout savoir les
écouter, mais aussi se rendre disponible, attribuer du crédit aux avis
fondés, savoir déléguer, être respectueux, avoir (ou acquérir) des
compétences techniques et une expérience du terrain minimale.

Et il ne doit pas négliger l’importance des interactions au sein de


l’entreprise. « L’idée répandue selon laquelle la communication dans
les petites et moyennes structures ne pose pas de problème de par son
existence satisfaisante quasi spontanée est fausse », constate Gérard
Regnault dans La Communication interne dans une PME85. « Se parler
banalement ne veut pas dire communiquer et encore moins travailler
ensemble. De trop nombreux responsables de PME considèrent sans
grand intérêt la prise en compte des échanges avec leurs salariés,
comme s’ils l’estimaient faite pour d’autres qui ont plus de temps ; ils
ont à l’évidence tort car la motivation du personnel, la progression de
ses compétences, ses capacités d’innovation et de performance, sont
très largement dépendantes de sa compréhension des objectifs et de la
stratégie, de sa participation aux différents challenges. »

j Le travail en équipe

Dans Animer une équipe dans les PME aujourd'hui86, ce même Gérard
Regnault traite sous un angle opérationnel des différentes
compétences que doit avoir l'animateur d'équipe dans une PME, quel
que soit son secteur d'activité. Il met en avant la nécessité de « savoir
analyser et résoudre des problèmes ».

Mais le management moderne trouve sa source dans des travaux


beaucoup plus anciens, comme ceux d’Henri Fayol, qui avait appelé sa
méthode « administration » et cherché à la transmettre dès 1900.
Selon lui, celle-ci était chargée de cinq tâches pour administrer les
hommes : prévoir, organiser, commander, coordonner, contrôler, ou
POCCC.
Vint ensuite Octave Gelinier notamment, qui édicta les règles d’une
bonne coordination :
• le chef tient le même discours à tous ses collaborateurs ;
• le chef ne prend pas de décision importante concernant plusieurs
collaborateurs sans que le problème ait été évoqué en réunion du
groupe ;
• en cas d'urgence, les personnes concernées sont consultées
individuellement et la décision est évoquée à la réunion suivante ;
• le chef refuse de se faire extorquer une décision importante dans un
entretien particulier ;
• tous les membres du groupe peuvent soumettre à la discussion les
problèmes qui leur paraissent importants ;
• le chef lutte contre toute rétention d'information, abstention, lutte
interne, absence de coopération ;
• le chef tient tous les membres du groupe solidairement responsables
des succès et des échecs ;
• les méthodes de travail font l'objet de débats et d'évaluation ;
• en cas de désaccords, le chef prend ses responsabilités et le fait
savoir.

De nombreux autres apportèrent leur pierre à l’édifice comme Kurt


Lewin, ce psychologue allemand émigré aux États-Unis auquel on doit
le concept de « dynamique des groupes ». Des travaux qui aujourd’hui
encore ont des applications dans le travail en équipe, qu’il s’agisse
d’animation, de favoriser la coopération, de la gestion des projets ou
de la conduite de réunion.

À
À ce sujet, nous ne saurions trop mettre l’accent sur la préparation : il
faut bien définir l’objet de chacune, ainsi que ses objectifs et sa durée,
son programme et les procédures qui vont être utilisées ; il ne faut pas
non plus négliger les paramètres physiques – aménagement de la salle,
fonctionnement des équipements, rédaction et diffusion de l’ordre du
jour.
Pendant la réunion à proprement parler, il faut veiller à énoncer les
objectifs, synthétiser les réponses, annoncer des actions, distribuer
équitablement la parole puis établir ensemble le compte rendu, qu’il
conviendra ensuite de diffuser avant de mettre en place les actions.
Attention cependant à la « réunionnite », car des réunions bien
préparées et menées à bien peuvent être voraces en temps.
[LE REVERSAL DAY À LA RESCOUSSE]
Des actions plus ou moins ponctuelles peuvent favoriser la cohésion comme le Reversal
Day, un concept anglo-saxon d’échange de postes de travail par tirage au sort le temps
d’une journée. C’est le cas chez le groupe d'agences de publicité de proximité Sioux, qui
y a recours tous les ans.
« Il n’y a aucune réticence dans la mesure où c'est finalement une occasion presque
inconsciente pour chacun de discuter avec son collègue et de mieux comprendre ce qu'il
fait tout au long de la journée. Grâce à cette expérience, chacun change de
comportement car on apprend à connaître les autres postes et leurs difficultés. C’est un
outil de management très concret, peu coûteux, et qui permet de détecter en amont ce
qui ne va pas », estime Emmanuel Debuyck, le directeur du groupe, sur le site d’Agir
Magazine87.
« Mais c'est surtout sur le long terme que l'on mesure l'intérêt de cette journée car on
constate que le climat s'apaise. C'est un peu comme pratiquer un sport ensemble pour
mieux se connaître. Dans le cas du Reversal Day, non seulement on se connaît mieux,
mais on se connaît mieux dans son environnement professionnel. L'esprit d'équipe est
renforcé, les relations interpersonnelles et la circulation de l'information sont améliorées.
C'est d'ailleurs cette faculté de l'opération à réduire les conflits, voire à les annihiler, qui
m'incite à reproduire cette opération depuis dix ans. »
Il faut tout de même prendre quelques précautions, et notamment faire un débriefing, ne
pas échanger des postes équivalents, s’assurer que chacun se prête au jeu et
éventuellement prévenir les clients.
Cet outil semble de plus particulièrement bien adapté aux petites entreprises : « Pour un
fonctionnement optimal, l'effectif de la société ne doit pas dépasser cinquante
personnes », explique Caroline Le Moigne, fondatrice et gérante de l'agence de
communication Les Têtes chercheuses, dans un article de L’Expansion88. « Il permet
d'optimiser les processus, d'améliorer la communication intra-entreprise, ce qui génère
une meilleure productivité. »

j La communication interne

« Communiquez-vous avec vos collaborateurs, abordez-vous


régulièrement avec eux d’autres sujets que ceux qui sont directement
liés à leur tâche ? » demande Jean-Philippe Tixier dans 10 points clés
pour réussir89. « Savez-vous ce que cela coûte de ne pas le faire ? »

Comme le constate Gérard Regnault dans Animer une équipe dans les
PME aujourd'hui90, « lorsque l’on interroge le personnel
d’encadrement sur son emploi du temps, il apparaît dans la majorité
des cas qu’il consacre entre 50 à 70 % de ses heures au travail à
communiquer ». Or d’après Brad Sugars91, la communication « c’est
l’huile que vous mettez dans les rouages pour que l’équipe puisse
continuer à avancer, et vous n’en mettez jamais trop ».
Il est donc vital de mettre en place une communication interne digne
de ce nom. « Une idée largement répandue par les dirigeants consiste
à mettre en avant le fait qu’elle ne pose pratiquement pas de problème
au sein des petites structures, du fait de la bonne connaissance et de la
proximité des gens », affirme encore Gérard Regnault dans La
Communication interne dans une PME92. « Cette appréciation
nécessite beaucoup de nuances car si un petit nombre peut faciliter les
contacts entre les personnes, il ne garantit pas les nécessaires échanges
sur des sujets nombreux et importants relatifs à la vie de l’entreprise et
de ses salariés. »

Il convient de mettre en œuvre un certain nombre d’outils : notes,


réunions, journal interne, livret d’accueil, entretiens individuels,
plaquette, Intranet, etc.
Pour Robert Papin93, il faut aussi multiplier les communications
informelles. « Si vous êtes un supporter de la participation, alors tôt ou
tard vos collaborateurs se comporteront comme vous et le système
officiel d’information ne perdra pas son efficacité s’il existe de multiples
réseaux informels de communication. »
Il conseille aussi d’agencer les locaux de telle sorte que les individus
puissent fréquemment s’y croiser, d’aménager une salle d’information
où le personnel pourra se détendre, sans oublier le restaurant ou la
cantine d’entreprise : selon lui, il est souhaitable de remplacer les
petites tables par des grandes, d’éviter d’y manger entouré par ses
collaborateurs directs, de prendre une place au hasard en espérant que
les autres vous imiteront. « Donnez à vos subordonnées la possibilité
de se rencontrer fréquemment, d’une manière informelle et non bridée
par la hiérarchie. »

Le plan d’action, qui détaille qui fait quoi, quand et comment, peut lui
aussi s’avérer bénéfique. « Lorsque je communique à mon équipe un
ensemble clair de règles à suivre, il est plus facile de faire son travail »,
poursuit en effet Brad Sugars.
Mais cela peut s’avérer difficile, même dans les TPE où, d’après Henri
Mahé de Boislandelle94, « la communication entre le dirigeant et le
personnel est directe et fréquente. Entre les membres du personnel il
en est de même, qu’il s’agisse des besoins d’information dans le cadre
du travail ou d’échanges informels. L’information se diffuse très vite,
les relations revêtent souvent un caractère affectif – on aime ou on
n’aime pas quelqu’un ».

