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CM HISTOIRE DU DROIT

Partie 2: Les temps féodaux (fin du IXème jusqu’à la fin du XIIème siècle).

Date de départ 888, lorsque qu’est élu en roi Robertiens, certains prenne la date de 987 c’est la date
à laquelle le trône passe aux capétiens. La fin du XIIème siècle marque la fin de la féodalité
dominante c’est-à-dire l’époque où l’élément féodal était celui qui l’emportait pour caractériser la
société. En effet, à partir du XIIIème siècle le système royal réussit progressivement à imposer l’état.
A partir de ce moment-là les pouvoirs régaliens des seigneurs et leurs dominations vont être
combattues et absorbés au profit du roi dans le cadre de l’état. Néanmoins il faut savoir que certains
éléments de la féodalité ont persisté jusqu’à la révolution (les justices seigneuriales).

Chapitre 1 : le système féodo-vassalique.

L’édifice carolingiens desservit par des rois affaiblit, dévasté par les invasions et miné par l’ambition
politique des grands ce lézarde tout au long du XXème siècle. Deux pratiques politiques prennent le
relais et ce mène de façon : d’un côté la pratique féodo-vassalique qui place un homme dans la
dépendance d’un autre c’est-à-dire qu’un seigneur concède à un vassal une terre appelée fief contre
certains services, de l’autre côté l’organisation seigneuriale qui consiste pour les grands devenu des
seigneurs à exercer les droits régaliens sur leur territoire l’autorité publique est passée des mains du
roi entre celles des seigneurs dans le cadre de la seigneurie.

Introduction : Le double triomphe des princes territoriaux.

Le contexte de la féodalité concerne le morcellement territorial et la nouvelle situation du roi. A


contrario on peut y discerner un double triomphe des princes territoriaux qui non seulement obtienne
l’autonomie de leur territoire mais également font accéder au trône une dynastie issue de leur rang.

I. Le morcellement territorial.

Amorcé en 843 avec le partage de l’empire en royaume lors du traité de Verdun. Ce morcellement
s’est poursuivie de la fin du IXème siècle à la seconde moitié du XIème siècle par étapes
progressives. On peut constater 3 étapes essentielles :

- 1ère : principautés territoriales -> plusieurs pagi

- 2ème : comtés comprenant un seul pagus conquièrent leur autonomie

- 3ème : le pagus se disloque en entités en châtellenies et en seigneuries d’église) -> entité plus
petite

A. La formation des principautés territoriales à la fin du IXème siècle.

La dissociation en principauté territoriale a deux origines :

- Les grands commandements militaires mis en place par Charles le chauve

- La manifestation des particularismes ethniques et juridiques qui avaient momentanément était


étouffé sous les carolingiens.

Ces principautés se forment d’abord à la périphérie du royaume là où l’influence su pouvoir central est
moindre et là où les ducs ont plus de facilité pour utiliser les compétences anciennement déléguées

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par l’empereur à des fins personnels. Ainsi prennent forment 3 grands ensembles au nord, au sud et à
l’ouest. Au nord, les principautés de Flandres et de bourgogne se fondent sur des particularismes
ethniques et linguistiques la bourgogne née sur le territoire de l’ancienne Bourgondie. La Flandres elle
fédère les régions de parler flamands, elle a pris place sur le commandement militaire de cette région
confiée par Charles le chauve à l’un de ses gendres le comte Baudouin. Au sud, naissent la
Gascogne et l’Aquitaine des régions très peuplés par les gallo-romains avec un système juridique
influencé par le droit romain. A l’ouest, la principauté de Bretagne c’est une région qui a toujours
manifestations de profonde réticence à l’assimilation notamment sous Charles le chauve, le chef
breton Erispoë avait accepté de prêter hommage à l’empereur Charles à condition que lui soit
officiellement reconnu son titre de roi. La Normandie est née d’un traité constitutif officiel celui de saint
clair sur Epte en 911. Rollon avait reçu la capacité d’exercer sur ce territoire l’essentiel des
prérogatives de puissance publique. Ainsi, ce territoire très circoncis avec une population homogène
normande et des institutions spécifiques va très vite prendre les traits d’un état. Toutes ces
principautés apparaissent comme de véritable concurrente du pouvoir centrale.

B. La dislocation en comté.

Au milieu du Xème siècle. En raison de leurs ambitions les comtes vont former des comtés
autonomes ceci concerne avant tout l’ensemble des régions qui sont géographiquement et
politiquement plus proche du pouvoir central. A la faveur des luttes entre les familles robertiennes et
carolingiennes un certain nombre de comtes s’émancipent ils se sont progressivement érigés en chef
politique autonome de leur comté c’est-à-dire d’un territoire contenant un seul pagus. Dans tous les
cas les comtes se taillent une indépendance de fait marqué par les mêmes traits que pour les princes
territoriaux c’est-à-dire hérédité et pouvoir politique.

C. La désintégration du comté en châtellenies.

Face à l’insécurité permanente dû aux invasions, les populations réalisent même devenues
indépendants les comtes se révèlent aussi incapables de les protéger que le pouvoir central. C’est
ainsi que le pouvoir de commandement des comtes, l’autorité des comtes s’effrite alors au bénéfice
d’une multitude de chefs locaux. Et d’autorités ecclésiastiques. Le plu souvent ces chefs locaux sont
ceux auxquelles les comtes ont donné missions de défendre e territoire en leur confiant la garde de
leur château. Ces châteaux ont d’abord été construit par le roi carolingien puis les comtes eux-
mêmes. Mais petit à petit l’entretiens et la garde de ces châteaux sont assurés par les chefs militaires
à qui ils ont été confiés mais parfois ce sont les maîtres de grands domaines fonciers qui relais
l’autorité défaillante et construisent eux même leur propre château sans même avoir l’autorisation.
Ainsi les châteaux se multiplient sur le territoire à partir du début du Xème siècle pour faire face aux
invasions normandes, hongroises et sarrasines. Au début il s’agit le plus souvent de simples mottes
fortifiées avec des tours de bois, des fossés, des palissades. Ce n’est qu’au XIIème siècle qu’ils
seront remplacés par les lourds châteaux de pierre. Même si ces mottes fortifiées sont sommairement
aménagées elles constituent des points de résistance autour desquelles le seigneur peut défendre un
territoire et les populations alentours. Ce seigneur met sur pieds une garnison composé d’hommes
d’arme et de chevalier et désormais c’est aussi lui qui exerce le pouvoir sur les hommes qu’il protège
ce n’est plus le comte. En s’appuyant sur ce pouvoir il peut ériger l’ensemble de ses possessions en
territoire autonome ainsi naissent à l’intérieur des comtés une multitudes de petites châtellenies
indépendante (territoire autour d’un château). Ce phénomène se retrouve au niveau de plusieurs
comtés mais également à l’intérieur de principauté sachant toutefois que la Normandie et la Flandres
y sont peu sensible, leur prince territorial a réussi mieux qu’ailleurs à préserver son autorité. Le même
phénomène va se produire à partir des anciennes abbayes immunistes, les carolingiens avaient
concéder à certains abbés et évêques des privilèges d’immunité sur leur domaine, il signifié que les
agents royaux n’avaient pas le droit de pénétrer sur ces terres c’était donc l’abbé l’évêque u son

