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A Cotten
Hôpital R Salengro, Lille
Un certain nombre de tumeurs bénignes des parties molles contient de la graisse. On individualise
classiquement cinq types de tumeurs graisseuses bénignes :
- le lipome, tumeur constituée de graisse mature, de topographie superficielle ou profonde,
- les lipomes hétérotopiques, se développant ou étant intimement associés à un tissu autre que le
tissu adipeux. Il s’agit du lipome intramusculaire et intermusculaire, du lipome des gaines
tendineuses, de l’hamartofibrolipome et du lipome lombosacré,
- les variantes du lipome, tumeurs moins fréquentes différant du lipome par les données
cliniques et microscopiques. Ce groupe comprend les angiolipomes, les lipomes à cellules
fusiformes, le lipome pléomorphe, le lipoblastome bénin et l’angiomyolipome,
- les proliférations de graisse mature, infiltrantes ou diffuses : la lipomatose diffuse, la
lipomatose pelvienne, la lipomatose symétrique (maladie de Madelung), la maladie de Dercum
(adiposis dolora), la lipomatose cortisonnée ou par hypercorticisme,
- l’hibernome, tumeur bénigne constituée de graisse brune.
En fait, par argument de fréquence, en présence d’une tumeur contenant un contingent graisseux
significatif, le problème principal est de différencier le lipome, qu’il soit superficiel, profond ou
intramusculaire, du liposarcome. La différenciation entre ces deux types de tumeur est bien évidemment
fondamentale pour la prise en charge thérapeutique et le pronostic du patient.
I- LE LIPOME
Le lipome est la tumeur la plus fréquente des parties molles. Il s’agit d’une tumeur bénigne
constituée d’un tissu adipeux mature avec des adipocytes uniformes en taille et en forme (1). Cette
tumeur est bien vascularisée mais le réseau vasculaire n’est pas vraiment discernable en microscopie et en
imagerie en raison de la compression des vaisseaux par les adipocytes. Selon sa topographie, on
différencie le lipome profond du lipome superficiel ou sous-cutané. Les lipomes superficiels constituent
16 à 50 % de toutes les tumeurs des parties molles. Les lipomes profonds sont, par contre, plus rares.
1) Les lipomes superficiels
Les patients sont typiquement d’âge moyen. Ils se présentent avec une masse focale des parties
molles de croissance très lente, qui finit par se stabiliser. Le durcissement de la lésion après application
locale de glace est utilisé par certains cliniciens comme critère sémiologique. Les lipomes sont
fréquemment asymptomatiques mais de vagues douleurs, une tension ou une compression d’un nerf
périphérique peuvent s’observer (un quart des cas) (2). Il s’agit habituellement d’une lésion solitaire, bien
que des patients puissent en présenter plusieurs (dans 5 à 15 % des cas) (2).
La plupart des lipomes sont de petite taille. Environ 80 % des lipomes mesurent en effet moins de
5 cm, le reste faisant typiquement moins de 10 cm. Dans l’étude de Rydholm et Berg (3) portant sur 338
lipomes, 4 % d’entre eux mesuraient plus de 10 cm. La taille constitue donc un élément sémiologique non
négligeable dans la différenciation entre lipomes / liposarcomes. Les lipomes superficiels sont le plus
souvent localisées au dos, aux épaules, au cou et à l’abdomen, suivis des bras et des cuisses. Ils sont
inhabituels à la main et au pied. Ils sont habituellement finement encapsulés et ont une disposition
lobulaire. Une récurrence après chirurgie est observée chez 4 % des patients.
Le liposarcome est une tumeur maligne d’origine mésenchymateuse. Il s’agit du sarcome des
parties molles le plus fréquent après l’histiocytofibrome malin (14 à 18 % de toutes les tumeurs malignes
des parties molles). La plupart des patients se présentent avec une masse non douloureuse, mais une
douleur et une tension sont rapportées dans 10 à 15 % des cas. Le liposarcome s’observe chez des
patients d’âge similaire à celui des lipomes. Il est extrêmement rare chez les nouveaux-nés et les enfants.
A cet âge-là, il s’agit surtout de lipoblastomes.
Les liposarcomes à cellules rondes ou pléomorphes sont par contre des sarcomes de haut grade. Le
liposarcome à cellules rondes correspond en fait à une forme mal différenciée et hypercellulaire du
liposarcome myxoïde. Dans le liposarcome dédifférencié, des plages très différenciées côtoient des zones
dédifférenciées. Certains le considèrent comme une forme particulière de liposarcome bien différencié.
Son pronostic est moins défavorable que celui du liposarcome pléomorphe (10).