Pour les auteurs de Management, stratégie et organisation95, les


propriétaires dirigeants retiennent l’information et font peu participer
leurs employés à la vie de l’entreprise, satisfaits de leur sort en raison
de leurs tâches, plus variées que dans un grand groupe bureaucratique,
mais incapables d’initiative quand il conviendrait d’en prendre.
Le comportement du dirigeant ou de l’équipe dirigeante peut alors
revêtir une importance capitale. « Même si une société à effectif réduit
a plus d’aisance pour fluidifier la communication interne et résoudre
certains conflits, dans la plupart des PME et a fortiori dans les TPE ou
entreprises individuelles et familiales, le dirigeant est investi d’un
pouvoir sans partage : il est à la fois directeur de production, financier,
commercial, administratif et responsable des ressources humaines. Il est
donc plus délicat de le convaincre de se démettre d’un pouvoir absolu,
aspect qui pourtant lui serait plus profitable, en allégeant le poids de
ses tâches et un emploi du temps souvent très lourd », écrivent
Annabelle Jaouen et Olivier Torrès96.

Dès lors, le problème de la délégation se pose plus souvent dans les


petites entreprises. « Le dirigeant de TPE est avant tout animé d’un
désir d’indépendance, ce qui accentue son souhait de ne pas grandir.
La croissance peut également être associée à une perte de contrôle du
dirigeant sur son entreprise et pose le problème de la délégation, le
dirigeant ayant généralement du mal à déléguer », poursuivent
Annabelle Jaouen et Olivier Torrès. Pour eux, toute perspective de
délégation risque d’être ressentie comme une perte d’autonomie et
d’identité.
Déléguer, que ce soit de façon temporaire ou permanente, peut
pourtant s’avérer utile pour le chef d’entreprise ou manager et pour le
délégataire, qui se trouve ainsi responsabilisé. « Il est nécessaire de
fournir le maximum d’informations au collaborateur sur ce qu’on
attend de lui (les objectifs à atteindre qui peuvent d’ailleurs être
discutés), les moyens et pouvoirs dont il disposera (qui peuvent aussi
être négociés) et, le cas échéant, ce que peut lui procurer à court ou
moyen terme la réussite de la délégation (il semble normal qu’un
salarié puisse, d’une façon ou d’une autre, tirer profit d’une ou de
plusieurs actions complémentaires qu’il aura acceptées ou réussies) »,
écrit Gérard Regnault dans Animer une équipe dans les PME
aujourd'hui97. « En réalité, le délégataire doit s’approprier le projet et
on peut parler à ce stade d’une véritable négociation du contrat de
délégation entre les parties concernées. »

Il faut préciser les conditions du déroulement et du contrôle de la


délégation : degré de liberté, contrôles, concertation. Le degré de
liberté étant, on l’imagine aisément, relativement important puisque le
responsable délègue souvent dans un premier temps par manque de
temps.
Pour Jean-Philippe Tixier, déléguer « cela veut surtout dire que le
manager délègue sa confiance à ceux qui l’entourent ». Il souligne que
ne pas faire confiance en demandant sans cesse où en est l’état
d’avancement du dossier conduira à démotiver le salarié.

Les auteurs de Gestion RH des PME-PMI98 proposent la grille suivante


pour déterminer si vous savez déléguer.
QUE PENSEZ-VOUS DES AFFIRMATIONS
OUI NON
SUIVANTES ?
1) Déléguer, c’est faire confiance.
2) On ne peut compter que sur soi-même.
3) Déléguer, c’est d’abord motiver ses collaborateurs.
4) On peut toujours apprendre.
5) Il faut encourager la prise d’initiative.
6) En déléguant, je peux prendre du recul.
7) Je dois garder le contrôle pour éviter les
dysfonctionnements.
8) Mes collaborateurs sont compétents.
9) Si je délègue, je n’aurai alors plus rien à faire.
10) Confier un dossier compliqué, c’est montrer ses limites.
Résultats

Comptez 1 point pour chaque « oui » aux affirmations 1, et 3 à 8.


Comptez 1 point pour chaque « non » aux affirmations 2, 9 et 10.
Si le total des points est supérieur à 8, vous reconnaissez l’utilité de
déléguer. En dessous, vous devez apprendre à faire confiance, vous
gagnerez en efficacité !

Le reporting, qui pour un employé est l'opération consistant à faire


rapport de son activité aux personnes chargées de le superviser, peut
lui aussi avoir cet effet quand il est trop poussé.
C‘est ce que montre l’enquête de 2009 du cabinet britannique
Alexander Proudfoot. Selon celui-ci, le reporting et les tâches
administratives annexes représentent 40 % de l’activité des managers
français, contre 34 % en moyenne dans le monde. Ils passent donc
presque autant de temps à commenter leurs actions qu’à agir…
« Cela se fait notamment au détriment de la gestion des équipes,
auxquelles ils ne consacrent désormais que 30 % de leur temps »,
estime Claude-Emmanuel Triomphe, directeur de l’Association travail
emploi Europe société (Astrees), dans un article publié sur le site
Capital.fr. « Le développement des organisations matricielles et du
reporting permanent contribue au sentiment de perte d’autonomie,
d’efficacité et d’utilité des équipes », estiment pour leur part les
auteurs du rapport « Bien-être et efficacité au travail », Henri
Lachmann (président du conseil de surveillance de Schneider), Christian
Larose (vice-président du Conseil économique, social et
environnemental) et Muriel Pénicaud (DRH de Danone), fait à la
demande du Premier ministre et remis au gouvernement en février
2010.

