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LA PROBLEMATIQUE DE LA PHILOSOPHIE EN
AFRIQUE
Posté par mafoi2007 le 13 août 2011
Un thème qui suit celui de l’introduction générale à la
philosophie dans les classes africaines est bien celui de
l’existence d’une philosophie dite « africaine ». Il est vrai
certains Etats africains se refusent à explorer ou même à
aborder la question car pour eux, elle ne se pose pas. Ne pas la
traiter voudrait donc dire pour eux traiter la philosophie
« comme les occidentaux l’abordent ».
Au delà de cette conception, chaque fois que l’on aborde la
question de la philosophie en Afrique, on soulève deux
problèmes fondamentaux : celui de sa nécessité et celui de son
existence. Peut-on alors parler d’une philosophie africaine ?
Nous aborderons la question en trois temps : nous traiterons
d’abord de la philosophie en Afrique comme un impératif(A) ;
ensuite nous aborderons le contexte de naissance de la
philosophie africaine(B) et nous terminerons par les courants
de la philosophie africaine(C).
Pour ceux qui veulent davantage d’information sur le sujet, je
vous renvois à la lecture de l’essai de MARCIEN TOWA
intitulé Essai Sur La Problématique Philosophique Dans
L’Afrique Actuelle. A côté de TOWA, nous avons également
un excellent philosophe au nom de LOUIS MPALA
MBABULA qui a d’excellents cours sur la philosophie
africaine et sur la philosophie en général (louis-mpala.com).
A. LA PHILOSOPHIE EN AFRIQUE COMME UN
IMPERATIF
On peut bien s’amuser à se demander si l’Afrique a elle aussi
besoin de la philosophie. Sans hésitation, répondons par
l’affirmative. Mais en réalité, de quelle philosophie s’agit-il ?
L’Afrique est un continent longtemps pillé, exploité par les
occidentaux et les impérialismes internationaux. Pendant la
colonisation, le colon opérait à visage découvert et parfois les
armes au poing. De nos jours le néocolonialisme a emprunté
des formes moins violentes pour poursuivre l’œuvre amorcée
par les premiers capitalistes et continue ainsi à imposer un
rythme de vie dépersonnalisant tout en exploitant
sournoisement à travers des discours à caractère
philanthropique.
Sur le plan intérieur de chaque Etat, le néocolonialisme
entretient des haines tribales, des guerres de frontière, des
dissonances de tout ordre. Dans une telle condition l’Afrique
est condamnée à philosopher c’est-à-dire à prendre conscience
de son sous développement, de son manque d’unité, de son
absence de liberté.
Une telle philosophie portera nécessairement comme le
préconise KWAME NKRUMAH dans Le consciencisme « la
marque de son histoire ». Elle recherchera donc à recouvrer la
liberté totale du nègre, ainsi qu’à lui donner la possibilité de
maitriser son sol et de sauvegarder ses biens par l’acquisition
de la science et de la technique.
La philosophie pourra ainsi procéder au recensement de tous
les pouvoirs positifs qu’ils soient traditionnalistes,
scientifiques et même occultes afin de les rendre utiles aux
sociétés africaines.
Pour une vie humaine authentique en Afrique, la philosophie
est donc nécessaire.
B. LE CONTEXTE DE NAISSANCE DE LA PHILOSOPHIE
AFRICAINE : UNE PHILOSOPHIE REACTIONNAIRE :
Dans son ouvrage Qu’est ce que la philosophie ? , le
philosophe MARTIN HEIDDEGER estime que la philosophie
est essentiellement occidentale et qu’elle parle grec. Cela
signifie que seul l’Occident est originellement et proprement
philosophique.
Dans le même ordre idées, le sociologue français LEVY
BRÜHL dans son ouvrage intitulé La mentalité primitive
pense que le nègre a une mentalité prélogique c’est-à-dire
qu’il est incapable de conceptualisation et d’abstraction. Le
nègre devient ipso facto comme a philosophique c’est-à-dire
que l’Afrique se présente désormais comme une table rase
philosophique.
La philosophie africaine nait donc dans ce contexte précis. Il
s’agit en effet pour les philosophes africains de dénoncer le
discours idéologiste colonialiste et même raciste des auteurs
occidentaux qui ne voyaient en l’africain qu’un sous homme.
HEGEL, reconnu pour son extrémisme impérialiste dira dans
Les principes de la philosophie du droit : « le nègre représente
l’homme naturel dans toute sa sauvagerie et sa pétulance. Il
faut faire abstraction de tout respect et de toute moralité, de
ce que l’on nomme sentiment si on veut le comprendre. On ne
peut rien trouver dans ce caractère qui rappelle l’homme ».
