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Anthony Mangeon
Résumé
The Invention of Africa (1988) constitue un véritable tournant dans l’œuvre de V.Y.
sur l’épistémè, mais il introduit également une nouvelle distance entre l’Afrique et les
discours – occidentaux et africains – qui la prennent pour objet. Cette distance lui permet
qu’absolu et sans médiation, en même temps qu’elle maintient – c’est l’hypothèse défendue
ici – un modèle de connaissance typique des sociétés initiatiques africaines, voire une
The Invention of Africa s’ouvre sur une distinction majeure : au concept d’épistémè,
emprunté aux Grecs par le truchement de Michel Foucault1, V.-Y. Mudimbe préfère
désormais celui de gnosis. Tandis que l’épistémè désignait communément la science ou, dans
plutôt comme « un savoir structuré, commun et conventionnel », mais qui est ordonné par
spécialisation en un « savoir supérieur et ésotérique »2. En posant cette option – alors même
qu’il prétend, à l’instar de Foucault, interroger les discours « en amont, dans ce qui les rend
1
Michel Foucault, Les Mots et les choses (1966), Paris, Gallimard, coll. TEL, 1995 ; L’Archéologie du savoir,
Paris, Gallimard, 1969.
2
Valentin-Yves Mudimbe, The Invention of Africa, Philosophy, Gnosis and the Order of Knowledge,
Bloomington, Indiana University Press, 1988, p.IX.
possibles, avant que de les accepter comme des commentaires qui révéleraient ou
restitueraient une expérience africaine »3, Mudimbe introduit, selon moi, un glissement
doublement significatif.
L’épistémè foucaldienne préexiste aux sujets et à leurs discours ; elle est « ce qui rend
possible » leurs positions et leurs énoncés et elle se trouve, dans le même temps, une totalité
close sur elle-même, puisque le savoir qu’elle propose se génère par infinie déclinaison, à
l’intérieur d’un cadre cohérent en dépit de ses variations et de ses ruptures épistémologiques.
Foucault distingue certes, dans Les Mots et les choses, plusieurs ruptures et, par conséquent,
Renaissance l’ordonne en effet selon la ressemblance, celle de l’Âge Classique s’articule sur
la représentation, et celle qui nous domine depuis le XVIIIe siècle se centre sur l’homme,
comme sujet et objet de savoir. Mais le philosophe français postule également une
« configuration générale » qui, quant à elle, ne varie guère dans ses préoccupations
essentielles. On peut ainsi passer d’une théorie de la richesse à une économie, d’une histoire
naturelle à une biologie, et d’une grammaire générale à une philologie, générant de fait une
nouvelle « triade du savoir » dans les interstices de laquelle viendront bientôt se loger toutes
les sciences humaines et sociales ; un continuum et un principe d’identité n’en continuent pas
moins de traverser les siècles et leurs ruptures. Ce continuum, Foucault l’appelle « l’épistémè
du monde occidental »4 et ce principe d’identité réside, selon lui, dans « une certaine position
de la ratio occidentale qui s’est constituée dans son histoire et qui fonde le rapport qu’elle
peut avoir à toutes les autres sociétés, même à cette société où elle est historiquement
apparue »5. Foucault précise alors la nature de ce mode relationnel, en soulignant que sa
singularité consiste à « se lier aux autres cultures sur le mode de la pure théorie »6 : le rapport
3
Ibidem, p.X.
4
Michel Foucault, Les Mots et les choses (1969), Paris, Gallimard, coll. TEL, 1995, p. 262.
5
Ibidem, p.388.
6
Ibidem.
occidental à l’autre s’instruit donc, fondamentalement, comme une violence symbolique qui
impose sur la réalité un ensemble de prismes qui la commentent plutôt qu’ils ne la révèlent ou
ne la dévoilent.