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représentant qui exercer les fonctions publiques à la place des agents du roi. A la fin du Xème siècle
l’évêque ou l’abbé immuniste exerce désormais ses prérogatives de puissance publiques mais pour
son propre compte. Dans un contexte de crise les châtellenies et les deviennent des lieux privilégiés
d’exercice du pouvoir, il est ramené à son plus bas niveau territorial. L’autorité publique s’est
disloquée en plusieurs étapes, de niveau du roi et du cadre royaume entre les mains des princes
territoriaux puis les comtes se sont accaparé l’autorité publique au sein de leur comté et enfin
l’autorité est parvenue au niveau des seigneurs châtelains dans le cadre de la châtellenie. Cependant
la dissociassion n’a pas était la même partout au terme de l’évolution au XIème siècle les chefs
politiques ne sont pas tous de même niveau. Ainsi en Normandie la chute de l’autorité publique s’est
arrêté à hauteur du duché et c’est le duc qui exerce ce qu’on appelle les droits régaliens c’est à dire
ceux qu’exerce traditionnellement le roi. Au contraire, en Ile de France la dislocation a été plus
profonde l’autorité publique c’est abaissé jusqu’au châtelain néanmoins quelques soit e degré de
dissociation le phénomène est le même à savoir le phénomène seigneurial. La seigneurie c’est le
territoire sur lequel le seigneur exerce les droits de puissance publique qu’exercer autrefois le roi. A
cet égard le duc de Normandie a tous son duché pour seigneurie. Tandis qu’un petit seigneur d’ile de
France a pour seigneurie le simple territoire qui entoure son château.

C’est désormais dans le cadre de ces nouvelles unité politiques : les seigneuries que le droit
s’élabore. C’est maintenant un droit coutumier et non plus un droit institué par un législateur.
L’évolution juridique s’articule toujours sur les faits politiques et sociaux. Cette évolution juridique a
connu 3 temps au Moyen Age :

- Aux temps mérovingiens les lois personnelles prédominent parce que les ethnies ne sont pas
encore fondues en un seul peuple.

- Aux temps carolingiens on discerne une tentative de législation territoriale uniforme avec les
capitulaires.

- Aux temps féodaux de petits territoires (les seigneuries) forment les ressorts de coutumes
diverses qui souvent se prolongeront jusqu’à la révolution.

II. Le chassé-croisé Robertiens carolingiens.

En 888 l’assemblée des grands a élu roi le fils de robert le fort, Eudes qui a acquis son prestige en
défendant paris contre les normands. Cependant, la légitimité carolingienne demeure encore
importante car à la mort d’Eudes en 898, est d’ailleurs à sa demande le pouvoir retourne au jeune
carolingien Charles le simple mais ce qui montre bien que le principe héréditaire a vécu c’est qu’en
922 les grands déposent Charles le simple et désignent pour roi le frère d’Eudes, Robert. Enfin,
lorsqu’en 936 la royauté fait retour aux carolingiens en la personne de Louis IV d’outre mers seul 3
princes viennent lui prêter serment de fidélité lors de son sacre et là on mesure clairement le déclin de
la puissance royale et à l’inverse n mesure la manifestation de la puissance des grands. Les
Robertiens gardent une place privilégiée, d’ailleurs le roi carolingien louis IV d’outre mers octroi au
Robertiens Hugues le grand l’honor de « duc des francs ». C’est une charge curieuse puisqu’elle
semble englober tous les francs et elle ne concerne pas un territoire délimité. Grace à cet honor
Hugues va se placer en second après le roi et il collectionne les charges publiques dans tout le
royaume pour ensuite les concéder par le moyen de la vassalité. Le duc des francs, Hugues, tient
d’une main de ferme toute la hiérarchie des honores (des charges publiques). En 987, à l’instigation
de l’archevêque de Reims, Adalbéron, l’assemblée des grandes portes à nouveau son choix sur un
Robertiens, Hugues Capet, il est sacré roi un mois plus tard dans la ville de Noyon par Adalbéron.

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Avec Hugues Capet commence la lignée des capétiens qui se succéderont sur le trône de France
jusqu’à la révolution.

Progressivement, l’effondrement des pouvoirs publics et l’apparition de la seigneurie ont entraîné une
prolifération des alliances privées. Un nouveau régime s’est mis en place que l’on peut qualifier de
féodal en raison de la place déterminante du fief dans la relation entre le vassal et son seigneur. Le
lien vassalique ne s’adresse pas à l’ensemble de la population, il concerne uniquement le monde des
chevaliers.
Section 1. L’affirmation des pratiques féodaux-vassaliques.
Le développement des liens féodaux-vassaliques constitue l’un des phénomènes marquants de
l’époque féodale. Ce lien est constitué tout d’abord par un élément personnel, sanctionnant
l’engagement d’homme à homme, c’est la vassalité ; puis, par un élément réel, le fief qui est concédé
au vassal. Progressivement l’élément réel l’emporte sur l’élément personnel. L’acquisition d’un fief
devient la raison première de l’engagement vassalique et la condition des services. L’évolution en
faveur de la patrimonialité aboutit d’ailleurs très vite. Le fief devient héréditaire puis aliénable entre
vifs.
Après avoir décrit la façon dont se noue le lien vassalique et les obligations qui en découlent, nous
verrons les évolutions juridiques qui ont modifié le statut du fief.
I. La formation et le contenu du lien vassalique.
Le contrat vassalique ne peut être conclu par l’ensemble de la population, mais seulement par ceux
qui appartiennent au monde des chevaliers. Ceux-ci sont tous engagés par des liens de vassalité.