Selon HEGEL l’esprit scientifique est inaccessible au nègre
dans cet état. Il propose donc qu’on l’arrache de cette
primitivité en lui imposant les vertus de la culture européenne
à travers la colonisation. « La colonisation a fait plus
d’humanité parmi les nègres. »
Face à ces déclarations tapageuses et provocantes aux accents
racistes et impérialistes les africains vont se sentir révoltés. A
ce niveau, il fallait une philosophie africaine, du moins à titre
de réaction. Et c’est dans ce contexte que nait le débat autour
de la philosophie africaine, une philosophie défensive et
mobilisée en vue d’une résistance face aux assauts du
colonisateur. Pourtant le tout n’est pas de réagir car la réaction
peut devenir elle même auto accusation si elle ne se déploie
pas avec ménagement.
Il ne s’agit pas de réagir dans un défoulement total pour laisser
passer tous les instincts et les pulsions. L’essentiel n’est pas de
dire comme le souligne F.E. BOULAGA « nous avons aussi
une philosophie » ; mais il est question dans cette réaction
même d’orienter sa pensée, de lui donner un sens.
JE MANGE ET JE BOIS P et Q
P Q P*Q
Vrai Vrai Vrai
Vrai Faux Faux
Faux Vrai Faux
II. L’INCONSCIENT.
A.L’AFFIRMATION DE L’INCONSCIENT
Certains de nos actes nous amènent à comprendre que la
conscience ne constitue pas la totalité de notre psychisme car
il y’a des éléments qui se dérobent à elle, mais qui pourtant
accompagnent certains de nos comportements. La
transparence du sujet que garantit une conscience toujours
présente et vigilante devient par conséquent illusoire.
Y’aurait-il dans ce cas une autre instance de notre psychisme
qui exprimerait et expliquerait le « moi » ? À cette question
Sigmund FREUD y répond en introduisant la notion
d’inconscient psychique qu’il définit d’ailleurs comme « tout
processus psychique dont l’existence nous est démontrée par
ses manifestations, mais dont par ailleurs nous ignorons tout
bien qu’il se déroule en nous ».
C’est dire que l’inconscient est le lieu des représentations qui
ne sont pas conscientes parce que obligées de refoulement.
Le refoulement est un mécanisme psychologique normal qui
fonctionne de façon habituelle en chacun de nous sans que
nous nous en apercevions ; et c’est l’ensemble des tendances
ainsi refoulées (soit que nous les ayons connues à un moment
quelconque, soit même qu’elles nous soient restées inconnues)
qui constituent l’inconscient.
Ne fais donc pas partie de l’inconscient tout ce qui est
préconscient ou subconscient, c’est-à-dire tout ce qui n’est pas
immédiatement présent à notre conscience claire, mais à notre
disposition et que nous pouvons évoquer grâce à un effort
personnel.
Notre inconscient n’est pas à notre disposition car il représente
la zone obscure de notre psychisme où se retrouvent nos désirs
refoulés, nos instincts qui ont subi la censure de la société ou
du surmoi.
Quelles en sont donc les manifestations ?
B.LES MANIFESTATIONS DE L’INCONSCIENT
Selon FREUD la réalité de l’inconscient se trouve à travers ses
manifestations. Il y’a d’une part les manifestations normales
c’est-à-dire celles qu’on peut déceler chez chacun de nous et
aussi des manifestations pathologiques ou anormales qui sont
des exceptions dans le comportement.
1.les manifestations normales
Nous en citerons trois : le rêve, les actes manqués et l’oubli.
L’oubli
C’est le fait de ne plus se souvenir de quelque chose. Il a selon
FREUD une signification cachée qui échappe à notre
conscience. FREUD pense par exemple que lorsqu’on ne
retient que difficilement un nom qui devrait nous être familier,
c’est qu’il y’a sans doute quelques ressentiments à l’égard du
porteur de ce nom.
Les actes manqués
Pour FREUD « certaines insuffisances de notre
fonctionnement psychique et certains actes en apparence non
intentionnels se révèlent lorsqu’on leur applique l’examen
psychanalytique comme parfaitement motivé et déterminé par
des raisons qui échappent à la conscience ».
Pour dire que les actes manqués sont des actes psychiques
ayant un sens et marqués d’une intention. Ils résultent de
l’interférence de deux intentions différentes. Les actes
manqués sont en bref des propos, des gestes qui sont tenus
involontaires et qui trahissent nos désirs profonds.
Le rêve
Pour FREUD « l’interprétation des rêves est la voie royale qui
mène à la connaissance de l’inconscient dans la vie
psychique ». Les rêves témoignent en effet d’une activité
psychique qui échappe complètement à notre contrôle
volontaire car lorsque nous souhaitons rêver telle ou telle
chose, nous n’y parvenons pas.