Dans le cas de l’Afrique, les discours qui l’ont pris pour objet, et que Mudimbe
rassemble sous l’appellation globale d’africanisme7, ont « inventé » toute une série de
topiques vouées à exposer sa différence et sa singularité. Ils ont ainsi progressivement formé
ce “quelque chose” qu’est le non-occidental se dévoile lui-même comme ce à quoi manquent les normes
occidentales, et il s’offre par conséquent lui-même comme objet pour la conversion, la transmutation et la
standardisation. (…) En elle-même, la bibliothèque n’est pas tant soucieuse de préserver les récits passés ou
présents, ou de considérer les coutumes et le savoir comme constituant un corps ou des corps ayant, en leur
propre droit, une qualité particulière inscrite dans une histoire donnée ; elle cherche plutôt à rassembler ces
Dès lors que les penseurs africains s’attachent à spécifier en quoi réside leur
« différence africaine », dans le statut qu’occupent par exemple les « systèmes traditionnels
de pensée » par rapport à la philosophie ou à tout autre savoir normatif, ou dès qu’ils tentent
d’africaniser les disciplines ou les pratiques discursives occidentales (des sciences humaines
ou sociales à la théologie, pour donner un autre exemple), ils emploient de fait, nous dit
Mudimbe, « des catégories et des systèmes conceptuels qui dépendent d’un ordre
épistémologique occidental »9. Leurs théories et leurs méthodes suivent en effet « des
contraintes, des règles, et des systèmes d’opération qui supposent un lieu épistémologique
non-africain »10 et c’est précisément parce que cet espace discursif participe de l’épistémè
occidental, sans pour autant s’y tenir ou s’y cantonner, c’est parce qu’il prétend exposer un
7
Valentin-Yves Mudimbe, The Invention of Africa, op.cit., p.XI.
8
Valentin-Yves Mudimbe, Tales of Faith, Oxford, The Athlone Press, 1997, p.176.
9
Valentin-Yves Mudimbe, The Invention of Africa, op.cit., p.X.
10
Ibidem.
autre savoir, à défaut d’un savoir autre, antérieur, subalterne ou alternatif au savoir occidental,
à toute subjectivité, la notion de gnose permet de rétablir la primauté d’un sujet connaissant,
Mudimbe, on le sait, n’a cessé d’invoquer, « contre le structuralisme, les droits du sujet et le
qu’il le souligne dans sa préface à Parables and Fables12. Dans le livre suivant, The Idea of
savoir. Mudimbe ne cesse d’insister, en effet, sur l’existence d’au moins trois niveaux
On trouve toujours, en principe, une sorte de degré zéro du discours : une interprétation première,
populaire, des événements fondateurs d’une culture et de son devenir historique. Qu’on puisse qualifier ce
discours comme un corps de légendes et de mythes n’a point d’importance étant donné que […] cette référence
discrète et, en même temps, systématique à une genèse, marque les pratiques quotidiennes de la communauté.
[…]
Il y a aussi, en principe, de manière très explicite dans certaines sociétés et moins dans d’autres, un
second niveau de discours. Ceux-ci se déploient eux-mêmes de manière critique et ils s’actualisent comme les
11
« The book attempts, therefore, a sort of archeology of African gnosis as a system of knowledge in which
major philosophical questions recently have arisen : first concerning the form, the content, and the style of
“Africanizing” knowledge ; second, concerning the status of traditional systems of thought and their possible
relation to the normative genre of knowledge » (ibidem, p.X).
12
Valentin-Yves Mudimbe, Parables and Fables, Madison, Wisconsin University Press, 1991, p.XI.
13
Valentin-Yves Mudimbe, The Idea of Africa, Bloomington, Indiana University Press, 1994, p.XV.
disciplinaire qui transcende le premier niveau de discours et qui, par son pouvoir critique, domestique le
Finalement, il y a un troisième niveau de discours, qui devrait en principe être critique des autres
discours (interrogeant leurs modalités, leur signification et leurs objectifs) et qui, en même temps, par vocation,
cette distinction herméneutique entre plusieurs échelles de discours, que Mudimbe entend se
situer. Ses « lectures » des deux précédents niveaux ont alors pour but de « comprendre, d’une
part, ce que sont et ce que ne sont pas les cultures africaines, et d’autre part, à quelles
difficultés font face les investigations scientifiques dans les sciences humaines et sociales »,
proviennent de la diversité des discours qui tous prétendent, d’une certaine manière, révéler
ou dévoiler le monde africain dans son essence ou sa nature. Sur quelles bases fondent-ils leur
visions africaines du monde, dont les auteurs peuvent être occidentaux aussi bien qu’africains.