A. La formation.

Comme aux temps carolingiens, c’est par un contrat qu’un homme, le vassal, s’engage dans la
dépendance d’un autre homme, le seigneur. Ce contrat est constitué par un double rite (un contrat
n’est pas forcément écrit). Vient d’abord l’ancienne commendatio de l’époque franque désormais
appelé hommage : le vassal s’agenouille (signe qu’il se soumet) et place ses mains jointes dans celles
de son seigneur, geste symbolisant sa totale soumission envers lui (il se donne à lui quasi-enchaîné).
Parfois le seigneur ayant relevé son vassal, lui donne le baiser de paix.

L’hommage vassalique
Puis la cérémonie se continue par l’autre rite destiné à consolider le contrat vassalique : posant sa
main sur la Bible ou sur des reliques (restes d’un saint dont le culte a été autorisé par l’Eglise), le
vassal prête serment d’être fidèle à son seigneur.
L’hommage est un acte bilatéral qui engage les deux parties. En revanche, le serment de fidélité, acte
de nature religieuse, n’est requis que du vassal et renforce son engagement personnel.

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Serment vassalique d’Harold envers Guillaume le Conquérant (tapisserie de Bayeux)
B. Le contenu.
Quel type d’obligations découle de l’hommage et du serment de fidélité ?
Une lettre célèbre adressée vers 1020 par l’un des grands juristes du temps, l’évêque Fulbert de
Chartres, au duc Guillaume V d’Aquitaine, nous en révèle le détail. Dans une première partie de sa
lettre, Fulbert définit les obligations de « celui qui jure fidélité à son seigneur » en insistant sur ce que
le fidèle doit s’abstenir de faire : éviter d’infliger aucun dommage au seigneur, comme par exemple
donner un de ses châteaux à un ennemi ou de nuire à sa terre ou à un autre de ses biens.
Une notion demeure absente de cette première énumération : celle de « service » que l’on rencontrait
dans les formules de la commendatio franque. Ce sont par conséquent les différents aspects d’une
fidélité purement négative qu’évoque ici Fulbert, comme si l’essentiel était à ses yeux que le vassal
s’abstint de nuire à son seigneur ; comme si la vieille conception franque d’un dévouement
inconditionnel s’était définitivement estompée. La fonction primordiale du lien vassalique semble être
désormais d’établir entre les deux contractants une garantie de sécurité et de paix (= un pacte de non-
agression).
La seconde partie de la lettre de l’évêque de Chartres donne la mesure de cette évolution en
rattachant les obligations positives du vassal, et donc l’idée de service, à la détention d’un fief. Le fief
peut consister en tout ce qui rapporte un revenu : moulin, maison de louage, marché avec ses
redevances, pont à péage ou même un bien vendable comme un cheval. Un château entouré de
terres est toutefois la forme la plus commune de fief. Fulbert écrit : « Ce n’est pas en se contentant de
s’abstenir de nuire à son seigneur que le fidèle mérite son fief. S’il veut en paraître digne, il doit fournir
à son seigneur aide et conseil ». Le lien entre fief et service est ici évident : on s’oblige à un service
actif à cause du fief. Le fief, le bienfait, qui à l’époque franque n’était qu’une récompense
occasionnelle, est désormais l’élément essentiel du lien vassalique. A tel point que l’acte d’investiture
par lequel le vassal est mis en possession du fief par son seigneur ne tardera pas à prendre place
immédiatement après la cérémonie de l’hommage et à constituer avec elle un tout indissociable. Cet
acte d’investiture est souvent formalisé par la remise d’un objet symbolique (une poignée de terre ou
un fétu de paille) ou par la « montrée » du fief : le seigneur et le vassal font ensemble, à cheval, le
tour de la terre concédée.
« Aide et conseil », tels sont désormais les devoirs positifs du vassal à l’égard de son seigneur. Aider,
c’est d’abord prêter main-forte, assister le seigneur par les armes : garde du château, expédition

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guerrière ou simple escorte lorsque le seigneur se déplace entre deux de ses châteaux, ce qu’on
appelle le service d’ost ou de chevauchée. C’est aussi lui fournir des subsides en argent s’il en a
besoin. L’assistance pécuniaire du vassal, d’abord imprécise, finira par se fixer de façon coutumière,
sur 4 types d’obligations : paiement de la rançon du seigneur prisonnier, frais d’adoubement de son
fils aîné (c’est-à-dire lorsqu’il est fait chevalier), participation à la dot de sa fille, financement de son
départ en croisade. C’est ce qu’on appelle « l’aide aux 4 cas ». (Parfois enfin s’ajoutent quelques
services hautement spécialisés qui vont pour les vassaux de l’évêque de Paris de l’obligation de
porter sur leurs épaules l’évêque nouvellement consacré pour son entrée officielle à Notre Dame, à
celle, par exemple, pour un petit propriétaire foncier anglais du Kent de « tenir dans le bateau la tête
du roi » quand celui-ci traverse la mer agitée).
Quant à l’obligation de conseil, elle impose au vassal de se rendre à la cour de son seigneur afin de
donner son avis sur toute décision politique importante comme la négociation d’un mariage ou la
guerre. En vertu de cette obligation de cour, le vassal est surtout conduit à assister le seigneur dans
son rôle judiciaire pour les affaires touchant aux relations féodaux- vassaliques. C’est là la mise en
œuvre du principe selon lequel un homme ne peut être jugé que par ses pairs, c’est-à-dire par ses
semblables.
Enfin, dans sa lettre à Guillaume d’Aquitaine, Fulbert de Chartres insiste sur le parallélisme des
obligations. « En toutes choses, écrit-il, le seigneur doit rendre la pareille à son fidèle » (fidèle =
vassal). La réciprocité ne signifie pas la similitude. La notion de service est étrangère aux obligations
du seigneur. Outre le fief, ce que le seigneur doit avant tout à son vassal c’est la protection. Par
ailleurs, n’ayant pas juré, mais seulement promis d’agir fidèlement à l’égard de son vassal, le seigneur
qui manque à son obligation ne peut encourir le reproche de parjure (le parjure c’est celui qui a trahi
son serment). Ce n’est que dans la seconde moitié du XIIe siècle que le vassal pourra porter plainte
contre son seigneur. En effet, à cette époque se mettra en place une hiérarchie féodale, et le suzerain
(= seigneur du seigneur) pourra imposer dans sa cour une sentence de désaveu du seigneur félon.
Par cette sentence le vassal lésé, pourra porter directement hommage au suzerain sans crainte de
perdre son fief. En revanche, le vassal qui manque à ses obligations est passible de lourdes peines
prévues pour le parjure (main droite coupée, mort) et surtout il encourt la confiscation temporaire (ce
qu’on appelle la saisie) ou définitive (la commise) de son fief. Toutefois, cette sanction reste
seulement théorique lorsque, comme c’est souvent le cas au plus haut niveau de la société nobiliaire,
le lien féodo-vassalique unit des personnages d’égale puissance. Il n’est pas rare qu’un seigneur
ayant fait prononcer par sa cour une sentence de commise contre l’un de ses vassaux, soit ensuite
dans l’incapacité de la faire appliquer.
II. Vers la patrimonialité du fief.
A l’origine le fief est viager : le seigneur est libre de le concéder à qui il veut, puis à la mort de son
vassal, il peut le récupérer (la concession du fief ne vaut que durant la vie du vassal). En principe le
fief ne peut être ni légué ni vendu par son titulaire : celui-ci a été personnellement choisi par le
seigneur parce qu’il pouvait rendre un service donné. Son héritier ne sera peut-être pas capable de le
rendre. Mais de viager, le fief est vite devenu héréditaire. Puis, le vassal a même pu le vendre. Ce
sont les signes que le fief est entré dans le patrimoine du vassal, il est devenu sa propriété.
A. La transmission héréditaire.
La prétention à l’hérédité du fief n’aura pas de mal à s’imposer. A cela, deux raisons :
- Tous les puissants sont eux-mêmes des vassaux et ils revendiquent pour eux l’hérédité.
- Face à la concurrence et aux entreprises de débauchage de ses rivaux, chaque seigneur a
intérêt à conserver et à stabiliser sa propre clientèle vassalique.
C’est ainsi qu’avant la fin du XIe siècle, la plupart des régions du royaume accueillent la règle suivant
laquelle la possession d’un fief implique un droit à l’hérédité. Le principe étant acquis, il a bien fallu
sauvegarder le droit du seigneur, désormais tenu d’accepter comme détenteur du fief quelqu’un qu’il
n’a pas choisi. On persiste donc à considérer qu’à la mort de son vassal, le fief fait juridiquement
retour au seigneur. Ce dernier en investit l’héritier une fois que celui-ci s’est plié à la formalité de
l’hommage et du serment de fidélité. Très tôt aussi, on admet l’usage pour le nouveau vassal de
récompenser son seigneur en lui offrant un cadeau qui, dès le XIIe siècle devient une taxe de
succession (appelé le relief) dont le montant varie en fonction des revenus du fief.
Des difficultés peuvent se présenter dans la pratique, voici comment elles sont résolues :