Là encore, il faut savoir trouver le bon dosage pour ne pas être accusé
de « fliquage ».
[EN TOUTE TRANSPARENCE]
Nicolas Doucerain dirige une société de conseils en ressources humaines et recrutement
qui a bien failli ne pas survivre à la crise. Une aventure qu’il a osé raconter dans un livre
fidèle à sa vision de la vie, qui a permis à Solic de réussir puis de ressusciter.
« En à peine deux mois, du 15 septembre au 15 novembre 2008, 115 missions de
recrutement sur 210 sont annulées ou reportées sine die. Tout au long de cette période,
pas un jour ne passe sans qu’une nouvelle désastreuse ne nous parvienne, laissant une
équipe commerciale tétanisée et des consultants plongés dans des abîmes d’angoisse.
Pas un des huit bureaux que compte le cabinet en France, en Suisse ou en Algérie n’est
épargné. Pas un des quatre-vingt-sept collaborateurs du groupe n’est à l’abri, tous
touchés à des degrés divers par les conséquences d’une crise qui s’est abattue sur Solic
comme une vague, balayant des années d’efforts, de réussite et de confiance en
l’avenir », raconte Nicolas Doucerain dans Ma petite entreprise a connu la crise99, écrit
avec l’appui de l’un de ses collaborateurs, Florent Papin, qui a vécu de l’intérieur les longs
mois de crise au cours desquels Solic a failli sombrer.
Et si son titre est un brin racoleur, le livre mérite d’être lu, ne serait-ce que pour la
démarche courageuse qui lui a donné naissance : « L’idée première, c’était d’apporter un
témoignage sincère, authentique pour montrer, tant du point de vue des salariés que du
monde politique ou des chefs d’entreprise, ce que c’est qu’une PME frappée de plein
fouet par la crise. Il y a tout de même soixante-sept mille entreprises qui ont déposé le
bilan en 2009. Il n’y a que 2,5 % qui s’en sortent donc 97,5 % qui restent au tapis,
précise-t-il. L’objectif était de rebondir. Je n’ai jamais pris le soin d’écrire un bouquin, je
ne suis pas connu médiatiquement et si on voulait que le livre soit édité il fallait amener
du fond, ce que l’on a essayé de faire, et se démarquer, d’où le fait de l’avoir écrit sous
forme de témoignage. »
Le président de Solic avoue encore s’être « beaucoup livré », mais aussi que cela s’est fait
assez naturellement. « Il y avait deux options : soit culpabiliser et se cacher, soit assumer
et m’exposer pour sortir plus fort », poursuit-il en toute franchise. « C’est dans ma
nature profonde. J’ai toujours été comme ça, je n’ai jamais aimé être dans le moule
classique, entre guillemets. Ce qui m’a toujours intéressé, c’est de me démarquer par
rapport à la normalité, à la moyenne. J’ai toujours été volontairement à l’écart, comme
j’ai arrêté mes études en seconde je me suis extrait du modèle de l’éducation nationale
qui imposait un système, des règles qui ne me convenaient pas, en tout cas dans mon
apprentissage des différentes matières. » Après avoir exercé des fonctions commerciales
dans le domaine automobile, à 19 ans il a repris un cabinet de recrutement qui allait être
fermé pour « apprendre un nouveau métier, le développer avec mes idées, mon
concept ». Et s’il estime que sa réussite est notamment due à sa pratique du golf en
compétition, utile au moment de « réunir les équipes pour remporter des appels
d’offres », c’est cette différence qui d’après lui a permis à Solic de devenir le premier
groupe français indépendant de conseils en ressources humaines et recrutement
spécialisé.
« J’ai développé Solic petit à petit, étape par étape, en me démarquant volontairement
de mes concurrents, ce qui a toujours fait du bruit dans la profession et nous a permis,
en moins de cinq ans, de devenir l’un des leaders en France », estime Nicolas Doucerain.
C’est aussi une de ses différences qui lui a permis de sauver la tête de Solic : « Ce qui m’a
guidé à travers ma carrière professionnelle et la période plus difficile que j’ai été amené à
traverser sur le plan économique, c’est la transparence, qui vient sans doute de mon
éducation. C'est-à-dire avoir toujours la démarche de donner du sens aux choses, de ne
pas imposer sans donner d’explication. Lorsque j’ai été amené à déposer le bilan,
beaucoup de personnes m’ont conseillé de cacher la vérité, de ne rien dire aux clients,
aux fournisseurs, aux salariés. J’ai pris le contre-pied de tout le monde : au contraire, j’ai
communiqué, pour ne pas dire surcommuniqué. Tous nos gros clients ont été informés
dans les quarante-huit heures, je suis allé les voir personnellement, nous avons adressé
un courrier à l’ensemble de nos prospects et clients pour les tenir informés, toujours en
donnant beaucoup de sens et de pédagogie. […] Cette manière de communiquer, aussi
bien auprès des clients, fournisseurs et collaborateurs, a permis à Solic de créer un climat
de confiance auprès des différents acteurs et de rebondir beaucoup plus rapidement. »
Cette transparence, il dit d’ailleurs l’avoir toujours appliquée en interne et auprès de ses
clients. « Quand nos clients sont amenés à nous confier un certain nombre de
prestations, soit vous êtes un petit peu mielleux et restez dans une espèce de moyenne,
soit vous avez le courage de dire les choses. C’est toujours informer en donnant du sens,
confie-t-il. Voici un cas précis : un de nos clients qui subit la crise de plein fouet. Il a fait le
choix stratégique de bâtir une cellule de crise il y a trois quatre mois pour mettre en place
plusieurs scénarios en toute confidentialité après la perte d’un énorme appel d’offres. Il
m’a informé que par manque de temps, il ne faisait pas partie de la cellule et qu’il avait
délégué cela à l’un de ses fidèles qui est là depuis douze ans et membre du Comex. Je lui
ai dit que c’était une erreur et je lui ai expliqué pourquoi : je lui ai dit que quand l’on
rentre dans des périodes de crise très violentes, où vous avez un impact et un risque sur
40 % de vos effectifs, la perception des gens est totalement différente par rapport à une
activité économique normale, normalisée. C’est une situation exceptionnelle, la tension
est à son comble, le stress augmente fortement chez les collaborateurs et donc les
réactions diffèrent énormément d’un individu à un autre. Les gens que vous pensiez
connaître, vous allez vous apercevoir que vous ne les connaissiez pas du tout. Je m’en
étais aperçu parce qu’en côtoyant un certain nombre des membres de cette cellule, je me
suis rendu compte que ça commençait à se battre, comme il n’y avait pas de chef
derrière ça partait dans tous les sens. Dans le management, on vient de vivre trois quatre
crises importantes au niveau de grands groupes et on voit bien que cela a été plus ou
moins bien géré. » Et d’opposer l’affaire Dior, exemple pour lui d’une bonne gestion, aux
couacs de Quick et Renault.

j Motiver…

Depuis les années 1940, le rôle de la motivation fait partie des


éléments étudiés dans le cadre de la psychologie du travail. C’est
même le principal élément introduit par les théories des besoins et des
motivations, qui ont cherché à faire passer auprès des dirigeants l'idée
que les excès de la division du travail doivent être régulés, en
s'appuyant sur des caractéristiques naturelles de l'homme.

Elles ont été alimentées par les travaux d’Abraham Maslow, connu
pour sa pyramide des besoins qu’il faut chercher à satisfaire, à chaque
niveau donné, sans penser aux besoins situés au niveau
immédiatement supérieur ; Douglas McGregor, auquel on doit la
théorie X où l’employé n’aime pas travailler et on doit mettre en place
une direction participative par objectifs, et la théorie Y où l’employé
aime travailler et on doit avoir recours à la direction par objectifs ;
Frederick Herzberg, qui a étudié les facteurs de satisfaction et de
mécontentement au travail : les facteurs d’hygiène (bruit, chaleur,
salaire, statut, relations humaines, etc.), qui doivent être assurés avant
que les facteurs valorisants – le travail en lui-même, l'accomplissement,
la reconnaissance, les responsabilités et l’évolution de carrière – ne
puissent être remplis pour générer de la satisfaction…

L’absence de motivation peut en effet être liée à de mauvaises


perspectives d’évolution ou à une rémunération trop faible, et se
manifester par un taux d’absentéisme voire un « turnover »
(renouvellement du personnel) importants.

Ne négligez aucun facteur, et surtout pas votre propre motivation,


indispensable pour que les employés le soient également. « La
motivation d’un groupe dépend d’abord de celui, véritable “capitaine”,
qui se trouve au cœur même de ceux, qui, à quelques exceptions près,
ressentent tous des besoins de stimulation, d’organisation et de
reconnaissance », considère en effet Gérard Regnault dans Animer une
équipe dans les PME aujourd'hui100.

Gérer les tensions, les conflits

D’après le baromètre des PME et TPE du Conseil supérieur de l'ordre


des experts-comptables, réalisé par la TNS Sofres en avril 2010, 63 %
des patrons de TPE et PME se sentent stressés. 42 % des sondés
déclarent avoir des angoisses dans les PME, 58 % dans les TPE. Plus de
34 % des patrons de PME ont des problèmes de santé, 58 % dans les
TPE. 50 % des patrons, toutes entreprises confondues, souffrent
d'insomnie, révèle l'enquête. Les facteurs générant le plus de stress
chez les patrons de PME sont : le carnet de commandes (69 %), la
gestion du personnel (67 %), les craintes d'impayés (49 %).

« De nombreux observateurs font état d’un stress professionnel lié à la


“charge mentale” forte que provoquent chez les salariés l’angoisse du
chômage, la flexibilité, les contraintes de rythme, quand il ne s’agit pas
de l’ambiance et de mauvaises relations personnelles », rapporte pour
sa part Bertrand Duchéneaut dans Enquête sur les PME françaises101.

