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La meilleure compréhension de la pathogenèse combinée au nouveaux traitements. Ainsi, parmi de multiples molécules en
besoin d’améliorer la prise en charge a créé un environnement cours d’investigation, deux nouveaux agents, l’inhibiteur to
favorisant le développement de nouveaux traitements pour la pique de la phosphodiestérase 4 (PDE-4) (crisaborole onguent)
dermatite atopique (DA). Plusieurs molécules sont étudiées, chez et l’inhibiteur des IL-4 et IL-13 par voie générale (dupilumab)
l’adulte principalement. La DA a cependant une prédominance ont récemment émergé sur le marché.
pédiatrique avec une prévalence d’environ 20 % d’enfants et 5 %
d’adultes. Actuellement, le crisaborole (inhibiteur de la phospho En outre, l’éducation thérapeutique du patient (ETP) a une
diestérase 4) topique et le dupilumab (inhibiteur des IL-4 et IL-13) place centrale pour aider les sujets avec DA et leur famille à
systémique ont leur place pour traiter la dermatite atopique chez développer une autogestion optimale et améliorer leur qualité
l’adolescent et l’enfant. Afin de renforcer la prise en charge médi de vie. Grâce à une approche humaniste, les besoins éducatifs
cale, l’éducation thérapeutique du patient joue un rôle essentiel de chaque patient sont définis et les nouveaux apprentissages
dans l’optimisation thérapeutique et l’encadrement des patients. réalisés. Il s’agit entre autres de tenter d’accroître l’adhérence
Le modèle lausannois au sein de l’Unité de dermatologie pédia
trique est détaillé dans cet article.
FIG 1 Eczéma atopique disséminé
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thérapeutique en soutenant le patient et sa famille dans leur nistration Adverse Event Reporting System. Les cancers cuta
parcours de santé. nés ont aussi été surveillés dans la population pédiatrique sur
quasiment 8000 patients utilisant le pimécrolimus sur dix
ans et aucun lien n’a pu être retrouvé.4
TRAITEMENTS TOPIQUES
De plus, l’utilisation topique d’ICT n’a jamais induit d’immu
Les émollients sont le premier et le plus élémentaire soin de nosuppression systémique au long cours démontrée ni d’alté
peau dans la DA. Plusieurs études démontrent qu’ils repré ration de la réponse vaccinale chez les enfants. L’absorption
sentent une méthode simple, sûre et efficace dans la préven transcutanée a été étudiée pour les ICT et reste largement
tion de la maladie, tant en retardant son apparition qu’en inférieure à celle des CT. Le pimécrolimus a une pénétration
diminuant son intensité. La comparaison de deux groupes de 70 à 100 fois moins importante que les CT mais aussi de 9 à
nouveau-nés à risque (anamnèse familiale d’atopie) de déve 10 fois inférieure au tacrolimus. Une étude a mesuré la
lopper une DA, chez qui l’on a appliqué un émollient quoti concentration plasmatique après application de pimécroli
diennement pendant les 32 premières semaines de vie versus mus à 0,03 % chez 54 enfants âgés de 3 à 24 mois et a retrouvé
un groupe exempt d’émollients, a montré une diminution de que 97 % des échantillons sanguins avaient une concentration
32 % de développement de la DA pour le groupe où l’appli médicamenteuse < 1 ng/ml, dont 20 % au-dessous de la valeur
cation fut quotidienne.1 Une étude similaire, randomisée, détectable (0,025 ng/ml).5
incluant 124 nouveau-nés à risque de DA (anamnèse familiale
d’atopie), a retrouvé un effet protecteur significatif sur Concernant les infections cutanées, dans de larges cohortes,
l’incidence cumulée lors de l’application d’émollients, avec l’incidence était similaire pour les groupes traités et placebo,
une réduction de 50 % du risque relatif (RR : 0,50 ; IC 95 % : et était en lien avec la prédisposition atopique chez ces
0,28‑0,9 ; p = 0,017).2 De larges études cliniques sont en cours patients (impétigo, molluscum contagiusum…).6,7 Par ailleurs,
afin de confirmer ces données. une étude pédiatrique sur l’utilisation exclusive de tacrolimus
rapporte un risque d’infection herpétique localisé de 2,6
L’application d’émollient est essentielle dans la prise en charge versus 0,9 % pour le groupe contrôle, soit 6 cas, dont 2 ont
de la DA. D’après une large revue de la littérature regroupant présenté une dissémination en un eczéma herpétique, en
77 études randomisées (pour un total de 6603 patients), comparaison de seulement 1 cas (0,75 % de dissémination)
l’application d’émollients améliorerait significativement le dans le groupe contrôle. Un cas additionnel de dissémination
SCORAD (Scoring Atopic Dermatitis). De plus, la fréquence dans le groupe contrôle a aussi été rapporté 3 jours après
des poussées de DA (RR : 0,40 ; IC 95 % : 0,23-0,70) de même l’arrêt du médicament.8 A ce jour, la littérature ne permet pas
que la quantité de corticostéroïdes topiques (CT) utilisée sur d’établir un lien clair entre leur application et la dissémina
6 à 8 semaines (différence moyenne 9,30 g ; IC 95 % : 15,3‑3,27) tion herpétique, qui reste tout de même faible.