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Lorsque le vassal laisse en mourant un héritier mineur, celui-ci se trouve dans l’incapacité
d’assurer les services liés au fief. Jusqu’à sa majorité, il faut organiser la garde provisoire de
l’héritage. Le rôle de gardien revient parfois au seigneur qui, en même temps, prend sous sa tutelle le
fils de son vassal défunt. A ce système de la garde seigneuriale, on a vite préféré, dans la plupart des
régions du royaume, celui de la garde familiale jugée plus respectueuses des droits du lignage : le
rôle de gardien peut alors échoir à l’un des oncles, voire à la propre mère du mineur. Le gardien prête
hommage entre les mains du seigneur, administre le fief dont il perçoit les revenus et acquitte le
service dû jusqu’à la majorité de l’héritier.
Autre difficulté : lorsque faute d’héritier mâle, le fief est dévolu à une femme. Si l’héritière est déjà
mariée, c’est à son époux qu’incombent la prestation d’hommage et l’accomplissement du service
vassalique. Si elle ne l’est pas, le seigneur a un droit de regard sur le choix du futur mari qui se
traduira soit par la présentation d’un candidat ayant sa préférence, soit par son agrément si sa
vassale a pris l’initiative du choix.
Reste le cas le plus fréquent : celui d’une pluralité d’héritiers mâles. L’intérêt du seigneur pour qui le
fief, source des services qu’il attend, doit conserver son intégrité, rejoint ici la tendance nouvelle qui
voit nombre de familles nobles renoncer à la pratique des partages en vue de maintenir l’intégralité de
leur patrimoine. Le droit naissant des fiefs au XIe siècle s’oriente donc vers des systèmes
successoraux qui préservent l’essentiel du fief soit en le réservant à un seul des héritiers,
généralement l’aîné (c’est à cette époque que naît le droit d’aînesse) soit en organisant l’indivision au
profit de l’ensemble des héritiers, l’aîné prêtant hommage au seigneur au nom de tous. Les systèmes
successoraux qui se dessinent au XIe siècle au sein du monde aristocratique tranchent radicalement
avec ceux des paysans et des bourgeois où le partage et l’égalité entre les héritiers demeurent la
règle.
B. L’aliénabilité entre vifs.
Plus encore que l’hérédité, c’est la faculté de disposer de son bien (en particulier par vente et par
donation) qui donne tout son sens à la notion de patrimonialité. Le fief entre réellement dans le
patrimoine du vassal dès lors que celui-ci peut disposer librement de son bien. Mais cela revient à
imposer au seigneur une contrainte supplémentaire : il ne s’agit plus du maintien d’un lignage proche
dans sa clientèle par le jeu de l’hérédité, mais de la possibilité d’introduire dans sa vassalité quelqu’un
qu’il peut ne pas connaître ou pire qui peut lui être hostile. On comprend donc que l’aliénabilité entre
vifs (c’est-à- dire le droit de céder ou de vendre à des personnes vivantes) se soit établie moins
aisément que l’hérédité. Encore convient-il de distinguer deux types d’aliénabilité.
Il y a tout d’abord certaines formes d’aliénation pour lesquelles entre peu ou pas du tout en compte la
recherche d’un profit financier : ainsi le fait pour un vassal de donner un fief à titre d’aumône à des
établissements religieux est étranger à l’idée de profit pécuniaire. Ces pratiques seront autorisées dès
le XIe siècle sous réserve de l’autorisation du seigneur.
A côté de ces pratiques, il existe des aliénations dont les motivations sont purement financières. C’est
bien sûr le cas de la vente ; c’est aussi le cas de la donation en gage qui accompagne un emprunt : le
créancier (généralement un grand établissement religieux ou un bourgeois enrichi par le négoce)
devient une sorte d’usufruitier du bien mis en gage et que le débiteur lui abandonnera en cas de non-
remboursement de la dette. Cette pratique se rencontre vers les années 1096-1097 chez les petits
chevaliers en partance pour la croisade qui engagent leurs biens pour subvenir aux frais de
l’expédition. Puis c’est au cours du XIIe siècle que ce phénomène prendra de l’ampleur en liaison
avec l’essor économique qui marquera la période. Incapables de compenser la montée des prix,
châtelains et petits nobles seront souvent contraints de vendre ou d’engager tout ou partie de leurs
domaines. Dans un tel contexte, l’interdiction de disposer d’un fief sans le consentement du seigneur
s’assouplira jusqu’à ce que le consentement devienne une simple formalité, le vassal étant finalement
le seul maître de la décision. Mais l’on s’attachera à préserver l’intérêt du seigneur en faisant de lui
l’intermédiaire obligé, et rétribué, de l’opération. C’est entre ses mains que le vassal procèdera à la
remise de son fief, par un rite inverse à l’investiture. Puis viendra l’investiture de l’acquéreur, précédée
de l’hommage et du serment de fidélité. Le seigneur prélève au passage un droit de mutation
équivalent au cinquième du prix de la vente. Une telle évolution n’est qu’en marche au début du XIIe
siècle, mais elle traduit bien cette prédominance, dans les relations vassaliques, de l’élément réel sur
l’élément personnel. L’engagement du vassal a désormais moins d’importance que sa condition de
tenancier d’un fief.