Les salariés ne sont pas en reste, d’ailleurs, puisque d’après l’enquête


nationale 2010 de l’Observatoire de la vie au travail (Ovat), 65 %
d’entre eux se sentent exposés au stress contre 55 % en 2009. 60 %
des salariés évaluent défavorablement le climat social qui règne dans
leur entreprise, 64 % étant mécontents de la gouvernance sociale.
58 % d’entre eux jugent insuffisante la qualité managériale. Soit leur
poste est généralement mal défini ou mal encadré, soit leur manager
ne sait pas communiquer.
Le stress peut également être généré par un manque de
reconnaissance. Les TPE apparaissent tout de même comme les
championnes du bien-être au travail grâce à la transparence de leur
communication et à la proximité de la direction. Parmi ses
préconisations pour développer le bien-être au travail et réduire le
stress, l’Ovat conseille d’ailleurs d’adopter la « TPE attitude » : assurer
la transparence ; développer la proximité ; communiquer
l’enthousiasme. Et aussi de développer la « biocompatibilité » des
postes et du management : établir une circulation de l’information
ouverte ; donner à chacun le pouvoir et la responsabilité de chacune de
ses missions ; se concentrer sur les tâches relevant de son cœur de
fonction ; manager davantage en fonction des motivations durables ;
former à la gestion des rapports de force.
Dans son ouvrage La Convivialité : aller vers une entreprise où il fait
bon travailler102, Philippe Détrie, qui est également délégué général de
l’association Entreprise et convivialité, appelle à « redéfinir le contexte,
la nature et les vertus de la convivialité, moteur d'efficacité collective et
de mieux-être individuel ». À condition toutefois qu’il y ait une
véritable prise de conscience au plus haut niveau de l’entreprise, la
convivialité pouvant par exemple être déclinée et déployée dans les
process RH, en l’intégrant notamment comme critère pour le
recrutement et l’évaluation des collaborateurs.

À ces solutions, nous pouvons ajouter des moyens simples de lutter


contre le stress : adopter une meilleure hygiène de vie, une meilleure
gestion de l’organisation, mettre en place des actions de formation sur
la connaissance du stress, aménager des pauses, améliorer le confort
au travail, agir sur la motivation intrinsèque (autonomie,
encouragements). Autant d’éléments indispensables car si le « bon »
stress peut être stimulant, l’excès de stress au travail peut être nocif.
« Le stress a un coût pour l’entreprise, en termes d’absentéisme, de
turnover, d’efficacité et d’image, ainsi que pour la société dans son
ensemble ; le Bureau international du travail (BIT) estime qu’en France,
le stress professionnel coûte, en moyenne, 3 % du PIB, soit environ
60 milliards d’euros », peut-on en effet lire dans le rapport d’étape
2010 écrit par le comité de pilotage et les commissions bien-être du
Centre des jeunes dirigeants (CJD). « On voit donc tout l’intérêt, pour
chaque entreprise comme pour le système économique dans son
ensemble, de passer du curatif au préventif : prévenir le mal-être coûte
moins cher que le guérir. »

Il faut tout faire pour éviter d’en arriver au conflit social, qui est,
d’après Annabelle Jaouen et Olivier Torrès103, « une véritable
souffrance pour ces dirigeants, et peut être rapidement désamorcé. Les
explications prennent beaucoup d’importance et des terrains d’entente
semblent émerger assez facilement ».

Il paraît donc nécessaire d’identifier les causes des conflits


(malentendus, jalousies, caractères), ce qui n’est pas toujours facile.
Cela revient parfois à gérer plus attentivement une ou des
personnalité(s) difficile(s) identifiée(s) par Alain Javelle sur NetPME104 :
l’anxieux, le dépressif, l’agressif, le paranoïaque, le râleur perpétuel, le
retardataire à répétition, l’expert, le blagueur, le bavard et
l’obsessionnel.
« Pour traiter ces cas, il est important dans un premier temps d’analyser
ce que provoque le comportement difficile, de vérifier les impacts sur
l’environnement immédiat, la qualité du travail fourni, les relations avec
l’extérieur et de mettre en place les mesures qui s’imposent. Il faut :
attendre le bon moment pour agir ; être à l’écoute mais rester ferme ;
discuter uniquement sur des éléments factuels ; avoir un discours
positif ; s’appuyer sur le travers pour faire progresser ou changer ;
consigner les faits reprochés. »

Il ne faut pas non plus oublier de remettre en question les managers,


comme y invite l’ouvrage Objectif zéro-sale-con, qui est souvent drôle
mais pas humoristique, car écrit par le très sérieux Robert Sutton105,
professeur de management à Stanford. « L’auteur démontre que les
sales cons ne sont pas une simple gêne au travail, mais un sérieux
obstacle à la réussite, explique l’éditeur. Il révèle l’énormité du CTSC
(Coût total des sales cons) dans les organisations. Il explique comment
on peut à coup sûr repérer les sales cons certifiés. Il propose un test,
qui vous permettra de déterminer si vous en êtes un vous-même. Il
donne des trucs pour empêcher le sale con qui est en vous de sortir au
grand jour. Il exploite enfin les plus récentes et les plus sérieuses
recherches pour montrer comment les managers peuvent et doivent
faire place nette dans leur entreprise et créer un environnement de
travail civilisé, enfin garanti zéro-sale-con. Un livre indispensable pour
lutter contre toutes les formes de harcèlement au travail. »

Certaines sociétés de conseils en RH comme Solic proposent par ailleurs


des outils performants de mesure du stress en entreprise et du climat
social. « C’est quelque chose que nous avons fortement développé »,
explique Nicolas Doucerain, son président. Ceux-ci permettent de
« sortir des statistiques et données », « les comparer par rapport à
d’autres entreprises du même secteur », « le décliner en plans d’action,
en préconisations pour aider l’équipe dirigeante et les managers à
mettre en œuvre une politique qui est la plus efficace, la plus
efficiente » et ensuite « les aider à faire faire cette conduite du
changement et à changer les mentalités ».
Il existe par ailleurs de nombreux systèmes de résolution de conflits
parmi lesquelles l’analyse transactionnelle, la PNL (programmation
neurolinguistique) ou la « process com ».

Nous vous souhaitons de ne pas en arriver là, mais pour cela, il semble
primordial de remettre en cause le fonctionnement existant.
« En très petite entreprise, les décisions tant stratégiques
qu’organisationnelles ou managériales sont rarement le fruit d’une
réflexion objective et délibérée », affirment Nathalie Tessier et
Annabelle Jaouen106. « Bien au contraire, l’intuition, l’affect,
l’irrationnel et l’arbitraire tiennent une place prépondérante dans les
processus décisionnels du dirigeant. De fait, les pratiques de gestion
des ressources humaines en sont imprégnées. »

Il convient donc de reprendre les choses en main, si vous voulez obtenir


des résultats.
Sylvie Salmon : « Privilégier la parole. »

Directrice d’une crèche municipale, Sylvie Salmon gère une équipe de dix personnes
(éducatrices, auxiliaires de puériculture, infirmière et cuisinières) et des structures
d’accueil différentes (une halte-garderie, deux crèches en fonction des âges) au
quotidien.

Comment faites-vous pour motiver vos troupes ?


Je fais en sorte que les idées viennent d’elles. Je joue le rôle d’étincelle. Ainsi, j’estime
que j’ai réussi mon travail de manager quand j’ai trouvé une petite flamme à
embraser ailleurs et quand je peux m’effacer. Pour moi, manager une équipe de
femmes, cela signifie déléguer, que chacune ait la capacité, en fonction de sa
personnalité, de s’exprimer. le plus compliqué, c’est de trouver en chacune la petite
flamme qui fera qu’elle se raccroche au projet.

Comment gérez-vous les différentes personnalités au sein de votre effectif ?