Pour FREUD le rêve étant un acte psychique, révèle une
signification qu’il s’agit de trouver. Il distingue donc deux
aspects du rêve : d’une part le contenu manifeste c’est-à-dire
le rêve lui-même tel que s’en souvient le rêveur et qu’il peut
raconter ; d’autre part le contenu latent c’est-à-dire l’idée,
l’impulsion qui se trouve sous le contenu manifeste et a
provoqué celui-ci. Ce qui importe, c’est l’interprétation du
rêve, son sens caché que son aspect apparent. Pour FREUD au
lieu de se référer à des essais d’explications toutes faites, il
faut plutôt interroger le rêveur, lui recommandant de ne pas
chercher une explication logique mais de laisser venir ses
idées à partir des images du rêve aussi librement qu’il pourrait
sans en faire un tri. Il faudrait ensuite passer à une association
de ces idées. Cette méthode débouche très vite sur la vie
intime du sujet, sa sexualité, ses sentiments agressifs, sa
jalousie, ses peines, tous ses aspects douloureux, mesquins et
puérils qu’il ne tient pas à étaler devant un public. Par
exemple il n’est pas rare qu’une personne raconte en
s’étonnant, avoir rêvé qu’elle se promenait nue et sans aucune
gène. Dans ce cas il est facile de lier les deux contenus latents
et manifestes car en effet, l’un et l’autre expriment une
tendance à l’exhibitionnisme, au nudisme. De là nous tenons
la fonction du rêve.
La fonction du rêve est de réaliser en imagination un désir
impossible à réaliser dans la réalité. Il s’agit d’un désir
contrarié, induisant une situation pénible d’insatisfaction
ressentie par le psychisme à l’état de veille et risquant par là
même de gêner le sommeil. Le rêve annule ici la situation
désagréable et la remplace par un nouvel aspect plus
satisfaisant des choses, ce qui permet de dormir
tranquillement. FREUD a ainsi pu dire que « le rêve est le
gardien du sommeil ».
Le rêve a aussi une fonction prémonitoire. Aussi cherche-t-on
le plus souvent à comprendre nos rêves et à y trouver des
présages et indications pour la vie quotidienne.
2.Les manifestations pathologiques
Nous en aborderons également trois : les névroses, les
perversions et les complexes.
Les névroses.
Les névroses sont des troubles de comportements et du
développement intellectuel de l’individu. Ces troubles
résultent des rapports entretenus avec l’environnement social.
FREUD pense que la névrose est la conséquence d’un conflit.
Il écrit : « la genèse des névroses nous apparait sous cette
formule simple : le moi a tenté d’étouffer certaines parties du
ça d’une manière impropre ; il a échoué et le ça se venge. La
névrose est donc le résultat d’un conflit entre le moi et le ça ».
Les perversions
FREUD entend par ce terme une déviation par rapport à l’acte
sexuel normal. Le sujet ici peut viser à atteindre le plaisir avec
une personne de même sexe, avec d’autres objets sexuels ou
d’autres zones corporelles.
Les complexes
Ce sont des idées que nous nous faisons nous même et qui
conditionnent nos relations avec les autres. En psychanalyse,
on en distingue trois grands groupes :
Les complexes psychologiques : ce sont les complexes de
supériorité ou d’infériorité.
Le complexe d’Œdipe : c’est un sentiment d’attachement
qu’éprouve l’enfant à l’égard du parent de sexe opposé et qui
l’amène à considérer l’autre parent comme un ou une rivale. A
l’âge adulte, ce complexe peut se manifester par l’attachement
à un parent proche.
Les complexes sociaux : ils désignent les idées que nous
formulons et qui commandent notre comportement ; plus
précisément c’est ce que nous croyons trouver dans le
jugement que les autres ont sur nous. Ex: le complexe de
castration qui désigne la peur que nous entretenons d’être
privé de notre organe génital et surtout sa fonction essentielle.
Chez le garçon c’est la peur de l’impuissance, ce qui entraine
la violence sexuelle, l’agressivité à l’égard des femmes ou a
contrario la timidité et la peur des femmes. Chez les filles
c’est la peur de la frigidité c’est-à-dire de ne pas se sentir
féminine, ce qui entraine des comportements maniérés ou le
fait de prendre beaucoup soin de sa présentation physique.
Tous ces comportements émanent des pulsions qui sont en
nous.
EN GUISE DE CONCLUSION PARTIELLE :
En définitive, avec la notion d’inconscient, FREUD introduit
une nouvelle conception du sujet en révélant que nous ne
sommes pas toujours avertis de nous-mêmes, de ce que nous
faisons et de ce qui nous arrive. Il y’a donc une dimension du
qui échappe à la conscience mais qui est révélatrice de ce que
je suis. Toutefois, objection aux psychanalystes de réduire les
comportements humains aux pulsions libidinales. La
psychanalyse prête ainsi son flanc à la critique, car si toute
l’action humaine était libidinale, l’homme se laisserait ravaler
au rang des animaux qui agissent de façon instinctive.
Bernard STEVENS: un scandale pour la philosophie africaine!
(Gervinho m.chadas)