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Les liens féodaux-vassaliques, c’est-à-dire la prolifération d’alliances privées, ne sont pas le seul
aspect qui mine l’Etat. Il faut y ajouter l’atomisation de l’autorité désormais exercée au sein de la
seigneurie.
Section 2. L’organisation seigneuriale.
Depuis que le pouvoir du roi s’est fait plus lointain et que le territoire qui en constituait l’assise s’est
morcelé, le seigneur est devenu le maître omniprésent et la seigneurie le cadre de vie le plus familier.
Depuis la fin du Xe siècle, en bien des régions, l’individu vit face à un pouvoir plus proche et plus
présent, celui du seigneur et dans un cadre géographique aux limites souvent incertaines, la
seigneurie.
La seigneurie repose sur les deux composantes que les seigneurs se sont appropriées et par lesquels
ils dominent : le ban et la terre. Par conséquent, la seigneurie revêt un double visage. C’est une
seigneurie banale, ce qui en fait un mode d’exercice du pouvoir (§I). C’est aussi une seigneurie
foncière qui consiste essentiellement en une forme d’organisation de la production (§II). Seules les
villes qui ont gagné leur autonomie échappent à l’emprise seigneuriale (§III).
I. La seigneurie banale, mode d’exercice du pouvoir.
Le seigneur est le chef de la seigneurie : il gouverne et dirige les hommes qui vivent sur son territoire
de puissance. Sur sa seigneurie, le seigneur exerce les anciennes prérogatives de puissance
publique. On dit qu’il détient le pouvoir de ban, c’est-à-dire un pouvoir plein, celui de commander,
de contraindre et de punir ses sujets.
A. Les hommes sous la dépendance seigneuriale.
Les hommes de la seigneurie se répartissent en deux groupes bien distincts et à chacun d’eux le
seigneur ne commande pas de la même manière. Tous ceux qui lui sont rattachés par les liens
féodaux-vassaliques échappent totalement à son emprise banale. Ce sont les chevaliers. Le seigneur
ne peut leur donner des ordres et des contraintes qu’en respectant les clauses du contrat vassalique.
Les vassaux ne lui doivent rien d’autre que les obligations découlant de l’hommage et du serment.
Tous les autres hommes qui habitent la seigneurie se trouvent au contraire soumis à la puissance
banale du seigneur, à sa potestas. On les appelle les « hommes de la poesté ». Les hommes de la
poesté constituent la classe des laboratores, ceux qui travaillent selon la répartition sociale en trois
ordres imaginée par Adalbéron de Laon au Xe siècle. Répartition qui décrit bien la réalité de l’époque
entre ceux qui prient, ceux qui combattent et ceux qui travaillent. Parmi les hommes de la poesté, on
trouve les paysans libres et les serfs.
Le servage constitue à l’époque le pire état social. Les serfs sont en effet considérés comme des
biens immeubles dans la mesure où ils sont attachés au fonds qu’ils travaillent. La plupart des serfs le
sont par leur naissance. Ils descendent des esclaves de l’époque romaine. En cas de mariage mixte,
la solution coutumière dominante est que « le pire emporte le bon » autrement dit l’époux de condition
libre tombe dans la servitude par son mariage avec un serf (alors que l’Eglise en 1187 s’est
prononcée pour la liberté). D’autres ne sont que des serfs dits d’héritage, ils le sont parce qu’ils
travaillent sur une terre servile. Le simple fait de quitter la terre leur rend la liberté : c’est le
déguerpissement. Dans tous les cas, la condition servile est lourdement frappée de charges : les serfs
sont « taillables et corvéables à merci ». Ils sont aussi assujettis au chevage, taxe recognitive de
la servitude (= taxe qui indique leur servitude) et qu’ils doivent verser chaque année au seigneur. Ils
sont par ailleurs frappés de plusieurs incapacités juridiques telles la mainmorte qui fait du seigneur le
seul héritier du serf, celui-ci ne peut transmettre son patrimoine. De même ils ne peuvent se marier
avec une personne dépendante d’une autre seigneurie sans le consentement de leur seigneur, c’est le
formariage. Avec le temps et sous l’action de l’Eglise ces incapacités pourront être rachetées.
B. Le ban seigneurial.
Le ban comprend l’ensemble des pouvoirs publics exercés par le seigneur sur sa seigneurie. Le ban
fait de la seigneurie une véritable unité de pouvoir tout à la fois militaire (1), financier (2) et judiciaire
(3).
1. La seigneurie : une unité de pouvoir militaire.
Aux premiers temps féodaux, la guerre est conçue comme un moyen de régler les conflits pour les
particuliers. Pour faire la guerre, le seigneur s’appuie à la fois sur ses réseaux vassaliques et sur ses