En tant qu’employée territoriale, j’ai la chance de pouvoir recruter mon personnel, ce
qui n’est pas toujours le cas. Cela me permet, au moment du recrutement,
d’annoncer la couleur en matière de personnalité. J’essaye de trouver un équilibre
entre les meneuses et les non-meneuses. Si vous n’avez que des meneuses dans votre
équipe, ça peut vite dégénérer. J’estime que l’on ne peut pas toujours avoir de beaux
projets, être en permanence en réflexion. Sinon, les équipes s’essoufflent. Il est donc
nécessaire de pouvoir compter sur des piliers sur lesquels s’appuyer, qui rappelleront
le groupe à l’ordre s’il s’écarte trop du projet pédagogique.

Ces dernières peuvent passer pour des rabat-joie auprès des autres…
Elles peuvent en effet être difficiles à motiver. En même temps, je leur rappelle que si
elles ont accepté de travailler ici, je ne les ai pas trompées en entretien d’embauche.
Je leur ai dit exactement ce à quoi elles devaient s’attendre. Elles ont le droit de ne
plus adhérer, mais les histoires personnelles doivent rester au vestiaire le matin. Elles
ont le droit d’avoir des flottements dans leur vie professionnelle ou personnelle. Pour
autant, je ne suis pas leur confidente. Là où je m’inquiète, c’est si pendant six mois,
neuf mois, il y a un grand flottement. Alors, je leur conseille de partir en formation ou
bien d’aller faire des stages inter-crèches, voir ce qui se passe ailleurs, ou encore
d’envisager d’aller travailler ailleurs.

Avant d’en arriver là, comment faites-vous pour les remotiver ?


Nous faisons des bilans deux fois dans l’année. Il y a les bilans de fin d’année et en
juin je profite des « passeport formation », au cours desquels elles peuvent faire des
demandes de formation, pour faire un bilan des six mois passés. Ça peut être au
cours d’un bilan ou d’un entretien. Cela se fait de façon assez spontanée. Je suis
quand même une directrice accessible.

Est-ce que l’équilibre entre les personnalités entre en compte dans la composition des
équipes ?
Plus difficilement. J’essaye d’en tenir compte, mais quelquefois je me heurte à la
problématique qui est de faire en sorte qu’il y ait le moins de changements possible
pour les enfants. Certaines années, je sais que ce sera une année difficile de par la
constitution des équipes. Mais entre une équipe qui flotte et trop de changements,
j’ai toujours fait le choix de privilégier les enfants.

Comment gérez-vous les conflits ?


J’aime bien que l’on n’aille pas jusque-là. Nous avons de nombreuses réunions où la
parole est libre et où je peux identifier les dysfonctionnements qu’il peut y avoir. Je
leur dis toujours à ce moment-là d’essayer de voir ça entre elles. Si elles n’arrivent pas
à régler le problème, je suis là comme médiateur. J’écoute les deux dans mon bureau
et éventuellement je me positionne. Le fait que cela soit relaté après une tentative de
négociation fait que souvent, les choses sont déjà aplanies. Je ne règle jamais un
conflit dans l’urgence. Si jamais j’entends des choses, je n’y vais pas tout de suite. Je
ne pense pas que l’on soit capable de régler un conflit quand la colère est présente.
Souvent, j’évoque la fonction, la mission de chacune parce que le conflit provient
généralement de quelque chose que l’une d’entre elles a oublié de faire et que l’autre
a été obligée de faire à sa place. J’interviens aussi quelquefois par rapport au respect,
quelle que soit la position hiérarchique. Je suis très attentive à cela.

Comment gérez-vous les périodes de stress, par exemple quand plusieurs d’entre elles
sont absentes ?
C’est compliqué parce que toute l’organisation est à repenser. Ce qui est difficile,
dans le stress, c’est comme pour les conflits : pouvoir prendre du recul. Les moments
conviviaux, où l’on se retrouve et où chacun se livre un peu sur sa vie personnelle
sont importants pour l’équipe. C’est à mon avis une façon d’anticiper les périodes de
tension.

78. Op. cit.


79. Op. cit.
80. Op. cit.
81. Op. cit.
82. Gestion des ressources humaines dans les PME, op. cit.
83. Serge, Blanchard, Quand les RH construisent la croissance : un modèle opérationnel de
développement, Paris, Éditions d'Organisation, 2005.
84. Op. cit.
85. Op. cit.
86. Op. cit.
87. www.agir-mag.com
88. Pierre Elise, « Un jour dans le job d'un autre », L’Expansion, 2006.
89. Op. cit.
90. Op. cit.
91. Coaching pour faire décoller votre entreprise, op. cit.
92. Op. cit.
93. L’Art de diriger, vol. 1, op. cit.
94. Gestion des ressources humaines dans les PME, op. cit.
95. Op. cit.
96. Les Très petites entreprises, op. cit.
97. Op. cit.
98. Op. cit.
99. Op. cit.
100. Op. cit.
101. Op. cit.
102. Philippe Détrie, La Convivialité : aller vers une entreprise où il fait bon travailler, Paris,
Éditions d’Organisations, 2009.
103. Les Très petites entreprises, op. cit.
104. www.netpme.fr
105. Robert Sutton, Objectif zéro-sale-con : petit guide de survie face aux connards, despotes,
enflures, harceleurs, trous du cul et autres personnes nuisibles qui sévissent au travail, Paris,
Vuibert, 2010.
106. Les Très petites entreprises, op. cit.
4- MANAGER/COACHER
« Les dirigeants des TPE ont un avantage, qui est de travailler
quotidiennement aux côtés de leurs salariés, de les connaître et de
connaître l’exercice de l’activité », estiment Annabelle Jaouen et Olivier
Torrès107. « Cette proximité favorise une adaptation des conditions de
travail, mais aussi plus de facilité dans le traitement qui se veut
équitable. Cela permet plus d’humanité dans le traitement et les
accidents sont vécus comme de véritables drames. Les dirigeants sont
très prudents dans une logique paternaliste et responsable. Ils peuvent
refuser des chantiers jugés trop dangereux. »

Il n’empêche qu’ils peuvent ne pas toujours se rendre compte de ce


que des changements sont susceptibles d’induire chez leurs salariés, et
mal appréhender la façon de les aborder. Car même si la décision
paraît rationnelle et justifiée, les changements qu’elle provoque
causent des problèmes.

La conduite du changement
Le changement est inévitable car la société est en perpétuelle mutation,
et nous ne pouvons donc que nous y adapter. Les petites entreprises
doivent d’autant plus s’efforcer de faire preuve de souplesse, car elles
sont par définition plus soumises à l’instabilité de l’environnement.
Courageusement, car cela ne permet pas d’éviter tous les
désagréments : « Les doigts de pied écrasés. Cette expression était
utilisée par un consultant psychologue, Patrice Bertier. Elle exprime de
façon imagée le fait qu’il n’y a malheureusement de réel changement
possible que s’il y a des “doigts de pied écrasés”, c’est-à-dire des
personnes qui souffrent de la situation existante, estime Gilles
Barouch108. Paradoxalement, l’existence de difficultés peut être un
atout pour le changement. Pour qu’il y ait changement, il faut donc
une certaine insatisfaction par rapport à la situation existante. Sinon,
c’est la force de l’habitude qui risque de l’emporter. »

Face au changement, le dirigeant doit prendre ses responsabilités. Car


comme le dit Peter Drucker109 : « On ne peut pas gérer le changement.
On peut seulement en prendre la tête. »

Sur sa route, se dressent des freins, au premier rang desquels on trouve


la résistance au changement. Celle-ci peut s’affirmer clairement (appel
aux syndicats dans les grandes entreprises) mais souvent, les individus
n’osent pas exprimer ouvertement leur désaccord, préférant se dire
« Je vais faire comme il me le demande puis il verra bien que ça ne sert
à rien ou que ça prend plus de temps »…
Pour diminuer la résistance au changement, il faut expliquer ce que les
changements envisagés apporteront à l’entreprise, aux salariés, faire en
sorte qu’ils puissent se les approprier au lieu de les leur imposer.