La présence de métastases est corrélée à la différenciation histologique du liposarcome. Elles sont
le plus souvent secondaires à une dissémination par voie hématogène et intéressent notamment les
poumons. Elles sont présentes dans 50 % des cas, avec un taux de survie à 5 ans de 60 %. Le liposarcome
myxoïde présente la particularité de métastaser aux séreuses (plèvre, péritoine, péricarde…), à la graisse
sous-cutanée et à l’os, particulièrement au rachis. Les récurrences locales après exérèse chirurgicale de
liposarcome s’observent dans 46 à 57% des cas.
Sur les radiographies, les calcifications sont rares (jusqu’à 10 % des cas), les ossifications encore
plus. En scanner et en IRM, les liposarcomes présentent en général des contours très bien limités car ils
ont tendance à grossir par expansion plutôt que par infiltration (7), à la différence des lipomes
intramusculaires. Ils présentent volontiers une forme plurinodulaire (13), avec parfois de petits nodules
satellites adjacents à la tumeur principale.
L’aspect du liposarcome au scanner et en IRM est fonction de son degré de différenciation. Plus la
tumeur est différenciée, plus le signal est de type graisseux. Les liposarcomes bien différenciés présentent
cependant fréquemment des septas linéaires épais ou nodulaires, hypointenses en T1 et en T2 et se
rehaussant après injection intraveineuse de gadolinium.
Le caractère hypervascularisé de ces septas peut d’ailleurs parfois être objectivé en échographie.
Dans les autres types de liposarcomes, lorsque de la graisse est présente, elle a une disposition en maille
ou en amas linéaires ou nodulaires. Le liposarcome myxoïde se caractérise par la présence de plages
pseudokystiques hypodenses en scanner et hypointense en T1 et hyperintense en T2 en IRM, mais se
rehaussant typiquement après injection intraveineuse de produit de contraste (13, 14). En l’absence de
graisse identifiable en imagerie, comme cela est fréquent dans les liposarcomes de haut grade
(pléomorphes ou à cellules rondes), l’imagerie n’est pas caractéristique (ref 1).
1) Autres lipomes
Le lipome peut rarement comporter du tissu conjonctif organisé en septas hypodenses et
hypointenses quel que soit le type de séquence, sans rehaussement après injection d’iode ou de
gadolinium. On les appelle alors fibrolipomes (1). Une métaplasie osseuse ou cartilagineuse est
également parfois observée, notamment dans les lipomes de longue date. Lorsque cette composante est
particulièrement développée, ces lésions sont volontiers appelées mésenchymome bénins. Enfin, une
substance mucoïde est parfois retrouvée au sein des lipomes qui sont alors dénommés lipomes myxoïdes
ou myxolipomes.
2) Les variantes de lipome
Le lipoblastome
Il s’agit d’un lipome immature survenant quasiment exclusivement chez le nourrisson et le jeune
enfant, notamment de sexe masculin. Il se développe dans les parties molles superficielles des extrémités,
au cou, au tronc et dans le rétropéritoine. Les deux tiers de ces lésions possèdent des contours bien
limités ; dans le tiers restant, la lésion est plus diffuse et les contours sont mal limités. Au scanner et en
IRM, la lésion est essentiellement graisseuse, mais avec des parties non graisseuses d’aspect non
spécifique. L’aspect est donc celui d’un liposarcome, mais cette tumeur est extrêmement rare à cet âge.
3) L’hibernome
L’hibernome est une tumeur rare, bénigne des tissus mous, contenant de la graisse brune. Le nom
de cette lésion provient de ses similarités histologiques avec la graisse brune des animaux hibernants.
Chez les humains, la graisse brune diminue de façon marquée après 8 semaines de vie, bien que de petites
quantités persistent à tous les groupes d’âge. Les hibernomes semblent se développer dans les zones où il
persiste de la graisse brune, comme la région scapulaire, axillaire, la paroi thoracique, le médiastin et
autour des reins. Ils peuvent cependant également se développer dans d’autres régions telles que la cuisse,
la fesse et le creux poplité. Les hibernomes peuvent s’observer à tous les âges, avec un pic durant la
troisième décennie. Certaines études ont montré une légère prédominance féminine. Les symptômes,
lorsqu’ils sont présents, sont habituellement secondaires à la compression des structures adjacentes.
Comme la lésion est hypervascularisée, la peau adjacente est souvent chaude.
Il s’agit d’une tumeur graisseuse souvent constituée de lobules séparés de septas se rehaussant
après injection de produit de contraste. Un rehaussement plus diffus de la lésion peut également
s’observer. Cet aspect rappelle donc celui des liposarcomes bien différenciés (15). Le signal de cette
lésion est cependant souvent un peu différent de celui de la graisse sous-cutanée adjacente (un peu plus
hypointense en T1 et un peu plus hyperintense en T2). Cette discrète différence de signal pourrait
suggérer l’hibernome plutôt que le liposarcome. Il n’y a pas de récurrence après résection chirurgicale (1)
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