La Philosophie Bantoue (1945) du révérend père Tempels, ou Une Bible noire (1973),
parfaitement “scientifique” d’un système philosophique implicite qui serait là, dans
l’expérience quotidienne »16. Dans tous les cas, leur prétention d’objectivité repose sur leur
sur leur aptitude spéculaire à représenter cette expérience première sur le mode de la pure
14
Valentin-Yves Mudimbe, The Idea of Africa, op.cit., 1994, p.XIII-XIV.
15
Op.cit., p.193.
16
Valentin-Yves Mudimbe, Parables and Fables, op.cit., p.101 ; The Idea of Africa, op.cit., p.XIV.
correspondance. « Nous avons essayé d’être en conformité avec la pensée noire », disent ainsi
Morlighem et Fourche, et s’ils reconnaissent que « la mise en chapitres, leurs titres, leur
ordonnance sont notre fait », c’est pour aussitôt ajouter que « ce découpage […] suit
fidèlement la séquence logique des conceptions noires » : « Une Bible noire est bien une
œuvre africaine » concluent-ils sereinement17. De son côté, le père Tempels assume une
position plus résolument paternaliste, mais qui ne se veut pas moins fidèle à « la philosophie
bantoue » :
Nous ne prétendons certes pas que les Bantous soient à même de nous présenter un traité de
philosophie, exposé dans un vocabulaire adéquat. C’est à nous qu’il appartient d’en faire le développement
systématique. C’est nous qui pourrons leur dire, d’une façon précise, quelle est leur conception intime des êtres,
et eux se reconnaissant dans nos paroles, acquiesceront alors en disant : “tu nous connais à présent, tu nous as
Or, c’est précisément cette option représentationnaliste que Mudimbe remet, de prime
abord, vigoureusement en question19. Pour lui, toute « interprétation de la relation entre une
expérience vécue et le récit oral ou écrit qui en témoigne ne peut être qu’une réduction à une
unité synthétique théorétique »20 si bien que, je cite encore Parables & Fables, « la meilleure
des traductions reste un reflet, ou plus exactement, une reconstruction métaphorique. Elle ne
peut s’identifier à ce qui la précède que de manière figurative et surtout elle témoigne, dans
« Ordre douteux » : cet hypallage dit bien quel soupçon fait peser sur ces « textes » et
leurs divers niveaux d’interprétation l’activité de Mudimbe lecteur. Un doute radical sert ainsi
17
Henri Morlighem & Tiarko Fourche, Une Bible noire, cosmogonie bantu (1973) ; Paris, Les Deux Océans,
2002, p. 26.
18
Placide Tempels, La Philosophie Bantoue, Elisabethville, Lovania, 1945, p.20.
19
Pour une critique du représentationnalisme dans la philosophie occidentale, voir Richard Rorty, L’Homme
spéculaire (traduction française de Philosophy and the Mirror of Nature, 1979) ; Paris, Seuil, 1990.
20
Valentin-Yves Mudimbe, Parables and Fables, op.cit., p.192.
21
Ibidem, p.171.
Ne pourrait-on pas supposer qu’en dépit même de l’habileté des discours et de la compétence de leurs
auteurs, ils ne révèlent pas la chose du texte, c’est-à-dire ce qui se trouve à l’extérieur [out there], dans les
traditions africaines, d’une discrète insistance, et qui détermine ces mêmes traditions tout en demeurant
indépendant à leur égard ? Le colonialisme et ses pièges, en particulier l’anthropologie appliquée et la chrétienté,
ont tenté de réduire cette réalité au silence. Les discours africains contemporains, par la distance
épistémologique même qui les rend possibles, explicites et crédibles en tant qu’énonciations scientifiques ou
philosophiques, pourraient bien n’être qu’en train de commenter plutôt que de révéler la chose du texte. […]
Cette réalité n’est-elle pas déformée par l’expression des modalités africaines dans des langues non-africaines ?