D’après Kurt Lewin, l’une des principales sources de la résistance au


changement, c’est la crainte de s’écarter des normes de groupes. Dans
ce cadre, la discussion de groupe et les décisions collectives revêtent un
avantage incontestable : il est plus facile de modifier les habitudes d’un
groupe que celles d’un d’individu pris isolément, même lorsqu’il ne
s’agit pas d’une décision concernant un but commun mais d’une
décision concernant des conduites individuelles dans un cadre social. Il
est possible de diminuer les résistances individuelles et de promouvoir
le changement grâce à des discussions en petit groupe.
Ali Taleb : « Une question de préparation. »

Docteur en sociologie, Ali Taleb est intervenu dans des entreprises de tailles variées
en tant que consultant en management avant de prendre la direction de l’office-relais
des Restos du cœur de Paris, un centre d’approvisionnement et de mise en
température des repas, également conventionné chantier d’insertion. La façon dont il
a pris ses fonctions illustre les choses à faire ou à ne pas faire pour bien accompagner
le changement.

Vous avez un poste au profil différent de la personne que vous avez remplacée…
Tout à fait, la précédente directrice est issue du secteur de l’insertion
socioprofessionnelle. Elle a été dans un premier temps chargée de l’accompagnement
des salariés en insertion au chantier avant d’en prendre la direction.
Au-delà des tâches qu’elle assurait, le développement de nouveaux projets est au
cœur de mes responsabilités. Il faut innover vers des items encore peu abordés à ce
jour, notamment en matière de formation et de modernisation dans
l’accompagnement professionnel des salariés en insertion. D’ailleurs, mon
recrutement à l’office-relais a surtout reposé sur mon appétence pour les questions
de formation et d’innovation pédagogique.

Comment s’est passée votre prise de fonctions ?


Suite à mon recrutement, la prise de fonctions s’est faite en deux temps. Je démarrais
avec une période de transition en compagnie de l’ancienne directrice. Cette période a
duré deux semaines. Puis, ce n’est qu’à l’issue de ces quinze jours que je me suis
retrouvé autonome et pleinement en responsabilité sur les fonctions qui m’étaient
attribuées par le président de l’association.
Ces modalités de transition me rassuraient a priori. En effet, à la veille de prendre
mon poste, j’étais soulagé de savoir qu’une passation de compétences, relativement
longue, se ferait. J’y voyais une occasion de m’approprier sereinement l’ensemble des
activités qui m’incombaient. C’était par ailleurs une manière d’évaluer la place de la
directrice de l’office relais.

Dès lors, les premiers questionnements se posaient : devais-je m’inscrire dans la


continuité ? Ou bien, fallait-il innover dans la gestion technique, administrative et
humaine ? Je savais que les réponses ne viendraient qu’une fois seul en
responsabilité.
Néanmoins, j’ai profité de cette transition pour questionner ma prédécessrice sur les
points qui me semblaient essentiels dans la vie du chantier, à savoir : la gestion
technique de l’office-relais, les partenaires financeurs et ce qui me préoccupait le plus
fortement, à savoir l’encadrement de l’équipe que j’aurais à manager. Sur ces trois
axes majeurs, j’ai pu compter sur sa disponibilité.

Elle vous avait donc préparé le terrain… Quels conseils vous a-t-elle prodigués ?
Tout à fait, on peut dire qu’elle a anticipé son départ et pris très au sérieux la
transmission des dossiers. Cela m’a fait gagner du temps dans l’appropriation et la
gestion de l’office. D’autant que j’arrivais à une période particulière, puisque les
entretiens annuels avec les salariés étaient programmés la semaine qui suivait mon
intégration. Les questions de gestion des ressources humaines cristallisaient beaucoup
notre attention. Plus que des conseils, elle me faisait des recommandations, parfois
écrites, sur la prise en compte des personnels encadrants.
De fait, les degrés d’attention n’étaient pas les mêmes et ses recommandations se
voulaient très hétérogènes. Elle me conseillait plus ou moins de rigueur dans la prise
en main de l’équipe selon les personnalités en présence : pour l’un, je devais être
vigilant sur la manière dont il encadre ses salariés en insertion et les forme à devenir
de bons techniciens. Pour un autre, ce sont plutôt des problèmes d’accompagnement
dans la gestion administrative qu’il faut surveiller. Pour un autre encadrant, je devais
veiller à ce qu’il soit rigoureux dans le suivi des personnes en insertion et dans son
relationnel avec les partenaires de l’office. Ces aspects-là étaient très formalisés et
relevaient de discussions dont le point d’orgue était le bon fonctionnement du
chantier et nos capacités à trouver un emploi pérenne ou une formation qualifiante
aux personnes en insertion.
Mais concernant la gestion d’équipe, un discours plus officieux, moins formel, s’est
fait jour. Il ciblait une à deux personnes selon les problématiques rencontrées. J’ai pris
note de ces informations, très orientées sur la nature des relations hiérarchiques
entretenues, et je me suis dit que je les apprécierais une fois seul en poste. Je ne
voulais pas être influencé dans ma manière de manager. Je craignais les interférences
liées à une mauvaise interprétation des rôles et activités de chacun.
Une fois la période de transition terminée, je me retrouve directeur à part entière.
Cette période, bien que bénéfique, ne m’avait pas permis de m’exprimer pleinement.
À compter de ce jour, les salariés que j’encadrais sont spontanément venus me
trouver et m’ont rappelé à mon bon rôle de responsable de l’office. J’ai rapidement
été légitimé.
Pour résumer, je dirais qu’actuellement, avec du recul sur ma prise de fonctions, seuls
les conseils objectifs délivrés par l’ancienne directrice, ceux liés à la vie du chantier, à
la répartition des responsabilités, ont eu un impact favorable sur mon travail et m’ont
permis d’enclencher une nouvelle feuille de route. En revanche, les recommandations
informelles sur les personnalités et la manière de fonctionner des uns et des autres
auraient pu me pousser à commettre des erreurs dans la gestion de mon équipe si je
les avais appliquées au pied de la lettre. La transition était donc nécessaire seulement
quand elle permettait de soulever les problématiques et les enjeux d’amélioration de
nos objectifs de production et d’accompagnement socioprofessionnel.

Les styles de management

Autoritaire, paternaliste, laisser-faire, consultatif, participatif,


charismatique, traditionnel, démocratique, rationnel ou
bureaucratique, etc. Il existe de multiples styles de management, aussi
variés dans leurs manifestations que caricaturaux dans leur définition.

« Existe-t-il un style idéal de management ? interroge Robert Papin110.


Jusqu’à ces dernières années, beaucoup de chercheurs répondaient par
l’affirmative, et ceci au bénéfice du style “démocratique” (l’ambiguïté
du terme y était peut-être pour quelque chose !). […] Il n’existe pas de
style de management qui, par nature, soit meilleur que les autres. […] Il
est cependant essentiel que vous preniez vous-même conscience de
votre propre style de management. »

Notons cependant que « les salariés français ont le sentiment d’être


peu écoutés et peu associés à la vie d’entreprise. Quand les entreprises
mettent en place des actions d’écoute et de “démocratie
participative”, les salariés y participent et cela renforce le lien à
l’entreprise. »
C’est ce qui ressort de la dix-huitième vague de l’Observatoire du
travail de BVA, menée en février 2011. « Cette absence de
considération et d’écoute peut coûter cher ou rapporter gros à celles
qui feront la différence sur ce point. »

D’après les auteurs de Management, stratégie et organisation111, « le


style de direction dépendra du caractère du patron, de celui du
dirigeant, de l’activité ou de la particularité de la culture locale ».
Il y a une cohérence à trouver entre l’environnement (circonstances), les
caractéristiques de l’entreprise (activité, métiers), les employés
(attentes, tempéraments) et le dirigeant (personnalité). Le type de
structure entre en compte également. Ainsi, on ne manage pas de la
même façon une PME lambda et une PME familiale.
Dans Le Guide stratégique du responsable d’entreprise112, François
Colle révèle un inconvénient majeur : « la prédominance des liens de
sang sur la compétence », mais également des avantages qui sont des
conséquences directes des inconvénients : « le sens des économies, la
présence réelle d’un patron, l’ambiance au travail, la complicité et la
compréhension intuitive ».
Pour Annabelle Jaouen et Olivier Torrès, malgré des effets positifs mais
aussi négatifs, la proximité caractérisant les TPE peut aller jusqu’à à
instaurer un management « sensoriel », quintessence du management
de proximité.
« Plus petite est l’entreprise, plus les capacités sensorielles du dirigeant
semblent se substituer efficacement aux outils classiques de la
gestion », écrivent-ils dans Les Très petites entreprises113. « C’est sur le
plan de la gestion sociale interne que les sens sont le plus souvent
évoqués. Là encore, l’écoute, l’échange, et plus largement le contact
paraissent essentiels. »
Et même s’il y a des contre-exemples plus ou moins flagrants,
globalement la tendance est à l’humanisme. « Le management directif
taylorien (organisé pour produire efficacement “l’ordre régi par la
règle”) a laissé progressivement place aux “relations humaines”, qui
conduisent à donner la priorité au groupe, au moral et aux conditions
de travail », affirme Bertrand Duchéneaut dans Enquête sur les PME
françaises114.