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« hommes de poesté ». De ses vassaux, il attend la garde du château, l’ost et la chevauchée qui
n’entrent pas dans son pouvoir de ban et sont règlementés. En revanche, pour les hommes de la
poesté, ces roturiers qui vivent sur la seigneurie, le seigneur peut leur demander beaucoup dans la
mesure où ils sont totalement soumis à son ban. Mais dans la pratique, il a peu à en attendre. Ne
disposant que de moyens limités, ils ne peuvent pas s’équiper pour combattre à cheval. Ils lui
apportent donc le service de simples fantassins.
Dans ces conditions, l’essentiel du service militaire roturier se trouve limité à certaines corvées
(construction et réparation du château) et à un simple service de garde, le guet, qui s’effectue par
équipe et par roulement. A cela s’ajoute la participation à toute opération défensive à chaque fois que
la seigneurie est menacée et que le seigneur proclame le ban. Mais au fur et à mesure que l’ordre
s’imposera et que reculera la guerre privée, ces charges militaires se réduiront pour être limitées à
quelques jours dans l’année et finalement être rachetées par les intéressés. Ils verseront dès lors au
seigneur un supplément de taille qui lui permettra d’engager des mercenaires afin de garder le
château en permanence.
2. La seigneurie : une unité de pouvoir financier.
La seigneurie est aussi une unité fiscale et financière dotée de revenus divers que le seigneur
collecte. Le seigneur s’est en effet substitué à l’Etat et à son administration fiscale pour imposer, taxer
et prélever des redevances à l’occasion de l’utilisation de services dont il s’est assuré le monopole. Il
délègue l’essentiel de ce pouvoir à son intendant, le prévôt, aidé par divers agents.
Tout d’abord, le seigneur fait lourdement payer sa protection en imposant directement les populations
par le biais de la taille. Cet impôt est ainsi appelé parce qu’à l’origine, à chaque paiement effectué, le
seigneur faisait une entaille sur un bâton qu’il remettait à titre de reçu. Les serfs et les roturiers doivent
obligatoirement s’en acquitter, tandis que les nobles en sont exempts en raison du service militaire
qu’ils doivent. A cette fiscalité directe s’ajoute une longue série d’impôts indirects, qu’il s’agisse des
taxes perçues sur la circulation des marchandises transitant sur les routes, ponts et rivières de la
seigneurie ou de droits levés à l’occasion des transactions et de la vente de marchandises ou produits
les plus variés sur les marchés seigneuriaux.
Enfin, à ces revenus s’ajoutent toutes les recettes tirées des banalités. Ce sont les redevances
versées par les paysans lorsqu’ils utilisent les équipements dont le seigneur a le monopole : fours,
pressoirs, moulins, ...

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Nombreux sont les autres monopoles qui autorisent le maître du ban à régir, planifier et rythmer la vie
économique de la seigneurie qu’il s’agisse de l’exploitation de la forêt, de la vaine pâture (droit de faire
paître son troupeau sur les terres des tenanciers après l’enlèvement de la récolte), de la chasse, de la
pêche, ou de la réglementation des poids et mesures utilisés sur la seigneurie. Ce pouvoir
règlementaire permet au seigneur d’organiser la vie économique de la seigneurie à son avantage.
C’est ainsi qu’il décide de manière unilatérale des dates des récoltes, des vendanges ou de la
commercialisation des produits. Toute liberté lui est laissée de récolter, vendanger et vendre avant ces
dates. Monopole avantageux qui lui permet d’écouler sans aucune concurrence les produits provenant
directement de sa réserve.
La réglementation, l’utilisation et les revenus de tous ces droits à caractère économique ont donc
échappé au roi. Mais des droits régaliens plus importants encore comme le droit de battre monnaie et
d’en fixer le cours sont passés de la main du roi dans celle des seigneurs pour leur plus grand profit.
La justice en est sans doute l’illustration la plus évocatrice.
3. La seigneurie : une unité de pouvoir judiciaire.
La justice du seigneur revêt différentes formes. Elle peut être féodale chaque fois que naissent des
litiges entre le seigneur et ses vassaux. Mais c’est alors la cour féodale où siègent les vassaux qui est
compétente. Elle peut être banale en ce qu’elle découle des droits de puissance publique usurpés ou
confisqués. Elle s’exerce alors sur les hommes de la poesté. C’est cette justice qui nous intéresse
dans le cadre présent.

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Seigneur rendant la justice sur ses terres (miniature du XVe siècle)
Cette justice banale est l’ancienne justice royale autrefois exercée par les agents publics et désormais
aux mains du seigneur. Le seigneur banal bénéficie ainsi d’une large compétence, jugeant parfois
toutes les causes, y compris celles qui étaient autrefois réservées au comte, les causes majeures :
rapt, incendie, homicide, vol. C’est ce qu’on appelle la justice du sang parce que ces quatre causes
sont passibles d’une condamnation à mort. Et cette compétence est encore élargie en raison de
l’insécurité des temps qui draine de plus en plus de crimes et délits vers ces prétoires proches. Cette
compétence judiciaire est due enfin à la nécessité de maintenir l’ordre dans la seigneurie depuis que
l’Etat n’assume plus cette fonction.
En pratique, le seigneur juge rarement en personne, préférant déléguer sa compétence à son prévôt
qui est entouré de quelques prud’hommes à simple voix consultative, et demeure donc maître de la
décision finale.
Conclusion I :
C’est bien désormais entre les mains du seigneur banal que se trouvent concentrés tous les droits de
la puissance publique devenus droits seigneuriaux qu’ils soient militaires, judiciaires, fiscaux ou
économiques. Ces droits sont confondus entre ses mains sous le même terme de « coutumes ». En
effet, tous ces droits sont échus depuis si longtemps au seigneur qu’on a fini par oublier tout à fait leur
origine publique, pour y voir quelque chose d’habituel, des coutumes.
II. La seigneurie foncières, mode d’organisation économique.
La seigneurie foncière (le foncier se rapporte à la terre, aux biens immobiliers) est toujours constituée
par un groupement de terres et d’autorité. Mais au-delà de ce facteur commun, les seigneuries
foncières sont d’une étendue très diverse : certaines seigneuries peuvent ne regrouper que quelques
dizaines d’hectares, d’autres au contraire en englobent des centaines ou des milliers. Quoi qu’il en
soit, la répartition entre réserve et tenures demeure toujours la règle fondamentale. Ces deux
éléments composent la structure de base de la seigneurie.

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A. La réserve.
(seigneu
C’est la terre du maître, celle qu’il s’est réservée. On y trouve la maison principale (qu’elle soit
château, maison fortifiée, résidence abbatiale ou demeure épiscopale) avec la chapelle ou l’église
privée. On y trouve ensuite les terres que le maître exploite directement (mais pas en personne). La
réserve est ainsi constituée de champs, de prés, de vignes, de friches et de bois. On peut l’évaluer en
moyenne à un tiers de la seigneurie, même si sa surface varie beaucoup en fonction des régions.
Le maître dispose de trois grands moyens pour assurer le faire-valoir direct de sa possession :
Le premier et le plus simple est d’utiliser sa familia constituée d’un ensemble de serviteurs
domestiques. Ces serviteurs sont pour l’essentiel des serfs à qui il est demandé des services
quotidiens et « à merci » c’est-à-dire aussi lourds et nombreux que le souhaite le maître. Ils sont
considérés comme la cheville ouvrière de l’exploitation économique de la réserve. Ils assurent à eux
seuls l’essentiel des travaux courants.
Mais lors des périodes de culture ou de récoltes les plus chargées, le maître a également recours à
une main d’œuvre salariée, second moyen qui lui est offert. Ce sont des auxiliaires temporaires,
rétribués à la journée. (Ils proviennent d’horizon divers qu’ils soient simples travailleurs sans terre ou
petits tenanciers à la recherche d’un complément de revenus). Le maître essaie d’y faire appel le plus
rarement possible dans la mesure où il lui faut les rémunérer.