[…] Est-ce que la question de savoir comment se lier plus fidèlement à la chose du texte implique
Tout en justifiant, en effet, l’émergence de la gnose africaine comme une alternative à l’ordre
Mudimbe anticipe son possible échec puisqu’elle demeure elle-même, de son point de vue,
dans un pur rapport d’extériorité, ou à tout le moins dans un rapport métaphorique, par ses
jeux de langage, vis-à-vis d’une réalité qu’il resterait donc toujours à nommer (« naming what
is out there »23). Mais dans l’instant même où il établit cette nouvelle distance, Mudimbe
opère lui-même un singulier retournement : ce ne sont pas tant, en effet, des représentations
du monde africain, que des représentations ancrées dans l’épistémè occidentale, y compris au
sein de la gnose africaine, qu’il remet en question. Il continue donc, implicitement, d’accorder
foi et crédit au représentationnalisme, puisqu’il s’interroge sur les modalités d’un lien plus
fidèle avec la chose du texte. L’idée d’« une chose du texte », d’une « quelque chose qui
serait là, dehors » vient alors confirmer la partition, soulignée précédemment, entre « ce que
sont les cultures africaines, et ce qu’elles ne sont pas ». La possibilité d’une « révélation » se
maintient, la nécessité d’un autre discours s’impose, tandis que se trouve reconduite l’idée
d’un savoir demeuré caché. Or, présupposer ou simplement maintenir cette hypothèse d’un
22
Valentin-Yves Mudimbe, The Invention of Africa, op.cit., p.183 & p.186.
23
Valentin-Yves Mudimbe, Parables and Fables, op.cit., p.171.
savoir profond, demeuré inaccessible jusque-là alors même qu’il énoncerait pleinement la
réalité et qu’il serait donc en prise avec un véritable ordre des choses, c’est implicitement
linguistique »24. Un peu plus tôt dans le livre, Mudimbe opposait déjà « l’immanence de
positives ou négatives » qui tâchaient d’en rendre compte pour souligner, à rebours, la
puissance du mythe25. Le mythe s’offre comme « un texte qu’on peut morceler et qui révèle
humaine au point que sans lui la réalité perd son sens »26. Je note d’ailleurs que ces
affirmations suivent l’exposition d’un « savoir profond des Dogons », à travers les entretiens
d’Ogotemmêli avec Marcel Griaule27. Mudimbe semble alors fasciné par les étroites
d’un cheminement initiatique, dont Griaule, à la suite d’Alexis Kagame pour le Rwanda ou
gnoséologique28.
Nous sommes alors face à un paradoxe saillant : ou bien les mythes, les contes
initiatiques sont communément partagés par l’ensemble des Dogons, des Bantous ou des
Peuls, irriguant et structurant leurs sociétés tout entières, et dès lors ils ne sont nullement
24
À la suite du philosophe rwandais Alexis Kagamé, à qui j’emprunte la formule d’une « analyse philosophico-
linguistique » (La Philosophie bantu-rwandaise de l’Être, Bruxelles, Académie Royale des Sciences d’Outre-
mer, 1956), V.-Y. Mudimbe insistait déjà, dans ses premiers essais francophones (L’Autre face du Royaume,
1973 ; L’Odeur du Père, 1982) sur la nécessité de philosopher à partir des langues africaines.
25
Valentin-Yves Mudimbe, The Invention of Africa, op.cit., p.89.
26
Ibidem, p.143.
27
Marcel Griaule, Dieu d’eau, entretiens avec Ogotemmêli (1948) ; Paris, Fayard, 1966.