« Communication descendante, transmission hiérarchique des


décisions, sacralisation des procédures, culte du secret, contrôles
tatillons, menaces de sanction : cette vieille panoplie managériale est
de plus en plus contre-productive. Son seul ressort est désormais la
peur. Mais elle provoque plus de mal-être et de paralysie qu’elle
n’engage au travail et à l’initiative », peut-on encore lire dans le
rapport d’étape 2010 écrit par le comité de pilotage et les commissions
bien-être du CJD.
L’association en appelle à un « management de l’intelligence, c’est-à-
dire des talents et des compétences », qui demande une gestion plus
souple des relations, une plus grande écoute de chacun, un système de
communication ouvert. « Il repose sur la confiance entre les personnes.
Dans ce management relationnel, qui laisse sa part à l’affectif et
l’émotionnel, le manager est plus un animateur qu’un organisateur ou
un donneur d’ordre. Il donne envie plutôt qu’il n’oblige. »

Ce n’est pas un hasard si, d’après la quatrième étude internationale sur


le profil du manager idéal menée en janvier 2011 par BVA pour le
cabinet BPI, « les qualités attendues pour faire face aux défis de
l’entreprise et les qualités du manager idéal sont précisément celles qui
sont le plus mal notées : capacité à écouter et prendre en compte les
avis et suggestions, capacité à motiver, à communiquer, à instaurer une
relation de confiance… »

Le management a beau revêtir un aspect technique, on ne peut lui nier


un aspect humain qui prend tout son sens dans le leadership.
[LEROY MERLIN NE BRICOLE PAS SON MANAGEMENT]
L’enseigne a mis à profit une approche humaine et un management « maison » pour
séduire ses employés et devenir leader dans son domaine.
Leroy Merlin s’est hissé en 2004 au premier rang français des grandes surfaces de
bricolage avec un chiffre d’affaires de 3,1 milliards d’euros, qui n’a cessé d’augmenter
pour atteindre 4,9 milliards en 2010. Damien Deleplanque, directeur général du groupe
Adeo, dont Leroy Merlin est l’entreprise pionnière, affirme dans le magazine
Management115 que c’est la philosophie à dimension humaine pratiquée dans son
groupe qui explique son succès.
On parle davantage d'esprit de service que de profit, de partage que de cours de Bourse.
Pour lui, le profil idéal du manager Adeo est le suivant : « quelqu'un d'humaniste et
pragmatique, passionné par son métier et qui sait insuffler de l'énergie à son équipe ».
Cela se traduit dans chaque magasin par un management participatif :
« Responsabilisation, autonomie des collaborateurs, développement sont les maîtres
mots du management chez Leroy Merlin. » Les employés choisissent par exemple eux-
mêmes les produits des différents fournisseurs et quand ils travaillent. Les niveaux
hiérarchiques sont peu nombreux et la responsabilité est verticalisée : les missions étant
larges et complètes, les équipes courtes, chacun est en prise directe avec ce qui se passe
en amont et en aval, et a ainsi une bonne connaissance des tenants et aboutissants lui
permettant de jouer pleinement le rôle qui est le sien. La synergie permet un
fonctionnement en réseau où chaque entité interagit pour optimiser un fonctionnement
global, des décisions collectives. À tous les niveaux les initiatives sont encouragées,
favorisant l'implication de chacun quelle que soit sa mission. C’est ce que Leroy Merlin
appelle le partage du pouvoir, ses principes humanistes trouvant aussi leur force à travers
le partage de l’avoir (participation, intéressement et actionnariat salarié) et le celui du
savoir – l’information et la formation, qui représentaient un peu plus de 5 % de la masse
salariale en 2009.
Tout ceci se manifeste par un turnover très faible (6 % pour les contrats de travail
supérieurs à 18 heures en 2010), et a permis à Leroy Merlin d’être depuis 2006 classé
première entreprise française (troisième au général) par l’institut Great Place To Work
France, qui récompense les entreprises où il fait bon travailler en France. À travers
l’enquête, les collaborateurs ont évalué leur entreprise sur cinq critères – crédibilité,
respect, équité, fierté et convivialité – et ainsi reconnu la politique de ressources
humaines menée depuis de nombreuses années.
Ainsi, le personnel de Leroy Merlin a particulièrement salué son style de management et
les valeurs fortes qui font le succès de l’entreprise. Les résultats révèlent par exemple
que : 86 % des salariés estiment que la direction gère l’entreprise de façon honnête, en
respectant des règles éthiques ; 81 % considèrent que l'entreprise leur offre des
formations utiles à leur développement professionnel ; 86 % déclarent que le partage
des bénéfices leur paraît équitable ; la qualité de l’accueil des nouveaux arrivants est
saluée par 92 % des collaborateurs, tous niveaux de postes confondus. « Notre enseigne
possède une culture d’entreprise forte, vécue et ressentie au quotidien par les
collaborateurs », se félicitait Stéphane Calmès, DRH de Leroy Merlin France, en 2009.
« Les valeurs véhiculées par l’entreprise sont l’expression concrète et directe de
l’ensemble des collaborateurs. Leur contribution au succès de la société et à sa croissance
est réelle, ils sont chacun à leur niveau les acteurs entrepreneurs qui font progresser
Leroy Merlin. »

Le leadership

« Une direction solide : je dois être un leader décidé et résolu pour que
mon équipe puisse avoir confiance dans les instructions que je lui
donne », préconise Brad Sugars dans Coaching pour faire décoller
votre entreprise116. Cela peut être utile de donner l’exemple, mais
l’abnégation a ses limites.
De la même façon que l’on doit faire preuve de plus d’humanité à
l’égard des salariés, cela ne doit pas interdire au dirigeant de paraître
humain. « L'idéologie du leadership reste pugnace et interdit au patron
d'avoir des failles. Elle leur impose d'apparaître tels des surhommes »,
explique Olivier Torrès dans Les Echos117. « Parallèlement, le fait de
parler du stress des collaborateurs a conduit à une victimisation des
salariés et, face à des victimes, il faut un bourreau. Cela a recréé un
manichéisme qu'il faut briser. »

Il faut donc trouver un juste milieu, et s’éloigner de l’image du petit


chef qui colle trop souvent à la peau du manager.

« Le petit chef commande ses employés… le leader les guide », relate


Ivan De Borde dans Management d’équipe : Les neuf missions du
manager118.
« Le petit chef s’appuie sur son autorité… le leader sur la bonne
volonté.
Le petit chef suscite la peur… le leader provoque l’enthousiasme.
Le petit chef dit “je”… le leader dit “nous”.
Le petit chef blâme pour l’insuccès… le leader règle la situation.
Le petit chef sait comment faire… le leader montre comment faire.
Le petit chef dit “allez-y”… le leader dit “allons-y”. »
« 100 % d’implication et d’intégration – chacun des membres de mon
équipe a la responsabilité de s’impliquer et c’est mon rôle, en temps
que leader, d’aider ceux qui se sentent exclus », écrit encore Brad
Sugars…

Le coaching

On entend beaucoup parler de coaching sans vraiment savoir de quoi il


s’agit, et le manque de régulation peut agir au détriment de ce métier,
digne de ce nom quand il est pratiqué avec un minimum d’intégrité.