L’intendant du seigneur surveille la corvée, (enluminure British Library, vers 1310)


L’essentiel de la force de travail lui est apporté par les corvées imposées aux tenanciers. Elles
sont très inégalement réparties dans l’année, toujours calquées sur le rythme des saisons et du travail

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des champs. Leur poids varie d’une région à l’autre. Partout, ces corvées sont très diverses : labourer
les champs du maître, irriguer ses prés, nettoyer ses chenils, passer la charrue, veiller sur ses biens,
filer sa laine, tuer ses oies ou même battre les étangs la nuit pour que les grenouilles ne troublent pas
son sommeil !... Partout elles sont menacées en raison de la mauvaise volonté que mettent les
tenanciers à les exécuter, en raison aussi de la nécessité dans laquelle se trouve le seigneur de les
convertir en argent pour trouver du numéraire. Elles sont rachetées par les tenanciers c’est-à-dire
converties en un versement fixe et régulier qui apporte ainsi au maître une masse d’argent qu’il peut
réinvestir. Même si les aléas de la conjoncture monétaire tendent à lui faire perdre de sa valeur.
B. Les tenures.
Ce sont des parcelles de terre exploitées par un tenancier.
C’est au terme d’un contrat que le seigneur foncier remet sa tenure au tenancier, toujours un paysan
de condition libre, moyennant versement d’une série de redevances globalement qualifiées de
cens, d’où l’appellation de censive qui est donné à ces tenures.
Leur statut juridique se dégage lentement. La censive est une terre démembrée et dépendante d’un
ensemble. Le seigneur foncier dont elle dépend conserve le domaine éminent ce qui l’autorise à
exercer certains droits (investiture, commise, saisine, perception de tous les revenus et des droits de
mutation) tandis que le censitaire reçoit le domaine utile qui emporte pour lui la jouissance de la
terre, le droit d’en percevoir les fruits et profits. Avec le temps, le tenancier obtiendra aussi la
possibilité d’aliéner sa tenure pour cause de mort, ou entre vifs, moyennant certaines conditions et
restrictions.
Les redevances que doit verser le tenancier au seigneur peuvent être indexées sur la récolte (dont
une partie, le champart, revient au maître). Dans ce système le maître doit assurer lui-même, par
l’intermédiaire de ses agents, la collecte des revenus qui lui reviennent. C’est un travail à la fois lourd
et couteux. Aussi les seigneurs préféraient le système des revenus forfaitaires fixes et établis au
moment du contrat. Sans lien avec la récolte, ils sont directement acquittés par le censitaire en argent
ou en nature. La part versée en nature est toujours produite par l’exploitation : céréales, bétail ou
volailles par exemple. Ce cens, assez léger dès le début, est devenu moins lourd encore du fait de
l’évolution monétaire et de l’érosion qui en résulte pour tout titulaire de revenus fixes. Néanmoins les
seigneurs lui attachent toujours une extrême importance. Moins pour ce qu’ils en retirent que pour sa
signification. Le cens symbolise la reconnaissance perpétuelle de leur droit éminent sur la terre. Le
cens est considéré comme récognitif de seigneurie foncière. On dit encore, le cens « emporte
seigneurie ».
S’ajoute au cens un large lot de prestations en travail, les corvées, qui deviennent de plus en
plus fixes et abonnées, voire rachetées. En théorie, le seigneur avait un pouvoir absolu sur les
tenanciers : il pouvait augmenter leurs redevances et leurs corvées à volonté, ou saisir leurs biens. En
pratique, cependant la position juridique du seigneur était façonnée par une accumulation de traditions
qui avaient force de loi. La coutume était renforcée par le fait qu’il ne pouvait survivre sans les corvées
de ses tenanciers. Le seigneur n’allait jamais jusqu’à les pousser à s’enfuir ni même à lui résister.
Le non-respect des obligations contractées par le censitaire l’expose à des sanctions. Dans un
premier temps, le seigneur foncier peut prononcer la saisie de la censive. Sanction temporaire qui, si
elle n’est pas suivie d’effet au bout d’un an et un jour, peut entraîner la commise c'est-à-dire la perte
définitive de la tenure et de tous ses droits par le censitaire. Mais ces sanctions ne sont pas à sens
unique. Tout tenancier qui s’estime lésé, ou qui souhaite simplement quitter son seigneur foncier, peut
abandonner sa tenure. C’est le déguerpissement. Il suffit que le tenancier soit à jour dans le
paiement de ses redevances.
A côté de la réserve et des tenures, il faut signaler la présence des alleux, terres libres de toute
emprise que les paysans peuvent cultiver librement sans être soumis à un seigneur, même si le
nombre d’alleux tend à rétrécir. Par ailleurs, certaines villes vont elles aussi constituer des enclaves
de liberté dans la mesure où elles auront été affranchies.
III. Les villes, enclavent de liberté.
Depuis le VIIème les villes avaient périclité et les petites villes qui restaient étaient intégré dans le
système féodal c’est-à-dire qu’elles n’ont pas d’existence autonome chaque ville fait partie d’une
seigneurie. Pour celles de plus grandes importances elles sont divisées entre plusieurs seigneuries.