ont diminué.3
Deux décennies plus tard, plusieurs nouvelles thérapies
Les CT restent toujours et encore le traitement de référence locales alternatives font l’objet d’études cliniques afin de
des poussées de DA. Comme autres anti-inflammatoires lo concurrencer ces pionniers. Le crisaborole onguent, un inhi
caux disponibles pour cette indication, nous disposons des biteur de la PDE-4, a été autorisé aux Etats-Unis, en décembre
inhibiteurs de la calcineurine (ICT), du tacrolimus (onguent 2016, pour traiter les patients âgés de deux ans et plus
à 0,03 % ou 0,1 %) approuvé en décembre 2000 et du pimé souffrant d’une DA légère à modérée.9,10 Deux études multi
crolimus (crème à 1 %), mis sur le marché une année après. centriques randomisées en double aveugle versus p lacebo
Leur utilisation est particulièrement indiquée sur des zones (AD-301 : NCT02118766 ; AD-302 : NCT02118792) ont été me
de peau fine et délicate (visage, plis, région génitale…) pour nées chez 1522 individus souffrant de DA légère à modérée ; la
une application continue à long terme du fait de l’absence population pédiatrique (2‑11 ans) de ces études représentait
d’atrophie cutanée et en tant qu’agent d’épargne des corti 60 % des participants.11 Environ 50 % des patients inclus ont
coïdes. Dans ces indications, ils représentent une thérapie de atteint l’objectif principal, c’est-à-dire être libres ou quasi
choix malgré leur prix plus élevé. Leur utilisation peut cepen ment libres d’eczéma ou présenter une amélioration d’au
dant être limitée par des effets secondaires locaux à type de moins deux points du score ISGA (Investigator’s Static G lobal
brûlures et picotements. A noter que cette classe médicamen Assessment). L’effet secondaire le plus souvent rapporté dû
teuse a longtemps préoccupé les praticiens et suscite encore au traitement actif était la sensation de brûlure et picotement
beaucoup de questions du côté des patients et des parents après application dans 45 % des cas. Pour le moment, il
quant à sa sécurité vis-à-vis du développement de lymphomes n’existe aucune donnée comparative entre le crisaborole et
systémiques, de cancers cutanés et d’une potentielle augmen les CT ou les ICT. Des études de phase IV sont encore en
tation d’infections cutanées. cours chez les enfants de 3 à 24 mois.
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Plus largement, le dupilumab a également démontré son effi réel partenariat soignant-enfant malade-famille. Elle est
cacité dans la prise en charge d’autres problèmes du spectre d’ailleurs fortement recommandée par l’Organisation mon
atopique comme l’asthme allergique persistant et difficile diale de la santé et l’ETFAD (European Task Force For Atopic
ment contrôlable chez les adultes et adolescents (12 ans et Dermatitis).16
plus), plusieurs études étant en cours pour les enfants de 6 à
11 ans. En Suisse, il y a actuellement 18 adultes et un enfant
souffrant d’une DA sévère qui bénéficient d’un traitement de MAUVAISE ADHÉRENCE AU TRAITEMENT
dupilumab. Les dates prévues de l’autorisation de ce biolo ET CORTICOPHOBIE
gique pour traiter la DA modérée à sévère sont 2019 chez
l’adolescent, 2020 chez l’enfant âgé de 6 et 11 ans et au plus En général, l’adhérence aux traitements est faible dans les
tôt, 2023, chez l’enfant entre 6 mois et 5 ans. maladies chroniques.17 Concernant la DA, ce manque d’adhé
rence est complexe et multifactoriel. Il peut être expliqué
De nombreux autres immunosuppresseurs sélectifs, comme entre autres par le défaut de connaissances, la complexité du
les médicaments biologiques et les petites molécules (inhibi traitement, les compétences spécifiques nécessaires incom
teurs de la PDE-4 et de Janus kinase) sont en cours d’évalua plètes et la fréquence insuffisante des visites médicales. De
tion dans la DA de l’adulte. Des études cliniques incluant des plus, nombre de croyances au sujet de la maladie et diffé
adolescents et enfants commenceront prochainement. rentes peurs en lien avec le traitement participent à cette
mauvaise adhérence.18 Une des peurs les plus répandues parmi
les patients, les parents et certains professionnels de la santé