« C’est vrai qu’on parle beaucoup du coaching depuis quelques


années, la profession tendant à se réguler en France, même si tout le
monde tend à s'improviser coach, le terme recyclant conseillers,
consultants, formateurs en quête d'un rebond ou d'une valorisation.
Peu importe le nom, d’ailleurs, l’essentiel étant de répondre à quelques
préalables : formation certifiante dans un organisme reconnu, code
déontologique, méthodologie et philosophie ad hoc, à l’image de ce
que recommandent les organisations de coachs », affirme Stephen
Bunard, coach en communication chez Coaching&com.
« Mais le coaching n’a rien d’une mode, d’abord parce que si c’est une
découverte en France, c’est loin d’être une invention, et aussi parce les
dirigeants véhiculent de plus en plus, sur leur personnalité, l’image de
l’entreprise. N’est-ce pas rassurant par exemple pour les salariés, en ces
temps de crise et d’instabilité, de savoir qu’un patron se fait coacher
parce qu’il a mesuré toutes les incidences de sa communication
personnelle ? Cela dit, on ne doit pas faire appel à un coach comme à
une ambulance, on peut en avoir aussi besoin pour garder un bon
niveau de performance. »

Le coaching, ou mentorat, c’est un accompagnement professionnel


personnalisé permettant d’approfondir ses connaissances et
d’améliorer ses performances, et ainsi d’obtenir des résultats concrets
dans la vie professionnelle et/ou personnelle.
Il existe de nombreux sujets traités ou de manières de les aborder :
Stephen Bunard s'est par exemple spécialisé dans le coaching en prise
de parole et le « coaching politique » (marque qu'il a déposée à l'INPI
début 2009). Il utilise notamment des outils tels que la synergologie,
l'improvisation, les techniques rhétoriques et dialectiques ou la
communication non violente pour aider des dirigeants, des hauts
fonctionnaires et des élus dans toutes leurs prises de paroles, y compris
médiatiques, en temps calme et en temps de crise.

Mais il existe seulement deux types de coaching : individuel ou de


situation (collectif) :
• le coaching individuel peut être mis en œuvre pour la prise de poste,
la gestion du stress, des émotions, du temps, le dépassement des
obstacles professionnels ;
• le coaching centré sur la situation peut aider à résoudre des conflits
managériaux, faciliter la conduite d’un changement ou encore
améliorer la cohésion des équipes (faire émerger les qualités) en
prenant en compte les façons de faire et d’être ainsi que le
positionnement du leader.

Les bénéfices peuvent donc être multiples, pour les dirigeants comme
leurs subordonnés. « Ensemble, qualifiés, unis, impliqués, passionnés,
efficaces. Il ne s’agit pas uniquement de se sentir plus à l’aise. Il s’agit
de réaliser davantage de choses », écrit en effet Brad Sugars dans
Coaching pour faire décoller votre entreprise119.
D’après lui, constituer une équipe plus efficace passe par exemple par
les six points fondamentaux suivants : « une direction solide, des
objectifs communs, des règles de fonctionnement, un plan d’action, le
soutien de la prise de risque, 100 % d’implication et d’intégration ».
[GROSPIRON SURFE SUR LA VAGUE DU COACHING]
Champion olympique et triple champion du monde de ski de bosses, Edgar Grospiron
s’est orienté depuis sa retraite sportive vers les métiers de coach, de formateur et de
conférencier.
Grâce au réseau Edge, franchise de conseils aux entreprises lancée en 2008, il diffuse
maintenant par le biais de consultants indépendants son concept de management de la
performance et de la motivation. La société intervient dans des domaines variés comme
la conduite du changement, la pérennisation de la performance ou la motivation des
équipes.
« Ce qu'Edge propose, c'est de susciter l'envie chez les collaborateurs de se former plutôt
que de subir », explique Edgar Grospiron, qui assimile volontiers les bosses aux obstacles
que peut avoir à surmonter une entreprise, dans une interview consacrée à l’Observatoire
de la franchise120. « Quand vous arrivez ainsi à provoquer un déclic dans une entreprise,
ne serait-ce que le temps d'une conférence, tout le monde en redemande : les
collaborateurs, les managers et la direction. En pratique, je suis fréquemment sollicité
pour des missions de coaching ou des formations lourdes que je n'ai pas le temps
d'assurer ! Grâce au réseau, nous aurons désormais les talents et les effectifs pour
répondre. »
Ses consultants prospectent, vendent des missions, réalisent l’audit motivationnel qui
inspire leur plan d’action. Ils orchestrent ensuite la mise en œuvre de ce plan qui
comprend des formations, des missions de coaching et des conférences sur la motivation
animées par des orateurs prestigieux (anciens sportifs de haut niveau, aventuriers,
artistes…) et non, comme souvent, par des professionnels moins aguerris ou à des
« juniors ». Ce dernier point est très important à ses yeux : « Mon rôle n'est pas de me
multiplier et d'assurer des missions de tous les côtés mais d'être l'inspirateur et le référent
du réseau, poursuit-il. Nous sélectionnerons des conférenciers reconnus et charismatiques
qui ont des choses à dire sur la motivation, des formateurs et des coachs de tout premier
ordre, des consultants issus de directions générales ou opérationnelles qui feront
d'excellents conseils. »
Edgar Grospiron attache aussi une certaine importance à l'engagement inconditionnel du
dirigeant, la volonté de travailler en profondeur et la capacité à se remettre en cause,
véritables conditions de réussite selon lui.

107. Ibid.
108. Élaborer des objectifs et un tableau de bord suivi, op. cit.
109. L’Avenir du management, op. cit.
110. L’Art de diriger, vol. 1, op. cit.
111. Op. cit.
112. François Colle, Le Guide stratégique du responsable d’entreprise, Paris, Maxima, 1993.
113. Op. cit.
114. Op. cit.
115. Christophe David, Management N° 158, novembre 2008.
116. Op. cit.
117. Laurance N’kaoua, « Les patrons de PME et de TPE à l'épreuve du stress », Op. cit.
118. Ivan de Borde, Management d’équipe : les neuf missions du manager, Paris, Ellipses,
2008.
119. Op. cit.
120. Rodolphe Hatchadourien, www.observatoiredelafranchise.fr
[CONCLUSION]

Production, ventes, information, finances, ressources humaines etc.


Même pour une petite structure, le management est un vaste chantier
permanent dont cet ouvrage a tenté de faire le tour sans pour autant
négliger le cœur du problème et la source des solutions : le manager.
Car comme vous avez pu le lire, vous devez commencer par mieux vous
gérer vous-même, vous donner les moyens de réussir, bien vous
entourer et devenir un véritable stratège. Et tout cela suppose que vous
fassiez preuve d’humilité… Nous espérons que vous avez maintenant
dans vos mains les outils nécessaires pour mettre en œuvre les
meilleures pratiques (vous appuyer sur les autres au lieu de persister à
ne pas déléguer ou trop timidement) car celles-ci ne sont pas innées,
pas plus que les mauvaises ne sont une fatalité. C’est nécessaire si vous
voulez faire en sorte que votre entreprise utilise au mieux les ressources
à sa disposition (notamment humaines) et soit plus performante.
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Développement durable et gouvernement d’entreprise : un dialogue
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Remerciements

Hélène Joncheray et Emmanuel Surun tiennent à


remercier pour leur temps et leurs témoignages :
Stephen Bunard, Élisabeth Carpentier, Éric Carreel,
Thomas Chardin, Bertrand Dietz, Nicolas Doucerain,
Dominique Jalaber, Jean-Pascal Lapra, Serge Le Roux,
Sylvie Salmon et Ali Taleb.
Dans la même collection

B.A.-BA des ressources humaines

B.A.-BA de la stratégie commerciale


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2e trimestre 2011

Service éditorial : Marjorie Champetier, Elsa Goisnard,


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Dépôt légal à parution


ISBN 978-2-7590-5064-2

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