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Les habitants de la ville sont soumis au régime seigneurial normal, ils sont soumis au pouvoir de ban
du seigneur. Mais dans le cours du XIème siècle se désigne lentement un renouveau urbain.
A. Le renouveau urbain.
Il se produit pour 3 raisons principales :
- Le renouveau commercial. La reprise économique se dessine en occident l’économie se
rouvre progressivement autour de la méditerranée dont les arabes reflux et elle se rouvre
avec le monde scandinave qui se christianise. En France la Normandie et la Flandre sont de
foyers de la reprise. Or les villes sont pour les commerçants, les voyageurs, les caravaniers
des lieux de refuge, des points d’hivernage, des centres de vente. Il y attire une population
artisanale, les commerçants cherchent à vendre et à acheter la ville va commencer à
produire. D’une part, la forte natalité du XIème siècle, la société a plus d’enfant que les
campagnes ne peuvent en nourrir et certain de ses enfants parmi les plus entreprenant
quittent donc la campagne pour la ville où ils deviendront marchand ou artisan. D’autre part
un certain renouveau des idées se produit à la fin du XI. En effet, les marchands apportent de
l’étranger de nouvelle conception et un esprit critique. Si bien que les habitants de la ville et la
commerçant réalisent qu’ils ont des intérêts assez différents des seigneurs.
- L’action seigneuriale. Certains seigneurs surtout dans le midi mais aussi dans le nord- ouest,
comprennent les avantages qu’ils peuvent retirer de la formation des villes et favorisent le
peuplement urbain. En Normandie, le duc guillaume le conquérant créer la ville de Caen vers
l’année 1059. Jusque-là la vie en Normandie était polarisée à ses deux extrémités avec d’un
côté Rouen et puis de grandes abbayes, le port d’Harfleur et le mont saint Michel. Mais entre
les deux s’étendait la vallée de l’orne où la vie sociale était moindre, la sécurité moins grande
et l’emprise du duc peut importante. Il était donc nécessaire de développer le peuplement de
cette région. Guillaume et Mathilde ont créé à cane deux abbayes, une abbaye d’hommes et
une abbaye de femme et ils ont aussi implanté le château. Grâce au château la sécurité est
assurée et grâce à un système de tenure la population afflue si bien et si vite que cette région
devient prospère ne quelques années.
- L’association. En ville on trouve d’innombrable fraternité qui associe leur membre avec un
serment, des rites religieux, des banquets parfois ses associations prennent une forme plus
économique ainsi les marchands se groupent à l’intérieur des villes pour s’entretenir de leurs
affaires organiser le commerce et défendre leurs intérêts. Il existe entre les membres de ses
associations une solidarité sociale, économique et juridique. Parfois aussi elles revêtent un
caractère nettement plus politique avec un aspect révolutionnaire et secret excluant les clercs
et les nobles. Ce type d’association est appelé la commune, l’objectif prioritaire en est la
sécurité parce qu’il faut être bien conscient qu’on vit dans une extrême insécurité (brigandage,
opposition avec des étrangers, oppressions des seigneurs, des guerres entre seigneurs qui
pillent les villes adversaires). Tout cela conduit les habitants des villes a s’unir dans des
associations de défense mutuelle et ceux qui se sont ainsi associé par serment se doivent
secours de toutes les façons possibles. En principe ces communes n’ont pas un but agressif
mais en même temps elles donnent à leur membre le sentiment de leur force et de leur
indépendance.

B. Le mouvement communal.
Le mouvement des communes a eu une part prépondérante dans l’émancipation urbaines. Ces buts
sont aussi divers que ces formes. Tantôt il s’agit uniquement de faire reconnaître des privilèges et
ainsi les villes obtiennent à leur profit des privilèges de justice ou économique consistant en des
dispenses de taxes ou de péage pour favoriser le commerce. Tantôt les habitants des villes cherchent
à obtenir la garantie qu’ils ne seront pas maltraités ou arrêté arbitrairement par les agents des
seigneurs. L’ensemble des avantages est alors consacré dans une charte concédée par le seigneur
(charte de franchise). Les habitants de ces villes émancipées prennent alors le titre de bourgeois. Le
plus souvent la charte est achetée par les bourgeois et le seigneur touche ainsi une indemnité. Mais il
préfère parfois se réserver des taxes sur le commerce urbain et participer à la prospérité de la ville.
Lorsque dans les années 1059 guillaume le conquérant a voulu créer la ville de Caen il a fait
bénéficier d’une franchise de taxe seigneuriale les trois bourgs qui ensemble constitués la ville, la
terre était affranchie de cette taxe et donc elle a attiré les acquéreurs et la ville s’est fondée. Au bout

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du compte concernant les finances de sa principauté le duc retiré davantage de ressources du
commerce urbain que des quelques revenus que les taxes lui auraient rapportés. Parfois la commune
se heurte à une opposition très ferme de la part du seigneur qui ne veut pas abandonner ses droits, il
ne veut pas octroyer de charte. Ceci c’est surtout produit dans le nord de la France en Flandre et dans
ce cas le mouvement communal devient violent et révolutionnaire, rend d’assaut le château
seigneurial. Parfois au contraire le seigneur est compréhensif parce que notamment l’exemple de
communes révoltés a pu lui donner à réfléchir. Le seigneur peut conserver un représentant dans la
ville et l’administration est partagée entre lui et les habitants. Il eut aussi concédé de grandes libertés.
Dans le midi il accorde à la ville des droits de justice et d’administration, dès lors les magistrats
municipaux rendent eux-mêmes la justice, administre les finances propres de la ville et également
lève une milice urbaine pour assurer la défense de la ville. Les rois ont généralement favorisé la
création de villes autonomes, notamment le roi Philippe auguste a accordé des chartes lorsque les
villes se créés dans les grandes seigneuries pour en devenir le protecteur et affaiblir ces seigneuries.
Il s’est créé une véritable alliance politique entre la monarchie et la bourgeoisie. En revanche, sur ses
propres domaines le roi est nettement plus hostile aux mouvements communaux.
C. L’opposition entre le régime seigneurial et le régime municipal.
Le développement du système urbain et commercial va mettre en question le régime féodal et en effet
existe une opposition complète entre les deux. Dans le système féodal, la valeur sociale importante
c’est la terre tout est construit autour des rapports engendrés par la possession du sol. Dans le régime
urbain la valeur sociale essentielle est l’argent, cet argent n’est plus une simple mesure de valeur
mais un instrument de capitalisation et également un instrument de transfert de valeur. Or pour une
conception de vie fondée sur le commerce le système féodal est un obstacle à travers les péages, la
diversité des systèmes monétaires et de mesures, brigandage et des guerres locales et privées et
puis à cause des règlements seigneuriaux du marché et de la fabrication. Ce sont autant d’obstacles
de faits ou de droit au développement des courants d’échange. En outre, en même temps qu’on prend
conscience des difficultés crées par le seigneur les services qu’il rendait jusque-là semble moins
nécessaire aux bourgeois et même aux paysans. En particulier la protection militaire du seigneur n’est
plus utile aux villes à partir du moment où elles se sont fortifiées et ont une garnison de bourgeois ou
de mercenaires. Le seigneur ne peut éviter d’entrer dans le courant des échanges mais se faisant il
est appelé à dépenser or il n’a pas de monnaie et il est alors obligé de s’endetter et de vendre ses
terres et à terme cela entrainera la mainmise de la bourgeoisie sur les fiefs.

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