28
Alexis Kagamé, La Philosophie bantu-rwandaise de l’Être, Bruxelles, Académie Royale des Sciences
d’Outre-mer, 1956 ; Ahmadou Hampâté Bâ, Contes initiatiques peuls, Paris, Stock, 1994. Pour une analyse plus
extensive de ce modèle gnoséologique, voir mon essai : La pensée noire et l’Occident, de la bibliothèque
coloniale à Barack Obama, Cabris, Sulliver, 2010.
secrets ; ou bien ils sont effectivement un savoir caché, une gnose possédée par quelques-uns,
mais alors ils restent à la marge des sociétés, comme le simple produit d’intelligences
profusion des symbolismes, et finalement d’autant plus précieuses qu’elles ne sont réservées
qu’à quelques élus ayant triomphé des épreuves de l’initiation, le conte initiatique Kaïdara la
met par exemple en abyme lorsqu’il prescrit de donner l’enseignement reçu oralement
pratique aux oreilles dociles et aux têtes chanceuses »29. Mais Henri Morlighem ne dit pas
autre chose lorsqu’il souligne, dans son introduction à la deuxième édition d’Une Bible noire,
que
l’ignorance étant considérée comme l’apanage des peu doués et des profanes, les enseignements de la
science secrète confèrent graduellement une connaissance rudimentaire, puis approfondie, de l’histoire et de la
tradition, des lois de la nature, de l’organisation des mondes visibles et invisibles régie par le processus de la
genèse divine. C’est donc bien à tort que beaucoup d’ethnologues limitent les matières d’enseignement
initiatique à la magie ou à la politique. L’existence de la Science secrète est posée du fait que, dès la Genèse, le
Créateur est le détenteur primordial et le dispensateur permanent des Sciences Profanes et Secrètes. La
possibilité pour l’homme, d’accéder à ces connaissances, se déduit du fait que, même déchu, l’homme a été créé
à l’image de Dieu, ce qui permet d’inférer qu’il conserve un potentiel divin dont l’initiation lui permet de
récupérer l’efficience30.
La mise en exergue d’une gnose africaine – ou african gnosis – est donc moins
anodine qu’elle n’en a l’air. Elle permet certes de marquer une nuance, et donc une réserve
foucaldienne, mais elle conserve également une dimension ésotérique – voire mystique – au
savoir puisque, d’une part, la gnose est « par définition un savoir secret »31 et que, d’autre
part, cette formule est explicitement empruntée à Johannes Fabian, qui s’en servit en 1969
29
Ahmadou Hampâté Bâ, Contes initiatiques peuls, op.cit., p. 331.
30
Henri Morlighem et Tiarko Fourche, Une Bible noire, op.cit., p.19.
31
Valentin-Yves Mudimbe, The Invention of Africa, op.cit., p.186.
pour caractériser la doctrine du mouvement prophétique Jamaa, fondé dans les années
cinquante par le Père Tempels32. Discutant l’idée que « la gnose est un savoir des mystères
divins réservé à une élite »33, l’anthropologue montre d’abord que La philosophie bantoue
avait servi de « premier manifeste »34 à une doctrine religieuse bientôt centrée sur la notion de
mawazo, que Fabian traduit par « gnose » mais qui désigne plus généralement, dans sa forme
s’incarne ensuite en une multitude de formes – dont l’homme (muntu mawazo). Fabian
montre alors que cette notion caractérise « la communication » dans ses trois aspects
fondamentaux : son origine (en Dieu), sa réalisation (en tant que processus) et son contenu,
« le contenu du savoir inclut l’explication de sa propre origine », nous dit Fabian, si bien que
savoir c’est tout ensemble actualiser une réalité (« un objet-monde ») et le processus même
qui nous permet de le connaître36. En somme, la gnose est un savoir performatif, qui crée le
texte » qu’il resterait à nommer, ou qui pourrait s’énoncer elle même sans médiation et par là
même manifester un autre rapport entre les mots et les choses, V.-Y. Mudimbe formule,
un pari gnoséologique qui le rend finalement plus proche de la mystique d’un Blaise Pascal
Anthony MANGEON,
32
Johannes Fabian, « An African Gnosis. For a Reconsideration of an Authoritative Definition », History of
Religions, vol. IX, n°1, Août 1969, p. 42-58.
33
Johannes Fabian, Ibidem, p.42.
34
Ibidem, p.46.
35
Ibidem, p.51.
36
Ibidem, p.51.
Institut de recherches inter-site en études culturelles, Université Paul Valéry