ALTÉRATION DE LA QUALITÉ DE VIE DES ENFANTS est la corticophobie. La crainte principale, en grande partie
irraisonnée, concerne les effets secondaires locaux et systé
ET ADOLESCENTS ATOPIQUES ET COÛTS DE SANTÉ miques associés à l’application régulière de cortisone. Une
La qualité de vie des enfants et adolescents atteints d’une DA non-adhérence aux soins liée à ces thérapies a été rapportée
est considérablement réduite, tout comme celle de leurs chez 36 % des patients.19 Bien que certains parents ne soient
proches. La DA peut également avoir des répercussions pas contre les CT et qu’ils soient convaincus de leur efficacité,
importantes sur leur développement psychosocial. De nom ils en limitent souvent l’utilisation. Dans ce contexte, le
breux enfants atteints de DA présentent des troubles du médecin et les spécialistes en ETP peuvent jouer un rôle-clé
sommeil lors des poussées. Des études ont aussi montré une dans l’identification des croyances autour du traitement. Ils
forte association entre la DA et des troubles de l’attention et vont également pouvoir accompagner les patients dans l’enri
l’hyperactivité. De plus, la famille supporte souvent un lourd chissement de leurs connaissances et de leurs compétences
fardeau financier, expliqué par les jours de travail manqués en lien avec les CT.
pour les visites médicales, les traitements en partie coûteux,
non remboursés ou seulement partiellement, et le temps in
vesti dans les soins cutanés. Aux Etats-Unis, l’impact écono ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE : EN PRATIQUE
mique de la DA a été estimé entre 364 millions et 3,8 milliards
de dollars par an.14,15 Dans l’Unité de dermatologie pédiatrique de l’Hôpital de
l’Enfance à Lausanne, les séances d’ETP sont régulièrement
proposées aux patients et à leurs proches (30 à 90 minutes,
ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE DU PATIENT (ETP) : renouvelables). Elles sont menées en partenariat entre un
dermatologue et une psychologue spécifiquement formée. La
ESSENTIELLE DANS LA PRISE EN CHARGE DE LA DA communication est centrée sur le patient afin d’accéder à sa
La mise sur le marché de nouveaux traitements systémiques réalité dans sa globalité psychosociale. Pour chaque famille,
est très attendue, car ils auront probablement un effet signifi un bilan éducatif est réalisé, dont les buts sont multiples : il
catif pour améliorer la qualité de vie du patient atteint d’une s’agit non seulement de définir les attentes, mettre au jour les
DA sévère et possiblement sur leurs comorbidités. Ce déve croyances individuelles, les ressources, les compétences déjà
loppement accentue l’importance de l’ETP dans la prise en acquises, mais également les contraintes qui pourraient faire
charge de cette pathologie chronique. Effectivement, afin de obstacle au changement. Un des bienfaits majeurs est que
poser la bonne indication pour ces nouvelles thérapies, il est ceci permet un accord patient-soignant sur les besoins éduca
important de différencier les rares cas véritablement résis tifs individuels. Au final, il sera possible de déterminer quels
tants aux traitements locaux de ceux où l’adhérence aux trai
tements topiques est sous-optimale. L’anamnèse et l’examen
Education thérapeutique :
clinique médical seuls ne permettent pas toujours de déter FIG 5 un processus en quatre étapes
miner la cause de l’échec de la prise en charge. L’ETP est pour
cela une approche précieuse et indispensable permettant le Modèle ETP
renforcement des connaissances et des compétences des pa Bilan éducatif
tients ainsi que le développement des capacités d’ajustement
Objectifs éducatifs
permanent afin de faire face à d’éventuels obstacles rencon
trés dans la vie quotidienne. L’ETP contribue également à Acquisition de compétences
prévenir les complications évitables et ainsi à réduire les
coûts de la santé, tout en améliorant la qualité de vie du ma Evaluation
lade. L’ETP doit donc désormais faire partie intégrante de la
prise en charge de la DA et permettre la mise en œuvre d’un (Adaptée de réf.21).
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** à lire absolument
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